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PRÉPARATION
m Tenir compte de la question
• Les termes mêmes de la question suggèrent déjà un plan de réponse :
– « efficacité / spectaculaire » vous invitent à vous interroger sur l’effet
produit par ce dialogue lors de la représentation, sur ce qu’on appelle la
« théâtralité » d’une scène ;
– « fonctions » signifie que vous devez vous demander : « À quoi sert cette
scène ? Quelles sont les buts de l’auteur ? ».
• Vos titres d’axes doivent tenir compte de ces termes et, mieux encore,
comporter l’un d’eux.
Pour bien réussir l’oral : voir guide méthodologique.
Le théâtre : voir lexique des notions.
m Trouver les idées directrices
• Utilisez les pistes que vous ouvre la question, mais composez aussi la
« définition » du texte (voir guide méthodologique).
Scène de tragédie moderne (genre), qui raconte (type de texte) les retrouvailles entre une sœur (Électre) et un frère (Oreste) et la « recréation » de ce
dernier par sa sœur (thèmes), lyrique (registre), spectaculaire, émouvante,
pour peindre le personnage d’Électre et annoncer la suite de la pièce (but).
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m Première piste : une scène « spectaculaire »
• Demandez-vous ce qui, dans le texte, suggère une mise en scène, quels
éléments touchent le spectateur : gestes, mouvements, progression…
• Identifiez le registre de la scène et analysez-en les indices.
• Qu’est-ce qui donne son intensité dramatique à la scène ?
m Deuxième piste : le portrait d’Électre (fonction psychologique)
• Analysez les différentes facettes du personnage d’Électre et ses rapports
avec les autres personnages, présents et absents.
• Analysez son rôle dans la scène.
m Troisième piste : le rôle symbolique de la scène (fonction dramatique)
• Étudiez les différents sentiments qui animent Électre.
• Quel est le rôle d’Oreste dans la scène ?
• Quelle importance cette scène prend-elle dans l’action ?
PRÉSENTATION (PLAN DÉTAILLÉ)
Introduction
Amorce : à l’époque inquiète de l’entre-deux-guerres, reprise fréquente,
dans la littérature de mythes anciens pour rendre compte de l’angoisse de
l’homme dans des temps troublés : Giraudoux réécrit le célèbre mythe tragique grec d’Électre (1937).
Mise en situation du texte : appartenance à la famille maudite des Atrides ;
Agamemnon, père d’Électre et d’Oreste, a été assassiné par sa femme Clytemnestre et son amant Égisthe, vingt ans avant que ne commence
l’action ; Électre a nourri une haine profonde pour sa mère. Acte I, scène 8 :
retrouvailles d’Électre et de son frère Oreste après vingt ans de séparation.
Annonce des axes : 1. Une scène lyrique qui prend l’allure d’une cérémonie
très théâtrale : celle de la renaissance d’Oreste, enfanté par sa sœur Électre.
2. Une scène qui dessine le portrait d’Électre, personnage hybride.
3. Une scène qui dépeint ses relations ambiguës avec son frère et sa mère,
et annonce la suite de la pièce.
I. Le lyrisme et la théâtralité d’une scène spectaculaire
1. Les gestes : une « cérémonie » à jouer et à voir
a. Une « cérémonie » en gestes…
• Pas de didascalies mais les répliques suggèrent la gestuelle et donnent
des indications d’interprétation :
– verbes et mots suggérant les gestes : « baisse les yeux », « caresse »,
« forme », « modelage », mouvements de la « main » qui façonne, « faire »
(répété), « je […] cloue », « tu me repousses », « dégagent » ;
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– présentatifs et démonstratifs : « voilà » qui suggère des jeux de scène :
« ce [corps] » ;
– « quelle réussite, ces oreilles » suggère un mouvement d’éloignement pour
observer l’ouvrage ;
– « tais-toi » : main sur la bouche.
• Le présent marque une action qui se déroule.
b. … dont Électre est la prêtresse
• Omniprésence du je, à la fin sous sa forme tonique « moi » (« prends de
moi… ») : Électre mène le jeu.
• Beaucoup de verbes d’action : « je t’appelle à la vie » ; « je forme mon
frère ».
• C’est elle qui dicte le rituel et le commente (présentatif répété « voilà »).
• C’est elle qui montre à tous : adjectifs démonstratifs « ce », « ces »…
c. … et qui retrace les étapes d’une naissance
• Électre se conduit comme Pygmalion (sculpteur mythologique amoureux
de sa statue, Galatée, laquelle prend vie et devient sa femme) : Oreste se
transforme en une statue qu’elle modèle et qui prend vie sous les yeux du
spectateur.
• Sont suggérées les différentes phases de cette naissance : de l’informe au
moindre détail, au souffle de vie (juxtaposition de phrases courtes).
• Mise en relief de certains détails (mains, bouche, oreilles, poitrine…).
2. La parole : un chant incantatoire lyrique
a. Un chant lyrique qui accompagne le rituel magique
• « Ô » : interjection d’invocation, du langage de la tragédie ou de la prière.
• Vers blancs : « Voilà que j’ai fait la poitrine de mon frère », « Un dernier
modelage, et l’oreille est finie », « Prends de moi ta vie, Oreste, et non de ta
mère » (alexandrins).
• Anaphores qui créent un rythme ample (« je », « voilà »).
• Groupes ternaires, marques de l’émotion : « le regard, la voix, la vie ».
• Répétitions, comme des leitmotive : « pourquoi hais-tu », « retrouver »
(3 fois), « aveugle », « frère », « fragments », « Oreste », « mon frère »…
• Des images poétiques :
– comparaisons : « comme le soleil », « comme l’aile de la chauve-souris » ;
– métaphores : « me blessent », « une brute d’or », « cloue ».
→ Incantation magique, au souffle ample, qui accompagne le rite.
b. Un mélange de sentiments intenses et contradictoires
• Joie extatique :
– 1re personne qui place Électre au centre de ces sentiments intenses ;
– vocabulaire : « bonheur », « joie » ;
– exclamations (« Ô », « Voilà que », « Quelle »…) ;
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– points de suspension qui montrent l’absence de mots pour rendre l’intensité des sentiments.
• Souffrance : les retrouvailles sont douloureuses :
– champ lexical de la douleur : Oreste : « tu m’étouffes » ; Électre :
« m’atteignent trop durement, me blessent » ;
– impression de choc trop violent : « éblouissement », « soleil », « brute d’or ».
→ Tout cela rappelle la tragédie antique.
II. Électre, un personnage hybride : sœur, mère, amante…
1. Une sœur dominatrice et possessive
a. Déséquilibre de la parole
• Électre monopolise la parole ; le dialogue tourne au monologue : longueur
de ses tirades, face aux courtes répliques d’Oreste ; 1re personne dominante.
• Elle refuse à Oreste ce qui fait exister : la parole (elle ne lui demande pas
d’informations sur son passé, alors qu’il a « tout à [lui] dire »).
b. Autorité : elle est celle qui défend et qui donne des ordres
• Elle multiplie les impératifs : « tais-toi », « baisse les yeux » (brièveté des
phrases → d’autant plus impérieuses).
• Elle multiplie les défenses (ordres négatifs) : « ne me parle pas d’elle ».
• Elle le contredit sans cesse : « je ne t’étouffe pas », « je ne te tue pas ».
c. Elle l’empêche d’exister
• Elle lui ôte non seulement la parole, mais aussi le « regard » (2 fois), à
travers lequel s’expriment les sentiments : « baisse les yeux ».
• Elle souhaiterait qu’il soit « dans [le] sommeil », sorte de privation de vie.
• Elle l’exclut de la scène : après la 2e personne du singulier (« tu »), elle
parle de lui comme s’il était absent (3 e personne du singulier). Alors qu’elle
l’a fait renaître, elle lui enlève l’existence.
• Appropriation forte de son frère : « mon frère » (adjectif possessif).
• Sa force dominatrice se marque physiquement, dans ses conséquences :
« Tu m’étouffes », comme si elle l’empêchait d’exister.
• Oreste sert de repoussoir à Électre : même s’il ne comprend pas la haine
de sa sœur, il la laisse parler → désir de compréhension (« Pourquoi haistu », question répétée deux fois) et de faire partager le passé (« J’ai tout à
te dire »).
• Passivité d’Oreste : physiquement suggérée. Sa phrase interrompue. Oreste
se sent sous la domination d’Électre. Il le dit lui-même : « Tu m’étouffes ».
2. Le comportement d’une mère et l’enfantement
a. Les gestes d’une mère
Elle le « caresse », elle évoque le « sommeil », elle le « touche ».
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b. L’enfantement
• Champ lexical de la vie : « la vie », « peu à peu vivante », « t’appelle à la
vie », « donner vie », « anime », « prends de moi ta vie », « palpitante ».
• Verbe faire dans son sens premier : « créer ».
• Création progressive : de l’informe (« masse fraternelle ») au détail le plus
élaboré (« main, pouce ») et au souffle de vie (« se gonfle », « expire »).
3. Presque une amante ?
• Une sorte de déclaration amoureuse : force de « retrouver à la fois le
regard, la voix […] d’Oreste, je n’en puis plus » ; métaphores de
« éblouissement » et « soleil, une brute d’or à son lever » (rappellent les
« feux » de l’amour) ; omniprésence de l’être aimé : « tout est Oreste ! »
• Le comportement d’une amante : « caresse », « [mes mains] touchent… »,
force du désir physique. Elle s’approprie le corps d’Oreste.
• Glorification de l’être aimé : par comparaison avec les autres, dévalorisés
(« l’ignoble », le « médiocre », « des fragments suspects », « faux ») ; par les
hyperboles et les termes laudatifs (« tout est vrai », « tout est fraternel »).
Oreste devient l’être idéal qui investit tout l’esprit et le monde.
• Allusion à un coup de foudre : « voilà que » ; « par un merveilleux hasard ».
4. Une artiste ? La dimension esthétique de la création
• La création naît de l’imagination : « Imaginons une minute ».
• L’œuvre d’art est source de « bonheur » (« pour notre bonheur »).
• La métaphore de l’éblouissement : une image de l’inspiration de l’artiste ?
• La progression de la création : le talent et la technique de l’artiste, la
nécessité d’une pratique (« que je m’entraîne… » ).
• Allusion à la sculpture : « forme », « mes mains », « insérés […] fragments »,
« masse », « je forme », « modelage », « je la cloue ».
• La souffrance inhérente à la création artistique : « trop durement ».
• Elle crée la beauté : « [son] beau [pouce] si net », « ourlée », « diaphane » ;
idée de perfection jusque dans le détail.
• C’est une création qui, bien qu’artificielle (et non réelle), fait jaillir le
« vrai » (« où tout est vrai ») : l’artifice plus vrai que la réalité.
III. Des sentiments contradictoires et assez troubles :
une scène symbolique
1. La haine pour la mère
• Haine pour la mère :
– champ lexical de la haine associé à la mère ;
– négations ou mots négatifs : refus de la mère qui se marque dans le désir
de refaire ou d’imaginer le monde sans elle (« sans ») ;
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– Oreste associé à cette haine : 1re personne du pluriel : « Imaginons ».
• Désir d’élimination : elle considère sa mère comme une rivale. Elle anéantit
Clytemnestre par la parole et par le simulacre de cet enfantement : elle lui a
pris sa maternité.
• L’enfantement d’Oreste = renaissance d’Électre : la renaissance d’Oreste
permet à Électre de renaître elle-même et lui donne un statut (s’affirme par
le je). À la fin de l’extrait, elle est devenue mère à part entière : elle parle
comme une mère de « l’ingratitude des fils » (celle d’Oreste envers elle).
2. Entre amour et déception réprobatrice
• De l’amour à la réprobation : début de l’extrait : amour et tendresse ; puis
admiration : « Quelle réussite, ces oreilles ! » ; fin de l’extrait : indignation et
colère, séparation violente de sa création-enfant marquée par :
– les interrogations : « Qu’as-tu ? Tu me repousses ? » (brièveté et brusquerie) ;
– le passage à la 3e personne du pluriel (Oreste ravalé au rang des « fils »
ordinaires) ;
– un ton réprobateur (« voilà bien… ») et un mot péjoratif (« ingratitude »).
• Le refus de l’autonomie :
– en fait, Électre est en admiration devant sa création, mais considérée par
morceaux (« oreilles », « bouche… ») ;
– cependant, dès qu’il y a une rébellion ou la marque d’une personnalité,
d’une autonomie (Oreste pose une question et lui donne un ordre :
« Écoute ! »), elle ne le supporte pas, parce qu’elle pense qu’il lui échappe.
3. Oreste, instrument de vengeance :
les prémices de la vengeance
En réalité, Électre ne voit en Oreste que l’instrument parfait de sa future
vengeance : parties du corps élaborées = moyens d’assouvir sa soif de
vengeance : une main pour tuer ; une poitrine qui lui donnera le « souffle »
pour agir ; des « oreilles » pour écouter ses incitations à la vengeance ; une
« bouche » pour aimer ou pour maudire.
→ Rôle dramatique de la scène (importante dans l’action) : préparation du
crime.
Conclusion
Scène sans doute difficile à jouer si on veut lui donner toute sa dimension,
mais :
– efficace lors de la représentation grâce à sa théâtralité et à sa tension
lyrique ;
– importante psychologiquement ;
– importante dramatiquement : annonce le rôle d’Oreste et son crime (venge
le meurtre d’Agamemnon : annonce indirecte de la suite de la pièce).
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ENTRETIEN
Question
L’examinateur pourrait débuter l’entretien par la question suivante.
m Comment
le théâtre permet-il de persuader et d’émouvoir ?
• Il s’agit d’une question de cours.
• Mais il ne faut pas le « réciter » purement et simplement. Vous devez expliquer et alimenter chaque remarque d’exemples personnels qui l’illustrent.
Pour réussir l’entretien : voir guide méthodologique.
Le théâtre : voir lexique des notions.
L’entretien pourra se poursuivre dans diverses directions, par
exemple :
m Avez-vous assisté à des représentations théâtrales ? Lesquelles ?
m Comment mettriez-vous en scène cette scène d’Électre ?
m Pour vous, qu’est-ce qu’un bon acteur ?
m Un metteur en scène a-t-il le droit de moderniser et de transposer une
pièce dans une époque différente ?
Pistes pour répondre à la première question
I. Le théâtre, un genre « à histoires » : une « histoire »
qui émeut et captive mais en même temps a valeur d’exemple
1. Une action en direct.
2. Une intrigue qui « court », surprend et entraîne l’adhésion du spectateur.
3. Mais, sans être la vie, c’est bien un peu la vie sous toutes les couleurs.
II. Des personnages accessibles et émouvants :
si différents, mais si proches de nous…
1. Des personnages simplifiés et passionnés auxquels on s’attache et
s’identifie, ou bien qu’on déteste.
2. Des personnages symboliques au langage stylisé.
III. Le spectacle : magie incantatoire, force de l’illusion
et de l’incarnation ; un art vivant
1. Éléments matériels, la mise en scène entraîne l’adhésion physique et
affective.
2. Des êtres en chair et en os, une histoire incarnée.
3. Présence du public, personnage collectif ; position privilégiée du
spectateur.
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