RACINES246 - aout 2013
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RACINES246 - aout 2013 19/07/13 16:54 Page40 Par Catherine Baty s r e m s e d ts n a é g s e d r u œ c u Visite a À Saint-Nazaire, Escal’Atlantic rouvre ses portes. Histoire, décoration, technique… Une fabuleuse aventure au cœur des paquebots. 14 avril 1862, La Louisiane quitte le port de SaintNazaire pour relier Veracruz au Mexique. C’est le lancement de la grande aventure des paquebots de la Compagnie générale transatlantique (CGT). Jusqu’au début des années 1930, le cœur de la ville de Saint-Nazaire battra au rythme des embarquements vers l’Amérique et les Antilles. La belle époque. Aujourd’hui, ironie de l’histoire, à l’emplacement même de ces départs au goût de luxe, c’est un autre récit qui s’impose aux habitants depuis soixante-dix ans : la gigantesque base sous-marine construite par les Allemands pendant la Seconde Guerre mondiale. Comme un blockhaus. Énorme. Une forteresse de béton de 301 m de long. Ici on a tout rasé de ce qui était le lieu de promenade des Nazairiens pour y abriter les fameux U-boote. L’endroit a longtemps été une verrue dans la ville, un souvenir douloureux. Ce n’est que depuis une dizaine d’années que la base est devenue un lieu vivant, touristique, attachant même. Au-dessus des bassins, naît Escal’Atlantic dans sa première mouture. Une immersion dans les voyages en paquebot. De la rue, la base a conservé son allure austère. Elle n’est jamais devenue autre chose qu’une cicatrice dans le patrimoine nazairien. Et c’est un choix. Ne pas RACINES 40 août 2013 effacer cette histoire, ne pas la travestir, simplement l’accepter puis l’intégrer. 1er juillet 2013, Escal’Atlantic a rouvert ses portes après neuf mois de travaux complets. Une modernisation pour lui donner plus de sens et d’ancrage. De l’extérieur, on ne sait toujours pas “ce qui nous attend de l’autre côté, comme lorsque l’on part en paquebot”, s’amuse Emmanuel Mary, directeur du tourisme. Découvrons… Dans ce grand hall d’embarquement, face à vous un majestueux marabout en relief sur un panneau de bois aux tons or, cuivre et pourpre. Le détail d’un décor de 6 m de haut d’un fumoir du paquebot Normandie (1935). Luxe et volupté des belles années de croisières transatlantiques. Les compagnies maritimes ont toujours voulu rester maîtresses du style de leurs bateaux. Années 1920-30, l’Art-Déco s’empare de ces hôtels des mers. Des dalles de verre, des boiseries sont l’œuvre d’artistes de renom. Ainsi, la salle à manger dédiée au Normandie. L’originale était monumentale : 90 m de long, neuf mètres de plafond. Dans l’après-guerre, on bannit le bois. Les compagnies allègent les embarcations et limitent les risques d’incendies tant redoutés. L’esthétique a toujours son importance mais le synthétique évince les matériaux naturels. Panneaux de huit laques réalisés par Pierre Bobot pour le salon musique 1re classe, du paquebot France (1962). Décors de luxe (Coll. Ville de Saint-Nazaire / Photo Jean-Claude Lemée – Maelwenn Leduc) RACINES246 - aout 2013 19/07/13 16:54 Page41 rateur André Arbus. Un lustre et deux tapisseries sont présentés dans Escal’Atlantic. Tout au long de votre immersion dans cet univers des paquebots, vous observerez des objets du quotidien, des témoins matériels d’une époque, autant d’illustrations tirées du réel. Parmi la collection de 4 000 objets appartenant la Ville de Saint-Nazaire et liés aux chantiers navals, 200 sont désormais exposés à Escal’Atlantic. Certains ont été dénichés presque in extrémis lors du démantèlement de l’ex-France en Inde, d’autres ont nécessité des négociations habiles. Devant les objets, des écrans tactiles permettent d’informer plus en détail les visiteurs. Touchez l’image et découvrez que cette malle armoire Vuitton (wardrobe) de 1932 est spécifiquement dimensionnée au confinement d’une cabine. Bagagerie, mobilier, vaisselle… chaque élément raconte une tranche de vie en mer, une aventure aussi. Boiseries et dalles de verre peint, lit divan en soie palissandre chez les 1re classe. Dans ce faste propice à la détente on fait oublier la longueur de la traversée. Changement de pont, changement de décor. Jusqu’en 1930, le trafic passager transatlantique est marqué par l’émigration vers les États-Unis. 60 millions d’Européens quitteront ainsi le Vieux Continent dès 1820, portés par les promesses des Amériques. La plupart de ces voyageurs de soutes n’ont jamais pris la mer lorsqu’ils montent à bord. Au retour, ces grands Mobiliers, éléments décoratifs, vaisselle : plus de 200 objets sont exposés. RACINES 41 août 2013 (Coll. Chantiers de l’Atlantique/Cliché Saint-Nazaire Tourisme & Patrimoine Ecomusée Le salon fumoir première classe du paquebot France (1962), conçu par le déco- RACINES246 - aout 2013 19/07/13 16:54 Page42 Pour mieux comprendre les détails de cette découverte, des panneaux tactiles en facilitent l’accès. Dans l’histoire Pendant près de soixante - dix ans, Saint-Nazaire verra s’amarrer les paquebots en partance pour l’Outre-Atlantique. Dans les années 1920, l’activité d’embarquement devint difficile. Finalement la Compagnie générale transatlantique décidera Paquebots transatlantiques, dont au premier plan de rapatrier au Havre les Lafayette (1915), dans le port de Saint-Nazaire, vers 1926. grandes lignes et dédiera la construction des paquebots géants à Saint-Nazaire. Pendant la Seconde Guerre mondiale, l’occupant supprime la gare maritime, souvenir de l’époque des voyages, pour y ériger une base sous-marine. (Coll. P. Pauvert / Cliché Saint-Nazaire Tourisme & Patrimoine – Ecomusée) entreponts collectifs stockeront les marchandises importées. Des milliers de passagers, des milliers de kilos de nourriture. Le documentaire noir et blanc de 1936 réalisé sur le paquebot Île France annonce 9 000 à 15 000 repas servis par traversée. Dans les réserves : 14 000 kg de viande, 3 000 kg de fromage, 53 750 L de vin, 15 000 L de bière… Avant de remonter vers “le sommet du navire”, passage vers le cœur technique, la salle des machines. Impératrice Eugénie, La Champagne, Paris, Le Normandie : sélectionner un paquebot et entrer dans ses entrailles. Le charbon est remplacé par le mazout, plus facile à embarquer et sans poussière. Couplé au développement des turbines, le nouveau carburant des paquebots leur donne un nouvel élan. Les paquebots sont plus grands, plus rapides. Moments clefs de cette découverte, le pont promenade. L’air est frais, l’eau est en contrebas. Comme un peu à l’écart d’une des nombreuses soirées des passagers de première classe. Plus tard, quand votre visite entre coursives, décors de luxe et entrepont se terminera, vous quitterez cette embarcation géante en prenant une chaloupe. Pas de naufrage, juste une façon assez drôle de conclure par “On s’y croirait !” La timonerie, cœur et cerveau du bateau. Le visiteur apprend à naviguer par tous les temps. Y aller À Saint-Nazaire, suivre la direction Ville-Port. Août-septembre : ouvert tous les jours ; en basse saison : du mercredi au dimanche (tous les jours pendant les vacances de la Toussaint et horaires spécifiques pour la période de Noël). Comptez 1 h 30 à 2 h de visite libre Tarifs : 12,50 € ; 8 € enfants (4-17 ans). Intéressant : 10 % de réduction à partir de deux visites achetées le même jour (2e entrée incluse) ; 15 % de réduction à partir de deux adultes et deux enfants. Parkings gratuits à proximité. Accessibilité : la visite peut être adaptée aux personnes à mobilité réduite. Il est conseillé de se renseigner au numéro ci-dessous. Contact : 0810 888 444 (prix appel local) ; www.saint-nazairetourisme.com. À voir aussi autour : L’écomusée sur l’histoire de Saint-Nazaire, chantiers navals, Sous-marin l’Espadon (intérieur d’un sous-marin) ; croisières découvertes sur l’estuaire, Airbus, port Nantes-Saint-Nazaire. RACINES 42 août 2013