INAUGURATION DE LA PLACE COLUCHE Dimanche 29

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INAUGURATION DE LA PLACE COLUCHE Dimanche 29
INAUGURATION DE LA PLACE COLUCHE
Dimanche 29 Octobre 2006
Allocution de Pierre CASTAGNOU
Maire du 14ème arrondissement
Monsieur le Maire de Paris, Cher Bertrand,
Chère Véronique Colucci, Cher Romain, Cher Marius Colucci,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames et Messieurs, Chers Amis,
Votre présence nombreuse est le signe que, plus de 20 ans après sa
tragique disparition, Coluche compte encore beaucoup pour nous. Le
philosophe Alain a dit : « le souvenir commence avec la cicatrice de la
disparition ».
La « cicatrice » est toujours présente, elle nous aide à nous souvenir.
Si nous sommes réunis aujourd’hui sur cette place qui va dans quelques
minutes porter son nom, c’est pour rendre hommage à un homme hors du
commun qui a marqué les années 70 et 80 d’un humour parfois féroce
mais toujours décapant et juste et qui nous laisse quelque peu orphelin.
Il ne s’agit pas pour moi de retracer ici, au lendemain du jour anniversaire
de sa naissance, le 28 octobre 1944, la vie exceptionnelle et insolite de
Michel Colucci.
Non, il s’agit pour moi de dire, en quelques mots, ce qu’incarne Coluche,
l’humoriste, l’acteur, l’homme de music hall, l’animateur de radio, le
clown, le chanteur, l’artiste populaire, disparu trop tôt.
Le 14ème arrondissement de Paris, l’amitié et la solidarité caractérisent,
pour moi, la vie et la personnalité de Coluche.
Le 14ème et Coluche sont intimement liés. C’est, en effet, dans le 14ème,
rue de la Gaîté, qu’est né le conte de fées entre son père d’origine italienne
et sa mère d’origine charentaise, laquelle, jeune fille, vécut et travailla
Boulevard du Montparnasse.
Je dirai que Coluche, lui, y est né deux fois, dans le 14ème.
D’abord, au sens littéral, car Michel Colucci est né à la maternité de
Notre-Dame de Bon Secours. Ensuite, en tant qu’artiste, rue d’Odessa, où,
démarrant sa carrière, il participe à l’aventure du Café de la gare, avec
Romain Bouteille, Miou-Miou, Patrick Dewaere, Renaud, Gérard
Depardieu, Josiane Balasko, Gérard Lanvin et bien d’autres encore.
Lieu novateur que le Café de la gare, s’il en est, puisque ce n’est ni un
théâtre, ni un cabaret, ni un bistrot, mais un peu des trois à la fois ; lieu
original où se forge son talent. Au Café de la gare succède le Vrai Chic
Parisien crée par Coluche, qui y dirige sa propre troupe.
A Bobino ensuite, rue de la Gaîté, il présente un de ses premiers spectacles
de music hall.
Et c’est encore le 14ème qu’il choisit pour y vivre, après Montrouge, à
Montparnasse, puis rue Gazan où il s’établit avec vous Véronique, dont il
fait la connaissance au Café de la gare, et avec vous Romain et Marius.
Attaché à ce quartier, il fréquente ses commerces et ses cafés, tout comme,
si je puis dire, le bureau de vote de l’école primaire, tout proche d’ici, du 3
rue d’Alésia.
Après le 14ème, l’amitié ! En effet, comment parler de Coluche sans
évoquer ses fameuses bandes de potes. Coluche n’aurait pas été ce qu’il a
été sans ses amis, sans ses joyeux copains rencontrés au fil des ans, au gré
de ses activités et de ses passions.
Il y eut bien sûr la bande du Café de la gare, puis celles du Vrai Chic
Parisien, de Hara-Kiri-Charlie-Hedbo, du Splendid, les acteurs, les
chanteurs, les réalisateurs, les motards, les journalistes, les dessinateurs,
les écrivains, bref toutes celles et tous ceux qui l’ont approché, entouré,
aimé et dont beaucoup sont présents parmi nous et que je salue.
Vous pourriez, bien mieux que moi, parler de cette sensibilité qui faisait de
Coluche un être si populaire, si attachant, un homme de cœur, qui est
toujours présent dans le nôtre.
C’est cette sensibilité, toujours à vif chez lui, qui le conduit en 1985 à
fonder les « Restaurants du Cœur », exemplaire message de solidarité.
Son action, qui s’est élargie par la suite à l’insertion et à l’hébergement
d’urgence se poursuit, et on le doit beaucoup à Véronique, vingt ans après
sa disparition, signe que notre société, hélas, ne va pas mieux. Les
« Restos du Cœur », ce sont aujourd’hui plus de 65 millions de repas
distribués annuellement grâce à 45 000 bénévoles et 400 000 donateurs.
Coluche ne vivra pas assez longtemps pour voir voter en 1988, à
l’unanimité par le Parlement, la loi qui porte son nom, loi dont il fut
l’initiateur et que Michel Charasse défendit.
Engagé contre la pauvreté, qu’il connut dans son enfance, engagé contre la
faim, il s’engage également contre le racisme aux côtés de SOS Racisme.
Avec ses chaussures de couleur jaune ou rouge, Coluche a les deux pieds
dans son époque. Il va jusqu’à envisager de se présenter comme candidat
des minorités à l’élection présidentielle de 1981, semant un certain trouble
dans le monde politique. Crédité de 16 % d’intentions de vote, il décide
cependant d’arrêter.
Il déclare alors : « J’ai voulu m’amuser et amuser les autres dans une
période d’une grande tristesse et d’un grand sérieux. C’est le sérieux qui
gagne et bien tant pis… Amusez vous bien, mais sans moi. »
Coluche nous quitte brutalement le 18 juin 1986 sur la route d’Opio, où sa
moto est percutée par un camion. L’Abbé Pierre lui rend un dernier
hommage.
Oui, Coluche, c’est « l’histoire d’un mec », d’un mec libre, d’un mec
vraiment bien !
Michel, les « enfoirés » te disent merci, merci encore et toujours.
Merci aussi à vous toutes et à vous tous d’être là aujourd’hui.