L`architecture du paysage au profit du développement durable

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L`architecture du paysage au profit du développement durable
L’architecture du paysage au profit du
développement durable
Synthèse d’un travail de certificat / CAS en développement durable à l’Université de Genève
Promouvoir un projet paysager de façon durable?
Mais quelle question ! La durabilité ne fait-elle
pas partie du métier d’architecte paysagiste?
Dans un monde aux ressources limitées,
économiser le sol, ressource non renouvelable
par excellence, est un défi à relever, pour les
politiques publiques. La notion de paysage,
indissociable de ces questions, serait donc une
notion à la fois d’utilité publique, mais aurait
également un rôle à jouer dans la mise en œuvre
du
développement
durable.
L’architecte
paysagiste, acteur dans cette problématique,
possède des compétences de conception et tend
à se retrouver toujours plus sollicité par les
gouvernances territoriales. Seulement, possèdet-il aujourd’hui les bonnes clés de lecture lui
permettant de concevoir et réaliser des paysages
dits durables? Comment l’architecte paysagiste
peut-il mettre son travail au profit du
développement durable? Telle est la question
sur laquelle je me suis penchée, ces derniers
mois, en réalisant un travail de certificat, dans le
cadre d’un CAS1 en développement durable, à
l’Université de Genève.
Méthode
La recherche s’est limitée à l’étude
d’aménagements paysagers conçus pour un
usage public. De ce fait, l’architecte paysagiste
n’agissant pas seul, il a semblé pertinent d’inclure
différents acteurs impliqués dans ce type de
réalisations. Les groupes suivants ont été
approchés : services publics, bureaux privés
d’architectes paysagistes, entités associatives et
bureaux privés d’urbanisme. Parmi tous ces
acteurs, certains sont parfois même impliqués de
façon simultanée, dans la conception et la
réalisation d’un aménagement public urbain.
Nonobstant, il est important de préciser que seul
un faible échantillonnage a été interrogé, ce qui
représente ainsi une limite non négligeable à
cette étude de nature exploratoire. Toutefois, la
synthèse des interviews a permis d’ouvrir la
réflexion et de considérer certaines pistes que
nous souhaiterions partager avec la profession.
L’ADN « durable » de l’architecte paysagiste
Bien que les interviews aient révélé qu’agir en
faveur du développement durable soit avant tout
une question d’éducation, de mœurs ou de « foi
personnelle », la durabilité semble faire partie du
métier de l’architecte paysagiste. Apparemment,
ce dernier choisi ces études, car il est déjà, en
quelque sorte, prédisposé et sensible à ces
questions. En effet, nous avons pu comprendre
que l’architecte paysagiste a été sensibilisé au
développement durable pendant sa formation,
sans que le terme « développement durable »
n’ait pourtant été mentionné au cours de ses
études. On lui attribue cette sensibilité, et
pourtant, les aménagements paysagers autour de
nous ne sont, en grande majorité, pas conçus et
réalisés dans une optique durable. Alors, que
faire ? Voici trois pistes, descellées au cours de
l’étude, qui lui permettraient d’œuvrer
favorablement dans ce sens.
Hypothèse et but du travail
L’Hypothèse de départ est fondée sur un ressenti
personnel : les architectes paysagistes, ne
conçoivent et ne réalisent pas toujours leurs
aménagements en tenant compte des principes
promus par le développement durable, même
s’ils y sont sensibilisés. Le but de la recherche a
donc été de vérifier cette supposition, d’en
desceller les éventuelles causes, mais surtout de
montrer comment l’architecte paysagiste peut
intégrer les dimensions du développement
durable dans sa profession. Ce travail n’a pas la
prétention de donner réponse à tout. Il ne s’agit
pas non plus de lister d’éventuels principes à
respecter, inscrits dans un guide, mais plutôt
d’ouvrir la réflexion.
1
CAS : Certificate of Advanced Studies/ Certificat de
formation continue universitaire.
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Première piste : Faire du développement
durable, sans en parler !
Les entretiens ont relevé que le terme
développement durable dessert à sa propre
cause. Les citoyens ont de la peine à s’approprier
cette notion, qu’ils considèrent comme un thème
fourre-tout. Au lieu de générer des stimuli
positifs, l’utilisation de ce terme défavorise un
projet et véhicule des connotations politiques qui
divisent. En Suisse alémanique, le terme a déjà
pratiquement été banni du vocabulaire des
architectes paysagistes, car il peut, selon eux,
complètement décrédibiliser un projet. Partant
de ce constat, il faudrait donc simplement
prendre en compte les aspects économiques,
environnementaux et sociaux, sans pour autant
déclarer « faire du développement durable ».
Troisième piste : S’impliquer dans les démarches
participatives pour contrer les dangers
d’instrumentalisation de l’architecte paysagiste
par le politique.
La synthèse des interviews a permis de constater
que la population est de plus en plus soucieuse et
active à participer à la fabrication de son
environnement naturel et construit. Les
processus participatifs vont vraisemblablement
prendre de l’ampleur les années à venir et il
s’agit, à notre sens, d’une bonne chose. C’est une
occasion unique pour l’architecte paysagiste de
trouver sa place dans ces processus. Concernant
les dangers d’instrumentalisation de l’architecte
paysagiste par le politique, nous sommes d’avis
que les processus participatifs et l’inclusion de
tels acteurs peuvent garantir la prise en
considération des besoins de la population. Ces
dangers pourraient donc être contrés par ces
démarches participatives, en veillant à ce qu’elles
ne soient pas elles-mêmes également
instrumentalisées.
Dans
cette
optique,
l’architecte paysagiste ne serait pas qu’une
marionnette articulée par le politique, mais
servirait de médiateur et de traducteur des
envies émises par les usagers, afin de construire,
tous ensemble, une réalité.
Deuxième piste : Défendre l’espace public et
régler un problème de vison de la profession.
Les différents entretiens menés ont montré que
l’espace public pose problème aujourd’hui, car il
est géré par différents services fragmentés. La
difficulté que nous avons éprouvée pour trouver
le bon interlocuteur lors de la recherche des
entités à interviewer, traduit cette complexe
réalité. L’architecte paysagiste n’est donc pas seul
à travailler sur l’aménagement et la
requalification de l’espace urbain. Il interagit de
différentes façons avec d’autres acteurs, parfois,
en tant que bureau mandataire ou à d’autres
occasions au sein d’équipes pluridisciplinaires.
Même si l’architecte paysagiste semble être
intégré à ces processus, on peut quand même se
demander s’il bénéficie d’une place équilibrée
face aux autres interlocuteurs. Est-il uniquement
consulté pour apporter « la touche verte »
(expression entendue au cours des interviews) ?
S’il souhaite avoir un plus grand rôle à jouer, il
faut tout d’abord qu’il règle les difficultés de
visibilité et de reconnaissance de sa profession.
Tous ces points relèvent d’un problème de vision,
car la plupart des gens perçoivent l’architecte
paysagiste comme un spécialiste (du végétal),
alors que ce dernier a finalement été formé sur
des thématiques plus larges. Pour pallier à cette
« méconnaissance » du métier, la Fédération
suisse des architectes paysagistes FSAP
encourage les professionnels à communiquer
davantage sur leurs actions et leurs projets.
Un savoir-faire à exploiter
Pour conclure, nous rappellerons que cette étude
a relevé que la durabilité fait partie du métier de
l’architecte paysagiste. Nous avons également pu
comprendre que comme chaque projet est
unique, et lié à une question d’échelle et de
contexte, la réalisation d’un guide paraît
superflue. Le meilleur outil pour une bonne mise
en œuvre du développement durable par
l’architecte paysagiste est finalement son savoirfaire. Les trois pistes énoncées ci-dessus
devraient toutefois aider ce professionnel du
paysage à mettre son travail au profit des valeurs
du développement durable.
Sonia Rosello
architecte paysagiste HES
assistante d’enseignement
filière architecture du paysage
Hepia, Genève
[email protected]
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