Related PDF - Amcham France

Transcription

Related PDF - Amcham France
N° 314 - Mercredi 29 juin 2016
ISSN 2105-1909
&
DROIT AFFAIRES
L’événement
Les avocats sont-ils les grands gagnants
du Brexit ?
L
a Grande Bretagne a parlé. Près de 52 % des électeurs ont
opté pour le Brexit. Sauf événement imprévu, le pays devrait
donc prochainement invoquer l’article 50 du Traité de l’Union
pour engager une sortie de l’Union européenne. Les avocats de
la place parisienne sont sur le pont. La quasi-totalité des firmes
a envoyé à la presse et à leurs clients des propositions d’éclairage et d’assistance sur les procédures à suivre. Car selon une
étude menée en avril par Pinsent Masons auprès de plus de
1 000 sociétés britanniques, françaises et allemandes, seul un
quart des organisations interrogées ont défini un plan d’action
à mettre en place face aux risques découlant d’un Brexit, tandis
que plus de la moitié des personnes interrogées (53 %) a avoué
que le sujet n’avait fait l’objet d’aucune discussion au sein de
leur conseil d’administration. Le secteur des services financiers
apparaît néanmoins comme le plus préparé au changement,
avec 58 % des sociétés ayant déjà abordé le sujet du Brexit lors
de leur conseil d’administration et 51 % ayant défini un plan
d’action. En comparaison, au sein du secteur de la construction, seules 27 % des entreprises ont dit avoir défini un plan
d’action. Les prochains mois promettent donc d’être actifs du
côté des cabinets d’avocats.
Si les cabinets anglais pourraient être bien placés pour
remporter ce type de dossiers, les choses ne sont pas si roses
en interne. Le Brexit risque en effet d’avoir des conséquences
importantes sur leur organisation. Au niveau de la rémunération des avocats tout d’abord : selon The Lawyer les augmentations des collaborateurs pour l’année prochaine seraient d’ores
et déjà gelées. A l’image de ce qui s’est passé durant la crise
de 2008. Or les rémunérations, en livres sterling, ont déjà de
fait perdu plus de 10 % par rapport à jeudi dernier. Tout comme
les retraites des associés, même si la plupart d’entre elles sont
calculées à partir d’un mix entre l’euro, la livre et le dollar.
Des mouvements sont par ailleurs à prévoir dans les équipes,
notamment londoniennes. Certains avocats pourraient en effet
être tentés de suivre leurs clients sur le continent. Selon un
sondage effectué ce week-end, une entreprise britannique sur
cinq envisagerait déjà de délocaliser une partie de son activité. D’autres avocats pourraient être obligés de quitter les
firmes britanniques pour poursuivre leur pratique, à l’image
des avocats anglais spécialisés en droit communautaire qui ne
pourront bientôt plus plaider devant la Cour de Luxembourg. n
Ondine Delaunay
au sommaire
Communauté
Gide se rapproche de HWB à Hong Kong
Carnet
Analyses
p.2
p.2
Affaires
BREXIT : quelle stratégie pour les entreprises ?
p.8-9
La technologie et l’innovation, au cœur de la relation
franco-américaine : l’innovation est le moteur des
économies modernes
p.10--11
Blockchain : quelle réglementation pour une utilisation par les
marchés ?
p.3
Affaire Cahuzac : le Conseil constitutionnel rejette la QPC p.5
L’avocat de Jérôme Cahuzac : Jean Veil, associé du cabinet
Veil Jourde
p.5
Deals
p.6-7
Ce numéro comporte un supplément Classement droit fiscal
Communauté
le cabinet de la semaine
Gide se rapproche de HWB à Hong Kong
G
ide poursuit sa stratégie de réorganisation internationale.
Le cabinet annonce aujourd’hui son rapprochement avec
le cabinet hongkongais Howe Williams Bowers (HWB). Il s’agit
d’un cabinet d’avocats indépendant offrant une large gamme
d’expertises dont le contentieux, le corporate, le capital market,
le droit maritime, le droit de la santé, le droit de l’assurance, le
droit social, etc. «Ce rapprochement permet aux clients de Gide
d’accéder à l’expertise d’un cabinet full service de premier plan
pour leurs besoins en droit hongkongais, en complément de
l’offre de Gide en droit chinois au travers de ses bureaux de Pékin
et Shanghai», précise le communiqué de presse. Sauf que Gide
est présent à Hong Kong depuis déjà plusieurs années… Mais
Baudouin de Moucheron et Stéphane Puel, respectivement senior
partner et associé gérant de Gide, expliquent : «Notre cabinet avait
une taille trop modeste pour traiter des opérations importantes.
Conformément à notre stratégie de développement à l’international, nous avons donc choisi de nouer un partenariat avec un
cabinet d’envergure local.» L’associé Gilles Cardanel et son équipe
de deux collaborateurs vont donc intégrer les rangs de HWB.
Mais l’histoire serait trop simple si elle s’arrêtait là. Selon nos
informations, l’associé David Boitout serait sur le point de repartir
en Asie pour chapeauter les deux bureaux chinois de la firme. Et il
serait basé chez Gide, à Hong Kong… Explications : ce bureau de
Hong Kong, qui finalement ferme sans fermer, ne sera désormais
plus consacré à l’exercice du droit. Il sera simplement composé
d’un associé, sans collaborateur.
carnet
CMS Bureau
F r a n c i s
Lefebvre Lyon
annonce l’arrivée d’Olivier
Leroy, comme
a s s o c i é .
Accompagné
de son équipe composée de trois collaboratrices – Elvire Mazet, Gaëlle Serrano
et Laure Vago – il vient renforcer l’activité
en droit de la concurrence et en droit de
la distribution. Une pratique qui vient
compléter celle de Laurent Romano,
associé en droit économique. Agé de
43 ans, Olivier Leroy est diplômé de
l’EDHEC (1994), titulaire d’un DEA de
droit des contrats d’affaires (Montpellier,
1997) et ancien allocataire de recherches.
Il a commencé sa carrière au sein du
cabinet Landwell en 2000, avant de
rejoindre Fidal à Lyon en 2005, dont il
avait été nommé associé et directeur du
département concurrence-distribution.
Capstan Avocats annonce la nomination de trois associés. Anne Murgier
intervient en conseil comme en contentieux, notamment sur des sujets liés à la
durée de travail et aux restructurations.
Elle est diplômée du DJCE de Montpellier
et a intégré le cabinet en 1999. Jérôme
Margulici intervient en conseil comme
2
Mercredi 29 juin 2016
en contentieux social. Titulaire d’un
DEA de droit social (Paris II), il a rejoint
le cabinet en mars 2009. Maxime de
Margerie intervient sur tous les aspects
du droit social et du droit de la sécurité
sociale, notamment dans les secteurs
d’activité des métiers de l’environnement, de l’économie sociale et des
nouvelles technologies. Titulaire du DESS
droit et pratique des relations de travail
(Paris II, 2004) ainsi que d’un DEA de droit
privé (Aix-Marseille III), il a commencé
sa carrière au sein de la SCP Grelin en
2004, avant de rejoindre Grand Auzas
Avocats en 2006, puis d’intégrer Capstan
en 2008. Il exerce au sein du bureau de
Marseille.
Bird & Bird vient
de
coopter
Nathalie Devernay
comme associée
du
bureau
de
Lyon. Elle intervient
en droit social, en
conseil comme en
contentieux, pour le compte d’entreprises françaises et étrangères. Elle se
charge notamment des questions de
mobilité internationale, de transferts de
personnel, d’opérations de réorganisation ou de restructuration. Titulaire du
DJCE de l’université de Lyon III (2003) et
diplômée de l’université de Berlin, elle a
commencé sa carrière chez CMS Bureau
Francis Lefebvre en 2005, avant de
rejoindre Bird & Bird quatre ans plus tard.
Magalie
Dansac
Le Clerc vient
d’être
nommée
local partner de
Baker & McKenzie.
Spécialisée en droit
des nouvelles technologies,
des
contrats informatiques, de l’Internet et
des télécoms, elle assiste des entreprises du secteur des nouvelles technologies, des éditeurs de logiciels et prestataires informatiques, ainsi que de grands
utilisateurs de services IT, notamment
dans la rédaction et la négociation de
contrats d’outsourcing, d’intégration, de
licence et de prestations de services en
matière informatique et télécoms. Elle
intervient également en matière de
réglementation des données personnelles et du commerce électronique.
Titulaire d’un Master 2 en droit des
affaires et de l’économie (Paris I, 2007) et
d’un Master 2 en droit de la propriété
littéraire artistique et industrielle (Paris II,
2006), elle a commencé sa carrière au
sein de l’équipe TIC de Baker & McKenzie
en 2008.
Affaires
focus
Blockchain : quelle réglementation pour
une utilisation par les marchés ?
Régulateurs, banques, Bourses, multiplient les groupes de travail sur l’utilisation
de la blockchain dans l’univers financier. Cette technologie n’est désormais plus
considérée comme un sujet de geek, mais bien comme un enjeu de place, avec pour la
France l’opportunité de prendre un coup d’avance sur le plan de la régulation.
E
t si la blockchain, cette technologie informatique mise en
lumière par le bitcoin, venait bouleverser les pratiques
sur les marchés financiers ? Le scénario est devenu crédible
depuis que le gouvernement s’est penché sur ce registre
virtuel de données, distribué entre de multiples parties. Deux
textes législatifs ont ainsi récemment été adoptés. Le premier
est issu de la loi Macron qui, dans une ordonnance du 28 avril
2016, autorise l’échange sur des plateformes internet des
«minibons». Ces derniers
sont des bons de caisse,
autrement dit des titres
de dette, dont le montant
total ne peut excéder
2,5 millions d’euros par
entreprise sur une période
de douze mois. Si les
conditions
d’application
doivent encore être confirmées par décret, cette
ordonnance annonce une
potentielle utilisation de la
blockchain pour l’échange
Hubert de Vauplane,
de ces titres. De même,
Kramer Levin
un amendement de la loi
Sapin 2 autorise le gouvernement à légiférer par ordonnance
sur «la représentation et la transmission au moyen d’un dispositif d’enregistrement électronique partagé» des titres non
cotés ainsi que des parts ou actions d’organismes de placement collectif.
Une utilisation légale mais une force juridique limitée
Un chantier qui prendra du temps au vu de la technicité du
sujet et des questions juridiques à trancher. «La blockchain est
une technologie. De ce fait, elle est neutre juridiquement et
peut être employée librement, rappelle Hubert de Vauplane,
associé chez Kramer Levin. Une banque ou une Bourse peut
donc parfaitement l’utiliser, de la même manière que n’importe
quel protocole informatique.» Mais la question de la régulation
se pose si on souhaite apporter une valeur juridique à la chaîne
elle-même.
«Pour l’heure, les échanges validés par la blockchain ne sont
pas opposables aux tiers, poursuit Hubert de Vauplane. La
seule force des opérations de la chaîne est celle conférée par
les parties.» Autrement dit, l’utilisation de la blockchain est
parfaitement légale, mais les parties ne sont pas protégées
en cas de contentieux. «Le Code civil reconnaît les contrats
électroniques à condition que les parties soient identifiées»,
précise Thibault Verbiest, associé chez De Gaulle Fleurance &
Associés. Or, en matière de blockchain, il faut distinguer les
blockchains publiques des blockchains privées. Les premières
sont ouvertes à tous et fonctionnent sous anonymat. Mais les
secondes
restreignent
l’accès à leurs membres
qui sont clairement identifiés. «Dès lors que les
identités des parties sont
établies, un contrat peut
parfaitement être enregistré dans la blockchain
et être reconnu comme
tel, à condition que la loi
n’exige pas un formalisme particulier pour
le contrat en question»,
ajoute Thibault Verbiest.
Thibault Verbiest, De Gaulle
Toutefois,
la
probléFleurance & Associés
matique de la preuve
demeure : «Même si les contrats électroniques sont reconnus
juridiquement, ils ne sont pas considérés comme des actes
authentiques, poursuit-il. Il existe donc un fort risque de
contestation.»
Le principal débat se situe là : quelle nature juridique souhaiteon accorder aux actes de la blockchain ? «L’Etat doit légiférer
afin de décider si une transaction validée par une chaîne de
bloc constitue une preuve réfragable de propriété, une preuve
irréfragable, ou le titre de propriété lui-même», résume Hubert
de Vauplane. Un amendement, déposé par la députée Laure
de La Raudière le 13 mai dernier, proposait de conférer le
caractère authentique aux opérations effectuées au sein d’une
blockchain, sous réserve que celle-ci soit habilitée par l’AMF.
Une proposition formulée un peu trop tôt puisqu’elle n’a pas
été retenue, mais le sujet devrait certainement refaire surface
au vu des enjeux.
Dématérialiser les transactions non cotées
Les initiatives de terrain commencent d’ailleurs à voir le jour.
Mercredi 29 juin 2016
3
Affaires
BNP Paribas Securities Services a ainsi monté un partenariat chain a le potentiel d’améliorer et de simplifier considérableavec la plateforme de crowdfunding SmartAngels pour utiliser ment la chaîne des opérations post-négociation, en facilitant la
la blockchain sur l’exécution et le suivi des levées de fonds ; consolidation des registres de titres pour le marché européen
une façon pour la banque de tester à petite échelle l’emploi de et en permettant une rapidité d’exécution avec un règlementla chaîne de bloc dans le non coté.
livraison en temps réel», ont précisé
«Les banques et les Bourses ne sont
les acteurs du projet. Un règlementni plus ni moins que des registres,
livraison instantané offrirait en outre
affirme Thibault Verbiest. Elles enre- «Les banques et les Bourses
l’avantage de supprimer le risque de
gistrent des écritures qui attestent
contrepartie. Si la livraison et le paiene sont ni plus ni moins
des transactions avec une chronoment d’un titre sont exécutés au même
logie et une identification. En tant que des registres. Elles
moment, le vendeur n’a plus besoin de
que registre distribué, la blockchain
provisionner des fonds pour faire face
pourrait potentiellement assurer enregistrent des écritures qui
à un éventuel défaut de paiement de
leurs fonctions.» La blockchain
l’acheteur. «Les économies potentielles
attestent des transactions
pourrait ainsi permettre une totale
pour les institutions financières sont
dématérialisation des transactions. avec une chronologie et une
considérables», souligne Hubert de
«Si les titres ne sont plus formaVauplane. L’intérêt se restreint touteidentification. La blockchain
lisés sur du papier, les mouvements
fois aux produits les plus simples dont
tout comme les ordres de mouve- pourrait potentiellement
l’exécution est immédiate, comme une
ments sont toujours inscrits sur un
vente d’action ; a contrario l’échange
registre physique, explique Hubert assurer leurs fonctions.»
de
produits
dérivés
nécessitera
de Vauplane. A terme, l’enjeu serait
toujours l’intervention d’une chambre
d’adjoindre la partie paiement au
de compensation.
stockage des titres afin de réaliser
Enfin, la blockchain pourrait devenir le
ces deux opérations en même temps. Toutefois, actuellement, nouvel outil de référence des relations interbancaires. Plusieurs
le paiement via la blockchain ne peut se faire que par une consortiums de banques se sont formés pour réfléchir à des
monnaie virtuelle.»
projets en la matière. «Assurer les échanges interbancaires
exige des ressources informatiques importantes doublées
Un post-marché plus efficace
d’une forte sécurité, indique Thibault Verbiest. Actuellement,
Une autre initiative a été annoncée la semaine dernière cette elles utilisent le système Swift, qui a récemment été victime
fois en matière de post-marché. La Caisse des Dépôts, BNP de hacking. La blockchain pourrait être une solution pour sécuParibas Securities Services, Euroclear, Euronext, S2iEM, Société riser ces échanges et réduire les coûts qui leur sont associés.»
Générale et Paris EUROPLACE ont annoncé qu’ils travaillaient Autre avantage : l’intervention du régulateur serait ici inutile. Les
sur la création d’une infrastructure blockchain post-marché banques emploieraient une blockchain privée dont elles fixeCoralie Bach
pour le segment des PME en Europe. «La technologie block- raient elles-mêmes les règles. n
&
DROIT AFFAIRES
Directeur de la publication :
Jean-Guillaume d’Ornano
01 53 63 55 55
Rédactrice en chef :
Ondine Delaunay Chambaud 01 53 63 55 61
[email protected]
Rédaction :
Coralie Bach 01 53 63 55 73
[email protected]
Editeur & Responsable Commerciale:
Lucy Letellier 01 53 63 55 56
[email protected]
Assistante : Sylvie Alinc 01 53 63 55 55
[email protected]
Conception graphique :
Florence Rougier 01 53 63 55 68
Maquettiste : Gilles Fonteny (55 69)
Secrétaire générale : Laurence Fontaine
01 53 63 55 54
Responsable des abonnements :
Céline Hemon 01 53 63 55 58
[email protected]
10 rue Pergolèse • 75016 Paris • Tél. 01 53 63 55 55
4
Mercredi 29 juin 2016
Administration, abonnements
Service abonnements :
10 rue pergolèse 75016 Paris
Tél 01 53 63 55 58 - Fax 01 53 63 55 60
optionfinance : [email protected]
Impression : Ambiance graphique - 2 rue Alain
Colas - 17180 Perigny
N° de commission paritaire : 0117 I 90179
N° ISSN : 2105-1909
Editeur : Option Droit & Affaires est édité par
Option Finance SAS au capital de 2 043 312 euros.
Siège social : 10 rue Pergolèse
75016 PARIS - RCS Paris B 342 256 327
Fondateur : François Fahys
Option Finance édite : Option Finance,
Option Finance à 18 heures,
Option Droit & Affaires, Funds, Family Finance,
AOF, Option Finance Expertise.
Affaires
La décision de la semaine
Affaire Cahuzac : le Conseil constitutionnel
rejette la QPC
V
endredi 24 juin, le Conseil constitutionnel a validé le cumul
des sanctions pénales et administratives en matière fiscale,
répondant ainsi aux QPC déposées dans l’affaire de Jérôme
Cahuzac. Pour rappel, l’ancien ministre délégué au budget est
poursuivi pour fraude fiscale, blanchiment de fraude fiscale et
minoration de déclaration de patrimoine à la Commission pour
la transparence financière de la vie politique, et a par ailleurs
été condamné, avec son épouse, à un redressement de l’ordre
de 2,3 millions d’euros. La même décision a été rendue sur le
dossier du marchand d’art Guy Wildenstein. Des QPC avaient
été déposées par les deux parties et transmises par la Cour de
cassation au Conseil constitutionnel le 30 mars dernier contestant les doubles poursuites dont leurs clients font l’objet.
Les avocats s’appuyaient sur une décision du 18 mars 2015
portant sur une affaire de délits d’initié des dirigeants d’EADS
et d’Oberthur Technologie, poursuivis au pénal après avoir été
mis hors de cause pour les mêmes faits par la Commission des
sanctions de l’AMF. Les Sages avaient alors considéré qu’il était
contraire à la Constitution de poursuivre deux fois la même
personne lorsque quatre critères étaient réunis : identité de
faits poursuivis, identité d’intérêt social protégé, identité de
nature des sanctions encourues et identité d’ordre juridictionnel. Visiblement, il n’en va pas de même en matière fiscale.
Dans sa décision, le Conseil a déclaré que les dispositions
contestées «permettent d’assurer ensemble la protection des
intérêts financiers de l’Etat ainsi que l’égalité devant l’impôt,
en poursuivant des finalités communes, à la fois dissuasive et
répressive. Le recouvrement de l’impôt et l’objectif de lutte
contre la fraude fiscale justifient l’engagement de procédures
complémentaires dans les cas de fraude les plus graves». La
double sanction ne doit donc pas être systématique, mais
réservée aux fraudes les plus importantes. Les juges devront
donc trancher sur le niveau de gravité des faits reprochés à
Jérôme Cahuzac lors du procès qui s’ouvrira le 5 septembre
prochain devant le tribunal correctionnel de Paris. Jérôme
Cahuzac est défendu par Jean Veil, associé de Veil Jourde.
Patricia Cahuzac est représentée par Sébastien Shapira du
cabinet éponyme.
L’avocat de Jérôme Cahuzac : Jean Veil, associé du cabinet Veil Jourde
Comment réagissez-vous à la décision du Conseil
constitutionnel et comment l’analysez-vous ?
Je ne peux être que déçu face à une telle décision. Concernant
le fond des QPC, il faut d’abord rappeler que le Conseil constitutionnel ne s’est pas penché sur le principe non bis in idem, qui est
conventionnel, mais sur le principe constitutionnel de la nécessité des délits et des peines. Dans sa décision, il rappelle que
ce principe n’exclut pas une double sanction.
Cependant, il va à l’encontre de sa décision en
matière boursière en ne faisant plus référence
aux quatre critères définis le 18 mars 2015 et
en admettant ainsi le cumul des majorations
d’impôts et sanctions pénales.
En matière fiscale, c’est désormais un
critère de gravité qui prévaut ?
Le cumul des sanctions n’est effectivement
permis que pour les fautes les plus graves. Le
Conseil définit le périmètre de la gravité qui
doit s’analyser selon le montant de la fraude,
la nature des agissements ou les circonstances de leur intervention. Dans l’affaire Cahuzac, il reviendra
donc au juge de décider si l’un de ces critères est constitué.
Nous aurons à débattre sur ce point.
Le Conseil constitutionnel émet également une
réserve concernant l’application d’une sanction
pénale à un contribuable «qui pour un motif de fond a
été définitivement jugé non redevable de l’impôt»…
Effectivement. Il s’agit du point positif de cette décision. Si
le juge administratif déclare qu’un contribuable n’est, sur le
fond, pas redevable de l’impôt, le juge pénal ne peut alors
pas reprendre la procédure. Jusqu’à présent, vous pouviez
être blanchi sur le plan administratif et condamné pénalement. Au moins sur ce point, les Sages ont
répondu favorablement à une réclamation
très ancienne, et ainsi mis fin à une situation
aberrante.
Comment expliquez-vous la différence
de position avec l’affaire EADS ?
Il semble que le Conseil constitutionnel ait
considéré que la fraude fiscale constituerait
un trouble sociétal plus grave que les fautes
boursières et nécessiterait une double sanction. Par cette décision, il protège également
la coexistence de sanctions administratives
et de sanctions judiciaires, qui est importante
au regard du contentieux de la faute en droit français. La France
demeure ainsi en contradiction avec la Convention européenne
de sauvegarde des droits de l’Homme et du citoyen en violant
le non bis in idem, et risque à ce titre une condamnation de la
Cour européenne des droits de l’homme. n
Propos recueillis par Coralie Bach
Mercredi 29 juin 2016
5
Affaires
actualités
Droit général des affaires
Six cabinets sur la vente de Coriance par
KKR
First State Investments, la division asset management de la
Commonwealth Bank of Australia, a signé un accord avec
KKR pour la reprise de Coriance. First State Investments
réalise ici son premier investissement d’infrastructure en
France. Coriance assure la gestion de réseaux en chauffage
et en froid urbain et propose du conseil en efficacité énergétique. L’entreprise gère ainsi un portefeuille de 29 concessions de chauffage urbain approvisionnant des bâtiments
résidentiels, sociaux et commerciaux. Au cours des dernières
années, elle a fortement développé sa production d’énergie
renouvelable qui représente aujourd’hui 60 % de sa production totale contre 34 % en 2012. Créée en 1998 par Gaz
de France, Coriance a été vendue en 2008 à l’énergéticien
italien A2A, avant d’être repris par KKR en 2012. KKR était
épaulé par Clifford Chance avec Laurent Schoenstein,
associé, Xavier Petet, counsel, en corporate M&A et Marion
Roquette-Pfister, counsel, sur les aspects de droit public et
réglementaires ainsi que par le cabinet Simpson Thacher &
Barlett. Le management était conseillé sur les aspects corporate et fiscaux par les cabinets Stephenson Harwood, avec
Patrick Mousset, associé, et Jeausserand Audouard, avec
Jérémie Jeausserand et Tristan Audouard, associés. First
State Investment était accompagné par Watson Farley &
Williams avec à Paris Vincent Trévisani, associé, et Sabrina
Delean, Charles-Douglas Fuz, Alban Vaqué d’Anla et Inès
Garcia de las Bayonas en corporate, Laurent Battoue et
Arnaud Troizier, associés, et Livia Rabuel, Julie de Bréon
et Nicolas Demeocq en droit public et réglementation
énergie, Romain Girtanner, associé, et Adrien Altomare
en fiscal et Guillaume Ansaloni, associé, Sébastien Hoff
et Marie Lesschaeve en financement. Allen & Overy est
également intervenu avec à Paris Adrian Mellor, associé,
Amine Bourabiat et Géraldine Lezmi.
Fusions acquisitions
Mayer et Winston sur l’opération de
Transilwrap
Le groupe américain Transilwrap, spécialisé dans la production
de films plastiques reprend l’activité films plastiques de spécialité de The Dow Chemical Company. Il met ainsi la main sur les
centres de production et de recherche et développement situés
dans l’Ohio ainsi que sur celui de Drusenheim en France ; ce
dernier comptant 259 salariés. Positionné sur la production de
films plastiques destinés à l’emballage, l’industrie médicale et
la sécurité, Transilwrap étend son offre à l’industrie alimentaire,
et son implantation européenne. Winston & Strawn a accompagné Transilwrap, avec à Paris Jérôme Herbet, associé, Sara
6
Mercredi 29 juin 2016
Susnjar, Aurélie Camard et Mathieu de Korvin sur les aspects
corporate, Sophie Bury et Jérémy Meunier, en social, JeanPierre Collet, associé, et Solange Frau en fiscal. The Dow
Chemical Company a été conseillé par Mayer Brown avec,
à Paris, Jean-Pierre Lee, associé, en financement, Thomas
Philippe, associé, et Marion Bruère, en corporate, Alexandra
Plain, associé, et Wladimir Mangel en immobilier, et Régine
Goury, counsel, en social.
Hogan sur le rachat de Logiters par ID Logistics
L’opérateur français de logistique ID Logistics rachète 100 %
de son concurrent espagnol Logiters pour 85 millions d’euros
auprès du fonds espagnol Corpfin Capital, qui avait acquis l’entreprise en 2014. Implanté en Espagne et au Portugal, Logiters
gère plus de 50 sites représentant près de 750 000 m2. Il
emploie 3 300 collaborateurs et a réalisé en 2015 un chiffre
d’affaires de 250 millions d’euros. Employant 15 000 collaborateurs, ID Logistics gère 200 sites à travers le monde et affiche
un chiffre d’affaires de 931 millions d’euros. Avec cette acquisition, le groupe poursuit son développement international et
étend son activité aux secteurs de la santé, la pharmacie et
l’automobile. Il intègre également de nouvelles compétences
notamment en informatique, en ingénierie et organisation des
flux. Hogan Lovells conseillait ID Logistics avec à Paris JeanMarc Franceschi, associé, Mathieu Frick en corporate, Michel
Quére, associé, Sophie Lok en financement, et Eric Paroche,
associé, Jean-Sébastien Duprey et Flora Oriot sur le contrôle
des concentrations. Logiters était assisté par le cabinet Garrigues.
Private Equity
Quatre cabinets sur l’investissement de
Turenne dans Dial Invest
Spécialisé dans le traitement des maladies rénales, Dial Invest
réorganise son capital à l’occasion de la sortie de son actionnaire minoritaire Pechel Industrie, entré en 2011. Il accueille
ainsi Turenne Capital qui investit en fonds propres et en obligations convertibles, tandis que le management se renforce. En
parallèle, l’entreprise souscrit une dette mezzanine auprès de
Siparex Intermezzo, ainsi qu’une dette senior auprès d’un pool
bancaire emmené par la Société Marseillaise de Crédit. Cette
opération va permettre de financer l’acquisition de la clinique
des Lilas en Ile-de-France. Elle vient ainsi renforcer la clinique de
l’Alma à Paris et deux établissements de santé spécialisés dans
le traitement de l’insuffisance rénale chronique situés à Aix-enProvence et Aubagne. La société a été accompagnée par Gordon
Blair avec David De Pariente, associé, et Vincent Vallez,
principal. Turenne a été conseillé par Lamartine Conseil avec
Olivier Renault et Gary Lévy, associés, et Agathe Fraiman.
Siparex a été épaulé par Pinot de Villechenon & Associés avec
Tristan Segonds, associé, et Martin Kyuchukov-Roglev. Les
banques ont été conseillées par De Pardieu Brocas Maffei avec
Christophe Gaillard, associé, Sébastien Boullier de Branche,
counsel, et Margaux Guennec.
Affaires
Saul sur la levée de MonBanquet
Le traiteur en ligne MonBanquet finalise une levée de fonds
de 500 000 euros auprès du Seed Club d’Isai. Ce dernier est
composé de Jean Claude Boulet (TBWA), Philippe Dokes
(Companeo), Pierre Kosciusko-Morizet et Olivier Mathiot
(PriceMinister), Eric La Bonnardière et Yvan Wibaux (Evaneos),
Jean-Fabrice Mathieu (Kelkoo, SeLoger), Yves Peis (Lolies),
Christophe Poupinel (Ooreka) et Thibault Viort (CityVox). La
start-up propose des buffets réalisés par des artisans à partir
de trois euros par personne et assure ensuite la livraison à
domicile. Lancé à Paris, le service est proposé depuis peu à
Lyon. Avec ce tour de table, l’entreprise souhaite renforcer ses
équipes et poursuivre son développement dans d’autres villes.
MonBanquet a été conseillé par Saul Associés avec Fabrice
Epstein et Benjamin Chouai, associés, et Victoire Ponsot.
Isai a été soutenu par sa direction juridique.
Bredin, Dechert et Orrick sur la levée de
Sevenhugs
Spécialisé dans les objets connectés pour la maison, Sevenhugs
boucle une levée de fonds de 13 millions d’euros auprès de la
société de gestion Xerys ainsi que des investisseurs historiques
NovX Capital (véhicule d’investissement du groupe Noveo) et le
Fonds régional de co-investissement d’Ile-de-France géré par
CapDecisif Management. Ces derniers avaient misé 1,5 million
d’euros sur la jeune pousse l’année dernière. L’entreprise s’apprête à lancer une télécommande universelle pour les objets
connectés d’une maison. La Smart Remote doit ainsi permettre
de contrôler lumière, musique et autres appareils, simplement
en la pointant sur l’objet. Elle se substituerait ainsi à la multitude
d’applications pour smartphone. L’opération doit financer la
production de la télécommande ainsi que le développement de
la société en Europe et aux Etats-Unis, où elle vient d’ouvrir un
bureau à San Francisco. Orrick a accompagné Sevenhugs avec
Benjamin Cichostepski, associé, et Agnieszka Opalach. Les
investisseurs ont été conseillés par Bredin Prat avec Olivier
Saba associé Jean-Benoît Demaret et Florent Veillerobe en
corporate, Pierre-Henri Durand associé et Ines Tran Dinh en
fiscal, ainsi que Dechert avec François Hellot, associé, Xavier
Leroux et Laurent Kocimski.
Nova et Haussmann sur la levée d’Interway
Interway accueille en minoritaires Bpifrance et BNP Paribas
Développement à l’occasion d’une augmentation de capital.
La SSII offre une large palette de prestations pour répondre
aux problématiques informatiques et numériques des entreprises : réseaux, wifi, sécurité… L’entreprise se distingue
notamment par une expertise sur les solutions informatiques
dédiées aux points de vente retail, accompagnant ainsi l’essor
du cross canal. En 2015, Interway a réalisé un chiffre d’affaires
de 41 millions d’euros, soit une croissance de 49 %. Le groupe
compte poursuivre son développement en France comme à
l’international. Les fonds ont été conseillés par Nova Partners
avec Olivier Nett associé. Les managers étaient accompagnés
par Haussmann-Paradis avec René Spadola associé.
Darrois, Mayer Brown et Weil sur la reprise
de Balmain
La holding d’investissement qatari Mayhoola a fait l’acquisition
de la maison de haute couture Balmain, auprès des héritières de
l’ancien Pdg Alain Hivelin qui détenaient 70 % du capital, ainsi que
du management et du créateur Olivier Rousteing. La valorisation
de la société n’a pas été communiquée, mais est estimée entre
460 et 490 millions d’euros. Face à des concurrents comme le
fonds français L Capital, l’anglais Permira ou le hongkongais Li
Ka-shing, Mayhoola a su se distinguer grâce au prix et à son
expérience avec Valentino. L’investisseur a repris en 2012 la griffe
italienne, qui a depuis triplé son chiffre d’affaires. Balmain espère
bien suivre la même trajectoire en se déployant au Moyen-Orient
et Outre-Atlantique. Créée en 1945, la maison Balmain a connu
d’importantes difficultés au début des années 2000 la conduisant
à déposer le bilan en 2004. L’arrivée du styliste Pierre Decarnin en
2006, puis surtout d’Olivier Rousteing qui assure la direction artistique depuis 2011, permet de relancer la marque. La société ne
compte qu’une dizaine de boutiques dans le monde, auxquelles
s’ajoutent quelques corners dans de grands magasins, et réalise
un chiffre d’affaires de l’ordre de 120 millions d’euros. Darrois
Villey Maillot Brochier a conseillé Mayhoola avec Alain Maillot
et Hugo Diener, associés, Christopher Grey et Fréderic
Chevalier en M&A, Igor Simic, associé, et Elise Maillot sur
les aspects antitrust ainsi que Vincent Agulhon, associé, et
Brian Martin en fiscal. Weil Gotshal & Manges a accompagné
Balmain avec David Aknin et Emmanuelle Henry, associés,
ainsi que Fabrice Piollet et Côme Wirz en corporate, Stéphane
Chaouat, associé, et Frédéric Bosc en fiscal et Romain
Ferla, associé, et Athene Chanter en droit de la concurrence.
Mayer Brown a conseillé le management avec Laurent Borey,
Benjamin Homo et Alexandre Dejardin, associés.
Mercredi 29 juin 2016
7
Analyses
droit communautaire
BREXIT : quelle stratégie pour les
entreprises ?
La City n’y croyait pas, mais les résultats du référendum sur le Brexit sont sans appel, les
Britanniques ont choisi de sortir de l’Union européenne. En application de l’article 50 du
Traité de l’UE, le Royaume-Uni dispose désormais d’un délai de deux ans pour négocier sa
sortie, et parallèlement ou consécutivement, de nouveaux accords avec l’UE des 27.
C
Par Emmanuel
Tricot, avocat
associé du
cabinet Veil
Jourde (Paris Bruxelles)
e délai de deux ans court en principe à partir du
moment où le Royaume-Uni signifiera officiellement au Conseil européen sa décision de quitter
l’UE. Pourtant, l’article 50 du TUE ne prévoit concrètement aucune disposition transitoire. Paradoxe de
la situation, pendant cette période transitoire, les
règles européennes devraient en principe continuer à s’appliquer pleinement au Royaume-Uni.
L’application du droit européen dans toutes ses
composantes et ses évolutions représente ainsi
l’enjeu essentiel de la stratégie à moyen terme des
entreprises, tant pendant la période de transition,
qu’après que le Royaume-Uni, comme on peut le
supposer, sera effectivement sorti de l’UE et en
chemin pour négocier de nouveaux accords économiques avec les 27.
Le Brexit génère ainsi des incertitudes juridiques
tant pour les entreprises qui entretiennent des
relations commerciales avec des partenaires
britanniques que pour celles qui souhaitent
accéder aux marchés UK depuis l’UE et réciproquement. La période de doute résultant d’une mise
en œuvre aléatoire de l’article 50 du TUE pourrait
ainsi dissuader nombre d’entre elles d’engager des
investissements dans un contexte réglementaire
incertain, en particulier au Royaume-Uni. Des audits
de situation sont nécessaires.
Les relations commerciales avec un
partenaire britannique
Les relations contractuelles ou simplement
commerciales avec un partenaire britannique pourraient voir leur équilibre économique initial modifié
et dès lors potentiellement questionné. Pour les
contrats en cours soumis au droit anglais, le Brexit
ne devrait a priori pas permettre de justifier la mise
en œuvre de clauses résolutoires à la demande
d’un partenaire britannique. Cependant, dans l’hypothèse où l’équilibre économique de la relation
contractuelle ou du partenariat serait remis en
cause (par exemple du fait de l’application de droits
8
Mercredi 29 juin 2016
de douane), ce dernier pourrait solliciter une renégociation. Pour les contrats soumis au droit français,
la reconnaissance par le nouveau droit des contrats
de la théorie de l’imprévision (nouvel article 1195
du Code civil), laquelle peut permettre la renégociation d’un contrat dès lors qu’«un changement de
circonstances imprévisible lors de la conclusion du
contrat rend l’exécution excessivement onéreuse
pour une partie qui n’avait pas accepté d’en
assumer le risque», paraît porteuse d’incertitudes.
En particulier si le partenaire britannique se trouve
finalement dans une situation moins favorable
qu’actuellement suite au Brexit. Pour les contrats
en cours de négociation, on pourra dès lors considérer prudent d’écarter cette disposition (qui n’est
pas d’ordre public) ou de prévoir des clauses de
«hardship».
Plus globalement, s’agissant des relations commerciales entre Royaume-Uni et Etats membres de
l’UE, les entreprises ne pourront plus se prévaloir
des quatre libertés fondamentales qui gouvernent le marché intérieur. Elles devront de ce fait
se préparer contractuellement à ce que leurs
échanges soient le cas échéant frappés de droits de
douane ou soumis à de fortes variations de taux de
change. De même, il faudra considérer les risques
induits par la poursuite de relations contractuelles
ou commerciales avec un partenaire britannique
susceptible de se trouver soudainement dépourvu
du passeport européen.
L’accès aux marchés UK
Globalement, l’accès au marché britannique devrait
se révéler plus fastidieux qu’auparavant pour les
entreprises de l’UE. A cet égard, les entreprises
dont l’activité au Royaume-Uni est réglementée
ou encadrée par des normes contraignantes apparaissent les plus exposées. L’impact du Brexit sur
les réglementations sectorielles applicables au
Royaume-Uni devrait essentiellement résulter du
niveau actuel de transposition des règles euro-
Analyses
péennes en droit anglais. Ainsi, dans les domaines
couverts par des règlements européens, applicables
directement sans transposition en droit interne, le
Brexit ouvre de potentiels vides juridiques.
Un point de vigilance : les entreprises de l’UE qui
disposent de droits de propriété intellectuelle ou
industrielle au niveau européen vont devoir se
préparer à déposer de nouvelles demandes auprès
de l’Intellectual Property Office (IPO), l’équivalent
britannique de l’INPI, afin de protéger leurs droits
privatifs au Royaume-Uni. En outre, pour certains
brevets ou marques, un réexamen de la demande
pourrait conduire à un refus de délivrance.
BRRD et CRD IV, alors même qu’une part importante
de la réglementation britannique sur les services
financiers trouve sa source dans une réglementation européenne qu’elle a largement influencée.
La même problématique devrait se poser pour
d’autres textes européens durant cette période
transitoire. C’est par exemple le cas du règlement
sur la protection des données personnelles et de
la directive en cours de transposition qui en dérive
qui doivent entrer en vigueur en mai 2018 et fixent
des règles strictes de protection des données et
certains standards s’appliquant aux entreprises
établies en dehors de l’UE qui proposent des biens
et services à des résidents européens.
L’accès aux marchés de l’UE
Les entreprises établies au Royaume-Uni qui Les audits nécessaires
souhaitent accéder aux marchés de l’UE, en parti- Face à cette situation inédite, avec l’assistance
culier les institutions finanet le conseil d’équipes
cières telles les sociétés
pluridisciplinaires
(droit
d’assurance et de réaseuropéen, droit financier,
surance qui pourraient «Les entreprises établies
droit des sociétés, fiscalité
cesser d’accéder sans
internationale, droit douaau Royaume-Uni seront
barrière réglementaire aux
nier, droit de la concurmarchés de l’UE dans un ainsi portées à s’interroger
rence et de la régulation,
contexte d’harmonisation
droit boursier, droit public,
sur l’opportunité d’ouvrir
des règles avec la direcaides d’Etat, etc.) intégrées
tive Solvency 2, devront une filiale, d’obtenir les
dans leur structure déciadapter leur stratégie et
sionnelle, certaines entreenvisager
l’opportunité autorisations nécessaires au
prises ont commencé un
de se domicilier dans un maintien d’une succursale, ou
travail d’audit de l’impact
Etat membre de l’UE. Les
juridique du Brexit sur leur
entreprises établies au de réaliser une acquisition dans situation, au regard notamRoyaume-Uni seront ainsi
ment des enjeux suivants :
un Etat membre de l’UE.»
portées à s’interroger
- contrats en cours au
sur l’opportunité d’ouvrir
regard du droit appliune filiale, d’obtenir les
cable et des juridictions
autorisations nécessaires
compétentes ;
au maintien d’une succursale, ou de réaliser une - procédures en cours ;
acquisition dans un Etat membre de l’UE.
- réglementation applicable aux produits et services
Du point de vue de la régulation bancaire, la ques- distribués depuis et vers le territoire britannique ;
tion a priori la plus délicate est probablement celle - appréciation de l’évolution des règles fiscales et
de la transposition de la directive MIFID II relative douanières et conséquences sur les échanges ;
à la transparence des marchés qui doit entrer - risques et opportunités des investissements entre
en vigueur début janvier 2018. A cette date, le UE et Royaume-Uni, à la lumière notamment des
Royaume-Uni devrait en effet être encore membre potentielles évolutions de la réglementation des
de l’UE et cette directive lui serait donc en principe produits financiers et dérivés ;
applicable. Réciproquement, le Parlement britan- - pour les entreprises ayant des liens capitalistiques
nique pourrait revenir sur des pans entiers de sa avec le Royaume-Uni, anticipation et traitement des
législation résultant de l’adoption des directives conséquences d’éventuels désinvestissements. n
Mercredi 29 juin 2016
9
Analyses
recherche et développement
La technologie et l’innovation, au cœur de
la relation franco-américaine : l’innovation
est le moteur des économies modernes
La Chambre de commerce américaine en France (AmCham) lance la première édition de
son livret «AmCham : Partenaire de l’Innovation Made in France». Le livret rassemble dix
cas pratiques d’investissements innovants réalisés par des entreprises américaines sur le
territoire français, et positionne l’AmCham comme un véritable catalyseur de l’innovation
entre la France et les Etats-Unis . Qu’il s’agisse de l’industrie comme Dow Chemical,
General Electric, 3M, des technologies de l’information comme Google ou IBM, des
services comme AIG, Carlson-Wagonlit Travel, FedEx, Selectionnist ou Vitanlink, toutes les
entreprises présentées dans ce livret font de l’innovation le cœur de leur démarche.
L
Par Robert
Vassoyan,
président,
AmCham1 France
président, Cisco
France
10
Mercredi 29 juin 2016
a Chambre de commerce américaine en France
(AmCham) lance la première édition de son
livret «AmCham : Partenaire de l’Innovation Made
in France». Le livret rassemble dix cas pratiques
d’investissements innovants réalisés par des entreprises américaines sur le territoire français, et positionne l’AmCham comme un véritable catalyseur
de l’innovation entre la France et les Etats-Unis .
Qu’il s’agisse de l’industrie comme Dow Chemical,
General Electric, 3M, des technologies de l’information comme Google ou IBM, des services comme
AIG, Carlson-Wagonlit Travel, FedEx, Selectionnist
ou Vitanlink, toutes les entreprises présentées
dans ce livret font de l’innovation le cœur de leur
démarche.
Ces investissements contribuent, de façon très positive et concrète, à la création d’emplois sur le territoire français. Ils illustrent le dynamisme du partenariat économique entre la France et les Etats-Unis. En
effet, en 2015, les Etats-Unis restent le premier pays
investisseur étranger créateur d’emplois en France,
avec 460 000 salariés directs et un montant cumulé
d’investissements de l’ordre de 114 milliards d’euros
(BusinessFrance).
Rarement ce constat n’aura été vérifié avec autant de
pertinence que dans la période que nous traversons.
Comme chacun le sait, elle se caractérise par des
avancées extraordinaires dans un ensemble de technologies clés, dans les domaines de l’informatique à
l’e-santé, du service numérique, du Big Data, de la
robotique et de l’intelligence artificielle. Ces nouvelles
technologies façonnent un monde nouveau et sont
aussi l’occasion pour les entreprises de se réinventer
pour trouver de nouvelles opportunités de marchés,
de recomposer leur chaîne de valeur.
C’est pour illustrer ce puissant courant d’innovation que l’AmCham a réalisé ce document. Il vise à
mettre en avant le rôle majeur des grandes entreprises américaines et celui des start-up soutenues par
l’écosystème de l’AmCham dans le foisonnement de
l’innovation en France. Ces entreprises ont lancé en
France des stratégies innovantes, créatrices de valeur
pour elles-mêmes tout en étant bénéfique pour le
tissu économique et de recherche et développement
français.
Que nous révèlent ces différentes expériences ?
D’abord que toutes les entreprises ont placé l’innovation au cœur de leur démarche et ce, quelle que
soit leur taille, leur secteur d’activité, la localisation
de leurs implantations ou leur ancienneté. En effet
dans le secteur de l’industrie des fleurons comme
General Electric, Dow Chemical, 3M, dans celui des
technologies de l’information comme Google ou IBM,
et des services comme AIG, Carlson-Wagonlit Travel,
Vitanlink ou Selectionnist, les démarches d’innovation
mises en œuvre prennent toutes leurs racines dans
l’excellence technologique au service de nouveaux
produits et services.
Le second enseignement est que l’écosystème français de recherche et développement est un puissant
moteur de localisation de l’innovation en France, en
raison à la fois de l’excellence académique du pays et
des incitations fiscales mises en place par l’Etat. Les
universités, les centres de recherche publics ou privés,
sont des partenaires essentiels des entreprises dans
le développement de leurs stratégies d’innovation et
le développement de nouveaux produits ou procédés.
La France est une terre de créativité, d’énergie, largement ouverte sur les nouvelles technologies dans un
contexte d’accélération de sa transformation numérique où les scientifiques et les chercheurs français
développent des compétences de pointe, universellement reconnues dans le monde. En outre, l’efficacité de la recherche des entreprises est aujourd’hui
Analyses
largement une affaire de réseaux : les compétences
des équipes implantées dans les diverses parties du
monde s’échangent et se fertilisent. Dans la plupart
des cas étudiés dans ce document, les chercheurs
et ingénieurs français sont partie prenante de ces
équipes internationales et y jouent un rôle très
important.
Enfin, les innovations développées sur le sol français
par les entreprises américaines contribuent de façon
très positive à l’emploi et au commerce international
de la France, puisqu’elles ont vocation à se développer
sur le marché mondial. C’est une preuve supplémentaire que les relations transatlantiques sont fortes,
que les échanges fonctionnent et sont bénéfiques
dans les deux sens, sur le plan économique et dans le
domaine de l’innovation.
Pour la France comme pour les Etats-Unis, les défis de
la révolution technologique en cours sont de même
nature : ils sont stratégiques pour le futur de nos deux
pays. Dans le seul domaine des objets connectés et
du Big Data, le potentiel économique pourrait représenter jusqu’à trois à cinq points de PIB incrémental
supplémentaire. Forte de ses quelque 400 entreprises membres, l’AmCham entend mettre à profit
l’ensemble de leurs compétences et le leadership
français en matière d’innovation, pour jouer un rôle
moteur dans le renforcement des échanges transat-
lantiques. Elle souhaite se réinventer en devenant le
catalyseur et le pont de l’innovation entre la France
et les Etats-Unis.
C’est l’ambition derrière la constitution de nouvelles
communautés telles que AmCham NextGeneration,
un réseau de grandes entreprises et start-up dont
le but est d’encourager le partage de connaissances
et d’expériences. Notre mission est de favoriser les
échanges et les investissements bilatéraux, notamment par l’ouverture d’un dialogue constructif sur des
sujets aussi stratégiques que la compétitivité et l’attractivité de la France.
Les entreprises américaines sont aujourd’hui le
premier investisseur étranger avec un montant
cumulé d’investissements de près de 115 milliards
d’euros et le premier créateur d’emplois en France
avec plus de 460 000 salariés en 2015, c’est dire le
rôle crucial que joue le partenariat économique et
technologique entre les deux pays. n
1. La Chambre de commerce américaine en France est la plus
ancienne organisation franco-américaine dans le monde. Depuis
1894, son but est de promouvoir les relations économiques entre la
France et les Etats-Unis. Aujourd’hui, les 4 200 sociétés américaines
présentes en France représentent 460 000 emplois sur le territoire
français. L’AmCham compte près de 400 membres, dont 150 sont
des entreprises listées au CAC40 et au Fortune 100. Les activités de
l’AmCham sont financées par les cotisations et contributions de ses
membres. www.amchamfrance.org.
Les Etats-Unis : le 1er pays investisseur étranger créateur d’emplois en France
Contribution à l’emploi
4 800
entreprises
en France
en 2015
46 000
salariés
en France
en 2015
10 783 emplois
(32 % des emplois
créés par des
entreprises étrangères)
Contribution à l’export
des filiales américaines implantées en France
3 612 emplois
(10,7 % des emplois
créés par des
entreprises étrangères)
2 833 emplois
(8,4 % des emplois
créés par des
entreprises étrangères)
1 013 emplois
(2,8 % des emplois
créés par des
entreprises étrangères)
Principaux pays investisseurs en France
vdans les activités de Recherche & Développement
24 %
13 %
5%
Selon l’INSEE, les filiales américaines implantées
en France assurent 30 % du chiffre d’affaires à
l’exportation de l’ensemble des entreprises sous
contrôle étranger implantées en France.
2%
Plus du tiers (37 %) des investissements étrangers dans
le secteur des logiciels en 2015 provenait des États-Unis.
Mercredi 29 juin 2016
11
Abonnez-vous
au Service professionnel
de veille concurrentielle
et d’analyses dédié
au Droit des Affaires
La Lettre
Les rencontres
d’experts
Le Magazine
+
+
Bulletin d’abonnement privilégié
A compléter et à retourner à : Service abonnements - 10 rue pergolèse 75016 Paris
Tél 01 53 63 55 58 - Fax 01 53 63 55 60 - email : [email protected]
J’accepte votre offre et vous demande d’enregistrer mon abonnement à DROIT AFFAIRES au tarif de :
&
❏ Entreprise : 898 euros H.T./an (soit 916,86 euros TTC)
❏ Cabinet de moins de 10 avocats : 1 098 euros H.T./an (soit 1 121,06 euros TTC)
❏ Cabinet entre 10 et 50 avocats : 1 398 euros H.T./an (soit 1 427,36 euros TTC)
❏ Cabinet ayant plus de 50 avocats : 1 698 euros H.T./an (soit 1 733,66 euros TTC)
Mon abonnement comprend :
– la lettre hebdomadaire Option Droit &Affaires (46 numéros par an) que je recevrai chaque mercredi soir après 18H,
consultable au sein de l’entreprise ou du cabinet sur le web, tablettes et smartphones
– les magazines de classements (5 par an)
– les suppléments «les rencontres d’experts» (7 par an)
Nous vous informons que les années suivantes votre abonnement sera reconduit pour un an par tacite reconduction
sauf avis contraire de votre part par lettre recommandée deux mois avant la date d’échéance.
Je choisis le mode de règlement suivant : o Chèque ci-joint à l’ordre d’Option Finance. o Règlement à réception de facture.
o M. o Mme o Mlle Nom ......................................................................................................... Prénom .................................................................................................
Fonction ......................................................................... Société ...................................................................................................................................................................
Adresse o Professionnelle o Personnelle ................................................................................................................................................................................................
............................................. Code postal l__l__l__l__l__l Ville .......................................................................................... Téléphone l__l__l__l__l__l__l__l__l__l__l
....................................................................................................................................................................................
Date et signature
(obligatoires)
POD16
Pour recevoir la lettre d’Option Droit & Affaires chaque mercredi soir, merci de nous indiquer
une adresse email de contact de référence
* Pour l’étranger, frais de port en sus (consultez le service abonnements au 01 53 63 55 58).
Conformément à la Loi Informatique et LIbertés du 06.01.78, vous disposez d’un droit d’accès aux données personnelles vous concernant. Par notre intermédiaire,
vous pouvez être amené à recevoir des propositions d’autres sociétés ou associations. Si vous ne le souhaitez pas, il vous suffit de nous écrire en nous indiquant
vos nom, prénom, adresse, et si possible votre référence client.