Audiovisuel - Syndicat National des Journalistes

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Audiovisuel - Syndicat National des Journalistes
Audiovisuel
Le SNJ Radio France
avait écrit au rapporteur
France Info lancée dans la confusion
Incohérences et manque de moyens
Lancement réussi du vaisseau France
Info, la chaîne d'information en continu
du service public. Mais aura-t-il assez
de carburant pour poursuivre sa route ?
Hélas, toutes les craintes du SNJ
se concrétisent : incohérence éditoriale,
manque de moyens, répercussions
chez France Télévisions, Radio France et
France Médias Monde (France 24 et RFI).
C
'est un curieux assemblage éditorial. Un plateau tout en
mouvements, suivi d'un autre très figé, des modules
sans commentaire et avec des bouts de sons, de longs
tunnels de paroles avec un seul intervenant, des titres
de France Info (la radio) différents de ceux de France Info
(la télé). Pire, des informations contradictoires, et quasiment
pas de reportages : un comble pour une chaîne d'information !
À l'incohérence éditoriale, s'ajoutent les mauvais coups subis
par les salariés. Ceux embauchés pour la chaîne d'info,
astreints à un rythme de travail infernal. Ceux subis par les
salariés qui assurent des vacations pour la chaîne.
Réquisition à FTV
À France Télévisions, les rédactions doivent mettre à disposition de la chaîne d'info des journalistes chaque jour, sans
discussion possible pour les intéressés. Les journalistes reporters d'images sont privés de reportages : ils tiennent la caméra
sur le plateau, ou font du banc-titre. Les journalistes des éditions de France 2 et France 3 interviennent pour France Info,
au détriment de leur temps de reportage.
La chaîne d'info parasite le bon fonctionnement de toute l'information sur France Télévisions, d'autant plus que les salariés
embauchés ou mis à disposition ne sont pas remplacés.
Confusion à la radio
À Radio France, les appels téléphoniques surréalistes s'accumulent :
« - Allô ? C'est France info, on voudrait vous inviter dans nos
studios.
- Mais vous venez déjà de m'inviter, je dois aller à 14 h 00
chez vous !
- Vous devez parler de France Info, la télé ? Nous, c'est France
Info, la radio ! »
À la perte d’identité, s’ajoute la perte du site internet. Le
mariage avec France Télévisions a fait disparaître les articles
et les infos de la radio. Ce mariage remet aussi en cause le
travail de l’agence interne qui vérifie toutes les infos données
à l’antenne radio. Le site internet « France Info » au contraire,
poursuit sur sa propre ligne éditoriale et relaye les infos de la
concurrence (RTL, BFM...) mettant ainsi les reporters de la
radio en porte-à-faux vis-à-vis de leurs sources.
Les journalistes de Radio France embauchés pour France info
(la télé), ne sont pas assez nombreux. Conséquence : la direction les planifie sur des vacations de 10 heures sans pauses
repas !
De leur côté, les journalistes de la rédaction de la radio France
Info, qui travaillent depuis des années pour toutes les chaînes
de Radio France, se demandent pourquoi ils devraient travailler, en plus gratuitement, pour la chaîne de télé.
Priorité à la nouvelle chaîne
À France Média Monde (France 24 et RFI), malgré le plan
d'économies mis en place par la direction, la priorité est donnée à France info (la télé). Au point que les salariés s'interrogent sur la pérennité même de leur entreprise. Inquiétude
légitime quand on examine la priorité de l'antenne pour les
correspondants de RFI et France24 : l'arbitrage se fait en
faveur de la nouvelle chaîne, qui a la primeur de l'information.
Enfin, la nuit, France Info diffuse tel quel le signal de
France 24. Où est la cohérence éditoriale de la chaîne d'info ?
D'autant plus qu'il n'y a pas de pilote dans l'avion : la nuit, sur
France 24, les équipes doivent se débrouiller sans rédacteur
en chef.
Le chaos social n'est pas loin, dans toutes les entreprises qui
concourent au fonctionnement de France Info. Quant à la
coordination éditoriale, essentielle pour donner des informations fiables, vérifiées et identiques en fonction des antennes,
elle est inexistante ! On nous avait promis qu'elle serait la clé
de voûte de France Info : elle en est le talon d'Achille. n
La direction condamnée par la justice à respecter les métiers
C’est un coup d’arrêt spectaculaire que le Tribunal de grande
instance de Paris, saisi par le SNJ et la CFDT, a porté le
13 septembre à la tentative de passage en force de la
direction de France Télévisions.
Non, a déclaré en substance le tribunal, la direction de
France Télévisions n’a pas le droit d’imposer de nouvelles
compétences complémentaires aux journalistes et techniciens de la chaîne d'info qu’elle emploie, après l’échec des
négociations avec les organisations syndicales menées sur
ce thème.
En conséquence, le tribunal interdit à France Télévisions
d’imposer des tâches de montage à des journalistes et de
confier des tâches éditoriales à des chefs monteurs. Il
ordonne en outre l’exécution provisoire.
Nous en arrivons donc à la mise en place du « plan B » que
le SNJ ne cesse de réclamer de la direction depuis l’ouverture de la négociation sur la chaîne info. Un plan qui passera notamment par l'embauche de techniciens pour le
montage.
Le propos du SNJ n’a jamais été de torpiller la chaîne info,
mais de la mettre sur de bons rails, c'est-à-dire notamment
dans le respect des dispositions de l’accord collectif du
28 mai 2013.
La direction a cru judicieux d’ajouter au pari éditorial et
technique que constitue ce projet un recul social bien inutile. Il n'est pas trop tard pour s’atteler à l’essentiel, l’offre
aux publics d’une information de service public de qualité.
Courroucé, le bureau national du SNJ
Radio France à écrit courant juillet au
député PS Jean-Marie Beffara,
rapporteur du projet CPI devant la
Commission des finances de
l’Assemblée : « C’est avec une
certaine consternation que nous
avons pris connaissance des
conclusions de votre rapport sur la
chaîne publique d’information […] :
« Son arrivée dans le paysage
audiovisuel français vient corriger une
anomalie qui faisait de la France le
seul pays européen où le service
public est absent de ce secteur »
estimez-vous, sans autre élément de
comparaison. Il aurait pourtant
semblé instructif de connaître les
pays européens où cohabitent quatre
chaînes nationales d’information en
continu, et même une cinquième à
vocation internationale… ne cherchez
pas, il n’y en a aucun ». Et une
question un peu plus loin : « À moins
qu’il ne s’agisse juste d’une volonté
de l’actuelle majorité parlementaire
d’affaiblir les chaînes privées
existantes avant les échéances
électorales de 2017 ? » Un ange
passe…
France Bleu en mouvement
Pas de journaux dans 40 locales, pas
de matinales dans 37 stations, les
journalistes de France Bleu se sont
mis massivement en grève le lundi
27 juin contre la baisse des moyens
qui affecte le réseau. La mobilisation
a été très forte dans les 44 radios
locales, les salariés ayant répondu
massivement à l’appel lancé par tous
les syndicats de Radio France, pour
protester contre une baisse des
budgets de remplacement qui a
atteint - 40 % en trois ans. Une
saignée qui est la conséquence d’une
politique de réduction drastique des
moyens, qui met en péril les radios de
proximité, l’avenir des salaires et la
santé des salariés qui voient leurs
journées de travail s’allonger.
Projet stratégique :
France 3 en danger
C’est ça la stratégie ? Suppression
saisonnière ou définitive des éditions
locales, disparition de la rédaction
nationale, expérimentations
numériques hasardeuses sur les
antennes régionales et absence de
projet fédérateur… « A l’heure de la
restructuration du réseau régional,
c’est bien tout France 3 qui est en
danger », a dénoncé le SNJ, courant
juillet, à propos du « projet
stratégique » de la présidence de
France Télévisions pour France 3 : un
vrai « requiem pour l’information ».
LE JOURNALISTE - 3e trimestre 2016 -
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