Protection fongicide contre les maladies cryptogamiques
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Protection fongicide contre les maladies cryptogamiques
LA TECHNIQUE BETTERAVIÈRE n° 996 du 21 janvier 2014 Protection fongicide contre les maladies cryptogamiques our une gestion raisonnée des maladies du feuillage, il importe de mettre en œuvre l'ensemble des leviers disponibles, c'est-à-dire à partir de l'analyse du risque local, la gestion agronomique, le choix variétal et enfin la protection fongicide. La pression des maladies et le besoin en protection fongicide sont évalués chaque année dans le réseau « RÉSOBET FONGI ». En 2013, cette pression a été particulièrement faible avec des maladies plus tardives qui se sont moins développées. Ainsi le « besoin en fongicides » (c'est-à-dire l’utilisation nécessaire et suffisante pour assurer le rendement, dans le cadre de la démarche IPM) dans le Résobet fongi a-t-il été de 0.91 traitements contre 1.45 en 2012 et 1.48 en 2011. Ces résultats montrent bien les marges de manœuvre disponibles lorsque sont mis en œuvre les principes de la protection intégrée, et tout particulièrement le suivi du développement des maladies en réseau. Les progrès enregistrés dans le niveau de résistance aux maladies (et tout particulièrement à la cercosporiose) des nouvelles variétés viennent à l’appui de cette démarche de progrès. En parallèle, l’ITB évalue chaque année les fongicides sur les maladies présentes. Ce travail permet le suivi des efficacités et la mise à jour des recommandations. P Les enseignements de 2013 1 Les conditions particulièrement froides du printemps associées à un mois de juillet sec, suivi des conditions un peu plus humides de la première semaine d’août, ont entraîné un développement des maladies principalement à la mi-août, la proportion des parcelles au seuil du RÉSOBET FONGI est ainsi passée de 13 % fin juillet à 69 % fin août et 77 % fin septembre. Du fait du développement particulièrement tardif des maladies, 26 % des sites du réseau n’auront reçu aucun traitement fongicide cette année. La date moyenne de première intervention est le 13 août (cf. graphique n° 1), avec plus de 56 % de déclenchements sur cercosporiose, principalement au sud de Paris, en Champagne et en Limagne, et près de 22 % sur oïdium partout ailleurs. Cette date d’intervention est la plus tardive en moyenne depuis la création du réseau en 2007, et ce quelles que soient les régions. Quand elles étaient utiles, les deuxièmes interventions (cf. graphique n° 1) ont été déclenchées à la date moyenne du 27 août, à 68 % sur cercosporiose, principalement au sud de Paris, en Champagne et en Limagne, 9 % sur oïdium dans l’Oise, 9 % sur ramulariose au sud de Paris, et le reste sur le complexe de maladies. Une seule troisième intervention a été déclenchée dans la Marne le 5 septembre sur cercosporiose (cf. graphique n° 1). Du fait du développement tardif des maladies, 57 % des sites du réseau ont reçu une seule intervention, 16 % deux interventions et 1 % (Cf. graphique n° 1) trois interventions, soit un nombre d’interventions moyen à 0,91, le plus faible depuis la création du réseau d’observation. Adapter le raisonnement à la situation de l’année Le complexe de maladies foliaires a fortement évolué ces dernières années en fonction des conditions climatiques, en particulier à partir de 2006 (Cf. graphique n° 2). En effet, la cercosporiose est devenue la maladie dominante en termes de nombre de sites touchés et donc de déclenchement des traitements, au dépend de l’oïdium, un peu plus discret ces dernières années, mais qui reste toujours la deuxième maladie présente, suivis par la rouille, et récemment par la ramulariose, présente depuis 2007 uniquement. De plus, sur les 3 dernières années, 2011 a un profil à dominante cercosporiose/rouille, 2012 un profil cercosporiose/ramulariose et 2013 un profil cercosporiose/oïdium. Il est donc essentiel de s’adapter à la situation de l’année. 24/9 17/9 10/9 3/9 27/8 20/8 13/8 6/8 30/7 23/7 16/7 9/7 2/7 25/6 18/6 Min Moy Max 2011 2012 2013 2011 2012 T1 2013 2011 T2 2012 2013 T3 Répartition des maladies ayant entraîné le déclenchement du 1er traitement selon les années 2 % de sites selon la maladie déclenchée Une année particulièrement tardive RÉSOBET : date d’intervention par intervention depuis 2011 100 % 0 % 7% 90 % 80 % 70 % 36 % 0% 7% 0% 7% 0% 13 % 29 % 36 % 36 % 20 % 18 % 14 % 20 % 18 % 15 % 8% 33 % 4% Ramu 14 % 46 % 50 % 50 % 40 % 57 % 57 % 67 % 47 % 10 % 2004 2005 2006 2007 Cerco Oidium 40 % 18 % 19 % 2008 2009 29 % 22 % 19 % 7% 2% 0% 56 % Rouille 41 % 51 % 20 % 2003 18 % 40 % 18 % 60 % 30 % 57 % 11 % 2010 2011 2012 2013 www.itbfr.org • L’information en temp réel • Les avis de traitement • Les notes d’information • Les actualités régionales au quotidien en photos • Un moteur de recherche sur la documentation I LA TECHNIQUE BETTERAVIÈRE Prendre en compte la diversité régionale Dans le complexe des maladies foliaires, l’importance de l’une ou de l’autre dépend fortement des facteurs climatiques annuels, des pratiques agronomiques et de la sensibilité variétale, qui va favoriser plus ou moins certaines maladies du complexe. Ainsi les trois graphiques ci-dessous montrent l’évolution sur la même période décennale du complexe de maladies dans 3 régions distinctes : - en Picardie (Cf. graphique n° 3), il apparaît que le complexe est assez équilibré avec la présence de ramulariose depuis 2007 ; - au sud de Paris (Cf. graphique n°4), il y a surtout de la cercosporiose et ramulariose en binôme ; - en Champagne (Cf. graphique n°5), on remarque que la cercosporiose est la maladie dominante du complexe depuis 2005. Ces écarts importants entraînent une protection différente entre régions, mais aussi au sein même d’une région puisqu’en Picardie les quatre maladies sont présentes chaque année de manière plus ou moins importante selon le climat de l’année. AXE D’ACTION MÉTHODOLOGIE ÉVOLUTION OBJECTIF Nuisibilité des maladies et facteurs climatiques et agronomiques Expérimentation et suivi de parcelles Communication sur les résultats depuis 2006 Connaître la nuisibilité des maladies selon leur précocité et leur dynamique Connaître les facteurs épidémiologiques intervenant dans l’apparition et le développement des maladies Sensibilité variétale Observatoire des variétés (plateformes réparties dans toute la zone betteravière) Mis en place chaque année depuis 1970 Connaître les sensibilités des variétés Identifier et promouvoir les variétés les moins sensibles Performance des fongicides Expérimentation des produits Mise en place chaque année Connaître le positionnement, l’efficacité et la persistance des fongicides Prévision du risque climatique Modélisation Réalisée chaque année Déterminer la précocité des attaques de cercosporiose Simuler la dynamique d’attaque Surveillance en végétation Réseau d’observation et d’alerte RESOBET-FONGI Mise en place chaque année depuis 2007 Conseiller, alerter et préconiser des interventions Stratégies de protection Expérimentation des stratégies Communication sur les résultats chaque année Mettre en place des stratégies de protection avec des seuils de traitement Transférer les connaissances Analyse des pratiques Enquête annuelle SITE ITB Réalisée chaque année depuis 1997 Connaître les pratiques culturales, la situation phytosanitaire et le transfert de connaissance Adapter la protection à sa situation parcellaire Les actions de l’ITB pour la gestion des maladies foliaires Le graphique ci-dessous (Cf. graphique n°6) représente pour l’ensemble des parcelles suivies depuis 2008 la répartition du nombre de sites qui ont reçu 0 à 3 traitements, en fonction de la date où le 1er seuil a été atteint. Il apparaît que, quand le 1er seuil est atteint tardivement, il est possible de réduire le nombre d’interventions. En 2013, c’était particulièrement le cas avec le nombre d’interventions le plus bas depuis la création du réseau. Quand le seuil est atteint précocement, l’observation montre qu’il est nécessaire de réaliser plus de traitements. Il est donc essentiel d’adapter la protection à la situation parcellaire en surveillant les parcelles, ce qui permet de réduire les traitements en année à faible pression, et de réussir la protection en année plus précoce. Les maladies du feuillage présentent un risque de perte de rendement et de qualité très variable selon de nombreux facteurs climatiques, agronomiques et variétaux. La pression des maladies du feuillage a été particulièrement faible cette année, confirmant une nouvelle fois la pertinence de notre démarche de raisonner le déclenchement des traitements, grâce aux outils développés ces dernières années (Cf. tableau ci-dessus) : • L’expérimentation et le suivi de parcelles : ils ont permis de comprendre la nuisibilité des maladies et les facteurs épidémiologiques, qui sont actuellement intégrés à la stratégie de protection ; ils ont également permis d’adapter les stratégies de protection avec la mise en place de seuils de traitement ; les expérimentations de 3 4 Évolution des maladies de 2003 à 2013 en Picardie 100 % Évolution des maladies de 2003 à 2013 au sud de Paris 100 % 90 % 80 % 70 % 60 % 50 % 40 % 30 % 20 % 10 % 0% 90 % 80 % 70 % 60 % 50 % 40 % 30 % 20 % 10 % 0% 2003 2004 2005 Oïdium 5 2006 2007 2008 Cercosporiose 2009 Rouille 2010 2011 2012 2003 2013 2004 2005 2006 Oïdium Ramulariose 2007 2008 Cercosporiose 2009 2010 Rouille 2011 2012 2013 Ramulariose Répartition du nombre de traitements des sites selon la semaine où le 1er seuil est atteint 6 Évolution des maladies de 2003 à 2013 en Champagne 60 % 100 % % de sites selon le nombre de traitements 90 % 80 % 70 % 60 % 50 % 40 % 30 % 20 % 10 % 0% 2003 2004 2005 Oïdium II produits permettent chaque année d’affiner les conseils sur leur utilisation. • La modélisation permet d’aider à la mise en place de l’observation en prévoyant la précocité des attaques ; • La surveillance en végétation est essentielle pour conseiller, alerter et préconiser des interventions via un réseau de parcelles représentatif de l’ensemble des situations. • L’enquête SITE annuelle : elle a permis de montrer le changement de raisonnement de la protection fongicide depuis la mise en place des outils de l’ITB et leur transfert aux agriculteurs. Tous ces outils permettent d’améliorer chaque année la stratégie de protection des maladies foliaires cryptogamiques. 2006 2007 Cercosporiose 2008 2009 Rouille 2010 2011 Ramulariose 2012 2013 50 % 40 % 3 2 30 % 1 0 20 % 10 % 0% 26 Juin 27 28 29 Juillet 30 31 32 33 34 35 Août Semaines où le 1er seuil atteint 36 37 38 Septembre 39 40 41 Octobre Le Betteravier français n° 996 Exemple de l’évaluation et de la performance des produits fongicides dans un essai en 2013 Essai produits fongicides 2013 (Luneray 76) 7 Notations sur la rouille 10 9 8 7 Note de gravité Pour juger de l’efficacité, de la persistance et évaluer la performance en contaminations naturelles des différents produits fongicides, l’ITB met en place chaque année des essais dans plusieurs régions. En 2013, 5 essais ont été mis en place en Normandie, dans le Centre, en Champagne et en Picardie. Les produits expérimentés cette année sont comparés aux références du marché fongicides. Malheureusement, la pression et le développement des maladies du feuillage, en 2013, ont été très tardifs. En effet, dans les 5 essais implantés, la date moyenne des traitements se situe au 13 août. De ce fait, l’unique traitement réalisé avec les différents produits fongicides sur l’ensemble des modalités expérimentées n’aura pas permis de les comparer entre eux du fait de cette pression fongique trop faible. Seul l’essai de la Normandie, avec une présence de rouille et une pression suffisante de la maladie, a permis de classer les produits fongicides étudiés (Cf. graphique n° 7) : Essai ITB sur l’évaluation et la performance des produits fongicides. 6 5 c 4 3 b 2 a a 1 0 19/08/2013 TEMOIN 02/09/2013 11/09/2013 SPYRALE 1l 26/09/2013 PRIORI XTRA 1l 07/10/2013 17/10/2013 RUBRIC 0.75l Le graphique ci-contre indique différentes notations de gravité de la rouille effectuées chaque semaine sur un essai de l’évaluation des produits fongicides. Lorsque l’une des quatre maladies du feuillage est atteinte, selon le seuil IPM (dans le cas de cet essai 15 % de rouille atteint le 20 août), un traitement est réalisé avec les produits expérimentés. Un suivi est effectué deux semaines après le traitement pour observer la maladie qui s’installe de nouveau selon le produit utilisé. L’échelle de notation se fait entre 0 et 10 (0 correspondant à aucune maladie présente et 10 à 100 % du feuillage atteint). Efficacité et persistance de fongicides sur rouille 8 Essai 2013, Luneray (76) Présence de pustules de rouille sur feuilles de betterave La courbe bleue correspond au témoin qui n’a reçu aucun traitement fongicide. Il permet d’estimer la présence et la pression de la maladie de l’essai. Les autres courbes permettent de comprendre l’efficacité et la persistance d’action des produits expérimentés. Plus la courbe évolue rapidement vers le haut et moins le produit est persistant pour lutter contre la maladie présente. Par ce suivi et cette évolution des courbes du graphique 7, il est ainsi possible de classer les produits entre eux. Les deux produits Spyrale (Syngenta) et Priori Xtra (Syngenta) réagissent de manière identique face à la rouille et font donc partie de la même classe statistique. Vient ensuite le Rubric (Cheminova) dans une autre classe statistique. Une fois les courbes de gravité obtenues, il est possible de calculer l’aire sous la courbe, appelée AUDPC, pour quantifier la pression de la maladie sur le produit de l’essai et donc de connaître son efficacité par rapport aux autres (Cf. graphique n° 8). TEMOIN SPYRALE 1l PRIORI XTRA 1l RUBRIC 0.75l La rubrique "La Technique betteravière" est rédigée par l'ITB - Reproduction interdite sans autorisation de la SEDA, société éditrice. Pour les produits expérimentés, plus la barre est courte et plus le produit est efficace et persistant sur la maladie rencontrée (rouille). Ce qui veut dire que plus la longueur de la barre du produit est proche de celle du témoin, moins le produit est efficace, et inversement. III LA TECHNIQUE BETTERAVIÈRE Le Betteravier français n° 996 Choisir un produit fongicide adapté à la maladie dominante 9 Tableau de l’efficacité des fongicides Cercosporiose Oïdium Rouille DAR* Ramulariose Priori Xtra 1 l 28 jours - XN, N Ibex 1 l 28 jours - XN, N 35 jours - XN, N Amistar Top 1 l 28 jours - XN Spyrale 1 l 28 jours - XN, N Monnaie 1 l 30 jours - XN, N Sans - T, N Armure 0,6 l Ce tableau représente les résultats pluriannuels des produits expérimentés sur l’ensemble des régions betteravières pour lutter contre les quatre maladies du feuillage (cercosporiose, ramulariose, oïdium et rouille). Plus le cartouche de couleur est grand, plus le produit est efficace et persistant sur la maladie à contrôler. 45 jours - N Punch One 0,5 l Sans - T, N Timbal EW 0,8 l 45 jours - N Impact 125 FL 1 l Sans - XN Fortress 0,3 l Mise à jour au 8 janvier 2013 selon l’évolution réglementaire des produits autorisés pour la campagne de protection fongicide 2014. 28 jours - XN, N * DAR : Délai Avant Récolte Évolution réglementaire des produits fongicides pour 2014 L’OGAM, dosant 125 g/l de kresoxim-méthyl et 125 g/l d’epoxyconazole, commercialisé par la société BASF, a reçu un retrait de l’autorisation de mise sur le marché au motif de la non-soumission des éléments nécessaires à la première étape du réexamen post-inscription des autorisations contenant la substance kresoxim-méthyl. Son délai d’utilisation est tombé au 31/03/2014, et ne sera donc pas utilisable pour la protection fongicide contre les maladies cryptogamiques de la betterave en 2014. L’OGAM avait été expérimenté par l’ITB pour la première fois en 1997 et avait reçu une autorisation de mise en marché pour la campagne 2001. Il avait montré de bonne efficacité sur l’oïdium. notifications de retrait des autorisations de mise sur le marché. Le délai d’utilisation de ces produits est tombé au 30/09/2014, et de ce fait ils pourront être utilisés une dernière fois pour la campagne de protection fongicide de 2014. Les produits PUNCH ONE, CAPITAN S et VERSION S, dosant 250 g/l de flusilazol, commercialisés par la société Dupont Solutions, ont reçu des autorités nationales les Nouvelle classification des substances actives, l’époxyconazole fait l’objet d’un réexamen de classement L’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) a lancé simultanément trois consultations publiques au titre des règlements REACH (enregistrement, évaluation et autorisation des produits chimiques) et CLT (Classification et étiquetage harmonisés des substances chimiques), dont l’une porte sur la classification et l’étiquetage d’une substance toxique pour la reproduction : l’époxyconazole, substance active présente dans plusieurs fongicides de la gamme des produits utilisés pour lutter contre les maladies cryptogamiques de la betterave. Cette évolution de classement pourra entraîner les changements suivants : • Changement d’étiquetage réglementaire, IV • Interdiction des mélanges, sauf autorisation particulière, • Obligations spécifiques de l’employeur, • Interdiction de l’utilisation du produit par les femmes enceintes ou allaitantes. Ce durcissement réglementaire vise donc à renforcer la protection de l’utilisateur et montre donc une évolution vers plus de précaution quant à l’utilisation des produits fongicides disponibles sur le marché de la protection des cultures. Pour le moment aucune décision n’a été prise par la Commission européenne, de ce fait pour la campagne 2014 ni les produits comportant la matière active époxyconazole, ni leurs homologations ne sont remis en cause par cette évolution de classement. INSTITUT TECHNIQUE DE LA BETTERAVE - 45, rue de Naples - 75008 Paris - Tél : 01.42.93.13.38 - Fax : 01.42.93.22.84 - www.itbfr.org - Président, Alexandre QUILLET - Vice-président, Bruno LABILLOY - Directeur Général, Marc RICHARD-MOLARD La rubrique « La Technique betteravière » est rédigée par l’ITB - Reproduction interdite sans autorisation de l’éditeur