(St Louis - Histoire de la Confrérie et de l`Eglise Saint Louis des

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(St Louis - Histoire de la Confrérie et de l`Eglise Saint Louis des
Histoire de la Confrérie et de l’Eglise Saint Louis des Français de Lisbonne
L'établissement de Saint-Louis des Français à Lisbonne remonte au XVème siècle. Il est
difficile de préciser la date exacte de sa fondation. Elle a dû avoir lieu au temps d'Édouard,
contemporain de notre Charles VII, et se constituer définitivement sous le règne d'Alphonse V
dit l'Africain (1438 – 1481). C'était l'époque où le Portugal méditait les grandes expéditions
qui devaient lui acquérir gloire et richesses. La politique des princes d'alors amenait à
accueillir avec une grande faveur les étrangers qui venaient à la fois apporter dans leurs États
les éléments de la prospérité commerciale et combler les lacunes que la navigation et les
établissements d'outre-mer laissaient dans la population indigène.
Les marchands allemands paraissent avoir été les premiers à organiser un corps de nation sur
le sol portugais. Ils jetèrent les bases d'une association dont l'objet était de prendre soin de
ceux de leurs compatriotes qui tombaient dans la misère, des vieillards et des malades.
Chaque maison contribuait à cette bonne œuvre dans la proportion de ses bénéfices
commerciaux, calculé sur la quantité des marchandises qu'elle importait.
Les français n'avaient pas tardé à être informés des avantages concédés par le gouvernement
portugais à l'Association des marchands allemands. Selon la tradition, ce sont les
chaudronniers bretons qui, les premiers ont conçu la pensée d'organiser une société semblable
et réclamer les mêmes faveurs. Édouard accueillit ces nouveaux colons qui demandaient à
former dans ses États un établissement durable.
Après avoir posé les bases de leur « factorerie », les français obtinrent du roi Édouard la
concession d'une chapelle de l'église paroissiale de Saint-Julien, pour en faire le siège de la
confrérie de religieuse. Cette chapelle formait un petit temple ayant une sacristie et des portes
particulières et constituait une sorte d'établissement à part.
Le premier acte des français fut de placer la chapelle sous l'invocation de Saint-Louis, Roi de
France. Depuis lors, l'association n'a pas cessé d'exister sous ce nom; mais les vicissitudes de
la politique, les dégradations firent passer dans plusieurs localités le siège de la confrérie de
Saint-Louis. On sait, traditionnellement, qu'il a été successivement placé dans l'ermitage de
Notre-Dame de la Victoire et dans l'église de Sainte-Catherine où il existe encore une chapelle
Saint-Louis.
En 1521, la Confrérie de Saint-Louis perdit sa chapelle, des biens et des archives dans
l'incendie de l'église paroissiale de Saint-Julien. Jean III permit aux Français de s'établir
momentanément dans l'ermitage de Notre-Dame de l'Olivier, mais en 1557, un nouvel
incendie les chassa de cette retraite.
Par lettres patentes, le roi Dom Sébastien touché de compassion, donna à la corporation une
autorisation de percevoir sur chaque vaisseau français qui entrait à Lisbonne, un droit de 400
reis pour subvenir à ses dépenses et à l'entretien de l'église.
Comme la confrérie n'avait plus d'église, elle s'adressa à la corporation des libraires et
relieurs portugais administrateurs de Sainte-Catherine du Mont Sinaï. Elle obtint, au moyen
de certains arrangements financiers, le droit de bâtir et d'entretenir, dans l'aile orientale de
cette église, une chapelle sous l'invocation de Saint-Louis. L'année suivante, en 1559, un
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tremblement de terre ayant fait s'écrouler la toiture de l'église, une contestation s'éleva entre
les Français et les Portugais pour le règlement de la part de dommage. Promettant son appui,
le Marquis de Cébès, Ambassadeur de France, suggéra à ses compatriotes de prendre une
totale indépendance, de fixer le siège inamovible de leur confrérie et de rédiger des
règlements.
La Confrérie fit l'acquisition d'un petit terrain et de quelques masures au lieu-dit Mata-porcos
situé en dehors des remparts près de la porte Saint-Antoine. Les travaux de construction
commencèrent en 1569. Le 25 août 1572 on y dit la messe pour la première fois.
En 1577, la Confrérie de Saint-Louis rédigea des statuts sous le titre de Compromis.
L'administration fut confiée à sept officiers, élus chaque année, à la majorité des voix, dans
une assemblée générale de la Confrérie, savoir:
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un juge: c'était lui qui convoquait les assemblées et y présidait; qui proposait les
affaires concernant le Factorerie. C'était enfin sur ses mandants que les aumônes
étaient payées ;
un secrétaire chargé de tenir les registres des délibérations de la Confrérie ;
un trésorier pour les recettes et les dépenses ;
un procureur pour les affaires contentieuses ;
trois majordomes ayant la direction et inspection du culte et du service de l'église.
Il y avait en outre six députés.
À cette époque, l'église n'avait point de parvis et se trouvait masquée par la maison d'un
Portugais, homme pieux et charitable, Marcos Heitor, chef des cuisines du Roi Dom
Sébastien. Il voyait avec intérêt grandir sous ses yeux la Confrérie de Saint-Louis. En
témoignage de sa dévotion et de sa générosité, il fit abattre sa maison, sauf le rez-de-chaussée,
afin de démasques la façade de l'église. Il voulut plus tard que les basses constructions
servissent à faire six boutiques dont il donna la propriété à Saint-Louis, sous la double
condition de faire célébrer, une fois par semaine, à perpétuité, une messe basse pour son âme
et celle de sa femme, de ses enfants et descendants. Il exigea également qu'une plaque fut
placée en un lieu apparent de la sacristie, sur une table de marbre, pour perpétuer le souvenir
de cette donation. De part et d'autre, les conditions furent loyalement exécutées.
Les six boutiques placées sous la terrasse qui conduit au parvis constituaient la plus solide
tranche des revenus de cet établissement.
En 1585, le Sénat de Lisbonne fit à la Confrérie remise du cens dont les boutiques de Marcos
Heitor étaient frappées.
Vers les premières années du siècle suivant, l'association de Saint-Louis reçut une nouvelle
dotation. Un navigateur portugais, Antoine Manhonet ou Magnonet, qui faisait habituellement
les voyages du Brésil, fonda une chapelle dans l'église de Saint-Louis des Français, en
l'honneur de notre-Dame du Bon Port (A Nossa Senhora do Porto Seguro) voulant que chaque
jour il y fut dit une messe à perpétuité. A cet effet, il céda à la Confrérie la propriété d'une
belle maison situé rua dos Armazens, quartier de Pedras negras à Lisbonne.
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Ce fut là pendant 150 ans une forte branche des revenus de Saint-Louis. Cette propriété fut
détruite par le grand tremblement de terre de 1755. Depuis lors, la Confrérie n'a plus rien
retiré de ce capital et la rente s'éteignit avec la destruction de la maison. Cette perte fut
d'autant plus dure que la chapelle de Nossa Senhora de Porto Seguro avait acquis une certaine
célébrité et que plusieurs papes lui avaient accordé des témoignages de bienveillance. En
1641, Urbain VIII et Innocent XII en 1696, lui accordèrent le privilège d'indulgences
plénières. Le droit d'être enseveli était une faveur spéciale que les Français achetaient à la
Confrérie.
Aujourd'hui l'église possède encore, non pas une chapelle, mais un autel sous le vocable de
Nossa Senhora do Porto Seguro.
L'année 1612 est signalée dans les fastes de Saint-Louis par un bref du pape Paul V qui
accorde des indulgences à perpétuité à l'église et à la Confrérie.
En 1644, le Roi Dom Juan IV renouvelle par un édit les privilèges de la Confrérie de SaintLouis. Ils consistent principalement en une exemption complète des impôts de monopole,
prêt, taille et autres tributs, exemption de service militaire, de logement de troupes, de tutelles.
Les besoins financiers de la Confrérie devenaient d'autant plus grands que l'association
prenait de plus en plus de développement, que les circonstances extérieures changeaient avec
le temps, et enfin que la valeur de l'argent diminuait de plus en plus.
En 1681, on vit les Confrères de Saint-Louis faire venir de France un chapelain de leur
nation.
La discorde s'étant installée parmi les Français, Louis XIV rendit un arrêt le 16 avril 1684
pour donner au Consul de France, entre autres droits celui de présider à toutes les assemblées
de la Confrérie. Par ce même acte, il autorisa une nouvelle perception de deux vingtaines par
tonneau. Un nouvel arrêt régla l'emploi des impositions et des revenus affectés à l'entretien de
Saint-Louis. La Confrérie prend vers cette époque le titre de Nation Française.
Entre 1720 et 1755, l'Église Saint-Louis des Français bénéficie de nombreux dons et
fondations de messes avec les rentes qui y sont jointes.
Le 1er Novembre 1755 vit s'anéantir en quelques instants, sous la double action du
tremblement de terre et de l'incendie, ce vénérable sanctuaire qui avait enrichi depuis trois
siècles, le patriotisme des marchands français, la dévotion des Portugais et la munificence des
souverains de l'un et l'autre royaume. Le comte de Baschi, ambassadeur de Louis XV à la cour
de Lisbonne et le Sr Grénier, Consul général de France réunirent leurs efforts pour obtenir de
la cour de Versailles quelques soulagements aux désastres de la Factorerie.
En 1756, la Nation se réunit afin de délibérer sur les mesures à prendre pour la réédification
de l'église mais il fallait se procurer les fonds. On ne pouvait pas compter sur les secours de la
Couronne, la France étant engagée dans la guerre de Sept Ans. Les armées du Roi
triomphaient en Méditerranée. Le maréchal de Richelieu enlevait Minorque aux Anglais. Le
roi du Portugal observait une prudente neutralité ce qui donnait confiance aux négociants
français. La factorerie s'assembla et décida des différentes manières d'acquérir des fonds pour
relever l'église de Saint-Louis, comme la cotisation payée par chaque Français durant la
guerre de 120 reis par chaque balle, ballot et caisse de marchandises qu'il recevait.
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Ces bonnes résolutions n'eurent pas le résultat que les Français en attendaient. La guerre vint
malheureusement déjouer tous les calculs. En1760, le Portugal prit parti pour l'Angleterre
contre la France. À la première menace du marquis de Pombal, premier ministre du roi Joseph
1er, dans sa majorité, la nation française avait sacrifié sa condition de Français et avait
accepté une naturalisation forcée. Mais l'église Saint-Louis n'avait été ni confisquée, ni
séquestrée comme certains magistrats l'avaient suggéré et la confrérie avait continué à
s'assembler et à fonctionner.
Au retour de la paix, Louis XV abolit tous les droits attribués tant à la nation française qu'à
l'église de Saint-Louis. Il réglait par ordonnance le corps de la Nation et statuait sur la
possession, la régie et l'administration de l'église et de la Confrérie nationales. Cette
ordonnance avait été sollicitée par le chevalier de Saint-Priest, ministre plénipotentiaire du
Roi près de la Cour du Portugal.
Le chevalier de Saint-Priest avait entrepris avec ardeur la restauration de l'église de SaintLouis. Les soins qu'il donna à cette œuvre pendant toute la durée de sa mission, voire même
après, lui acquirent le titre de bienfaiteur de Saint-Louis. Son portrait fut solennellement
inauguré par le corps des négociants français, dans la salle du Conseil. Il fut bien aidé par
l'abbé Garnier, principal chapelain et aumônier de Saint-Louis depuis 1750. L'abbé Garnier,
docteur en théologie, était aussi savant que pieux. Il voua son existence à la prospérité de son
église, et s'appliqua sans relâche à seconder les intentions du chevalier de Saint-Priest.
Le 2 octobre 1768, on procéda à la pose de la pierre de fondation. L'église et les bâtiments
furent reconstruits avec simplicité ; le maître-autel, dessiné sur le plan du grand autel de
Saint-Roch à Paris et les deux petits autels latéraux, placés sous l'invocation de Notre-Dame
de Porto Seguro et Saint-Yves furent exécutés à Gênes en marbre blanc de Carrare par le sieur
Bioccardi, célèbre sculpteur génois. Ils furent terminés et envoyés à Lisbonne en 1768.
À cette époque, le chevalier de Saint-Priest avait quitté Lisbonne, mais ses projets furent
continués avec zèle par l'abbé Garnier, sous la direction de monsieur de Sémonin, consul
général chargé des affaires du Roi, et plus tard sous les yeux du marquis de Clermontd'Amboise, ministre plénipotentiaire. Aux anciens bâtiments qui dépendaient de Saint-Louis,
on ajouta un hôpital propre à recevoir cinquante malades, et les fondations pieuses furent
rétablies autant que la chose était possible.
Plus on avançait vers la fin du XVIIIème siècle, et plus les temps devenaient difficiles. La
décadence progressive du commerce français d'importation ne nuisit pas d'une manière
sensible à l'établissement de Saint-Louis tant que dura l'organisation établie par le chevalier
de Saint-Priest.
En 1792, le droit de Saint-Louis cessa d'être perçu; les règlements du chevalier de SaintLouis furent abrogés et l'établissement n'eut plus pour subsister que les cotisations des
membres de l'association.
Durant la révolution française, les agents politiques et commerciaux de la République
française proposèrent le rétablissement de l'ancien droit pour fournir aux dépenses et à
l'entretien de l'église et de l'hôpital, mais cette proposition n'eut pas de suite.
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Le 26 avril 1802, le général Lannes, envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire de la
République, prit solennellement possession de Saint-Louis et y fit chanter le Te-Deum. Puis la
préoccupation qu'inspirait l'importance des évènements politiques la fit tomber dans l'oubli.
Elle fut par la suite séquestrée par le Gouvernement territorial, au commencement de l'année
1808.
A la seconde Restauration, la France obtient la levée du séquestre et la restitution de cette
propriété nationale. Ce fut le 11 mars 1816 que la remise officielle de l'église et de ses
dépendances fut faite à monsieur de Lesseps, consul général de France. Cet agent reçut en
même temps une somme de 900 000 ries (5 000 francs) provenant des économies opérées par
l'administration des séquestres.
Monsieur de Lesseps voulant rendre Saint-Louis à sa première destination en obtint
l'autorisation et reçut l'invitation de nommer provisoirement un chapelain, bien qu'il y eût plus
de difficulté depuis l'abolition des Factoreries étrangères en Portugal.
Le 10 novembre 1824, le Roi du Portugal, Jean VI, voulant donner un témoignage public de
sa vénération pour la mémoire de Louis XVIII, vint assister à la cérémonie funèbre que le
baron Hyde de Neuville faisait célébrer à Saint-Louis pour le repos de l'âme du Roi de France.
Quand éclatèrent les mouvements révolutionnaires fomentés par l'Infant Dom Miguel, le
chapelain provisoire de Saint-Louis, abbé de Seixas Vasconcellos, fut arrêté dans sa maison
attenante à l'établissement national, et conduit à la prison d'Aljube. L'Ambassadeur de France
chargea le Consul de constater officiellement l'enlèvement de l'abbé qui fut rendu à la liberté
après quatre jours de détention.
Le nouveau chapelain, monsieur de Saint Anne Negrão, fut également jeté en prison en 1831,
sous le prince Dom Miguel, et n'en sortit qu'à la suite de sa capitulation imposée par l'Amiral
Roussin.
Durant tout ce XIXème siècle, agité en Europe et au Portugal, l'établissement de Saint-Louis
déclinait de plus en plus. Tout espoir de le relever semblait perdu. Il y eut un sursaut d'utilité
lorsque l'épidémie du choléra toucha Lisbonne en 1832. Des lits furent établis dans l'hôpital.
Après la cessation de la maladie, l'établissement de Saint-Louis rentra dans l'oubli.
Cependant les Français établis à Lisbonne déploraient la ruine et l'abandon du siège de leur
nationalité, siège qui leur permettait de resserrer les liens et de faire revivre les vieilles
coutumes. Le baron de Bois le Compte, ministre du Roi en Portugal, prépara cette impulsion
que la naissance du Comte de Paris consacra. Il fut décidé que la Légation et le Corps des
Négociants français feraient célébrer un Te Deum dans l'église nationale de Saint-Louis le 11
septembre 1838.
La Factorerie avait, en cette circonstance, exprimé formellement son désir de voir restaurer le
siège de la nationalité française, et ce vœu bien accueilli par Louis-Philippe. Lorsqu'il envoya,
en novembre 1838, le général comte Durosnel pour le représenter comme parrain au baptême
de l'Infant, il le chargea de remettre la somme de 5000 francs destinés aux réparations les plus
urgentes de l'église Saint-Louis.
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Monsieur His, (chargé d'affaires) fit aussitôt commencer les réparations d'urgence qu'exigeait
la conservation de Saint-Louis, et à partir de cette époque, la restauration de ce vénérable
établissement de notre nationalité fut un fait irrévocablement arrêté. La Légation du Roi avait
atteint le but de ses efforts ; elle avait préparé l'impulsion, déterminé le vœu exprimé par les
Français, saisi toutes les occasions que la providence avait fait naitre et obtenu, en faveur de
son œuvre, le patronage de l'auguste héritier de ces mêmes Rois qui avaient élevé à un si haut
degré la prospérité de St Louis.
En 1859, l'église fut confiée aux Pères Lazaristes.
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