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RESUME De son nom scientifique Aucoumea klaineana Pierre, l’okoumé est une espèce héliophile qui joue un rôle important dans l’économie du Gabon. En effet, avant ladécision gouvernementale d’interdire depuis le 1er janvier 2010 l’exportation des bois en grume, cette espèce participait à 71% au volume de bois exporté (Observatoire Mondial des Forêts Gabon, 2000). Sur le plan phytogéographique, l’okoumé est une espèce endémique dans la partie atlantique de l’Afrique Centrale. Au Gabon, elle permet de caractériser les deux principales formations forestières : forêt à okoumé occupant les 2/3 Ouest du territoire et la forêt sans okoumés au nord et nord-est du Gabon (Brunck et al, 1990). Pour comprendre les facteurs qui régissent la répartition de l’okoumé au nord-est du Gabon, une étude visant à savoir comment la structure diamétrique et la dynamique de l’okoumé à été menée dans le Parc National de l’Ivindo plus précisément dans la région de Kongou. Cette étude a été réalisée dans un dispositif couvrant une superficie de 4600m × 100m et orienté SE-NE. Un total, de 58 okoumés a été inventorié et mesuré le long du transect de 4600m de long. Ces okoumés suivent un gradient de concentration décroissant, cela pourrait s’expliquer par la présence d’un microclimat au nord-est défavorable à la croissance de l’okoumé. Mots- clés : Aucoumea klaineana Pierre, espèce héliophile, espèce endémique. 0 INSTITUT DE RECHERCHE EN ÉCOLOGIE TROPICALE UNIVERSITÉ DES SCIENCES ET TECHNIQUE DE MASUKU FACULTÉ DES SCIENCES DEPARTEMENT DE BIOLOGIE Master1 de Biologie des Populations et des Écosystèmes Sujet de stage : Étude de la structure diamétrique et de la dynamique de l’okoumé (Aucoumea klaineana) dans la forêt du nord-est du Gabon (Ogooué-Ivindo, Makokou) Rapport présenté par : Sous la direction du : MOUNDOUNGA Cynel Gwenaël Dr NGOMANDA Alfred Année académique 2010-2011 1 DÉDICACE Je dédie mon travail à l’ensemble des personnes qui ont déjà pris conscience que les écosystèmes gabonais méritent d’être protégés afin de léguer aux générations futures un pays viable d’une part et d’autre part que ces écosystèmes participent activement à l’équilibre du climat planétaire. 2 REMERCIEMENTS - Ce rapport a été réalisé grâce au Dr Alfred NGOMANDA, Directeur de l’IRET, qui a bien voulu nous confier ce travail et qui nous ont accompagnés dans l’aboutissement de celui-ci. - Mes remerciements s’adressent particulièrement au Dr Nestor Laurier ENGONE et au Pr Nicolas PICARD pour leur encadrement dans ce travail. - Au Dr Jacques François MAVOUNGOU pour ses précieux conseils. - Au Dr Donald MIDOKO IPONGA pour sa disponibilité - Remerciements au Dr Joseph OKOUYI conservateur du parc national de l’Ivindo pour son appui logistique sur le terrain. - Profond remerciement à l’ensemble des techniciens de l’IRET, notamment: YAO Nicolas, ANVAME Lucien, Serges, Molière, Wera, Ulrich. Remerciements à mes deux grands frères, OKOUYI MICKALA Clency « Ya Clency » et ZINGA Roland « Ya Roland », pour leurs précieux conseils mais aussi pour l’humour qu’ils mettaient dans le groupes ; sans oublier mes collèges Quentin, Franck, Fred, Ornella et Boyyer. Mes remerciements s’adressent aussi à l’ensemble du Département de Biologie de la Faculté des Sciences de l’Université des Sciences et Techniques de Masuku. Je ne saurai terminer sans remercier l’ensemble des membres de ma famille qui compte sur moi car c’est grâce à elle que je trouve l’énergie nécessaire pour avancer et franchir les obstacles qui se présentent à moi : « honte à celui qui ne fera pas mieux que son père », « il faut profiter à apprendre tant que je respire encore » et « on te fait confiance, tu vas réussir et Dieu t’aime ». Ce travail a été réalisé Grâce au financement du Secrétariat des ACP et de la commission de l’Union Européenne, via EU- ACP « Establishment of a Forestry Research network for ACP countries» projet (9 ACP RPR 91#1- FORENET). 3 SOMMAIRE Table des matières INTRODUCTION ................................................................................................................................... 5 I. MATERIELS ET METHODES ...................................................................................................... 7 1. Site d’étude .................................................................................................................................. 7 2. Protocole de mesure .................................................................................................................... 8 II. 2.1) Dispositif d’échantillonnage ................................................................................................ 8 2.2) Acquisition des données .................................................................................................... 10 2.3) Analyse statistique ............................................................................................................. 11 RÉSULTATS ................................................................................................................................ 12 1. Résultats et interprétations ........................................................................................................ 12 1.1) Évolution de la densité de l’Okoumé dans la forêt de Kongou le long du transect d’inventaire.................................................................................................................................... 12 1.2) III. Évolution de la structure diamétrique de l’Okoumé dans le transect d’inventaire. ........... 13 DISCUSSION ........................................................................................................................... 14 CONCLUSION ..................................................................................................................................... 16 ANNEXE .............................................................................................................................................. 17 4 INTRODUCTION L’okoumé (Aucoumea klaineana Pierre, Burseraceae) est une essence forestière qui joue un rôle important dans l’économique du Gabon. En effet, avant la décision gouvernementale d’interdire depuis le 1er janvier 2010 l’exportation des bois en grume, cette essence participait à 71% au volume de bois exporté (Observatoire Mondial des Forêts Gabon, 2000). Sur le plan phytogéographique, l’okoumé, espèce endémique dans la partie atlantique de l’Afrique Centrale au Gabon, permet de caractériser les deux principales formations forestières du Gabon: forêt à okoumé occupant les 2/3 Ouest du territoire et forêt sans okoumés au nord et nord-est du Gabon (Brunck et al, 1990). Comprendre les facteurs environnementaux qui expliquent la distribution de cette espèce emblématique du Gabon est essentiel pour la gestion durable des forêts gabonaises. L’okoumé est une espèce héliophile, pionnière, qui ne se régénère que dans les espaces très ouverts. La germination de la graine et la survie de la plantule ne peuvent se faire que dans de chablis supérieurs à 0,25 ha (Biraud, 1959). C’est également une espèce grégaire et sociale qui a une longue durée de vie (150 à 300 ans) (Mapaga et al, 2002). Son aire de répartition se trouve dans un espace climatique dont les précipitations varient de 1700 à 3000 mm/an. La température moyenne dans cette aire de répartition oscille autour de 26°C avec une amplitude thermique de 6 à 9°C (Saint-Aubin, 1963). L’okoumé pousse sur tous les types de sol, excepté les zones inondées. Deux hypothèses ont été avancées pour expliquer la distribution actuelle de l’okoumé. La première stipule que la répartition de l’okoumé est liée aux effets anthropiques. En effet, comme l’okoumé est une espèce héliophile pionnière qui colonise aisément les jachères agricoles. Sa présence, en particulier avec des gros individus dans les forêts de l’intérieur du Gabon, suggère que celles-ci ont été perturbées par les activités anthropiques dans le passé (Aubréville, 1962). La deuxième hypothèse suggère que l’aire de distribution de l’okoumé est liée aux contraintes climatiques (Saint-Aubin, 1963). L’absence de l’okoumé dans la région de Makokou serait liée à l’intensité de la petite saison sèche (décembre à février) qui correspond à la période de fructification- dissémination des graines. Au nord et nord-est de l’aire de répartition actuelle, cette petite saison sèche serait trop longue ce qui empêcherait la germination des graines qui n’ont pas de dormance et/ou la survie des plantules (Saint-Aubin, 1963). 5 Si la répartition de l’okoumé est déterminée par des contraintes climatiques, alors la densité de l’okoumé devrait décroitre au fur et à mesure que l’on s’approche de la limite, sinon l’abondance des okoumés devrait montrer un pattern aléatoire. L’objectif principal de cette étude but à décrire, les changements dans la structure diamétrique et la densité des okoumés dans la forêt tropicale du nord-est du Gabon. De plus on tentera, de répondre aux questions suivantes : - existe-t-il une quelconque tendance évolutive ou mode de répartition de l’Okoumé à l’approche de sa limite de distribution naturelle ? - les changements dans la structure diamétrique et la densité de l’Okoumé peuventelles être liées à une perturbation anthropique ancienne ou bien reflètent-elles un gradient environnemental ? - la limite de distribution de l’Okoumé au nord-est du Gabon est-elle dynamique, c’est-à-dire en régression ou en expansion? 6 MATERIELS ET METHODES I. 1. Site d’étude Le site d’étude se situe dans le Parc National de l’Ivindo (PNI), précisément dans la zone des chutes de Kongou (N 00°17’24.8’’, E 012°34’21.3’’), au sud de la ville de Makokou. Couvrant une superficie de 3000 Km², le PNI est au cœur d’une région de plateaux situé entre 300 et 760 mètres d’altitudes, dans la province de l’Ogooué Ivindo et de l’Ogooué Lolo. Il renferme la réserve naturelle intégrale d’Ipassa (1000 ha) sur la rive droite de l’Ivindo (Vande Weghe, 2006). L’ensemble du parc présente trois sous-ensembles forestiers distincts (Doumenge et al, 2004 ; Vande weghe, 2006). a. forêt du nord-est | b. forêt de l’ouest | c. forêt du sud Figure 1 : Présentation du site d’étude et des différentes formations végétales (source WCS/WWF/INC/ANPN, 2009. Vande Weghe, 2006). • La zone Ouest, soumise à l’influence atlantique, est caractérisée principalement par l’okoumé (Aucoumea klaineana). Elle comporte également d’autres espèces telles que le Sorro (Scyphocephalium ochocoa), l’Ebo (Santiria trimera), l’Ozigo (Dacryodes buettneri), l’Alep (Desbordesiaglaucescens), Coula edulis, etc. 7 • La zone sud moins marquée par l’influence atlantique, est caractérisée par Paraberlinia bifoliolata (Beli), Entandrophragma utile (Sipo), Filaeopsis discophora(Nieuk), Klainedoxa gabonensis(Eveus), Coula edulis (Noisetier africain), Panda oleosa(Afane). • Les zones Nord et Est, présentent des espèces typiquement congolaises: Gilbertiodendron dewevrei(Limbali), Uapaca spp(Rikio), Lophira alata (Azobé), Hallea sp (Bahia), Eurypetalum batesi, Dacryodes buettneri(Ozigo), Desbordesia glaucescens (Alep). Cette forêt repose sur des sols jaunes, argileux (60% d’argile) qui ont une structure très fine assurant une bonne perméabilité (Beaujour, 1971). La région qui couvre le Parc National l’Ivindo est soumise à un climat équatorial de transition de type austral, à quatre saisons généralement bien marquées (annexe tab1) et aux amplitudes thermiques journalières et annuelles faibles. La petite saison sèche (décembre à février) s’y caractérise par un ciel souvent dégagé, générateur d’ensoleillements assez importants, d’évaporations diurnes et de températures élevées, mais épisodiquement pluvieux. L’humidité chute parfois nettement en fin de saison et peut générer des effets négatifs sur la végétation. La période de mars à mai représente la petite saison de pluie. Alors que les précipitations augmentent, l’insolation atteint son maximum. Survient ensuite, avec une baisse des pluies la grande saison sèche (juin à août). A cette époque de l’année, l’effet négatif de la baisse des pluies sur la végétation est tempéré par une forte nébulosité quasi-permanente : l’insolation chute, les températures sont les plus faibles de l’année, l’évaporation diurne est minimale, l’humidité reste élevée. De septembre à novembre s’étend la grande saison sèche des pluies (Saint- Vil, 1977). 2. Protocole de mesure 2.1) Dispositif d’échantillonnage Un transect de 4.60 km de long et 100 m de large couvrant une superficie de 46ha a été utilisée pour l’inventaire des Okoumé. Dans ce dispositif, des parcelles de 25m×25m (625m²) ont été réalisées dans 4 layons parallèles. Pour réaliser ces parcelles, nous avons tracé une bande de 100m de long perpendiculaire au layon central. Puis, des piquets marquant le début 8 des layons secondaires ont été placés tous les 25m et numérotés de manière à donner le numéro du layon et du piquet (Ln°Pn°). 4 layons secondaires ont été réalisés parallèlement au layon principal. Après chaque 25m, une bande perpendiculaire au layon central était tracé de manière à couper tous layons secondaires et à chaque fois un piquet était placé et numéroté afin de délimiter les parcelles. Les coordonnées géographiques des piquets marquants le début et la fin de chaque layon ont été enregistrées afin de faciliter le repérage de la dite zone pour les études futures. 46OO m 1OO m Figure 2 : Dispositif de la parcelle d’étude réalisé à H Kongou. Tableau 1 : Points GPS du début et la fin de chaque layon. Début des layons Central L1A L2A L3A L4A Coordonnées Fin des layons N 00°17’42.6’’ E 012°33’44.2’’ N 00°17’42.6’’ E 012°33’43.8’’ N 00°17’42.2’’ E 012°33'441’’ N 00°17’41.7’’ E 012°33’44.6’’ N 00°17’41.0’’ E 012’33’45.6’’ Central P64 L1P64 L2P64 L3P64 L4P64 9 Coordonnées N 00°18’21.9’’ E 012°34’11.0’’ N 00°18’21.9’’ E 012°34’11.2’’ N 00°18’21.4’’ E 012°34’12.0’’ N 00°18’21.2’’ E 012°34’12.5’’ N 00°18’20.7’’ E 012°34’13.2’’ 2.2) Acquisition des données Figure 3 : Mesure de la circonférence et marquage de l’arbre après la mesure. Tous les Okoumés présent dans les parcelles ont été identifiés et mesurés. Pour les grands arbres, le diamètre à hauteur de poitrine, en abrégé DBH, et les coordonnées géographiques ont été mesurés. Pour les jeunes okoumés (DBH < 10 cm) seule la taille des individus était relevée. La mesure du DBH s’est faite à l’aide d’un décamètre classique. Généralement la mesure du DBH d’un arbre à tronc cylindrique se fait à une hauteur de 1.30 m du sol au-dessus des contreforts. Mais dans notre étude, la mesure de la circonférence des grands arbres a été faite au-delà de 1,30m à cause de la présence des contreforts au-dessus de cette limite. Elle s’est faite plus précisément à l’endroit où le tronc commence à être uniforme. Chaque arbre échantillonné a été marqué à l’aide d’une peinture à huile de couleur rouge. Comme les jeunes okoumés ne se rencontrent généralement que dans des chablis, les coordonnées GPS de ces chablis ont été enregistrées tandis que les grands arbres ont été identifiés en fonction de la proximité des piquets. Les jeunes pieds d’okoumés étaient différenciés des autres espèces des Burseraceae principalement par la comparaison des feuilles : 10 a) feuille de jeune okoumé b) feuille d’un jeune ozigo Figure 4 : Plantules de Burseraceae. - Aucoumea klaineana, feuilles imparipennées, 3-6 juguées. Folioles ovées-oblongues, acuminées, arrondies à la base. Le limbe de 14 à 30 cm de large (Aubreville, 1962). - Dacryodesbüttneri (ozigo),les feuilles ont 5 à 8 folioles de 12×3cm, asymétrique à la base et se rétrécissant en pointe. Elles sont sombres et luisantes sur le dessus et couvertes d’un duvet doré sur le dessous. Toutes les données collectées sont reportées sur une fiche de terrain puis traitées à l’aide du logiciel de statistique R. 2.3) Analyse statistique La structure du peuplement d’Okoumé a été caractérisée par deux variables : (i) L’abondance (totale, adulte et régénération) qui correspond à l’ensemble des Okoumé inventorié le long du transect ; (ii) Le diamètre équivalent (De) qui correspond au diamètre d’un arbre dont le tronc aurait une forme parfaitement cylindrique et même surface terrière de l’arbre sujet : De= C/ . La surface terrière est par définition la surface de la section du tronc de l’arbre à 1,30m de hauteur et est estimée par la circonférence à partir de la relation : S = C2/4 . 11 II. RÉSULTATS 1. Résultats et interprétations 1.1) Évolution de la densité de l’Okoumé dans la forêt de Kongou le long du transect d’inventaire Figure 5 : Évolution de la densité des Okoumé le long du transect d’étude. Un total de 58 okoumés a été inventorié et mesuré le long du transect de 4600 m de long. La Figure 4, qui présente l’évolution de la densité totale le long du transect d’inventaire, montre que l’abondance des Okoumés décroit de façon exponentielle : elle est maximale dans le premier kilomètre du transect et devient de plus en plus faible lorsqu’on s’éloigne de cette limite. Figure 6 : abondance de la régénération de l’Okoumé. L’abondance des jeunes okoumés (Figure 5) suit le même mode de distribution, diminuant de façon exponentielle avec la distance. La régénération de l’okoumé est maximale dans les 400 premiers mètres du transect puis décroit le long du transect d’étude pour atteindre des valeurs très faibles autour de 1600 et de 4000 m de distance. 12 Figure 7 : Abondance des Okoumé adulte (DBH>10 cm) le long du transect d’inventaire. L’évolution de la densité des gros individus d’okoumé suit par contre une courbe en cloche, montrant un maximum d’individu entre 700 et 1000 m et peu d’individu aux extrémités du transect (Figure 6). On note qu’un gap important dans la distribution de l’Okoumé, marqué par l’absence total d’individus jeunes ou adultes, se situe de façon remarquable entre 1600 et 4000 m. 1.2) Évolution de la structure diamétrique de l’Okoumé dans le transect d’inventaire. Figure 8 : répartition de la moyenne des Figure 9 : Répartition de diamètre diamètres dans le dispositif d’étude. maximum dans le dispositif d’étude. Les figures 7 et 8 montrent que le diamètre moyen des arbres se situe entre 1 m et 1.30 m. Ces arbres sont concentrés entre 400 et 1000 m. Ils sont encadrés par deux gros individus qui se situent tous les deux aux extrémités du transect, le plus gros individu (1.90 m de diamètre) se trouvant à 4000 m de distance. 13 III. DISCUSSION Les résultats de cette étude montrent que la densité de l’Okoumé dans la forêt de Kongou suit bien un gradient orienté SE-NE : elle décroît au fur et à mesure qu’on s’éloigne du point sud du transect. Afin de bien comprendre ce mode de répartition, il est important de se rappeler des traits biologiques de l’espèce et les facteurs environnementaux qui les contrôlent. Ces facteurs sont de deux ordres : la disponibilité en lumière et l’humidité du sol au moment de la dispersion des graines. L’okoumé est une espèce héliophile, c’est-à-dire que cette espèce a besoin de lumière pour que les jeunes plantules se développent correctement. Elle ne se régénère donc qu’après perturbation de la canopée, dans les espaces ouverts (chablis naturels, jachères, bords des routes ou toutes zones perturbées par les activités humaines) ayant au moins une superficie de 0.25 ha (Biraud et al, 1959). La présence de jeunes individus dans la première et la deuxième zone à Okoumé indique bien que les conditions de lumière n’étaient pas un facteur limitant pour la régénération. Autrement dit, il y a eu suffisamment de perturbation dans la canopée (chablis naturels ou perturbations anthropiques) pour que la germination des graines d’Okoumé se fasse normalement. Toutefois, le taux de régénération est plus faible dans la deuxième zone par rapport à la première zone, et il décroît au fur à mesure qu’on s’éloigne de la première zone. Cette observation ne peut s’expliquer que si on prend en compte le deuxième facteur qu’est la disponibilité en eau du sol, l’un des éléments déterminant la germination des graines d’Okoumé. En effet, les graines d’Okoumé n’ont pas de dormance, leur germination se fait donc immédiatement après la dispersion. Ceci n’est possible que si la graine tombe sur un sol suffisamment humide pour permettre le développement de la jeune plantule. La différence de régénération entre la première et la deuxième zone à Okoumé pourrait donc traduire une différence d’humidité du sol entre les deux zones : la première zone serait donc plus humide que la deuxième zone. Nos données montrent également que le peuplement d’Okoumé dans la forêt de Kongou se structure en 3 zones bien distinctes : une première zone qui s’étend jusqu’à 400 m de distance dans le transect et est caractérisée par une densité élevée en okoumé (6,75 okoumés/ha) ; la 14 deuxième zone qui se situe entre 400 et 4000 m est une zone intermédiaire faiblement peuplée en Okoumé (0,736 okoumé/ha). Dans cette zone, on note une faible régénération de l’espèce, qui n’est que de 13,79% alors qu’elle est de 41,38% dans la zone précédente ; enfin la troisième zone est caractérisée par l’absence totale des okoumés, car aucun jeune pied ni adulte n’a été inventorié. Cette zone sans Okoumé se situe au-delà de 4000 m de notre transect. Par ailleurs, le peuplement à Okoumé est encadré aux deux extrémités du transect par deux gros individus ayant pratiquement le même diamètre, et donc le même âge. La présence aux extrémités du transect de ces deux très gros individus d’Okoumé, avec des diamètres supérieurs à 180 cm, suggère que le peuplement d’Okoumé dans la région de Kongou n’était pas aussi fragmenté dans le passé qu’il ne l’est aujourd’hui. En effet, les deux individus peuvent être considérés comme ayant le même âge, que l’on peut estimer à 140 ans en tenant compte d’un taux de croissance moyen de 0.8 cm/an, (communication personnelle). Par ailleurs, l’okoumé le plus vieux (198 cm de diamètre) se trouve à la limite de distribution de l’espèce, soit à 4 km de la zone actuelle à forte densité en okoumé. Cette observation suppose que le pied mère ayant permis la régénération de cet Okoumé devait être très proche de celui-ci dans le passé. En effet, bien qu’étant une espèce anémochore (c’est-à-dire que la dispersion de sa graine ailée est assurée exclusivement par le vent), la graine d’Okoumé ne se disperse que jusqu’à 200 m de distance maximale du semencier (Brunck et al, 1990). Donc la zone intermédiaire actuelle était sans doute plus riche dans le passé en Okoumé qu’elle ne l’est aujourd’hui. 15 CONCLUSION Cette étude montre bien qu’il y a une tendance évolutive dans la répartition de l’okoumé à l’approche de sa limite de distribution nord-est. La répartition de l’Okoumé dans la forêt de Kongou se fait suivant un gradient de densité SE-NE qui probablement reflète un gradient d’humidité. Cette limite nord-est de distribution de l’Okoumé dans la Parc National de l’Ivindo est sans doute entrain de régresser vers le sud, probablement en réponse à un changement des conditions environnementales qui déterminent la régénération de cette espèce. Le climat bien plus que l’action passé de l’Homme pourrait donc être le facteur environnemental majeur qui explique l’aire de distribution et la dynamique de l’Okoumé dans les forêts gabonaises. 16 ANNEXE FICHE DE TERRAIN POUR LA MESURE DE LA DENSITE ET LA STRUCTURE DIAMETRIQUE DES OKOUMES Nom du pointeur : Date : Layon N° du carreau N° de l’arbre Circonférence ou diamètre (cm) à 1,30m 17 GPS_WP Remarques 18 BIBLIOGRAPHIE 1. Aubreville, 1962. Flore du Gabon n°3. Muséum National d’Histoire Naturelle, Paris. P 5762. 2. Biraud, 1959. Reconstitution naturelle et amélioration des peuplements d’okoumé du Gabon. Bois et Forêts des Tropiques 66. P 3-28. 3. Brunck, F., Grison, F., Maitre, H-F., 1990. L’Okoumé, Aucoumea klaineana Pierre, Monographie. CTFT, Norgent-sur-Marne. 4. Leroy-Deval , J., 1976. Biologie et Sylviculture de l’Okoumé, Tome I : La sylviculture de l’Okoumé. Centre Technique Forestier Tropical, Nogent-sur-Marne. P 5-20. 5. Doumenge C., Issembe Y., Mertens B., Trebuchon J-F, 2004. Amélioration de la connaissance et de la cartographie des informations du Parc National de l’Ivindo. Rapport de Mission CIFOR/IRET-CENAREST/CIRAD, Montpellier, France& Libreville, Gabon: p 99. 6. Mapaga D, Ingueza D, Louppe D, Koumba Zaou P, 2002. Okoumé. Fiche technique, 7. Libreville (Gabon). 8. Saint-Aubin, 1963. La Forêt du Gabon. Centre Technique Forestier Tropical, Nogent-surMarne. 9. Saint-vil J., 1977.- Les climats du Gabon. Ann. Univ. Nat. Gabon, 1 : 101-125 10. VandeWeghe, J-P, 2006. Ivindo et Mwagna, Eaux noires, forets vierges et bais. WCS, Libreville Gabon. p 272. 19