NRJ Renouvelable
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D o s s i e r D o s s i e r 4 DANS NOTRE DÉPARTEMENT, LE DÉVELOPPEMENT DURABLE VA AU-DELÀ BIEN DES DISCOURS CHARGÉS DE BONNES INTENTIONS. DU LITTORAL AUX SOMMETS DES PYRÉNÉES EN PASSANT PAR LA PLAINE, LES PROJETS DÉDIÉS AU DÉVELOPPEMENT DES ÉNERGIES RENOUVELABLES SE MULTIPLIENT. EOLIEN, PHOTOVOLTAÏQUE OU RÉSEAUX DE CHALEUR, DE NOMBREUSES RÉALISATIONS PERMETTENT AU TERRITOIRE DE SE DISTINGUER AU PLAN NATIONAL. CERTES, LE VENT ET LE SOLEIL CONSTITUENT DE BELLES OPPORTUNITÉS. ENCORE FAUT-IL SAVOIR COMMENT BIEN LES UTILISER. DOSSIER RÉALISÉ PAR CLAUDE FABER PHOTOS EMMANUEL LAYANI 14 • Terres Catalanes Énergies renouvelables Du vent, du soleil, des idées ! D o s s i e r D o s s i e r 4 Energies renouvelables 1 Les grands projets DU PÔLE DERBI AU PROJET DE L’ECOPARC CATALAN EN PASSANT PAR L’ESPACE MÉDITERRANÉE, AUX ÉNERGIES ENTREPRISES LES PROJETS LIÉS RENOUVELABLES FUSENT DES CARTONS ET DES CERVEAUX CATALANS. Page de gauche : clin d’œil futuriste à Rivesaltes. La cîme des éoliennes émerge des “ombrières” de l'entreprise de gardiennage de camping-cars Pacar. Ci-dessus : les locaux du CNRS, à Perpignan, entièrement équipés de photovoltaïque. 16 • Terres Catalanes L e plus spectaculaire, ce sont les éoliennes. En quelques années, elles ont pris place dans le paysage – surtout du côté de Rivesaltes, Salses et Opoul-Périllos – provoquant parfois certains débats plus ou moins houleux. Et puis, il y a aussi ces toits photovoltaïques, sombres et plus discrets mais repérables ici et là, si la perspective le permet. Autant d’indices qui prouvent bien qu’il se passe quelque chose sur nos terres livrées aux forces de la nature. Une centaine de jours d’ensoleillement, 134 jours avec des rafales à 58 km/h, et une dizaine de journées bousculées par des vents soufflant à plus de 100 km/h (dans chaque cas en moyenne et par an, d’après Météo France) : une manne inestimable à l’heure où le développement durable est devenu une priorité. « Ces dernières années, la France a pris beaucoup de retard par rapport à d’autres pays dans le domaine de la production des énergies renouvelables, mais dans notre région, nous sommes bien placés pour constater qu’une indéniable dynamique s’est mise en place. » André Joffre ne fait pas de triomphalisme. « Je constate tout simplement », dit-il, de sa position de patron d’un des principaux bureaux d’études indépendants français spécialisés dans l’énergie solaire, et surtout de président du pôle de compétitivité Derbi. Créé en 2005 et basé à Perpignan, ce pôle est spécialisé dans le Développement des Énergies Renouvelables dans le Bâtiment et l’Industrie. Concrètement, il doit développer l’innovation, la recherche, la formation, le transfert de technologie en vue de favoriser la création et le développement d’entreprises dans le domaine des énergies renouvelables (EnR). Après cinq années d’activité, il incarne sans conteste cette dynamique évoquée précédemment. Son bilan est largement positif : le pôle a labellisé 134 projets portés par des entreprises et des laboratoires, représentant 277 millions d’euros d’investissement et associant plus de 300 partenaires. Depuis sa création, Derbi a mobilisé plus de 40 millions d’euros d’aides publiques investies dans les différents programmes issus de domaines d’avenir comme la conversion de l’énergie solaire, la conversion énergétique de la biomasse, Terres Catalanes • 17 D o s s i e r D o s s i e r 4 1 la relation entre les réseaux intelligents et la gestion de l’énergie ou encore la production d’électricité d’origine éolienne. Aujourd’hui, Derbi, qui compte 155 membres (collectivités, grands groupes, PME, laboratoires, universités…), se place même en 11ème position au niveau national sur l’ensemble des 71 pôles de compétitivité français, en tenant compte du montant d’aides reçues. DES PROJETS DE POINTE… Même si la nouvelle réglementation risque de freiner bon nombre d’intentions (lire page 25), l’éolien continue de garder une place importante dans les projets d’avenir. Pour preuve : la Communauté d’agglomération Perpignan Méditerranée annonce la création de l’Ecoparc catalan, qui vise à couvrir 75 % des besoins en électricité de l’agglomération perpignanaise, par la production d’énergie renouvelable. « Ce vaste projet s’inscrit dans la logique de la convention cadre signée par Perpignan Méditerranée avec l’Etat et la ville de Perpignan, qui vise le respect des principes dictés par le Grenelle de l’environnement pour la période 20082015, souligne Gilles Foxonet, maire de Baixas et vice-président de Perpignan Méditerranée chargé des énergies renouvelables. D’ailleurs Perpignan Méditerranée s'est engagée, à travers la convention G2015, à être exemplaire dans ce domaine, avec l'objectif de devenir le premier territoire à énergie positive d'Europe. » Pièce maîtresse du projet : une vaste Zone de développement éolien (ZDE), arrêtée par le DES RÉALISATIONS ET DES PROJETS EXEMPLAIRES • Avec 68 000 mètres carrés de tuiles photovoltaïques sur ses toits, Saint-Charles International, premier centre européen d'éclatement de fruits et légumes, va devenir la plus grande centrale solaire intégrée aux bâtiments du monde. • La commune de Torreilles va accueillir une vaste centrale solaire de 161 200 panneaux sur 36 hectares de terrains actuellement en friche, non entretenus ou à l’abandon. Une première en France. Production annoncée : 12 mégawatts, soit la consommation électrique de 5 800 habitants (hors chauffage). La mise en service est annoncée pour le début 2011. La réalisation de la centrale est réalisée par l’entreprise Poweo. Un espace pour accueillir le public est prévu avec des circuits de visites proposés. • Le choix du solaire… quelques exemples : le Cellier des Templiers à Banyuls-sur-Mer, le centre de balnéothérapie Balnéo Vital à Argelès-sur-Mer, la crèche Pinède au Boulou, le gite L’Orri de Planès à Planès, le Grand Hôtel Les Flamants roses à Canet-enRoussillon, l’entreprise Pacar CampingCar à Rivesaltes, le terminal fruitier à Port-Vendres, l’entreprise Montperal Energie à Rivesaltes, le futur Hôtel d’entreprises à Rivesaltes, l’entreprise Tecsol, le laboratoire Promes-CNRS, le stade Aimé-Giral, l’école PolyEnr, l’Hôtel d’agglomération, l’espace aquatique Gilbert-Brutus, la piscine Arlette- Franco ou encore le pôle enfance Claude-Simon à Perpignan… • Tecnosud, le “Cluster” pluridisciplinaire des EnR de Perpignan Méditerranée. Il s’agit d’un “Pôle d’Excellence” conçu et porté par PMCA comme une plateforme complète allant de la Recherche à l’Entreprise, l’innovation et la R & D : l’Université, le pôle de compétitivité DERBI, l’école d’ingénieurs PolyEnR (1ère école d’Europe qui forme des ingénieurs spécialisés en EnR), le CFA Bâtiment (formation pro), la Recherche avec le CNRS et les laboratoires CARTECH et PROMESS, l’expertise avec les bureaux d’étude (Tecsol, Fluides Pépin, etc.), les entreprises EnR (Tecsol, AEHLIOS, Cansol, Dalkia, Batiwat, etc.) et demain l’incubateur pépinière de PMCA. • Créé en juin 2009, à l’initiative entre autres de la CCI des Pyrénées-Orientales et du Pôle Derbi, l’IMEDER (Institut méditerranéen des énergies renouvelables) est basé à Perpignan. Il veut fédérer les acteurs et les porteurs de projets dédiés aux EnR des deux côtés de la Méditerranée. Parmi ses objectifs : permettre aux PME régionales de participer au Plan solaire méditerranéen, l’un des projets phares de l’Union pour la Méditerranée. IMEDER permettra ainsi aux entreprises françaises de rencontrer des sociétés marocaines, tunisiennes et d’autres pays du pourtour méditerranéen. • A l’occasion de sa 5ème conférence internationale, en mai 2010 à Perpignan, le Pôle Derbi a présenté le projet de création d'un “Institut d'excellence” sur le thème du “Solaire thermique haute et basse température”. Ce projet sera soumis au gouvernement dans le cadre du grand emprunt. 32 chaudières fonctionnent au bois dans le département, soit pour desservir un réseau de chaleur comme à Eyne (la mairie, des bâtiments communaux et quelques privés) ou encore à Mosset (la mairie, l’office du tourisme, les écoles et d’autres bâtiments) ou un seul bâtiment comme les collèges de Pia, d’Ille-sur-Têt, de Saint-André et de Toulouges. (Informations : www.be66.fr) préfet en décembre 2009 (1600 hectares) et qui pourrait accueillir une quarantaine d’éoliennes sur les communes de Baixas, Calce, Pézilla-la-Rivière et Villeneuve-dela-Rivière. …SUR UNE TERRE D’EXCELLENCE L’Ecoparc ne mise pas que sur la force du vent. Le programme prévoit aussi la création d’un parc de serres agricoles destiné aux cultures maraîchères, proches de la ZDE, dont l’énergie calorifique sera fournie par un réseau de chaleur récupérant les déperditions de l’Usine de Traitement et de Valorisation Économique des déchets de Calce. Des centrales solaires au sol et une filière de production de biocarburants grâce à la photosynthèse de micro-algues sont également au programme. Autre projet directement lié au vent, mais avec une approche différente : l’installation d’une éolienne rabattable à Rivesaltes, sur le site Espace Entreprises Méditerranée (EEM) développé par le Conseil général des Pyrénées-Orientales. Il s’agit du prototype d’un modèle conçu par la société Alizéo. Cette éolienne est avant tout destinée aux zones cycloniques. D’une puissance de 1 MW, elle est capable de supporter des vents de 150 km/h en position verticale et de 270 km/h en position rabattue. Abaisser les éoliennes présente d’autres avantages : leur maintenance est plus simple et la possibilité de les occulter du champ de vision, les jours sans vent, pourrait atténuer les réticences. Avec 68 000 mètres carrés de tuiles photovoltaïques sur ses toits, Saint-Charles International va devenir la plus grande centrale solaire intégrée aux bâtiments du monde. L’éolienne rabattable Alizéo, à Rivesaltes : un prototype capable de résister à des vents de 270 km/h en position inclinée. « Nous nous sommes battus pour convaincre les actionnaires de choisir notre site et c'est la somme des conditions climatiques exceptionnelles du département, du potentiel et des qualités environnementales innovantes et exemplaires de ce parc qui ont permis cette implantation, explique JeanJacques Lopez, premier vice-président du Conseil général. Nous espérons accueillir, à deux pas de l’éolienne, une unité de production Alizéo. » Elle viendra rejoindre les entreprises présentes à terme sur les 105 hectares de l’Espace Entreprises Méditer-ranée, dont une vingtaine est dédiée aux secteurs des éco-activités et des énergies renouvelables. « Tous ces projets confirment que nous sommes sur un territoire très actif dans le domaine », souligne Bernard Fourcade, président de la CCI de Perpignan, qui héberge Club EnR 66. Depuis 2004, ce club réunit tous les acteurs institutionnels, les associations et les entreprises dédiées aux EnR. « Nous sommes sur des filières d’avenir qui exigent de fédérer et de soutenir tous les acteurs concernés, ajoutet-il. Nous devons promouvoir nos savoirfaire. N’oublions pas que nous sommes sur une terre d’excellence. Historiquement, les P.-O. se sont rapidement illustrées au fil des décennies avec la création des fours solaires de Sorède, Mont-Louis, Odeillo et la centrale électro-solaire de Thémis. Les énergies renouvelables, c’est donc un domaine d’activité que nous connaissons bien. » ❏ Terres Catalanes • 19 D o s s i e r D o s s i e r Energies renouvelables 1 Avec de l’eau et la chaleur de la terre O n connaît les sources d’eaux chaudes sulfureuses des Pyrénées-Orientales : Saint-Thomas-lesBains (commune de Fontpédrouse), Dorres et Llo. Des lieux renommés pour les activités thermoludiques qui nous confirment que notre planète a le cœur chaud. Aujourd’hui, des projets de géothermie consistent à prélever la chaleur contenue dans le sol et à l’utiliser comme énergie. Dans notre région, ce type de projet est encore relativement rare. Mais Sainte-Marie, l’église paroissiale de Palau-del-Vidre, bâtie sur les vestiges d’une salle de l’ancien château (XIVe et XVe siècles), et récemment rénovée, constitue un exemple intéressant. Afin de réintégrer un retable du XVe siècle dont la conservation nécessite chauffage et climatisation, l’église a été équipée d’un système géothermique. • La force hydraulique, tout le monde connaît. Un bel exemple dans notre région : le barrage des Bouillouses. Il fut construit entre 1904 et 1910, pour assurer le fonctionnement de l’usine hydro-électrique de La Cassagne, située en aval, afin de permettre l’alimentation électrique de la ligne ferrée du Petit Train Jaune, reliant Villefranche-de-Conflent à Latour-deCarol. Aujourd’hui, on peut affirmer que le Train Jaune a porté les couleurs du développement durable bien avant l’heure ! Le développement durable intéresse les jeunes générations. A Odeillo, des élèves de primaire réalisent une maquette de tour solaire avec des bouteilles d’eau. LE PHOTOVOLTAÏQUE, VOUS Y PENSEZ ? L e photovoltaïque vous tente mais vous vous posez encore certaines questions. Voici quelques éléments de réponse qui vont peut-être vous décider à jouer la carte du solaire. C’est quoi le principe du photovoltaïque ? Certains matériaux semi-conducteurs comme le silicium possèdent la propriété de générer de l’électricité quand ils reçoivent la lumière du soleil : c’est l’effet photovoltaïque, découvert par le physicien Henri Becquerel en 1839. Il est mis en application dans les cellules photovoltaïques, petits composants électroniques le plus souvent à base de silicium. Concrètement : les photons de la lumière solaire transfèrent leur énergie aux électrons du matériau semi-conducteur qui créent alors un courant électrique. En d’autres termes, les cellules photovoltaïques transforment l’énergie solaire en électricité, sous forme de courant continu. Que faire de cette énergie électrique ? Si vous êtes raccordé au réseau, vous avez deux options : • la totalité de votre production est injectée dans le réseau et vendue au tarif réglementé. • seul le surplus de production sur l’instantané est injecté dans le réseau et vendu au tarif réglementé et vous consommez le reste (“autoconsommation”). Si vous êtes sur un site isolé, non raccordé au réseau, vous pouvez ne rien vendre de votre production, estimant que celle-ci sera consommée sur place. Aujourd'hui, la 1ere option est économiquement la plus intéressante, même si elle nécessite un compteur supplémentaire. A quel tarif l’électricité photovoltaïque est-elle rachetée ? Sachez que la compagnie d’électricité qui deviendra votre “partenaire” (Électricité de France ou une régie locale de distribution d’électricité) a l’obligation d’acheter l’électricité que vous injectez sur le réseau à un tarif fixé par l’État. Depuis janvier 2010, les tarifs d’achat de l’électricité photovoltaïque se divisent en quatre catégories : • 58 c€/kWh pour les installations photovoltaïques intégrées au bâti de bâtiment à usage principal d’habitation, d’enseignement ou de santé. • 50 c €/ kWh pour les installations de même type, sur les autres bâtiments (bâtiments de bureaux, industriels, commerciaux, agricoles). • 42 c€/ kWh pour l’intégration simplifiée au bâti. Pour être considérée comme intégrée simplifiée au bâti, une installation sur toiture doit remplir à la fois des critères techniques et des critères d’usage du bâtiment. Sans trop entrer dans les détails, quelques critères techniques : le système photovoltaïque doit être parallèle à la toiture. La face extérieure du système photovoltaïque doit ainsi être parallèle au plan de couverture mais n’est pas nécessairement au même niveau que lui. Le système photovoltaïque doit remplacer des éléments du bâtiment qui assurent le clos et le couvert et il doit assurer la fonction d’étanchéité. • 31,4 à 37,7 c €/kWh pour les centrales solaires au sol, selon le degré d’ensoleillement des régions où elles sont installées. • 32 c€/kWh pour les installations en surimposition (au-dessus des tuiles). La distinction entre intégré bâti et intégré simplifié ne se fera qu'en 2011 (2010 étant une année de transition). Comment choisir son installateur ? Vous avez le choix. Vous trouverez la liste des artisans et des entreprises adhérents à la charte QUALIPV pour une installation photovoltaïque sur le site web : www.qualit-enr.org N’hésitez pas à demander les références, à comparer les devis, à vérifier les garanties décennales, à bien faire étudier les différents systèmes d’installation, etc. Ça coûte cher ? Difficile de donner un budget. Cela dépend du projet et de ses contraintes. Sachez qu’il faut intégrer le coût d’un générateur photovoltaïque (matériel et pose) : environ 5 500 à 7 000 €HT/ kWc dans le cas d’une installation intégrée au bâti + le coût des travaux de raccordement au réseau, qui doivent être effectués par le gestionnaire de celui-ci et facturés au maître d’ouvrage (entre 500 et 1 000 € dans certains cas particuliers). Si vous injectez dans le réseau le surplus de votre production, le raccordement est en général moins cher (400 à 800 HT) . Actuellement, le prix des capteurs baissent. Des particuliers obtiennent des installations à 20 000 € TTC (TVA à 5,5 %) avec du bon matériel pour une puissance 3 kWh. Pour affiner votre projet et en savoir plus ? Vous pouvez vous adresser à l’Espace Info Energie du Conseil général des Pyrénées-Orientales : permanence téléphonique, accueil sur rendez-vous, informations techniques, financières, fiscales… et animations sur la maîtrise de l’énergie et les énergies renouvelables. Il s’agit d’un service public gratuit. Tél. 04 68 85 82 18. Vous pouvez aussi consulter le site : http://www.photovoltaique.info/ Terres Catalanes • 21 D o s s i e r D o s s i e r 4 2 Les éoliennes d’Opoul-Périllos font partie du paysage depuis 2003. Ça souffle fort au pays des éoliennes ! ALORS, POUR OU CONTRE VRAIMENT LE PAYSAGE ? ET LES OISEAUX DE PASSAGE ? DÉTÉRIORENT-ELLES LE BRUIT ? QUE ? ET DE QUESTIONS ET DE DÉBATS AUTOUR DE CETTE FILIÈRE. CATALANES À POUR TERRES EST PARTI HUMER LE VENT D’OPOUL MONTALBA, DEUX COMMUNES AUX PARTIS PRIS OPPOSÉS. 22 • Terres Catalanes Terres Catalanes • 23 D o s s i e r D o s s i e r 4 Energies renouvelables 2 L e jeune couple est mordu de randonnées pédestres. Chaque année, ils viennent dans la région, prenant un malin plaisir à délaisser le littoral. Sacs sur le dos et guide touristique en poche, ils filent dans l’arrièrepays, se faufilant dans les paysages secs et vallonnés, souvent derrière Rivesaltes. Ce matin, ce sont les éoliennes sur la commune d’Opoul-Périllos qui les ont attirés. « On ne s’était jamais approchés aussi près », raconte Natasha, impressionnée par la dimension des pales. David, son appareil numérique en main, en profite pour photographier sa belle compagne. Contre-plongée oblige avec une éolienne en toile de fond, pointant un ciel bleu azur. A vrai dire, une signalétique déconseille aux randonneurs de s’approcher trop près. Mais les mises en garde ou parfois les fossés ne freinent pas toujours la curiosité. OPOUL : LE CONSENSUS Au cœur du village d’Opoul-Périllos, on ne fait même plus attention à elles. « Les éoliennes ? Elles font partie du paysage, affirme une commerçante. On n’en parle même pas. » Ce qui n’a pas toujours été le cas. Quand leur implantation fut évoquée à la fin des années 90, les craintes habituelles se sont faites entendre. « Il n’y avait pas de réelle opposition, juste de l’inquiétude, se souvient Jean-François Carrère, maire de la commune depuis 1989. Certaines personnes étaient surtout inquiètes pour le bruit et l’esthétisme. Et puis, elles se sont rapidement rendues compte qu’elles ne poseraient pas de problèmes majeurs. » Au départ, 16 éoliennes étaient envisagées. Seulement six aérogénérateurs de 1,75 MW chacun seront installés, trois sur la commune d’Opoul-Périllos et trois autres sur la commune de Salses. Mis en service en 2003, ce parc éolien sera le premier à voir le jour dans les Pyrénées-Orientales. « Mais avant d’en arriver là, complète le maire, il a fallu trouver un consensus avec plusieurs organismes convaincus qu’il y aurait un problème avec la faune. » En effet, le Groupement ornithologique du Roussillon avait immédiatement attiré l’attention des porteurs du projet sur la forte pré24 • Terres Catalanes sence de passereaux et surtout d’un couple d’aigles royaux récemment installé dans les Corbières. Et d’ailleurs, le GOR a toujours affirmé son opposition à la présence des éoliennes dans ce coin de garrigues et de vignes. De son côté, la Ligue pour la protection des oiseaux avait elle aussi tiré la même sonnette d’alarme. Après discussions, échanges et débats, la commune et la société EOLE-RES se sont engagées à créer des garennes et à développer à proximité des cultures cynégétiques. L’objectif étant d’assurer aux rapaces un apport de gibiers. La réalisation des garennes, véritables viviers de lapins, a été confiée à l’Association de chasse communale agréée (ACCA). « Nous avons défriché, arraché d’anciennes vignes, labouré et semé du blé, de la luzerne et de l’avoine, se souvient Jean Vallès, président de l’ACCA. Ces terres sont désormais valorisées, moins exposées à l’abandon et aux risques d’incendie. » La Ligue de protection des oiseaux, elle, s’est vue confier le suivi du couple d’aigles sur une période de cinq ans. Les concernant, les avis divergent encore. Le maire assure que l’on continue de les voir survoler le secteur. Le GOR affirme le contraire. D’après lui, le couple ne revient plus depuis la mise en marche des éoliennes. « Beaucoup de gens râlent après les éoliennes, ajoute le maire. Mais avant, nous avions 0 € de taxe professionnelle. LE GRENELLE 2 De nouvelles mesures pour l’éolien L es nouvelles dispositions de la loi dite “Grenelle 2” votée en mai dernier ont fait et font encore débat. Les “pro-éoliens” considèrent que le texte pose trop de contraintes et met en péril le développement de la filière. Les principales dispositions : • Des schémas régionaux de l’éolien devront être créés par les Conseils régionaux. Ces derniers définiront sur les territoires les zones propices, les zones où il existe des gisements éoliens, les zones où l’acceptabilité est présente et, enfin, celles qui comportent des secteurs à préserver. L’Etat pourra se substituer à la Région si celle-ci n’avait pas établi son schéma d’ici juin 2012. • L’implantation des éoliennes est désormais soumise au régime d’autorisation au titre des Installations Classées pour la Protection de l’Environnement, les ICPE (au même titre que les sites industriels présentant des risques ou les stations-service), en plus du simple permis de construire. • Toute installation éolienne devra se trouver au moins à 500 m des zones urbaines d’habitation (définies par les préfets dans les schémas régionaux). • Rappelons aussi l’obligation de démantèlement. Lorsque l’exploitation est terminée, les paysages devront être restitués dans un état conforme. L’entreprise Alizeo a développé et breveté une technologie d’éolienne rabattable en moins d’une heure. Le prototype est implanté à Rivesaltes, à quelques centaines de mètres d’éoliennes plus “conventionnelles” qui font souvent débat. Et si les éoliennes rabattables, moins gênantes sur le plan visuel, venaient à convaincre les plus réticents ? Terres Catalanes • 25 D o s s i e r D o s s i e r 4 Energies renouvelables 2 Aujourd’hui, elles rapportent environ 80 000 euros à la commune, ce qui nous permet de rémunérer entre autres les trois personnes de la cantine. » MONTALBA-LE-CHÂTEAU : PAS D’ACCORD Des visiteurs, il en croise. Ainsi que des rapaces, dit-il. Julien Lesueur est le responsable technique du parc éolien de Rivesaltes, regroupant 8 éoliennes mises en service en juin 2003. « On n’évitera jamais les débats, explique cet employé de l’entreprise Hydelec. Mais je peux vous assurer que les gens ont plein d’a priori. Par exemple, ils sont souvent surpris par le bruit relativement faible. Ici, c’est surtout l’autoroute que l’on entend. » Julien Lesueur est aussi chargé d’étudier le développement du site. Et si un jour, Rivesaltes comptait encore plus d’éoliennes ? « Ce n’est pas gagné, affirme-t-il. Aujourd’hui, implanter une éolienne relève du parcours du combattant. Vous devez batailler contre les riverains, les associations, l’aviation civile et même Météo France qui s’inquiète de la gêne occasionnée sur ses radars comme celui d’OpoulPérillos. Sans parler de la nouvelle réglementation (lire page précédente). » Du côté de Montalba-le-Château, Antonio Palacios a rapidement fait partie de ceux qui “bataillent”. Le président de l’association Chevaux et Chemins est monté au créneau à l’annonce, en octobre 2008, d’un projet de ZDE porté par la Communauté de communes RoussillonConflent, sur le plateau de Montalbale-Château. « Je ne suis pas contre l’éolien, annonce-t-il. Mais je suis contre les projets qui n’ont aucun sens. Il faut rappeler que nous avons le privilège d’avoir sur le plateau des sites Natura 2000 et d’Intérêt communautaire. C’est bien le signe que nous sommes en présence d’un bien naturel fragile. » Antonio Palacios ne manque pas d’arguments : la détérioration d’un paysage d’une grande beauté, riche de vestiges archéologiques, la présence d’espèces animales considérées comme des “sentinelles de l’environnement” (des chauve- souris, des abeilles noires et des myriades d’amphibiens), « sans parler du bruit, des routes pour accéder aux éoliennes et des lumières nocturnes ». Aujourd’hui, M. Palacios patiente et croise les doigts. En juillet dernier, la Dreal LanguedocRoussillon aurait émis un premier avis négatif sur ce projet, mais rien n’est encore confirmé officelement, la décision finale revenant au Préfet. « Nous pensions ce projet compatible avec l’environnement, explique M. Robert Olive, président de la Communauté de communes Roussillon-Conflent. Je pense qu’il ne se fera pas. Dommage, cela aurait présenté une belle opportunité économique aux communes concernées tout en s’inscrivant dans les logiques de développement durable. Mais je sais que tout le monde ne partageait pas cet avis… » ❏ Le parc d’éoliennes de Rivesaltes. « Les gens sont surpris du bruit relativement faible. Ici, c’est surtout l’autoroute qu’on entend » explique Julien Lesueur, de la société Hydelec. A Montalba-le-Château, Antonio Palacio, président de l’association Chevaux et Chemins, se bat contre l’installation d’éoliennes sur le plateau. 26 • Terres Catalanes Terres Catalanes • 27 D o s s i e r D o s s i e r 4 3 La nouvelle vie de DES EXPÉRIENCES SCIENTIFIQUES, DES TRAVAUX DE RECHERCHE, DES EXPOSITIONS POUR LE GRAND PUBLIC… DE Thémis Le champ de 200 miroirs de Thémis, réfléchissant les rayons du soleil vers le sommet de la tour, haute de 101 mètres. THÉMIS LA CENTRALE ÉLECTRO-SOLAIRE N’A PAS DIT SON DERNIER MOT. UN VASTE PROGRAMME DE RECONVERSION VISE À REDONNER UN NOUVEAU SOUFFLE À CE SITE EXCEPTIONNEL IMAGINÉ EN SON TEMPS COMME L’UN DES PILIERS DE LA POLITIQUE ÉNERGÉTIQUE DU PAYS. 28 • Terres Catalanes Terres Catalanes • 29 D o s s i e r 3 Non loin de la centrale de Thémis, le grand four solaire d’Odeillo accueille une partie des équipes du laboratoire de recherche Promes du CNRS. Page de gauche : cuisson de céramique dans un four à concentration solaire. E t dire que la centrale électro-solaire de Thémis a failli être détruite. En 2003, certains ne voyaient pas l’intérêt de conserver cet étonnant complexe scientifique, avec son champ de 200 miroirs mobiles réfléchissant les rayons du soleil vers le sommet d’une tour haute de 101 m, repérable comme un totem. La détruire. Comme si sa présence relevait de l’erreur. Pourtant, Thémis n’est pas arrivée là par hasard. Tout commence à la suite du choc pétrolier de 1973-74 et 1979. Face à l’envol inquiétant du prix du pétrole, l’Etat français s’interroge sur les solutions énergétiques alternatives pouvant permettre à la France et à son économie d’être moins dépendantes des importations de pétrole. En 1979, le gouvernement français décide de lancer la construction de l’une des premières centrales électro-solaires au monde dans les Pyrénées-Orientales. Le Conseil général acquiert alors des terrains sur la commune de Targasonne, sur le plateau de Cerdagne (1 650 m). 30 • Terres Catalanes Elaboration de verres au four solaire à axe vertical de 2 kW pour confiner des déchets radioactifs. Terres Catalanes • 31 D o s s i e r D o s s i e r 4 Un site naturel remarquable ponctué d’énormes blocs granitiques, avec une vue panoramique sur la chaine pyrénéenne à couper le souffle et un ensoleillement béni des Dieux. Rapidement, toujours en 1979, le Conseil général conclut un bail emphytéotique avec Électricité de France (EDF) pour la construction d’une centrale électro-solaire thermodynamique à concentration, baptisée Thémis, qui débutera deux ans plus tard. Et en 1983, Thémis devient opérationnelle. Disposant de 102 hectares, la centrale est alors considérée comme une référence internationale en matière de conversion de l’énergie solaire en électricité. Seulement voilà, l’Etat évoque un manque de rentabilité. Après seulement trois années de fonctionnement, Thémis ferme ses portes. Le Conseil général, propriétaire du site, cherche alors une solution. De 1987 à 2004, le site est alors mis à la disposition du CNRS IN2P3 pour des recherches astrophysiques. Puis le CNRS se retire. Que faire de Thémis ? L’abandonner avec ses regrets ? L’effacer du paysage ? « Pas question », rétorque Christian Bourquin. Le président du 32 • Terres Catalanes 3 Conseil général décide en 2004 de lancer un vaste programme de reconversion de Thémis en vue d’en faire « l’une des premières plateformes collaboratives d’innovation solaire multi-technologique de niveau international ». CINQ PROJETS SCIENTIFIQUES IMPORTANTS Au programme, recherche et développement, expériences scientifiques, formation, business, tourisme… La nouvelle vie de Thémis s’annonce ambitieuse. Ce projet de 5,8 millions d'euros porté par le Département sera également cofinancé par la Région et devrait être reconnu par l'État Institut d'Excellence dans le cadre du Grand Emprunt. D’importants travaux vont être lancés fin 2010 pour transformer, entre autres, le bâtiment-usine en espace muséographique. Il faut souligner que depuis cinq ans, Thémis est ouvert au tourisme industriel. 2500 visiteurs en 2004, plus de 13 000 en 2009. C’est dire l’intérêt du grand public pour ce site dédié aux énergies renouvelables, sachant que Thémis dispose en plus de la superbe LES DEUX ILLUSTRES VOISINS DE THÉMIS L e Four solaire de Mont-Louis a été construit en 1949 par le professeur Félix Trombe. Il s’agissait du premier four solaire au monde à double réflexion, capable d’initier des recherches scientifiques et des applications industrielles à très hautes températures (1 000 à 3 000° C). Aujourd’hui, il fonctionne toujours et le public peut assister à des démonstrations et des expériences en direct à plus de 3 000° C. Les équipes scientifiques du four de Mont-Louis mènent des travaux de recherche et d’application en vue de développer la technologie des fours solaires. Le grand four solaire d’Odeillo, qui regroupe 12 fours solaires, a été réalisé entre 1962 et 1968. Opérationnel depuis 1969, il accueille une partie des équipes du laboratoire de recherche PROMES du CNRS. Il s’agit d’un des deux plus grands fours solaires au monde. Démonstrations, visites et animations sont proposées au public. exposition de la Cité des sciences et de l’industrie de La Villette, “Soleil, mythes et réalités”. Le projet de reconversion prévoit aussi la création d’un hôtel d’entreprises (avec bureaux, ateliers, salles de réunion communes, cafétéria…) dédié à l’accueil de sociétés spécialisées dans les énergies renouvelables et les éco-activités ainsi qu’à des laboratoires de recherche. Car Thémis va conserver plus que jamais sa vocation scientifique. Cinq importants projets de recherche et développement dans le domaine du solaire sont d’ores et déjà engagés (d’ailleurs, la moitié des miroirs a été remplacée par des éléments photovoltaïques pour les besoins de certains programmes) : Thémis-PV (portée par la société Sunergie), Censol-PV (EDF Energies Nouvelles), Phoc PV (Nur Energie), ENEOVIA-Themis (Strategeco Solar), et l’opération PEGASE du laboratoire Promes du CNRS. « Pour nous, Themis est avant tout un site expérimental, explique Alain Ferrière, responsable du projet PEGASE. Nous visons à exploiter expérimentalement un démonstrateur de centrale solaire à tour mettant en œuvre un système hybride utilisant le solaire et du gaz. L’objectif étant d’ouvrir la voie vers des centrales solaires avec un rendement encore meilleur. » Ce projet espère ainsi ouvrir de nouvelles perspectives au solaire en France et dans le monde. Et c’est à Thémis que cela se passe. ❏ Page de gauche : Julien Eck, doctorant à PROMES CNRS, analyse le comportement des matériaux composites sous conditions extrêmes au four solaire 1000 kW d’Odeillo. Le four solaire de Mont-Louis propose de nombreuses démonstrations au public. Ici, la fusion d’une plaque d’acier de 1 cm d’épaisseur grâce à une température de 3 000 degrés obtenus en 30 secondes. Terres Catalanes • 33 D o s s i e r D o s s i e r 4 4 ECRIVAIN, INGÉNIEUR, UNIVERSITAIRE, MILITANT ASSOCIATIF, DIRECTEUR DE CENTRE DE LOISIRS OU SIMPLES PARTICULIERS DÉSIRANT RÉDUIRE LEUR Jean-Paul LOPEZ répare les éoliennes comme un voltigeur “EMPREINTE” ÉCOLOGIQUE, TOUS PARTAGENT CE MÊME INTÉRÊT POUR LES ÉNERGIES RENOUVELABLES. ET CHACUN À LEUR FAÇON, ILS AGISSENT ! Les énergies renouvelables, ça les passionne ! U ne pale à réparer à 80 m de haut ? Une fissure, un problème de structure, un fendillement ou une trace d’impact ? Pas de problème. Jean-Paul Lopez est l’homme de la situation. A 57 ans, cet ingénieur de formation, expert dans le domaine de la plasturgie, de la fibre de verre et du polyester (monsieur “Babau” à Rivesaltes, c’est lui !), s’est spécialisé depuis 2008 dans la réparation des éoliennes. « Mon premier chantier, ce furent les éoliennes de Rivesaltes, explique-t-il dans son bureau atelier sur ladite commune. Aujourd’hui, j’interviens dans toute la France. Les éoliennes plus anciennes ont entre sept et dix ans. Beaucoup d’entre elles ne sont donc plus sous garantie. Il faut une intervention extérieure. » Et quelle intervention ! Jean-Paul Lopez, l’un des rares en France à proposer un tel service, n’est pas du genre à se laisser impressionner. Le vertige ? Connaît pas. Passionné de montagne, il fut même instructeur auprès des clubs alpins. Depuis 30 ans, il escalade du haut, du très haut, dans des situations souvent très difficiles. Généralement, il monte par l’intérieur de l’éolienne. Puis, il redescend par l’extérieur. Au bout d’une corde, avec tout le dispositif de sécurité nécessaire et aussi l’aide de deux ou trois assistants, le plus souvent au sol. « J’ai trouvé le moyen d’allier mes connaissances en haute technologie et ma passion pour l’altitude », dit-il tout en montrant sur son ordinateur des photos de lui en pleine action. On découvre l’intérieur très étroit d’une de ces hélices de 40 à 50 m de long, dans lequel JeanPaul doit se faufiler comme une souris. « C’est beau, non ? » Il ne s’en cache pas, Jean-Paul est fasciné par les éoliennes. Elles lui plaisent, comme il dit. Il les trouve belles, sans risque, sans danger. « A condition de ne pas en mettre n’importe où », précise-t-il. ❏ Ingénieur de formation, passionné d’altitude, Jean-Paul Lopez est devenu expert dans la réparation d’éoliennes. Il intervient dans toute la France. 34 • Terres Catalanes Terres Catalanes • 35 D o s s i e r D o s s i e r 4 4 Olivier Bétoin : le bois, Alice Palou et Michel Castillo c’est l’avenir pour un habitat écologique et économe L ’exemple type de ce que l’on peut faire avec du bois. Le Mas de la Coume (à deux pas de Mosset) dispose d’une forêt, coupe le bois, le transforme (ou plutôt le déchiquette), le stocke, l’utilise et alimente ainsi une chaudière pour le chauffage et l’eau chaude des sanitaires. Et le tour est joué pour cette ancienne auberge de jeunesse créée à la fin des années 1930, qui accueille aujourd’hui des stages, des séminaires, des séjours et des classes vertes. « Nous avons cette chance : 65 hectares de forêts, explique Olivier Bétoin, directeur des lieux depuis 1982. Dans les années 30, l’établissement était déjà chauffé au bois, mais au début des années 90, nous nous sommes équipés d’une installation automatique utilisant du bois déchiqueté. A l’époque, nous faisions partie des quelques précurseurs dans ce domaine. » Aucune énergie fossile n’est utilisée pour chauffer l’établissement (sauf pour les tracteurs et les tronçonneuses indispensables aux travaux). La chaufferie dessert les deux principaux bâtiments d’habitation, la bibliothèque et salle de détente, la cuisine et salle à manger et deux maisons d’habitation. Soit un total de 1 500 m2 ! « On évite ainsi 36 • Terres Catalanes D eux présidents, deux associations, deux histoires distinctes, mais une même préoccupation. La valorisation de l’habitat sain, économe, écologique et solidaire. Alice Palou, présidente d’Adobes (Association pour le Développement de l’Ossature Bois et de l’Eco Construction Solidaire), créée en août d’émettre 20,6 tonnes de CO2/an (dioxyde de carbone) et 4,4 tonnes de SO2/an (dioxyde de soufre) », annonce Olivier Bétoin, soulignant par la même occasion que les avantages sont multiples. Le domaine boisé est entretenu, les coûts de fonctionnement de l’établissement sont maîtrisés, la consommation énergétique reste “propre” et l’installation s’inscrit dans une démarche pédagogique. Olivier Bétoin sensibilise les jeunes visiteurs aux questions du développement durable. Et il leur explique, démonstrations pratiques à l’appui, le cheminement du bois et son utilisation. « C’est une des forces de notre établissement, explique-t-il. Nous sommes au cœur de la forêt et nous pouvons leur expliquer comment mieux gérer et mieux utiliser cette immense ressource naturelle primordiale pour notre avenir. » ❏ 2009 à Argelès-sur-Mer, et Michel Castillo, président de Volem Casa, basée à Thuir depuis le début de l’année 2009, visent un même objectif. Soutenir les professionnels de la construction et les particuliers qui désirent se tourner vers des modes de construction plus respectueux de l’environnement. « Adobes propose des journées d’information et des stages de découverte et de formation à certaines techniques, des chantiers participatifs, dit Alice Palou. Nous nous adressons par exemple à des particuliers qui veulent construire ou rénover leur maison de façon écologique. » Le projet de Volem Casa est quelque peu différent, comme nous l’explique Michel Castillo. « Nous cherchons à convaincre les élus du territoire de soutenir un projet de construction d’habitat économe à destination de familles et de personnes à faibles revenus. Nous pensons qu’il est possible de construire un petit parc HLM sur ces critères, rendant l’éco-construction accessible à tous. » Pour l’heure, les deux associations réfléchissent à la création commune d’un lieu d’information, de conseils et d’exposition sur ce sujet. Une sorte de “maison” de l’habitat économe ouvert à tous. « Devant la demande de plus en plus pressante des gens, nous sommes convaincus que ce lieu aurait sa place », affirment-ils d’une même voix. ❏ Tout comme Adobes, l’association Volem Casa soutient les professionnels et les particuliers qui désirent se tourner vers des modes de construction plus respectueux de l’environnement. • VOLEM CASA – www.volemcasa.com • ADOBES – www.adobes.fr Terres Catalanes • 37 D o s s i e r D o s s i e r 4 Tatiana et Lionel Avec Hélène Legrais, il était une fois le premier four solaire bâtissent une vraie maison écolo 38 • Terres Catalanes L 쏘 D. R. T atiana et Lionel ne sont pas au bout de leurs peines. Depuis 2007, ils consacrent leurs week-ends, leurs vacances et leurs énergies à bâtir leur future maison familiale, pour eux et leurs deux jeunes enfants. Une superbe bâtisse de 140 m2 au cœur d’un joli village de pierres et du paysage verdoyant du Conflent. Et quelle bâtisse ! Une maison totalement bioclimatique et écologique. Actuellement, d’autres projets similaires sont en cours dans le département, mais Tatiana et Lionel font partie des pionniers. « Tout d’abord, c’est un acte militant, explique Tatiana. Quitte à construire, autant le faire dans le respect de l’environnement. Ensuite, nous tenions à la construire nous-mêmes. C’est donc un peu long, mais tellement enrichissant. » La jeune femme, consultante en écologie, intervient dans le domaine des plantes pour le Parc naturel régional et des bureaux d’études privés. Lui est ornithologue de métier. Le couple n’était pas forcément armé pour se lancer dans un tel chantier. Ils se sont informés et ont suivi des stages de formation pour apprendre à maîtriser la technique des ossatures bois, des puits canadiens ou encore des enduits en terre. Ils ont aussi bénéficié de coups de main appréciables. La construction de la maison a donné l’occasion d’organiser plusieurs chantiers participatifs réunissant bénévolement des amis et des adeptes de l’habitat écologique. « Notre maison intéresse beaucoup les gens, ajoute Lionel, car sa conception repose sur toute une série d’options techniques simples et innovantes. » Orientée au sud avec de grandes ouvertures vitrées (double ou triple vitrage suivant l’exposition), la maison va profiter d’un ensoleillement maximal en hiver. En été, un balcon à l’orientation très étudiée protègera sa face sud des rayons du soleil. Par ailleurs, la bâtisse repose sur une épaisse dalle faite entre autres de cailloux et de lièges (parfait pour l’isolation et l’emmagasinement de l’énergie). Les murs se composent d’une importante ossature en bois (originaire d’une forêt voisine) dans laquelle des bottes de paille ont été glissées. Le tout est recouvert d’un enduit. Sur le toit, des panneaux photovoltaïques pour l’électricité et l’eau chaude. A l’extérieur, un système de récupération des eaux de pluie et des bassins de phytoépuration (un système d'assainissement filtrant les eaux usées domestiques avec des plantes), à deux pas d’un potager bio. « Nous avons tout mis en œuvre pour obtenir les meilleurs résultats possibles, explique Tatiana. D’ailleurs, nous avons prévu un chauffage au bois mais normalement, en plein hiver, la température intérieure devrait être de 16° C. » Coût total de la construction : environ 120 000 € sachant que le couple a bénéficié d’une subvention de 17 000 € accordée par le Conseil régional, l’ADEME, et le Conseil général, plus le Crédit d’impôts. Emménagement prévu à la fin de l’année. ❏ Tatiana et Lionel Courmont ont construit pour leur famille une maison totalement bioclimatique et écologique. es auditeurs de France Bleu Roussillon connaissent bien sa voix claire. Chaque matin, Hélène Legrais leur en dit un peu plus sur la terre catalane. Passionnée d’histoire, et c’est peu dire, cette journaliste perpignanaise originaire du quartier Saint-Jacques raconte un nom de rue, un épisode historique ou encore une anecdote de l’Usap. Une dame élégante qui cherche en permanence à combattre l’oubli. « Notre mémoire collective est un vrai gruyère, alors moi, je cherche à combler les trous, » avouet-elle non sans humour. Aussi, elle raconte et depuis quelques années, elle écrit. Des romans pétris de vécu et d’émotion comme Les enfants d’Elizabeth (2007), hommage à la célèbre maternité d’Elne. Avec L’ermitage du soleil, sorti en mai dernier, Hélène nous rappelle que la question des énergies renouvelables ne date pas d’aujourd’hui. En 1900, un personnage hors du commun, le père Manuel Antonio Gomes, alias “Padre Himalaya”, va venir installer à Sorède (au lieu-dit El Coll del Buc) l’un des tout premiers fours solaires, d’un diamètre de 7 m. Hélène va en faire un roman passionnant où les préoccupations quotidiennes des gens de Sorède se mêlent aux grands enjeux d’un monde moderne qui s’affirme. « C’est André Joffre, le président du pôle Derbi, qui a attiré mon attention sur cette histoire fabuleuse, explique-t-elle. Cet homme d’église mais aussi de sciences, était un visionnaire, un pionnier doté d’une personnalité charismatique. » Bref, un vrai héros de roman dont on n’a pas fini de parler dans la région. A Sorède, on envisage de reconstruire le four du Padre Himalaya. ❏ • L’ERMITAGE DU SOLEIL Hélène Legrais, Ed. Calmann-Lévy (2010) Terres Catalanes • 39 D o s s i e r 4 Xavier Py forme de jeunes ingénieurs aux Energies renouvelables I ngénieur des procédés, Xavier Py aurait pu faire carrière dans une filière industrielle classique. Mais après quelques années passées dans un centre de R&D chez Rhône-Poulenc, il a choisi. Fouiller, cogiter, communiquer aux jeunes ses passions, lui conviendront mieux. « Et puis il y a tant à étudier dans les domaines du recyclage, de la valorisation des déchets ou encore de la production énergétique. » Aujourd’hui professeur à l’Université de Perpignan, Xavier Py dirige l’École doctorale “Énergie Environnement”. Il fait aussi partie de l’équipe scientifique de PROMES (Procédés, matériaux et énergie solaire), un labo du CNRS. Actuellement, il bosse dur sur une question plutôt complexe : comment fabriquer des matériaux de stockage thermique pour des centrales électrosolaires à partir de déchets industriels ? En d’autres termes et résumé par lui, « comment faire au mieux avec ce que l'on a sous la main ? » De l’énergie, lui n’en manque pas. En 2009, Xavier Py a contribué à la création de PolyEnR, un nouveau département de l’École Polytechnique de Montpellier, sur le site de TecnoSud à Perpignan, 40 • Terres Catalanes parrainé par le célèbre explorateur Jean-Louis Etienne. La toute première école de France à former des ingénieurs aux énergies renouvelables. ❏ Professeur à l’Université de Perpignan, Xavier Py a contribué à la création de PolyEnR, la toute première école de France à former des ingénieurs aux énergies renouvelables.