Fiche n°14

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Fiche n°14
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MEMENTO AQUITAIN DU BOIS ÉNERGIE
UN ENJEU STRATÉGIQUE
DES CIRCUITS COURTS POUR REGROUPER L’OFFRE
Les acteurs du bois énergie insistent sur la nécessité de mettre en place des circuits courts, pour des
raisons environnementales et surtout économiques. À eux de trouver la bonne formule juridique pour y
arriver dans les meilleures conditions.
Les regroupements associent tous les acteurs d’un territoire autour
d’idées fortes : limiter le rayon d’approvisionnement, favoriser les
économies d’échelle en évitant que la taille des chantiers ne pénalise des
coûts de mobilisation et massifier les lots offerts à la vente pour obtenir
une meilleure valorisation pour le propriétaire.
Dans une Aquitaine où la propriété forestière est différemment morcelée
selon les massifs, le regroupement de l’offre est un enjeu stratégique si
l’on veut que le bois mobilisé à des fins énergétiques soit concurrentiel
par rapport aux énergies fossiles et aux besoins des énergéticiens.
UNE PALETTE DE FORMULES DE REGROUPEMENT
Les propriétaires forestiers privés sont familiers de certaines formules
de regroupement économique, par exemple de lots de bois mis en vente
par l’intermédiaire d’un organisme regroupant des propriétaires forestiers
adhérents. Il en existe d’autres.
• Les organismes de gestion en commun (OGEC) mettent en commun des
moyens humains et matériels au service de la mise en valeur des forêts
de leurs adhérents. C’est le cas des coopératives : elles commercialisent
les bois des adhérents, réalisent leurs plans simples de gestion ont
une compétence de maîtrise d’œuvre (reboisement, desserte, travaux
sylvicoles etc.).
• Les associations syndicales libres (ASL) regroupent exclusivement des
propriétaires fonciers (personnes physiques ou morales, de droit privé
ou de droit public) pour réaliser des interventions collectives. Outre la
compétence de maîtrise d’ouvrage, cette formule n’implique aucun
transfert de propriété et elle est stable dans la mesure où, en cas de
vente ou succession, le nouveau propriétaire est automatiquement
membre de l’association. Les ASL se caractérisent par leur grande
souplesse.
• Les groupements forestiers (GF) dont il existe plusieurs formes sont
propriétaires du foncier : leurs membres sont porteurs de parts sociales.
Le GF peut assurer l’exploitation des bois issus de ses propres parcelles
et disposer du personnel nécessaire à la gestion, à l’exploitation, jusqu’à
la première transformation.
• Les groupements fonciers ruraux (GFR) et sociétés civiles immobilières
(SCI). Le groupement foncier rural est une formule mixte adaptée aux
domaines ruraux comprenant des parcelles forestières et des terrains
agricoles. Quant aux sociétés civiles immobilières, elles sont tout à fait
habilitées à gérer les massifs forestiers qu’elles possèdent.
•
Les entrepreneurs de travaux forestiers sont des prestataires de
services. Certains ETF ont diversifié leurs activités vers de la gestion
forestière et/ou de la vente de bois de chauffage.
• Les experts forestiers ont des compétences qui vont bien au-delà de la
seule technique. À ce titre, ils sont des spécialistes capables de gérer la
globalité d’un patrimoine forestier.
•
Le «gestionnaire forestier professionnel» (GFP) qualifie certains
professionnels qui travaillent en forêt (loi de modernisation de
l’agriculture du 27 juillet 2010).
DES EXEMPLES DE REGROUPEMENT
Le programme AFO (Activating Forest Owners) a fait un état des lieux des
regroupements pour mettre en place des approvisionnements en filière
courte.
• L’ASL des Propriétaires Sylviculteurs du Pays de Born (40) rassemble
une centaine de propriétaires forestiers des alentours de Parentisen- Born. Elle approvisionne notamment la CECA pour la production
de charbon actif et souhaite développer son activité bois-énergie (cf.
interview de Philippe Dassié, président. Fiche 14).
• La SEM Fumel Énergie Durable (47) rassemble la communauté de
communes du Pays du Fumelois, un scieur/parqueteur (Castagné) et
un exploitant forestier (Marès) dans une structure juridique associant
des partenaires publics et privés. Elle gère une plateforme bois-énergie
qui valorise principalement des taillis dépérissants de châtaigniers (cf.
interview de Bernard Mares, exploitant forestier et gestionnaire de forêt.
Fiche 14).
• La SCIC Landes Bois Énergie (40) rassemble des acteurs de l’ensemble
de la filière bois-énergie pour proposer de la chaleur «clé-en-main».
Après avoir coordonné la vente de chaleur auprès de la commune de
Mézos, Landes Bois Énergie souhaite étendre son activité (cf. interview
de Bertrand Ardilouze, sylviculteur, co-fondateur et administrateur de la
SCIC Landes Bois Énergie. Fiche 2).
POUR EN SAVOIR PLUS…
LES DIFFÉRENTS TYPES DE REGROUPEMENTS POUR UN CIRCUIT COURT
http://www.crpfaquitaine.fr/docs/files/Bois-Energie/Synth%C3%A8se_14_regroupements_circuit_court_v_2013_10_16.pdf
Fiche 14
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MEMENTO AQUITAIN DU BOIS ÉNERGIE
BERNARD MARES
Exploitant forestier et gestionnaire de forêt
«Le nerf de la guerre, c’est d’abord de chercher les débouchés»
COMMENT EST ORGANISÉ VOTRE CIRCUIT
D’APPROVISIONNEMENT ?
• Nous faisons partie d’une SEM (société d’économie mixte) avec un
autre partenaire privé, les Ets Castagné & Fils (Villefranche du Périgord)
et la Communauté de communes du Fumélois1 qui avait monté un
projet de plateforme bois énergie, à Blanquefort-sur-Briolance (canton
de Fumel, Lot-et-Garonne). Il s’agit d’une plateforme fixe, implantée
à côté de la scierie Castagné. Le projet date de 2007, il a abouti en
2010 et fonctionne depuis 2011. En parallèle de l’installation de cette
plateforme, les communes avaient prévu de monter des chaudières.
Mais la plateforme a été prête avant cela. Le nerf de la guerre, c’est
d’abord de chercher les débouchés. Heureusement, nous avons pu
nous tourner vers un serriste de Villeneuve sur Lot qui utilisait de la
sciure affinée injectée dans la chaudière. Il fallait donc un produit très
fin. D’où l’obligation de calibrer la plaquette pour obtenir du 0.20.
POURQUOI UNE PLATEFORME FIXE ?
• Nous avons été les premiers à partir sur une plateforme fixe, parce
que sur cette zone, le parcellaire est trop petit, trop morcelé. C’est plus
simple de tout amener par camion sur la plateforme. On broie, on tamise
et on met sous hangar de stockage. Nous produisons surtout du 0.20
et du 0.50. Le châtaignier sec (des taillis dépérissants) représente 60%
de notre approvisionnement, que l’on conserve pour l’hiver. Les dosses
de scierie sont stockées jusqu’à l’été, puis broyées et mises sous abri.
Et nous avons un stockage de 1600 m3 dédié à notre client serriste.
Hangar de séchage de plaquette forestière (SEM Lot-et-Garonne).
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1 - Aujourd’hui Fumel Communauté.
Broyeur à plaquette fixe (SEM Lot-et-Garonne).
COMMENT AVEZ-VOUS DÉVELOPPÉ
VOTRE CLIENTÈLE ?
• Nous avons prospecté : en Lot-et-Garonne, l’hôpital de Fumel l’an dernier,
le collège de Monflanquin il y a deux ans ; en Dordogne, nous avons
répondu à un appel d’offres public ; dans le Lot une maison de retraite à
Prayssac. Notre atout, c’est la proximité : pour l’approvisionnement, sur
le Nord du Lot-et-Garonne et le Sud de la Dordogne, dans un rayon de 40
km maximum. Pour la fourniture, on tourne aussi sur du local, dans un
rayon maximal de 50 km. Nous recherchons surtout la petite chaudière,
de 75 à 400 KWh, exigeante en taux d’humidité et demandeuse d’un
produit calibré, fin, très sec.
QUELLE EST LA VIABILITÉ ÉCONOMIQUE DU
PROJET ?
• Ce n’est pas rémunérateur pour l’instant pour deux raisons : pour
arriver à l’équilibre, nous avions tablé sur 5 000 tonnes. Un projet de
piscine chauffée à Villeneuve-sur-Lot nous y amènerait. Nous avions
commencé en 2011 avec 1200 tonnes, puis 3000 en 2012. Nous
savions que nous aurions trois années difficiles à passer. L’autre raison,
c’est le prix. Même si notre produit est de qualité reconnue, vendu de 60
à 70 euros départ plateforme à 20% d’humidité, ce n’est pas suffisant
pour dégager une marge correcte.
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MEMENTO AQUITAIN DU BOIS ÉNERGIE
PHILIPPE DASSIÉ
Sylviculteur, président d’une ASL1
«Compétitivité et transparence totale»
APRÈS 4 ANS D’ACTIVITÉ, OÙ EN EST VOTRE ASL ?
• Nous avons démarré tout seuls, sans subvention ni appuis. Au contraire.
Aujourd’hui, notre association, gérée par des bénévoles, compte 110
membres, beaucoup de propriétaires des communes de Parentis en
Born et Biscarrosse.
Elle exerce donc son activité depuis 4 ans : après 3 années de bois
tempête et de bois scolytés, nous continuons avec l’exploitation de
petits bois et l’éclaircissage.
Dans le cadre de l’ASL, nous avons exploité 35 000 tonnes en 3 ans.
ET LE BOIS ÉNERGIE DANS TOUT CELA ?
• C’est un débouché qui s’ouvre mais nous en sommes encore très
loin. En bois énergie, nous avons discuté le prix et les débouchés, en
particulier avec DRT.
Nous avons une masse importante de souches à expédier. Nous savons
livrer du bois en billons, nous sommes prêts à continuer avec de la
plaquette.
COMMENT VOUS ORGANISEZ-VOUS ?
• Nous faisons appel à des ETF, un abatteur et un débardeur ainsi qu’à des
transporteurs, avec qui nous travaillons régulièrement. Et un géomètre
fait le suivi technique des chantiers.
Nous n’avons pas de personnel, la gestion est assurée bénévolement,
ce qui nous permet d’être compétitifs et d’avoir une transparence totale
sur les produits et sur le coût.
Stockage bord de route souches.
SI ON PARLE PRIX ?
• Pour moi, bois d’industrie ou bois énergie, c’est la même chose et les
prix doivent être, au minimum, les mêmes.
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1 - Association Syndicale Libre.
CRPF AQUITAINE 2015. CRÉDIT PHOTO : CRPF AQUITAINE.
COMMENT EST NÉE L’ASL QUE VOUS PRÉSIDEZ ?
• J’ai créée cette ASL à Parentis en Born (Landes) avec un ami directeur
d’une ASA de DFCI locale, fin 2009, après avoir constaté que les
parcelles de jeunes bois étaient difficiles à faire nettoyer et surtout que
les prix de vente des bois étaient très bas.
Nous sommes allés voir l’industriel local, CECA , spécialiste des charbons
actifs, pour lui proposer de lui vendre directement nos produits. CECA
accepté de nous entrouvrir la porte. Il a fallu très vite mettre en place
une chaîne logistique pour nettoyer les parcelles. Le succès a été très
rapide.
Selon nos calculs, cela a permis de dégager, net propriétaire, 4 euros,
au lieu de 0,50.