Août 2010-Voyage en Catalogne et session de français.

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Août 2010-Voyage en Catalogne et session de français.
LES NOUVELLES DE TAYBEH
Août 2010
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Voyage en Catalogne
Six jeunes du diocèse de Barcelone sont venus cette année fêter Pâques à Taybeh, passant la
Semaine sainte dans des familles. Et ce sont cinq jeunes de Taybeh qui sont partis du 28 juillet au
13 aout à leur tour, accueillis par le diocèse de Barcelone et le Comite interdiocésain de
Catalogne. Deux semaines de partage et de témoignage avec la jeunesse catalane catholique, avec
de nombreuses conférences sur la vie des chrétiens en Palestine occupée, témoignage qui a
beaucoup touché le cardinal Sistach, archevêque de Barcelone, et relayé par la presse locale –
dont le journal Catalogne chrétienne. Les jeunes Taybaouis ont aussi passé cinq jours sur le
chemin de Compostelle avec cinq cent jeunes Catalans. Ces échanges devraient se poursuivre,
avec la venue de six autres jeunes de Catalogne à Taybeh pour les fêtes de la Nativité.
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La session de français
La 10e ! Pour fêter ça, la session ludique de français ludique ne pouvait qu’avoir un thème…
ludique : LE FESTIVAL DES JEUX ! Dès mercredi 28 juillet, les premiers animateurs arrivent. Le
samedi 31, le Père Jean-Louis Eckert, assomptionniste et conseiller aux affaires religieuses du
Consul General de Jérusalem, emmène l’équipe pour la journée dans une belle visite guidée de
Jérusalem. Dimanche 1er aout, le Consul General de France a Jérusalem, le bien-nomme Frédéric
Desagneaux, en fonction depuis un an, vient faire a l’occasion de la session de français sa
première visite a Taybeh, en compagnie de Chantal Juge du SCAC et du Père Jean-Louis Eckert.
Tout d’abord, un grand échange se fait entre les animateurs de la session et le Consul General,
autour de la présence et de l’action de la France en Terre Sainte et notamment sa mission auprès
des Palestiniens dont il a la charge – et l’on voit le représentant de la République laïque exposer
la vocation spécifique de la France, héritée de la monarchie (notamment des Capitulations de
1535), comme protectrice des Lieux saints et des communautés chrétiennes de Terre Sainte.
Abouna Raed Abusahlia, curé latin de Taybeh, se joint a la discussion, ainsi que Monseigneur
Michel Sabbah, Patriarche latin émérite de Jérusalem, qui vient nous honorer de sa présence et
nous éclairer de ses lumières. L’échange se poursuit autour d’une bonne table pour un grand
déjeuner amical. Ensuite, première grande réunion générale des animateurs pour préparer la
session, où l’on admire le travail préparatoire et le génie pédagogique de Sœur Claudine.
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Lundi 2 aout, démarrage de la session de français de Taybeh ! A 9 heures du matin, 80 enfants de
l’école latine de Taybeh, issus du village ou des villages environnants (Deir Jareer, Silwad, Kufr
Malik…) se réunissant dans le grand « qaa », la salle de spectacles de l’école. Comme tous les
matins, on commence par des chants : Alouette, gentille alouette ou encore Vent frais, vent du
matin, histoire de réveiller l’assemblée. La quinzaine de jeunes animateurs venus de France,
arrivée ces derniers jours, a eu le temps de tout préparer avec les Sœurs de la Sainte Croix de
Jérusalem et les renforts locaux : les volontaires DCC de Taybeh ainsi que des jeunes
francophones du village comme Fouad, qui a 19 ans fait sa 10e session de français, mais du côté
des animateurs cette fois, ou encore Amer, Taybaoui, séminariste a Verdun et ordonné diacre en
juin dernier. Sœur Claudine mène le bal : après les chants et la mise en place des dix équipes
(sur le thème des couleurs : Famille Legris, Laverdure, Soleil, Rose, Bleuet, etc.), on commence a
9 heures et demie par une heure de lecture par niveau (du Petit Poucet a Une bouteille dans la
mer de Gaza en passant par Boucle d’Or, Tombé et le lion ou le Grain de riz…) et des
entrainements au DELF. Ensuite, après une récréation, le grand jeu du jour de 11 heures a 13
heures. Aujourd’hui, le Mille-Bornes ! Armés de leur permis de conduire, les enfants s’éparpillent
par équipes dans le village pour aller gagner des kilomètres, qui au zoo, qui au garage, qui au
marché, a la gare ou ailleurs, pour des jeux mêlant habilement exercices de français et gains de
points… Aya, 16 ans, de Deir Jareer : « Je suis fatiguée… Je me suis levée à 6 heures ce matin a
cause des moustiques ! » Ce qui ne l’empêche pas d’être une chef d’équipe très énergique !
Mickael, 17 ans, de Taybeh : « Aujourd’hui j’ai aidé Joséphine et Olivier, les animateurs français,
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au ‘garage’ : il fallait réparer la voiture, mettre de l’essence, etc. » Ibrahim, 12 ans, de Silwad :
« Nous sommes allés au cinéma, a l’hôpital, et ce soir nous revenons jouer… C’est la première fois
que je fais la session, je suis content ! » Il y a encore Valérie, une jeune Suisse de 13 ans qui s’initie
à l’arabe, participe a la session et vient passer deux semaines à Taybeh, accueillie dans la famille
d’Amanda et Ayrine. L’après-midi, relâche, tandis que les bénévoles déjeunent ensemble et
préparent la journée du lendemain. A 18 heures 30, les jeunes reviennent pour la veillée : on
s’échauffe encore par quelques chants (La cloche du vieux manoir…), jeux et mimes, puis a 19
heures les élèves qui sont partis 20 jours en France en juin avec Sœur Claudine racontent leur
voyage avec projection d’un diaporama : Un voyage a Paris, et nous voila tous partis, avec
Amanda, Morine, Mickael, Rawan et les autres, a Paris, a Lourdes et Toulouse, de la Tour Eiffel
a la grotte de Massabielle… De quoi mettre plein de rêves dans les yeux pour la nuit !
Mardi 3 aout. Les jeunes arrivent le matin a 9 heures, motives pour être a l’heure par la cage de
football individuelles qu’ils reçoivent, gagnant des ballons autocollants pour tous ceux qui sont
ponctuels (ou mieux encore : en avance !...). Les équipes ayant le plus de ballons gagneront
quelque chose… L’esprit de compétition ludique entre les équipes, dans la tradition de la
pédagogie scoute, est un vrai moteur d’émulation collective ! Résultats du Mille-Bornes d’hier :
c’est l’équipe Marron qui est en tête avec 1115 kilomètres, suivies par les familles Rouge avec 1090
km et Legris avec 1030 km – les autres n’ont pas franchi la barre des mille bornes… Comme
toujours, on commence par des chants : Dans la forêt lointaine on entend le coucou, ou le chant
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de la Fête des voisins qui aura lieu ce soir… Mais auparavant, atelier quotidien de lecture par
niveau, animés par les animateurs français et locaux : cette lecture suivie d’un récit complet,
soutenue, commentée, expliquée dans chaque groupe, est un type d’exercice très bénéfique que
l’on ne peut malheureusement guère faire en cours d’année scolaire. Et puis, le grand jeu de la
journée : avant de célébrer la fête des voisins, encore faut-il être… voisins ! Aussi c’est une version
adaptée du fameux Monopoly qui va être aujourd’hui disputée ! Les équipes a nouveau courent
de jeu en jeu a travers tout le village pour gagner des euros et acheter des maisons, chemin des
oliviers, rue des jasmins et ailleurs… Les négociations vont bon train et si par moment l’arabe
reprend le dessus dans le feu de l’action, ceux qui les mènent entièrement en français font
évidemment de meilleures affaires que les autres… Heureusement, des banques ambulantes dans
les rues du village permettent d’aller changer les chèques gagnés en espèces sonnantes et
trébuchantes. Si les enfants courent les rues, Flore aussi, harnachée de sa grosse camera sur pied,
qui fait un reportage de 26 minutes sur la session de français pour l’émission Ainsi soit-il
commandé par le Jour du Seigneur et diffusée par KTO. Quelle célébrité pour Taybeh ! « C’est sur
la session de français mais aussi sur la vie de ce village. La session est une bonne façon d’entrer
dans ce village particulier d’un pays particulier… » Chaque famille repart avec ses maisons, ses
pénates… et donc des voisins qui seront fêtés ce soir. Écoutons Morine, 16 ans, qui assiste les
animateurs, et sa sœur A’rine, 14 ans, de la famille Rouge. Morine : « Je me suis levée a 8 heures,
puis je suis venue a la session a 9 heures moins le quart, ça s’est fini a 1 heure 1heure et demie.
Nous avons marché dans les rues de Taybeh, nous avons joué acheter des maisons…» A’rine «
« Le nom du jeu c’était le Monopoly. On a acheté 5 maisons. C’était facile, mais il faisait très
chaud ! » Morine : « Le matin on lit Une bouteille dans la mer de Gaza. C’est sur les Juifs et les
Palestiniens… » A’rine : « Nous, on fait des exercices de DELF. C’est bien, mais c’est facile… »
Morine : « Oui, pour A’rine, c’est facile… » Mais en attendant, dans la chaleur montante, chacun
regagne sa vraie famille et sa vraie maison pour se reposer l’après-midi, en attendant la grande
fête de ce soir… Et les animateurs français, après un grand déjeuner en compagnie d’un groupe de
pèlerins du Burkina Faso aux belles tenues colorées, font leur réunion quotidienne de
préparation du lendemain. Marie-Noel : « Oui, Jésus est venu a Éphraïm, je l’ai lu dans le
journal… » Effectivement une dépêche AFP sur la convention internationale des expatriés de
Taybeh en juillet avait été diffusée dans l’ensemble de la presse française !... 18 heures 30, la Fête
des voisins commence ! Résultats du Monopoly : la famille Marron mène encore avec 300 000
euros, suivie de la famille Legris avec 310 000 euros. La chanson Ha bibi fait un tabac : « Tu es
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comme la lune dans la nuit, Tu es comme le soleil a midi, Tu as changé ma vie, Habibi ! » La
chanson des couleurs aussi : ce n’est pas du Rimbaud, mais presque ! C’est l’occasion de
présenter l’ensemble des équipes : familles Soleil, Laverdure, Legris, Rouge, Rose, Marron,
Bleuet, Leblanc, Orange et Laviolette. On croirait des patronymes de Canadiens français !
Quelques familles se présentent, ainsi Hilda, pour le coup père de famille des Soleil : « Je
m’appelle Georges, j’ai 50 ans, je suis chauffeur… » Aux jeux linguistiques se joignent des jeux
d’adresse, et les acrobaties et chutes (bénignes) des uns et des autres, avec grimaces appropriées,
font hurler le public de rire… Puis, comme c’est la fête des voisins, tous rejoignent sur le parvis de
l’église les jeunes scouts et guides italiens qui campent a Taybeh pour une soirée avec dabkeh,
danse traditionnelle palestinienne par les jeunes de la paroisse latine, mais aussi chants, danses
et jeux de veillée scoute, qui mêlent jeunes de Taybeh, de France et d’Italie… et de Suisse aussi –
tous voisins et surtout amis ! Valérie, 14 ans, du Tessin en Suisse, est venue ici pour dix jours. Ses
parents, qui connaissaient déjà Taybeh, sont venus dimanche la confier à la famille d’Amanda et
Ayrine pour cette semaine. Elle ira passer le week-end avec eux à Jérusalem avant de revenir
pour une autre semaine dans la famille de Luna. Elle s’est très vite intégrée avec ses nouvelles
amies, et toutes se promènent bras dessus bras dessous comme des camarades de toujours. Ne
serait sa blondeur de blé, on la penserait de Taybeh ! « J’aime beaucoup Amanda et Ayrine. Je
voulais apprendre l’arabe mais tout est en français à la session. Mais elles m’apprennent quelques
mots d’arabe à la maison… »
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Mercredi 4 aout. Ce matin, après l’habituel dérouillage vocal et linguistique et les ateliers de
lecture et de DELF, c’est la Triviale Poursuite, librement adaptée d’un célèbre jeu – mais là,
France oblige, les fameux camemberts sont de vraies boites de fromages… Fouad raconte : « On a
fait les camemberts, c’était drôle, on a fait beaucoup de questions, beaucoup de jeux, les jeunes
étaient contents mais les questions étaient difficiles. Tout le monde était choqué par le nom du
fromage Caprice des dieux : comment peut-on appeler un fromage comme ça ! Je crois que les
Babybels ont gagné mais on n’a pas encore les résultats… » Aya, plus volubile aujourd’hui : « Nous
avons fait un cours avec Charles : une histoire qui s’appelle Une bouteille dans la mer de Gaza.
C’est très bien, c’est une très jolie histoire. Ce sont des lettres entre une fille israélienne et un
garçon palestinien. On n’est encore qu’a la première lettre… Après on a mangé a la recréation,
puis nous avons joué a un grand jeu avec les fromages… - Vous avez mangé du fromage ? – Non
hamdulillah ! Je déteste le fromage ! » Amanda : « Il y avait des jeux pour les petits, pour les
moyens et pour les grands… On gagnait des fromages. Moi j’aime beaucoup le Babybel, la Vache
qui rit et le Kiri… mais je n’aime pas le roquefort ! » Salim : « C’est ma 6e session de français.
J’aime bien la musique en français. Ce serait mieux si tous les cours de français à l’école étaient
comme la session ! » Résultats des aventures fromagères : cette fois, ce sont les familles
Laverdure et Rouge qui ramassent la mise avec respectivement 11 et 10 fromages ! Le soir, Fête
des voisins numéro 2 ! On apprend la chanson Petit frère, puis a tue-tête Habibi qui fait toujours
fureur ! Une équipe de jeunes de Forbach, les Servants de Messe, donne aussi de la voix avec de
beaux chants chrétiens, français ou anglais : Oh happy days ! On saute au plafond avec le chant
du sport… Des jeux d’équipe et d’adresse alternent avec les bans et les appels au silence : un
lence, deux lence, trois lence, quatre lence, cinq lence, silence ! On continue sur le parvis de
l’église avec une veillée déchainée menée par les scouts italiens : Ils sont fous ces Romains !
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Jeudi 5 aout, 9 heures : on commence par du sport ! Gym tonique du matin en musique et en
français s’il vous plait ! On apprend de nouvelles chansons et sketches comiques, comme « un
drôle de restaurant »….. Puis concours cuisine ! Gâteau au chocolat ou sablés, selon les équipes,
où l’on s’initie au vocabulaire culinaire : beurrer le moule, verser dans une jatte (djat en arabe,
c’est facile !). Enfin, une fois le jeu terminé, les gâteaux démoulés et les biscuits dorés, on fête les
anniversaires de la session : Linda, Nagham, Clara et Zara : JOYEUX ANNIVERSAIRE ! Pas de
veillée le jeudi et vendredi, car c’est la saison des mariages… Mais les scouts italiens sont là quand
même pour organiser des jeux devant l’église ! Vendredi 6 aout. La chanson du fantôme, avec
Olivier dans le rôle éponyme, fait hurler de peur ou de rire les enfants ! Puis envolons-nous vers
l’Orient sur la Route des épices… Entendu : « Quand on a mal aux dents on mange un clou de
girafle et quand on a mal à la gorge on boit de la Camille.. »
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Lundi 9 aout. Après la relâche du week-end, plus fatiguant que reposante semble-t-il tant pour
les animateurs qui ont visite Naplouse et Hébron que pour les jeunes qui ont eu des mariages, la
reprise est difficile ce matin ! Mais tant bien que mal on se dérouille, avec force chants et
animations. Une nouvelle chanson : « J’entends le loup, le renard et la belette, j’entends le loup et
le renard chanter ! » « Moi, je n’entends rien », s’exclame Amer, animateur originaire de Taybeh.
Les résultats de la première mi-temps (comprendre première semaine) sont annoncés : en raison
de leur présence et ponctualité, l’équipe Rouge mène le match avec 33 buts talonnée de prés par
les Orange avec 30 ballons… Rawan, 17 ans : « Le matin, on lit Une bouteille dans la mer de Gaza.
Ca parle d’une fille israélienne qui n’aime pas les attentats palestiniens. La fille a l’idée de mettre
une lettre dans une bouteille dans la mer de Gaza. Dans Gaza il y a un garçon qui a reçu cette
bouteille et lu cette lettre, écrite en hébreu. Le garçon répond à la fille sur son adresse
électronique avec beaucoup d’humour » Décidément, un livre qui suscite, par son sujet, de fortes
réactions, enthousiastes ou non… « C’est bien la réponse du garçon ? – Pour moi oui, pour
Charles (l’animateur) non…, dit-elle en riant. Je n’aime pas du tout ce livre : parce que mon
opinion c’est que pour gagner votre liberté il faut faire des choses comme des attentats. On dit
qu’il y a des femmes et des enfants qui sont tués mais ce n’est rien a coté de tous les femmes et
enfants palestiniens morts… Chez nous on dit : œil pour œil… Mais Muhammad dit dans le
Coran : ne tuez pas les femmes, les enfants, les vieux, ne coupez pas les arbres, respectez les
hommes d’église, les mosquées… » Pour elle, qui prépare a la rentrée un baccalauréat scientifique,
l’école reprend demain : cours de soutien en mathématiques et physique, prérentrée… Fini la
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session ! Helena et Luna, 17 ans : « On a juste fait trois-quatre jours. On a aide les petits, on
emmène les équipes aux jeux. C’est notre neuvième session de français ! L’année prochaine
encore, peut-être… Le voyage ne France c’était vraiment très bien. On va passer le tawjiheh cette
année… - Vous voulez faire quoi après ? – Peut-être étudier pour être guide touristique,
répond Helena, et Luna : Je veux apprendre à dessiner des vêtements… » Mais en attendant,
grand voyage en francophonie au départ de l’aéroport international de Taybeh. Que l’on aille en
Belgique, en Suisse, au Liban, au Cameroun, au Canada ou encore au Maroc, il faut avant tout se
munir de passeports, de visas et de billets d’avion. Puis on se disperse par équipes dans tout le
village, pour prendre place dans l’avion, réaliser des exercices de sauvetage – notamment enfiler
un gilet gonflable (de fortune !)-, etc. Et il faut rafler les drapeaux, qui bientôt s’agitent à bout de
bras d’un bout à l’autre du village… Le soir, grande surprise : le bingo, et pas n’importe quel
bingo : le Franco Bingo ! Franco Dingo, pourrait-on dire, au vu des tenues bariolées des
animateurs, comme échappés d’un asile psychiatrique de bande dessinée : qui ressemble a
Fantasio qui jouerait dans Fantasia, qui promène un python en laisse, et autres extravagances
qui amusent la galerie… On joue, avec moult cris, rires, exclamations, dans un suspense constant,
jusqu'à épuisement des lots… Puis la moitie des animateurs part diner chez Christine et sa
famille…
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Mardi 10 aout. Ce matin, DELF blanc pour tous ceux qui auront à le passer l’an prochain : un
peu de piment dans l’indolence estivale ! Et puis, catastrophe ! Une maladie inconnue vient de
frapper le village ! Pour sauver les habitants, et enrayer l’épidémie qui pourrait menacer, qui sait,
le monde entier, il faut prendre des mesures efficaces, drastiques… D’inquiétantes équipes
médicales masquées et coiffées de gaze blanche se déploient… Les enfants doivent se mobiliser
pour contrer la pandémie ! Il faut trouver le vaccin, éliminer le virus ! Aller voir à la pharmacie les
médicaments disponibles, réviser l’anatomie humaine, élaborer une potion pour soigner les
malades, cibler le virus avec des anticorps, et affronter le délirant Dr Maboul !
Mercredi 11 aout. Résultats de la pandémie hier : la famille Laverdure obtient un résultat de 30
points, puis viennent Orange avec 27, Marron avec 26, Rouge avec 25… et ainsi de suite. Ce
matin, drame soudain et sanglant ! Alors que Laure-Marie s’apprête à faire entonner un chant
aux enfants, un agresseur masqué se précipite dans le grand qaa, se jette sur elle, lui tord le cou
et s’enfuit aussitôt. Laure-Marie étalée par terre, la police intervient, il faut trouver le meurtrier !
Signalement du coupable : taille moyenne, casquette de base-ball, lunettes de soleil, chèche
blanche sur le visage, chemise a carreaux, bedaine certaine… La collaboration de tous est requise,
chaque équipe part à la chasse aux suspects. Il y a Thibault, arrêté par la police palestinienne
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alors qu’il s’enfuyait, courant dans les rues de Taybeh, qu’il faut interroger et cuisiner… en
français… Laure-Marie dument ressuscitée et muée en auxiliaire de la police palestinienne mène
l’interrogatoire… Il y a les portraits-robots, les exercices d’observation, l’identification des
suspects, la fouille, etc., et chaque jeu réussi permet a chaque équipe de récolter un indice pour
identifier a la fin le coupable… qui n’est autre que Joséphine ! Le début du ramadan aujourd’hui
empêche de faire une veillée.
Vendredi 13 aout. Matinée sportive pour le dernier jour ! Pecha la ligne, scrabble, dominos,
course contre la montre, mots croisées, etc., tout tourne autour du sport, du foot, de la coupe du
monde été surtout du grand match France-Palestine ! Après les jeux, tous se réunissent dans le
grand qaa pour regarder une projection des photos de la session finie déjà, avec rires,
commentaires et applaudissements… A l’an prochain Inch’allah !
Récit complet avec photographies sur :
http://soeurs-stecroixdejerusalem.cef.fr/-Prieure-N-D-d-Ephraim-Terre-Sainte-
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La terre et les morts
« Sous le soleil, il n’y a pas d’histoires, il n’y a que des drames », disait le romancier provençal Jean
Giono. Le 5 aout, lors d’une partie de pêche près de la Nouvelle-Orléans, en Louisiane, Yousef, 24
ans, se jette a l’eau pour sauver un enfant qui se noie : il tend le bébé a bout de bras a sa mère,
puis est entraîné par le courant, noyé. Mort sainte, mort généreuse : « Il n’y a pas de plus grand
amour que de donner sa vie… » Sa famille, taybaouie, veut l’enterrer au village. Le cauchemar
administratif commence. Vendredi 20 aout au soir : arrivée enfin a l’aéroport Ben-Gourion après
quinze jours de demandes et blocages administratifs américains et israéliens. Attente cruelle,
douloureuse. Plus de cent voitures de Taybeh escortent le corps jusqu'au village natal, où sonne
le glas. Samedi 21 aout, a cinq heures, funérailles solennelles. La marche funèbre est ouverte par
les scouts vêtus d’uniformes noirs, drapeaux, croix et couronnes en tête, puis fanfare, suivis des
homme qui portent le cercueil a bout de bras, tendu vers le ciel, et grondent des chants
funéraires en l’honneur du défunt. Puis la grande masse sombre des femmes qui chantent,
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pleurent et se lamentent, crient que la mort est une injustice, une tragédie a laquelle il ne faut
pas se résigner, a laquelle on ne peut pas s’habituer. Le village est pavoisé de drapeaux noirs et de
portraits de Yusef. Toute la population taybaouie est là pour faire ses adieux à l’enfant du pays,
des larmes roulent sur les visages. Obsèques byzantines dans l’église orthodoxe nimbée de la
lumière rasante du soleil couchant, en présence d’un nombreux clergé palestinien – aussi bien
latin que byzantin. Puis la procession se déroule de l’église au cimetière : croix fleurie, portraits
et couronnes, puis tambours et cuivres, et ensuite le clergé et tout le village derrière. Les femmes
restent en arrière et pleurent, seuls les hommes vont aujourd’hui au cimetière, demain elles
pourront aller pleurer sur la tombe. La mélopée s’élève déchirante jusqu’au ciel, arrachant aux
anges des larmes. Entrée du cimetière : tandis que les tambours battants font un roulement de
tremblement de terre, juché sur le porche, un homme cagoulé vide un chargeur de pistolet en
l’honneur du martyr. La mise au tombeau, que l’on couvre de fleurs, rassemble la famille et les
prêtres, tandis que la foule s’égaille au cimetière, chacun vers les caveaux de ses proches. Ses
cousins, ses amis d’enfance le pleurent à sanglots. Ensuite, la longue et lente théorie des
condoléances et chacun rentre chez soi dans un lourd silence. La mort héroïque et tragique de
Yousef personnifie le drame de l’exil, de l’occupation, de l’injustice qui nécessite de se battre
pour enterrer un parent au pays, aux côtés de ses ancêtres qui dorment au cimetière, et ont
depuis des siècles et des siècles mêlé leur poussière a la terre de Taybeh. Elle est aussi un
exemple de courage, et de courage chrétien : ne pas hésiter un instant à risquer sa vie pour sauver
quelqu’un.
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Oliviers de la paix
Pendant la dernière semaine d’aout une délégation scientifique de 8 personnes est venue de
Florence a Taybeh pour procéder a des recherché scientifiques sur les oliviers de Gethsémani,
avec notamment le professeur Gianfrate de l’association Cultiviamo la pace et le professeur
Cimato du Centre National de Recherche de Florence. La première phase a été accomplie l’an
dernier par une analyse du statut génétique et sanitaire des huit oliviers de Gethsémani, et cette
année la seconde phase a été accomplie par le prélèvement d’échantillons des troncs – ainsi que
de l’olivier de Gamaliel a Beit Gemal – avec l’accord de la Custodie de Terre Sainte. La troisième
phase de l’opération sera la publication d’un rapport scientifique avec publication officielle des
résultats et conférences de presse à Rome et Jérusalem. Puis peut-être, si Dieu veut, pourra-t-on
procéder a la multiplication des huit oliviers pour permettre a chaque pèlerin d’en rapporter un
en souvenir de Terre Sainte qu’il pourra planter dans son jardin ou garder en pot chez lui.
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Joies d’aout
Le mardi 3, l’Église de Jérusalem fête les saints Macchabées, ces héros de la résistance juive à
l’oppression païenne d’Antiochus Épiphane – guerriers tenaces dont les exploits se déployèrent
notamment sur les pentes du mont Tell-Assur qui domine Taybeh. Le vendredi 6, solennité de la
Transfiguration du Seigneur, que les orthodoxes fêteront le 19, et le dimanche 15 aout,
Assomption de la Vierge Marie, Fille de Sion et Reine de Palestine, que les orthodoxes fêteront le
28. Le mercredi 18 aout, l’Église universelle fête encore sainte Helene, la mère de l’empereur
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Constantin, qui découvrit la relique de la Croix et couvrit d’églises les Lieux saints. Le mardi 24,
c’est l’apôtre saint Barthelemy qui est à l’honneur des autels, et le jeudi 26, sainte Marianne de
Nazareth., sœur de l’apôtre saint Philippe. Le Martyre de saint Jean-Baptiste, 29 aout, tombe un
dimanche, et le mois finit le 31 par la célébration locale des saints évangéliques Nicodème et
Joseph d’Arimathie.
Pour fêter les mariés de l’été, dont les derniers se sont unis le samedi 28 aout a l’église latine,
Abouna Raed organise une fête le dimanche 29 : messe d’action de grâces, gâteaux et boissons
sur le parvis, puis le soir une belle grande fête sur le parvis de l’église avec la chorale de Taybeh,
une chorale de Bethleem, et bien sur du dabkeh – pour le plus grand bonheur des Taybaouis et
des pèlerins mélangés.
Et le lundi 30 aout, c’est déjà la rentrée : les élèves après le long été revêtent leur uniforme et
reprennent les cours. Déjà le temps, qui n’avait jamais été aussi chaud ce mois-ci de mémoire de
Taybaoui, par bonheur se rafraichit…
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Notre Dame de Palestine, priez pour nous !
Les Nouvelles de Taybeh paraissent a la fin de chaque mois.
Direction : Abouna Raed Abusahlia
Rédaction : Falk van Gaver
Rendez-vous sur http://taybeh.info/
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