Qu`est-ce qu`être responsable

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Qu`est-ce qu`être responsable
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Qu’est-ce qu’être responsable ?
Chapitre 1 - Les régimes de responsabilité
Chapitre 2 - La mise en œuvre de la responsabilité civile
Chapitre 3 - La réparation du dommage
Mots-clés du thème
Chose : Bien meuble ou immeuble à l’origine d’un dommage.
Dommage : Préjudice subi par la victime à cause d’un fait générateur (faute ou risque).
Dommage corporel : Atteinte à l’intégrité physique (blessures, incapacités…).
Dommage matériel : Destruction d’un bien appartenant à la victime.
Dommage moral : Douleur provoquée par la perte d’un être cher ou atteinte à l’honneur (réputation).
Exonération : Fait pour un individu déclaré responsable de ne plus être considéré comme responsable
du dommage.
Faute : Événement matériel qui est à l’origine du dommage ; il peut s’agir d’une faute (article 1382 du
Code civil) ou d’un risque.
Faute de la victime : Comportement de la victime à l’origine du dommage.
Faute d’un tiers : Un tiers est une personne étrangère à l’activité du responsable et dont le fait présente
les mêmes caractéristiques de la force majeure.
Force majeure : Fait imprévisible et irrésistible.
Gardien de la chose : Celui qui exerce sur la chose un pouvoir d’usage et de contrôle.
Lien de causalité : Lien de cause à effet entre la faute et le dommage ; le dommage doit être la
conséquence directe de la faute.
Réparation en équivalent : Versement de dommages et intérêts à la victime (somme d’argent
correspondant au préjudice subi).
Réparation en nature : Elle a pour objet de faire disparaître le dommage (destruction d’un mur par
exemple).
Responsabilité civile délictuelle : Elle a pour objet de réparer un dommage causé à autrui par un fait
juridique (article 1382 du Code civil).
Responsabilité du fait d’autrui : Elle permet à une victime d’engager la responsabilité d’une personne
qui n’est pas l’auteur du dommage mais qui va supporter la réparation (parents vis-à-vis des enfants).
Responsabilité du fait des choses : Une chose va intervenir dans la survenance du dommage et va faire
que son propriétaire en est responsable (un chariot de supermarché par exemple).
Responsabilité du fait personnel : Elle repose sur une faute, volontaire ou non (négligence ou
imprudence).
Responsabilité pénale : Elle est engagée lorsqu’un individu commet une infraction à la loi (contraventions,
délits ou crimes).
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6. Qu’est-ce qu’être responsable ?
Mise en situation
Objectifs
• Distinguer responsabilité civile et responsabilité pénale
• Citer et définir les cas de responsabilité civile (délictuelle, contractuelle)
• Identifier les conditions de mise en œuvre de la responsabilité : fait générateur,
dommage, lien de causalité
• Identifier les sources de la responsabilité : fait personnel, fait d’autrui, fait des
choses
• Citer les évolutions : responsabilité de plein droit et assurance de responsabilité
Une soirée qui finit mal
Quelques heures après le dernier cours, tout le monde se retrouve chez A.,
[...]. C’est la fiesta. Jusqu’à ce qu’un malheureux incident se produise. Après
avoir vidé d’un trait son drink, W. se dirige vers la piscine en criant et en gesticulant. Il plonge tête première [...]. Le choc est violent et les conséquences
seront tragiques : W. se fracture le cou et devient paralysé. A. se sent très,
très mal : pour « faire lever la party », il avait quelques instants auparavant,
en cachette, saupoudré le verre de W. de speed. Par le biais de ses parents,
W. poursuit maintenant A. et ses parents en responsabilité civile. Pourquoi ?
[...]. Une personne doit payer quand son geste fait du tort à quelqu’un.
http://www.educaloi.qc.ca/jeunesse
Actes de tortures et séquestration : condamné par la cour d’assises
La cour d’assises de Seine-et-Marne, à Melun, a condamné hier X à neuf
ans de prison et Y à sept ans de prison pour « séquestration avec actes
de torture ». Ces anciens marginaux, âgés de 38 et 29 ans, qui autrefois
formaient un couple, ont comparu devant le jury criminel pour avoir fait
subir des sévices à Z, un Meldois de 42 ans, durant quatre jours, en juillet
2009, dans son appartement [...]. La victime a dû endurer des souffrances
physiques et psychologiques, ses agresseurs lui avaient entaillé certaines
parties du corps avec un couteau et lui avaient proposé un « dernier verre
avant la mort » et menacé de le défenestrer du 11e étage.
www.leparisien.fr, 18/03/2011
1 - Pour quelle raison les parents de W. poursuivent-ils A. (document 1) ?
2 - Pourquoi la Cour d’assises de Melun a-t-elle condamné les deux protagonistes (document 2) ?
3 - Selon vous, que signifie l’expression « être responsable » en droit ? De qui et de quoi un individu peut-il être
responsable dans sa vie quotidienne ?
À la fin de l’étude de ce thème 6, vous serez capable de définir les régimes de responsabilité, d’identifier le fait générateur ainsi que le dommage et de développer les modes de réparation.
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Qu’est-ce qu’être responsable ?
6. Qu’est-ce qu’être responsable ?
Chapitre 1
Les régimes de responsabilité
Objectifs
1
• Définir responsabilité pénale et responsabilité civile
• Définir et caractériser les différents régimes de responsabilité civile
La responsabilité pénale
Document 1
Carambolage et meurtre
Définition
1 - Que sanctionne la responsabilité pénale ?
La responsabilité pénale
est l’obligation faite par
une personne physique de
réparer une infraction dont
elle est complice ou auteur. À ce titre, la sanction
consiste en une amende
et/ou une peine d’emprisonnement et/ou d’autres
mesures (travaux d’intérêt général, peine de jour,
amende, privation de libertés…).
2 - Caractérisez l’infraction à l’origine des faits dans chacune des
photos présentées et rappelez quelles juridictions vont traiter ces
affaires.
3 - Imaginez les sanctions que pourront infliger ces juridictions dans
chacun des deux cas.
Qu’est-ce qu’être responsable ? Chapitre 1 - Les régimes de responsabilité
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La responsabilité civile
Définition
1 - Approche du concept, définition
La responsabilité civile (délictuelle) oblige une personne physique à réparer les dommages
causés à autrui par le versement d’une somme d’argent équivalent au préjudice subi (dommages et intérêts). Ces dommages sont causés par une faute : soit une négligence, soit une
imprudence.
Responsabilité pénale et responsabilité civile coexistent quelquefois : par exemple, en novembre 2012, une fillette, à qui ses parents avaient acheté une jupe et un tee-shirt « made in
China », s’est retrouvée défigurée car ces produits contenaient du diméthylfulmarate (DMF),
substance hautement allergique. Si les parents avaient porté plainte, le fabricant aurait pu être
responsable pénalement (en cas de non-respect de la réglementation) et civilement responsable (et aurait alors réparé les dommages causés à la fillette).
Document 2
Un piéton renversé et un sauvetage risqué
1 - Quelle est la faute à l’origine du dommage dans chacune des situations présentées par les photos ?
2 - Comment sera indemnisée la victime renversée par l’automobiliste ?
3 - Qui devra supporter les frais de sauvetage ?
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Qu’est-ce qu’être responsable ? Chapitre 1 - Les régimes de responsabilité
2 - Évolution de la responsabilité civile délictuelle
Document 3
De la responsabilité subjective à la responsabilité objective
L’idée de faute
L’idée de risque
Pour les articles 1382 à 1386 du Code civil, on disait que l’idée de faute intervenait par un biais : si
la personne sur laquelle repose la responsabilité
n’avait pas commis de faute, le dommage n’aurait
pas pu se produire. Ces idées, au XIXe siècle, ont
semblé suffisantes, et la responsabilité délictuelle
était envisagée comme une responsabilité subjective [...]. La conséquence pratique est l’obligation
faite à la victime de prouver la faute de l’auteur du
dommage pour obtenir réparation.
Cette théorie a été proposée en France par deux
grands juristes : Salleil et Josserand. Pour ces
auteurs, les problèmes de responsabilité ne sont
que des problèmes de causalité. Ils parlent d’une
responsabilité objective. Cette théorie ne nécessite aucune appréciation psychologique ou morale.
Le raisonnement est simple : celui qui a causé un
dommage doit en supporter les conséquences. On
ne se préoccupe pas de la faute. Celui qui exerce
une activité doit en assumer les risques, à plus forte
raison s’il tire profit de cette activité.
Cependant, à la fin du XIXe siècle, le progrès industriel a eu pour rançon la multiplication des accidents, notamment du travail. La jurisprudence a
réagi dans deux directions. Elle a cherché à élargir
le domaine de la responsabilité contractuelle. Par
exemple, elle a rattaché aux contrats de transport
une obligation de sécurité à la charge du transporteur. Il a fallu pour cela attendre un arrêt de la Cour
de cassation du 21 novembre 1911 (Siret 1912).
La théorie du risque est plus avantageuse pour la
victime car elle assure la réparation dans des cas
où la faute ne peut être prouvée. Cette théorie, pour
Salleil et Josserand, est plus juste. Le préjudice doit
demeurer à la charge de celui qui en est responsable. Toute activité fournit des avantages, mais en
contrepartie procure des risques. Cette théorie n’est
pas incompatible avec les textes du Code civil. La
faute n’est pas l’élément mis au premier plan par
l’article 1382 du Code civil : « Tout fait quelconque
de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige
celui, par la faute duquel il est arrivé, à le réparer ».
Gabriel Seignalet, www.conseil-droitcivil.com
4 - Complétez le schéma suivant en vous aidant du texte :
Fondements de la responsabilité civile délictuelle
Fondement classique
Autre fondement
.............................................
.............................................
.............................................
.............................................
= Responsabilité subjective
= Responsabilité .........................
5 - Quelles sont les deux raisons du développement de la théorie du risque ?
Qu’est-ce qu’être responsable ? Chapitre 1 - Les régimes de responsabilité
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3 - Les régimes de responsabilité civile (délictuelle)
A - La res po ns abi l i té d u fa it p er s on n el
Document 4
Extraits du Code civil
Article 1382 – « Tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un
dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »
Article 1383 – « Chacun est responsable du dommage qu’il a causé
non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou son
imprudence. »
Document 5
Éléments constitutifs de responsabilité
Pour que la responsabilité du fait personnel soit
retenue, trois éléments doivent être réunis :
- une faute : selon l’article 1382 il s’agit de « tout
fait quelconque de l’homme ». Cette expression est très vague. On peut dire qu’il y a faute
lorsqu’un individu ne se comporte pas comme
l’aurait fait quelqu’un de normalement prudent. La faute peut être intentionnelle (délit) ou
non intentionnelle (quasi-délit). La concurrence
déloyale est un exemple de faute intentionnelle
car il y a une volonté de nuire ; le ski hors-piste
est un exemple de faute non intentionnelle (imprudence) ;
- un dommage (ou préjudice) ;
- un lien de causalité entre la faute et le dommage : le préjudice subi doit être la conséquence directe de la faute. Si tel est le cas, le
juge alloue des dommages et intérêts.
6 - Indiquez, pour chacun de cas suivants, quelle est la faute, quel est le dommage (ou préjudice), s’il y a un lien
de causalité entre eux et s’il y a indemnisation. Expliquez.
Cas 1 : Un automobiliste ouvre sa portière sans regarder et raye la voiture garée à côté.
Faute : ..................................................................................................................................................................
Dommage : .........................................................................................................................................................
Lien de causalité ? Indemnisation ? ...............................................................................................................
...............................................................................................................................................................................
...............................................................................................................................................................................
Cas 2 : Un individu monte un mur pour empêcher son voisin de profiter du soleil.
Faute : ..................................................................................................................................................................
Dommage : .........................................................................................................................................................
Lien de causalité ? Indemnisation ? ...............................................................................................................
...............................................................................................................................................................................
...............................................................................................................................................................................
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Qu’est-ce qu’être responsable ? Chapitre 1 - Les régimes de responsabilité
Cas 3 : Nicolas est distrait : en courant dans la rue, il renverse l’étalage d’un commerçant sur le trottoir.
Faute : ..................................................................................................................................................................
Dommage : .........................................................................................................................................................
Lien de causalité ? Indemnisation ? ...............................................................................................................
...............................................................................................................................................................................
...............................................................................................................................................................................
Cas 4 : M. Laval, propriétaire d’un grand sapin, ne l’entretient pas. Une rafale de vent fait tomber une
branche sur la voiture de M.V. stationnée dans la rue.
Faute : ..................................................................................................................................................................
Dommage : .........................................................................................................................................................
Lien de causalité ? Indemnisation ? ...............................................................................................................
...............................................................................................................................................................................
...............................................................................................................................................................................
Cas 5 : Le tribunal de commerce de Montpellier a refusé d’allouer des dommages-intérêts au site de ventes
immobilières entre particuliers « Le Partenaire européen », lequel avait été dénigré sur des forums
de discussion. Pour le juge, ce dernier n’a pas apporté la preuve que seuls les messages de son
concurrent avaient terni sa réputation. Selon le Partenaire européen, de nombreux messages postés
sur différents forums de discussion ont entamé la réputation de son site. L’auteur de ces messages,
identifié à partir de son adresse IP, était le cogérant de la société AK. Pour être indemnisé, le demandeur aurait dû prouver, chiffres à l’appui, que des internautes s’étaient détournés de son site à cause
de ce dénigrement.
www.droit-des-nouvelles-technologies.net
Faute : ..................................................................................................................................................................
Dommage : .........................................................................................................................................................
Lien de causalité ? Indemnisation ? ...............................................................................................................
...............................................................................................................................................................................
...............................................................................................................................................................................
Qu’est-ce qu’être responsable ? Chapitre 1 - Les régimes de responsabilité
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B - La res pons abi l i té d u fa it d ’ a u tr u i ( a r ticles 1 3 8 4 d u C od e civ il)
Document 6
Parents, employeurs et artisans
La responsabilité du fait d’autrui dépend d’une faute causée par des personnes dont on doit répondre.
C’est ainsi que :
- les parents sont responsables des dommages causés par leurs enfants mineurs habitant avec eux ;
- les employeurs sont responsables des dommages causés par leurs salariés dans le cadre de leurs
fonctions et durant le temps de travail ;
- les artisans sont responsables des dommages causés par leurs apprentis.
Dans ces hypothèses, la personne qui commet le dommage n’est pas celle qui indemnise la ou les victimes. Les parents et les artisans sont responsables même s’ils n’ont commis aucune faute.
Document 7
La responsabilité des parents d’enfants en internat
Attendu, selon l’arrêt attaqué,
que le 24 juin 1991, X..., alors âgé
de quinze ans, et élève du collège
S., établissement privé d’enseignement sous contrat d’association avec l’État, a été blessé à
l’œil gauche, dans la cour de récréation, par une balle de tennis
lancée par un autre élève, Y...; que
X... a assigné en réparation de
son préjudice, devant un tribunal
de grande instance, le préfet des
[…], représentant l’État français,
le collège S., et son assureur la
société Préservatrice foncière
assurance, les époux Z..., parents
de Y..., et leur assureur, la société W., en présence de la caisse
régionale d’assurance-maladie ;
que la société Mutuelle accidents
corporels (SMAC) est intervenue volontairement à l’instance
pour solliciter le remboursement
d’une somme versée à la victime
en exécution d’un contrat d’assurance scolaire ;
Attendu que si la responsabilité
de l’État est substituée à celle des
instituteurs du fait des élèves placés sous leur surveillance, c’est à
la condition qu’ils aient commis
une faute qui doit être prouvée
conformément au droit commun ;
Attendu que pour déclarer l’État
français responsable des consé-
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quences dommageables de l’accident, l’arrêt retient, par motifs
propres et adoptés, que X..., en
regardant des camarades jouer
au tennis, a reçu une balle sur
l’orbite gauche et que cet accident, imputable à Y..., qui, d’après
les témoignages d’élèves, a lancé
la balle, n’a pu se produire qu’en
raison d’un défaut de surveillance caractérisé des éducateurs
du collège privé S., qui auraient
dû interdire la pratique du tennis
en dehors d’un espace spécialement prévu et réservé à ce sport,
ce qui caractérise la faute de
l’établissement ;
Qu’en se déterminant par ces
seuls motifs, sans rechercher
l’existence d’une faute personnelle à la charge d’un enseignant
déterminé, la cour d’appel n’a
pas donné de base légale à sa
décision ;
Attendu que seule la force majeure ou la faute de la victime
peut exonérer les père et mère
de la responsabilité de plein droit
encourue du fait des dommages
causés par leur enfant mineur
habitant avec eux ;
Attendu que pour écarter la responsabilité des époux Z..., et déclarer l’État français entièrement
Qu’est-ce qu’être responsable ? Chapitre 1 - Les régimes de responsabilité
responsable du dommage subi
par la victime, l’arrêt relève, par
motifs propres et adoptés, que
les parents de Y... sont fondés à
se prévaloir du fait que leur fils
n’habitait pas avec eux lors des
faits, étant interne du collège
S., de sorte qu’ils n’avaient plus
la garde de leur enfant, laquelle
s’était trouvée transférée à l’établissement ;
Qu’en statuant ainsi, alors que
la présence d’un élève dans un
établissement scolaire, même en
régime d’internat, ne supprime
pas la cohabitation de l’enfant
avec ses parents, la cour d’appel
a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu’il n’y a pas lieu de
faire droit à la demande de mise
hors de cause du collège S. ;
PAR CES MOTIFS, CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 12 juin 1998,
entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties
dans l’état où elles se trouvaient
avant ledit arrêt et, pour être fait
droit, les renvoie devant la cour
d’appel de Versailles.
Arrêt Cour de cassation, Chambre civile,
www.juricaf.org, 29/03/2001
Document 8
L’absence de faute suffit à engager la responsabilité des parents
Attendu que, pour que la responsabilité de plein droit des
père et mère exerçant l’autorité
parentale sur un mineur habitant
avec eux puisse être recherchée,
il suffit que le dommage invoqué
par la victime ait été directement
causé par le fait, même non fautif, du mineur ; que seule la force
majeure ou la faute de la victime
peut exonérer les père et mère de
cette responsabilité ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué,
qu’au cours d’une séance d’éducation physique, Emmanuel X... a
été atteint à la tête par un coup
de pied porté par Grégory Z... qui
a chuté sur lui en perdant l’équilibre ; que les époux X..., agissant
tant à titre personnel qu’en qua-
lité de représentants légaux de
leur fils Emmanuel (les consorts
X...), et leur assureur M. ont demandé réparation de leurs préjudices aux époux Z..., pris en tant
que civilement responsables de
leur fils mineur Grégory ; qu’en
cause d’appel, après intervention volontaire du liquidateur
judiciaire du père de Grégory Z...,
Emmanuel X... et Gregory Z...,
devenus majeurs, sont intervenus à l’instance ; que les époux
Z... ont appelé leur assureur, la
Mutuelle accidents élèves, en
intervention forcée ;
Attendu que, pour rejeter les
demandes des consorts X... et
de leur assureur, l’arrêt retient
que la responsabilité des parents
de Grégory Z... ne saurait être
recherchée sur le fondement de
l’article 1384, alinéa 4, du Code
civil en l’absence d’un comportement du mineur de nature à
constituer une faute ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé
le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes
ses dispositions, l’arrêt rendu le
22 mai 2001, entre les parties, par
la cour d’appel de Paris ; remet,
en conséquence, la cause et les
parties dans l’état où elles se
trouvaient avant ledit arrêt et,
pour être fait droit, les renvoie
devant la cour d’appel de Paris,
autrement composée.
Arrêt de la Cour de cassation, www.juritravail.com/jurisprudence, 13/12/2002
7 - Après avoir lu ces deux arrêts de la Cour de cassation, complétez le tableau ci-dessous.
Résumé des faits
Type de responsabilité - Décision des juges
Document 7
Document 8
8 - La victime d’un dommage doit-elle prouver une faute de l’enfant pour engager la responsabilité des parents ?
Qu’est-ce qu’être responsable ? Chapitre 1 - Les régimes de responsabilité
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C - La res pons abi l i té d u fa it d es c h os es
Document 9
Responsabilité du gardien de la chose
La responsabilité du fait des choses dépend d’une faute causée par une chose dont on a la garde. C’est
le gardien, qui est la personne qui a la garde ou l’usage de la chose au moment de la constatation du
préjudice, qui en assume la responsabilité (exemple : le propriétaire d’une maison dont les tuiles sont en
mauvais état et tombent sur des voitures en stationnement). Le gardien perd la garde de la chose chaque
fois qu’elle se trouve entre les mains d’une personne sur qui il n’a pas d’autorité : locataire, emprunteur,
voleur…
Pour le droit, sont des choses :
- les animaux (sauf les animaux vivant à l’état sauvage) ;
- les biens inanimés, c’est-à-dire les biens ne pouvant se déplacer ou fonctionner sans l’intervention
d’une personne (un pot de fleurs, une piscine, des skis…) ;
- les bâtiments (ex. : défaut d’entretien, ruines…).
Le gardien n’est déchargé de responsabilité que s’il prouve que le dommage est dû à un cas de force
majeure, du fait d’un tiers ou de la faute de la victime.
Document 10
Responsabilité dans un contrat d’assistance bénévole
Par un arrêt du 7 mai 2002, la
Deuxième Chambre civile nous
fournit la parfaite occasion de la
réflexion sur la responsabilité du
fait des choses, et sur la vie quotidienne. En l’espèce, Madame
X avait demandé à son voisin,
Monsieur Z, de l’aider à installer ses rideaux. Jusqu’ici, tout
va bien, et nous pouvons même
nous réjouir de ce que Madame
X entretienne de si bons rapports
avec ses voisins. Monsieur Z accepta, et acheta un escabeau de
la marque E. pour le compte de
sa voisine. Le lendemain, Monsieur Z se rendit chez sa voisine.
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Or, stupeur ! À peine monté sur
l’escabeau, celui-ci s’effondre, et
Monsieur Z se blesse.
Monsieur Z, probablement vexé
d’avoir chuté à proximité d’une
dame, assigna sa voisine. La
Cour d’appel de Douai, dans un
arrêt du 27 janvier 2000, estima,
d’une part, que Monsieur Z avait
utilisé un escabeau acheté pour le
compte de Madame X et, d’autre
part, que Madame X n’avait pas
transféré la garde dudit matériel.
Dès lors, sa responsabilité peut
être engagée sur le fondement
de la responsabilité du fait des
Qu’est-ce qu’être responsable ? Chapitre 1 - Les régimes de responsabilité
choses. Madame X, certaine que
la faute relevait de Monsieur Z,
qui avait oublié de mettre la sécurité, forma un pourvoi.
La question qui se pose alors à la
Cour de cassation est de savoir
si, dans un contrat d’assistance
bénévole, la garde d’un escabeau, utilisé à la demande et en
présence du propriétaire, est
transférée à la victime.
La Cour confirme l’arrêt d’appel, excipant de ce que la garde
n’était pas transférée.
www.legavox.fr, Cour d’appel de Douai,
Arrêt du 27/01/2000
Document 11
Le gardien d’un chariot de supermarché
Voilà une jurisprudence qui
va rassurer les responsables
de magasins : un chariot de
supermarché est sous la
responsabilité
du client qui
s’en sert et
non du sup e r m a r ch é
auquel il
a p p a rtient, qui
n’a donc
pas à assumer d’éventuels dommages
causés par ce chariot, estime la
Cour de cassation. Les indemni-
tés d’un dommage causé par un
chariot abandonné ne peuvent
pas, selon les juges, être réclamées au supermarché, car le
client qui a utilisé cet objet en
demeure responsable jusqu’au
moment où il le remet à l’emplacement prévu.
Les juges examinaient la réclamation d’un navigateur dont le
bateau avait été détérioré par un
chariot jeté au fond d’un port.
Alors que le navigateur demandait des indemnités au supermarché, la justice lui a répondu
que ce dernier n’était pas respon-
sable puisque seul le client, qui
l’avait détourné de sa fonction en
le jetant dans le port, en était le
« gardien ».
Ils ont rejeté l’argument selon
lequel la brève durée d’utilisation par le client ne ferait pas
disparaître le pouvoir de contrôle
du supermarché qui ne le prête
que pour un usage déterminé.
Ils ont aussi rejeté le grief fondé
sur l’absence de surveillance des
chariots et l’absence de moyens
propres à éviter qu’ils ne soient
sortis de la zone commerciale.
Arrêt n° 47, Cass. Civ 2, 13/01/2012
9 - Qu’appelle-t-on « gardien de la chose » selon le document 9 ?
10 - Dans le document 10, quelle est la chose qui a causé le dommage ? Qui est le gardien de la chose ? Quelle
a été la décision de la Cour de cassation ?
11 - Dans le document 11, quelle position adopte la Cour de cassation quant aux chariots de supermarché ?
Qu’est-ce qu’être responsable ? Chapitre 1 - Les régimes de responsabilité
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Qu’est-ce qu’être responsable ? Chapitre 1 - Les régimes de responsabilité
L’essentiel de cours
Chapitre 1 - Qu’est-ce qu’être responsable ?
1
La responsabilité pénale
Elle est engagée lorsqu’une personne a commis une infraction aux lois pénales (contravention, délit, crime).
Objectif : punir
2
La responsabilité civile
Elle est retenue lorsqu’un dommage a été causé à autrui.
Objectif : réparer
faute
Qu’est-ce qu’être responsable ? Chapitre 1 - Les régimes de responsabilité
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Test de connaissances
1 - Retrouvez le mot correspondant à la définition.
1. Son objet est de punir une infraction à la loi. ...............................
2. C’est le fait à l’origine de la responsabilité civile. ...............................
3. Est ainsi qualifiée la responsabilité que l’on a lorsqu’on est propriétaire d’une maison. ...............................
4. C’est une forme de responsabilité sans faute. ...............................
2 - Ces affirmations sont-elles vraies ou fausses ?
N°
Affirmations
1
Responsabilités pénale et civile ne peuvent pas coexister.
2
La responsabilité pénale d’une personne est engagée lorsqu’elle commet un
homicide.
3
Le propriétaire d’un animal est responsable des dommages qu’il peut causer.
4
La responsabilité sans faute d’une personne est une évolution récente des
tribunaux.
5
Les parents sont responsables du fait de leurs enfants majeurs.
6
Une boîte aux lettres scellée sur un mur est considérée comme une chose.
7
8
Vrai
Faux
Un chien tenu en laisse par son maître mord un passant à la cheville. Le maître du
chien est responsable des blessures.
Un chien tenu en laisse par son maître mord un passant qui l’excitait avec un
bâton. Le maître est responsable des blessures.
9
Pour engager la responsabilité pénale d’une personne, il suffit d’une négligence.
10
Une personne est déclarée responsable civilement si elle commet une infraction
aux lois.
Synthèse
À l’aide des éléments ci-dessous, des documents étudiés, des mots-clés et des notions vues en cours, rédigez
en quelques lignes votre synthèse.
- Quels sont les deux types de responsabilité et leur objectif respectif ?
- Quelles sont les conditions à réunir pour engager la responsabilité délictuelle d’une personne ?
- Présentez les différents régimes de responsabilité et donnez des exemples.
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Qu’est-ce qu’être responsable ? Chapitre 1 - Les régimes de responsabilité
Application 1
Arrêt de la Cour de cassation deuxième chambre civile du 27/03/2003
Sur le moyen unique
Vu l’article 1384, alinéa 1er du Code civil1 ;
Attendu que le gardien d’une chose ne peut s’exonérer de la présomption de responsabilité pesant sur lui
en invoquant la faute de la victime que s’il démontre que cette faute présente les caractères de la force
majeure ;
Attendu, selon l’arrêt confirmatif attaqué, que, dans le magasin en libre-service de jardinerie bricolage
exploité par la société C. (la société), M. S. s’est blessé en tombant d’une échelle tri-plan sur laquelle il
était monté pour en éprouver la solidité et la stabilité ; qu’après clôture d’une information pénale par un
non-lieu, il a assigné la société et son assureur, X. , en responsabilité et indemnisation de son préjudice
sur le fondement de l’article 1384, alinéa 1er, du Code civil ;
Attendu que pour rejeter cette demande, l’arrêt retient que la société était gardienne de l’échelle ; que les
échelles étaient placées verticalement contre un mur, mais qu’il arrivait que des clients les manipulent
sans les remettre en place ; qu’aucun vendeur ne se trouvait à proximité lorsque M. S. est monté sur une
échelle dépliée et l’a secouée ; qu’en testant seul l’échelle litigieuse, qui n’était affectée d’aucun vice caché
mais n’avait pas été correctement enclenchée de sorte que le poids de la victime a entraîné la rupture des
rivets et l’effondrement de l’échelle, sans s’assurer auprès d’un vendeur que celle-ci avait été correctement assemblée et alors qu’il s’agissait d’un produit « bon marché », la victime avait commis une imprudence fautive qui était seule à l’origine de son dommage ;
Qu’en statuant ainsi, sans caractériser la force majeure, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
Par ces motifs… :
Casse et annule… ; renvoie…
1. Article 1384 al. du Code civil : « On est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore
de celui qui est causé par le fait [….] des choses que l’on a sous sa garde ».
Cour de cassation, 27/03/2003
1 - Qualifiez juridiquement les faits, les acteurs et la procédure suivie.
2 - Indiquez les arguments de la cour d’appel et sa position concernant cette affaire.
3 - Formulez le problème de droit posé à la Cour de cassation.
4 - Énoncez la décision prise par la Cour de cassation.
Qu’est-ce qu’être responsable ? Chapitre 1 - Les régimes de responsabilité
19
Application 2
Vu l’article 1384, alinéa 4, du Code civil ;
Attendu qu’en cas de divorce, la responsabilité de plein droit prévue par le quatrième alinéa de ce texte
incombe au seul parent chez lequel la résidence habituelle de l’enfant a été fixée, quand bien même l’autre
parent, bénéficiaire d’un droit de visite et d’hébergement, exercerait conjointement l’autorité parentale ;
Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué que X..., mineur de 13 ans, dont les parents ont divorcé, a provoqué
l’incendie et la destruction totale d’un gymnase en mettant le feu à une bâche ; que le tribunal pour enfants
l’a définitivement reconnu coupable d’incendie volontaire ;
Attendu que, pour confirmer le jugement ayant condamné le mineur, solidairement avec son père et sa
mère, à des réparations civiles, l’arrêt, après avoir énoncé que le jugement de divorce a fixé la résidence
de l’enfant au domicile de sa mère, attribué un droit de visite et d’hébergement au père et conservé à chacun des parents l’exercice conjoint de l’autorité parentale, retient que la résidence habituelle de l’enfant
chez un de ses deux parents ne fait pas obstacle à ce que l’autre exerce la plénitude de son pouvoir de
surveillance et de contrôle de l’éducation, de sorte que la responsabilité civile des deux parents, titulaires
de l’autorité parentale conjointe, est engagée ;
Mais attendu qu’en se déterminant ainsi, alors que la responsabilité du parent chez lequel la résidence
habituelle de l’enfant n’a pas été fixée ne peut, sans faute de sa part, être engagée, la cour d’appel a
méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus énoncé ;
D’où il suit que la cassation est encourue de ce chef ; que, n’impliquant pas qu’il soit à nouveau statué sur
le fond, elle aura lieu sans renvoi, ainsi que le permet l’article L. 411-3 du code de l’organisation judiciaire ;
Par ces motifs, sans qu’il soit besoin d’examiner le second moyen de cassation proposé :
CASSE et ANNULE, l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Rouen, en date du 20 juillet, en ses seules dispositions ayant déclaré M. Y... civilement responsable de son fils mineur et l’ayant condamné in solidum(1) à
indemniser la partie civile, toutes autres dispositions étant expressément maintenues [...].
1. In solidum = solidairement
Cour de cassation, Chambre criminelle, 6/11/2012
1 - Qualifiez juridiquement les faits dans cette affaire, c’est-à-dire résumez-les, en employant les termes et
expressions les plus précis possible.
2 - Quelle a été la solution de la Cour d’appel ?
3 - Quel est le problème juridique posé ?
4 - Quelle a été la solution de la Cour de cassation ? Quels sont ses motifs ?
5 - Qui devra indemniser les victimes de l’incendie ?
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Qu’est-ce qu’être responsable ? Chapitre 1 - Les régimes de responsabilité