Notes sur le spectacle La Paix du ménage (1888)

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Notes sur le spectacle La Paix du ménage (1888)
Notes sur le spectacle La Paix du ménage (1888)
Attention, ne pas confondre aristocratie et bourgeoisie. Les noms des personnages sont un indice avec la présence
de la particule : M. et Mme DE Sallus et Jacques DE Randol.
A noter, la présence de la musique qui caractérise les origines du vaudeville.
Evolution des titres : Duel au canif puis La paix du foyer puis La paix du ménage : on passe d’un titre qui évoque
explicitement un conflit à un titre qui fonctionne sur une antiphrase et qi resserre sur le couple. Finalement le mari
recherche cette paix pour mieux avoir les mains libres et mener une vie libre en dehors de son couple, avec une
« vraie » femme qui se fait désirer.
1- Les procédés comiques
Comique de situation : le vaudeville se définit le plus souvent par la relation triangulaire entre amant/maîtresse/mari
et donne lieu à des situations cocasses que nous retrouvons ici notamment lorsque Randol veut quitter la maison
alors que le mari arrive. Il fonctionne même ici sur la répétition. Autres situations qui prêtent à sourire : le mari qui
veut « acheter » sa femme pour remplacer ses maîtresses ou l’entente entre les deux hommes à la fin de la pièce,
l’époux demandant à l’amant de rester pendant le dîner et lui parlant des « vraies » femmes.
Comique de mots : dans l’énumération des maîtresses de Sallus, toutes en diminutifs ridicules formés sur la
répétition de deux syllabes tels que Melle Zozo, Melle Lili. Dans la comparaison utilisée par Randol pour décrire la
femme aimée mais inaccessible «comme les affamés regardent les pâtés et les volailles derrière les vitres d'un
restaurant » ou dans la métaphore de la femme associée à des bonbons dans la même scène. Les lapsus créés par
l’amant, embarrassé face au mari. Donc on retrouve des traits d’esprit assez nombreux qui caractérisent la langue de
Maupassant.
Comique de caractère : le personnage de Sallus, incapable de se passer de maîtresse, esclave de ses désirs ; l’amant
beau parleur mais lâche ; l’épouse un peu naïve qui croit au revirement amoureux = belle galerie de portraits peu
flatteurs pour l’espère humaine.
Omique de mœurs : satire du fonctionnement de l’aristocratie, entre hypocrisie et respect des apparences.
Comique de geste : la tape sur les fesses de l’épouse qui donne lieu à un verre d’eau en plein visage, la chute de
l’amant alors que sa maîtresse lui apprend qu’elle veut s’enfuir avec lui, les mimiques de Randol qui cherchent à se
sortir de cette situation délicate, les fausses sorties de l’épouse alors que le mari lui demande de redevenir sa
maîtresse. Ce comique reste limité car nous sommes dans la classe sociale de l’aristocratie.
 Le comique réside donc principalement dans l’ironie, l’humour caustique et derrière les bons mots se cache
la critique acerbe de ce mode de vie.
2- Le rythme
La pièce n’est composée que de trois personnages et son rythme est créé par l’alternance des duos et une fin sur un
trio. La durée de la fiction est limitée : on reste sur deux jours environ, le temps du revirement de l’actrice dont
Sallus veut devenir l’amant. Cette concentration donne donc une certaine rapidité à la pièce, relativement courte
(deux actes seulement).
3- Costumes et décors
Costumes d’époque avec trois pièces pour les messieurs et robe « faux-cul » pour madame. A noter que M. de Sallus
n’a pas toujours sa veste puisqu’il est chez lui alors que M. de Randol garde sa veste. Lorsque M. de Sallus arrive chez
lui, on notera une tenue un peu plus sophistiquée que M. de Randol ce qui peut souligner son goût. Le changement
de cravates permet de souligner l’évolution temporelle : changement de jour. La recherche d’une symbolique pour
les couleurs semble dans ce cas assez aléatoire. L’essentiel réside plutôt dans le choix de costumes datés qui créent
une atmosphère particulière et nous fait entrer immédiatement dans une classe sociale aisée.
Le décor était constitué de 3 panneaux créant un salon avec deux fauteuils à jardin en avant scène, une table au
centre, une console avec chaise à cour. Cela ménageait 2 entrées en biais. A noter le tableau sur le mur du fond avec
le jeune couple, le mari derrière la femme assise qui reprend d’ailleurs l’image finale avec l’amant en plus. Plusieurs
interprétations sont possibles : c’est d’abord la mise en évidence d’un compromis entre le mari et ‘lamant, tous deux
derrière la femme qu’ils « possède ». C’est aussi la mise en évidence de la soumission de la femme, chaque homme a
en effet une main sur son épaules, adoptant finalement une position supérieure.
Vlacour 2011/2012 – théâtre
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4- Portée de la pièce
C’est d’abord la dénonciation de l’hypocrisie de l’aristocratie, classe oisive qui passe son temps dans les théâtres et
qui s’accommode très bien des relations superficielles entre les individus, notamment entre mari et femme.
C’est surtout une réflexion sur la condition de la femme car Mme de Sallus apparaît complètement sous la
domination de son époux qui a tous les droits sur elle ; il le lui rappelle très bien en faisant allusion au code civil qui
justifie le fait qu’elle doit se plier à ses moindres désirs. La femme passe de l’autorité de son père à celle de son
époux et n’a aucune existence propre. Elle ne doit absolument pas entacher la réputation de son mari par son
comportement : lui a le droit de sortir avec d’autres femmes, de paraître avec des maîtresses et de subvenir à leurs
besoins en dilapidant l’argent du foyer mais elle ne doit en aucun cas montrer qu’elle a un amant. Elle peut sortir
dans les salons mondains, visiter ses amies mais doit rester discrète.
Son amant ne vaut guère mieux car il ses satisfait d’une relation qui le laisse libre et dès qu’il lui faut prendre des
risques pour la femme qu’il dit aimer (cf I,1), il semble plus que réticent et son attitude montre sa lâcheté.
D’ailleurs la structure de la pièce souligne que la femme est totalement dépendant des hommes : elle commet une
erreur quand elle croit que son mari est à nouveau amoureux d’elle et toute la pièce n’est qu’un démenti des
sentiments car l’amour n’est envisagé que comme une relation de complaisance qui se marchande.
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