Le tennis dans le sang depuis plus de 30 ans

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Le tennis dans le sang depuis plus de 30 ans
Le tennis dans le sang
depuis plus de 30 ans
PAR MARIE-CHRISTINE CHARTIER
Ancienne joueuse de tennis sur le circuit de la NCAA et présentement
stagiaire aux Internationaux de tennis junior de Repentingy
| En collaboration avec Réjean Levesque
Bien avant qu’on ne lui accole le titre de leader
dans le développement du tennis junior au Québec,
au Canada, voire même à l’échelle internationale,
Repentigny avait développé un lien privilégié avec
le tennis, un sport qui fait vibrer ses résidents
depuis fort longtemps. À Repentigny, le tennis fait
partie intégrante de l’histoire de la ville, de ses
gènes. Il s’agit d’une véritable tradition marquée
par la passion et l’amour pour ce sport de plus en
plus prisé par la population québécoise.
Le début de l’aventure
Selon René Gauthier, directeur des loisirs à Repentigny
jusqu’au tournant des années 2000 et l’un des pères
fondateurs de l’événement, c’est la qualité des
installations du parc Larochelle qui a contribué à établir
la réputation et la crédibilité du tournoi. La première page
d’histoire s’est écrite avec la présentation de l’une des
étapes du Circuit de tennis professionnel Alcan. Puis, se
tête des meilleurs sites de développement d’athlètes de
haut niveau et permettra le développement de plusieurs
entraîneurs de calibre international.
« Nous avions une bonne équipe et un site propice à
accueillir un tournoi de cette envergure. Nous nous
sommes entourés de gens d’expérience, comme Richard
Legendre, à l’époque directeur des Internationaux de
tennis du Canada disputés au Parc Jarry. Richard nous
avait enseigné comment organiser un bon tournoi avec
le Circuit professionnel Alcan. Les Internationaux à
Repentigny, c’était un événement que nous ne devions
accueillir qu’une seule année. Mais après un an, on a
eu la piqûre et on a travaillé avec acharnement pour
trouver le financement nécessaire afin de poursuivre
l’aventure et bâtir la réputation du tournoi. Repentigny,
ce n’était peut-être pas le plus grand tournoi du monde,
mais j’oserais dire que c’était le plus aimé des joueurs,
surtout avec le programme des familles d’accueil. Que le
tournoi ait duré toutes ces années, c’est une très grande
fierté. Ce n’est pas facile de lancer un événement comme
Jean-François Mathieu, Caroline Delisle et Philippe LeBlanc lors des Championnats
canadiens Chipwich, un évènement précurseur des Internationaux.
sont succédées l’organisation des championnats juniors
québécois en 1983 et celle des championnats canadiens
en 1984-1985. La fièvre du tennis s’est alors emparée
de Repentigny.
Après le succès remporté lors de ces événements
majeurs, le maire Louis-Philipe Picard et René Gauthier
ont décidé de relever un défi encore plus ambitieux, celui
d’amener les Internationaux de tennis junior du Canada
à Repentigny. Après de longues négociations avec
Tennis Canada et l’ITF (International Tennis Federation),
le comité organisateur obtiendra finalement le mandat
d’orchestrer la présentation de l’édition de 1986. Cette
étape marquera le coup d’envoi d’une grande aventure
qui propulsera Repentigny au rang des plus importantes
villes de tennis junior du monde. Qui plus est, l’événement
élargira le rayonnement de la municipalité de Lanaudière
jusqu’à l’extérieur de ses frontières régionales,
provinciales et nationales. Il l’amènera à se hisser en
international à se tenir en sol canadien. après la Coupe
Rogers. Les Internationaux de tennis junior Banque
Nationale ont développé, au fil des ans, une crédibilité,
une notoriété et une réputation indéniables auprès
des athlètes et aussi chez les personnalités sportives
et culturelles du Québec qui aiment s’y greffer. Dès ses
premières éditions, le tournoi a accueilli d’importantes
personnalités publiques qui ont assuré la présidence
d’honneur, dont Serge Savard, Mario Tremblay, Patrice
Brisebois, Hélène Pelletier et Rodger Brulotte, pour ne
nommer que ceux-là. Le tournoi est également devenu
un lieu de prédilection pour les personnalités politiques
qui désirent profiter de la crédibilité de l’événement et
des nombreux spectateurs et des médias qu’il attire.
Plusieurs se souviennent encore qu’à quelques mois
du référendum sur la souveraineté du Québec en 1995,
le premier ministre du Québec de l’époque, député de
l’Assomption (comté de Repentigny) et meneur du
mouvement souverainiste, Jacques Parizeau, ainsi que le
chef du Bloc Québécois, Gilles Duceppe, avaient convergé
Assis à l’avant, on retrouve Mme Chantal Deschamps, alors présidente du tournoi et
aujourd’hui mairesse de Repentigny - M. Alain Brien, maire de Repentigny à l’époque et
M. Maurice « Le Rocket » Richard. Se trouvent à l’arrière M. Henri Rochon, vedette du
tennis québécois dans les années 50 et membre des Panthéons du tennis québécois et
canadien ainsi que M. René Gauthier, un des pères fondateurs du tournoi.
celui-là et c’est encore plus difficile de le maintenir, »
conclut René Gauthier, la voix teintée d’un immense
sentiment de fierté.
Le monde converge
vers Repentigny
Dès la présentation des premières éditions, les meilleures
raquettes juniors du monde affluent à Repentigny en
quête, non seulement d’un titre en simple ou en double,
mais également de la reconnaissance associée à un
couronnement au parc Larochelle. De Jim Courier à Andy
Murray, la foule a été témoin du passage des meilleurs
joueuses et joueurs de tennis du monde. «Après Paris
et Londres et avant le US Open, il y a Repentigny.» Un
slogan créé par René Gauthier et qui a longtemps été la
marque de commerce du plus ancien tournoi de tennis
vers Repentigny afin d’assister aux finales. Afin que les
dignitaires ne soient pas incommodés par le soleil de
plomb qui sévissait, on leur a remis une casquette. Or,
le premier ministre Parizeau n’aura porté « fièrement » le
couvre-chef que pendant quelques minutes, soit le temps
que son attaché politique constate que la coiffe de son
chef arborait la feuille d’érable du commanditaire en
titre… le Gouvernement du Canada!
« En comparaison avec les autres tournois internationaux
du Groupe 1, Repentigny attire vraiment les foules; des
foules qui sont connectées avec l’histoire du tournoi
et avec les joueurs. Les meilleurs du monde sont ici,
ce qui a toujours créé un engouement monstre. Les
Internationaux, c’est un événement unique, avec un
comité solide et la réputation de bien savoir accueillir les
athlètes,» souligne pour sa part Daniel Cloutier, directeur
de l’Académie Tennis Momentum et ancien directeur
technique à Tennis Québec. z
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Bénévoles et familles
d’accueil, les ancres
du tournoi
On ne peut parler des Internationaux de tennis junior de
Repentigny sans souligner l’apport majeur des bénévoles
et des familles d’accueil. L’hébergement en familles,
supervisé pendant presque toutes les années de son
existence par le couple Pierrette et Claude Laperrière,
était devenu une véritable tradition et constituait, en
quelque sorte, la marque de commerce de Repentigny.
L’organisation a toutefois dû se résigner à abolir ce
service en 2011. Reconnue comme un modèle en matière
d’hébergement et présentant un dossier sans tache,
Repentigny n’a pas réussi à se soustraire à la nouvelle
règle de l’ITF qui interdit, depuis maintenant cinq ans,
l’hébergement des athlètes en familles d’accueil dans
tous les tournois juniors internationaux. Une telle règle
a ainsi mis un terme à une tradition vieille d’un quart de
siècle causant une grande perte pour le tournoi. Au fil
des ans, les familles hôtesses et les athlètes tissaient de
forts liens entre eux. Encore aujourd’hui, il n’est pas rare
d’entendre de formidables histoires de familles d’accueil
qui sont toujours en contact avec les athlètes. Avec les
médias sociaux, ces liens sont grandement facilités
et perdurent. Parmi les plus belles histoires, il y a celle
de Jo-Wilfried Tsonga, l’une des meilleures raquettes
du monde, qui prend toujours le temps de rencontrer
la famille Jetté lors de son passage à la Coupe Rogers
à Montréal.
têtes des principaux experts du monde. Malgré son
élimination surprise au premier tour en simple, plusieurs
se souviennent encore de l’aura que dégageait déjà à
l’époque la jeune Martina Hingis1 et du prestige qu’elle
avait ajouté à l’événement.
Un partenariat qui a
contribué à l’essor
du tennis
Présenter un événement de l’envergure des Internationaux
de tennis junior du Canada en sol québécois aura permis à
plusieurs athlètes de chez nous d’acquérir de l’expérience
et d’avoir l’occasion de se mesurer, devant leurs partisans,
aux plus beaux espoirs juniors du monde. Indéniablement,
Tennis Canada a appuyé Repentigny en lui témoignant
une confiance absolue. La fédération canadienne aura
insufflé à l’organisation le désir et la motivation de se
dépasser et d’améliorer la qualité de son tournoi tout au
long de ces 30 ans.
Les projecteurs du court central du parc Larochelle
ont mis en lumière les Eugenie Bouchard et Françoise
Abanda, respectivement championnes en 2011 et 2012,
Milos Raonic, Vasek Pospisil, Aleksandra Wozniak, Daniel
Nestor et Stéphanie Dubois. Ces derniers sont des athlètes
d’ici qui ont tous rayonné, au cours des dernières années,
sur la scène internationale. À cette impressionnante
liste s’ajoute aussi Cristina Popescu qui a été, en 1997,
la première Québécoise
couronnée en simple à
Repentigny et la deuxième
Canadienne de l’histoire après
Sonya Jeyaseelan. D’anciens
joueurs professionnels, dont
Frédéric Niemeyer, Simon
Larose ainsi que les favoris
locaux Marie-Ève Pelletier et
Jocelyn Robichaud, ont non
seulement pris part au réputé
tournoi de Repentigny mais ils
se sont tous déjà entraînés au
Centre récréatif de Repentigny
(anciennement Club Grand
Chelem Lanaudière) sous
la supervision de Sylvain
Bruneau. Devenu l’un
des meilleurs entraîneurs
de tennis du Canada, le
Mme Terry De Palma, responsable des l’accueil, des hôtes et hôtesses et du
Repentignois est responsable
protocole, toujours en lien avec sa famille d’accueil à Repentigny. En compagnie de
du développement des
Jo-Wilfried Tsonga en 2002.
athlètes féminines du Centre
national d’entraînement
Un tremplin vers
de Tennis Canada (CNT) et est capitaine de l’équipe
canadienne de la Coupe Fed. Niemeyer, Larose, Pelletier
le circuit professionnel
et Robichaud sont tous aujourd’hui impliqués dans
le CNT.
Repentigny fait partie du groupe restreint des tournois
majeurs. Considérés comme de véritables tremplins,
Succédant à tous ces Québécois et Canadiens qui ont fait
ces tournois propulsent les joueurs les plus talentueux
leur marque, la relève est présente plus que jamais. Les
issus des rangs juniors vers les circuits professionnels
prochaines éditions des Internationaux de tennis junior
féminins et masculins. La liste des anciens champions
de Repentigny placeront à l’avant-scène nos plus beaux
et participants au tournoi de Repentigny est plus
espoirs avec, en tête de liste, les Charlotte Robillardqu’impressionnante. Andy Roddick et Kim Clijster,
Millette, Félix Auger-Aliassime, Nicaise Muamba, Alexis
consacrés numéros un mondiaux, ainsi qu’Andy Murray
Galarneau et Marie-Alexandre Leduc, pour ne nommer
et Jo-Wilfried Tsonga font partie de l’imposant contingent
que ceux-là.
d’athlètes ayant foulé les courts du parc Larochelle avant
de devenir de véritables stars du tennis international.
En 1994, Repentigny a accueilli une jeune fille âgée
de 14 ans seulement. La Suissesse faisait tourner les
Gagnante en 1996, Cristina Popescu aura également
été coprésidente d’honneur du tournoi en 2012.
La réputation des Internationaux de tennis junior de
Repentigny dépasse les frontières depuis de nombreuses
années. Grâce à son tournoi, Repentigny aura marqué
la carrière de plusieurs athlètes qui sont devenus des
figures emblématiques du tennis mondial. Ce tournoi
aura également contribué, de manière significative, à
l’essor du tennis québécois et canadien. Le tournoi de
Repentigny peut se targuer d’avoir joué un rôle de premier
plan dans le développement de quelques générations de
joueurs de chez nous ainsi que dans la formation de
toute une cohorte d’entraîneurs de talent qui se sont
brillamment illustrés.
Jocelyn Robichaud, maintenant entraîneur au CNT
Quelques mois après sa participation à Repentigny, Martina Hingis célébrait
ses 15 ans et obtenait ainsi l’autorisation de devenir officiellement joueuse
professionnelle. Moins de deux ans plus tard, elle devenait la plus jeune
joueuse de l’histoire à décrocher le titre en double dans un tournoi du Grand
Chelem (1996 - Wimbledon).
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Photos : Archives Tennis Québec
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