Intervention de Jean-Bernard LEVY,

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Intervention de Jean-Bernard LEVY,
plénières
Intervention de
Jean-Bernard LEVY,
Président-Directeur
général d’EDF
congrès de la FNCCR - juin 2016 / PLÉNIÈRES
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Intervention de Jean-Bernard LEVY,
Président-Directeur général d’EDF
Animation :
Xavier PINTAT, Président de la FNCCR
Introduction
Xavier PINTAT
Président de la FNCCR, sénateur de la Gironde
Electricité de France (EDF) et notre fédération ont
fait ensemble un très long chemin depuis notre
congrès de Tours en 1947. Depuis, le paysage
énergétique s’est métamorphosé, notamment
par l’ouverture de la fourniture d’électricité à la
concurrence, et maintenant avec la lutte contre le
changement climatique. Malgré tout, le groupe EDF
est demeuré un opérateur majeur du service public
de l’énergie, en sa qualité de concessionnaire
de nos collectivités pour la distribution, avec
sa filiale Enedis, mais aussi pour la fourniture
d’électricité au tarif bleu. Nous devons préparer le
renouvellement des contrats de concession signés
dans les années 90, dans un contexte de transition
énergétique qui fait émerger des problématiques
nouvelles et impose des réponses adaptées. Nous
avons fortement progressé dans l’élaboration d’un
nouveau modèle de contrat, fondé sur une vision
partagée de l’intérêt général. Nous souhaitons
donc une énergie compétitive et peu émissive
de gaz à effet de serre, accessible à tous dans le
cadre d’un système organisé de solidarité sociale
et territoriale. Les représentants des autorités
concédantes souhaitent qu’EDF ait la capacité
de s’engager durablement dans un partenariat
ambitieux au service de nos territoires. Le monde
de la transition énergétique est toutefois empreint
d’incertitudes, et nous vous remercions de venir
nous aider à les dissiper.
e service public de l’énergie
L
face au défi des marchés
et de l’environnement
Jean-Bernard LEVY
Président-Directeur général d’EDF
Historiquement présente dans le secteur de
l’énergie, de l’électricité et du gaz donc, la FNCCR
l’est également dans celui de l’eau et de plus en
plus aussi dans le domaine du numérique. Dans
toutes ces technologies, l’innovation est essentielle
pour être plus efficace. Les relations de la FNCCR
et d’EDF sont issues d’un parcours commun très
riche, qui s’est beaucoup renforcé lorsque le modèle
national de contrat de concession de distribution
publique et de fournitures au tarif réglementé de
vente (TRV) a été mis en place en 1992. Sur cette
base ont été établis la grande majorité des contrats
de concession encore en vigueur aujourd’hui.
L
’ouverture des marchés :
un bouleversement attendu
Depuis une quinzaine d’années, l’ouverture
progressive des marchés a bouleversé l’organisation
du secteur énergétique. Une nouvelle étape a
été franchie, au début de cette année, avec la
suppression des tarifs règlementés pour les sites de
puissance supérieure à 36 kilovoltampères1. Cette
nouvelle concurrence était un défi pour les équipes
d’EDF, mais nous nous étions bien préparés en
enrichissant nos offres de services, par exemple,
pour mieux maitriser et piloter la consommation.
Grâce à ces efforts, plus de 70% de nos clients
concernés par la fin des tarifs ont continué de
choisir EDF. Les autorités organisatrices de la
distribution d’électricité que vous représentez
jouent un rôle important pour structurer les achats
d’électricité et de gaz, dans la recherche, non
seulement du moins-disant mais aussi d’un mieux-
1- Le kilovoltampère (kVA) mesure la puissance électrique apparente d’une installation.
2
disant, notamment fait d’accompagnement et de
services. Quand aux clients de puissance inférieure
ou égale à 36 KVA, qu’ils soient résidentiels ou non
résidentiels, ils peuvent choisir entre les offres de
marché ou l’offre au tarif Bleu réglementé. EDF
est attaché au maintien de ce Tarif réglementé de
vente (TRV).
U
ne réponse : l’innovation
EDF est une entreprise qui innove. Nos efforts sont
importants : 2000 personnes sont en charge de
l’innovation pour nous permettre d’avancer dans
les technologies de demain. Cela bénéficie bien
sûr, aux systèmes de production, aux systèmes
d’acheminement, mais aussi aux clients. Pour nous,
l’innovation technologique est intrinsèquement
liée à la démarche commerciale. Exemple : notre
solution numérique « Equilibre » donne à nos
clients particuliers un accès en ligne à des données
personnalisées leur permettant d’analyser leur
consommation. En un an, plus d’un million de
clients y ont souscrit. Deuxième exemple : sur la
base des compteurs Linky, nous allons ouvrir des
services de base gratuits, qui faciliteront eux aussi,
la maitrise des consommations. Trois millions de
compteurs seront déployés en 2016, 5 milliards
d’euros investis pour 35 millions de nouveaux
compteurs de 2016 à 2021, créant des emplois dans
nos régions. C‘est une innovation majeure, dont
nous ne savons décrire à l’avance toutes les
opportunités et toutes les possibilités sur la base
des données fondamentales fournies par les
compteurs. Tout un écosystème va se mettre en
place. Il enrichira les services que nous offrons à
nos clients. Evolution majeure, la loi de transition
énergétique acte l’accroissement des responsabilités énergétiques des collectivités territoriales,
tant pour la production d’énergie renouvelable
que pour la promotion de l’efficacité énergétique
et le développement durable des territoires. Ce
mouvement reconnaît la responsabilité primordiale
des collectivités territoriales dans la bonne marche
du service public de l’électricité.
L
a relation contractuelle,
moteur de l’adaptation
La relation entre les autorités organisatrices
de l’énergie, EDF et Enedis tient compte de ces
changements. Dans ce cadre, nous élaborons
un nouveau modèle national de contrat de
concessions. Très prochainement finalisé, il
devra réaffirmer notre attachement mutuel à des
principes fondamentaux. D’abord, un principe de
péréquation nationale pour le tarif d’acheminement
et les tarifs réglementés de vente, facteur essentiel
de cohésion sociale et d’équilibre territorial. Les
concessions locales de distribution d’électricité
s’inscrivent dans une organisation nationale.
De ce point de vue, la directive « Concessions2»
confirme la spécificité du modèle concessif
français et l’exemption de mise en concurrence des
concessions d’électricité. L’association, en amont,
des collectivités concédantes et d’Enedis dans la
définition des investissements propriétaires, est
un atout. A cet égard je salue la décision de faire
siéger le président de la FNCCR au conseil de
surveillance d’Enedis, ainsi que la création du
Comité national du système de distribution p
ublique d’électricité3, également présidé par
un membre de la FNCCR. Cette gouvernance
sera complétée par les nouveaux dispositifs de
programmation des investissements, et par la mise
à disposition de données économiques et techniques supplémentaires. Ce nouveau cadre contractuel sera adapté aux enjeux de la transition
énergétique et aux attentes légitimes des
collectivités.
A
u cœur des enjeux, la solidarité
Ce cadre contractuel doit aussi réaffirmer la
solidarité des collectivités et d’EDF à l’égard des
clients en difficulté, plus que jamais nécessaire,
puisque quatre millions de foyers sont en
situation de précarité. La réponse aux enjeux
énergétiques d’une entreprise ne peut s’exonérer
d’un engagement social, et nous plaçons la lutte
contre la précarité énergétique au cœur de notre
responsabilité. Ainsi, nous avons déjà mis en œuvre
les dispositifs règlementaires dont bénéficient
plus de 2,5 millions de foyers, en matière de tarifs
sociaux, tout en accompagnant l’action des pouvoirs
publics. Par exemple, l’Etat, nous a récemment
chargés de fournir gratuitement un million
d’ampoules LED aux collectivités situées dans les
Territoires à énergie positive pour la croissance verte
(TEPOS), en faveur des ménages à faible revenu.
Sur le plan social, nous intervenons dans l’aide
au paiement, avec le co-financement des fonds de
solidarité pour le logement. Nos conseillers clients
et nos conseillers solidarité accompagnent des
clients en difficulté, et nous avons mis en place
des partenariats avec les travailleurs sociaux des
2- La directive dite « Concessions » 2014/23/UE encadre pour la première fois au niveau européen les concessions de services ou de travaux.
3- Ce comité est chargé de rendre des avis sur les politiques d’investissement des gestionnaires de réseaux de distribution et des autorités
organisatrices des réseaux publics de distribution d’électricité.
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collectivités territoriales, avec les structures de
médiation sociale et avec le monde associatif.
Enfin, nous faisons de la prévention, avec l’aide
à la rénovation thermique des logements et la
pédagogie sur les bonnes pratiques en matière
de maitrise de l’énergie. Toujours en matière de
solidarité, nous innovons avec le portail Pass
Solidarité, qui permet de traiter les situations de
précarité énergétique les plus urgentes.
L
’électricité décarbonée,
une réponse au réchauffement
Vous êtes confrontés à de nouveaux défis : trouver
des solutions concrètes à la mise en œuvre de la
transition énergétique au service des habitants
des territoires. EDF est pleinement mobilisé pour
vous accompagner à travers la fourniture électrique
bas carbone et à travers l’offre de solutions et de
services énergétiques que porte le pôle Services
de notre direction Commerce, mais que portent
aussi, sous leur marque, nos filiales de spécialités
comme Dalkia, Citelum, Tiru4, et nos partenaires.
Nous sommes un électricien déjà très décarboné,
puisque les kilowattheures produits par EDF
émettent 20 fois moins de dioxine de carbone que
la moyenne européenne avec, en France, un mix
énergétique performant, conjuguant nucléaire
et énergies renouvelables. Si nous sommes le
premier électricien mondial en matière d’électricité nucléaire, nous sommes aussi le premier
producteur européen d’énergies renouvelables.
Ceci fait d’EDF l’acteur central de la transition
vers une économie sobre et bas carbone. Nous
poursuivons dans cette direction avec plusieurs
programmes, dont notre programme de grand
carénage destiné à prolonger la durée de vie de
nos centrales nucléaires, ou nos programmes de
développement de nouveaux réacteurs nucléaires,
comme l’EPR5 de Flamanville. Le nucléaire, énergie
décarbonée, s’affirme de plus en plus comme un
avantage compétitif remarquable. A cet égard,
et dans le cadre de notre stratégie bas carbone,
nous rééquilibrons nos investissements en matière
nucléaire et ceux en matière d’énergie renouvelable. La stratégie Cap 2030 doit permettre de
doubler la capacité d’EDF en matière de production
d’origine renouvelable, en la portant en 15 ans de
28 gigawatts à plus de 50, grâce à notre maîtrise
de toutes les technologies : l’hydraulique avec les
grands barrages et aussi la plus petite hydraulique, essentielle dans les territoires ; la biomasse,
avec Dalkia, leader en matière de réseaux de
chaleur et de froid ; l’éolien, avec notamment
le plus grand parc d’énergie éolienne dans les
Pyrénées-orientales – près de 100 mégawatts en
une seule rangée d‘éoliennes ; le photovoltaïque et
la géothermie.
L
e progrès par l’accompagnement
Chaque année, nous investissons autant pour
construire de nouvelles capacités en matière
d’énergie renouvelable, que nous investissons
en matière d’énergie nucléaire. Nombre de
collectivités publiques souhaitent intégrer le
volet énergie dans leur démarche de planification
urbaine, et piloter des systèmes valorisants les
ressources locales faiblement carbonées. Depuis
70 ans, EDF a développé culture et connaissances
en matière d’infrastructures énergétiques – de
la conception à la maintenance – et en matière
de services. Notre objectif est de vous aider
maintenant à les optimiser à l’échelle territoriale.
Nous pouvons vous aider à construire encore
d’avantage vos expertises, à définir vos politiques
énergétiques, à construire un capital unique de
connaissances qui nous permettra, au plus près
des clients, d’optimiser la performance énergétique des différentes installations, et en
particulier, des logements. Notre recherche
et développement, notre savoir faire en
matière d’accompagnement territorial sont
complémentaires. Sans privilégier une filière ou
une solution technique ou gamme de matériels
particulières, notre objectif est de vous donner
la réponse la plus adaptée à vos réalités et à
vos enjeux. Nous accompagnons déjà plus de
300 projets portés par les collectivités. La
décentralisation de l’électricité est une révolution,
et nous avons donc à l’optimiser, à la fois dans la
dimension nationale et dans la production, que
dans la dimension locale et de la consommation,
en nous appuyant sur l’innovation, un savoirfaire et une bonne volonté permanents. Vous
pouvez également bénéficier de nos nombreux
partenariats avec le monde scientifique et
académique, avec de nombreuses institutions
en France et à l’étranger, ainsi que dans le
monde des start-up, qui nous stimule, nous
apportant challenges et innovations, en testant,
grandeur nature, des solutions d’optimisation
locale et de maitrise de l’énergie, ainsi qu’en
développant tout un éventail de services interactifs.
4- Filiales d’EDF spécialisées dans l’efficacité ou la valorisation énergétiques.
5- Le réacteur pressurisé européen, L’EPR (Evolutionary Power Reactor) est réacteur à eau préssurisée nucléaire de troisième génération
conçu et développé par Areva.
4
L
a confiance, un enjeu d’avenir
En conclusion, vous pouvez compter sur le groupe
EDF. Nous allons vous accompagner dans vos
projets de transition énergétique dans toutes
leurs dimensions, tant pour des opérations
ponctuelles que des partenariats inscrits dans les
investissements conjoints, inscrits dans la durée
et la confiance. Nous sommes confrontés à la
concurrence, nous sommes néanmoins conscients
de nos responsabilités pour faire du service public
de l’électricité un des socles de notre action, et nous
sommes innovants dans l’exercice de nos missions
de service public.
Enfin, je voudrais insister sur l’importance nationale
des enjeux de lutte contre le réchauffement
climatique. A Paris, 195 chefs d’Etat ont partagé la
nécessité de faire quelque chose d’ampleur pour
préserver notre environnement et notre planète.
Nous partageons ces enjeux et nous sommes
convaincus que l’électricité est l’une des solutions,
parce qu’elle est un vecteur de la décarbonation,
et un vecteur important en matière de maitrise
des énergies. C’est donc un message de grande
confiance dans l’avenir, de grand respect pour le
partenariat entre nous, que je vous adresse. Je vous
remercie de votre attention.
Questions de la salle
E
DF et le chèque-énergie
De la salle (Denise SAINT-PE, Présidente du
Syndicat d’énergie des Pyrénées Atlantiques (SDEPA),
Conseillère régionale des Pyrénées Atlantiques)
Quel est votre positionnement sur le remplacement
de l’application des tarifs sociaux par le chèqueénergie ?
Jean-Bernard LEVY
La loi de transition énergétique prévoit en effet le
basculement du système des tarifs sociaux par
un chèque-énergie qui permettrait notamment de
traiter d’autres modes d’énergie que l’électricité
et le gaz – ce qui est parfaitement compréhensible
vis-à-vis de ceux qui ont choisi d’autres modes
de chauffage. Le sujet est néanmoins complexe.
Sagement, le gouvernement a décidé de passer
d’abord par une expérimentation dans quatre
départements, et ce n’est qu’après que l’on en
mesurera les bénéfices, et que sera éventuellement
généralisé le passage au chèque-énergie. Certains
s’inquiètent d’une possible inefficacité dans la
gestion de ce moyen de paiement. Je crois qu’il faut
attendre l’expérimentation avant de pouvoir donner
une opinion définitive.
U
n risque, et une opportunité
De la salle (Denis LINGLIN, Vice-président
du Syndicat intercommunal d’énergie et de
e-communication de l’Ain (SIEA), maire de SERGY)
Comment vous préparez-vous à un éventuel
black-out – dont la cause principale serait les
énergies renouvelables (ENR) et en premier lieu,
l’éolien – dans la plaque électrique européenne ?
En matière de nucléaire, que prévoyez-vous pour
le futur, maintenant que vous êtes partenaire
d’AREVA ?
Jean-Bernard LEVY
L’équilibre du réseau français et l’insertion dans
la plaque européenne sont de la responsabilité
de Réseau de transport d’électricité (RTE) qui, en
dépit d’un passé commun, doit traiter EDF comme
un producteur d’électricité parmi d’autres. Si RTE
estime qu’il n’y a pas de risque, sur les deux ou trois
prochaines années, d’un effondrement du système
électrique européen du fait de la concomitance de
certains évènements climatiques, les experts d’EDF
pensent que ce risque est mésestimé, notamment
par la Commission européenne. Nous pensons que,
quand nous aurons eu une proportion beaucoup
plus importante d’énergies intermittentes, notre
système ouest-européen sera beaucoup plus
fragile, notamment en raison du mix énergétique
de nos voisins allemands. Il y a sept ou huit ans,
les services d’EDF ont montré que le système
électrique français est venu sauver le système
électrique allemand en 300 millisecondes.
Sur le sujet du nucléaire, nous avons en France
un grand programme électronucléaire qui a
permis d’acquérir une quasi-indépendance
énergétique, une sécurité d’approvisionnement, un
réseau robuste, bien géré, avec une remarquable
disponibilité du courant. Il nous a également
permis de créer une industrie électronucléaire, qui
est le troisième secteur industriel français, avec un
courant d’exportation, qui permet, notamment à
Areva, de servir des clients dans le monde entier.
Enfin, il nous a permis d’avoir des prix entre 30 et
85 % moins cher que nos voisins, à consommation
identique. EDF a le devoir de préserver cet acquis
et de faire en sorte que nous puissions continuer à
bénéficier de tous ces atouts. C’est pour cela qu’un
grand plan de restructuration a été mis en place :
recapitalisation d’AREVA et d’EDF, renforcements
des fonds propres d’EDF, reprise de l’activité
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réacteurs d’Areva dans une filiale d’EDF qui
permettra un pilotage unique de l’activité réacteurs.
Nous faisons tout pour aller, d’étape en étape,
vers la construction d’EPR optimisés pour le parc
français, mis en service entre 2030 et 2050. Cela
passe par la continuité de l’effort de reconstruction,
ainsi que par la construction à Hinkley Point en
Grande-Bretagne, de deux EPR, qui permettront
d’assurer la viabilité économique, la soudure en
matière de plan de charge, et une bonne rentabilité
pour EDF. Nous avons la responsabilité de faire
en sorte que nous ne nous retrouvions pas, dans
une génération, avec une électricité beaucoup
plus chère et qui dépendra, comme chez nos
voisins, des importations de gaz.
L
’acceptabilité des évolutions
De la salle (Joseph FOURNIER, Vice-Président du
Syndicat mixte d’électricité du Var)
Pour avoir connu une époque de présence sur
le terrain, de contact humain, j’ai bien peur que
demain, toutes ces évolutions fassent que tout ce
qui était la base d’un service public au service de
la nation et au service du public surtout, perde un
peu de ces réalités dans les mots. Quels sont les
enseignements que vous pouvez nous dire pour
demain, pour faire en sorte que ces évolutions
soient acceptées et partagées réciproquement ?
Jean-Bernard LEVY
Nous sommes très désireux de garder une forte
implantation dans les territoires. A l’ère du
numérique, cela veut dire mener avec vous des
actions de partenariat, parce que seul l’ancrage
territorial partenarial nous permettra de construire
des solutions proches de vous, quand les
technologies s’imposent à nous. Nous sommes
dans un monde de concurrence dans tous les
domaines, nous n’avons plus de monopole sur rien.
L’efficacité, les technologies, le numérique, nous
obligent à utiliser des moyens qui peuvent paraître
comme moins humanisés, ce que nous pouvons
contrecarrer en menant ces partenariats. Nous
devons arriver à faire cohabiter un système très
standardisé, tourné vers l’efficacité intrinsèque,
avec un système sur mesure, à l’écoute, dans lequel
la dimension humaine jouera tout son rôle. C’est
un défi pour une entreprise comme EDF, et pour
d’autres : banques, assurances… Nos collègues
d’Orange, par exemple, une entreprise de réseaux
d’une certaine façon, doivent faire cohabiter ces
deux dimensions. Nous nous inspirons d’ailleurs
les uns des autres. C’est un défi d’entreprise, très
ambitieux, mais aussi indispensable.
L
es syndicats d’énergies, acteurs
indispensables
De la salle (Ladislas PONIATOWSKI, Sénateur de
l’Eure, Président du Syndicat de l’électricité et du gaz
de l’Eure – SIEGE)
Plus qu’une question, c’est un message que je vais
adresser à mes collègues. La loi sur la transition
énergétique donne des pouvoirs importants en
matière énergétique aux régions. Si elles ont une
compétence très large, elles n’ont pas les hommes,
et elles ne savent pas quoi en faire. Il est très
important que nous, Présidentes et Présidents
des syndicats d’énergie, nous proposions à notre
président de région d’être des partenaires pour
l’aider à mettre en oeuvre cette compétence. La loi
donne aussi des compétences aux établissements
publics de coopération intercommunale (EPCI)6,
notamment pour le plan climat, et nous pouvons
être de bons acteurs pour les aider à le réaliser.
Mais elle nous donne une compétence importante
en matière de production d’électricité. Nous
devons saisir cette opportunité. Beaucoup de gens
considèrent que nous ne servons à rien, et d’autres
– y compris à EDF – pensent qu’ils pourraient faire
les choses beaucoup mieux que certains syndicats
d’électricité. Il est donc important que nous
nous rendions indispensables, et nous pouvons
l’être en devenant des producteurs d’électricité.
Nous pouvons devenir de très bons acteurs en
matière de production, notamment dans l’éolien,
le photovoltaïque, la biomasse, la valorisation des
déchets, l’hydroélectricité, la petite hydraulique.
Nous pouvons être maîtres d’œuvre, nous pouvons
faire de la maîtrise d’ouvrage partagée, nous
pouvons être maître d’ouvrage, nous pouvons être
associés dans des sociétés d’économie mixte. Si
vous voulez que les syndicats d’électricité continuent
à être de bons partenaires d’Enedis et d’EDF. Nous
avons tout intérêt à porter des projets ensemble.
Jean-Bernard LEVY
Je ne vais rien ajouter à ce que le sénateur
PONIATOWSKI : je suis 100% d’accord avec ce qu’il
a dit.
6- Structure administrative française regroupant des communes ayant choisi de développer plusieurs compétences en commun.
6
L
a question de l’énergie
hydraulique
De la salle (François FORTASSIN, Président du
Syndicat départemental d’énergie des Hautes
Pyrénées, sénateur des Hautes Pyrénées)
Quelle est votre position sur le problème de l’énergie hydraulique ? Avez-vous dans vos projets
de continuer à exploiter, ou de relancer l’hydroélectricité ?
Jean-Bernard LEVY
L’hydroélectricité est la première des énergies
renouvelables. C’est une partie importante de
notre patrimoine, de nos implantations territoriales et de notre rôle au bénéfice de la collectivité.
Nous pouvons stocker l’eau et l’utiliser à notre
guise, à travers les barrages que nous exploitons
avec un grand savoir-faire dans l’équilibre national
et la conduite des opérations pour optimiser la
valeur de l’eau. Je suis particulièrement attentif –
notamment vis-à-vis de la commission de Bruxelles
– à toutes les menaces qui pèsent sur ce modèle,
et je souhaite un programme de renforcement des
moyens de production hydraulique. Certains projets
sont en cours, et nous aimerions en lancer d’autres,
de grande envergure.
que les phénomènes de substitutions seront un
peu supérieurs aux phénomènes d’optimisation
de la maitrise de l’énergie. Mais tous les économistes montrent que la productivité s’est
améliorée en matière de production et de
consommation.
Xavier PINTAT
Monsieur le Président, au nom de tous les
auditeurs, je tenais à vous remercier pour vos
propos très riches et la clarté dans les réponses
aux questions. Si vous avez dépassé le million
de compteurs Linky, nous avons, nous, dépassé
les 1600 participants au congrès ! Merci de votre
présence.
V
ers une baisse des prix ?
De la salle (François AUMONIER, membre du bureau
du Syndicat départemental d’électricité de la HauteGaronne)
Peut-on, avec toutes les innovations, espérer
aussi la réduction des besoins de production et la
diminution du coût de l’électricité ? Linky, qui va
entraîner une meilleure facturation de la quantité
d’électricité consommée, va-t-il faire baisser le
prix de l’électricité ?
Jean-Bernard LEVY
Les prix sont formés par les coûts directs, la
contribution au service public de l’électricité
(CSPE), les taxes, les coûts régulés et dérégulés.
Premièrement, la meilleure gestion de nos
consommations collectives permet de conserver
une croissance de l’électricité inférieure à la
croissance du Produit intérieur brut (PIB). A
l’inverse, la substitution à prévoir entre énergies
fossiles et énergie électrique décarbonée
entraînera une croissance de l’électricité et donc,
à notre avis, une légère augmentation, parce
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CONGRÈS 2016
Du 21 au 23 juin
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Intelligences territoriales
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