Léon Léon - Theatre comique

Transcription

Léon Léon - Theatre comique
Léon Léon
Pièce de théâtre comique
Année de création : 2004
Denis Cousin
Ce texte est déposé à la SACD.
Toute reproduction, diffusion, ou utilisation doit
faire l'objet de l'accord de l'auteur.
Contact : [email protected] /
www.theatre-comique.fr
LEON – LEON
Scène 1
Bazil – Léon – Francine
Bazil entre, pose ses seaux, boit un coup en douce. Sonnerie du réveil et remue-ménage en
coulisse côté gauche (chambre de Francine), entrée de Léon qui sort de la chambre de
Francine, il est en train de se rhabiller, s’excuse devant Bazil.
Francine apparaît en nuisette, rappelant Léon qui a oublié sa chemise (atmosphère de
panique).
Léon : (à Bazil en regardant sa montre) Excuse moi, hein, je suis pressé !
Francine : (ouvre la porte et crie à Léon) Léon ! Léon ! Ta chemise !
Léon : Tant pis ! Cache la !...
Voix de Simon : (en coulisse côté droit)Bazil non de non !... Qu’est-ce que c’est que ce
boucan là ?
Bazil : (à Léon et Francine) Rentrez dans la chambre ! Je crierai un coup quand vous pourrez
sortir !...
Entrée de Simon
Scène 2
Bazil– Simon
Bazil : Ce n’est rien patron, c’est moi !
Simon : Je le vois bien que c’est toi, tu arrives à faire un potin pareil tout seul !
Bazil : Bin je n’étais pas tout seul !
Simon : Ah bon, Francine est réveillée ?
Bazil : Bin non…
Simon : Ce n’est pas la patronne, elle est déjà dans le jardin !
Bazil : Non, j’étais avec… avec…Le chat ! Pour moi, il guettait une souris, alors tout d’un
coup, il est parti comme une balle entre les seaux et puis il les a renversés !
Simon : Le chat, je ne vois pas de chat ici !...
Bazil : Il a dû vous passer entre les jambes quand vous avez ouvert la porte !
Simon : Ça m’étonnerait, je l’aurais senti passer ! Je ne peux pas les sentir ces sales bêtes là !
Bazil : (faisant mine de chercher dans la pièce) Forcément, vous ne l’aimer pas, alors quand il
vous voit, il se cache !
Simon : Comme tu es là, tu te fiches de moi ! Tu crois que je vais te croire avec tes histoires
de chat ! C’est toi qui a renversé les seaux puis tu ne veux pas en avoir l’honneur, voilà ce
qu’il y a !
Bazil : (cherchant à nouveau dans la pièce) De toute façon, vous voulez jamais me croire !
Mikaze !.... Mikaze !... Viens là mon petit Mikaze ! Où est ce que tu es caché donc ?
Le souffleur miaule
Bazil : Ah ! Vous voyez que j’avais raison ! Le voilà mon petit Mikaze… Il a faim ce petit
Mikaze là ? Tu ne l’as pas attrapé ta souris ?... Je suis bien content de te trouver tu sais !
Heureusement que tu es là, sinon il y a des moments je serais sans voix… Tiens je vais te faire
un petit plaisir, parce que moi je sais ce que tu aimes bien.
(Bazil verse un peu de vin dans un bol et le donne au souffleur. Simon le regarde faire un peu
désabusé)
Simon : C’est vraiment ton petit con de chat qui a renversé les seaux ?
Bazil : Bin oui !
Simon : Bien un chat qui renverse des seaux, il n’a rien à faire dans une maison !
Allez ! Mikaze… Dehooooors !
(Simon s’avance vers le souffleur, prend le chat – peluche aux moustaches rouges – et le jette
dans le public)
Non, non, Madame ! C’est un chat d’ivrogne mais il n’est pas méchant !
Tu vois Bazil, on dirait que ton chat Mikaze il a eu un accident ! Sale bête !... Faut il être bête
pour appeler un chat Mikaze !
Bazil : Ce n’est pas plus bête d’appeler un chat Mikaze qu’un taureau Léon !
La porte de gauche s’ouvre, Léon apparait
Il doit rester enfermé Léon !.....
Simon : Et pourquoi il ne sortirait pas Léon ?
Bazil : (Léon n’a pas encore fermé la porte) Parce qu’il ne sortira que quand je lui dirais
Léon !
Léon referme la porte
Simon : Bien elle est raide celle-là ! Et c’est qui le patron ici ?
Bazil : (s’essuyant le front) C’est vous !...
Simon : Ah bon j’aime mieuxça !
Bazil : J’ai attrapé soif !
Simon : Bien justement ! Assieds toi, on va boire un canon, ça ira mieux après.
Ils s’assoient, Simon verse une « larme » à Bazil et un « bon verre » à lui-même.
Bazil : (à part au public) Eh bien ! Déjà qu’on n’est pas beaucoup payé !
(Simon reverse un peu plus de vin…)
Simon : Alors, pourquoi il doit rester enfermé notre taureau Léon ?
Bazil : Parce que notre voisine Jeanne, elle a une vache qui est en chaleur.
Simon : Ah bon, tu l’as vu ?
Bazil : Qui ? La vache ?
Simon : Non, Jeanne !
Bazil : Non plus, mais j’ai vu son neveu…
Simon : Celui que l’on voit de temps en temps dans sa cour là, celui qui n’est pas beau avec
une moustache, et puis tout dégarni, qui n’a pas l’air très dégourdi…
Bazil : Pas dégourdi… Ça dépend pourquoi ! Il monte bien… Il monte bien… Il monte bien
dans les trains… Il va rentrer à la SNCF…
Simon : Ah bin il ne va pas travailler longtempsalors…. En tout cas, il va falloir le tenir le
Léon, elle me doit encore une saillie la Jeanne, qu’elle a eu à l’œil comme ça le dernier coup
que Léon est passé chez elle.
Bazil : Elle va faire venir le faux Léon comme d’habitude, le taureau à chapeau, le séminaire…
Simon : Je t’ai déjà dit plusieurs fois, Bazil, que le taureau à chapeau, ce n’est pas le
séminaire qu’on dit… C’est l’inséminariste… L’INSEMINARISTE…Vu ?
Bazil : Bah ! Quand je dis faux Léon, le taureau à chapeau ou le séminaire vous comprenez
vous, c’est l’essentiel patron !
Simon : (en rigolant de Bazil) Bien sûr, mais quand il y a du monde, tu me fais honte ! Tu te
rappelles de son vrai nom, au faux Léon comme tu dis ?
Bazil : Ah non ! Comment il s’appelle déjà ?
Simon : (qui rigole) Raymond !
Bazil : Ah oui ! Bin ce n’est pas drôle…
Simon : (qui continue à rigoler) Non, mais attends…Raymond… Raymond Fourzivit.
Bazil : Ah oui, un nom prédestiné.
Simon : Tu ne crois pas si bien dire, maintenant il a vieilli, mais il y a une vingtaine d’années,
c’était un sacré coureur le Raymond… A ce qui parait làque Jeanne… C’est peut-être pour ça
qu’elle a continué à le faire venir…
Bazil : (attitude étrange) Oh ! Mais il ne viendra pas cette fois ci le faux Léon !
Simon : Et pourquoi elle ne le ferait pas venir ?
Bazil : Parce que il est fort fort malade le séminaire…
Simon : Qu’est-ce que tu en sais ?
Bazil : J’ai eu une vision…
Simon : Ah bon, tu as des visions maintenant ? C’est nouveau ça ?
Bazil : Oui ! Je vois des choses dans ma tête et puis après elles se font !
Simon : (incrédule, faisant non de la tête) Et Léon, tu le vois en ce moment ?
Bazil : (montrant de la tête la chambre de Francine) Eh bin dans la chambre à…
Simon : Dans la chambre ?
Bazil : Euh, non, dans la chambre à Jeanne !
Simon : Le taureau dans la chambre à Jeanne ? Non mais tu n’y es plus, tu mélanges tout
comme tu es là… Oh, mais il n’y aurait pas un peu de cela dans tes visions… (Levant la
bouteille, il se lève emportant son verre qu’il pose dans l’évier et la bouteille qu’il pose sur le
buffet)
Je m’en vais le voir Léon, et gare à toi si il n’est pas enfermé comme il faut dans son étable !
Simon sort
Bazil : (s’essuyant le front) Le vrai Léon…. Léon…. Le faux Léon, moi je vais tourner maboule
si ça continue ! Bon vite maintenant…
Il va vérifier par la fenêtre que son patron s’éloigne, puis s’approche de la porte de la
chambre de Francine.
Scène 3
Bazil– Joséphine
Bazil se rapproche de la porte de Francine et appelle à plusieurs reprises
Bazil : Léon ! Léon !
Entrée de Joséphine par l’autre porte, Bazil crie encore deux fois, puis s’aperçoit de la
présence de Joséphine et change sa manière d’appeler, et crie plusieurs fois.
Léon ! Léon (Joséphine s’approche doucement)
Léon ! Léon ! Léon ! Léon !....
Joséphine : Dis donc ! Qui est ce que tu appelles là ?
La porte de la chambre s’ouvre, Léon apparait
Bazil : (en parlant fort) Ah ! Justement, je n’appelle personne, comme ça tout le monde reste
ou il est ! Et Léon aussi !
La porte se referme
Joséphine : Et pourquoi tu cries Léon ?
Bazil : Je ne crie pas Léon, je m’entraîne à faire le cri du paon Léon ! Léon !
Joséphine : Ah bon, c’est nouveau ça ? Et pourquoi ?
Bazil : Parce que je vais m’inscrire à un concours d’imitation de cries d’animaux que le maire
va faire.
Joséphine : Et ou est-ce que tu as vu ça ?
Bazil : Je ne l’ai pas vu, j’ai eu une vision … Des fois, j’ai des visions, après ça se produit .
Joséphine : Et puis tu as besoin de te mettre devant la chambre de Francine pour répéter tes
âneries ?...
Bazil : (se déplaçant vers l’autre porte) Bin non, je peux me mettre devant l’autre porte.
Joséphine : Oui ! Bin ne m’énerve pas hein, je le suis déjà assez comme ça ! Francine est
réveillée ?
Bazil : Non, elle dort encore !
Joséphine : (s’avance vers la porte de Francine, Bazil s’interpose) Qu’est-ce que tu en sais ?
Bazil : Elle ronfle !
Joséphine : Elle ronfle ?
Bazil : Je l’ai entendue elle ronfle !
Joséphine : Non mais, tu n’y es plus, elle n’a jamais ronflé !
Bazil : Si, si, hier Francine elle m’a dit comme ça : Bazil, demain, t’écoute à ma porte. Surtout
si tu entends ronfler, c’est que je dors, tu me laisses ronfler.
Joséphine : Et toi pour la laisser bien dormir tu fais des cris de bêtes à sa porte !
Bazil : Bin non ! J’écoute si elle ronfle et puis je répète…
Joséphine : Retire toi de là !
Bazil : (parlant fort) Ce n’est pas la peine, elle m’a dit comme ça : de toute façon demain
matin ma porte sera fermée…
Joséphine : Elle ne ferme sa porte que quand elle est partie, jamais quand elle est là…
(Elle pousse Bazil sur le côté et essaye d’ouvrir la porte sans succès)
C’est ça, sa porte elle est fermée, elle est déjà partie !
Bazil : Ah bin oui, elle est sans doute partie alors !
Joséphine : Et puis tu l’as entendue ronfler toi ?
Bazil : Bin ce n’était peut-être pas elle !
Joséphine : Et c’était qui alors ?
Bazil : C’était sans doute Mikaze qui ronronnait !
Joséphine : Ça m’étonnerait qu’elle ferme sa porte en laissant Mikaze enfermé dans sa
chambre.
Bazil : Peut-être qu’il ronronnait pour du faux…
Joséphine : (voyant le verre sur la table, puis la bouteille) Pour du faux ? Dis donc c’est à qui
ce verre là ? Et où elle est la bouteille, je la reconnais celle-là, elle a été entamé hier au soir,
et ça c’est ton verre !...
Bazil : Ah ! Mais c’est le patron…
Joséphine : Taratata, tu as des visions de bêtes, tu entends des voix, moi, je sais ce que c’est
Bazil, c’est du délirium de pinard !... Fiche moi le camp délirer à la cour ! (menaçant et
poussant Bazil qui sort)
Scène 4
Joséphine – Simon
Joséphine : Il était déjà bête, il va devenir fou mon Bazil !...
Retour de Simon, en colère, il tient « La voix du Nord » dans la main.
Simon : (en coulisse puis sur scène)Bazil ! Non de non ! Bazil ! Tu n’as pas vu mon cochon de
commis ?
Joséphine : Je viens de le mettre dehors ton cochon de commis !
Simon : Il avait encore fermé la porte de Léon de travers ce monstre-là, il avait mis la barre
qui tourne par en dessous, j’ai dû la remettre au-dessus !
Joséphine : (montrant la bouteille) Il devient fou ton commis, voilà qu’il a des visions et qui
fait des cris de bêtes maintenant, et tu sais ce que c’est ?... C’est ça !...
Simon : Oh, il n’a peut-être pas bu tout tout seul…
Joséphine : Tu ferais bien d’arrêter toi aussi !
Simon : (se servant un café) Ce n’est pas d’aujourd’hui qu’il boit, et ça ne lui fait pas ça
d’habitude… Non, pour moi, il a quelque chose qui le turlupine et puis qu’il n’ose pas dire !
Joséphine : (s’assoit à table et prend le journal) Mon dieu Simon ! Bin… Bin…Bin… Ca alors !...
Simon : Quoi donc ? Te revoilà dans la nécrologie… Tu n’as rien de mieux à regarder ?
Joséphine : L’inséminateur… Il est mort !...
Simon : Non ! Pas vrai !....
Joséphine : (lui tendant le journal) Bin regarde !....
Simon : Monsieur Raymond FOURZIVIT. Bin merde !... Bazil il le voyait fort malade ! Tu le
savais toi qu’il était malade ?
Joséphine : Bin non…Y a quelqu’un qui lui aura dit…
Simon : Bin il disait que non… Il l’a vu dans une vision…
Joséphine : C’est un menteur !....
Simon : Il est plutôt bête que menteur… C’est quand même drôle…Enfin… Je lui
demanderai.(Simon reprend le journal qu’il feuillette) Ah! Tiens, on parle de (nom du village)
« Cette année à l’occasion de la fête du village, le comité des fêtes organise un grand
concours d’imitation d’animaux. Inscription et règlement en mairie. » Ah ! C’est une idée
ça… Mais le maire il n’en a même pas parlé à la dernière réunion de conseil
Joséphine : (restée bouche bée) Attends, répète un peu…
Simon : Ah ! Tu m’as entendu !... Je te dis que le comité des fêtes organise un concours
d’imitation de bêtes… (En rigolant) Dis donc, dans le rôle du baudet, notre Bazil il aurait
peut-être ses chances !
Joséphine : Ah bin alors là !... C’était vrai !
Simon : Quoi ?
Joséphine : Bazil il l’avait vu !
Simon : Comment ça ?
Joséphine : Bin dans une « vision » comme il dit.
Entrée de Bazil
Scène 5
Joséphine – Simon – Bazil
Bazil : (cherchant ses mots) Il y a Léon, il est… dans la chambre… Enfin non il y est plus… Il
veut… Il veut monter…
Simon : (se levant) Non de non ! J’avais pourtant remis la barre par-dessus qui est ce qui l’a
sorti ?
Bazil : Ah, pas moi ! Il est sorti tout seul !
Simon : On en reparlera plus tard ! Pour l’instant il faut le faire rentrer ! Jeanne elle serait
trop contente. Allons-y et puis on va l’attacher dans son étable…
Simon, Joséphine sortent, Bazil reste en retrait, Simon revient
Eh dis donc, toi tu viens aussi !
Bazil : Oui, oui, je pisse un coup et puis j’arrive !
Simon : Evidemment, c’est toujours quand il y a du boulot urgent que Monsieur a envie de
pisser, allez, dépêche toi !
Simon sort
Scène 6
Bazil – Léon – Francine
Bazil après avoir vérifié par la fenêtre que le patron s’est éloigné, s’approche de la chambre
de Francine et frappe à la porte.
Bazil : Léon ! Francine ! C’est moi ! Vous pouvez sortir ils sont dehors !
Léon et Francine sortent, Léon (timide) reste près de la porte de Francine, Bazil entraîne
Francine à la fenêtre
Francine : Où est ce qu’ils sont ?
Bazil : Ils sont dans la cour, on va attacher Léon dans son étable, quand il sera rentré dans
l’étable et qu’ils seront occupés à l’attacher, je viendrais te le dire alors là ton Léon à toi, il
aura plus qu’à traverser la cour en vitesse ; Bon j’y vais !
Bazil sort
Scène 7
Francine – Léon – (+ voix de Simon)
Francine regarde par la fenêtre, Léon est resté près de la porte de Francine. Léon va avancer
et reculer.
Francine : (regardant par la fenêtre puis regardant Léon) Ils sont dans la cour tous ! Quelle
aventure ! Tu m’aimes mon Léon ?
Léon : (avance de trois pas) Bien sûr que je t’aime !...
Voix de Simon : (Léon recule) Non Léon !... Tu n’iras pas !...
Francine : Tu as peur mon Léon ?
Léon : (réavance tout doucement) Bin, ton père il n’as pas l’air fort commode…
Francine : Il aboie fort mais il ne mord pas !
Voix de Simon : (Léon recule) Non Léon, ce coup-ci, il faudra qu’elle paye !...
Léon : Qu’est-ce qu’il dit ?
Francine : Il parle de ta tante… Il dit qu’il faudra qu’elle paye pour que Léon il y aille.
Léon : Ah bon ? Qu’il aille où ?
Francine : Bin chez ta tante !
Léon : Pour faire quoi ?
Francine : L’amour !... Innocent !....
Léon : Ah oui !
Voix de Simon : Non !... Tu ne lamonteras pas !
Léon : (reculant) Qu’est-ce qu’il dit ?
Francine : Oh rien ! Tu m’aimes fort alors ?
Léon : (avançant d’un pas) Bien oui !...
Francine : Alors on va se marier ?
Léon : (avançant d’un pas) Bien sûr !... Si tu veux !...
Francine : Bin, je veux !... Et puis… Il va falloir !...
Léon : (avançant d’un pas) Ah bon ?... Pourquoi ?...
Francine : (montrant son ventre) Bien tu ne devines pas gros bêta ?
Léon : Bin non !
Francine : Ça fait deux mois que je ne suis pas réglé !
Léon : (met un temps à réaliser, sort un mouchoir, s’essuie le front est s’écroule victime d’un
malaise) Ah bon ?... Alors t’es…
Bazil rentre
Scène 8
Bazil – Francine – Léon
Bazil : Ca y est ! Ils sont dans l’étable, Léon il peut passer, mais il faut qu’il se dépêche… Bien
où est ce qu’il est ?
Francine : Là !
Bazil : Bien, qu’est-ce qu’il fait là ?
Francine : Un malaise… Une syncope !
Bazil : Tu l’as usé toute la nuit comme tu es là ?
Francine : Oh dis !... Non, là il a eu une émotion et puis clac ! Ce n’est pas grave, je suis
habitué dans quatre à cinq minutes il en sera revenu…
Bazil : Oui, mais c’est trop long, il faut qu’il repasse vite dans la cour après tes parents vont
revenir… Tu n’as qu’à lui faire la ventilation respiratoire…
Francine : Ça ne sert à rien, il ne manque pas d’air, c’est comme si il dormait fort…
Bazil : (administre deux claques à Léon) Bin on va le réveiller ! Bon ça ne marche pas fort, on
va essayer autre chose… Donne la bouteille de goutte va !
Francine : C’est qui n’a pas l’habitude…
Bazil : Justement, ça marchera encore mieux !
(Francine amène une bouteille et un petit verre de gnole qui resteront sur la table. Elle
regarde par la fenêtre au passage.)
Ils sont encore dans l’étable ?
Francine : Oui !
Bazil : Bon, je tiens sa tête donne lui toi !
Francine : Léon, Léon, ouvre ta bouche donc !
Léon boit le verre, se lève, ouvre grand la bouche et expire fort
Francine : Ca y est, il en revient !
Bazil : Je savais bien que c’était du bon !... Bon, vite maintenant, il faut te sauver !
Léon : Mais il faut le dire à ton père…
Francine : Pas tout de suite, il faut le préparer…
Bazil : (se rapprochant de la fenêtre) Allez ! En route, tu vas tout droit jusqu’à la barrière de
Jeanne, tu passes en dessous, tu es sauvé !
Léon sort
Scène 9
Bazil– Francine
Bazil : (regardant par la fenêtre) Ca y est, il a passé la clôture, nous sommes sauvés…. Mais
dis donc, qu’est-ce que tu lui as dit à ton Léon pour le mettre dans cet état-là ?
Francine : Que je suis enceinte !
Bazil : Ah ! Parce qu’en plus… Ah bon !... C’est toi qui est enceinte, puis c’est lui qui fait des
malaises… Oh, mais c’est ton père qui va être content !... Et puis Léon tu peux le cacher le
temps que tu veux dans ta chambre, mais son petit tu ne pourras pas le cacher longtemps
dans ton ventre…
Francine : Justement, mon père, pour lui dire, ça me fait peur… Et puis Léon … Il n’est pas
fort hardi…
Bazil : Pas fort hardi !... Pas fort hardi !... Ca dépend pourquoi ! Enfin pour ton père va falloir
trouver quelque chose pour lui faire avaler la pilule…
Francine : Oui, c’est moi qui aurais dû la prendre !
Bazil : Quoi ?
Francine : La pilule…
Bazil : Ca, c’est bien vrai… Il ya peut-être une idée à creuser… Mais il faudrait vérifier ça !
Francine : A quoi tu penses ?
Bazil : Je pense que tu vas nous faire un poussin d’hayure mais que toi aussi tu es un poussin
d’hayure !
Francine : Non !?
Bazil : Quel jour tu es née ?
Francine : Le 9 juillet !
Bazil : Et quel jour ils se sont mariés ?
Francine : Le 10 octobre de l’année d’avant, juste 9 mois avant.
Bazil : Ce n’est pas vrai !
Francine : Bin ils me l’ont toujours dit…
Bazil : Tu l’as vu écrit ?...
Francine : Bin non !
Bazil : Hé ! Hé ! Faudrait le livret de famille… Tu ne sais pas où ils l’ont cachés ?
Francine : Oh je crois savoir je vais regarder tout de suite (elle cherche et trouve dans le haut
au-dessus d’un meuble dans une grande enveloppe)
Bazil : (regardant par la fenêtre) Vite ! Vite ! Les voilà !
Francine : Mariés le 10 décembre… Sept mois, sept livres. Ha ! Les monstres !...
Bazil : Les monstres, les monstres… Je te signale que tu es entrain de faire la même chose…
Vite, cache toi dans la chambre, tu écoutes à la porte, si je t’appelle tu rentres !
Francine sort, la bouteille de « goutte » et un petit verre sont resté sur la table
Scène 10
Bazil – Joséphine – Simon
Entrée de Joséphine et Simon
Simon : (en colère) Ah, parce que c’est là que tu es ?.... Alors c’est le monde à l’envers, les
patrons bossent et les commis se reposent … Tu ne pouvais pas nous donner un coup de
main pour l’attacher non de non !
Bazil : Bin il fallait que je revienne vite ici pour… Pour…
Joséphine : Pourquoi ?
Bazil : Pour pisser…
Simon : Encore ?
Bazil : Bin, j’avais à nouveau envie !
Simon : Dis donc, tu ne peux pas pisser dehors, tu ne sais plus pisser debout ?
Joséphine : Oh, mais il va falloir faire venir le médecin, tu dois avoir des problèmes de
tuyauterie.
Simon : On va faire d’une pierre deux coups, on va le faire venir pour la tête et puis pour le
bout !
Joséphine : Oui ! Puis si il n’y a plus rien à faire, bien il y aura plus qu’à tout couper (puis
voyant la bouteille sur la table)
Oh, mais je comprends qu’il n’arrête pas de pisser, qu’est-ce que c’est encore cette
bouteille-là ?
Bazil : Oh ça, ce n’était pas pour moi, c’était pour Léon pour le requinquer.
Simon : Tu veux donner de l’armagnac au taureau, non mais tu n’y es plus ?
Joséphine : Cette fois ci, il est devenu fin fou ! Oh mais dis donc, il a servi ce petit verre là ?
Bazil : Bin j’avais besoin de me requinquer aussi…
Simon : (ironique) Ah d’accord ! Forcément, tu t’es usé à faire rentrer Léon…
Bazil : Non à le faire sortir…
Joséphine et Simon se regardent interloqués
Simon : Ah parce que c’est toi qui l’as fait sortir de l’étable !
Joséphine : Tu ne crois pas que ça devient carrément un motif de licenciement ?
Bazil : Je ne l’ai pas fait sortir… Il est sorti tout seul…
Simon : Ecoute Bazil… Ce matin quand je suis sorti pour vérifier qu’il était bien enfermé, la
barre qui tourne je l’avais remise au-dessus, parce que toi Bazil, tu l’avais remise en
dessous… Je t’ai déjà dit dix fois que si tu mets la barre en dessous, une fois de temps en
temps, en grattant sa tête comme ça, il arrive à faire tourner la barre vers le bas… Si la barre
elle est poséeau-dessus, il ne sait pas faire ça, même si il soulève un peu avec sa tête la barre
elle retombe dedans et puis elle bloque !
Bazil : Rappelez-vous le patron, la dernière fois qu’il a fricotter avec la vache de Jeanne, la
barre elle était par-dessus !
Simon : C’est bien pour ça que je suis quasiment sûr que cette fois là c’est Jeanne qu’elle a
ouvert la porte en douce au matin de bonne heure !
Bazil : Et bien non ! Moi maintenant, je sais que c’est Léon tout seul ! Je le sais parce que j’ai
eu une vision hier de ce qui s’est produit ce matin
Simon : Ah bon… Eh bien expliquetoi !
Bazil : Vous savez qu’un coup de temps en temps, Léon il se met debout sur son train arrière
pour regarder par-dessus la grande porte ?
Joséphine : Bon et alors ?
Bazil : Bin d’habitude il ne se passe rien, mais quand il sent une vache en chaleur pas loin, là
il se passe quelque chose…
Joséphine : Bin quoi donc ?
Bazil : Léon il est déjà bien monté !
Joséphine : C’est normal, c’est un taureau, c’est à sa que ça sert !
Bazil : Eh bin, quand Léon amoureux il grimpe sur la porte, ce n’est pas bien monté qu’il est,
c’est extra bien monté … C’est… Monté à rallonge…
Joséphine : Bon ça va ! On a compris !
Bazil : Eh !... Debout sur son train arrière, il y a la rallonge qui soulève la barre et puis la
porte elle s’ouvre…
Simon : Bien merde alors… C’est vrai qu’à voir comment elle est faite la porte, c’est bien
possible… Et tu as vu ça hier dans une vision alors ?
Bazil : Bin oui…
Simon : Et tu en as souvent des visions ?
Bazil : Un coup de temps en temps !
Joséphine : Et la vision qu’il va y avoir un concours d’imitation d’animaux, il y a longtemps
que tu l’as eu ?
Bazil : Il y a une quinzaine de jours
Joséphine : Et tu n’en as pas parlé à personne….
Bazil : Ah bin non, comme ça je peux m’entraîner avant les autres !
Joséphine : Alors tu sais déjà ce que tu vas faire comme bêtes ?
Bazil : Bin oui !
Joséphine : Montre un peu !
Bazil fait des imitations d’animaux
Simon : (reprenant le journal, il a une idée en voyant les pronostics pour le « quarté » du
lendemain) Dis donc Bazil, tu as des visions de taureau, mais tu pourrais aussi avoir des
visions de cheval sur quelque chose qui se produirait le lendemain ?
Bazil : Bin oui, il suffit que j’y pense fort et puis que….
Joséphine : Oui, oui, je comprends ton idée (à Simon)
Et puis que quoi Bazil ? (à Bazil)
Bazil : Oh mais vous n’allez pas être contente !
Joséphine : Si, si Bazil, dit quoi ?
Bazil : Bin ça se produit seulement quand j’ai bu un coup de trop…. Juste avant de tomber…
Simon : Oh, bin on a bien le droit de boire un petit coup de trop de temps en temps, pas vrai
Joséphine ?
Joséphine : Bien sûr ! Et puis tu sais Bazil que tu es notre meilleur commis et puis qu’on
t’aime bien !
Bazil : (a part au public)Elle n’a pas toujours dit ça !
Simon : (fait asseoir Bazil et lui verse un verre) Ça c’est bien vrai que l’on t’aime bien, tiens
assieds toi puis bois un coup…. On va faire une expérience…..Tu vois Bazil il y a un quarté
quinté plus demain, arriverais tu à voir l’arrivée des chevaux aujourd’hui ? (il fait mine de lui
reverser un verre)
Bazil : (repoussant la bouteille) Oh, c’est fort probable ! Mais celle-là, elle est quasiment
finie, puis avec du bordeaux ça marche quand même mieux !
Simon : Phine donc ! Tu vois bien que notre commis à soif, va chercher une bouteille de
bordeaux… (À part)Ramènes en deux parce qu’une ça ne suffira peut-être pas à le faire
tomber ! (à Bazil) Détends toi va Bazil …. Tu es bien là ?
Bazil : Oui !
Simon : Tu n’as pas trop chaud ?
Bazil : Non !
Simon : Tu n’as pas trop froid ?
Bazil : Non !
Simon : (verse une nouvelle bouteille) Tiens bois un coup, c’est du bon ! Bon alors tu veux
essayer de voir les chevaux du quinté demain !
Bazil : (qui boit) Oui !
Joséphine : Tu les vois déjà ?
Bazil : Non ! Je disais oui il est bon ce vin là !
Simon verse, Bazil boit
Simon : Alors ? Maintenant tu vois quelque chose ?
Bazil : Oui, je vois des gens, plein de gens que je ne connais pas. Il y en a qui sont assis puis
d’autres qui sont debout. Puis il y a une allée au milieu.
Joséphine : (à Simon) Là il n’y est pas du tout, c’est des chevaux qu’il doit voir !
Bazil : J’en vois même un debout avec des jumelles !
Joséphine : Bin moi je ne vois rien !
Bazil : (désignant un compère avec des jumelles au bout de la salle) Mais si, regardez là-bas
dans le fond !
Joséphine : Bin enfin non, moi je ne vois rien !
Simon : Mais forcément que tu ne vois rien, puisque c’est une vision. Mais c’est sûr il y est…
Plein de gens, une allée, quelqu’un avec des jumelles… Mais c’est le champ de course
Phiphine …
Joséphine : Ah oui bien sûr !...
Simon : Alors maintenant Bazil ?
Bazil : Ca y est, je vois des chevaux, Oh, il y en a bien une quinzaine, alignés derrière des
barrières… Oh puis il y a un homme à côté avec un pistolet qui lève son bras en l’air… Et
puis ?.... Ah, bin il a disparu… Ça c’est qu’il y a quelqu’un qui me perturbe… Maintenant, je
vois Francine … Elle est derrièreune porte elle va rentrer…
Entrée de Francine
Scène 11
Bazil – Joséphine – Simon – Francine
Simon : Ah ! Merde !...
Joséphine : Qu’est-ce que tu fais là ?...
Francine : Bin merci pour l’accueil !
Simon : Ecoute ma fille… On est occupé avec Bazil, on fait une expérience…
Francine : (elle compte les bouteilles) 1 - 2 - 3 … Vous jouez à qui est-ce qui va tomber le
premier ?
Joséphine : Regarde et puis tais toi, on t’expliquera après !
Simon : Bazil, mon brave Bazil, tu vois encore les chevaux ?
Bazil : Oui, mais fort loin…
Joséphine : Remet lui une dose…
Simon verse, Bazil boit
Simon : Et là ?
Bazil : Bin il court.
Simon : Tu vois les numéros ?
Bazil : Oui, ils vont arriver, il y en a deux devant et deux derrière !
Simon : C’est quoi les numéros des deux premiers ?
Bazil : C’est le 9 et puis le 7 !
Simon : On aura toujours le doublet, note Phine, le 9 et puis le 7.
Joséphine : Je retiens le 9 et puis le 7, c’est justement la naissance à Francine !
Simon : Et les deux qui suivent Bazil, tu les vois ?
Bazil : Oui dans le brouillard…
Simon verse, Bazil boit
Simon : Et là ?
Bazil : Le deuxième et puis le troisième c’est le 10 et puis le 12.
Simon : Ca y est, on a le quarté, note Phine 10 et 12
Joséphine : Pas la peine le 10 du 12 c’est notre date de mariage l’année d’avant.
Simon : Ah bin oui, c’est vrai !
Francine : Ah bon ? Je pensais que votre mariage c’était le 10 mais du mois d’octobre.
Simon : C’était la date qu’on aurait voulu, mais on n’a pas pu parce que le maire était
malade…
Francine : D’habitude quand le maire est malade, c’est l’adjoint qui le remplace !
Simon : Bin oui mais l’adjoint il était malade aussi !
Francine : Puis ils ont été malade deux mois tous les deux !
Joséphine : Ecoute Simon, à 23 ans, ce n’est plus une gamine, maintenant il faut lui dire la
vérité… On s’est marié le 10 du mois de décembre et puis tu es née le 9 du mois de juillet, 7
mois après, voilà tout !
Francine : Ah, bin ça tombe bien justement, moi….
Simon : On verra ca plus tard, il ne faut pas laisser passer le quinté. Bazil, voit tu encore les
chevaux ?
Bazil : Bin j’en vois encore un fort loin, mais c’est drôle, il court mais il n’ arrive pas … Ah, bin
ce n’est pas un cheval, c’est un taureau, c’est Léon… Non, c’est un train… C’est Léon avec la
tête de Léon monté sur un train…
Joséphine : Tu lui en as mis de trop toi, il délire !
Simon : Mais non, le numéro… Le numéro Bazil ?...
Bazil : C’est écrit petit, c’est le numéro…
Toc, toc, toc… Entrée de Léon
Scène 12
Bazil – Joséphine – Francine – Léon
Simon : Qui est ce qui vient encore emmerder le monde au mauvais moment ?
Entrez !
Léon entre et se décoiffe, timide
Léon : Bonjour, excusez-moi, je ne vous dérange pas au moins ?
Simon : Si, tu vois, on vient peut-être de louper le quinté, qu’est-ce que tu veux ?
Léon : C’est-à-dire que ce n’est pas facile à dire….
Simon : Oh, mais je te reconnais toi, tu es le neveu de Jeanne, celui qui veut travailler dans
les trains.
Léon : Oui, c’est ça !
Simon : Alors, si tu es venu pour la saillie… Bin, c’est gratuit, on s’en fout maintenant, on va
être riche…
Léon : Ah bin, vous, vous êtes direct alors !... Bien pour ainsi dire… C’est fait…
Simon : Quoi, Léon il l’a monté ?...
Léon : Bin oui…
Simon : Ah bon ! Bin tu vois Bazil « barre au-dessus » ou « barre en dessous », on n’arrive
pas à l’empêcher ce monstre-là ! Alors, l’as-tu vu le cinquièmeBazil le numéro ?...
Bazil : Le numéro je ne le vois pas, mais c’est Léon !
Simon : (reprenant le journal) Attends, à moins qu’il y aurait un cheval…
Oui… Non de non !... C’est ça !... Outsider l’as Léon du Désir…
Bravo Bazil !...
Simon : 9 – 7 – 10 – 12 - AS. Bon, bien reste plus qu’à aller le jouer
(Il prend son portemonnaie et sort, s’arrêtant devant Léon) Au fait, comment tu t’appelles
toi ?
Léon : Léon !
Simon : C’est un bon prénom ça ! Garde le !
Simon sort
Léon : (à Francine) Ca y est, c’est dit, mais je ne suis pas sûr qu’il est tout compris !.... Ah,
mon petit poussin !....
Léon et Francine s’embrassent. Joséphine les sépare, Francine tient son ventre à deux mains.
Joséphine : Dis donc toi, qu’est-ce que c’est que ça ?....
Francine : Ca, c’est un poussin d’hayures !... Comme vous !...
Joséphine : (partant vers la porte pour rappeler son mari)
Mon dieu Simon c’est Léon ! Léon !...
Bazil : (se mettant debout et sortant de sa torpeur)
Léon !... Léon !...
RIDEAU