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Qu’est-ce qu’une approche axée sur le genre ?
Lignes directrices publiées par
l’Initiative allemande BACKUP
« Les inégalités et les différences qui existent entre les hommes et les femmes sont une cause majeure d’iniquité dans le domaine de la
santé et des soins. Les prestataires de santé et les chercheurs sont toujours plus nombreux à admettre le rôle essentiel que doivent tenir
les questions de genre dans les politiques, la planification, la pratique et les recherches en matière de santé, tant pour limiter les
inégalités que pour accroître l’efficacité et l’efficience des services de santé. » 1
Les programmes qui adoptent une approche axée sur le genre contribuent à l’égalité de genre et favorisent l’équité en matière de santé et
d’accès aux soins. En cela, ils protègent les droits humains et contribuent à la réalisation de l’initiative mondiale pour l’accès universel aux
soins et des objectifs du Millénaire pour le développement. L’Initiative allemande BACKUP encourage donc toutes les organisations
partenaires à faire en sorte que leurs programmes et leurs propositions de projets soient sensibles au genre et/ou contribuent à transformer
les rapports de genre, et à tenir davantage compte de l’égalité de genre au sein de leurs organisations.
À propos de l’Initiative allemande BACKUP
L’Initiative allemande BACKUP a aidé de nombreux pays à accéder aux financements accordés par le Fonds mondial et à les mettre en
œuvre. BACKUP est l’acronyme de Building Alliances, Creating Knowledge and Updating Partners. Les financements accordés par le Fonds
mondial offrent aux pays en développement la possibilité d’améliorer considérablement leurs services de santé. De nombreux pays éligibles
ne disposent cependant pas de l’expertise et des structures nécessaires pour soumettre des propositions de projets viables et utiliser
efficacement l’argent obtenu. C’est là que l’Initiative allemande BACKUP peut apporter son aide : notre objectif est de permettre à des
gouvernements et à des organisations non gouvernementales d’accroître l’efficacité et la rentabilité des subventions du Fonds mondial
destinées à des mesures de lutte contre le VIH, la tuberculose et le paludisme. Le travail de BACKUP est axé sur le renforcement des
capacités dans trois domaines transversaux : le renforcement des systèmes de santé existants (sur la base des concepts de l’OMS), le
renforcement des systèmes communautaires et les approches axées sur le genre et sur les groupes de population les plus concernés.
L’appui fourni par l’Initiative allemande BACKUP s’inscrit dans le droit fil de la stratégie en matière d’orientation sexuelle et d’identité de
genre du Fonds mondial. Le Fonds mondial s’est engagé à veiller à ce que ses subventions soutiennent un accès égal et équitable à la
prévention, au traitement, aux soins, à l’appui et à la prise en charge de tous ceux qui en ont besoin et à garantir que chacun bénéficie des
interventions les plus appropriées et les plus efficaces possibles.
À propos de ce document
Ces lignes directrices apportent des conseils et de l’aide aux organisations qui envisagent de demander l’assistance technique de l’Initiative
allemande BACKUP pour analyser la question du genre et l’intégrer à leurs programmes. Elles contiennent des conseils utiles sur la
planification de l’aide technique et l’élaboration d’applications tenant compte des différents aspects de la dimension du genre. En prenant en
compte et en évaluant individuellement la pertinence du genre dans les programmes de lutte contre le VIH, la tuberculose ou le paludisme,
il est possible d’améliorer la qualité de la proposition, puis l’efficience et l’efficacité de la mise en œuvre du projet. Il est important de noter
que les activités de développement peuvent avoir un impact sur les identités et les rôles assignés à chacun des sexes ainsi que sur les
relations entre les hommes et les femmes en général. Nous recommandons donc d’intégrer la question du genre dans les actions de
planification, de mise en œuvre et d’évaluation de tous les programmes. Ce document présente les définitions, les concepts et les outils de
base qui permettent d’aborder la question du genre. Étant donné la complexité des concepts liés au genre et la concision requise, il n’a
cependant pas pour but d’offrir un tour d’horizon complet du discours actuel sur la problématique du genre. Il vise essentiellement à donner
un aperçu de l’idée que l’Initiative BACKUP se fait du « genre » et d’une « approche axée sur le genre ».
Le document est divisé en deux parties. La première section contient une présentation théorique des principaux termes et concepts en
commençant par une définition du genre, puis étudie les liens qui existent entre genre et santé. Elle s’efforce de clarifier des termes tels
1
Liverpool School of Tropical Medicine : Guidelines for the Analysis of Gender and Health (Directives pour l'analyse du genre et de la santé),
www.lstmliverpool.ac.uk/research/departments/international-public-health/gender-and-health-group/guidelines
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qu’équité de genre, égalité de genre et analyse de genre. La deuxième section aborde la mise en pratique de l’approche axée sur le genre, en
tenant compte des trois maladies ciblées par le Fonds mondial. Elle explique la différence entre ce que nous appelons les interventions
sensibles au genre et les interventions contribuant à transformer les rapports de genre et évoque de manière plus approfondie la relation
entre genre et VIH, tuberculose et paludisme.
Présentation théorique d’une approche axée sur le genre
« Il y a une bonne chose : les normes et les valeurs de ‘genre’ ne sont pas fixes ; elles évoluent dans le temps, varient sensiblement d’un
endroit à un autre et sont susceptibles de changer. Les conséquences négatives pour la santé qui résultent des différences et des
inégalités entre les hommes et les femmes ne sont donc pas fixes non plus. Elles peuvent changer. » 2
Genre
Le genre est un concept relationnel qui fait référence aux identités, aux rôles et aux relations que l’on attribue aux hommes et aux femmes. Il
diffère du sexe qui fait référence aux caractéristiques biologiques (généralement considérées comme binaires) des femmes et des hommes,
notamment les différences physiologiques, immunologiques, génétiques et hormonales. Bien que les mots sexe et genre soient souvent
utilisés de manière interchangeable, il s’agit en fait de deux notions distinctes. Alors que le sexe est déterminé biologiquement et n’a aucune
implication sur la perception que la société a d’une personne, le genre est multidimensionnel et fait référence au sexe dans un certain
contexte (social) tout en impliquant l’attribution d’identités et de rôles aux hommes et aux femmes, ces identités et ces rôles étant définis,
perçus et vécus différemment. En fonction du contexte, les idées varient quant aux responsabilités et aux comportements sociaux et
économiques qui sont attendus des femmes et des hommes. Ces idées préconçues sont à l’origine des rapports de force, des schémas de
pouvoir décisionnel, de l’exclusion et de l’inclusion sociales, ainsi que des normes qui donnent naissance aux inégalités sociales,
économiques et politiques.
Il est important de noter que le genre ne concerne pas uniquement la condition des femmes. Sachant que les identités et les rôles assignés à
chacun des sexes sont définis par les hiérarchies et les rapports de force qui existent entre les femmes et les hommes, le genre est un
concept à deux facettes dont « il ne faut pas oublier d’étudier la partie masculine » 3. Les rapports hommes-femmes donnent naissance à des
schémas sociaux dans lesquels les femmes ou les hommes peuvent se retrouver en position défavorable ou en position de subordination. En
outre, le terme genre va bien au-delà de la stricte classification de ce qui est considéré « féminin » et « masculin » et de ce que la société
attend de ces rôles. Il comprend également des groupes marginalisés tels que les lesbiennes, gays, bisexuels, transsexuels et intersexués
(LGBTI) ; les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH) ; les travailleurs du sexe et toutes les personnes qui ne s’identifient
pas à l’une des catégories susmentionnées.
Le caractère construit du genre indique que celui-ci n’est ni statique ni inamovible. Sachant qu’elles ont généralement un impact sur les
conditions et sur la situation sociale de la population ciblée, les actions de développement jouent un rôle important dans la définition, la
reproduction et/ou la modification des identités et des rôles assignés à chacun des sexes. C’est pour cette raison qu’en tant qu’acteurs
influents dans le secteur de la santé, nous devons prendre le problème en main et mettre l’accent sur les différents aspects du genre dans
nos programmes.
Pour en savoir plus sur le genre, voir : www.who.int/gender/fr.
Égalité de genre et équité de genre
« (…) le genre ne signifie pas que les hommes et les femmes doivent être identiques ou qu’ils doivent faire les mêmes choses. La seule
chose qui est similaire, ce sont les droits auxquels ils peuvent prétendre. » 4
La lutte contre la discrimination passe par l’égalité de genre. Égalité de genre signifie égalité entre tous les genres. Elle est fondée sur le
concept selon lequel tous les êtres humains sont libres de développer leurs capacités personnelles et de faire des choix sans être limités par
des stéréotypes, des préjugés et des rôles rigides assignés à chacun des sexes. Aucune discrimination basée sur le genre ne doit être faite
dans l’attribution de ressources ou d’avantages ou dans l’accès et l’utilisation de services. Cette notion signifie également que les différents
comportements, aspirations et besoins des hommes et des femmes sont considérés, valorisés et satisfaits de manière égale. L’égalité des
chances est un des moyens qui permet de mesurer l’égalité de genre.
La notion d’équité de genre est légèrement différente en ce qu’elle « vise à comprendre l’impact que les relations, les identités et les rôles
assignés à chacun des sexes ont sur certains aspects de la vie des hommes et des femmes. Alors que l’égalité de genre vise clairement à
améliorer les opportunités offertes aux femmes dans un monde dans lequel elles sont généralement défavorisées par rapport aux hommes,
l’équité de genre « va au-delà de l’égalité des chances puisqu’elle exige un changement transformateur » 5. Elle reconnaît que les femmes et
les hommes ont des besoins, des pouvoirs, des préférences et des intérêts différents qui doivent être identifiés et pris en compte et elle
s’efforce donc d’aboutir à « une équivalence de qualité de vie » 6.
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6
OMS : Pourquoi parle-t-on de "genre" et santé ? www.who.int/gender/genderandhealth/fr.
Reeves, H. and Baden S., Gender and Development: Concepts and Definitions, BRIDGE Institute of Development Studies, Brighton, 2000.
INSTRAW, www.un-instraw.org.
Reeves, Baden.
Reeves, Baden.
2
Genre et santé
Selon la définition bien connue de l’OMS, la santé est un état de bien-être physique, mental et social, et pas uniquement l’absence de
maladie ou d’infirmité. Cela signifie que la santé des femmes et des hommes est influencée non seulement par des facteurs biologiques
(physiques), mais aussi par certains facteurs sociaux, dont le genre est un aspect central. Il est certain que les caractéristiques liées au sexe
ont un impact sur la santé en termes de facteurs de risque face à certaines maladies et de réaction aux traitements (en raison, notamment,
des différences de composition corporelle, de métabolisme et d’absorption des médicaments). Mais les raisons biologiques ne suffisent pas à
expliquer toutes les disparités de santé entre les hommes et les femmes. Comme nous l’avons vu précédemment, les relations entre les
hommes et les femmes entraînent des inégalités de genre et des différences dans les rôles et les responsabilités assumés par les hommes et
les femmes. Celles-ci peuvent conduire à des iniquités entre les hommes et les femmes en matière de santé et d’accès aux soins de santé » 7
en raison « des inégalités dans l’accès aux ressources, aux informations et aux pouvoirs » 8 qui façonnent la capacité de chacun à protéger sa
propre santé.
En résumé, le genre joue un rôle important pour la santé car
•
les inégalités, les rapports de force, les normes, les identités, les rôles, les comportements, le pouvoir décisionnel, le contrôle des
ressources, les attentes, les fonctions sociales et les responsabilités liés au genre
ont un impact et/ou influencent
•
les risques de maladie, la vulnérabilité et l’exposition à une mauvaise santé, la perception de la santé et des besoins de santé, l’impact
et le poids de la maladie, ainsi que l’accès aux soins et aux traitements et la capacité à en prendre le contrôle – en d’autres termes, la
capacité à protéger sa propre santé.
C’est pourquoi le Fonds mondial a adopté une stratégie sur l’égalité de genre qui définit sa vision de la prise en compte du genre et ce qu’il
attend des candidats. Au niveau des pays, le Fonds mondial attend des Instances de coordination nationale qu’elles s’efforcent d’atteindre la
parité au niveau de leurs adhérents et de leurs dirigeants, qu’elles intègrent adéquatement la question du genre dans leurs programmes et
dans les notes de concept qu’elles soumettent en réalisant obligatoirement des analyses approfondies selon le genre, et qu’elles adoptent un
système de suivi et d’évaluation sensible au genre, assorti de données ventilées en fonction du sexe. L’implication de BACKUP dans le
processus a pour but d’assurer que les programmes sont, au minimum, sensibles au genre et, si possible, qu’ils contribuent à transformer les
rapports de genre.
Mise en pratique de l’approche axée sur le genre
Analyse de genre
L’analyse de genre est « la collecte et l’étude systématiques d’informations sur les différences de genre et sur les relations sociales dans le
but d’identifier, de comprendre et de corriger les iniquités basées sur le genre » 9. En tant que tel, il s’agit d’un outil de description et de
diagnostic qui sert à introduire la question du genre dans les activités et les projets de développement liés à la santé. L’analyse selon le genre
étudie l’interaction entre les différences biologiques et sociales et leurs conséquences en matière d’inégalités de santé. Cette connaissance
est cruciale pour pouvoir ensuite planifier des interventions de santé publique favorisant les droits humains car « les interventions
indifférentes aux questions de genre peuvent renforcer ou aggraver les inégalités et les problèmes de santé » 10 de certains groupes. Sachant
que l’analyse de genre est axée spécifiquement sur les aspects liés au genre des secteurs, pays/régions et organisations et/ou des groupes
cibles, la méthode varie en fonction des spécificités de l’institution ou du contexte étudié et de la manière dont la question du genre est
interprétée. Elle associe donc différentes approches. L’analyse des facteurs spécifiques au genre dans la vie quotidienne des hommes et des
femmes est à la base de leur participation équitable aux processus de développement. Elle permet d’identifier les problèmes, les objectifs et
les potentiels spécifiques des femmes et des hommes.
Pour plus d’informations sur l’analyse de genre et la santé, voir
http://www.lstmliverpool.ac.uk/research/departments/international-public-health/gender-and-health-group/guidelines.
Élaboration de programmes sensibles au genre et contribuant à transformer les rapports de genre
Les gouvernements, les agences internationales et les organisations non-gouvernementales prêtent une attention croissante aux
composantes « droits humains » du genre et notamment à la nécessité de créer des programmes sensibles au genre qui traitent des risques et
des vulnérabilités spécifiques aux femmes et aux filles ainsi qu’ aux hommes, aux garçons et aux groupes marginalisés ou qui ont un effet
transformateur sur les rapports d’inégalité entre les hommes et les femmes.
Les programmes sensibles au genre sont des programmes, approches ou activités qui reconnaissent les différents besoins et contraintes liés
au genre et à la sexualité des personnes et qui s’efforcent d’y répondre. Ces activités améliorent considérablement l’accès des femmes et des
filles et/ou des hommes et des garçons à la protection, au traitement ou aux soins, mais font peu en soi pour transformer le contexte plus
vaste à l’origine des inégalités entre les genres. Ces approches de programme suffisent pour modifier fondamentalement l’équilibre des
forces dans les relations de genre ou s’attaquer aux inégalités structurelles et à la discrimination.
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OMS
Liverpool School of Tropical Medicine
Reeves, Baden.
INSTRAW.
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Les programmes transformateurs en matière de genre sont des programmes, approches ou activités qui s’efforcent activement d’établir des
normes et structures sociales équitables en plus de comportements individuels équitables du point de vue du genre. Les approches
transformatrices visent à faire évoluer les rôles attribués aux genres et à créer des relations plus équitables entre hommes et femmes. Des
exemples de telles approches incluent les efforts qui favorisent des rôles constructifs de la part des hommes dans les domaines de la santé
sexuelle et reproductive et qui facilitent l’analyse critique et le dialogue sur le genre et la sexualité ainsi que sur leur impact sur la santé et les
relations.
Genre et maladies transmissibles
Certains facteurs liés au sexe influencent le risque d’infection par le VIH, la tuberculose et le paludisme. Toutefois, et c’est là qu’une
approche axée sur le genre s’avère particulièrement intéressante pour les programmes liés au Fonds mondial, « les différences qui existent au
niveau des rôles, des ressources et du statut des femmes par rapport aux hommes ont un impact sur les aspects biologiques et accentuent ou
réduisent cette vulnérabilité » 11. Les différences de vulnérabilité à la maladie, d’accès à des mesures de prévention et à des soins de qualité,
et les impacts résultant d’un mauvais état de santé sont étroitement liés à la capacité d’une personne à protéger sa propre santé, à l’accès et
à la maîtrise qu’elle a sur les ressources et à la manière dont elle perçoit ses propres besoins de santé. Cette vulnérabilité a également des
implications sur la manière dont les femmes, les hommes et les minorités sexuelles sont affectés par le VIH, la tuberculose et le paludisme.
Les inégalités de genre produisent ainsi des inégalités dans les résultats sanitaires obtenus au niveau des trois maladies ciblées par le Fonds
mondial. Les trois sections suivantes étudient différents moyens de sensibiliser les acteurs de santé à l’identification de la dimension du
genre dans le cadre de la lutte contre le VIH, la tuberculose et le paludisme afin qu’ils puissent doter leurs programmes d’une approche axée
sur le genre.
Genre et VIH
Les femmes représentent actuellement environ la moitié de la population mondiale séropositive, mais les taux d’infection par le VIH chez les
femmes varient fortement selon les régions. En Afrique subsaharienne, la région la plus fortement touchée par le VIH, 60 % des personnes
infectées sont des femmes. Dans certains groupes de population, les disparités hommes-femmes au niveau des taux de prévalence du VIH
sont extrêmes : en Afrique australe, par exemple, les filles ont entre 2 et 4,5 fois plus de risque que les garçons d’être infectées par le VIH.
Les raisons de ces disparités de genre dans les taux d’infection ont fait l’objet de nombreuses études. On sait depuis longtemps que les
femmes et les filles sont physiologiquement plus prédisposées à l’infection par le VIH que les hommes et les garçons lors de relations
hétérosexuelles. Toutefois, on estime généralement que différents facteurs sociaux, économiques et culturels (pauvreté, inégalité
économique, faibles niveaux d’autonomisation des femmes et violences des hommes envers les femmes) se conjuguent pour accroître la
vulnérabilité des femmes et des filles à l’infection. Les facteurs structurels liés au genre, tels que les faibles niveaux d’éducation, le déni des
droits de propriété et d’héritage, la persistance de pratiques culturelles nuisibles et les normes tenaces de masculinité et de féminité qui
empêchent souvent les femmes d’insister pour avoir des relations sexuelles sûres, sont souvent cités pour expliquer pourquoi les femmes et
les filles risquent davantage d’être infectées. Mais il apparaît maintenant que les relations sexuelles avec des partenaires multiples et
concomitants sont un des principaux facteurs de l’épidémie en Afrique subsaharienne. De nouvelles données épidémiologiques et de
nouvelles études sociales axées sur les normes et les valeurs qui sous-tendent les relations sexuelles dans les pays à forte prévalence de VIH
ont montré que l’interaction entre genre et VIH est plus complexe qu’il ne paraît. Même s’il ne faut pas négliger certains facteurs structurels
profondément enracinés, les femmes et les filles ne sont pas simplement des victimes impuissantes : les femmes, tout comme les hommes,
ont des pratiques sexuelles à risque (partenaires sexuels multiples et concomitants, relations sexuelles intergénérationnelles, etc.) qui
favorisent la propagation de la maladie dans les pays d’Afrique subsaharienne à forte prévalence du VIH. Des études comparatives
transnationales ont montré que, dans de nombreux pays d’Afrique subsaharienne, les femmes plus riches et plus éduquées risquent
davantage d’être séropositives que les femmes plus pauvres et moins éduquées. Ces conclusions ont remis en cause les hypothèses
antérieures relatives aux liens qui existent entre VIH, genre, éducation et pauvreté.
Il peut être fort difficile de faire parvenir aux femmes et aux hommes concernés des informations, des services de prévention du VIH et des
programmes de santé, indépendamment du fait que l’épidémie soit concentrée ou généralisée dans leur région. Ceux qui risquent plus
particulièrement d’être infectés par le VIH (professionnels du sexe, consommateurs de drogues injectables, etc.) sont généralement peu
enclins à consulter des services sanitaires, sociaux ou juridiques du fait de leur stigmatisation par la société et de la criminalisation de certains
comportements. Dans les régions où l’épidémie est généralisée, il existe toujours relativement peu de programmes et de services ciblant les
femmes et les hommes mariés, alors que de nombreuses personnes séropositives, femmes et hommes, sont infectées dans le cadre du
mariage. Les jeunes font partie des groupes les plus vulnérables au VIH, mais il leur manque une connaissance détaillée et précise du VIH et
des moyens de prévention. Les personnes dont les comportements sexuels ne sont pas conformes aux normes et aux valeurs majoritaires
(HSH, LGBTI et autres catégories comme les professionnels du sexe) sont également touchés de manière disproportionnée par le VIH.
Genre et tuberculose
Malgré l’existence de traitements capables de soigner la plupart des cas de tuberculose, cette maladie reste, après le VIH, la deuxième cause
de décès résultant d’une maladie infectieuse dans le monde. D’après le Rapport 2012 de l’OMS sur la lutte contre la tuberculose dans le
monde, environ 8,7 millions de nouveaux cas de tuberculose (dont 13 % sont des co-infections VIH-TB) et 1,4 million de décès liés à la
tuberculose ont été enregistrés en 2011. Les cas de tuberculose multirésistante constituent notamment un problème majeur. Les régions
pauvres d’Asie et d’Afrique sont les plus affectées par la tuberculose car la pauvreté augmente le risque de contracter la maladie tout en
faisant partie des conséquences de l’infection par la tuberculose. Les personnes infectées par le VIH présentent un risque élevé de
développer la tuberculose.
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INSTRAW
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Les études estiment que les taux d’incidence de la tuberculose sont plus élevés chez les hommes adultes que chez les femmes adultes, alors
que chez les enfants, les filles sont plus nombreuses à être affectées par la tuberculose. En Afrique subsaharienne, par contre, le nombre de
cas de tuberculose signalés chez les femmes est en augmentation en raison de la co-infection par la tuberculose et le VIH, au point que, dans
certains pays de la région, la majorité des cas de tuberculose sont maintenant concentrés chez les femmes. Du fait de l’absence de données
désagrégées par sexe sur l’incidence de la tuberculose, les raisons des différences enregistrées entre les genres restent mal comprises. Elles
pourraient résulter de différences dans les taux de signalement ainsi que de différences dans la progression de la maladie par suite de
différences de comportement liées au genre.
Le signalement tardif ou l’absence de signalement de la maladie peut être dû aux raisons suivantes : difficulté d’accès aux soins, préférence
donnée à des praticiens privés combinée à un manque de femmes praticiennes, difficulté à se libérer de son travail lorsque les centres de
soins ne sont ouverts que pendant la journée et embarras et stigmatisation qui peuvent toucher à la fois les hommes et les femmes, selon
leur rôle dans la société. D’autres raisons font de la stigmatisation un facteur de consultation tardive : pour les femmes, la tuberculose peut
limiter les chances de mariage ou conduire à un rejet par le mari et à des actes de harcèlement de la part de la belle-famille ; et pour les
hommes, la tuberculose peut entraîner une perte de revenus et des difficultés économiques. En outre, les rôles et les responsabilités liés au
genre peuvent être source de mauvaise nutrition, de consommation d’alcool et de tabagisme, mais aussi influencer la répartition du travail.
C’est ainsi qu’une infection par la tuberculose est susceptible d’entraîner une perte de revenus et l’incapacité à prendre soin de ses enfants et
de son foyer. Les comportements sains et la réponse des prestataires de santé sont également influencés par le genre. L’accès aux soins est
parfois limité en raison de problèmes de mobilité physique, et certains patients présentant des symptômes pulmonaires ne font pas l’objet
d’un dépistage de la tuberculose car les praticiens ne sont pas qualifiés pour le faire. Des différences liées au genre s’observent même au
niveau des traitements. Alors que les hommes ont généralement davantage accès aux centres de soins, ils sont moins nombreux à mener leur
traitement à terme, alors que les femmes ont plus de chances de finir leur traitement une fois qu’elles ont réussi à accéder à un
établissement approprié. Cette liste de facteurs a pour but de montrer que le genre joue un rôle majeur dans de nombreux aspects de la
tuberculose et qu’il doit donc être intégré aux programmes de santé.
Genre et paludisme
En dépit du fait que le paludisme peut être évité et soigné, il reste une cause majeure de morbidité et de mortalité à travers le monde. L’OMS
a enregistré 219 millions de cas de paludisme et 660 000 décès liés au paludisme en 2010, dont 90 % dans les régions africaines de l’OMS. Les
plus vulnérables au paludisme sont les populations des pays les plus pauvres du monde et, parmi elles, les enfants de moins de cinq ans.
Biologiquement, les hommes et les femmes soumis à un niveau d’exposition identique présentent la même vulnérabilité à l’infection par le
paludisme, à l’exception des femmes enceintes qui présentent un risque plus élevé en raison de la baisse de leur immunité. Pourtant, dans de
nombreuses régions, les disparités hommes-femmes dans les taux de prévalence du paludisme représentent un défi majeur pour les
programmes de lutte contre la maladie.
Depuis 2000, les taux de mortalité liés au paludisme ont chuté de plus de 33 % dans la région africaine de l’OMS, ce qui signifie que,
lorsqu’elles sont bien planifiées, les stratégies de lutte contre le paludisme sont efficaces. La pauvreté associée au genre augmente la
vulnérabilité et donne naissance à une interaction complexe de différents facteurs qui ont rarement été pris en compte à ce jour. Ces facteurs
peuvent accroître le risque d’infection par le paludisme pour les hommes et pour les femmes, mais les traditions culturelles et les structures
de pouvoir liées au genre jouent également un rôle. L’exposition aux moustiques est influencée par les schémas travail/loisirs, les conditions
de sommeil et l’utilisation de moustiquaires et de produits anti-moustiques, facteurs qui varient selon les contextes. Dans les sociétés dans
lesquelles les hommes dorment dehors, s’assoient dehors en début de soirée, travaillent à l’extérieur aux heures où les moustiques sont les
plus virulents ou migrent vers des zones hautement endémiques pour trouver du travail, le risque de piqûre est beaucoup plus élevé. Les
femmes augmentent leur risque si elles commencent à exécuter leurs tâches domestiques avant l’aube. Les femmes qui dorment avec les
enfants à l’intérieur de la maison sous une moustiquaire et/ou qui passent leurs soirées à préparer le repas dans une cuisine enfumée sont
protégées contre les piqûres de moustiques. Dans d’autres contextes, il apparaît que lorsque le foyer ne compte qu’une seule moustiquaire,
celle-ci est souvent réservée à l’homme qui est considéré comme plus important que la femme au sein de la famille.
Les femmes peuvent jouer un rôle actif et influencer les stratégies de lutte contre le paludisme mais, à ce jour, cette possibilité a été
largement négligée. Les études montrent que les femmes consacrent généralement une partie plus importante de leurs revenus à la famille
que les hommes lorsqu’elles ont la possibilité de le faire. Dans certains cas, les femmes ne peuvent pas acheter de moustiquaires si leurs
maris ne sont pas d’accord. Les décisions sur l’utilisation des revenus, sur le recours à des centres de soins et sur l’application des traitements
sont cruciales pour améliorer la santé familiale. Lorsque les hommes ont, comme c’est le cas dans certaines cultures, le pouvoir décisionnel
au sein du foyer et de la communauté, les possibilités d’action des femmes en faveur de leur famille sont limitées. Par conséquent, pour être
efficaces, les interventions doivent cibler à la fois les hommes et les femmes et doivent être conçues de manière à ne pas provoquer de
conflits entre les membres de la famille.
De plus, les décisions prises pour lutter contre une mauvaise santé dépendent également des rapports de force sociaux et économiques qui
règnent au sein d’un contexte plus large que celui du seul foyer. Lorsque les centres de soins sont éloignés, ils sont moins utilisés par les
hommes et par les femmes qui n’ont pas les moyens de se déplacer et/ou ne peuvent pas quitter leur travail ou leurs enfants. Les faibles taux
de signalement des cas de maladie et de respect des procédures de traitement chez les hommes sont souvent dus à la perception que ceux-ci
ont de la masculinité et de leur rôle dans la société, tandis que l’absence de praticiennes conduit certaines femmes à refuser d’être examinées
par un homme par crainte d’être considérées comme sexuellement infidèles. Dans de nombreuses régions, les femmes manquent
d’éducation alors qu’elles sont responsables de la santé de l’ensemble de la famille. Il est donc essentiel de leur inculquer des connaissances
sur la transmission et les symptômes des maladies et sur la présence de centres de soins afin de permettre aux femmes et aux hommes de
faire des choix et d’accéder à des mesures de prévention et de soins appropriées.
5
Pour plus d’informations sur le genre et les maladies transmissibles, voir http://www.who.int/gender/fr.
Conclusion
En conclusion, il est important de rappeler qu’en vertu de l’article 25 de la Déclaration universelle des droits de l’homme (1948), toute
personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé. En tant que tel, le droit à la santé doit être placé au cœur des efforts en
faveur du développement. Les titulaires de ces droits sont tous les hommes, toutes les femmes et tous les enfants, quelles que soient leur
orientation sexuelle et leur origine sociale. Pour promouvoir une meilleure santé pour tous, nous devons intégrer la question du genre dans
tous les programmes afin de garantir la disponibilité, l’accessibilité, l’acceptabilité et la qualité des informations, des services et des
établissements de santé qui sont les éléments de base du droit à la santé.
Pour plus d’informations sur le genre et les droits humains, voir
GIZ: Practitioner’s Tool: Health & Human Rights (Outil du praticien. Santé et droits humains), 2013.
http://hesp-news.org/2013/07/26/practitioners-tool-health-and-human-rights
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En sa qualité d’entreprise fédérale, la Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit (GIZ) GmbH aide le gouvernement
allemand à concrétiser ses objectifs dans le domaine de la coopération internationale au développement durable. Le principal commettant
de la GIZ est le ministère fédéral de la Coopération économique et du Développement (BMZ). L’entreprise intervient également pour le
compte d’autres ministères fédéraux de même que pour des Länder, des communes et des clients et commettants publics et privés en
Allemagne et à l’étranger. Parmi ces derniers figurent par exemple les gouvernements d’autres pays, la Commission européenne, les
Nations unies et la Banque mondiale. La GIZ a son siège à Bonn et à Eschborn. L’Initiative allemande BACKUP est financée par le BMZ.
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Septembre 2013
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