Aide à la prise de médicaments par du personnel non infirmier
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Aide à la prise de médicaments par du personnel non infirmier
Aide à la prise de médicaments par du personnel non infirmier Avant la loi HPST : textes et jurisprudence La circulaire DGS/PS3/DAS n° 99-320 du 4 juin 1999 relative à la distribution de médicaments autorisait la distribution de médicaments dans les établissements sociaux et médicosociaux par les personnels chargés, entre autre, de l’aide aux actes de la vie courante. Le Conseil d’Etat, dans un avis rendu le 9 mars 1999, a estimé que la distribution de médicaments, lorsqu’elle correspondait à l’aide à la prise d’un médicament prescrit apportée à une personne empêchée temporairement ou durablement d’accomplir ce geste, pouvait être réalisée par toute personne chargée de l’aide aux actes de la vie courante, suffisamment informée des doses prescrites aux patients concernés et du moment leur prise (hors des restrictions exceptionnelles relatives soit au mode d’administration comme une injection ou au médicament lui-même comme la nécessité d’une dose très précise de la forme administrable). Inversement, lorsque la distribution du médicament ne peut s’analyser comme une aide à la prise (…) elle relève de la compétence des auxiliaires médicaux habilités à cet effet. C’est le cas, par exemple, des patients d’une structure hospitalière qui peuvent prendre euxmêmes leurs médicaments, contrairement à ceux qui ne peuvent accomplir ce geste. Le refus d’un aide-soignant Mr. X, aide-soignant, a été suspendu de ses fonctions par le directeur du CHU de Bordeaux, en raison, notamment, de son refus de participer à l’aide aux patients pour la prise de médicaments. La cour administrative d’appel, dans un arrêt du 3 avril 2008, rejette la demande d’annulation de la suspension de ses fonctions. La cour d’appel s’appuie sur la notion d’actes de la vie courante évoquée dans la circulaire précitée et ajoute : « Ce refus, qui est à l’origine de dysfonctionnement du service et qui met en jeu la sécurité des patients, constitue un manquement grave à ses obligations professionnelles » Les décrets 2002-194 du 11 février 2002 et 2004-802 du 29 juillet 2004 traitent « des actes accomplis et les soins dispensés relevant du rôle propre de l’infirmier… ». Certains y ont vu « l’abrogation » de la circulaire précédente et l’obligation d’un personnel infirmier (ou, sous sa responsabilité, d’aides-soignants, d’auxiliaires de puériculture, d’aides médico-psychologiques) Depuis la loi HPST : textes et jurisprudence La loi 2009-879 du 21 juillet 2009 portant sur la réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires est venue conforter la circulaire de 1999 (article L.313-26 du code de l’action sociale et des familles) : « Au sein des établissements et services mentionnés à l'article L. 312-1, lorsque les personnes ne disposent pas d'une autonomie suffisante pour prendre seules le traitement prescrit par un médecin à l'exclusion de tout autre, l'aide à la prise de ce traitement constitue une JEAN-‐CLAUDE DAUBIGNEY – 5 AOÛT 2015 1 modalité d'accompagnement de la personne dans les actes de sa vie courante. L'aide à la prise des médicaments peut, à ce titre, être assurée par toute personne chargée de l'aide aux actes de la vie courante dès lors que, compte tenu de la nature du médicament, le mode de prise ne présente ni difficulté d'administration ni d'apprentissage particulier. Le libellé de la prescription médicale permet, selon qu'il est fait ou non référence à la nécessité de l'intervention d'auxiliaires médicaux, de distinguer s'il s'agit ou non d'un acte de la vie courante. Des protocoles de soins sont élaborés avec l'équipe soignante afin que les personnes chargées de l'aide à la prise des médicaments soient informées des doses prescrites et du moment de la prise. » Par conséquent 1(commentaire CASF Dalloz 2014) : « Le texte prévoit que lorsque les personnes prises en charge ne disposent pas d’une autonomie suffisante pour prendre seules les traitements prescrits, l’aide à la prise des médicaments constitue une des modalités d’accompagnement de la personne dans les actes de la vie courante. Elle peut alors être assurée par toute personne chargée de cet accompagnement, à condition toutefois que, compte tenu de la nature du médicament, le mode de prise ne présente ni difficulté d’administration ni d’apprentissage particulier. » Cela signifie-t-il que certains personnels peuvent alors distribuer des médicaments alors qu’ils n’ont pas les titres médicaux requis ? Distribuer ou aider à la prise de médicaments ? L’article L.313-26 CASF, issu de la loi HPST de 2009 ne fait aucune référence à la distribution de médicaments mais seulement à l’aide à la prise de médicaments. Ce texte exclut une confusion possible qui pouvait naître de la rédaction de la circulaire de 1999. La loi HPST a écarté le jugement du tribunal de grande instance de Nancy du 13 mars 2006 qui considérait que l’aide à la prise de médicaments incluait « la préparation des piluliers et la distribution des médicaments ». La distribution de médicament relève du rôle propre de l’infirmier, du médecin ou du pharmacien. Elle suppose la préparation de piluliers par l’un ou l’autre. La « distribution de médicaments » : infirmier, médecin ou pharmacien. Préparation des piluliers qui ne peut être déléguée L’ « aide à la prise de médicament » : aidesoignant, auxiliaire de puériculture, aide médicopsychologique (et d’autres ?). Pour les personnes qui ne peuvent accomplir ce geste. 1 Commentaire CASF Dalloz 2014 page 524 JEAN-‐CLAUDE DAUBIGNEY – 5 AOÛT 2015 2 Règles liées à l’exercice de la profession d’infirmier2 L’infirmier donne habituellement des soins infirmiers : • • Sur prescription ou conseil médical, Ou en application du rôle propre qui lui est dévolu (en particulier la liste des dispositifs médicaux que les infirmiers sont autorisés à prescrire en vertu de l’arrêté du 13 avril 2007) Nous nous intéresserons ici à la distribution de médicaments sur prescription médicale. Parmi les actes professionnels propres au rôle de l’infirmier, l’article R.4311-2 CSP précise : « contribuer à la mise en œuvre des traitements en participant à la surveillance clinique et à l’application des prescriptions médicales contenues, le cas échéant, dans des protocoles établis à l’initiative du ou des médecins prescripteurs » « Lorsque les actes accomplis et les soins relevant de son rôle propre sont dispensés dans un établissement ou un service à domicile à caractère sanitaire, social ou médico-social, l’infirmier […] peut, sous sa responsabilité, les assurer avec la collaboration d’aides-soignants, d’auxiliaires de puériculture ou d’aides médico-psychologiques qu’ils encadrent dans les limites de la qualification reconnue à ces derniers du fait de leur formation3. » Par exemple, l’aide médico-psychologique est amené « sous la responsabilité d’un infirmier, à effectuer certains soins et aider à la prise de médicaments sous forme non injectable4 » Les actes qu’accomplit l’infirmier ou les soins qu’il dispense font l’objet, en particulier, des articles R.4311-5 à R.4311-10, du Code de la Santé Publique. Le refus d’un agent de service Par un arrêt du 2 décembre 2014, la Cour de cassation a jugé que le fait, pour un agent de service en salle à manger, de refuser d'aider les résidents à prendre des médicaments dans le cadre de l'assistance à l'accomplissement des actes de la vie courante constitue un motif réel et sérieux de licenciement. « Ayant refusé d'assurer l'aide à la prise de médicaments relevant des actes de la vie courante au sens de l'article L. 313-26 du Code de l'action sociale et des familles, un agent de service en salle à manger est licencié pour motif réel et sérieux ; elle conteste alors son licenciement devant la juridiction prud'homale. La Cour d'appel confirme le congédiement de la salariée au motif que le refus opposé constitue bel et bien un motif réel et sérieux. La Chambre sociale de la Cour de cassation, contrôlant l'appréciation des faits réalisée par le juge d'appel, constate que la salariée, engagée comme agent de service en salle à manger, distribuait les médicaments et assistait les résidents à la prise de médicaments lors des repas, conformément à sa fiche de poste, mais qu'après que certains de ces repas avaient été servis dans les chambres, elle avait refusé de remettre à leurs destinataires les piluliers nominatifs placés sur les plateaux repas qu'elle distribuait. Elle considère que, dès lors, le juge du fond a exactement qualifié ce comportement de fautif et que ce manquement caractérise un motif réel et sérieux de licenciement ». 2 Ordonnance n°2009-1586 du 17 décembre 2009 – articles L.4311-1 CSP Article R.4311-4 CSP 4 Annexe 1 du référentiel professionnel des AMP 3 JEAN-‐CLAUDE DAUBIGNEY – 5 AOÛT 2015 3 Des situations particulières Établissements sans personnels médicaux ou paramédicaux Certaines structures ne disposent pas nécessairement de médecin, d’infirmier, d’aide-soignant, d’auxiliaire de puériculture ou d’aide médico-psychologique. C’est le cas, par exemple, de beaucoup des maisons d’enfants à caractère social ou des établissements et services d’aide par le travail. Lorsque, compte tenu de la nature du médicament, le mode de prise ne présente ni difficulté d’administration ni d’apprentissage particulier, l’aide à la prise du traitement peut être assurée par toute personne chargée de l’aide aux actes de la vie courante5. Ce qui inclut, par exemple, les éducateurs, les moniteurs éducateurs, les veilleurs de nuit. La fiche de poste des professionnels concernés doit faire apparaître cette disposition. Les piluliers sont alors préparés, le plus souvent, par le pharmacien ou infirmière libérale appelée à cet effet. Gestion des médicaments à l’occasion de transferts temporaires d'établissements pour enfants et adolescents handicapés6 « La circulaire DGS/DAS 99/320 du 4 juin 1999 reprenant un avis du Conseil d'Etat sur la question distingue : • • l'aide à la prise d'un médicament prescrit qui relève d'un acte de la vie courante et qui peut être confié à toute personne chargée de l'aide aux actes de la vie courante (éducateur, animateur) suffisamment informée des doses prescrites au patient concerné et du moment de la prise de médicament (cf. ordonnances jointes au dossier) ; du champ d'application de l'article L. 4161-1 du code de la santé publique qui relève d'un acte professionnel (médical ou infirmier) et qui constitue un champ de restrictions liées à des modes d'administration particuliers (injection) ou à la nature du médicament prescrit (exemple d'une dose très précise de la forme administrable). Il convient de demander au médecin de l'établissement d'interpréter les prescriptions en regard de ces dispositions avant le départ en transfert afin d'éviter tout problème sur place. Cela signifie que d'une manière générale la présence permanente d'une infirmière qui administre les médicaments aux enfants n'est pas obligatoirement requise (sauf bien sûr s'agissant d'enfants nécessitant une présence médicale ou paramédicale constante). Les médicaments sont confiés à l'encadrant référent de l'enfant, qui se charge de lui donner les médicaments dans les conditions prescrites. Lorsqu'un enfant aura une prescription qui nécessite l'intervention d'un professionnel de santé, le directeur ou son représentant devra s'assurer qu'il peut disposer en tant que de besoin des services de ce professionnel. Il faut que les ordonnances des médecins et les médicaments soient stockés et rangés avec mention du nom des enfants dans un meuble fermé à clé et dans une pièce particulière non accessible aux enfants. Dans le cas d'un transfert dans un camping une solution devra être trouvée pour isoler et gérer les médicaments et les rendre inaccessibles pour les enfants ». 5 6 Article L.313-26 CASF Circulaire DGAS/3 C/MEN/DES/MS/DS n° 2003/149 du 26 mars 2003 JEAN-‐CLAUDE DAUBIGNEY – 5 AOÛT 2015 4 La prescription La prescription est un acte médical. Le contenu de la prescription fait l’objet de l’article R.51322 du code de la santé publique et d’une recommandation de la Haute Autorité en Santé (nom et prénom du patient, sexe et date de naissance, si nécessaire son poids et sa surface corporelle, éventuellement la mention d’une grossesse ou d’un allaitement, la qualité, le nom et la signature du prescripteur, l’identification de l’unité de soin, la date de la prescription, la dénomination commune du médicament, son dosage, sa forme pharmaceutique, la voie d’administration, la dose par prise et par 24 heures, la durée du traitement,…) Les protocoles Le dernier alinéa de l’article L.313-26 CASF indique la nécessité d’élaborer des protocoles de soins avec l'équipe soignante afin que les personnes chargées de l'aide à la prise des médicaments soient informées des doses prescrites et du moment de la prise. Les ARS, à travers les rapports d’enquêtes réalisées par les pharmaciens inspecteurs dans les établissements médico-sociaux rappelle, entre autres, certaines nécessités : • Élaboration de protocoles de soins signés par un médecin o Protocole d’urgence de soins définis, o Protocole de soins d’urgence individualisé pour chaque résident concerné (résident à risque, épilepsie, allergies,…) o Protocole relatif aux médicaments en « si besoin ». • Procédure décrivant les étapes du circuit des médicaments o Procédure générale décrivant les principales étapes du circuit des médicaments : prescription, stockage, préparation, distribution, administration, o Fiche de distribution rédigée ou contre signée par un médecin, o Médicaments identifiables jusqu’à leur administration : nom, dosage, péremption et numéro de lot. Notons que de nombreuses pharmacies ne disposent pas d’un dispositif permettant de répondre à cette dernière exigence qui supposerait que chaque médicament, dans le pilulier, soit enveloppé individuellement et porter les indications demandées. Sources • • • • • Code de l’Action Sociale et des Familles 2014 - Dalloz Code de la Santé Publique 2013 - Dalloz La gazette santé-social novembre 2011 : L’aide à la prise de médicaments – Michel Boudjemaï Rapports d’enquête ARS Circulaires, ordonnances, référentiels relatifs au sujet : références en bas de pages JEAN-‐CLAUDE DAUBIGNEY – 5 AOÛT 2015 5