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grands chais Tr e a s u r e s o f t h e s o i l Convoquant le meilleur de l’architecture contemporaine, les nouvelles caves s’invitent au cœur des vignobles avec force et humilité. Tantôt sculpturales ou enfouies dans le sol, comme d’exigeants musées. – Spectacular, often sculptural, the newest wineries are designed to blend harmoniously into their natural surroundings. 202 PHOTOS Fernando Guerra/FG+SG – Archea Savorelli. Par Marie Le Fort Vue vers le ciel depuis l’intérieur de la cave Marchesi Antinori, creusée dans les collines du Chianti. Page de gauche : Quinta do Vallado Winery, à Vilarinho de Freires, Portugal. 2 03 Chianti se piquent de cyprès, de maisons toscanes et de la calligraphie linéaire des vignes qui sillonnent ses coteaux. A priori, rien ne semble venir troubler cet ordre millénaire. Et pourtant, presque invisibles à l’œil nu, quelques biseaux taillés dans la pente comme des traits de fusain annoncent la nouvelle cave Marchesi Antinori. “Ce n’est pas un bâtiment, ni une architecture ; c’est un morceau de paysage”, s’exclame l’architecte Marco Casamonti, fondateur de l’agence Archea. “C’est une cave sans façade, un pan de colline”. Intégralement construite en sous-sol (après que 400 000 m3 de terre aient été excavés), cette cantina s’inscrit dans le prolongement de la nature environnante : murs en béton pigmenté d’oxyde de fer, acier Corten (déjà rouillé), tuiles en terre cuite, chêne et verre, chaque surface et volume se fond dans le décor non sans faire écho, au passage, aux principes de l’Arte Povera. Un bel hommage écologique qui permet au vignoble de la famille Antinori, 26e génération de vignerons florentins, non seulement de se tourner vers le futur, et de prolonger l’horizon, mais aussi de respecter des traditions ancestrales. De l’autre côté de la Méditerranée, même humilité à l’approche du chai libanais Ixsir : seule trace de la main de l’homme dans le paysage, une vieille bâtisse en pierres sèches du XVIIe siècle domine les environs. Creusée en sous-sol par l’architecte Raëd Abillama pour respecter le “vide et la respiration du paysage”, la cave est éclairée à l’aide de saillies de lumière du jour. Impressionnant. Imposante à première vue, la cave portugaise de Quinta do Vallado s’inscrit de manière sculpturale dans le paysage de la vallée du Douro, au Portugal. Réalisé par l’agence Guedes+DeCampos, l’édifice se couvre d’ardoises à flanc de coteau comme pour faire écho au paysage minéral alentour. Un approche austère, conceptuelle, qui n’est pas sans évoquer les perspectives et lignes de fuite de la Medhurst Winery australienne : coiffant une colline de la vallée de Yarra, deux formes abstraites en béton et verre avec des reflets acier s’invitent comme une pièce de Dan Flavin en plein air. A contrario, le profil du nouveau chai du domaine Château Cheval Blanc, à Saint-Emilion en Gironde, est tout en courbes et sensualité. Dessiné par l’architecte Christian de Portzamparc, il rajeunit le domaine vieux de 181 ans, et se découvre, par-delà les vignes, comme une pièce d’art contemporain. Comme un geste chorégraphié. “Mon souci a été de trouver un équilibre avec le paysage”, explique l’architecte. “A distance, le chai semble d’abord flotter en douceur sur les vignes ; ses voiles de béton incurvées s’animent d’un mouvement qui part de la terre pour former une colline. En montant, on découvre soudain la douceur, l’amplitude du paysage millénaire, et de ces lignes tracées par l’homme.” M 204 Ci-contre en haut : L’ AND Vineyards, hôtel et vignoble contemporain imaginé dans l’Alentejo, au Portugal, avec la complicité de l’architecte brésilien Marcio Kogan. Ci-contre à droite : l’intérieur du chai Ixsir, creusé par Raëd Abillama dans les montagnes du Liban. En haut à droite : Medhurst Winery, en Australie. Ci-dessous : la nouvelle cave du Château Cheval Blanc, œuvre de Christian de Portzamparc. the hills outside of Florence are marked by cypress groves, photos L’AND – Courtesy RAËd Abillama – Peter Bennetts – EricK Saillet E n dehors de Florence, les collines du Tuscan houses and the linear calligraphy of the Chianti vineyards. An order that seems to have reigned unchanged for centuries. And yet, nearly imperceptible to the naked eye, a few deep facets cut into the ground, like outsized charcoal strokes, announce the presence of the new Marchesi Antinori wine cellar. “It’s not a building—it’s a part of the landscape,” says architect Marco Casamonti, whose firm, Archea, supervised the project. Built entirely underground, after the excavation of 400,000 cubic meters (14 million cubic feet) of earth, the storehouse is an extension of its natural setting, in its form as well as the choice of materials: concrete tinted by iron oxide, pre-rusted Corten steel, terracotta tiles, oak and glass. This eloquent ecological homage to the soil enables the Antinori family, Florentine winegrowers for 26 generations, to look to the future while perpetuating ancestral traditions. The same respect for nature can be found on the other side of the Mediterranean at the IXSIR winery in Lebanon. The 17th-century house overlooking the vines is the only visible construction. Architect Raëd Abillama built the new cellar below ground in order to preserve the “emptiness and breathing space” of the terrain, with overhangs to let in natural light—most impressive. Imposing at first sight, the Quinta do Vallado wine cellar exerts a sculptural presence in Portugal’s Douro Valley. Designed by Guedes+deCampos, the building is covered with cut slate, echoing the mineral landscape. This stark, nearly conceptual approach can also be seen in the lines and perspectives of the Medhurst Winery in Australia: at the crest of a hill in the Yarra Valley, two abstract wedges of concrete and steeltinted glass emerge from the earth, like an outdoor installation by Dan Flavin. In contrast, the profile of the new Château Cheval Blanc storehouse in the Bordeaux region of France is all about curves and sensuality. Designed by Christian de Portzamparc, it rejuvenates the 181-year-old winery like a contemporary sculpture among the winepresses. “I wanted to find a balance with the terrain,” the architect explains. “From a distance, the structure seems to float over the vines, its sheets of curved concrete rising out of the earth to form a hill. Up close, one is suddenly struck by the beauty and vastness of this timeless landscape, and of the traces left here by man.” M 205