Résorption radiculaire externe après un trauma
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Résorption radiculaire externe après un trauma
Pratique quotidienne · formation complémentaire Résorption radiculaire externe après un traumatisme dentaire: Diagnostic, conséquences, thérapie Andreas Filippi, Thomas von Arx et Daniel Buser Klinik für Oralchirurgie, Zahnmedizinische Kliniken der Universität Bern Les traumatismes dentaires conduisent souvent à l’endommagement de la couche de cémentoblastes de la surface radiculaire. Il en résulte des résorptions radiculaires externes. Alors que la resorption de surface (Surface resorption) n’a aucune influence sur le pronostic à long terme d’une dent traumatisée, la résorption de remplacement (Replacement resorption) aboutit à plus ou moins long terme à la perte de la dent, à laquelle s’ajoute un trouble de la croissance chez les enfants et les adolescents. La resorption radiculaire inflammatoire (Inflammatory resorption) entraîne rapidement, si elle n’est pas traitée, la perte de la dent, cette résorption peut toutefois être évitée par une thérapie adéquate. Le présent article traite en détail de l’étiologie, du diagnostic, de la prévention et de la thérapie des résorptions radiculaires externes. Différents nouveaux concepts de traitement sont également présentés et discutés. Mots clés: traumatisme dentaire, résorption radiculaire, ankylose Adresse pour la correspondance: Priv.-Doz. Dr Andreas Filippi Klinik für Oralchirurgie Zahnmedizinische Kliniken der Universität Bern Freiburgstrasse 7, 3010 Berne tél. 031/632-2504, fax 031/632-9884 e-mail: [email protected] (Illustrations et bibliographie voir texte allemand, page 713) Introduction Pratiquement tous les traumatismes dentaires sont accompagnés de lésions du parodonte. Les dommages sur les cellules du desmodonte vont de l’ébranlement (commotion) à la nécrose des cellules d’une grande partie de la surface radiculaire en passant par la contusion (meurtrissure). Les dommages les plus importants sont générés après l’intrusion ou l’avulsion, avec conservation extraorale dans un milieu non physiologique et/ou de longue durée. Le pronostic parodontal, donc le pronostic sur la dent elle- même, est en conséquence très défavorable après ces lésions (ANDREASEN 1980, ANDREASEN & ANDREASEN 1994, HUPP et al. 1998, SCHATZ et al. 1995, VON ARX et al. 1998). Aucune résorption radiculaire des dents définitives ne se produit en général dans des conditions physiologiques. Les cellules vitales de la surface radiculaire (cémentoblastes) maintiennent les cellules responsables de la résorption radiculaire (ostéoclastes) à distance et possèdent ainsi des propriétés antirésorption (TROPE 1998a). Lorsque les cémentoblastes sont endommagés, une réaction inflammatoire locale se développe en premier lieu en raison de la Rev Mens Suisse Odontostomatol, Vol 110: 7/2000 725 Pratique quotidienne · formation complémentaire détérioration des tissus. Les ostéoclastes sont activés, le cément et la dentine résorbés. Une résorption externe radiculaire apparaît. On différencie plusieurs types de résorptions radiculaires, qui diffèrent nettement en ampleur et en qualité et qui influent donc de manières différentes sur le pronostic concernant la dent traumatisée. Les principaux types sont la résorption de surface (Surface resorption), la résorption de remplacement (Replacement resorption) et la résorption inflammatoire (Inflammatory resorption) (ANDREASEN & ANDREASEN 1994, TRONSTAD 1988). La recherche dans le domaine de la traumatologie dentaire s’est consacrée intensivement à ce problème dans les dernières années. Diagnostic des résorptions radiculaires Les résorptions radiculaires externes entraînent des altérations réversibles ou non du ligament alvéolo-dentaire. Ces phénomènes peuvent être diagnostiqués en fonction de leur étendue et de leur localisation par examen radiologique des dents isolées ou par cliché occlusal. Les altérations des tissus durs de la dent ne sont toutefois mises en évidence par radiologie souvent que si 50% au moins des tissus anorganiques sont endommagés. Des résorptions radiculaires externes sont donc visualisées par radiologie relativement tard, voire pas du tout lors d’une localisation palatine ou vestibulaire. Les radiographies ne sont donc pas adaptées pour un diagnostic précoce de résorptions dues à un accident (ANDERSSON ET AL. 1984, ANDREASEN 1975, ANDREASEN & ANDREASEN 1994, ANDREASEN et al. 1995). Une détection précoce et une mise en place rapide de la thérapie adaptée sont essentielles pour le pronostic de la dent accidentée. Contrairement aux radiographies endoorales, le procédé du périotest est en mesure de détecter précocement et avec fiabilité les résorptions radiculaires externes après traumatisme dentaire. Le périotest consiste en la percussion horizontale, définie, des dents à l’aide d’un percuteur intégré dans l’appareil (société Medizintechnik Gulden, Bensheim, Deutschland) (fig. 1). La dent examinée doit être aussi verticale que possible et la tête de mesure placée approximativement à angle droit, à une distance de 0,5 mm à 2,5 mm (fig. 2). L’appareil mesure les propriétés d’amortissement du ligament alvéolo-dentaire. Une valeur est affectée à la déviation parodontale et est retransmise acoustiquement ou optiquement. Les dents voisines intactes doivent être contrôlées pour comparaison car le fabricant indique une grande plage de valeurs normales. La plage normale d’une incisive supérieure centrale est par exemple de 3 à 13, pour une incisive latérale de 3 à 10. Les valeurs élevées montrent une mobilité élevée de la dent due à une inflammation ou à un traumatisme. Les petites valeurs du périotest indiquent un rétrécissement pathologique de la poche parodontale, un contact direct ou une liaison osseuse entre l’os alvéolaire et la dent: l’ankylose. 2 à 3 mesures doivent être effectuées par dent. L’évolution doit être contrôlée pour le diagnostic d’éventuelles résorptions radiculaires. Les valeurs du périotest doivent être relevées à tous les contrôles post-traumatiques, effectués au début à courts intervalles. L’évolution des valeurs de mesure résultant d’une résorption est ainsi détectée avec rapidité et fiabilité. Il est également important d’utiliser l’appareil du périotest selon les indications du fabricant pour l’obtention de résultats reproductibles. L’expérience a montré que les valeurs du périotest obtenues par mesures verticales donnent des indications encore plus précoces d’un début de résorption radiculaire externe (position allongée du patient, axe de la dent aussi parallèle que possible au sol et emploi axial de la tête de mesure) (fig. 3) (EBELESEDER & GLOCKNER 1999). Des 726 Rev Mens Suisse Odontostomatol, Vol 110: 7/2000 contrôles radiologiques et la détermination du son de percussion avec un manche de miroir – comparés avec ceux des dents voisines – complètent le diagnostic. Résorption de surface (Surface resorption) De légères blessures telles que commotions ou contusions correspondent uniquement à des dommages peu étendus de la couche de cémentoblastes (fig. 4). Comme il l’a déjà été mentionné ci-dessus, il se développe dans les premiers jours après l’accident une réaction locale inflammatoire dans la région endommagée, avec résorption consécutive du cément et de la dentine par les ostéoclastes activés (TROPE 1998a). La lésion est toutefois peu étendue de sorte que les cémentoblastes vitales voisines prolifèrent, se déplacent vers les lacunes de résorption (migration) puis revêtissent toute la lésion (ANDREASEN & ANDREASEN 1994). Le ligament alvéolo-dentaire est régénéré en quelques semaines. Les tissus durs de la dent résorbés ne sont toutefois pas remplacés. Une lacune de résorption revêtue d’une couche de cémentoblastes vitaux subsiste. Le desmodonte est fonctionnel et la dent est physiologiquement mobile (fig. 5). Une résorption de surface distale ou mésiale est visible par radiologie si elle est d’une certaine taille. Elle est caractérisée par un rétrécissement de la surface radiculaire avec une poche parodontale continue et de largeur normale (fig. 6). Dans la majorité des cas, les résorptions de surface ne peuvent être détectées ni cliniquement ni par radiographie (TROPE 1998a). Les résorptions de surface ne peuvent pas être améliorées par thérapie. Elles n’ont néanmoins aucune influence sur le pronostic grâce à la régénération du parodonte. Des exceptions existent lors de nécrose pulpaire pendant la phase de résorption ou dans le cas d’un traitement endodontique insuffisant (voir ci-après). Résorption de remplacement (Replacement resorption) Des blessures dentaires sérieuses peuvent conduire à une détérioration irréversible de la couche de cémentoblastes (ANDREASEN 1980, HUPP et al. 1998, SCHATZ et al. 1995) (fig. 7). Il en résulte une réponse inflammatoire déjà mentionnée sur les produits de dégradation des tissus. Les ostéoclastes activés commencent à résorber le cément et la dentine. La lésion est toutefois si importante que les cémentoblastes vitaux voisins ne sont plus en mesure de la revêtir complètement. Les cellules vitales qui pourraient revêtir cette liaison manquent le cas échéant totalement sur la surface radiculaire. Les ostéoclastes poursuivent la résorption radiculaire; les ostéoblastes remplacent les tissus résorbés de la dent immédiatement par de l’os alvéolaire. L’os alvéolaire est directement déposé sur la surface radiculaire, une ankylose a lieu (ANDREASEN 1980, ANDREASEN & ANDREASEN 1994, HELLSING et al. 1993, NE et al. 1999, TROPE 1998a) (fig. 8). Toute la racine est alors lentement résorbée et remplacée par de l’os alvéolaire. Finalement, la couronne de la dent se fracture, la dent est perdue au bout de 3 à 7 ans en moyenne (ANDERSSON et al. 1989). Il faut remarquer que les résorptions de remplacement n’évoluent pas avec la même vitesse chez les enfants et chez les adultes (ANDREASEN & ANDREASEN 1994, EBELESEDER et al. 1998). Dès la phase initiale de résorption, les valeurs du périotest (vertical) diminuent continuellement. Le son de la percussion (manche de miroir) est ensuite nettement plus élevé, avec un timbre métallique et clair typique (CORNELIUS et al. 1987, EBELESEDER & GLOCKNER 1999, NE et al. 1999, ANDREASEN & ANDREASEN 1994, ANDERSSON 1988). Le phénomène est également révé- Résorption radiculaire externe après un traumatisme dentaire: Diagnostic, conséquences, thérapie lé par examen radiologique en fonction de la localisation et de l’état de la résorption. La poche parodontale ne peut plus être détectée en continu et les contours de la dent disparaissent avec la croissance de la résorption (fig. 9). Prévention et thérapie Les causes d’une résorption radiculaire externe sont essentiellement l’altération de la couche protectrice antirésorption (cémentoblastes) et l’inflammation locale induisant l’activation des ostéoclastes (TROPE 1998a). Les conditions pour une prévention et une thérapie efficaces sont donc la réduction des dommages de la couche de cémentoblastes et/ou la réduction de la réaction inflammatoire. Différentes possibilités sont discutées sur ce point. 1. Réduction du traumatisme Le port d’une protection dentaire (Mouthguard) réalisée individuellement est recommandé plus particulièrement dans les types de sports à risques d’accidents dentaires, tels que le hockey sur glace et le «Inline skating». Cette protection permet de nettement diminuer ou d’empêcher totalement les dommages cellulaires de la surface radiculaire par amortissement des chocs lors d’accidents dentaires (fig. 10). 2. Conservation physiologique de la dent Après une avulsion, l’importance des dommages des cellules sur la surface radiculaire de la dent dépend essentiellement de la durée extraorale et du milieu de conservation. Des conditions optimales sont obtenues uniquement dans le cas d’une réimplantation immédiate (dans les cinq minutes) ou d’une conservation dans un milieu spécial, qui correspond aux besoins très spécifiques des cémentoblastes (et odontoblastes lors d’un Foramen apical ouvert). Alors que des expérimentations sont encore effectuées aux USA sur le VIASPAN® (DuPont Pharmaceuticals, Wilmington, DE, USA), un milieu de transplantation du foie, (HUPP et al. 1998, PETTIETTE et al. 1997, TROPE & FRIEDMAN 1992), il existe en Europe le flacon de conservation de dent DENTOSAFE® (Fabricant: Medice, Iserlohn, Deutschland, distributeur en Suisse: Mephem, Baar) (KIRSCHNER et al. 1992, POHL et al. 1999). Des études effectuées confirment le succès de la conservation physiologique de la dent dans le flacon de conservation (FILIPPI et al. 1999a). Un grand nombre d’écoles primaires et de centres sportifs allemands et autrichiens sont déjà pourvus de flacons DENTOSAFE® afin d’optimiser les soins après traumatisme dentaire. Une dent expulsée peut être conservée à la température ambiante jusqu’à 25 heures dans le flacon de conservation sans nuire au pronostic de la guérison parodontale (POHL et al. 1999). Hormis cela, un médecin-dentiste doit dans tous les cas être consulté. 3. Moyens pour faciliter la régénération des cémentoblastes Il est aujourd’hui conseillé de ne pas réimplanter immédiatement une dent expulsée pour laquelle le temps extraoral a dépassé 20 minutes mais de la mettre auparavant, pendant 30 à 60 minutes, dans un milieu nutritif spécifique (VIASPAN® ou DENTOSAFE®) (POHL et al. 1999, PETTIETTE et al. 1997). Les cémentoblastes altérés en raison d’une conservation extraorale inadaptée ou trop longue peuvent mieux se régénérer dans ce milieu que dans le coagulum. La probabilité d’une résorption de remplacement peut être ainsi nettement réduite. 4. Thérapie atraumatique Le traitement d’une dent traumatisée ne doit provoquer aucune autre détérioration des cellules de la surface radiculaire. La dent accidentée et disloquée doit être replacée avec précaution. Il ne faut pas toucher la surface radiculaire d’une dent expulsée; Un contact de la pince sur la surface radiculaire peut engendrer des dommages irréversibles étendus. La surface radiculaire et l’alvéole ne doivent être rincées qu’avec un milieu physiologique, du sérum physiologique stérile et isotone ou une solution de lactate de Ringer. La contention des dents traumatisées ne doit pas comprimer non physiologiquement le desmodonte. La contention à la main pour fracture maxillaire, pour laquelle un fil est entouré autour des dents, est contre-indiquée. Il en est de même pour les contentions rigides qui ne permettent aucun mouvement physiologique. Le manque de stimulus fonctionnel nuit également à la régénération du parodonte: le risque de résorption de remplacement augmente. 5. Réduction des micro-organismes et de la résorption On sait aujourd’hui que les bactéries pénétrant dans le desmodonte en voie de guérison contribuent à la stimulation des ostéoclastes et donc à une résorption nettement plus rapide de la dent (TROPE 1998a). Les dents accidentées doivent donc être traitées par prévention par antibiotiques, en principe pendant sept à dix jours (WEIGER et al. 1999). Des études récentes sur le choix de l’antibiotique ont montré que la tétracycline non seulement réduit le nombre de micro-organismes mais possède également, contrairement à l’amoxicilline, une action inhibitrice sur les ostéoclastes (SAE-LIM et al. 1998b). La tétracycline est donc l’antibiotique de choix pour les traumatismes dentaires, à partir d’expériences menées sur des animaux. Le traitement doit durer de 7 à dix jours. Le dosage est le suivant: à partir de 8 ans, 100 mg de doxycycline le jour de l’accident et 50 mg les jours suivants et à partir de 14 ans, 200 mg puis 100 mg. Etant donné que la tétracycline peut colorer les dents définitives pendant la phase de développement des dents, le traitement systématique reste limité à 10 jours au maximum chez les enfants et chez les adolescents. Le traitement local de la surface radiculaire par de la tétracycline est conseillé en alternative ou en complément: la dent est plongée avant la réimplantation pendant 5 minutes dans une solution de tétracycline (1 mg de tétracycline dans 20 ml de solution NaCl) (CVEK et al. 1990). Des études cliniques manquent encore à ce jour. Lors d’une complète nécrose présumée du desmodonte résiduel après un long séjour extraoral et non physiologique de la dent, le tissu mou est tout d’abord retiré mécaniquement de la surface radiculaire (scaler, curette). La dent est trempée avant la réimplantation pendant 5 minutes dans une solution de fluorure afin de retarder au maximum la résorption consécutive (BJÖRVATN et al. 1989, Selvig et al. 1990). 6. Recolonisation des surfaces radiculaires dénudées Un complexe protéinique en mesure de recoloniser les surfaces radiculaires avec des cémentoblastes par migration et le cas échéant par différenciation a été développé ces dernières années (Emdogain®, société Biora, Malmö, Schweden) (fig. 11). Un cément acellulaire radiculaire est tout d’abord formé (HAMMARSTRÖM 1997). Le ligament parodontal et l’os alvéolaire se régénèrent alors. L’expérience acquise en parodontologie montre des résultats positifs (HAMMARSTRÖM et al. 1997, HEIJL et al. 1997, SCULEAN et al. 1999, ZETTERSTRÖM et al. 1997). Il n’a pas pu être totalement déterminé jusqu’à présent si la régénération repose sur la différenciation des cellules ou si la préparation a plutôt une action sur la membrane et laisse ainsi le temps aux cémentoblastes vitaux voisins de migrer. Contrairement à la parodontologie, la surface radiculaire après une avulsion ne doit pas être Rev Mens Suisse Odontostomatol, Vol 110: 7/2000 727 Pratique quotidienne · formation complémentaire conditionnée à l’acide avant l’application du gel Emdogain®. La surface radiculaire est tout d’abord brièvement séchée avec précaution à l’aide d’un tampon stérile, puis le complexe protéinique est appliqué sur l’ensemble de la surface radiculaire et dans l’alvéole. La dent expulsée est ensuite réimplantée. Le surplus de produit est enlevé. 7. Minimisation de la phase inflammatoire initiale Une résorption radiculaire est toujours liée à un processus inflammatoire qui entraîne l’activation des ostéoclastes. La recherche actuelle se concentre donc sur une réduction de cette inflammation afin de retarder, voire d’empêcher d’éventuelles résorptions radiculaires. L’application locale de stéroïdes (dexaméthason) après une avulsion a été étudiée. Le traitement montre une nette réduction de l’activité des ostéoclastes (SAELIM et al. 1998a). Des études cliniques à long terme font encore défaut. Que faire si une ankylose ou une résorption de remplacement a tout de même lieu? Si une résorption de remplacement est diagnostiquée, on implante chez les adultes une prothèse à moyen terme (implant enossale, bridge). Une période de 3 à 7 ans est nécessaire jusqu’à ce que la dent ankylosée tombe (ANDERSSON et al. 1989). Le prolongement alvéolaire est généralement conservé dans toute sa périphérie car la racine de la dent est uniquement transformée en os et qu’aucun phénomène inflammatoire avec résorption de l’os n’a lieu. Chez les enfants et les adolescents (de 8 à 14 ans environ), c.-à-d. lorsque la mâchoire est en pleine croissance, il se produit non seulement une résorption radiculaire mais aussi un blocage de la croissance de l’os maxillaire dans la région de la dent touchée (ANDERSSON ET AL. 1989, ANDREASEN & ANDREASEN 1994, EBELESEDER et al. 1998). La croissance du maxillaire se poursuit dans les directions caudale et antérieure, mais la dent ankylosée reste dans sa position, et la dent paraît cliniquement «plus courte» (MALMGREN et al. 1994) (fig. 12). Après la perte de la dent touchée, un déficit parfois important d’os persiste à cet endroit en raison du blocage de la croissance. Ceci peut être corrigé ultérieurement par des mesures augmentatives. Si une ankylose dans un os maxillaire en phase de croissance est diagnostiquée, il faut décider si la dent peut être laissée ou si elle doit être retirée (fig. 13). Une conservation de la dent est justifiée par la fonction de maintien de la place de la dent dans le Ankylose Dent laissée Dent retirée Transplantation (resorption radiculaire avancée) (prémolaire) Obturation orthopédique dento-maxilaire Réimplantation intentionnelle (avec Emdogain®) Orifice maintenu ouvert Fin de la croissance de la mâchoire Retrait de la dent Traitement par implantation (éventuellement augmentation) Fig. 13 Thérapies possibles après ankylose dans l’os maxillaire en phase de croissance 728 sens mésio-distal. En outre, aucune intervention chirurgicale n’est nécessaire. Un retrait de la dent est justifié par le fait qu’en raison de leur infraposition, de telles dents sont sans fonction et non satisfaisantes du point de vue esthétique. Si une ankylose se développe à l’âge des enfants, il en résulte, en raison de l’infraposition de la dent, d’importants déficits en os et en tissus mous. Les dents ankylosées doivent donc être retirées chez les enfants (ANDREASEN & ANDREASEN 1994, MALMGREN et al. 1994). Des thérapies consécutives possibles consistent à maintenir les sites ouverts par orthopédie de la mâchoire ou leur obturation, qui doit être discutée en particulier après ankylose ou perte des deux incisives centrales. Le traitement idéal serait de remplacer la dent ankylosée par une dent avec un desmodonte vivant, qui stimulerait la croissance de la mâchoire et satisferait aux exigences esthétiques et fonctionnelles. La thérapie classique consiste en la transplantation d’une prémolaire (inférieure). La guérison des dents est dans un haut pourcentage parodontale et les dents peuvent généralement très bien être corrigées du point de vue esthétique. (ANDREASEN ET AL. 1990, ANDREASEN et al. 1994, KRISTERSON 1985, KRISTERSON & LAGERSTRÖM 1991). Le retrait d’une prémolaire doit toutefois être indiqué en premier lieu du point de vue orthopédie dento-faciale. Lors de résorptions radiculaires initiales et/ou peu étendues (diagnostic précoce et/ou valeur du périotest >0), une extraction et une réimplantation intentionnelles peuvent être prises en considération grâce au développement de l’Emdogain® (voir cidessus). La dent est pour cela extraite avec précaution (fig. 14). Afin de prévenir des résorptions externes inflammatoires ou endodontiques (voir ci-après), nous préconisons dans ce cas une thérapie endodontique extraorale. Après la résection de l’apex radiculaire et la préparation du canal radiculaire à l’aide de fraises cylindriques avec refroidissement interne (fig. 15), une pointe en titane de grand volume, de même longueur que la longueur initiale de la dent, est fixée (fig. 16) (KIRSCHNER et al. 1978, POHL et al. 1999). Ce procédé permet la résection des parties avec résorption dans le tiers apical et le tiers moyen de la racine, sans devoir faire de compromis fonctionnels et statiques (FILIPPI & KIRSCHNER 1992, POHL et al. 2000). Une longueur autologue résiduelle de la racine de 2 à 3 mm est en principe suffisante (FILIPPI et al. 1998). La durée du traitement décrit est de 15 à 20 minutes (POHL et al. 1999). Il assure une thérapie endodontique définitive en une séance. De l’Emdogain® est appliqué sur les surfaces radiculaires résorbées ainsi que dans l’alvéole, sans conditionnement préalable. La dent est réimplantée et une contention souple (non rigide) est posée comme après une avulsion pendant 1 à 2 semaines. L’insertion de la pointe en titane ne nuit pas à la guérison de la partie autologue de la racine (POHL et al. 2000). L’expérience, à présent de plus d’un an, montre des résultats encourageants de cette méthode (fig. 17). Rev Mens Suisse Odontostomatol, Vol 110: 7/2000 Résorption inflammatoire (Inflammatory resorption) Une résorption externe radiculaire inflammatoire est de même générée lors d’une lésion du cément radiculaire, créant aussi une ouverture des tubuli dentinaires (ANDREASEN & ANDREASEN 1994, TROPE 1998a). Des micro-organismes ou leurs toxines peuvent donc passer de la pulpe qui n’a pas été traitée ou qui l’a été insuffisamment dans le ligament parodontal (fig. 18). Mais une technique erronée de contention ou un soin dentaire insuffisant après l’accident peuvent également entraîner la pénétration des micro-organismes via le sillon gingival (Sulcus gingivae) Résorption radiculaire externe après un traumatisme dentaire: Diagnostic, conséquences, thérapie dans les sites endommagés de la surface radiculaire (TROPE 1998b, TRONSTAD 1988). Les bactéries activent alors les ostéoclastes, il en résulte une rapide résorption du cément et de la dentine ainsi que de l’os alvéolaire voisin au sens d’une infection aiguë (ANDREASEN & ANDREASEN 1994, TROPE 1998a) (fig. 19). La dent atteinte est sensible à la percussion, très mobile et du pus s’écoule éventuellement du sillon gingival. Les radiographies montrent de nettes ostéolyses et dentinolyses dans la région de la racine et de l’os alvéolaire environnant car les tissus de la dent ne sont pas remplacés par de l’os mais par un tissu enflammé (fig. 20). La dent est perdue en quelques semaines. Les états initiaux d’une résorption inflammatoire peuvent être détectés avec fiabilité lors de contrôles fréquents à l’aide du périotest: les valeurs de mesure sont pathologiquement augmentées. Prévention et thérapie L’apparition d’une résorption radiculaire inflammatoire après traumatisme d’une dent peut être évitée par une bonne hygiène buccale de même que – si nécessaire – par un traitement endodontique appliqué correctement en temps utile. Une bonne hygiène buccale doit être assurée avec une contention adaptée, qui laisse les cavités proximales et le collet libres. Le patient est informé sur son alimentation et sur les soins dentaires. Le nombre de micro-organismes peut de plus être réduit par une antibiothérapie systématique et par des rinçages buccaux désinfectants. S’il est constaté dès le premier examen après l’accident qu’une revascularisation et une réinervation pulpaire ne sont plus possibles, le traitement endodontique doit être immédiatement entrepris ou dans les 7 à 10 jours post-traumatiques, c’està-dire avant que l’activité ostéoclastique ne débute (ANDREASEN & ANDREASEN 1994, CVEK 1994). Il est plus agréable pour les patients que la trépanation, la préparation et l’obturation aient lieu pendant la phase de contention. On ne doit pas attendre l’apparition d’une nécrose pulpaire ou de gangrène. Si une revascularisation pulpaire semble possible au moment de l’accident (dent immature, Foramen apical ouvert, commotion, contusion, subluxation), des examens de contrôle fréquents sont nécessaires. Si une nécrose pulpaire apparaît, il faut immédiatement entreprendre une thérapie endodontique. Le signe net d’une revascularisation pulpaire est la progression contrôlée par radio- logie de la croissance radiculaire ou de l’oblitération pulpaire (EBELESEDER & GLOCKNER 1999). Des examens radiologiques des dents sont effectués sur une période de 6 mois environ, un cliché de dent isolée étant indiqué toutes les semaines lors d’incertitude. Un test négatif de la sensibilité ne fournit aucune information sur la vitalité pulpaire après un traumatisme dentaire. L’apparition d’une résorption radiculaire inflammatoire après un traumatisme dentaire dépend entre autres d’un timing correct ou du bon choix de la thérapie. Cette forme de résorption radiculaire externe, la plus sérieuse, peut être sûrement empêchée par des contrôles fréquents et par une thérapie adéquate effectués par le médecin-dentiste. Que faire s’il se produit tout de même une résorption inflammatoire? Si une résorption radiculaire inflammatoire est révélée cliniquement (percussion, périotest) ou par examen radiologique, une trépanation immédiate de la dent est indiquée avec obturation avec de l’hydroxyde de calcium; une apexification ne doit pas être envisagée après la disparition des douleurs si la phase de croissance n’est pas terminée. Se référer sur ce point à la littérature actuelle sur l’endodontie (p. ex. KOCKAPAN 1998). Conclusion Alors que la résorption de surface n’a aucune influence sur le pronostic de la dent atteinte, les résorptions de remplacement et inflammatoires conduisent tôt ou tard à la perte de la dent. Grâce aux connaissances acquises sur les processus biologiques lors de résorptions externes radiculaires et à l’identification des facteurs initiateurs et générateurs, différents concepts prophylactiques et thérapeutiques ont été développés au cours de ces dernières années. Les recherches actuelles se concentrent davantage sur les possibilités d’empêcher et de retarder les résorptions de remplacement. Grâce au développement des complexes protéiniques, il est devenu possible ces dernières années d’induire in vivo des cellules très spécialisées (p. ex. ostéoblastes et cémentoblastes) (HAMMARSTRÖM 1997, FILIPPI et al. 1999b). La traumatologie dentaire se concentrera à l’avenir davantage sur les mécanismes pilotes cellulaires de la cicatrisation parodontale et pulpaire. Rev Mens Suisse Odontostomatol, Vol 110: 7/2000 729