A quand l`ouverture de Jurassic Park?
Transcription
A quand l`ouverture de Jurassic Park?
A quand l’ouverture de Jurassic Park? Dans le film de fiction «Jurassic Park», les dinosaures étaient clonés à partir d’anciennes séquences d’ADN (ADN-A) extraites de sang de dinosaures trouvé dans l’intestin de moustiques pris dans de l’ambre (résine de conifères fossilisée), ce qui permettait d’obtenir l’information génétique nécessaire à les recréer. Bien que la plupart des scientifiques considèrent encore la science de «Jurassic Park» comme fantaisiste, l’acquisition d’ADN de dinosaure est devenue possible depuis ces dernières années, sur la base de tentatives de séquençage de petits fragments d’ADN-A extraits d’humains archaïques et d’animaux. Est-il possible que l’ADN-A et les autres biomolécules telles que les protéines d’organismes morts puissent suffisamment bien résister aux conditions environnementales pendant des milliers d’années, voire, selon les scientifiques séculiers, des millions d’années? En mars 2005, Mary Schweitzer et ses collègues ont publié un article dans le magazine Science, décrivant la présence de tissus mous (matériel cellulaire) dans le fémur fossilisé d’un Tyrannosaurus rex découvert dans l’est du Montana (USA).1 Schweitzer et les autres ont relevé la présence de structures qui semblaient être des vaisseaux et des cellules sanguines contenant des noyaux dans lesquels de l’ADN pouvait être trouvé. Beaucoup de ces tissus ont pu être étirés à plusieurs reprises puis ont repris leur forme initiale, ce qui indique la présence de protéines élastiques généralement présentes dans les vaisseaux sanguins. Des photos du tissu et des expériences comparant celui du T. rex à celui d’un os d’autruche semblent confirmer que le matériel soit du tissu mou. La présence de ce dernier, lequel se décompose rapidement après la mort d’un organisme, correspond mieux au modèle de la création (affirmant que les dinosaures ont vécu récemment – dans les 10 000 dernières années) qu’à un scénario évolutionniste datant les dinosaures à 65 millions d’années. Cependant, les facteurs environnementaux responsables de la conservation des tissus mous dans de l’os fossilisé sont inconnus, et jusqu’à ce qu’ils soient établis, ni les créationnistes ni les évolutionnistes ne peuvent être sûrs qu’il existe un mécanisme capable de les préserver indéfiniment. Après tout, jusqu’à la découverte de Schweitzer, personne ne croyait que des cellules et des vaisseaux sanguins intacts – qui normalement se décomposent rapidement après la mort – pouvaient encore se trouver dans un os de dinosaure après quelques années, et encore moins après 10 000 ou 65 millions d’années. Est-il possible que ce tissu renferme encore de l’ADN et des protéines? Bien que l’on ignore par quel procédé les tissus mous sont conservés dans l’os fossilisé et combien de temps ils subsistent, des études cinétiques sur la dégradation de l’ADN et des protéines ont été menées afin d’estimer leur 1 Schweitzer, M. H., Wittmeyer, J. L., Homer, J. R., and Toporski, J. K. 2005. Soft-tissue vessels and cellular preservation in Tyrannosaums rex. Science 307:1952-1955. p. 1 / 5 durée possible de conservation une fois l’organisme mort. Ces recherches démontrent que de petits fragments d’ADN (< 500 paires de bases), dont l’intégrité de la séquence originale nécessaire à déterminer l’origine de l’organisme serait suffisante, ne devraient pas être âgés de plus de 10 000 ans, si le spécimen était conservé dans un climat tempéré.2,3,4 La moiteur ou l’humidité environnant les cellules de l’animal et la rapidité avec laquelle il a été fossilisé influencent également la vitesse de dégradation de l’ADN-A. Les conditions environnementales affectent de manière significative la durée de conservation de l’ADN-A et il est possible de prolonger la «vie» de l’ADN-A en abaissant la température ambiante. Les laboratoires de biologie moléculaire conservent ad eternam de l’ADN dans des congélateurs à -80° C (bien que de toute évidence personne n’ait jamais fait cela pendant des milliers d’années!) et des études de cinétique prédisent qu’à des températures polaires (-50° C), la «vie» d’ADN indentifiable pourra être prolongée jusqu’à 100 000 ans.2,3,4 Le récent séquençage de 28 millions de bases d’ADN de mammouth extraites de tissu congelé tend à confirmer l’hypothèse selon laquelle l’ADN se conserve plus longtemps à des températures froides.5 Certaines protéines pourraient avoir une durée de vie plus longue (jusqu’à 1 million d’années), tout comme les petits fragments de peptide de la protéine intégrale originale. D’autres protéines telles que le collagène – une protéine se trouvant dans l’os – se dégradent probablement complètement en moins de 30 000 ans, mais ceci est manifestement bien en dessous de l’âge de 65 millions d’années donné aux dinosaures.6 Une fois qu’un organisme meurt, l’ADN commence immédiatement à se dégrader. Les dommages subis par l’ADN après la mort de la cellule mènent à de nombreux changements pouvant rendre la détermination de la séquence originale difficile. L’ADN est contenu dans des chromosomes d’une longueur atteignant généralement des millions de bases, mais à la mort de l’organisme, les liaisons chimiques formant la spirale de l’ADN se rompent rapidement, conduisant à la fragmentation de l’ADN en de courts segments de moins de 500 bases de longueur.4,7 Deux des quatre bases qui composent le code génétique de l’ADN – les purines : adénine et guanine – disparaissent de la séquence d’ADN originale au fil du temps. Une modification de la base de cytosine peut avoir pour résultat des substitutions de bases dans les séquences d’ADN proposées qui ne se trouvaient pas dans la séquence originale.4,7 Ce ne sont que quelques-uns des nombreux problèmes que rencontrent couramment les scientifiques qui essaient de déterminer la séquence d’ADN-A originale à partir d’échantillons prélevés sur des organismes morts depuis longtemps. 2,3,4 Poinar, H. N., Höss, M., Bada, J. L., and Paabo, S. 1996. Amino acid racemization and the preservation of ancient DNA. Science 272:864-866. | Smith, C. I., et al. 2001. Neanderthal DNA : not just old but old and cold? Nature 410:771772. | Willerslev, E., and Cooper, A. 2005. Ancient DNA. Proc. R. Soc. B 272:3-16. 2,3,4 op.cit. 5 Poinar, H. N., et al. 2006. Metagenomics to paleogenomics : Large-scale sequencing of mammoth DNA. Science 311:392-394. 6 Bada, J. L., Wang, S. W., and Hamilton, H. 1999. Preservation of key biomolecules in the fossil record : current knowledge and future challenges. Phil. Trans. R. Soc. Lond. B 354:77-87. 4,7 Willerslev, E., and Cooper, A. 2005. Ancient DNA. Proc. R. Soc. B 272:3-16. | Lindahl, T. 1993. Instability and decay of the primary structure of DNA. Nature 362:709-715. 4,7 op.cit. p. 2 / 5 En dépit de ces problèmes, beaucoup de séquences courtes d’ADN-A ont été publiées, extraites d’une large variété d’anciens organismes fossilisés. De courtes séquences d’ADN-A ont pu être identifiées sur des plantes8, des bactéries9, des mammifères10, des hommes de Néandertal11 et d’autres êtres humains archaïques12. La plupart de ces informations sur l’ADN-A ont été rendues possibles grâce aux nombreuses copies d’ADN mitochondrial (ADN mt) trouvées dans chaque cellule ainsi qu’à la technologie de réaction en chaîne par polymérase (PCR : polymerase chain reaction). La PCR est capable de reproduire des millions de copies d’un petit brin d’ADN, à partir de quelques molécules d’ADN-A original seulement. Cependant, le procédé complet d’amplification d’ADN-A à partir d’une source archaïque engendre de nombreux défis, et il est possible qu’aucune des séquences publiées ne soit valable. La réaction PCR est suffisamment sensible pour amplifier l’ADN d’une seule molécule d’échantillon d’ADN-A. Ceci signifie que la contamination de l’ADN par les êtres humains et les microbes présents dans le laboratoire (le simple fait de respirer, les microbes présents dans la poussière ou les précédentes réactions PCR) peut causer l’amplification d’un organisme contaminant, au lieu de celle de l’ADN-A souhaité. Des scientifiques travaillant dans ce domaine ont essayé d’établir un ensemble de critères qui garantiraient la similitude de séquences publiées valides.4 Une des conditions proposées est que toute séquence d’ADN-A doit être reproduite dans un laboratoire indépendant. Ceci est un principe fondamental de la méthode scientifique stipulant qu’une véritable découverte scientifique doit être reproductible, et cette exigence est louable. Il existe de nombreuses autres directives permettant de déterminer la validité d’un échantillon d’ADN-A; malheureusement, l’une des procédures utilisées consiste à définir si la séquence d’ADN-A en question est conforme à la théorie de l’évolution, quant à l’origine et à l’époque de l’apparition de l’organisme séquencé. C’est à l’évidence cette directive qui a été utilisée dans deux cas impliquant des séquences d’ADN-A publiées pour un présumé os de dinosaure et une bactérie. En 1994, l’équipe de Woodward13 a annoncé qu’une séquence de 84 paires de bases du gène cytochrome b de l’ADN mt, extraite d’un échantillon d’os trouvé dans une roche du Crétacé, s’apparentait le plus étroitement à de l’ADN de cytochrome b de mammifère. A cause de la taille de l’os et de sa localisation dans une roche du Crétacé, on en a déduit qu’il s’agissait d’un os de dinosaure. Woodward a été largement critiqué pour ses conclusions14,15 : premièrement parce que son travail n’était pas reproductible dans un laboratoire indépendant, deuxièmement «parce que de l’ADN de dinosaure n’aurait pas pu être conservé aussi longtemps» (rappelez-vous que l’ADN se 8 Golenberg E. M., et al. 1990. Chloroplast DNA from a Miocene Magnolia species. Nature 344:656-658. Vreeland, R. H., Rosenzweig, W. D., and Powers, D. W. 2000. Isolation of a 250 million-year-old halobacterium from a primary salt crystal. Nature 407:897-900. 10 Orlando, L., et al. 2002. Ancient DNA and the population genetics of cave bears (Ursus spelaeus) through time and space. Mol. Biol. Evol. 19:1920-1933. 11 Krings, M., et al. 1997. Neanderthal DNA sequences and the origin of modem humans. Cell 90:19-30. 12 Adcock, G. J., et al. 2001. Mitochondrial DNA sequences in ancient Australians : Implications for modem human origins. Proc. Nat. Acad. Sci. 98:537-542. 4 op. cit. 13 Woodward, S. R., Weyand, N. J., arid Bunnell, M. 1994. DNA sequences from Cretaceous period bone fragments. Science 266:1229-1232 14,15 Schweitzer, M. H., and Hedges, B. S. 1995. Detecting dinosaur DNA. Science 268:1191. | Allard, M. W., Young, D., and Huyen, Y. 1995. Detecting dinosaur DNA. Science 268:1192. 9 p. 3 / 5 dégrade en 10 000 ans à peine), et troisièmement parce que «chaque paléontologue sait» que les dinosaures sont plus étroitement apparentés aux oiseaux qu’aux mammifères. Mary Schweitzer – qui travaillait à ce moment-là pour le Musée des Rocheuses (Museum of the Rockies) à Bozeman, dans le Montana – a été l’une des critiques les plus intarissables de Woodward. Schweitzer et Blair Hedges ont écrit une réfutation au travail de Woodward, déclarant : «(…) On attendrait d’une présumée séquence de dinosaure qu’elle se recoupe avec celles des oiseaux et des crocodiles lors d’une analyse phylogénétique des amniotes.»14 En dépit du soin méticuleux dont le groupe de Woodward a usé pour s’assurer qu’aucun de ses échantillons ne soit contaminé, Schweitzer et Hedges (avec d’autres) ont soutenu que la séquence de cytochrome b d’ADN mt était contaminée par de l’ADN humain car le résultat n’avait pas été vérifié indépendamment dans un autre laboratoire et parce que leur analyse phylogénétique assimilait la séquence de cytochrome b d’ADN mt du présumé dinosaure à de l’ADN humain. Dans un cas similaire, Vreeland et ses associés ont publié la séquence complète du gène 16S de l’ADN-R d’une espèce de bactéries Bacillus prélevée sur un cristal de sel prétendument âgé de 250 millions d’années.9 Non seulement ils ont obtenu une séquence d’ADN-A ressemblant étroitement aux Bacillus modernes, mais encore ont-ils réussi à mettre l’organisme en culture. A nouveau les critiques ont prétendu que les cultures et les échantillons d’ADN-A devaient être contaminés, s’appuyant sur l’idée qu’un organisme âgé de 250 millions d’années ne peut pas s’apparenter aussi étroitement à des bactéries modernes et que cultiver une substance dormante depuis 250 millions d’années est de la pure science-fiction. Les affirmations de Vreeland n’ont pas été reproduites dans un laboratoire indépendant et beaucoup de scientifiques de la branche continuent à douter du fait que de l’ADN-A puisse être extrait d’organismes âgés de «millions d’années». Par opposition à Woodward et Vreeland, des séquences d’ADN mt du spécimen de Néandertal ont été utilisées pour évaluer la contribution d’ADN que les Néandertaliens pourraient avoir transmise aux premiers hommes modernes en Europe.16 Cette étude n’a pas non plus été vérifiée indépendamment, mais elle a été saluée comme un exemple de la manière dont l’ADNA peut augmenter les connaissances en génétique des premières populations humaines, les données générées soutenant la notion évolutionniste affirmant que les Néandertaliens n’étaient pas les ancêtres des humains modernes.4 La reconnaissance d’un travail non vérifié parce qu’il correspond à la pensée évolutionniste versus le rejet d’un travail non vérifié parce qu’il ne correspond pas au paradigme évolutionniste est une tendance inquiétante qui affectera certainement les futurs efforts de recherche sur des échantillons d’ADN-A. 14 op. cit. op. cit. 16 Serre, D., et al. 2004. No evidence of Neanderthal mtDNA contribution to early modem humans. PLoS Biol. 2:313-317. 4 op. cit. 9 p. 4 / 5 L’équipe Schweitzer est en possession de tissu qui pourrait fournir plus d’informations sur l’ADNA et l’âge des dinosaures. Cette question est déjà réglée dans l’esprit de nombreux scientifiques séculiers, mais si l’équipe Schweitzer réussit à extraire de l’ADN-A du tissu de Tyrannosaurus rex, soit cela confirmera que le T. rex vivait il y a moins de 10 000 ans, soit cela renverra les scientifiques à leur laboratoire pour essayer de comprendre comment de l’ADN peut survivre à 65 millions d’années de bouleversements environnemental et géologique. Si l’ADN-A extrait ne rejoint pas les présuppositions évolutionnistes, les séquences seront-elles considérées comme contaminées et ne seront-elles pas publiées? Schweitzer a admis, dans une récente interview sur la chaîne d’information américaine MSNBC, que les données préliminaires réunies étaient «surprenantes».17 De nombreux scientifiques attendent anxieusement les résultats de leur analyse biochimique du contenu possible de la protéine et de l’ADN extraits du tissu du T. rex ainsi que les implications de ces résultats. Bien que «Jurassic Park» demeure le fantasme d’un parc d’attractions rempli de dinosaures vivants, observer les scientifiques jouer des coudes pour produire de nouvelles théories expliquant les récentes données issues des tissus mous de dinosaures pourrait être encore plus intéressant et plus divertissant! Daniel Criswell, Docteur en biologie moléculaire et Professeur de biologie à la section Bachelor de l’Université ICR Source : Journal de l’Institut pour la recherche sur la création (Institute for Creation Research) Impact, Numéro 396, Juin 2006 Titre original : How soon will Jurassic Park open? Traduction française : APV Date de parution sur www.apv.org : 30.06.09 17 Boyle, A. 2006. Proteins could reveal new dinosaur secrets. MSNBC.COM., Feb. 20, 2006, see : http://www.msnbc.msn.com/id/11385533. p. 5 / 5