Rapport de stage - astro

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Rapport de stage - astro
Rapport de stage
Eric SARRAZIN
Ecole d'astronomie d'été pour la formation des maîtres
Août 2002
Introduction
L'astronomie est un domaine des sciences qui peut être partagée par un grand nombre de
personnes et d'horizons différents. Quel meilleur endroit que l'école pour le faire découvrir et
faire participer un large public à cette aventure passionnante? Dans le cadre de la formation
des maîtres, l'Observatoire de Paris (Institut de la Mécanique Céleste) organisait cet été un
stage à l'Observatoire de Haute Provence (OHP). Ce stage est l'occasion pour chaque
enseignant participant de parfaire ses connaissances théoriques et pratiques en astronomie et
de vivre pendant une semaine au rythme des astronomes professionnels. Il permet également
de réaliser le rêve de tout astronome amateur en accédant à des télescopes de « grand
diamètre » tels que le Schmidt, le T120 ou encore le T80.
Le Schmidt
Ce télescope a été construit et exploité en collaboration avec l'Université de Liège. Mis en
service en 1970, il fut modifié en 1974. Le miroir primaire est en verre St.Gobain (diamètre
87cm, épaisseur 9cm, focale 208.8cm, ouverture f/3.36) et la lame de Schmidt est en BK7
Schott (diamètre 62cm, épaisseur 2.3cm). Des plaques 16x16cm (15x15cm utiles) sont
chargées automatiquement depuis la périphérie extérieure du tube. Cependant depuis quelques
années il n'est plus possible de trouver de plaques 16x16. Nous avons donc utilisé des plans
films d'une dimension inférieure réduisant ainsi le champ de vue (~3° au lieu de 4.1°). Une
lunette guide de 26cm et de 4,22m de focale est utilisée avec une platine X-Y à déplacement
programmable pour le suivi des comètes.
Préliminaires :
Lors de cette première nuit d'observation nous avons pu nous familiariser avec le télescope et
plus particulièrement avec une technique de recherche de foyer connue sous le nom de
foucaultage. Cette technique, très efficace demande cependant un certain nombre de
précautions. L'étoile visée pour réaliser cette mise au point étant Véga dans la constellation de
la Lyre.
Une autre étape importante pour l'obtention d'un cliché au Schmidt est la préparation et le
chargement du plan film. Tout doit se faire dans l'obscurité la plus totale. Il est donc impératif
de s' entraîner à préparer et à charger un faux plan film avant de passer aux choses sérieuses.
Quel cérémonial que la description des opérations effectuées dans le noir à nos camarades du
groupe : -Oui je sens les entailles du plan film sur mon index gauche; donc je retourne le plan
film …etc etc. Puis c'est la longue procession jusqu'au télescope pour le chargement du plan
film. La mécanique de ce système est d'une précision remarquable.
Nous voilà prêt à tenter notre premier cliché. Malheureusement (ou heureusement !), le temps
se couvre et c'est l'occasion pour nous de rentre visite aux chercheurs du Télescope de 193
cm. Quelle expérience… Nous pénétrons dans l'antre. Quel privilège de pouvoir visiter la
coupole de nuit et de s'entretenir avec les astronomes en mission ce soir là. Nous voulions tout
savoir.
Il est temps maintenant de se rendre à la traditionnelle collation des 2 heures du matin (encore
un autre cérémonial !!) afin de tenir le coup jusqu'à l'aube. Un vrai repas en plein milieu de la
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nuit. Cela peut surprendre le premier soir mais on s'y habitue vite. Fin de la collation et le
temps n'est toujours pas terrible. Tans pis, on retourne au Schmidt histoire de s'entraîner
encore sur quelques plans films de façon à être opérationnel pour la nuit suivante. Il est 3h30
et notre première nuit de pseudo astronome professionnel prend fin. Il est temps d'aller se
reposer pour être en forme la nuit prochaine.
Les Dentelles du Cygne :
Cette deuxième soirée au Schmidt s'annonce bien compte tenu d'une météo favorable. Après
avoir correctement foucaulté notre télescope et étalonné nos codeurs en ascension droite (α)
et en déclinaison (δ), nous envisageons une première cible : les Dentelles du Cygne. Ces
draperies occupent un champ suffisamment important pour couvrir la totalité de notre plan
film. Les coordonnées affichées aux codeurs sont :
-
α = 20h 52min 44s
δ = 31° 12' 54"
Il s'agit maintenant de trouver une étoile guide suffisamment brillante dans le champ du
chercheur de façon à réaliser un suivi de qualité. Cette étoile est placée au centre du
chercheur. Le temps de pose est fixé à 30 minutes. L'obturateur s'ouvre et pendant toute la
durée de la pose il s'agit de surveiller l'étoile guide et de rattraper ses éventuels écarts par
rapport au centre du chercheur.
Le développement du plan film est identique à la technique utilisée pour la photo argentique.
Verdict : quelques draperies sont présentes sur le cliché mais on pouvait s'attendre à en
trouver plus. Le suivi est correct mais sans plus…
Le lendemain après midi en consultant un atlas du ciel (W. Tirion 2000) à la bibliothèque de
l'Observatoire, il apparaît que le champ visé la veille ne contient effectivement que peu de
draperies. Nous aurions du centrer notre champ en α = 20h 15min 00s et δ = 40° 00' 00". Le
nombre de draperies aurait certainement été plus important (cf Digital Sky Survey en
annexe 1) et Deneb une excellente candidate comme étoile guide!!
A la recherche de 2001 NY 40:
Le champ d'observation du Schmidt est suffisamment important pour espérer repérer le
déplacement d'un astéroïde. La veille, le télescope T120 a pu repérer et obtenir les
éphémérides d'un astéroïde connu sous le nom de 2001 NY 40.
Dans la nuit du 6 au 7 août 2002 sa vitesse est donnée à 0,51"/min. à 00 h TU. Pour un temps
de pose de 20 minutes le déplacement sur le plan film correspond à 10,2" d'arc. On peut donc
espérer obtenir un trait de 6mm sur le plan film.
00 h TU le Schmidt est pointé en α = 21h 33min 44s et δ = -04 ° 24' 33". Après 20 minutes de
pose, suivies d'un développement nous obtenons notre plan film. A première vue, aucun trait
significatif n'est observable. Les raisons peuvent être multiples :
3
-
L'exploitation du plan film avec une loupe n'est pas toujours facile et il est possible de
passer à coté d'une légère trace.
Compte tenu de la faible magnitude de l'astéroïde, il est possible que celui n'est pas
correctement impressionné le plan film.
Il est également possible qu'une erreur de pointage soit à l'origine de cette non détection.
Conclusion
Notre passage au télescope de Schmidt a permis de nous initier à la mise au point du télescope
par foucaultage. Nous avons également pu pointer à la main un télescope d'un diamètre
conséquent, ce qui procurait ainsi une intense émotion.
La nébuleuse North América obtenu au Schmidt de l’OHP par une équipe de professionnels.
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Le télescope de 120 cm (T120)
Ce télescope, d'abord installé à l'Observatoire de Paris en 1872, a été rénové et installé à
l'OHP en 1943. Il est équipé d'une caméra CCD TK1024x1024 aminci, montée sur un port du
foyer Newton (f/6). Cette caméra, construite à l'OHP, a été mise en service fin 1988.
FWMH (")
Une différence importante par rapport au télescope Schmidt est le contact physique avec le
tube sous la coupole. En effet pratiquement tout se fait dans la salle de contrôle. De plus le
champ observé au T120 est plus petit que pour le Schmidt (12' contre 3°). Comme pour le
Schmidt, la soirée démarre avec le pointage d'une étoile de magnitude 5 environ, afin
d'effectuer la mise au point du foyer. Une série d'acquisitions est lancée et ce pour différentes
positions du foyer. On obtient une courbe identique à celle de la figure ci dessous :
9
8
7
6
5
4
3
2
1
0
490
‹• °
500
510
520
530
540
550
mise au point
Evolution de l'étalement de l'étoile à mi-hauteur (FWHM) en fonction de la position du foyer.
Cette courbe permet au passage de calculer le "seeing" du début de soirée, donnant une
indication sur la qualité des images à venir. Pour les très bonnes nuits d'observations à l'OHP
ce seeing est de l'ordre de 2" et la magnitude 21 peut alors être envisagée. Ce soir il est
d'environ 3,7" (valeur correcte). Cette information intéressante est en général demandée par
les autres coupoles. Cependant ce réglage du foyer n'est pas définitif pour la nuit
d'observation. En effet, le tube peut subir des contraintes mécaniques notamment à cause de la
baisse de la température; un nouveau calibrage doit alors être effectué.
La première cible envisagée est la planète Neptune ainsi que son satellite Néreïde découvert
en 1949. Nous procédons alors à l'acquisition de plusieurs poses de 30 secondes espacées de
10 minutes. En utilisant la technique du blink entre le premier et le dernier clichés, nous
détectons effectivement Néreïde mais surprise, il apparaît dans notre champ de visée un
astéroïde apparemment non repéré jusque là (MPC Checker). La technique du blink consiste à
faire apparaître à l'écran successivement deux images du même champ d'observation. Les
étoiles, fixes pendant cet intervalle de temps, restent immobiles alors que des objets comme
les astéroïdes ou les comètes ont le temps de se déplacer entre la première et la dernière
acquisitions. Il en résulte un clignotement et une impression de déplacement de l'objet.
Attention à ne pas confondre ces clignotements avec des rayons cosmiques. Avec un peu
d'habitude il devient facile de faire la différence.
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IMCX2 (TU = 22h45min 04s)
IMCX2(TU = 00h 06min 45s)
Déplacement de l’objet IMCX 2
Il s'agit maintenant de déterminer précisément les coordonnées (α et δ) de ce nouvel astéroïde
dont le nom de code sera pour nous IMCX2. Pour cela nous devons faire une réduction
astrométrique de nos clichés à l'aide d'un logiciel tel que PRISM. Un atlas du ciel est
également nécessaire. Nous avons utilisé celui de l'US Naval Observatory (USNO) sous
forme de CD Rom.
Le tableau ci après rassemble les informations obtenues lors de cette réduction.
N° de clichés
299
301
305
306
Temps moyen (TU)
22h 45min 04sec
23h 07min 50sec
23h 55min 31sec
00h 06min 45sec
Ascension droite (α)
20h 47min 44.580sec
20h 47min 43.890sec
20h 47min 41.720sec
20h 47min 41.260sec
Déclinaison (δ)
-17° 46' 11.82"
-17° 46' 18.34"
-17° 46' 17.99"
-17° 46' 18.94"
Ces informations permettent alors de générer un éphéméride de l'objet de façon à pouvoir le
suivre sur plusieurs nuits.
Une estimation de la position de IMCX2 est donnée en annexe 2. Malheureusement la nuit
suivante a été nuageuse nous empêchant de pointer l'astéroïde de façon à préciser son
éphéméride.
Ces deux nuits au T120 nous ont permis de nous familiariser aux techniques de l'astronomie
professionnelle avec un récepteur CCD. Nous avons également pu nous initier à la préparation
du récepteur, son paramétrage ainsi qu'aux opérations d'acquisition des images. Le repérage
d'un astéroïde a pu être réalisé.
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Le télescope de 80 cm (T80):
Ce télescope, financé par la Fondation Dina, a été conçu par A. Couder en 1928 et construit
en 1930 par la Maison Prin à Paris. Installé à Forcalquier en 1932 sous la responsabilité de
l'Observatoire de Paris, il fut déménagé à St.Michel en 1945, après la création de l'OHP. Il
devient alors le deuxième télescope à être installé à l'OHP après le 1,2 mètre.
Actuellement, il est utilisé dans sa configuration Cassegrain à f/15. Sa distance focale est de
12 mètres. Une configuration en Newton (f/6) est également possible. Ce télescope possède
une roue à filtres manuelle. Contrairement aux deux autres télescopes (Schmidt et T120), il ne
possède pas de codeurs. Le pointage se fait à l'aide de cercles et la formule de référence est :
H = Ts - α
Cette technique de pointage est très pédagogique et très enrichissante pour l'astronome
amateur.
Ce télescope est équipé d'une caméra CCD Tektronix 512x512 pixels de 27 µm. La focale du
télescope donne une échelle de 0.42"/pixel et un champ utile de 3.6' par 3.6'. Le signal du
CCD est codé sur 15 bits, donc la saturation numérique a lieu à 32767 ADU. Le bruit de
lecture est de 10 électrons et le gain est de 6.4 électrons/ADU. La profondeur des puits est de
500000 électrons environ, donc la saturation numérique intervient avant la saturation des
puits.
Le télescope de 80 cm permet également de placer son œil à l'oculaire et la vision de l'anneau
de la Lyre dans un télescope de 80 cm de diamètre est une chose que je ne suis pas prêt
d'oublier.
Les cibles se succèdent : M56, M57, Albireo. Nous passons indifféremment de l'observation
visuelle à l'acquisition CCD. Le traitement des images est effectué en fin de nuit. Les
techniques classiques sont appliquées : soustraction du dark, division par le flat …
Une belle image numérique de l'anneau de la Lyre est ainsi obtenue.
Saturne se lève. Il est temps de la pointer. Encore basse sur l'horizon la qualité de l'image est
médiocre. Qu'importe, le plaisir de pointer Saturne avec un tel instrument est suffisant…
Conclusion
Ce stage à l'Observatoire de Haute Provence a été pour moi l'occasion de vivre pendant une
semaine au rythme d'un astronome professionnel en mission. Il a été possible d'utiliser des
télescopes de diamètre important inaccessibles autrement pour un astronome amateur. Cette
semaine a également été très enrichissante tant sur le plan théorique que pratique. J'espère
maintenant pouvoir faire partager un peu plus cette passion à mes élèves en suscitant,
pourquoi pas des vocations d'astronomes...
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Remerciements
Je tiens à remercier tout particulièrement Monsieur Arlot pour cette superbe initiative de
stage. La disponibilité et la gentillesse des personnels encadrant ce stage a été remarquable.
Qu'ils trouvent ici l’expression de toute ma sympathie.
Quelques stagiaires en compagnie de l’équipe d’encadrement dans la salle du T120.
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Annexe 1 : Digital Sky Survey dans la région des dentelles du Cygne.
N
E
Champ de 30’ X 30’
Centre du champ α = 20h 52min 44s
δ = 31° 12' 54"
9
N
E
Champ de 30’ X 30’
Centre du champ α = 20h 15min 00s
δ = 40° 00' 00 "
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Annexe 2 : Estimation de la position de IMCX2
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