Café – interview avec Sylviane ROBINI (et Olivier...)

Transcription

Café – interview avec Sylviane ROBINI (et Olivier...)
Café – interview avec
Sylviane ROBINI (et Olivier...)
1. Tout d’abord, comment te définis-tu?
Photographe, peintre, graphiste,
artiste, maman, business woman, tout
en un ?
En effet, même si je le veux, il est difficile de
prioriser, si je m'écoutais, je serais seulement
« artiste ». Aujourd’hui je me vois plus comme
un entrepreneur, multifonction, c'est une
obligation lorsqu'on travaille à son compte.
Mais principalement, j’organise mon temps
entre l’activité photo et la peinture.
2. Est-ce que tu penses que le
photographe d’aujourd’hui doit être
multitâche ?
C’est une nécessité. Même si on a une bonne
réputation, c’est un métier où il est difficile de
se concentrer sur un seul secteur d'activité; en
effet depuis le début je me suis spécialisée dans
la photographie de maternité (grossesse,
nouveau-né, reportage familial...) mais j'ai dû
varier mon portfolio et proposer d'autres
services en matière de photo (mode, mariage,
corporate, photo de produit, graphisme..) pour
avoir des contrats plus régulièrement. Du coup
il faut absolument être polyvalent. J'adore vivre
des expériences aussi différentes, je ne
m’ennuie jamais dans mon travail !
Montréal Accueil - Novembre 2011
3. Comment est née ta passion pour la
photo et la peinture ? Une rencontre,
une exposition, un évènement ?
J’ai toujours dessiné, j’ai pris de cours de dessin
depuis toute petite, j'étais très appliquée, je
pouvais passer des heures sur un dessin. Ensuite
j’ai poursuivi au Lycée et à l’université d’Aix
en Provence, où j’ai fait des études en Arts
Visuels, photo et peinture et j’ai obtenu un
master (Université de Provence) ca m'a ouvert
les yeux sur la création contemporaine et j'y ai
appris beaucoup de techniques différentes. J'ai
eu l'occasion aussi d'animer de nombreuses fois
des ateliers de peintures dans l'école privée
d'arts de ma belle-mère, Casa Firenze, Bagnolssur Cèze, proche d'Orange, on est une famille
d'artiste.
4. De quelle région de France es-tu
originaire ? Comment es-tu arrivée
ici ?
Je viens de Seyne sur Mer, à côté de Toulon,
alors au début, j’étais assez réfractaire à l'idée
de venir ici, j'appréhendais les hivers canadiens.
Nous avons suivi la famille de mon mari qui est
venue s’installer un an avant avec un visa
d'entrepreneur. Mon mari est artiste aussi, sa
famille aussi, on a été tous comme une
« meute » à émigrer. Ils se sont installés en
Ontario. Nous avons préféré Montréal, c’est
plus stimulant d’être dans une métropole, c’est
une ville jeune avec plus d’émulation culturelle.
La francophonie nous a permis une adaptation
très rapide. On a vu l’arrivée à Montréal comme
une opportunité de carrière.
5. Avec quelles perspectives êtes-vous
arrivés ?
O : A terme, de travailler ensemble et d’avoir
notre école d’art qui serait un lieu de rencontres,
lieu d’exposition et d’échanges culturels, de
conférences et aussi un espace pour des cours de
dessin pour adultes dans un premier temps.
S : Mais après notre arrivée, mon mari a très
rapidement été embauché dans une banque, nos
deux garçons sont nés, et on aura donc mis 4
ans, à le faire, car nous ouvrons en janvier
prochain !
6. Comment devient-on photographe à
Montréal ? Quels ont été tes débuts ?
En fait, depuis notre arrivée à Montréal, j’ai un
blog qui a comme principe de poster une photo
par jour, c'est http://isaac.aminus3.com/ il me
permet comme à beaucoup d'expats de donner
des nouvelles à la famille et aux amis. Et c’est là
que l’histoire a commencé. Des amis m’ont dit
qu’ils trouvaient ça super, et m’ont demandé de
faire des photos de leurs enfants, et puis, j’ai eu
un contrat comme ça, puis un deuxième,
troisième et ça a démarré. J’ai créé mon site
web. Et mon entreprise s’est montée à fur et à
mesure.
7. Est – ce qu’il y a quelque chose qui t’a
vraiment surpris ici, à quoi tu n’étais
pas préparée après ton arrivée ?
Je ne suis pas arrivée avec beaucoup d’à priori.
La politesse et le respect des gens m'ont
surprise. Ils sont chaleureux et ont envie d’aider.
Tout va plus vite dans les démarches
administratives.
Les difficultés que je pensais rencontrer, comme
le froid, ont été vite évacuées. Je trouvais les
hivers plutôt magiques. C’est paradoxalement
plus dur au 5ème hiver…
C’est aussi la première fois que nous sommes
immigrants. On comprend mieux maintenant
les procédures par lesquelles passent les
immigrants.
On s’attendait à un grand enthousiasme et une
grande effervescente, à une présence culturelle
très forte à Montréal, et on trouve qu’il y a
encore beaucoup à construire. La saturation
dans le domaine de la création n’est pas atteinte,
notre génération de créateurs à le vent en poupe
et les gens se connaissent, Montréal n'est pas
une si grande ville que ca; du coup tout est
possible!
Montréal Accueil - Novembre 2011
8. As- tu un avantage comme française
dans ton domaine ?
Pour la photo, oui, j’ai cru comprendre que ma
création était un peu différente, une sensibilité
européenne sans doute. Quand j’ai commencé,
je me suis rendue compte que je n’avais pas
beaucoup de concurrence dans la photo de
maternité. Mes photos « lifestyle » sont plus
naturelles, moins conformes que celles
proposées par les studios, je privilégie
l'authenticité, l’atmosphère vraie et douce de la
lumière naturelle. Les photos ont une teinte
particulière, ce sont comme des plans issus d’un
film.
9. Où t'inspires tu ?
Je regarde régulièrement sur des sites internet
spécialisés qui donnent le ton des influences
actuelles (Fubiz, Thefancy, slumberdesign,
deviantart, tumblr.com...) on y trouve toutes
sortes de nouveautés dans la création des
publicitaires,
illustrateurs,
photographes,
peintres, designers...etc. je regarde ce qui se fait,
je m'imprègne, je m'inspire...je cherche.
10. Si tu avais un souvenir photo à
raconter ?
Ce serait peut être les séances de « mamma
dance ». J’ai photographié des mamans qui
dansaient avec leur bébé, dans un parc, sur le
rythme des percussions. C’était vraiment une
super ambiance.
11. Tes photos sont imprégnées de
tendresse et semblent très spontanées.
Mais le sont-elles vraiment ?
Prépares-tu la scène ?
Spontanées! Elles le sont! Et elles le sont
d'autant plus qu'il est primordial pour moi que
les gens se montrent tels qu'ils sont, dans leur
environnement tel qu'il est tout les jours. Je
dirige les gens seulement pour leur demander de
se rapprocher, de se tourner, se placer à telle ou
telle place. La plupart du temps c'est moi qui
bouge, comme un cinéaste, c'est à moi de venir
chercher le meilleur plan de la scène.
Les meilleures photos sont toujours celles qui
sont prises juste avant que les gens s’installent,
ou juste après, les photos des regards qu’ils vont
s’échanger avant qu'ils regardent la caméra.
Mais c’est sûr qu’avant une séance, je sais déjà
globalement ce que je vais prendre.
12. Est-ce que c’est ta propre maternité
qui t’a donnée envie d’immortaliser
ces moments précieux ?
O : Absolument, ça a apporté un regard
complètement nouveau sur son travail et la
rencontre de mamans lui a donné envie de
traduire cette maternité dans ses réalisations.
S : Mon blog aussi m’a permis tous les jours de
me dépasser, de changer de regard, de trouver
des nouvelles solutions. J’ai plus de 1400 photo
sur le blog, et c’est difficile d’être originale tous
les jours, c’est un challenge d’arriver à poster
une photo par jour, c'est un vrai lieu
d'exploration pour moi.
13. Comment peut-on suivre ton travail ?
J’ai une fan page facebook, où je poste
régulièrement des exemples de mon travail (des
photos que mes clients me laissent le droit de
poster), des nouveautés, des recherches
personnelles, des nouveaux projets, des choses
que j'aime. J’ai également un site internet
professionnel pour mon travail de photographe
avec toutes les informations nécessaires et des
exemples de commandes que j’ai réalisées
(http://sylvianerobini.com). Et puis, mon blog…
14. Comment est venue cette idée de
blog ?
Comme beaucoup de gens, je pense, en arrivant
au Québec, j’ai créé ce blog, pour donner des
nouvelles à nos familles. Souvent c’est plus
facile pour eux que d’ouvrir les fichiers.
15. Quel serait ton rêve dans le domaine
de la photo ou de la peinture que tu
voudrais réaliser?
On va ouvrir notre atelier de peinture avec mon
mari, où je vais donner des cours de dessin pour
adultes, avec des modèles vivants. Je voudrais
dans ma carrière photo travailler davantage avec
des artistes et prendre part dans le processus de
leur campagne de promotion.
16. Revenons à tes peintures. Comment
définirais-tu ton style et qu’est ce qui
t’inspire?
J’ai d’abord commencé par la figuration
narrative, c'est-à-dire la peinture d’après les
photos. Puis, je suis passée à l’abstraction, avec
davantage d’émotion et de couleur dans les
œuvres, c’est une peinture de l’instant. Ma
peinture
découle
du
courant
des
expressionnistes abstraits que j'affectionne
particulièrement.
Le tableau est comme un objet, avec un rapport
de force dans la couleur, dans la composition,
avec une atmosphère particulière, nous apporte
une émotion. C’est une libération de la forme,
de quelque chose de connu pour trouver des
choses plus primitives.
17. Où est – ce que tu as déjà exposé tes
œuvres ? Et quelle a été ta toute
première exposition ?
Avant d’exposer, j’ai débuté à vendre mes
réalisations par du bouche à oreille. Ma
première exposition a eu lieu en 2009 dans une
galerie d'arts d’un salon de thé sur la rue Saint
Hubert et a duré deux mois. Deux ans plus tard,
en été 2011, j’ai exposé ma nouvelle série de
Montréal Accueil - Novembre 2011
peintures à la galerie l’Espace contemporain, sur
le plateau.
18. Sur quoi travailles-tu actuellement ?
Je travaille sur plusieurs projets de photos de
maternité. Et sur un particulier qui me tient à
cœur pour une chanteuse montréalaise, Maryse
Letarte, j'ai travaillé avec elle pour
sa
promotion et il reste à venir une série de photos
de son show en décembre, un livre pour Noel,
etc. Je m'investis également au sein de Nourrisource, une association du CLSC qui conseille
et supporte les mamans dans leur allaitement.
rentrée de Montréal Accueil au Collège Marie
de France.
Il y a également au sein de Montréal Accueil
une vraie « émulation » artistique, un collectif
d’une dizaine de créatrices appelé « Miss
coquêtes ». C’est une initiative de Marie-Laure
Plano qui réunit des artistes qui ont toutes une
création différentes : couture, photo, tricot,
bijoux, peinture, déco. Nous avons fait notre
première vente en mai dernier et plusieurs à
venir je l'espère...
19. Où pourra-t-on admirer ou acheter tes
œuvres prochainement ?
Je serai présente à la vente de Noel de Montréal
Accueil le 6. décembre prochain avec mes
photos sous différents formats et mes dessins.
Je voudrais en plus organiser encore une
exposition de mes toiles avant Noël.
20. Tu fais partie de MA depuis quelques
années déjà, qu’est ce que cela t’a
apporté ?
Quand je suis arrivée à Montréal, il y a 5 ans, je
ne connaissais pas l'association. C’est une amie
expatriée qui en faisait partie qui me l’a fait
connaitre. J’étais jeune maman, je cherchais des
repères, des conseils et à MA il y a plein de
mamans qui sont à leur premier, deuxième,
troisième, quatrième enfant, et ça m’a beaucoup
aidé. Que ce soit par le biais de Café poussettes
ou d’autres ateliers. J’ai donné aussi un atelier
photo l’an dernier. J’ai fait de très belles
connaissances et amitiés.
Ca m’a aidé aussi pour mon travail, j’y ai
rencontré ma coach Céline Chabée que je vois
régulièrement maintenant déjà depuis presque 1
an.
J’ai bénéficié de beaucoup de conseils pour
démarrer mon business en plus du coup de
pousse du bouche à oreille.
J’ai eu l’occasion d’exposer mes peintures et
mes photos à l’occasion du Cocktail de la
Montréal Accueil - Novembre 2011
21. Quels seraient tes conseils à donner à
quelqu’un qui arrive à Montréal pour
que son intégration se passe au
mieux ?
Ce serait d’abord de bien choisir le lieu où l’on
va habiter. Il y a plusieurs Montréal…Nous
avons habité dans le downtown, l'agité, voire
l'hyperactif, c’est l'expérience de vie urbaine au
cœur de la ville, très excitant mais difficile sur
le long terme. Puis, dans le coin de Côte des
Neiges, puis enfin le Plateau, où nous habitons
maintenant, est une espèce de village d'artistes,
qui nous va très bien pour une vie de famille
avec les enfants.
Après, il faut donner la chance à Montréal et au
Québec. Ca peut ne pas nous parler les premiers
mois, mais avec le temps, on apprend à aimer.
On ne doit pas se faire son idée sur la vie ici les
premiers mois.
Interview réalisée par Lada Billard