Le secret de grand-père
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Le secret de grand-père
J’étais en train de penser à elle… 1 5 10 15 20 25 30 35 40 45 - J’étais en train de penser à elle, là-bas, sur le buffet, déclara-t-il. Je mis quelques secondes avant de comprendre ce qu’il voulait dire. - Ça fait vingt ans aujourd’hui. Elle s’en est allée, elle m’a quitté il y a vingt ans. Elle s’en allée, elle est morte dans mes bras. Elle était tout pour moi. Et tu sais quoi ? Nous étions en plein milieu de quelque chose que nous n’avons pas fini. Elle est tombée malade et elle est morte. Elle n’aurait pas dû. Elle n’aurait jamais dû. - - Vous étiez au milieu de quoi ? lui demandai-je. Il me regarda en essayant de sourire. - Tu es un brave petit. Quand j’y pense, tu es un peu comme elle, tu sais. Tu laisses les gens tranquilles quand il le faut. Il y en a qui ont deviné, ton père et ta mère, par exemple, j’en suis sûr ; mais la seule personne à qui je l’ai vraiment dit, c’est elle, là, sur le buffet. Je le lui ai dit avant de l’épouser, et elle m’a répondu que ça ne faisait rien, que ce n’était pas ce qui comptait le plus chez quelqu’un. Il n’y a pas de quoi avoir honte, disait-elle. Que son cœur soit béni. Bien sûr, dès qu’elle est venue vivre avec moi, je n’ai plus eu besoin de m’en occuper, tu comprends ? Je veux dire qu’elle faisait tout pour moi. Et j’avais toutes les excuses possibles : il y avait la ferme. Je travaillais du matin au soir ; et les enfants à élever, les bouches à nourrir, les traites à payer. Eh oui, j’avais toutes les excuses. Mais la vérité, c’est que je m’en fichais. Puis, quand les enfants ont grandi et se sont plus ou moins envolés du nid, elle m’a dit que nous avions le temps de nous y mettre. Elle a dit que nous devrions nous asseoir ensemble le soir, quand j’avais fini les travaux de la ferme, et commencer. C’est ce que nous avons fait. A peine un mois plus tard, je me suis réveillé un matin, et elle était toujours au lit à côté de moi. D’habitude, elle se levait toujours avant moi, toujours. Et elle était froide, si froide ! J’ai immédiatement compris qu’elle était morte. Un cœur fragile, m’a expliqué le médecin. Elle avait souffert de rhumatisme articulaire quand elle était petite. Je ne le savais pas. Elle ne me l’avait jamais dit. Il me fit signe de m’asseoir en face de lui, et me regarda longuement, fixement, avant de reprendre : - Je lui parle toujours, tu sais. La nuit dernière, je lui ai demandé : « Tu crois que je devrais lui dire ? Tu crois qu’il le ferait ? Qu’est-ce que tu en penses ? » Elle m’écoutait, je le sais. Elle ne dit jamais rien, mais c’est comme si je l’entendais m’écouter, comme si parfois, je l’entendais penser. Et la nuit dernière, elle pensait : « Il est temps que tu finisses ce que nous avons commencé. Ça ne sert à rien de rester là assis le reste de tes jours à te lamenter sur ton sort. Demande-lui, vieux grincheux. Au pire, il te dira non. » Il se redressa soudain et me prit par le bras. - Alors, tu veux bien ? Je n’avais toujours pas la moindre idée de ce qu’il me demandait. - Tu pourrais nous donner un coup de main à la ferme. Je te paierais, tu sais, un vrai salaire d’adulte. Et peut-être que … Il gardait les yeux baissés sur ses mains, triturant ses jointures. II semblait avoir du mal à continuer. Stéphane Boscher, école Pontrieux Et peut-être que tu pourrais me montrer, comme elle le faisait, elle. J’apprendrais vite. - Te montrer quoi ? Grand-père ? Demandai-je. - 50 Le secret de Grand-père, Michael MORPURGO, Gallimard, 2001, pp.34-39 Stéphane Boscher, école Pontrieux Œuvre étudiée Le secret de grand-père Source : Le secret de Grand-père, Michael MORPURGO, Gallimard, 2001 Domaine Littérature Compétences Intitulé Découvrir le secret de grand-père (séances 6 et 7) (L3) Etre capable de comprendre en le lisant silencieusement un texte littéraire court (petite nouvelle, extrait...) de complexité adaptée à l'âge et à la culture des élèves en s'appuyant sur un traitement correct des substituts des noms, des connecteurs, des formes verbales, de la ponctuation... et en faisant les inférences nécessaires. (L7) Etre capable de participer à un débat sur l'interprétation d'un texte littéraire et en étant susceptible de vérifier dans le texte ce qui interdit ou permet l'interprétation défendue. (L11) Avoir compris et retenu que le sens d'une œuvre littéraire n'est pas immédiatement accessible, mais que le travail d'interprétation nécessaire ne peut s'affranchir des contraintes du texte ; Objectifs opérationnels Apprendre à émettre des hypothèses à justifier ses hypothèses et ses interprétations, à les argumenter en s’appuyant sur le texte Apprendre à faire des inférences (Relever des indices dans le texte pour mettre en lumière un procédé d’auteur visant à créer un jeu entre auteur et lecteur (suspense, horizon d’attente)… a) Lecture individuelle du tapuscrit (à la maison) puis lecture à haute voix en classe. b) Lecture à haute voix par le maître de la p.39 à la p.49 ( en fin de 2ème séance). c) Relecture ind. à la maison de la p. 34 à la p.49. Niveau 2 : l’implicite textuel Les zones d’ombres Séance 6 : Questions et consignes : Ind, écrit 5 min Coll, oral 5 min Ind, écrit 10 min 1. L’auteur emploie très souvent dans cet extrait le mot elle. Qui est le personnage qui se cache derrière ce mot ? C’est la grand-mère du narrateur, la femme de grand-père. 2. Que nous apprend l’arrivée de ce personnage? Grand-père a un secret. Mise en commun : Echanges sur les réponses et les arguments puis validation Question 4. Grand-père désire quelque chose, mais l’auteur ne dit pas quoi. As-tu une idée de ce que veut Grand-père ? Quels sont les indices qui te permettent de répondre. Stéphane Boscher, école Pontrieux Niveau 2 : l’implicite textuel Les idées-force Question : 3. Est-ce que tu as ressenti un effet d’énigme ? Si oui, quels sont les éléments du texte qui ont rendu cet effet ? Tu peux surligner. Différenciation : Pour 3 élèves, remise d’un texte dans lequel les indices auront été surlignés avec la question suivante : Ind, écrit 10 min Groupe 20 min Coll. Oral 25 min 3. (bis) En écrivant les phrases surlignées, l’auteur a voulu créer un suspense. Qu’est-ce qui crée le suspense dans ces phrases ? Séance 7 : Questions et consignes : Autour des questions 3 et 4 : Différenciation : Groupes constitués à partir des travaux individuels de la séance 6. Mise en commun : Correction de la question 3 sur les procédés littéraires utilisés (voir contenu à retenir) Débat interprétatif à propos de la question 4, invalidation des interprétations non fondées et conservation au tableau des interprétations possibles. Guidage possible du maître : L.15-16 : Lorsque la grand-mère dit : Il n’y a pas de quoi avoir honte. De quelle honte parle-t-elle ? Qu’est-ce qui pourrait bien causer de la honte chez grand-père ? De quoi une femme pourrait-elle avoir honte chez son mari ? Quel peut bien être le secret de grand-père lorsqu’il dit qu’il ne pouvait pas résoudre son problème à cause de son travail à la ferme ? L.19-20 Quel peut bien être le secret de grand-père lorsqu’on apprend ensuite qu’il a commencé à le résoudre seulement lorsque ses enfants eurent quitté sa maison ? L22-24 Que veut dire Grand-père lorsqu’il dit « j’apprendrais vite ». ? L.50 Epilogue au débat : Lecture à haute voix par le maître de la p.39 à la p.49 Stéphane Boscher, école Pontrieux Contenu à retenir à la fin de la séquence I. Grand-père a un secret. II. L’auteur utilise les procédés suivants pour alimenter le suspense autour du secret de grand-père : Créer un effet d’annonce entraînant une frustration chez le lecteur : - Nous étions en plein milieu de quelque chose que nous n’avons pas fini. L.5-6 Utiliser des substituts vagues : - Nous étions en plein milieu de quelque chose que nous n’avons pas fini. L.5-6 - Je le lui ai dit… L.13 - … elle m’a dit que nous avions le temps de nous y mettre. L.24 - dès qu’elle est venue vivre avec moi, je n’ai plus eu besoin de m’en occuper. L.17 Placer le lecteur dans la peau de l’enfant (le narrateur) - Vous étiez au milieu de quoi ? lui demandai-je. Il me regarda en essayant de sourire. Tu es un brave petit. Quand j’y pense L.8-9 Poser des questions sans réponse (éluder les questions) - Vous étiez au milieu de quoi ? lui demandai-je. L.8 La nuit dernière, je lui ai demandé : « Tu crois que je devrais lui dire ? Tu crois qu’il le ferait ? Qu’estce que tu en penses ? » L.35-37 Aiguiser la recherche du secret - Il y en a qui ont deviné, ton père et ta mère, par exemple, j’en suis sûr ; mais la seule personne à qui je l’ai vraiment dit, c’est elle, là, sur le buffet. L.11-13 - Bien sûr, dès qu’elle est venue vivre avec moi, je n’ai plus eu besoin de m’en occuper, tu comprends ? L.16-18 Stéphane Boscher, école Pontrieux Comment un auteur peut-il créer du suspense ? Voici l’exemple Michaël MORPURGO dans Le secret de Grand-père. Michaël MORPURGO utilise les procédés suivants pour créer le suspense autour du secret de grand-père : a) Créer un effet d’annonce entraînant une frustration chez le lecteur : - Nous étions en plein milieu de quelque chose que nous n’avons pas fini. L.56 b) Utiliser des substituts vagues : - Nous étions en plein milieu de quelque chose que nous n’avons pas fini. L.5-6 - Je le lui ai dit… L.13 - … elle m’a dit que nous avions le temps de nous y mettre. L.24 - dès qu’elle est venue vivre avec moi, je n’ai plus eu besoin de m’en occuper. L.17 c) Placer le lecteur dans la peau de l’enfant (le narrateur) - Vous étiez au milieu de quoi ? lui demandai-je. Il me regarda en essayant de sourire. Tu es un brave petit. Quand j’y pense L.8-9 d) Poser des questions sans réponse - Vous étiez au milieu de quoi ? lui demandai-je. L.8 La nuit dernière, je lui ai demandé : « Tu crois que je devrais lui dire ? Tu crois qu’il le ferait ? Qu’est-ce que tu en penses ? » L.35-37 e) Aiguiser la recherche du secret - Il y en a qui ont deviné, ton père et ta mère, par exemple, j’en suis sûr ; mais la seule personne à qui je l’ai vraiment dit, c’est elle, là, sur le buffet. L.11-13 - Bien sûr, dès qu’elle est venue vivre avec moi, je n’ai plus eu besoin de m’en occuper, tu comprends ? L.16-18 Stéphane Boscher, école Pontrieux Indices pour les questions 1 et 4 (J’étais en train de penser à elle…) 1 5 10 15 20 25 30 35 40 45 - J’étais en train de penser à elle, là-bas, sur le buffet, déclara-t-il. Je mis quelques secondes avant de comprendre ce qu’il voulait dire. - Ça fait vingt ans aujourd’hui. Elle s’en est allée, elle m’a quitté il y a vingt ans. Elle s’en allée, elle est morte dans mes bras. Elle était tout pour moi. Et tu sais quoi ? Nous étions en plein milieu de quelque chose que nous n’avons pas fini. Elle est tombée malade et elle est morte. Elle n’aurait pas dû. Elle n’aurait jamais dû. - - Vous étiez au milieu de quoi ? lui demandai-je. Il me regarda en essayant de sourire. - Tu es un brave petit. Quand j’y pense, tu es un peu comme elle, tu sais. Tu laisses les gens tranquilles quand il le faut. Il y en a qui ont deviné, ton père et ta mère, par exemple, j’en suis sûr ; mais la seule personne à qui je l’ai vraiment dit, c’est elle, là, sur le buffet. Je le lui ai dit avant de l’épouser, et elle m’a répondu que ça ne faisait rien, que ce n’était pas ce qui comptait le plus chez quelqu’un. Il n’y a pas de quoi avoir honte, disait-elle. Que son cœur soit béni. Bien sûr, dès qu’elle est venue vivre avec moi, je n’ai plus eu besoin de m’en occuper, tu comprends ? Je veux dire qu’elle faisait tout pour moi. Et j’avais toutes les excuses possibles : il y avait la ferme. Je travaillais du matin au soir ; et les enfants à élever, les bouches à nourrir, les traites à payer. Eh oui, j’avais toutes les excuses. Mais la vérité, c’est que je m’en fichais. Puis, quand les enfants ont grandi et se sont plus ou moins envolés du nid, elle m’a dit que nous avions le temps de nous y mettre. Elle a dit que nous devrions nous asseoir ensemble le soir, quand j’avais fini les travaux de la ferme, et commencer. C’est ce que nous avons fait. A peine un mois plus tard, je me suis réveillé un matin, et elle était toujours au lit à côté de moi. D’habitude, elle se levait toujours avant moi, toujours. Et elle était froide, si froide ! J’ai immédiatement compris qu’elle était morte. Un cœur fragile, m’a expliqué le médecin. Elle avait souffert de rhumatisme articulaire quand elle était petite. Je ne le savais pas. Elle ne me l’avait jamais dit. Il me fit signe de m’asseoir en face de lui, et me regarda longuement, fixement, avant de reprendre : - Je lui parle toujours, tu sais. La nuit dernière, je lui ai demandé : « Tu crois que je devrais lui dire ? Tu crois qu’il le ferait ? Qu’est-ce que tu en penses ? » Elle m’écoutait, je le sais. Elle ne dit jamais rien, mais c’est comme si je l’entendais m’écouter, comme si parfois, je l’entendais penser. Et la nuit dernière, elle pensait : « Il est temps que tu finisses ce que nous avons commencé. Ça ne sert à rien de rester là assis le reste de tes jours à te lamenter sur ton sort. Demande-lui, vieux grincheux. Au pire, il te dira non. » Il se redressa soudain et me prit par le bras. - Alors, tu veux bien ? Je n’avais toujours pas la moindre idée de ce qu’il me demandait. - Tu pourrais nous donner un coup de main à la ferme. Je te paierais, tu sais, un vrai salaire d’adulte. Et peut-être que … Il gardait les yeux baissés sur ses mains, triturant ses jointures. II semblait avoir du mal à continuer. Stéphane Boscher, école Pontrieux Et peut-être que tu pourrais me montrer, comme elle le faisait, elle. J’apprendrais vite. - Te montrer quoi ? Grand-père ? Demandai-je. - Le secret de Grand-père, Michael MORPURGO, Gallimard, 2001, pp.34-39 … Q1 … Q4 Stéphane Boscher, école Pontrieux Indices pour la question 3 (J’étais en train de penser à elle…) 1 5 10 15 20 25 30 35 40 45 - J’étais en train de penser à elle, là-bas, sur le buffet, déclara-t-il. Je mis quelques secondes avant de comprendre ce qu’il voulait dire. - Ça fait vingt ans aujourd’hui. Elle s’en est allée, elle m’a quitté il y a vingt ans. Elle s’en allée, elle est morte dans mes bras. Elle était tout pour moi. Et tu sais quoi ? Nous étions en plein milieu de quelque chose que nous n’avons pas fini. Elle est tombée malade et elle est morte. Elle n’aurait pas dû. Elle n’aurait jamais dû. - - Vous étiez au milieu de quoi ? lui demandai-je. Il me regarda en essayant de sourire. - Tu es un brave petit. Quand j’y pense, tu es un peu comme elle, tu sais. Tu laisses les gens tranquilles quand il le faut. Il y en a qui ont deviné, ton père et ta mère, par exemple, j’en suis sûr ; mais la seule personne à qui je l’ai vraiment dit, c’est elle, là, sur le buffet. Je le lui ai dit avant de l’épouser, et elle m’a répondu que ça ne faisait rien, que ce n’était pas ce qui comptait le plus chez quelqu’un. Il n’y a pas de quoi avoir honte, disait-elle. Que son cœur soit béni. Bien sûr, dès qu’elle est venue vivre avec moi, je n’ai plus eu besoin de m’en occuper, tu comprends ? Je veux dire qu’elle faisait tout pour moi. Et j’avais toutes les excuses possibles : il y avait la ferme. Je travaillais du matin au soir ; et les enfants à élever, les bouches à nourrir, les traites à payer. Eh oui, j’avais toutes les excuses. Mais la vérité, c’est que je m’en fichais. Puis, quand les enfants ont grandi et se sont plus ou moins envolés du nid, elle m’a dit que nous avions le temps de nous y mettre. Elle a dit que nous devrions nous asseoir ensemble le soir, quand j’avais fini les travaux de la ferme, et commencer. C’est ce que nous avons fait. A peine un mois plus tard, je me suis réveillé un matin, et elle était toujours au lit à côté de moi. D’habitude, elle se levait toujours avant moi, toujours. Et elle était froide, si froide ! J’ai immédiatement compris qu’elle était morte. Un cœur fragile, m’a expliqué le médecin. Elle avait souffert de rhumatisme articulaire quand elle était petite. Je ne le savais pas. Elle ne me l’avait jamais dit. Il me fit signe de m’asseoir en face de lui, et me regarda longuement, fixement, avant de reprendre : - Je lui parle toujours, tu sais. La nuit dernière, je lui ai demandé : « Tu crois que je devrais lui dire ? Tu crois qu’il le ferait ? Qu’est-ce que tu en penses ? » Elle m’écoutait, je le sais. Elle ne dit jamais rien, mais c’est comme si je l’entendais m’écouter, comme si parfois, je l’entendais penser. Et la nuit dernière, elle pensait : « Il est temps que tu finisses ce que nous avons commencé. Ça ne sert à rien de rester là assis le reste de tes jours à te lamenter sur ton sort. Demande-lui, vieux grincheux. Au pire, il te dira non. » Il se redressa soudain et me prit par le bras. - Alors, tu veux bien ? Je n’avais toujours pas la moindre idée de ce qu’il me demandait. - Tu pourrais nous donner un coup de main à la ferme. Je te paierais, tu sais, un vrai salaire d’adulte. Et peut-être que … Il gardait les yeux baissés sur ses mains, triturant ses jointures. II semblait avoir du mal à continuer. Stéphane Boscher, école Pontrieux Et peut-être que tu pourrais me montrer, comme elle le faisait, elle. J’apprendrais vite. - Te montrer quoi ? Grand-père ? Demandai-je. - Le secret de Grand-père, Michael MORPURGO, Gallimard, 2001, pp.34-39 … … … … … Créer un effet d’annonce entraînant une frustration chez le lecteur Utiliser des substituts vagues Placer le lecteur dans la peau de l’enfant (le narrateur) Poser des questions sans réponse (éluder les questions) Aiguiser la recherche du secret Stéphane Boscher, école Pontrieux Evaluation Chaque élève a répondu aux questions et exprimé des hypothèses argumentées se basant sur des éléments du texte. Remarques sur la séquence Prolongements 1) Lecture à haute voix par le maître de la p.39 à la p.49 ( en fin de 2ème séance). 2) Lecture individuelle et personnelle de la p.49 à la p.59 Stéphane Boscher, école Pontrieux Œuvre étudiée Le secret de grand-père Source : Le secret de Grand-père, Michael MORPURGO, Gallimard, 2001 Activités : Lire un texte. Identifier les personnages, décrire des procédés d’écriture, émettre des hypothèses sur la suite de l’ouvrage, relever des indices et argumenter des réponses. Consigne : Cherche dans le texte les réponses à ces questions. Argumente tes réponses. Pour cela, surligne dans le texte et utilise les numéros de lignes du texte. Stéphane Boscher, école Pontrieux J’étais en train de penser à elle… 1 5 10 15 20 25 30 35 40 45 - J’étais en train de penser à elle, là-bas, sur le buffet, déclara-t-il. Je mis quelques secondes avant de comprendre ce qu’il voulait dire. - Ça fait vingt ans aujourd’hui. Elle s’en est allée, elle m’a quitté il y a vingt ans. Elle s’en allée, elle est morte dans mes bras. Elle était tout pour moi. Et tu sais quoi ? Nous étions en plein milieu de quelque chose que nous n’avons pas fini. Elle est tombée malade et elle est morte. Elle n’aurait pas dû. Elle n’aurait jamais dû. - - Vous étiez au milieu de quoi ? lui demandai-je. Il me regarda en essayant de sourire. - Tu es un brave petit. Quand j’y pense, tu es un peu comme elle, tu sais. Tu laisses les gens tranquilles quand il le faut. Il y en a qui ont deviné, ton père et ta mère, par exemple, j’en suis sûr ; mais la seule personne à qui je l’ai vraiment dit, c’est elle, là, sur le buffet. Je le lui ai dit avant de l’épouser, et elle m’a répondu que ça ne faisait rien, que ce n’était pas ce qui comptait le plus chez quelqu’un. Il n’y a pas de quoi avoir honte, disait-elle. Que son cœur soit béni. Bien sûr, dès qu’elle est venue vivre avec moi, je n’ai plus eu besoin de m’en occuper, tu comprends ? Je veux dire qu’elle faisait tout pour moi. Et j’avais toutes les excuses possibles : il y avait la ferme. Je travaillais du matin au soir ; et les enfants à élever, les bouches à nourrir, les traites à payer. Eh oui, j’avais toutes les excuses. Mais la vérité, c’est que je m’en fichais. Puis, quand les enfants ont grandi et se sont plus ou moins envolés du nid, elle m’a dit que nous avions le temps de nous y mettre. Elle a dit que nous devrions nous asseoir ensemble le soir, quand j’avais fini les travaux de la ferme, et commencer. C’est ce que nous avons fait. A peine un mois plus tard, je me suis réveillé un matin, et elle était toujours au lit à côté de moi. D’habitude, elle se levait toujours avant moi, toujours. Et elle était froide, si froide ! J’ai immédiatement compris qu’elle était morte. Un cœur fragile, m’a expliqué le médecin. Elle avait souffert de rhumatisme articulaire quand elle était petite. Je ne le savais pas. Elle ne me l’avait jamais dit. Il me fit signe de m’asseoir en face de lui, et me regarda longuement, fixement, avant de reprendre : - Je lui parle toujours, tu sais. La nuit dernière, je lui ai demandé : « Tu crois que je devrais lui dire ? Tu crois qu’il le ferait ? Qu’est-ce que tu en penses ? » Elle m’écoutait, je le sais. Elle ne dit jamais rien, mais c’est comme si je l’entendais m’écouter, comme si parfois, je l’entendais penser. Et la nuit dernière, elle pensait : « Il est temps que tu finisses ce que nous avons commencé. Ça ne sert à rien de rester là assis le reste de tes jours à te lamenter sur ton sort. Demande-lui, vieux grincheux. Au pire, il te dira non. » Il se redressa soudain et me prit par le bras. - Alors, tu veux bien ? Je n’avais toujours pas la moindre idée de ce qu’il me demandait. - Tu pourrais nous donner un coup de main à la ferme. Je te paierais, tu sais, un vrai salaire d’adulte. Et peut-être que … Il gardait les yeux baissés sur ses mains, triturant ses jointures. II semblait avoir du mal à continuer. Stéphane Boscher, école Pontrieux Et peut-être que tu pourrais me montrer, comme elle le faisait, elle. J’apprendrais vite. - Te montrer quoi ? Grand-père ? Demandai-je. - Le secret de Grand-père, Michael MORPURGO, Gallimard, 2001, pp.34-39 Stéphane Boscher, école Pontrieux