Mesure de conductivité thermique avec les sondes en forme anneau
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Mesure de conductivité thermique avec les sondes en forme anneau
MESURE DE LA CONDUCTIVITE THERMIQUE AVEC LES SONDES EN FORME ANNEAU L. Rabiey, A. Duquenoy ENSIA, UMR Génial, 1, avenue des Olympiades - 91300 Massy Résumé Un appareil du commerce pour la mesure de la diffusivité et de la conductivité thermique de matériaux solides est décrit, et les difficultés de son emploi évoquées. Des modèles mathématiques décrivant l'évolution de la température sur laquelle est basée la mesure sont décrits : il s'agit de solutions analytiques de l'équation de la chaleur dans des conditions ne correspondant pas strictement au mode opératoire de l'appareil. Pour pouvoir utiliser ces solutions, il a fallu modifier le mode opératoire. Le nouveau procédé de mesure est décrit ainsi qu'un dispositif permettant des mesures sur des produits pâteux ou liquides. Les conditions de validité des mesures réalisées sont établies et décrites à l'aide d'invariants de similitude. Abstract The difficulties of use of a commercial instrument (CTmetre) for the measurement of the thermal conductivity and diffusivity of solid matters are presented. As the analytical solutions of the thermal mathematical models on which the measurement is based is unknown, the operating procedure is modified in order to fit to those corresponding to models found in the literature. These new way of use of the instrument is described together with a complementary device which allows measures on pastes or fluids. The conditions for the validity of the measurements are established in terms of non-dimensional parameters. Introduction Pour mesurer la diffusivité et la conductivité thermique des matériaux que nous soumettons à des traitements thermiques, nous utilisons un appareil, le CT METRE, dont la documentation ne précise pas le mode d’interprétation de mesures, si bien qu'il est difficile de trouver les conditions optimales de mesure. Au cours de nos recherches bibliographiques d'un modèle représentatif de la procédure employée, la découverte de modèles proches de celui recherché nous a amené à proposer un autre mode d’utilisation de l’appareil, et à étudier les conditions de sa bonne utilisation. Appareil de mesure utilisé : le CT METRE Le CT METRE (Technique Electronique Photogravure, Meylan, France), appareil conçu pour évaluer les caractéristiques thermiques de matériaux solides, peut aussi être utilisé avec des poudres ou des liquides immobilisés. Le principe de la mesure est d’associer un élément chauffant et un capteur de température dans la même sonde : la vitesse d’échauffement du capteur est en fonction de la puissance dissipée par l’élément chauffant et de la position relative de ces deux éléments, d’une part, et des caractéristiques thermiques du matériau dans lequel la sonde est noyée, d’autre part, qui peuvent ainsi être estimées. La sonde, dont trois modèles sont disponibles, est un circuit imprimé souple d’épaisseur 0.2 mm. Les 3 modèles diffèrent par la forme et les dimensions de l’élément chauffant qui est soit linéaire, soit circulaire (anneau). La température est toujours mesurée au barycentre de l’élément chauffant. L’évolution de température subie par le matériel au cours d’une période de chauffage, choisie en fonction de sa nature et de la sonde utilisée, dépend de la conductivité et/ou de la diffusivité thermique du matériau. Un organe de commande est chargé de générer la puissance de chauffe et d’interpréter la courbe d’évolution de température induite dans le matériau à tester. L’utilisateur programme l’appareil en fournissant un certain nombre de paramètres dont la puissance et le temps de chauffage d’une part, la durée totale de la mesure d’autre part qui doivent être adaptés aux caractéristiques du matériau. On peut également fixer la variation maximale de température admissible. Dans notre cas, nous avons utilisé une sonde dont l’élément chauffant est en forme d’anneau de rayon 1.5 cm (voir figure1). Cette sonde doit être placée entre deux morceaux du produit à caractériser, morceaux de dimensions suffisantes pour que la chaleur se dissipe comme dans un milieu d’épaisseur infinie. Dans le cas d’un produit solide, les faces en contact avec la sonde doivent être impérativement planes pour assurer la continuité thermique de l’ensemble du dispositif de mesure. Figure 1 - Sonde utilisée pour la mesure de la conductivité thermique Le CT METRE peut transmettre les données durant le déroulement de l’essai ainsi que les résultats de son analyse, grâce à un port RS232C. Ces valeurs peuvent alors être enregistrées sur un PC (Figure 2). -La puissance 1,6 W 1,6 Tcentre-T0 (°C) -Le temps de chauffage 200s 1,2 -Le temps de mesure 500s 0,8 -Le pas de scrutation 1s -La variation max. de T 0,4 λ= 0,664 W/m°C 0 -0,4 2°C 0 100 200 300 Temps (s) 400 500 ρCp=4297 kJ/m3°C Coef. Ajustement =1,90 Figure 2 - Graphe obtenu à partir des relevés effectués par le CT METRE L’appareil ne fournit pas de résultat lorsqu’il considère que l’estimation des caractéristiques thermiques n’est pas fiable. Cette situation correspond à un mauvais choix des paramètres opératoires, mais la documentation de l’appareil ne fournit aucune règle quant à ce choix à partir de l’ordre de grandeur des valeurs à mesurer. Aussi avonsnous procédé à une recherche bibliographique sur la modélisation du dispositif utilisé. Etude bibliographique Martinet (1990) [1] a établi la loi de l'échauffement provoqué par une source linéique circulaire de rayon R située au niveau du plan z = 0 et dissipant, à partir de l’instant t = 0, une quantité d’énergie calorifique de Q dans un matériau homogène de température initiale nulle et de dimensions infinies, comme : (− Q 1 T (r , z, t ) = ⋅e 1, 5 ρ Cp ( 4πα t ) R2 +r2 +z2 ) 4α t ⋅ I0 ( rR ) 2α t (1) La figure 3 montre l’évolution de T selon cette loi au point de coordonnées (z = 0, r = 0), barycentre de l'éléments chauffant. 8 x 10 -3 7 Température (°C) 1 Q R2 )2 T = erfc ( 4 ⋅ λ ⋅π ⋅ R 4 ⋅α ⋅ t (2) dont la dérivée par rapport au temps est : R2 (− ) dT Q = ⋅ t −1 , 5 ⋅ e 4 α t 1, 5 0,5 dt 8 ⋅π ⋅α ⋅ λ (3) On constate que c'est l'expression (3) est la même que celle donnée par Martinet pour z = 0 et r = 0 : il y a donc une confusion entre la fonction et sa dérivée temporelle chez Martinet. La fonction (3) admet à tm = R2 (4) et un maximum 6 ⋅α (− ) 6 1, 5 ⋅ Q ⋅ α 2 ⋅ e (5). égal à 8 ⋅ π 1, 5 ⋅ R 3 ⋅ λ R2 L’équation (4) donne α = et la combinaison des 6 ⋅ tm 3 équations (4) et (5) donne : 6 λ= 5 4 3 2 1 0 On constate deux défauts à l'évolution ainsi calculée : l'élévation de température est très faible, et la température devrait croître jusqu'à un palier, et non décroître après un certain temps. Pour décrire la même situation, Cull (1974) [2] donne pour la température au barycentre de l’anneau l’équation : 0 50 100 150 200 250 300 350 400 450 500 T em ps (s) Figure 3 – Evolution de température en fonction du temps selon de l’équation (1) dans le cas où λ= 0.7 W.m-1.K-1, ρCp= 4,44.106 J.m-3.K-1 Q=1,6 W 7,36 ⋅ 10 −2 ⋅ Q ⋅ α (6) dT 3 ( ) max ⋅ R dt Nous n’avons jusqu’ici pas trouvé de modèle correspondant au cas d’un chauffage interrompu après un certain laps de temps. Aussi, avons nous décidé de changer la façon d’utiliser le CT METRE en procédant à un chauffage continu et en réalisant une dérivation numérique des températures mesurées afin d’utiliser les équations (4) et (6) pour interpréter le résultat de la mesure. Sa dérivée temporelle est calculée par dérivation d'un polynôme de degré 2 glissant, ajusté sur 5 points consécutifs. Modification du mode d’emploi de la sonde Afin de simplifier le montage expérimental, nous avons choisi de n’utiliser qu’un morceau du produit, de remplacer le deuxième morceau par un isolant et de calculer les caractéristiques thermiques avec une valeur de Q double de celle effectivement utilisée. De cette façon on n'a plus qu'une surface bien plane à réaliser avec les produits solides. Avec cet isolant nous arrivons aussi à mesurer la conductivité de produits très mous ou fluides, en plaçant ces derniers dans une petite cuve de 8 cm sur 8 cm et de profondeur 5 cm, que l'on remplit à ras bord du produit. On vient ensuite poser la sonde surmontée d’un couvercle en matériau isolant contre la surface supérieure. Le chauffage par le dessus limite les éventuels mouvements de convection naturelle. Dimensions de l’échantillon de matériau à mesurer L'utilisation du modèle ci-dessus suppose que les dimensions de l'échantillon de produit sont suffisantes pour que ce dernier se comporte thermiquement lors de l'essai comme un milieu infini. Aussi nous sommes-nous intéressé à l'évolution de la température aux limites de notre système. Plutôt que de nous arrêter au seul dispositif que nous avons mis en œuvre, nous avons préférer généraliser la portée de notre étude en donnant les dimensions minimales à donner à l'échantillon pour que la température aux limites les plus proches de l'anneau, ne s'élève pas plus qu'une valeur donnée, très faible. Deux valeurs ont été testées : 10-2 et 101 °C. L’endroit où cette élévation est constatée dans la direction z à r =R (au-dessus de l’élément chauffant) et dans la direction r à z = 0 (dans le plan de cet élément) dépend bien sûr du temps. Nous avons choisi le temps où tm est dépassée de 25%, temps qui correspond à une expérience suffisamment longue pour qu’on ait pu bien observer le maximum de la dérivée temporelle de T. Pour donner encore plus de généralité à notre étude, nous en avons cherché le résultat sous une forme aussi "adimensionnelle" que possible. changement fait apparaître le groupe 1 dQ ∂T λ ∂ 2T ∂ 2T 1 ∂T = ⋅( 2 + 2 + ⋅ ) + ⋅ ∂t ρcp ∂z ∂r r ∂r ρCp dV Le dernier terme, symbolisant la production de chaleur par la sonde, est nul partout sauf en Z=0 et r =R. On effectue un premier changement de variable en définissant les coordonnées réduites : k = r z et j = R R en prenant pour R le rayon de l'élément chauffant. Ce dont on divise les deux membres de l’équation pour faire apparaître le nombre de Fourier Fo : ⎛ ∂ 2T ∂ 2T 1 ∂ T dT + ⋅ + =⎜ j ∂j dFo ⎜⎝ ∂k 2 ∂j 2 ⎞ ρ .Cp ⋅ R 2 1 dQ ⎟+ ⋅ ⋅ ⎟ . Cp dV λ ρ ⎠ dQ 2 ⋅R qui est un invariant de Le dernier terme est dV λ similitude, non adimensionnel puisqu'en °C/Fo, n'est autre que le rapport entre la production linéique de chaleur et la conductivité, soit : A= Q 2⋅π ⋅R⋅λ Dans cette formulation le temps tm correspond maintenant à Fo=1/6. Nos résultats se présenteront donc sous la forme de graphe donnant la valeur des coordonnées réduites k et j où l’échauffement limite est atteint, en fonction de l’invariant A, ceci à Fo=5/24. Validation de la résolution numérique L’équation différentielle a été résolue numériquement par une méthode de différence finie explicite. Pour en valider les résultats nous avons comparé les valeurs calculées numériquement à celle données par la solution analytique connue au point (k=0, j=1), après avoir explicité cette solution à l’aide des même invariants de similitude que l’équation différentielle, soit : ⎛ ⎞ T = A⋅erfc⎜ Fo ⎟ 2 2 ⎝ ⎠ Les évolutions obtenues par résolution numérique et par calcul de la solution analytique sont présentées à la figure 4. Nous constatons que les courbes sont très bien superposées et donc cette résolution peut être utilisée pour définir les dimensions minimales, définies par un maximum de la variation de température, à donner à l’échantillon à mesurer. 1,2 Mise en évidence d'invariants de similitude 1 Température (°C) En l'absence d'une solution analytique pour l'expression de la température en tout point de l'échantillon, nous avons procédé à une résolution numérique du bilan thermique ponctuel. Ce bilan s'écrit, en coordonnées cylindriques avec symétrie de révolution : λ ρCp⋅R 2 0,8 0,6 0,4 0,2 0 0 0,05 0,1 F0 0,15 0,2 0,25 Figure 4 – Validation la résolution numérique (trait continu) à l'aide de la solution analytique (points) pour une valeur de A=18 Dimensions minimales de l'échantillon La figure 5 montre les dimensions minimales de l’échantillon ainsi obtenues, pour deux valeurs du critère d'échauffement avec chauffage continu, en fonction de A. ρCp = 4,24.106 J.m-3.k-1 Ces valeurs sont également assez fortes, et tout à fait comparables à celles obtenues par notre méthode. 3,5 -2 r/R 10 °C 2,5 Cas d'un produit fluide : une purée de tomates -1 10 °C 1,5 1 -2 10 °C z/R -1 0,5 10 °C 0 0,1 1 10 100 A (°C/Fo) Figure 5 – Dimensions minimales réduites « j » et « k » en fonction de A pour les deux valeurs du critère Exemple d’une mesure de caractéristiques thermiques Cas d'un produit dur : un gel d'alginate Le solide utilisé est un gel d’alginate ( 93,93% eau + 3,87 % alginate + 0,58% Na4P2o7 + 1,62% CaSo4) en forme de cylindre de rayon 4,25 cm et de longueur 4cm. La figure 6 montre l’évolution de la température relevée par le CT METRE lors d’un chauffage continu, avec une puissance de 1,6 W (équivalant à 3,2 W pour un demi volume). La dérivée temporelle de T (figure 6) admet un maximum à t=252s. On déduit de ce temps la diffusivité thermique du gel : α = 1,49.10-7 m2.s-1 Le maximum vaut 8,4.10-3 C.s-1, d’où la conductivité : λ = 0,616 W.m-1.K-1. On déduit des deux calculs la capacité thermique du gel : ρCp =4,13.106Jm-3k-1. Les valeurs obtenues correspondent à A=10.3°C/Fo, valeur pour laquelle les dimensions minimales sont z/R=1,7 et r/R=2,6 selon le critère le plus sévère (10-2°C) alors que nous avons pour valeurs extrêmes z/R=4/1,5=2,6 et r/R=4,25/1,5=2,83 : on respecte donc le critère le plus sévère selon r. 3,5 3 3 dT/dt 2 2 1,5 1 1 dT/dt * 343 T-To (°C) 2,5 1,5 Température 0,5 0,5 0 0 -0,5 0 100 200 300 Temps (s) 400 On peut vérifier que les dimensions de la cuve sont suffisantes en calculant A qui vaut ici 54 ce qui correspond à des valeurs minimales pour z/R et r/R de 2,0 et 3,0 selon le critère le plus exigeant, 1,6 et 2,4 pour le moins exigeant. Avec notre cuve, les dimensions réduites sont, pour le hauteur de 5/1,5=3,33 et 4/1,5=2,66. On peut en conclure qu’on respecte donc le critère le moine sévère selon r. Pour respecter le critère le plus sévère, en lisant la figure 5 à partir du facteur limitant qui est ici r/R=2,66, on trouve A=10 d'où une puissance efficace de 0,6 W (0,3 W pour le CT mètre). Nous avons procédé aussi à un essai avec chauffage interrompu (1,6 W pendant 200s), et le CT METRE a donné pour résultats λ = 0,666 Wm-1°C-1 et ρCp = 4,146.106 J.m-3.k-1 Ces valeurs sont plus fortes par rapport à celles obtenues par notre méthode. 7 7 6 6 5 5 4 4 3 3 2 2 1 1 0 0 100 200 300 400 0 500 Temps (s) 3,5 2,5 Pour les mesures, avec chauffage continu ou non, la purée a été placée dans la cuve décrite ci-dessus. La figure 7 montre l’évolution de la température relevée par le CT METRE lors d’un chauffage continu, avec une puissance de 1,6 W (équivalant à 3,2 W pour un demivolume) Le maximum de la dérivée est atteint à t=255s, d'où la diffusivité de 1,47.10-7 m2.s-1 Ce maximum vaut 1,64.10-2 °Cs-1, d’où la conductivité de 0,625 W.m-1.°C-1 et la capacité thermique de 4,25.106 J.m-3.°C-1. dT/dt * 360 2 T-T0 (°C) dimension réduite 3 -0,5 500 Figure 6 – L’évolution de température et sa première dérivée temporelle avec le gel Avec un chauffage continu, le CT METRE ne fournit pas de résultat. Donc nous avons procédé aussi à un essai avec chauffage interrompu (0,3 W pendant 200s), et le CT METRE a donné pour résultats λ = 0,662 Wm-1°C-1 et Figure 7 - Evolution de température et sa première dérivée temporelle avec la purée de tomate pour un chauffage continu Conclusion En l'absence d'un modèle correspondant au cas d’un chauffage interrompu après un certain laps de temps, nous avons changé la façon d’utiliser le CT METRE en procédant à un chauffage continu et nous avons établi les équations nécessaires à l'interprétation du résultat de la mesure. Nous sommes arrivés à mesurer la conductivité de divers produits durs ou fluides avec une simplification du mode d’emploi de la sonde et la maîtrise de la validité des mesures. Les dimensions d’échantillon que nous avons prévu d’utiliser sont suffisantes pour que l’on ait pas besoin d’utiliser une cuve isolée. De ce fait on peut imaginer de placer cette cuve dans un bain-marie pour faire des mesures de diffusivité et de conductivité thermique à diverses températures et de façon automatisée. Symbole Q : Puissance(W) Cp : Capacité thermique massique (Jkg-1°C-1) λ : Conductivité thermique. (Wm-2K) ρ : Masse volumique (kg.m-3) α : Diffusivité thermique. (m.s-2) r : Position radiale (m) R : Rayon de la sonde (m) Z : Position axiale (m) I0 : Fonction de bessel modifiée F0 : Nombre Fourier Erfc : Fonction erreur complémentaire T : Température (°C) Références [1] J. Martinet, Thermocinétique. Paris, Lavoisier,1990. [2] J.P. Cull, Thermal conductivity probes for rapid measurements in rock." Journal of physics E: Scientific Instruments 7: 771-774,1974.