Livres illustrés : de la page à l`écran

Transcription

Livres illustrés : de la page à l`écran
 Assises Professionnelles du Livre
A l’heure du numérique
21 mars 2011 - 14h00 -18h00
Salon du livre de Paris
Livres illustrés : de la page à l’écran
Izneo, la BD numérique à portée de clic
Régis Habert
Directeur général Izneo
Amélie Rétorré
Directrice du développement Izneo
Bande Numérique est une association d’éditeurs de bande dessinée franco-belge qui ont choisi de
mettre en commun des moyens pour aborder et développer l’offre numérique. Première incarnation
de cette coopération, la société Izneo propose un catalogue commun de BD numérisées, consultables
en streaming.
Lors de leur présentation, Régis Habert et Amélie Rétorré ont éclairé les auditeurs sur les 10
questions que chacun se pose sur la BD numérique.
1. Qu’est ce qu’une BD numérique?
Si aujourd’hui la BD numérique (au sens littéral du terme) n’existe pas, elle fait néanmoins l’objet
d’une grande réflexion chez tous les éditeurs.
Ces mêmes éditeurs, en revanche, travaillent déjà sur la BD dite “numérisée” ; c’est-à-dire : un
fichier image de haute qualité, des métadonnées assez riches, un système de lecture (liseuse et
terminal de lecture physique) et un prix d’accès.
Ce format de fichier, en comparaison à un fichier texte ou son, est assez compliqué à manipuler,
notamment parce qu’il est lourd et doit être de très bonne qualité pour obtenir le nom de BD
« numérisée » ; ce qui implique une réflexion particulière à mener sur ce que sera demain la BD
« numérique ».
2. Qui s’en occupe?
Premiers intervenants (dès 2006-2007), les éditeurs de logiciels et d’applications, les fournisseurs
d’accès et les fabricants de matériels se sont appropriés le sujet et sont venus solliciter auteurs et
éditeurs pour travailler sur ce que serait la BD demain, comment la vendre et à quel prix ?
Mais rappelons que la principale richesse reste le contenu, et non les tuyaux, ni les terminaux.
Nous voyons donc naître, dans les maisons d’édition, de nouveaux métiers autour du numérique.
D’où l’idée de créer Bande Numérique, pour mener une réflexion commune en tant que
professionnels de la bande dessinée réunissant tous les acteurs de la chaîne du livre.
3. Combien ça rapporte ?
Sur ce marché encore balbutiant, on entrevoit surtout d’importants centres de coûts :
- le coût du piratage et celui de l’éducation des lecteurs ;
- le coût éventuel de la disparition de la BD dans le paysage culturel ;
- le coût de la recomposition de la chaîne du livre ; c’est-à-dire l’énergie que chaque acteur doit
mettre pour s’adapter et repenser son métier (humain, temps, financier) ;
- et le coût de la construction de nouveaux outils de création, d’édition, de diffusion, de vente…
Syndicat national de l’édition
Assises professionnelles du livre – 21 mars 2011
1
D’où l’idée de s’associer pour faire face à ces dépenses.
En cela, Bande Numérique a servi notamment à mutualiser les investissements et propose déjà
concrètement :
- un entrepôt qui fonctionne et contient déjà un certain nombre d’ouvrages ;
- des « tuyaux » prêts à fonctionner, qui permettront de raccorder les œuvres aux réseaux de
librairies ;
- un raccordement déjà effectif avec Dilicom pour lire des BD numérisées ;
- et un accès à tous les ouvrages numériques d’Izneo via Gallica (la bibliothèque numérique
française gérée par la BnF).
4. Combien ça vaut?
Le marché de la BD numérisée qui se dessine aujourd’hui propose une structure homothétique à la
version papier, tant en terme de format que de prix.
Le plus important étant justement de donner une valeur au contenu que nous proposons. La fixation
du prix se heurte cependant à de nombreuses contraintes, avec la nécessité d’un prix d’accès peu
cher pour construire le marché et lutter contre l’offre « illégale », et un taux de TVA en décalage par
rapport au papier.
L’objectif est donc de trouver un prix et un niveau de marge motivant pour tous les acteurs de la
chaîne et permettant de faire du volume.
5. Comment lire une BD numérique ?
Lire confortablement une BD numérisée nécessite un grand écran, en couleur, et un peu de mémoire.
Liseuses et smartphones ne sont donc pas des outils appropriés.
L’ordinateur reste le terminal adapté le plus répandu, mais une nouvelle expérience de lecture de BD
numérisée est arrivée en mai dernier avec l’Ipad, qui offre une réelle proximité de lecture et un retroéclairage qui sublime les couleurs. Nous sommes donc dans l’attente de l’élargissement du parc de
terminaux pour mieux comprendre comment on lit une BD sur un écran.
6. Qui sont les lecteurs de BD numériques ?
Les premiers adeptes de BD numériques ont souvent plus de 50 ans. Déjà lecteurs du format papier
et habitués à payer leurs contenus ; ils vivent le plus souvent en famille.
A l’avenir, l’enjeu sera surtout de rechercher et conquérir de nouveaux viviers de lecteurs, tant en
termes d’âge (en particulier les plus jeunes qui auront appris à lire sur écran) qu’en termes de
secteur géographique ou de profil culturel (comme les personnes moins à l’aise avec la culture du
livre et plus proche des univers du jeu ou du logiciel par exemple).
7. Une BD numérique, est-ce un livre ?
Cette question importante se pose au sujet de tous les objets éditoriaux numériques, en particulier
avec les mouvements sur la TVA à 5,5 % et la future loi sur le prix unique du livre numérique.
Rappelons qu’aujourd’hui, la BD numérisée est un objet identifié avec :
- un contenu (planches, couverture),
- un numéro ISBN (différent de la version papier),
- des métadonnées (dont la qualité est primordiale pour construire un bon catalogue),
- un prix.
Autant d’éléments qui font que la BD numérisée s’apparente au livre.
Mais demain, la BD « numérique » pourra prendre une toute autre forme ; celle par exemple d’un
objet logiciel enrichi de son et lumière, de vidéo, de 3D, à la limite de l’audiovisuel… Elle pourrait être
un contenu mouvant et évolutif dans le temps, né de la collaboration entre plusieurs auteurs de BD,
Syndicat national de l’édition
Assises professionnelles du livre – 21 mars 2011
2
voire de lecteurs et d’auteurs… Le champ d’expérimentations dans ce domaine reste ouvert.
Peut-être aussi que la BD numérique demain ne sera plus un objet mais un accès temporaire, une
autorisation de visionnage, un moment de loisirs dans une grille de programmes culturels.
Autant de pistes à creuser avec les libraires, néo-libraires, médiateurs …
7. Tout le patrimoine de la bande dessinée doit-il être disponible en version numérique ?
Toutes les BD de moins de 15 ans sont déjà disponibles gratuitement en quelques clics, sur les
serveurs de téléchargements. Les plus importants concurrents des libraires numériques s’appellent
aujourd’hui : Rapidshare, Megaupload, BDgratuites…
Les nouvelles générations de lecteurs de BD (12-15 ans), faute d’offres, lisent leurs mangas sur
Internet. La question de la diffusion se pose donc spontanément.
Il s’agit de construire le marché par l’offre, en fédérant les éditeurs pour que tous les contenus soient
disponibles en un point ; ce qui constitue un des premiers leviers pour lutter contre le piratage. La
mission d’Izneo est donc de proposer une offre patrimoniale la plus large possible et la plus
exhaustive, avec :
- des bandes dessinées qui n’existent plus en papier, voire des œuvres orphelines,
- des contenus qui n’existeront jamais en papier, des tests, des inédits,
- des œuvres éphémères.
Sur le plan éditorial, nous réserverons les intégrales à la version papier, tandis que les éditions
numériques s’orienteront vers du morcelage, des épisodes, du feuilleton (un format plus adapté à la
mobilité, à la lecture zapping et conciliable avec de petits prix…).
9. Apple va-t-il réussir dans le livre le même coup que dans la musique ?
Apple est l’une des premières sociétés à avoir su mettre en place une structure qui permette de faire
payer ses lecteurs et clients pour du contenu. Aujourd’hui, un certain nombre d’opérateurs
internationaux (Google, Amazon, mais aussi Orange, Free…) ont tous des velléités de préempter ce
marché du contenu et de se l’accaparer complètement.
Heureusement la BD numérisée est un objet numérique particulier.
D’abord, parce qu’il n’existe pas encore de format standard de lecture sur tous les écrans ; ensuite
parce que le domaine de la BD franco-belge est un petit marché où les investissements se
rentabilisent à une plus petit échelle.
Nous disposons donc d’un peu de temps pour redéfinir le rôle de chacun, auteur, éditeur, lecteur,
mais aussi celui du libraire dans la chaîne économique et du bibliothécaire dans l’accès à la lecture…
Pour cela, il faut aussi que chaque acteur se sente concerné par le sujet.
10. La BD numérique a-t-elle un avenir ?
Les réseaux de télé-acheminement des données sont de plus en plus performants, les tablettes de
lectures commencent à inonder le marché. On compte aujourd’hui en moyenne 10 écrans par foyer
et les enfants apprennent déjà à lire sur des écrans.
De plus, l’offre se constitue, les auteurs commencent à créer des œuvres adaptées que les éditeurs
sont prêts à éditer et à diffuser. Les libraires se positionnent…
La bande dessinée « numérisée » a donc tout pour devenir demain « numérique » ; c’est en tout cas
le parti des éditeurs qui investissent dans Bande Numérique.
Nos seules incertitudes résident dans la vitesse de déploiement de ce marché, la nature des acteurs
(seront-ils les mêmes que ceux de la chaîne du livre ?) et l’éducation des lecteurs à payer un contenu
numérisé.
Pour accompagner le développement des outils de réception numérique, auteurs et éditeurs
Syndicat national de l’édition
Assises professionnelles du livre – 21 mars 2011
3
travaillent donc de concert pour imaginer la BD numérique de demain. Et sur le plan technologique,
Bande Numérique réfléchit déjà à l’adaptation des contenus à toutes les tablettes déjà disponibles sur
le marché, mais aussi au développement en HTML5 et aux web applications accessibles sur Ipad.
A propos d’Izneo et Bande Numérique
Bande Numérique est née de l’initiative de 8 éditeurs de BD franco-belge désireux de mettre en place
un réceptacle commun pour le développement de la BD numérique et une offre acceptable pour tous
les acteurs du marché. Aujourd’hui, de nombreux autres éditeurs (petits et grands) les ont déjà
rejoints.
Pour que l’expérience de lecture soit la meilleure possible, ces éditeurs ont créé un outil commun qui
simplifie la diffusion et la distribution : Izneo, qui constitue un entrepôt et un point d’ancrage unique
pour les hubs et les libraires.
La plateforme propose la lecture de BD « numérisées » en streaming à des prix éditeurs.
Fort d’un catalogue de 3 000 titres, dont 2 000 sont déjà à disposition des lecteurs, le site s’enrichit
chaque jour de nouveautés.
Aujourd’hui, Izneo propose aux lecteurs des formules de location temporaires ou des accès
permanents à coûts réduits. L’affiliation peut aussi se faire via un libraire numérique.
Il existe également des offres de consultations sur site, par poste, pour les lieux publics
(bibliothèques, médiathèques…).
Syndicat national de l’édition
Assises professionnelles du livre – 21 mars 2011
4