Les soins corporels, média de l`ergothérapeute pour améliorer l
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Les soins corporels, média de l`ergothérapeute pour améliorer l
IFPEK Institut de Formation en Ergothérapie de Rennes Les soins corporels, média de l’ergothérapeute pour améliorer l’image du corps en soins palliatifs UE 6.5 S6 : Evaluation de la pratique professionnelle et recherche En vue de l’obtention du Diplôme d’Etat d’ergothérapeute CHAUVIN Orane Mai 2015 Selon le code de la propriété intellectuelle, toute reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur est illégale IFPEK Institut de Formation en Ergothérapie de Rennes Les soins corporels, média de l’ergothérapeute pour améliorer l’image du corps en soins palliatifs UE 6.5 S6 : Evaluation de la pratique professionnelle et recherche En vue de l’obtention du Diplôme d’Etat d’ergothérapeute Sous la direction de Mme PELE Patricia CHAUVIN Orane Mai 2015 RESUME A cause de la progression de leur maladie, les personnes en soins palliatifs sont confrontés quotidiennement à un corps devenu objet de souffrances. Cette étude a pour objectif de comprendre en quoi la prise en compte de l’image du corps par l’ergothérapeute, par le biais des soins corporels, permet de favoriser la qualité de vie de ces personnes. Ce travail développe les concepts de soins palliatifs, d’image du corps et de soins corporels, en relation avec la pratique ergothérapique. Ces notions sont également liées à la « qualité de vie », concept subjectif et multidimensionnel primordial en soins palliatifs. Sept entretiens réalisés avec différents professionnels sont ensuite analysés, mettant en évidence les points de vue divers selon les pratiques et les structures. Les apports théoriques et l’analyse des entretiens ouvrent la réflexion sur la possibilité de l’interprofessionnalité entre ergothérapeutes et socioesthéticiennes autour des activités de soins corporels Mots clés : « soins palliatifs », « image du corps », « soins corporels », « qualité de vie », « ergothérapie Because of the progression of their illness, people receiving palliative care are facing everyday a body becoming a suffering object. The aim of this study is to understand how taking body image into consideration by the occupational therapist, using body care activities, optimizes these people’s quality of life. This work develops the concepts of palliative care, body image and body care, in relation with occupational therapy’s practice. Those elements are also linked to quality of life, a subjective and multidimensional concept, essential in palliative care. Seven interviews with different professionals are also analyzed, highlighting different points of view depending of practices and institutions. The theorics elements and interviews analysis extend the reflexion on interprofessionality between occupational therapists and socio-aesthetics around body care activities. Keywords: “palliative care”, “body image”, “body care”, “quality of life”, “occupational therapy” « Le corps, unique lieu de rêve et de raison, Asile du désir, de l'image et des sons. » Anna de Noailles, L’honneur de souffrir REMERCIEMENTS Je tiens à remercier toutes les personnes qui ont contribué à l’élaboration de ce mémoire de fin d’étude, en particulier : Mme Patricia Pelé, ma directrice de mémoire, pour son suivi ses remarques avisées, Les différents professionnels ayant montré leur intérêt pour cette recherche en acceptant de répondre à mes questions par le biais d’entretiens, L’équipe pédagogique de l’IFER pour ces trois années de formation, Mes amis de promotion qui ont su me soutenir et me conseiller dans les périodes de doutes et de questionnements, Ma famille et mes amis pour leur soutien et leurs relectures attentives SOMMAIRE INTRODUCTION ...................................................................................................................... 1 1. PROBLEMATIQUE ........................................................................................................... 2 2. PARTIE THEORIQUE ....................................................................................................... 9 3. 4. 2.1. Les Soins Palliatifs ...................................................................................................... 9 2.2. L’Image du Corps ...................................................................................................... 14 2.3. Les Soins Corporels ................................................................................................... 17 2.4. Retour sur la problématique et les hypothèses .......................................................... 24 DEMARCHE DE RECHERCHE ..................................................................................... 25 3.1. Méthodologie ............................................................................................................. 25 3.2. Analyse du recueil de données .................................................................................. 28 DISCUSSION ................................................................................................................... 39 4.1. Conclusion du recueil de données ............................................................................. 39 4.2. Vérification des hypothèses ....................................................................................... 41 4.3. Critique ...................................................................................................................... 43 4.4. Pistes d’ouverture ...................................................................................................... 44 CONCLUSION ........................................................................................................................ 46 BIBLIOGRAPHIE ................................................................................................................... 47 ANNEXES ................................................................................................................................... INTRODUCTION L’évolution de nos sociétés, avec la sur-représentation dans la publicité et les médias de corps considérés comme « idéaux », a amplifié le rapport ambivalent qu’entretiennent les Hommes avec leur corps. Aimé ou détesté, rejeté ou protégé, le corps vécu est souvent en contradiction avec son idéal souhaité. Pour autant, l’image du corps est un concept dont les composantes restent floues pour de nombreux professionnels de santé, alors même que le rapport au corps peut être douloureux pour certains patients. En soins palliatifs notamment, l’altération corporelle, due à la maladie et aux traitements, peut engendrer des difficultés pour une personne à être en accord avec cette image d’un corps ne lui correspondant plus. La présence d’ergothérapeutes en soins palliatifs tend à se développer. Spécialistes de l’autonomie et des activités de vie quotidienne, ils favorisent également la qualité de vie des personnes qu’ils accompagnent. De ce fait, ils peuvent être confrontés à des situations portant sur l’image du corps et ses retentissements dans les activités de vie quotidienne des patients. Néanmoins, ils peuvent se trouver démunis face à cette question, car leur formation aborde très peu la question de l’image du corps et la manière dont elle peut être prise en compte, alors qu’elle a un impact sur la qualité de vie des patients. Ce travail de recherche a pour objectif d’apporter des éclaircissements sur la manière de prendre en considération l’image du corps dans la pratique ergothérapique en soins palliatifs. Il fera également le lien avec la qualité de vie et les activités signifiantes de la personne. Après avoir exposé le processus qui m’a amenée à énoncer ma question de recherche et des hypothèses pouvant y répondre, le cadre conceptuel développera les notions de soins palliatifs, d’image du corps et de soins corporels. Une enquête de terrain menée auprès de professionnels sera décrite et analysée, avec dans un premier temps la méthodologie du recueil de données, puis les résultats et leur analyse. Ce travail d’initiation à la recherche se poursuivra par une discussion sur les résultats obtenus, et des pistes de réflexions futures. 1 1. PROBLEMATIQUE La relation d’un individu à son corps est un sujet qui me questionne depuis longtemps, avant même de commencer mes études d’ergothérapie. Durant celles-ci, le thème de l’image du corps a été abordé succinctement, alors que les ergothérapeutes le rencontrent fréquemment dans leur pratique, comme j’ai pu le remarquer au cours de mes stages et après discussion avec différents professionnels. Pour SCHILDER, psychiatre et psychanalyste, « l’image du corps humain, c’est l’image de notre propre corps que nous formons dans notre esprit, autrement dit, la façon dont notre corps nous apparait à nous même » (1968). Il s’agirait donc d’un abord psychologique, mettant en avant les sentiments et le sens engagés par le corps. complémentairement au schéma corporel, lié à la proprioception, qui se base plus sur les perceptions et représentations mentales du corps dans l’espace, en lien avec les sens et les mouvements (REICH, 2009). De plus, selon ANDRIEU, l’image du corps et l’image de soi sont 2 notions différentes, mais néanmoins complémentaires. Ainsi, « établir une correspondance entre soi et le corps, c’est aussi rechercher une identité personnelle » (2002). Au cours de mes différents stages, j’ai été confrontée plusieurs fois à des situations déstabilisantes où l’image du corps était questionnée. J’ai rencontré la première situation lors d’un stage en EHPAD. Mme G, une femme de 84 ans réalisait des exercices de gymnastique tous les matins. Son objectif était d’éviter d’avoir un fauteuil roulant, symbole pour elle de la fin de vie. Elle se projetait également sur des résidents du même âge, à qui elle s’identifiait et ne souhaitait pas ressembler. Pour elle, la perte de la marche symbolisait l’approche de la mort. Durant un stage dans un service de rééducation adulte, j’ai accompagné un patient qui présentait une hémiplégie gauche consécutive à un AVC. Lors de l’activité toilette, effectuée quotidiennement, il arrivait que Mr N se mette à pleurer, exprimant un rejet vis-à-vis de son corps, et de l’incapacité qu’il avait à réaliser des tâches autrefois acquises pour lui (enfiler un tee-shirt, se raser…). Il souffrait également de ne pas pouvoir porter ses petits-enfants dans ses bras, et de ne plus pouvoir s’occuper de son jardin. Enfin, lors d’un stage dans un IEM, Mlle R, une jeune fille atteinte de paralysie cérébrale a exprimé lors d’une situation de douche le mot « honte » : « J’ai honte, ne me regardez pas ! ». Questionnée quant à cette phrase, elle a déclaré ne pas savoir pourquoi elle 2 avait honte, mais que la nudité la gênait en particulier parce que nous n’étions pas « handicapés ». Ces trois situations m’ont permis de faire différentes observations. Dans un premier temps, on peut remarquer qu’un corps changeant et vieillissant, comme celui de Mme G, entraine des questionnements vis-à-vis de la mort. Les représentations associées à la mort sont différentes pour chaque personne. Pour Mme G, la perte de la marche représente une étape cruciale engageant un processus de deuil. Cette question est également à prendre en compte chez Mr N, pour qui le changement corporel a été brutal, soudain et non préparé. Ensuite, le regard des autres a une place extrêmement importante pour la construction du sujet par rapport à son corps. La société expose/impose des images de corps parfaits, inaccessibles, idéalisés (LE BRETON, 2013). Cette surexposition de corps soi-disant « sans défauts » peut entrainer une rupture narcissique chez la personne. Lors de l’adolescence, comme c’est le cas chez Mlle R, la question est encore plus douloureuse. Le regard des autres sur soi entraine également un regard de soi sur les autres. Ainsi, Mlle R nous visualisait comme des corps sans handicaps, auxquels elle n’aura pas accès. La projection rend encore plus douloureuse l’acceptation de son propre corps. Quant à Mme G, elle projette son futur sur des personnes du même âge présentant des déficits plus importants. La question d’un corps changeant entraine également une modification des rôles sociaux. Ainsi, « tout notre réseau relationnel se réorganise autour de la maladie mettant à l’épreuve la nature et l’intensité du lien avec les autres » (ANDRIEU, 2002). On peut observer que pour Mr N, la difficulté réside également dans l’impossibilité à réaliser des activités signifiantes pour lui. Il a l’impression de perdre ses rôles de mari, de père et de grand-père. Enfin, on peut remarquer que la plupart des observations faites par l’ergothérapeute ou le patient se sont déroulées lors d’une activité en lien avec les soins corporels. Ceux-ci mettent ainsi pleinement la personne face à ses difficultés et à la réalité de son corps. La question de l’image du corps est donc prégnante pour le sujet, et l’ergothérapeute y est fréquemment confronté lors de ses accompagnements, particulièrement l’activité toilette. Suite à ces observations, ma question de départ s’est définie de la sorte : Comment l’ergothérapeute peut-il intervenir autour de l’image du corps pour des patients atteints de cancer ? 3 Mes premières réflexions orientaient mon travail de recherche sur la question de l’image du corps en ergothérapie auprès de personnes atteintes de cancer. Cependant, après discussions avec différents professionnels, il m’est apparu que traiter de ce thème auprès de cette population était très vaste, et que je devais donc cibler mon sujet afin de pouvoir traiter de façon plus complète les différentes notions. Les ergothérapeutes ont un travail limité auprès de ces personnes aux phases de traitements actifs ou de réhabilitation, c’est pourquoi j’ai choisi d’axer mes recherches sur le secteur des soins palliatifs, qui est une dimension importante de la prise en charge des patients atteints de cancer. Mes réflexions se portaient donc sur le rôle de l’ergothérapeute autour de la question de l’image du corps dans le secteur des soins palliatifs La question de la fin de vie est une préoccupation majeure actuellement dans le domaine de la santé. En effet, il y a une augmentation de l’espérance de vie des patients ayant une maladie grave et chronique, du fait des progrès au niveau de la prévention, du dépistage et des traitements. Cela entraine une augmentation des personnes concernées par les soins palliatifs. Ainsi, le nombre de personnes ayant recours à ce type de soins a augmenté significativement depuis 2004 (Ministère de la Santé, 2008). Les structures de soins palliatifs sont donc plurielles, afin de répondre aux différents besoins des personnes. Il existe les Equipes Mobiles de Soins Palliatifs (EMSP), les Unités de Soins Palliatifs (USP), les réseaux de Soins Palliatifs ou encore les associations. On peut également trouver un nombre limité de Lits Identifiés Soins Palliatifs (LISP) dans les centres de Longs Séjours. Le secteur des soins palliatifs est mal connu par des professionnels de santé, et en particulier l’ergothérapeute. En effet, celui-ci ancre plus généralement sa pratique dans une optique de progression et d’avenir, en cherchant à récupérer les capacités antérieures de la personne soignée. Un secteur comme celui de la fin de vie demande donc une approche différente de celle des techniques rééducatives dites « classiques ». Les objectifs de l’ergothérapeute, comme définis par l’ANFE (Association Nationale Française des Ergothérapeutes), sont de « maintenir, de restaurer et de permettre les activités humaines de manière sécurisée, autonome et efficace ». Cependant, dans le cas du secteur des soins palliatifs, le but recherché ne peut pas être de regagner des aptitudes antérieures dans des activités de vie quotidienne, mais plutôt d’accompagner la personne dans la perte de ses capacités. La place de l’ergothérapeute pourrait donc être remise en question. 4 Pourtant, les soins palliatifs sont définis comme « des soins actifs délivrés dans une approche globale de la personne atteinte d'une maladie grave, évolutive ou terminale. L’objectif des soins palliatifs est de soulager les douleurs physiques et les autres symptômes, mais aussi de prendre en compte la souffrance psychologique, sociale et spirituelle. ». Ainsi, les soins palliatifs demandent une approche holistique de la personne soignée, en prenant en compte les différents éléments qui régissent son quotidien. Cela correspond à une vision de l’ergothérapie telle que celle décrite par Sylvie MEYER dans Le Processus de l’Ergothérapie (1990). Elle nous explique ainsi que tout soignant intervient dans une démarche globale de prise en charge de la personne soignée, en prenant en compte les différentes sphères de vie de la personne soignée, présentées dans le Modèle du fonctionnement de l’individu : A travers ce schéma, on peut observer que les différentes sphères interagissent entre elles, et influent sur la globalité de l’individu. L’ergothérapeute et les soins palliatifs se rejoignent dans l’objectif de prise en charge globale de l’individu. La deuxième partie de la définition de l’ergothérapie par l’ANFE met en avant « l’Activité ». Le groupe ENOTHE, dirigé par Sylvie MEYER, différencie l’Activité de l’Occupation. Ainsi, l’activité est une « suite structurée d’actions ou de tâches qui concourt aux occupations » (MEYER ,2005), l’occupation étant définie comme « un groupe d’activités, culturellement dénommé, qui a une valeur personnelle et socioculturelle et qui est le support de la participation à la société » (MEYER, 2005). On peut donc supposer que l’Activité 5 décrite par l’ANFE regroupe les 2 termes décrits par Sylvie MEYER. Dans tous les cas, il s’agit du cœur de métier de l’ergothérapeute. Il se distingue des autres professions paramédicales par son approche de soin sur et par l’activité. Celle-ci devient donc le moteur de la prise en charge. De ce fait, l’activité travaillée en tant que but ou moyen doit être signifiante pour la personne, afin qu’elle soit pleinement intégrée à la prise en charge, et qu’elle en perçoive le sens. La mise en action peut ainsi permettre, parmi nombreux autres apports, de redonner à la personne le plaisir dans l’activité. Cependant, la mise en activité peut s’avérer difficile dans le secteur des soins palliatifs. En effet, mettre en place une activité connue du patient le place pleinement face à ses difficultés et ses déficits, et peut s’avérer extrêmement douloureux pour lui. Les accompagnements autour des soins corporels, comme la toilette ou l’habillage, peuvent amplifier cette impression de « déchéance », le corps étant révélé dans sa réalité, souvent altéré et douloureux. Ainsi, une activité qui pouvait autrefois être source de plaisir pour la personne devient une souffrance morale et psychique. Enfin, par l’activité, l’ergothérapeute vise l’autonomie et l’efficacité, comme décrit par l’ANFE. Pourtant, dans le cas de la fin de vie, est-ce réellement le but recherché par l’activité ? N’y a-t-il pas d’autres composantes qui peuvent être traitées ? J’ai souhaité m’interroger sur l’image du corps en soins palliatifs, car le corps est ici objet de souffrance, de maladie et de mort. Les activités proposées par l’ergothérapeute y sont limitées, du fait du manque de temps et des contraintes de travail. Toutefois, il est important que le patient hospitalisé en soins palliatifs soit vu comme une « personne », avec ses envies, ses besoins et son environnement. L’objectif est de le mettre au cœur de la prise en charge. Nous avons vu précédemment que le but des soins palliatifs n’est plus la recherche d’une guérison mais un accompagnement dans le maintien ou la diminution des capacités. Il s’agit donc de s’intéresser à la qualité de vie de la personne. La qualité de vie est définie par l’Organisation Mondiale de la Santé comme « la perception qu'a un individu de sa place dans l'existence, dans le contexte de la culture et du système de valeurs dans lesquels il vit en relation avec ses objectifs, ses attentes, ses normes et ses inquiétudes. C'est un concept très large influencé de manière complexe par la santé physique du sujet, son état psychologique, son niveau d'indépendance, ses relations sociales ainsi que sa relation aux éléments essentiels de son environnement. » (BACQUE, 1996). Or, l’image du corps influe fortement sur l’état psychologique, physique et social de la personne. En effet, « L’atteinte profonde de l’image corporelle et de son intégrité face à une image dévalorisée renvoyée à soi-même et à autrui 6 contribue à renforcer l’atteinte narcissique majorée par l’appréhension de se regarder et du regard des autres. » (REICH, 2009). Ainsi, il me parait important que la question de l’image du corps fasse partie intégrante du programme de soin de la personne, afin de favoriser sa qualité de vie. Cependant, suite à un entretien exploratoire effectué avec Mme T, ergothérapeute travaillant dans un service de soin palliatif, j’ai pu faire plusieurs observations. Tout d’abord, la place de l’ergothérapeute en soins palliatifs est limitée du fait des contraintes de temps et institutionnelles. Ainsi, malgré le désir d’axer son intervention sur la qualité de vie des patients, l’ergothérapeute se retrouve parfois à n’effectuer que des positionnements. Cela est un frein à l’évolution des pratiques ergothérapiques en soin palliatif. Ensuite, je me suis posée la question de la légitimité de l’ergothérapeute pour traiter de la question de l’image du corps. Des professionnels tels que les psychomotriciens ne sont-ils pas les mieux placés pour traiter de l’image du corps ? Afin de cibler au mieux les champs de compétences de ces deux professions, j’ai interrogé plusieurs psychomotriciens et ergothérapeutes. Il apparait donc que les champs d’interventions des deux professionnels se recoupent autour de la question du corps, mais que la différence réside dans l’approche qui est utilisée pour traiter de cette question. En effet, le psychomotricien va utiliser des techniques psychomotrices telles que des ateliers corporels, gestuels ou d’expression ayant pour objectif premier la prise en compte corporelle. L’ergothérapeute va quant à lui utiliser les activités de vie quotidienne pour ses accompagnements. L’image du corps sera traitée de manière indirecte, contrairement au psychomotricien pour qui c’est le cœur de métier. Elle devient donc un outil, un levier pour les autres axes de prise en charge. Ainsi, il m’a semblé que pour traiter au mieux le rôle de l’ergothérapeute autour de l’image du corps, l’activité devait être une composante importante de mes recherches. Ma question de recherche devenait de ce fait : Comment, par le biais de l’Activité, l’ergothérapeute peut-il intervenir autour de la question de l’image du corps dans le secteur des soins palliatifs ? J’ai pu remarquer que la plupart des observations faites sur l’image du corps étaient en lien avec des activités mettant en jeu les soins corporels. Lors de l’entretien exploratoire, Mme T m’a également souligné ce fait. La prise en compte de l’activité en général lui paraissait trop vaste à traiter dans le cadre de mon mémoire, et m’a incitée à ne me porter que sur un type d’activité. De ce fait, j’ai décidé d’axer ma réflexion sur les soins corporels, qui 7 sont ceux qui permettent de toucher au plus près la question de l’image du corps à des degrés divers. Au vue de toutes ces observations, il me parait donc légitime de se poser la question suivante : « En quoi la prise en compte de l’image du corps en ergothérapie, par le biais des soins corporels, permet d’améliorer la qualité de vie des patients en soins palliatifs ? » Plusieurs hypothèses demandent à être vérifiées afin de répondre à cette question : - Les soins corporels sont le médiateur privilégié pour aborder les notions d’image du corps en ergothérapie auprès de patients en soins palliatifs - Les soins corporels sont un domaine important de prise en charge auprès des patients en soins palliatifs afin de favoriser leur satisfaction 8 2. PARTIE THEORIQUE 2.1. Les Soins Palliatifs 2.1.1. Que sont les soins palliatifs ? L’Organisation Mondiale de la Santé définit en 1990 les soins palliatifs comme « des soins actifs, complets, donnés aux malades dont l’affection ne répond pas au traitement curatif. La lutte contre la douleur et d’autres symptômes, et la prise en considération de problèmes psychologiques, sociaux et spirituels sont primordiales.» (OMS, cité par GUEGUEN, 2001) En 2002, l’OMS complète cette définition en nous disant que « les soins palliatifs cherchent à améliorer la qualité de vie des patients et de leur famille, face aux conséquences d’une maladie potentiellement mortelle, par la prévention et le soulagement de la souffrance, identifiée précocement et évaluée avec précision, par le traitement de la douleur et des autres problèmes physiques, psychologiques et spirituels qui lui sont liés. » (FWSP, 2008). Ainsi, les soins palliatifs ne sont pas uniquement des soins donnés en phase terminale, mais des soins apportés dès que la prise en charge s’oriente non plus vers la guérison, mais vers le soin. Ainsi, J WATSON a en 1979 établi la « théorie du caring », en opposition au « cure ». Elle définit « le care » comme « un ensemble de facteurs qui fondent une démarche soignante favorisant soit le développement ou le maintien de la santé, soit une mort paisible » (WATSON, 1998), et le « cure » comme la démarche de traitement d’une pathologie. Dans le cadre des soins palliatifs, il parait important de favoriser l’approche du « care », car les personnes qui bénéficient de ces soins ne répondent plus à l’approche curative. Cette théorie étant originellement basée sur le modèle des soins infirmiers, on peut néanmoins préférer le terme de «prendre soin », définit par Walter HESBEEN comme « porter une attention particulière à une personne qui vit une situation qui lui est particulière et ce, dans la perspective de lui venir en aide, de contribuer à son bien-être, à sa santé » (1999), parce qu’il est par nature pluridisciplinaire. L’approche du soin telle qu’elle est perçue en soins palliatifs nécessite de prendre en compte le patient de manière globale, avec toutes ses spécificités, que ce soit d’un point de vue physique, psychique, psychologique, social et spirituel. Elle s’inspire de la démarche holistique qui vise une prise en charge globale, replaçant de ce fait le patient au cœur du processus de soins. Il s’agit d’humaniser la prise en charge, de voir la personne en tant 9 qu’entité et non plus uniquement vecteur d’une pathologie, la plaçant ainsi comme sujet et non plus objet des soins (MARZANO, 2010). 2.1.2. La fin de vie Les soins palliatifs sont, de part leur définition, mis en place lorsque la fin de vie proche n’apparait plus comme une simple éventualité, mais comme un futur à envisager. Ainsi, même si l’unicité de chaque personne est prise en compte et reconnue, certains éléments de similitudes apparaissent chez les patients en fin de vie, comme nous l’expose C E KEMP dans Le malade en fin de vie. En effet, lorsque le patient arrive en soins palliatifs, il a souvent connu une longue période de traitements plus ou moins fructueux, « une alternance d’espoir et de désespoir » (KEMP, 2002). Il s’agira donc de prendre en compte le patient dans sa globalité, son vécu de la maladie. La fin de vie apporte ainsi de nombreux questionnements pour le patient et entraine de nombreuses pertes, parmi lesquelles : - La santé physique : l’atteinte de la maladie qui se répercute sur le corps - La famille : les relations intrafamiliales sont impactées - Les rôles, l’identité : diminution du rôle social, familial ; la personne devient « le malade », qui le définit au détriment des autres composantes de son identité. - Le fait d’être productif, de se sentir compétent : la perte de l’emploi et des rôles au sein de la société - Une indépendance : la personne est tributaire des personnels de santé et de ses proches pour de nombreux actes et soins. Ces situations de pertes qui peuvent être rencontrées sont gérées par le processus de deuil. 2.1.3. Le processus de deuil Le deuil est « un processus dynamique, envahissant, hautement individuel, avec une forte composante normative » (COWLES & RODGERS, 1991). Il survient en réaction à une perte. CE KEMP le décrit comme : - « Changeant et non linéaire (dynamique) - Composé de phases nécessitant un travail pour les traverser - Vécu de manière individuelle par chacun 10 - Une manifestation physique, psychologique, sociale et spirituelle envahissante - Composé d’étapes relativement prévisibles, pendant une période également prévisible, même s’il y a des variations individuelles » (2002) Selon E KUBLER ROSS, le deuil dit « normal » est constitué de plusieurs étapes impactant l’état d’esprit des personnes. Dans un premier temps, la personne apprend l’imminence d’une mort ou d’un deuil à effectuer : c’est la phase de sidération, de déni. Cette phase est ensuite suivie par de la révolte face à cette situation choquante pour la personne. Vient ensuite la phase de marchandage, où la personne a accepté sa situation, mais essaye de gagner du temps. Ces phases sont suivies généralement d’une période dite « de dépression », qui peut se manifester par 3 catégories de signes : somatiques, intellectuels et affectifs. En effet, l’aspect somatique peut se traduire par une apathie ou encore un désinvestissement des activités menées précédemment, l’aspect intellectuel par un « affaiblissement des performances cognitives », et l’aspect affectif par une hypersensibilité. Enfin, la personne finit par s’adapter à la situation lors de la phase d’acceptation (KEMP, 2002). Ce deuil peut être vécu par les proches d’une personne en fin de vie, mais également par celui-ci. En effet, il devra faire le deuil de sa vie antérieure, de ses capacités physiques ou encore de ses rôles sociaux. Néanmoins, il arrive que le deuil ne se déroule pas de manière classique : il devient « pathologique » (KEMP, 2002). Il en existe plusieurs : - « L’absence de deuil : […] absence d’expression de deuil - Le deuil déformé, caractérisé par la déformation […] d’une ou plusieurs composantes du deuil, essentiellement la colère et la culpabilité - Le deuil converti, similaire à une névrose de conversion […] - Le deuil chronique, chagrin sans fin qui peut même s’intensifier avec le temps. » (KEMP, 2002) Dans les cas d’un deuil normal ou d’un deuil pathologique, il est important d’être à l’écoute et disponible afin d’accompagner ce processus de la manière la plus juste possible. 2.1.4. L’ergothérapeute en soins palliatifs De part leurs pathologies et traitements, les personnes recevant des soins palliatifs peuvent avoir des difficultés dans la participation à leurs activités de vie quotidienne, à cause de troubles au niveau moteur, sensitif ou encore cognitif. En prenant en compte les facteurs 11 personnels et environnementaux de la personne, l’ergothérapeute cherche à favoriser l’implication des patients dans des activités qui lui sont signifiantes, afin d’améliorer sa qualité de vie. Du fait de la notion de fin de vie, la prise en charge ne sera pas rééducative mais plutôt réhabilitatrice. On cherchera ainsi à compenser et adapter afin de préserver et favoriser l’implication de la personne (BURKHARDT et al, 2011). Afin de permettre cette participation, l’ergothérapeute va utiliser une approche holistique, de prise en compte globale de la personne. Ainsi, l’ergothérapeute prendra en compte les aspects physiques, cognitifs, psychologiques, sociaux et environnementaux ((BURKHARDT et al, 2011). La présence d’ergothérapeutes dans des services prenant en charge des patients en soins palliatifs est encore limitée. 2.1.5. La qualité de vie Le rôle de l’ergothérapeute en soins palliatifs correspond donc à favoriser la qualité de vie des personnes à l’approche de leur fin de vie. La qualité de vie est un concept clé dans les soins palliatifs. En effet, il est la raison même de leur existence, ceux-ci ne visant ainsi plus la guérison, mais le bien être de la personne. Ainsi, selon l’OMS, « le but des soins palliatifs est d’obtenir la meilleure qualité de vie possible pour les malades et leur famille » (GUEGUEN, 2001) L’OMS définit la qualité de vie comme « la perception qu’à un individu de sa place dans l’existence, dans le contexte de la culture et du système de valeurs dans lequel il vit, en relation avec ses objectifs, ses attentes, ses normes et ses inquiétudes » (LEPLEGE, 1999). Selon D CELLA, la qualité de vie est constituée de 2 dimensions fondamentales : la subjectivité et la multidimentionnalité (2007). 2.1.5.1. La subjectivité Ce concept est évalué de façon subjective par le patient, comme peut l’être la douleur par exemple, par le biais de l’Evaluation Visuelle Analogique (EVA). Ainsi, la qualité de vie est influencée par des facteurs sous-jacents, tels que la perception de la maladie et des traitements, ou encore les attentes et objectifs personnels. De ce fait, la qualité de vie est un concept mouvant, en constante évolution. Néanmoins, il est important de considérer la qualité de vie comme « l’évaluation par les patients de leur niveau de fonctionnement actuel et leur satisfaction quant à ce dernier, par rapport à ce qu’ils perçoivent comme étant possible ou 12 idéal » (CELLA, 2007). Ainsi, il s’agit de rendre compte des capacités du patient, mais également du retentissement dans le « système de valeurs des patients » (CELLA, 2007) Cela peut expliquer la difficulté à mettre en place un outil de mesure fiable de la qualité de vie. 2.1.5.2. La muldimensionnalité La qualité de vie présente également un caractère multidimensionnel. En effet, elle prend en compte un large panel de domaines, variables selon les auteurs et les situations. Nous retiendrons ici les six dimensions de la qualité de vie déterminées par AARONSON, cité par D CELLA: - « Les symptômes pathologiques et effets secondaires des traitements - L’état fonctionnel - La détresse psychologique - Les interactions sociales - La sexualité et l’image corporelle - La satisfaction par rapport au traitement » (2007) Cette classification permet de mettre en avant la présence de la notion d’image corporelle dans le concept de qualité de vie. Ainsi, il semble que la prise en compte de l’image corporelle du patient en soin palliatif aurait un lien causal dans le ressenti de sa qualité de vie. 13 2.2. L’Image du Corps 2.2.1. Qu’est-ce qu’un corps ? Tenter de définir le corps de façon exhaustive semble impossible tant sa vision diffère selon les auteurs, les époques et les croyances. Les différents écrits qui se risquent à apporter une représentation claire ne sont finalement que contradictions et correspondances. Néanmoins, afin de clarifier ce terme, nous nous baserons ici sur la vision de LE BRETON dans Anthropologie du corps et modernité, qui nous dit que « le corps est la souche identitaire de l’homme, le lieu et le temps où le monde prend chair à travers un visage singulier » (2013). Il place donc le corps comme le média qui permet à l’homme d’entrer en relation avec le monde, tout en exprimant son unicité d’être. Toutefois, certaines époques ont posé la théorie d’une dualité entre l’esprit et le corps, ce dernier n’étant plus qu’un « reste, ce qui demeure après le retrait en l’homme du cosmos, des autres et de la division qui fait de l’homme l’autre de son corps » (LE BRETON, 2013). 2.2.2. L’image du corps et le schéma corporel : quelles différences ? L’image du corps est définie pour la première fois en 1968 par SCHILDER comme « le schéma corporel est l’image tridimensionnelle que chacun a de soi même ; nous pouvons aussi l’appeler image du corps » (SCHILDER , 1968). Il pose ainsi le postulat d’un modèle du corps construit par le sujet à sa naissance, se basant sur les perceptions ressenties, et sur l’interprétation que le sujet en fait. Cette définition pose les bases d’un lien entre le corps et l’esprit, contrairement aux postulats existants sur la dualité corps-esprit (LE BRETON, 2013). Cependant, les termes « schéma corporel » et « image du corps » correspondent ici à une même entité. Cette notion de lien entre corps et esprit a été appuyée par les écrits de MERLEAUPONTY, qui expose « le corps est le principe biologique de ma présence au monde. Il convient donc de dire je suis un corps et non j’ai un corps » (1945). C’est avec DOLTO que l’on distingue dans L’image inconsciente du corps le schéma corporel, qui correspond aux perceptions physiques, et l’image du corps, qui est inconsciente et qui évolue en fonction de l’expérience. Ainsi, « le schéma corporel est en principe le même pour tous les individus de l’espèce humaine, l’image du corps, par contre, est propre à chacun : elle est liée au sujet et à son histoire » (DOLTO, citée par MARZANO, 2010). De plus, autant le schéma corporel peut être conscient ou inconscient, elle nous décrit l’image du corps comme pleinement inconsciente. Le schéma corporel serait ainsi le lieu des pulsions, et 14 l’image du corps celui de leurs représentations. Cette dualité peut selon elle entrainer des perturbations sur les liens entre ces deux notions. PAILLARD a quant à lui décrit un « corps identifié », correspondant à l’image du corps et lié au traitement des informations sensorielles fournies par le « corps situé » qui correspond au schéma corporel, le corps étant situé par rapport aux objets qui nous entourent (PAILLARD, 1980). 2.2.3. L’image du corps, facteur primordial de l’image de soi Les notions d’image du corps et d’image de soi semblent encore nébuleuses et entremêlées. Néanmoins, il existe des différences notables entre ces deux éléments. Selon Florence ROCHON, infirmière spécialiste clinique en oncologie, le concept de soi « reflète les sentiments de la personne pour elle même, s’exprime par le comportement, paroles, pensées, objectifs, attitudes et valeurs » (ROCHON, LEI, 2014). Ce concept est constitué de trois domaines : - L’estime de soi, qui est l’appréciation qu’à une personne de sa valeur - L’identité personnelle qui est la conscience de son individualité vis-à-vis des autres, tout en « participant aux idéaux de notre groupe social » (ROCHON, LEI, 2014) - L’image corporelle, qui serait « la somme des jugements conscients et inconscients que l’on porte à l’égard de son corps » (ROCHON, LEI, 2014) Elle pose ainsi l’image du corps comme une composante de l’image de soi qui, en interagissant avec les deux autres constituantes, influe considérablement sur elle. 2.2.4. Les différentes dimensions de l’image du corps selon PRICE Après avoir différencié l’image du corps des autres concepts, il s’agit désormais de détailler cette notion. Selon PRICE, on peut distinguer 3 dimensions à l’image corporelle: - Le corps réel, qui est le corps tel qu’il est véritablement, transformé par le temps et la maladie - Le corps idéal, qui est l’image d’un corps rêvé, influencé par les normes sociétales - L’apparence, qui est la façon dont on se présente aux yeux des autres. Elle est modifiable par une action de la personne (1998) 15 2.2.5. L’altération du corps en soins palliatifs Une prise en charge palliative est mise en place lorsque tous les traitements curatifs ont échoués. Cela veut donc dire que le patient arrive dans ces soins en ayant précédemment subis de multiples traitements plus ou moins invasifs. Cette association entre maladie et traitements a pu entrainer différentes altérations, telles qu’une cachexie, une incontinence ou encore une alopécie (KEMP, 2002). Ces répercussions ont pu de ce fait impacter l’image du corps de la personne. Il est également nécessaire de remarquer que ces altérations, en plus du retentissement évident pour la personne en soins palliatifs, ont des conséquences sur le vécu de la situation par la famille et les proches. En effet, la personne qu’ils accompagnent n’est plus telle qu’ils l’ont connue, et cette fracture entre ces deux corps différents peut entrainer des souffrances psychologiques majeures. Il est de ce fait primordial d’accompagner la famille afin qu’elle puisse continuer à être un pilier pour la personne dans sa fin de vie. 16 2.3. Les Soins Corporels 2.3.1. Histoire Les soins corporels et la toilette sont présents dans la vie quotidienne des Hommes depuis plusieurs millénaires. Cependant, ils se sont transformés au fil des siècles, en suivant l’évolution de la société et des mœurs. 2.3.1.1. A l’antiquité Durant l’Antiquité, les soins corporels sont présents sous plusieurs formes. Les bains, privés et publics, sont d’abord conçus en lien avec l’exercice physique. De ce fait, les thermes, qui apparaissent vers le VIème siècle, sont « une dépendance des gymnases » (RIVAL, 1986). Ces bains répondent également à une procédure importante (passage dans différents bassins de tailles et températures différentes). Cette époque est aussi celle de l’apparition des savons pour leurs vertus nettoyantes. Les bains sont ainsi utilisés pour se laver, mais également pour se délasser. Ils sont également intégrés dans la vie communautaire. De plus, l’eau n’est pas considérée comme favorisant uniquement le lavage du corps. Ainsi, « très tôt s’y mêle l’idée que cette immersion dans l’eau a aussi la vertu de purifier l’âme et de la régénérer » (RIVAL, 1986). Les soins corporels ont donc ici un rôle d’hygiène, mais également une signification rituelle et religieuse. 2.3.1.2. Au Moyen-Âge La place occupée par la religion durant cette période impacte fortement sur les habitudes de soins des habitants. En effet, la notion de double représentation de l’eau est conservée, « la netteté du corps est le reflet de la pureté de l’âme » (RIVAL, 1986). Cependant, ces actes de toilettes doivent respecter la pudeur liturgique et rester cachés. Seuls les actes d’hygiène sont acceptés ; les bains de détente ou de volupté sont prohibés. Pour autant, ce souci de l’hygiène est réservé aux classes aisées, les produits et ustensiles nécessaires étant trop coûteux pour une grande partie de la population. 2.3.1.3. La Renaissance Durant la Renaissance, un changement majeur est apporté aux habitudes d’hygiène. Ainsi, « l’usage du linge de corps étant devenu plus courant […], la nécessité des bains se serait fait moins sentir » (RIVAL, 1986). C’est donc par la propreté du vêtement qu’ils 17 contrôlaient leur hygiène. De ce fait, c’est à cette époque que s’est développée l’industrie du linge, notamment par des importations de tissus. L’hygiène corporelle, qui était auparavant profondément ancrée dans la religion, s’émancipe et devient un moyen d’affirmer sa place dans la société. Cela se réalise grâce aux vêtements, et à l’arrivée du parfum des produits dits « de beauté », tels que les fards qui blanchissent la peau, ou les pastilles purifiant l’haleine. Le vêtement et le maquillage sont autant d’éléments de représentations sociales. 2.3.1.4. XIXème siècle La période postrévolutionnaire a vu l’apparition des premières salles d’eau privées au sein des maisons. Cependant, les bains restaient des affaires collectives, l’objectif étant de ne pas gaspiller l’eau. Néanmoins, ces bains étaient toujours controversés ; il ne fallait pas qu’ils deviennent de simples objets de plaisir, mais qu’ils soient réservés à l’hygiène. Cette époque a également vu l’apparition de l’eau courante et du chauffe-eau, ce qui a favorisé le courant hygiéniste, qui prônait le bain comme une nécessité afin d’éviter la propagation des maladies L’industrie du textile s’est également développée grâce à l’apparition des grands magasins. (RIVAL, 1986) 2.3.1.5. Depuis le XXème siècle Le XXème et le XXIème siècle ont vu l’explosion de l’industrie de la beauté de l’hygiène, par l’apparition de produits et maquillages nombreux. Favorisée par la publicité et le développement de la communication, elle touche aujourd’hui une majeure partie de la population. 2.3.2. La prise en compte des caractéristiques personnelles Les soins corporels sont ainsi présents dans la vie quotidienne depuis de nombreuses années. Malgré leurs évolutions au fil des siècles et leur libéralisation, certaines caractéristiques restent prédominantes et impactent sur la relation des personnes vis-à-vis des soins corporels. 2.3.2.1. Le sexe Il apparaît que la vision des soins corporels est différente selon le sexe. En effet, la pression réalisée par les sociétés contemporaines sur les corps impactent plus les femmes. Ainsi, « les femmes restent de manière privilégiée une cible de la cosmétique ou de ces 18 ateliers de métamorphose du corps » (LE BRETON, 2013). Néanmoins, les hommes sont de plus en plus visés par l’industrie cosmétique (LE BRETON, 2013). 2.3.2.2. La religion Le poids de la religion a été au fil des ans un vecteur influençant la relation des croyants à leur corps. En effet, « un aspect important de tous les rituels religieux est lié à l’entretien du corps », afin d’être en accord avec les pratiques liturgiques visant à « guérir », assurer « la santé du corps » (MARZANO, 2010). De plus, « la fonction de la religion est de contrôler ou de régler le corps à des fins religieuses » (MARZANO, 2010), par le biais par exemple du jeûne ou de contrôle du corps. Ces deux dimensions peuvent impacter significativement le rapport au corps et la réalisation des soins corporels. 2.3.3. Les soins corporels comme activité signifiante Il apparait que les soins corporels font partie intégrante de la vie quotidienne des individus depuis plusieurs siècles. Ainsi, comme exposé précédemment, les soins corporels font partie de l’ « occupation » car ils ont une valeur « personnelle et socioculturelle » et sont « support de la participation à la société ». De ce fait, ils peuvent avoir pour chaque personne un sens particulier engageant une implication différente. Cette activité peut être considérée comme signifiante pour certaines personnes. Une activité est signifiante lorsqu’elle « revêt un sens particulier pour la personne lié à son histoire et à son projet personnel » (MOREL-BRACQ, 2006), alors qu’une activité significative a un sens pour un groupe social ou culturel particulier. Ils sont de plus une composante des soins personnels, et donc pleinement acteurs de l’occupation de la personne. 2.3.4. Les soins corporels en ergothérapie L’ergothérapeute peut prendre en compte les soins corporels dans la prise en charge de la personne. En effet, comme exposé précédemment, les soins corporels font partie intégrante des actes quotidiens réalisés par une personne. Ils s’inscrivent dans ses habitudes de vie et peuvent être signifiants dans une majorité des cas. HENDERSON (DELCHAMBRE et al, 2005) a d’ailleurs défini quatorze besoins fondamentaux. Ceux-ci comprennent notamment le besoin de se vêtir et se dévêtir et le besoin d’être propre. Il apparait que ces besoins sont nécessaires à l’épanouissement et au bien-être de la personne. De ce fait, la prise en compte des soins corporels par l’ergothérapeute semble primordiale pour favoriser le bien-être de la personne. 19 Cependant, S BILLAUD et C BOILLAT posent une question pertinente dans leur analyse de l’activité toilette/habillage : « pourquoi la rééducation de la toilette et de l’habillage est-elle une prise en charge relevant aussi de l’ergothérapie ? » (2006). En effet, la prise en compte des activités quotidiennes n’est pas réservée à l’ergothérapeute, tous les professionnels peuvent être inclus dans ce processus. Pour autant, chaque corps de métier va apporter, grâce à sa pratique professionnelle, une approche différente des soins corporels. Ainsi, l’infirmière ou l’aide soignante vont « suppléer le patient » (BILLAUD, BOILLAT, 2006) pour ces activités qu’il n’est plus en mesure de réaliser, alors que l’ergothérapeute va tenter de favoriser les capacités du patient afin d’optimiser sa participation dans ces soins. Néanmoins, le travail en pluridisciplinarité est une composante essentielle à la prise en charge des activités de soins corporels du patient, afin d’être au plus proche de ses besoins et de ses attentes. La mise en place d’une prise en charge axée sur les soins corporels peut comprendre plusieurs étapes : - La toilette : o Le déplacement jusqu’à la salle de bain ou la mise en place du lit en position fonctionnelle o Le déshabillage o Se laver le visage, les cheveux, le haut du corps, le bas du corps… o se sécher - l’habillage : o le choix des vêtements o la mise en place des vêtements - les soins de présentations : o se coiffer / se peigner o se raser o se maquiller o se parfumer… 20 Ces différentes étapes sont sujettes aux changements par rapport aux habitudes de vie antérieures de la personne 2.3.5. La place des soins corporels en soins palliatifs Les soins corporels sont une dimension importante de la prise en charge en soins palliatifs. Cependant, ils ne se centrent pas ici sur une rééducation aux gestes de la vie quotidienne, mais peuvent être utilisés comme vecteurs favorisant la qualité de vie et le bien être de ces personnes. Il est de plus nécessaire que l’accompagnement autour des soins corporels soit consécutif à une demande du patient afin d’être au plus près de ses besoins réels. Afin d’évaluer les besoins de la personne concernant les soins corporels, il paraît intéressant de se baser sur le Modèle Canadien du Rendement Occupationnel et de Participation (MCRO-P). Cette version sera celle détaillée ci-après ; en effet, une nouvelle version intitulée MCREO (Modèle Canadien du Rendement et de l’Engagement Occupationnel) a été réalisée, mais elle n’est effectuée pour le moment qu’au Canada. Celui-ci se base sur plusieurs hypothèses, notamment que « la vie de toute personne est fondée sur l’occupation […], le rendement occupationnel et la participation », « la promotion de l’activité permet le maintien de la santé et contribue à redonner un sentiment de contrôle sur sa vie » (MOREL BRACQ, 2009). Cette deuxième affirmation prend tout son sens dans le domaine des soins palliatifs. Ainsi, « L’activité est considérée comme un besoin fondamental de la personne qui permet de donner un sens à la vie, d’accéder à un équilibre et d’éprouver de la satisfaction » (GUEGUEN, 2001). Ce modèle met également en avant les liens entre « la personne, son environnement, ses activités, sa santé et son bien-être » (MOREL BRACQ, 2009). Différentes dimensions ressortent de ce modèle. Au niveau de la personne, quatre dimensions sont identifiées et agissent entre elles : les dimensions physique, cognitive, affective et spirituelle. Ces dimensions sont mises en jeu dans les activités (ou ici « occupations ») de la personne, qui sont divisées en 3 catégories : les soins personnels, la productivité et les loisirs. De plus, la personne interagit avec son environnement, qu’il soit physique, institutionnel, culturel et/ou social. Ce modèle comprend différentes étapes, dont une évaluation appelée Mesure Canadienne du Rendement Occupationnel. Elle se déroule en 4 parties. Dans le premier temps, le patient doit citer les activités qu’il réalisait, réalise ou souhaiterait réaliser, en fonction des 3 21 catégories d’activités définies par le modèle (Soins personnels, productivité et loisirs). La personne devra ensuite les classer par niveau d’importance, afin de pouvoir sélectionner les 5 activités les plus importantes pour elle. A partir du choix réalisé, il lui sera demandé de coter ses capacités dans la réalisation de l’activité. Pour finir, il notera sa satisfaction concernant la réalisation des ces activités dans sa situation actuelle. Ce modèle semble être pertinent pour l’ergothérapeute afin de traiter de la question des soins corporels. En effet, ceux-ci peuvent être inclus dans les soins personnels, qui sont une composante de la MCRO-P. Ainsi, la passation de ce modèle permettra de mettre en avant les besoins de la personne dans ce domaine, et de le coter objectivement. La MCRO est également un des modèles privilégiés en soins palliatifs. En effet, elle permet de respecter l’autodétermination de la personne, car celle-ci est amenée à désigner « les activités qui lui sont significatives et sur lesquelles nous allons orienter le projet de soin » (GUEGUEN, 2001). Elle permet également de tenir compte du temps qui reste à la personne. Enfin, elle favorise la prise en compte de la qualité de vie, qui peut être définie en fonction des « besoins perçus par les patients » (LEPLEGE, 1999). Selon A-F GUEGUEN, « si nous considérons la satisfaction comme critère d’évaluation de la qualité de vie, la MCRO nous renseigne sur la perception du patient de la qualité de ses derniers moments de vie » (2001) Ainsi, l’utilisation de la MCRO dans le cadre proposé ici paraît pertinente, car elle permet de proposer un modèle validé, basé sur les activités de vie quotidienne de la personne, ce qui est le propre de l’ergothérapie, tout en respectant ses choix et son autodétermination. Cela nous permettra de ce fait de connaître les besoins de la personne dans le domaine des soins corporels. 2.3.6. L’impact des soins corporels sur l’image du corps Les soins corporels apparaissent donc comme une composante influençant la qualité de vie de la personne. Ils sont également le lieu privilégié pour évoquer les questions d’image du corps. Une étude parue en 2014 a prouvé que la réalisation d’une routine de soin de beauté, sans fonction réelle d’hygiène, impactait sur l’image corporelle, indépendamment du sexe. (PAASSCHEN et al, 2014). En effet, les activités de soins corporels mettent en avant différentes constituantes qui peuvent impacter sur l’image du corps de la personne, car celleci « n’est pas une donnée objective, c’est une valeur qui résulte essentiellement de l’influence de l’environnement et de l’histoire personnelle du sujet » (LE BRETON, 2013). 22 2.3.6.1. La confrontation au corps Les activités de soins corporels sont les seules à mettre instantanément la personne face à son corps et à la dégradation de celui-ci. C’est par ce biais qu’elle va être confrontée à son corps réel, différent de celui d’avant la maladie et des représentations sociales. En effet, le corps tel qu’il est exposé doit « être lisse et beau, jeune, conforme au modèle implicite de n’attirer l’attention sur lui que par sa séduction » (LE BRETON, 2013). Ainsi, il faudra être vigilant quant à cette vision d’un corps en désaccord avec les normes sociales. De plus, « Respecter la nudité et l’habillement, même de la personne âgée et du malade, favorisera une réélaboration imaginaire et symbolique du soi corporel. » (ANDRIEU, 2007). De ce fait, il sera important de respecter les limites émises par le patient et d’être à l’écoute de ses remarques, afin de lui laisser l’espace nécessaire pour se réapproprier son corps, d’être en accord avec lui et d’accepter le reflet du miroir . 2.3.6.2. La relation de soin La vision de la personne sur son corps est prégnante durant cette mise en situation. Cependant, celle-ci peut être influencée par l’attitude du soignant et le regard qu’il porte sur la personne et sur son corps, ainsi que le rapport qui existe entre les deux individus. Ainsi, une mise en situation autour des soins corporels ne peut être réalisée qu’après la mise en place d’une relation de confiance. Le regard que le professionnel porte sur la personne devrait être bienveillant, ou du moins sans a priori, afin de permettre au malade de réinstaurer un rapport paisible avec son corps. Enfin, il est important de remarquer que le patient va être confronté à son corps par le biais de la vue, en le regardant directement ou à travers un miroir, mais également par élément de comparaison avec le soignant, qui présente un corps idéalisé ou du moins exempt d’altérations dues à la maladie. 2.3.6.3. Le toucher Le toucher est, associé à la vue, l’autre sens prépondérant pour la question de l’image du corps dans les soins corporels. En effet, ce sens est particulièrement sollicité dans les mises en situations de toilette, ou de soins d’apparence. Il apparait également que « le soin corporel est […] le moyen privilégié par le sujet contemporain de s’incarner en ressentant sa peau, son énergie, ses formes et sa matière. » (ANDRIEU, 2007). Le toucher est donc un média nécessaire au bon déroulement de l’activité. « Stratégie relationnelle servant de mode de 23 contact avec le monde et avec les autres » (ANDRIEU, 2008), le toucher apparait comme une alternative à la parole pour la mise en relation. C’est pourquoi « Derrière la blouse ou l’uniforme, la sensibilité tactile doit traverser le vêtement, ne pas codifier un contact trop rigide ni justifier un isolement professionnel toujours déshumanisant » (ANDRIEU, 2007). Prendre le temps d’établir un toucher-douceur est primordial afin de favoriser la revalorisation du corps. Enfin, il parait important d’observer que « souffrant de l’absence de contact […], le besoin de toucher devient un désir de toucher et d’être touché. Insatisfait, il produit des pathologies relationnelles comme l’isolement, la solitude et la difficulté d’entrer en relation » (ANDRIEU, 2008) Ainsi considérer le toucher comme un soin à part entière permet de prendre en compte l’aspect social et relationnel ainsi que l’image du corps, qui sont des facteurs influençant la qualité de vie. 2.4. Retour sur la problématique et les hypothèses La mise en parallèle des différentes notions nécessaires à la compréhension du sujet a permis de faire ressortir plusieurs dimensions. Tout d’abord, le concept d’image du corps, qui a été défini et détaillé, a pu être recensé comme étant une composante influençant la qualité de vie. Ensuite, nous avons présenté la MCRO-P, utilisée par les ergothérapeutes en soins palliatifs. En posant le postulat que l’évaluation de la satisfaction permet de déterminer la qualité de vie, nous avons mis en exergue la présence des soins corporels comme déterminant de la satisfaction. Ainsi, les soins corporels influent également sur la qualité de vie. Enfin, la description des soins corporels et l’analyse d’activité qui a pu être réalisée a fait ressortir la légitimité de cette mise en situation pour prendre en compte l’image du corps. Tout en prenant en compte les différents éléments recueillis au cours des lectures, nous allons à présent réaliser une enquête de terrain afin de répondre à notre problématique intitulée « En quoi la prise en compte de l’image du corps en ergothérapie, par le biais des soins corporels, permet d’améliorer la qualité de vie des patients en soins palliatifs ? Cette problématique est appuyée par deux hypothèses qui étaient : Les soins corporels sont le médiateur privilégié pour aborder les notions d’image du corps en ergothérapie auprès de patients en soins palliatifs et Les soins corporels sont un domaine important de prise en charge auprès des patients en soins palliatifs afin de favoriser leur satisfaction. Afin de rendre compte de la validité de ces hypothèses, un recueil de données à été réalisé. 24 3. DEMARCHE DE RECHERCHE 3.1. Méthodologie 3.1.1. Outils du recueil de données Afin de répondre à ma question de recherche, j’ai choisi de réaliser des entretiens semi directifs de différents professionnels. L’entretien me paraissait être la méthode de recueil de données la plus pertinente pour mon sujet. En effet, il permet ainsi aux personnes de s’exprimer librement sur un sujet, tout en suivant une trame de questions définies en amont. Un questionnaire aurait été trop restrictif au niveau des réponses pour des questions qui demandent de développer un raisonnement et un schéma de pensée. Un groupe focus aurait pu être proposé, mais très difficile à organiser du fait du peu d’ergothérapeutes travaillant en soins palliatifs et des contraintes institutionnelles. De plus, il me semblait pertinent de réaliser des observations de patients en activité de soins corporels grâce à une grille d’observation, tout en observant l’évolution grâce à la passation de la MCRO-P en début et fin de prise en charge. Cependant, il m’a été impossible de le réaliser du fait du secret médical et des contraintes de temps. 3.1.2. Les professionnels interrogés Plusieurs critères ont été exposés afin de choisir les professionnels à interroger. Ces critères ont néanmoins évolué au fil des recherches. Effectuant un stage dans la région MidiPyrénées, pour des raisons pratiques, mes premiers critères étaient : - 4 catégories de professionnels différents, dont des ergothérapeutes - Travaillant auprès de personnes en soins palliatifs : o En service spécialisé o En hôpital ou Soins de Suite et de Réadaptation (SSR) o En hôpital ou SSR avec des Lits Identifiés de Soins Palliatifs (LISP) o A domicile (libéral ou réseau de soin) - Dans la région Midi Pyrénées Ces critères m’ont permis de trouver six de mes contacts. Cependant, après étude de mes entretiens, il m’est apparu que l’avis d’un troisième ergothérapeute était nécessaire afin de compléter certaines réponses. J’ai donc revu mes critères pour trouver un professionnel correspondant à mes attentes : 25 - Un ergothérapeute - Travaillant auprès de personnes en soins palliatifs : o En service spécialisé o En hôpital ou SSR avec des Lits Identifiés de Soins Palliatifs (LISP) o A domicile - Dans toute la France Cette nouvelle recherche m’a permis de trouver un troisième ergothérapeute, travaillant plus spécifiquement auprès de la catégorie de personnes concernée par cette étude. J’ai donc réalisé sept entretiens avec des professionnels variés. Le recueil de données comprend les points de vue de trois ergothérapeutes, deux socio esthéticiennes, une psychologue et une masso-kinésithérapeute. Ces professionnels ont tous travaillé auprès de personnes en soins palliatifs, mais dans des contextes et situations différentes. Ainsi, certains travaillent en Unité de Soins Palliatifs (une socio esthéticienne et la masso-kinésithérapeute), dans un réseau de soins palliatifs à domicile (une socio esthéticienne et la psychologue), ou encore en SSR ou centre hospitalier (deux ergothérapeutes), comprenant des Lits Identifiés Soins Palliatifs (un ergothérapeute). J’ai souhaité varier les secteurs d’exercices afin de mettre en avant les différences de prises en compte de l’image du corps par les professionnels selon les contraintes institutionnelles, de temps et de matériel. Interroger différents professionnels m’a paru pertinent d’observer les points de vue des différentes personnes interrogées sur le rôle de l’ergothérapeute, et en particulier en soins palliatifs. Cela me permet également de placer ce travail de recherche dans un contexte pluridisciplinaire. Afin de préserver l’anonymat des professionnels interrogés, ils seront nommés de la sorte : - ERGO 1 : travaille en centre hospitalier, en rééducation et USLD. Prend en charge de temps en temps des personnes en soins palliatifs. - ERGO 2 : travaille en SSR gériatrique. Prend en charge de temps en temps des personnes en soins palliatifs. - ERGO 3 : travaille en SSR polyvalent avec LISP. Il a fait un DU Soins Palliatifs. - SOCIO-E 1 : travaille en équipe mobile de soins palliatifs, unité de soins palliatifs et oncologie. - SOCIO-E 2 : travaille dans un réseau de soins palliatifs auprès de patients à domicile. 26 - PSYCHO : travaille dans un réseau de soins palliatifs auprès de patients à domicile et en EHPAD. - KINE : travaille en unité de soins palliatifs et hôpital de jour gériatrie. 3.1.3. La grille d’entretien La grille d’entretien pour les professionnels est composée de trois parties : « les soins palliatifs », « l’image du corps » et « l’ergothérapeute & les soins corporels ». Cette grille d’entretien comporte 17 questions, réparties entre les trois thèmes (cf Annexe 1). Cette présentation a pour objectif de suivre un déroulement logique similaire à celui utilisé pour le rappel des notions théoriques. Cette progression permet également de partir de leur pratique pour arriver finalement à des idées plus complexes. La même grille a été utilisée pour tous les entretiens afin de faciliter l’analyse des réponses obtenues. Néanmoins, quelques modifications ont pu être apportées pour la tournure des questions suivant les professionnels interrogés. Lors de plusieurs entretiens, certaines questions n’ont pas été posées, soit parce que les réponses à ces questions avaient été énoncées précédemment, soit parce que la question n’était pas pertinente compte-tenu des réponses précédentes. De plus, lors des deux premiers entretiens réalisés (ERGO 1 ou ERGO 2), certaines questions n’ont pas été posées du fait d’un manque d’expérience pour la réalisation de ces entrevues. 27 3.2. Analyse du recueil de données 3.2.1. Les soins palliatifs 3.2.1.1. Présentation des personnes interrogées La présentation des différents professionnels s’est déroulée en trois temps : la précision de leur poste, la présentation de la structure de soins et l’explication de leurs rôles. 3.2.1.1.1. La profession Sept professionnels ont été interrogés : trois ergothérapeutes, deux socioesthéticiennes, une psychologue et une kinésithérapeute. Quatre catégories professionnelles sont ainsi distinguées. Chaque professionnel a énoncé son rôle, mais de façon plus ou moins explicite. Certains nous ont dit clairement leur profession, comme SOCIO-E 1 qui nous dit « je suis socioesthéticienne », quand d’autres l’ont plutôt laissée sous-entendre, comme ERGO 2 lorsqu’elle commence son explication par « en tant qu’ergo ». Le fait que je les ai contactés en connaissant déjà leur profession peut expliquer ces différences. Ainsi, certains n’ont pas jugé utile de redonner leur titre exact, étant donné qu’il était déjà connu. Il est intéressant d’observer que les deux socioesthéticiennes ont détaillé plus précisément la formation qu’elles ont suivie. En effet, elles nous précisent qu’elles ont fait « une école avec la certification » pour SOCIO-E 1, « une formation complémentaire pour pouvoir vraiment avoir une approche psychologique de la personne fragilisée » pour SOCIO-E 2. Elles ont par ce biais souhaité mettre l’accent sur la légitimité de leur exercice, et le professionnalisme qu’elles peuvent présenter auprès des patients. Enfin, ERGO 3 est le seul professionnel à avoir fait une formation spécifique complémentaire, un « Diplôme Universitaire (DU) en soins palliatifs ». Il semble donc qu’il ait des compétences complémentaires pour travailler auprès du public qui nous intéresse ici. 3.2.1.1.2. La structure de soins Les structures de soins ont été données par cinq professionnels sur les sept. Nous pouvons supposer qu’ERGO 2 et la kinésithérapeute ne l’ont pas précisé pour des raisons similaires que précédemment, à savoir que je connaissais déjà leur lieu d’exercice. Avec les réponses obtenues, nous pouvons observer que deux professionnels (SOCIOE 2 et la psychologue) travaillent dans « un réseau de soins à domicile », et que les cinq autres professionnels travaillent en structure : en « USP(Unité de Soins Palliatifs) » pour 28 SOCIO-E 1 et la kinésithérapeute, en « hôpital » pour ERGO 1 et en « Soins de Suite de Rééducation et de Réadaptation » pour ERGO 2 et ERGO 3. De plus, ERGO 3 a dans sa structure « dix Lits Identifiés de Soins Palliatifs(LISP) ». Il est important de remarquer que les trois ergothérapeutes interrogés travaillent en structure de soins, mais dans des services très différents. Les dix LISP évoqués par ERGO 3 nous laissent penser qu’elle est plus fréquemment confrontée à des personnes en soins palliatifs qu’ERGO 1 et ERGO 2. 3.2.1.1.3. Des rôles bien explicités Six professionnels sur les sept ont détaillé leurs rôles auprès des personnes en soins palliatifs. En effet, la kinésithérapeute n’a pas du tout évoqué son rôle, mais a insisté sur le fait que « le kiné a un rôle très important dans l’équipe ». Cela peut s’expliquer par le fait que la profession de kinésithérapeute est développée et reconnue. De ce fait, elle n’a pas jugé utile de détailler sa pratique. Il apparait que les rôles de l’ergothérapeute sont différents suivants les structures d’exercice. Ainsi, les trois ergothérapeutes réalisent des positionnements, des adaptations et des aides techniques. Par contre, seuls ERGO 2 et ERGO 3 mettent l’accent sur les activités de vie quotidienne, avec notamment « la façon de réaliser des transferts », ou des « ateliers cuisine ». De plus, seul ERGO 3 réalise des activités de groupe « cuisine […] de danse en position assise ». Nous pouvons supposer qu’elle prend en charge plus de patients en soins palliatifs que ses collègues, et peut ainsi développer ces axes de pratiques avec les personnes en soins palliatifs. Des divergences existent également lorsque les deux socioesthéticiennes présentent leurs rôles. Néanmoins, l’écoute est une composante importante pour elles, afin « d’accueillir les maux du corps », dans un objectif d’ «accompagnement ». Enfin, il est important de remarquer que SOCIO-E 2 retrouve un parallèle entre sa profession et celle d’ergothérapeute, dans l’utilisation d’un média pour le soin, pour sa profession : « utiliser l’esthétique comme un outil pour la prise en charge du patient ». 3.2.1.2. Quelle définition pour les soins palliatifs ? Cette question a pour objectif d’observer si les professionnels connaissent les différentes composantes des soins palliatifs, et si les différents éléments sont pris en compte. Nous pouvons observer que les notions principales de la définition sont exprimées par les professionnels. En effet, ils évoquent les « soins de confort » car « il n’y a pas de guérison 29 possible ». Néanmoins, « ce n’est pas forcément des gens qui vont mourir », de ce fait la fin de vie est à envisager mais n’est pas forcément imminente. Enfin, il leur parait important de mettre en place une « prise en charge globale », holistique, afin d’ « accompagner » au mieux la personne dans cette dernière étape de vie. Ainsi, tous les professionnels ont fait ressortir les composantes essentielles des soins palliatifs, du fait de leur pratique quotidienne avec cette catégorie de patients. Néanmoins, nous pouvons observer qu’aucun des trois ergothérapeutes n’a mis en évidence le concept « d’accompagnement » dans leur définition des soins palliatifs. Cela peut s’expliquer par les contraintes institutionnelles. En effet, ils ont peu de temps pour prendre en charge chaque personne, et de ce fait un suivi régulier est parfois compliqué à mettre en place. Enfin, il est intéressant de remarquer que la notion de prise en charge holistique a été évoquée uniquement par la psychologue et SOCIO-E 2 qui travaillent dans le réseau de soins à domicile. Cela apparait surprenant au premier abord, les professionnels qui travaillent en structures sont plus sensibilisés à la prise en charge pluridisciplinaire et globale du patient. Néanmoins, nous pouvons supposer que la prise en charge holistique (qui est la prise en compte globale de l’individu en lien avec son système, avec ses attentes, ses besoins et ses valeurs), est une des valeurs primordiales dans ce réseau de soins, et qu’elle est identifiée comme telle par ces deux personnes. 3.2.1.3. L’organisation de la prise en charge Trois grandes dimensions de la prise en charge sont identifiées par les professionnels : la pluridisciplinarité, la présence d’intervenants extérieurs et la hiérarchisation. En effet, de nombreux professionnels mettent en avant le « travail d’équipe » ou la présence d’une « équipe pluridisciplinaire très complète ». Ainsi, ERGO 3 nous dit travailler « régulièrement ensemble avec les kinés », et la kinésithérapeute nous exprime travailler en collaboration avec «les aides-soignantes » et « les infirmiers ». Cependant, les deux socioesthéticiennes ne mettent pas en avant cette composante, ce qui s’explique car SOCIO-E 1 nous dit qu’elle travaille « seule », et SOCIO-E 2 qu’elle ne fait que « croiser » les autres professionnels. Au contraire, elles exposent plutôt bien la hiérarchisation de la demande de soins, qui peut venir de l’ « équipe soignante », du « personnel médical », mais également de « la famille » ou « des patients eux-mêmes ». Cette composante est également mise en avant par ERGO 1 car « c’est la psychologue qui (lui) demande d’intervenir », et ERGO 3, qui nous dit être 30 « souvent alertée par mes collègues ou par une prescription ». Nous pouvons ici observer que la socioesthétique est parfois demandée par la famille. Par contre, l’ergothérapie est uniquement recommandée par des professionnels de santé. Nous pouvons l’expliquer par la méconnaissance de notre profession par le grand public et par la rareté de notre intervention auprès des personnes en soins palliatifs. 3.2.2. L’image du corps 3.2.2.1. Les attentes d’une personne en soins palliatifs Les professionnels ont identifié plusieurs attentes formulées par les personnes en fin de vie : la gestion de la douleur physique en apportant « du bien-être, du confort », la gestion de la souffrance psychologique « par rapport à leur situation de fin de vie, à leur perte d’autonomie, de devoir demander de l’aide, d’être tributaire de quelqu’un pour des choses qu’elles faisaient seules », et une posture d’écoute de la part des soignants par « la présence et la chaleur humaine ». ERGO 1 est le seul professionnel à nous évoquer les notions de « constitution de leur projet » de fin de vie et de respect des volontés de la personne en lui demandant « qu’est ce que vous souhaitez ? ». De plus, ERGO 3 et SOCIO-E 2 nous expriment que « les attentes ne sont pas toujours verbalisées par les patients eux-mêmes ». Cela peut s’expliquer par des situations vécues par ces professionnels où ils se sont retrouvés en difficultés face à des patients n’exprimant pas leurs besoins. Enfin, le souhait par la personne de prendre en compte les proches et la famille n’est évoqué par aucun des professionnels interrogés. Nous pouvons supposer que ce sont plus les médecins, les infirmières et les assistantes sociales qui sont confrontés aux demandes des familles. Cela pourrait expliquer cette absence d’identification de la famille dans les attentes du patient par les professionnels interrogés. 3.2.2.2. La qualité de vie : quelles dimensions ? Cinq des six dimensions de la qualité de vie énoncées par AARONSON sont évoquées dans les réponses des professionnels. Nous retrouvons ainsi les symptômes pathologiques et effets secondaires des traitements avec la « prise en charge de la douleur », l’état fonctionnel avec les souhaits de « se lever, de marcher », la détresse psychologique avec le « soutien moral du patient et surtout de sa famille », les interactions sociales en leur permettant « d’être en lien avec les autres, de ne pas être isolé ». 31 La satisfaction par rapport à la prise en charge est une dimension identifiée par aucun des professionnels. Ainsi, elle ne leur apparait pas comme influençant significativement la qualité de vie des patients alors même qu’elle permet de l’évaluer. La sexualité et l’image corporelle sont évoquées spontanément uniquement par la psychologue qui, en parlant de la socioesthétique, dit que « cette approche était vraiment très importante dans ce rapport au corps qui était déchirant ». Par contre, sur sollicitation, six professionnels sur sept identifient l’image du corps comme influençant la qualité de vie. ERGO 3 nous précise qu’elle peut avoir des répercussions sur l’autonomie de la personne dans les soins corporels et sur les relations sociales. La psychologue met quant à elle en avant l’impact que peut avoir l’image du corps sur les relations familiales. Ainsi, l’impact de l’image du corps sur la qualité de vie n’est pas évident pour les professionnels, mais apparait comme important après sollicitation. Cela peut être dû à un manque de connaissances sur cette notion. Pour autant, ERGO 1 ne considère pas, même sur sollicitation, l’image du corps comme influençant la qualité de vie. Cependant, il nuance ses propos en soulignant l’importance de la structure et de la relation de soin pour faire apparaitre cette composante. 3.2.2.3. Quelles distinctions entre image du corps et schéma corporel ? Tous les professionnels interrogés identifient des différences entre le schéma corporel et l’image du corps. Toutefois, les distinctions effectuées ne sont pas les mêmes suivant les professionnels. En effet, seuls les trois ergothérapeutes et la kinésithérapeute nous disent que le schéma corporel correspond à la proprioception, qui est « la position du corps dans l’espace ». Cela peut être dû au contenu de leur formation, qui comporte une composante plus analytique et précise du fonctionnement corporel. Ainsi, l’idée que le schéma corporel soit interne à la personne est quant à elle évoquée par tous les professionnels sauf les ergothérapeutes. Le schéma corporel serait ainsi « très propre à soi », « c’est comment on perçoit le corps ». Cette distinction fait appel à des concepts plus en lien avec le psychisme, ce qui peut expliquer pourquoi les ergothérapeutes n’ont pas évoqué cette composante. En effet, ils sont peut-être moins sensibilisés que la psychologue ou les socioesthéticiennes à cette notion. L’image du corps est quant à elle identifiée globalement par tous les professionnels, sauf par SOCIO-E 1 qui ne distingue pas réellement l’image du corps et l’image de soi. L’image du corps apparait donc comme « plus extérieur(e) ». En effet, elle est liée aux normes et aux 32 « représentations sociales », car « c’est l’image que l’on renvoie ». La kinésithérapeute nous dit d’ailleurs que les personnes en soins palliatifs peuvent avoir « du mal à se regarder ». L’image du corps est également influencée par les relations sociales et affectives, « elle est aussi référente avec ce que nous dit l’entourage », car « le regard de l’autre va changer ». Ainsi, il apparaît que l’image du corps est fortement impactée par la société et les relations sociales. ERGO 1 ajoute également que cette image du corps est « subjective », et « correspond plus au vécu ». Il appuie ainsi sur l’influence de l’histoire de vie de la personne dans la vision de l’image du corps. 3.2.2.4. Mise en jeu de l’image du corps Quelques situations ont été identifiées par les professionnels comme mettant en jeu de façon privilégiée l’image du corps de la personne en soins palliatifs. ERGO 3 identifie les relations sociales, car « dès qu’il s’agit d’être en groupe, avec d’autres patients […] et puis par rapport aux familles », l’image du corps est sollicitée. Elle est la seule à l’observer, ce qui s’explique par sa pratique professionnelle. En effet, ERGO 3 est le seul des sept professionnels interrogés qui réalise des activités de groupe avec les patients. SOCIO-E 2 note quant à elle que les conséquences des traitements mettent en jeu l’image du corps : « la maladie ça entraine des déficits sur le corps, les traitements très lourds […] donc là oui effectivement l’image du corps est mise en jeu ». Les soins du corps qu’elle peut être amenée à réaliser ont certainement influencé cette réponse. Les soins corporels sont mis en avant de façon implicite par deux professionnels. Ainsi, ERGO 2 nous dit que les personnes en soins palliatifs « n’aiment pas se voir comme grabataire », et la psychologue que l’image du corps est mise en jeu « quand on commence à ne plus pouvoir s’alimenter, aller aux toilettes ». On peut également noter qu’ERGO 3, à la question précédente, déclarait considérer l’image du corps comme liée « aux soins d’apparence ». Ainsi, les soins corporels ne sont pas clairement identifiés par les professionnels comme favorisant la prise en compte de l’image du corps car seuls trois professionnels le mettent en évidence. Il parait néanmoins étonnant que les deux socioesthéticiennes n’aient pas fait ressortir cet élément. Nous pouvons cependant supposer que la question n’a pas été comprise par ces deux personnes, car SOCIO-E 1 a parlé des pathologies psychiatriques et SOCIO-E 2 de la généralité des soins palliatifs. 33 3.2.2.5. L’image du corps dans la pratique professionnelle L’image du corps est prise consciemment en compte par tous les professionnels, sauf par ERGO 2 qui considère qu’il s’agit plus des compétences de l’équipe soignante qui y est « plus […] confrontée ». Nous pouvons donc supposer qu’elle n’a pas identifié de méthodes ou de postures particulières de sa part visant à prendre en considération l’image du corps. Les professionnels qui prennent en compte consciemment l’image du corps mettent en avant différentes postures qu’ils mettent en place. La psychologue utilise une posture d’écoute, car l’image du corps « fait partie des thèmes (qu’elle) essaie d’aborder avec tout le monde » ; la kinésithérapeute note quant à elle l’importance du regard ; ERGO 3 va pour sa part essayer « de valoriser la personne ». Ainsi, par le biais de postures et de comportements spécifiques, certains professionnels accordent une place dans leur pratique à la prise en compte de l’image du corps. Cette question n’a pas été posée aux socioesthéticiennes car elles avaient identifié précédemment la prise en compte de l’image du corps comme une composante importante de leur pratique, par le biais des soins de beauté et de l’écoute (cf Question 1 ). 3.2.3. L’ergothérapeute & les soins corporels 3.2.3.1. Que fait un ergothérapeute ? Cette partie s’adresse uniquement aux autres professionnels, c’est-à-dire les socioesthéticiennes, la psychologue et la kinésithérapeute. Aucun d’entre eux n’a travaillé en collaboration avec un ergothérapeute pour la prise en charge de patients en soins palliatifs. En effet, il n’y en a pas dans les services où ils travaillent. Cependant, SOCIO-E 2 nous dit qu’elle juge pourtant le rôle de l’ergothérapeute auprès de ces personnes comme « important ». Du fait de cette absence d’ergothérapeute auprès des personnes en soins palliatifs, ses différentes compétences ne sont pas identifiées par tous les professionnels. Néanmoins, nous pouvons remarquer que SOCIO-E 2 connait plutôt bien les compétences de l’ergothérapeute, car elle cite la gestion de la douleur en essayant de « diminuer toutes les souffrances physiques », la favorisation du lien social en recréant « un lien avec l’extérieur » ou encore le développement de l’autonomie dans le « maintien des capacités fonctionnelles », « plus dans les gestes de la vie quotidienne ». Elle est le seul des professionnels interrogés à citer ces trois compétences. On peut supposer qu’elle a pu rencontrer un ergothérapeute exerçant dans un autre secteur d’activité, ou qu’elle s’est renseignée avant la réalisation de l’entretien. 34 La prise en compte de la souffrance morale est citée par la psychologue et SOCIO-E 2 en favorisant la « coordination entre le psychisme et le corps ». La kinésithérapeute a quant à elle noté que nous pouvons « apporter beaucoup au niveau du positionnement des patients ». Enfin, tous les professionnels nous parlent des compensations et adaptations, par la mise en place de « cuillère adaptée » par exemple. Ainsi, nous pouvons remarquer que la compétence de l’ergothérapeute la plus reconnue est celle concernant les aides techniques. C’est, en effet, la plus visible par tous les professionnels. Il est également intéressant de noter que les compétences repérées sont souvent en lien avec le métier exercé par le professionnel qui l’énonce. En effet, la kinésithérapeute nous parle du positionnement alors que la psychologue met en avant la prise en compte de la souffrance morale. Finalement, SOCIO-E est le professionnel qui a saisi le plus globalement notre rôle auprès des personnes en soins palliatifs. 3.2.3.2. Les activités de soins corporels Les professionnels interrogés trouvent en majorité un intérêt à la mise en place d’activités de soins corporels. Cependant, aucun d’entre eux n’a justifié ce choix. La psychologue nous précise néanmoins que la mise en place de ces activités pourrait être bénéfique « autant pour les personnes que pour leur entourage ». Les soins corporels semblent être une catégorie recouvrant un large panel de composantes. En effet, les professionnels identifient la socioesthétique, la relaxation avec les « touchermassages » et les « activités physiques adaptées ». Ces activités sont citées par les professionnels lorsqu’elles ont lieu sur leur lieu d’exercice. Au niveau des soins d’hygiène, ils sont évoqués spontanément par une partie des professionnels, « la toilette, l’habillage », « la douche », les soins d’apparence « le passage chez la coiffeuse, le vernis à ongles, pour les hommes être bien rasé ». La kinésithérapeute ne l’identifie pas spontanément, mais après sollicitation. On peut observer que les ergothérapeutes les identifient en priorité, car elles peuvent concerner leur pratique professionnelle. Ainsi, les activités de soins corporels semblent importantes à mettre en place en soins palliatifs, et notamment la toilette, l’habillage et les soins d’apparence. 3.2.3.3. La prise en compte de l’image du corps dans les soins corporels Les professionnels mettent en avant de façon non exhaustive différentes postures qu’ils peuvent adopter afin de prendre en compte l’image du corps dans les activités de soins corporels : 35 - Revaloriser : ERGO 3 nous dit essayer de « revaloriser la personne rien que par une toilette et un habillage » et SOCIO-E 1 de « les revaloriser par rapport à leur corps ». - Ecouter les demandes de la personne : ERGO 1 nous dit qu’il faut « prendre en compte les demandes du patient », et ERGO 3 « faire attention aux attentes de la personne ». Ainsi, les ergothérapeutes sont les seuls à mettre en avant cette notion de respect du projet de soin. - Créer une relation de soin : la psychologue nous dit qu’il faut « connaitre un peu la personne ». Quant à ERGO 1, il nous signifie que l’activité se passera différemment s’il est face à un homme ou à une femme. Nous pouvons supposer qu’il a été confronté à des situations de gêne où cette question s’est posée. - Respecter la personne : la psychologue nous dit qu’il faut être « dans le respect de la personne », pour leur montrer qu’ « on les considère toujours comme des êtres humains » (SOCIO-E 1). - Le toucher : Cette composante est mise en avant uniquement par les professionnels travaillant dans le réseau de soins à domicile. Ainsi, SOCIO-E 2 nous dit que « le toucher, c’est le lien qu’on va créer avec la personne », et la psychologue que « tout ce qui passe dans le toucher […] valorise pour le coup aussi l’image du corps ». - Le regard : cette dimension est mise en évidence par les socioesthéticiennes et la psychologue. On peut supposer qu’elles ont été plus sensibilisées dans leur formation à cette notion. Ainsi, la psychologue nous dit notamment qu’il faut « revenir à […] du regard » afin de favoriser l’image du corps - L’autonomie : la kinésithérapeute et ERGO 3 nous expriment que favoriser l’autonomie de la personne en soins palliatifs est pertinent pour prendre en compte l’image du corps. Ainsi, il faut que ce soit le patient « qui fasse le maximum ». Pour cela, « il faut arriver à doser jusqu’où on l’aide, et jusqu’où on le laisse faire ». La formation et les compétences acquises par ces deux professionnels expliquent pourquoi ils sont les seuls à avoir émis cette composante. Enfin, SOCIO-E 2 nous rappelle que certains patients ne verbalisent pas leurs attentes. De ce fait, elle nous dit que le regard et le toucher sont des dimensions importantes à prendre en compte car ils sont vecteurs de relation : « « je crois qu’il y a beaucoup de choses qui passent qui ne sont pas forcément verbalisées, par le regard et par le toucher ». Ainsi, les professionnels arrivent globalement à identifier les postures à adopter afin de favoriser la prise en compte de l’image du corps dans les activités de soins corporels. 36 Néanmoins, il est important de noter que certaines de ces attitudes, assez globales, ne sont pas spécifiques aux soins corporels, et peuvent donc être adoptées en toutes circonstances. 3.2.3.4. L’ergothérapeute : intervenant privilégié ? La place de l’ergothérapeute pour traiter de l’image du corps dans les activités de soins corporels est justifiée par plusieurs dimensions. La kinésithérapeute note notamment qu’ « il y a un côté bilan, savoir ce que fait la personne », qui est spécifique à l’ergothérapeute. En effet, les autres professionnels intervenant dans les soins corporels ne vont pas effectuer de bilans aussi spécifiques que les ergothérapeutes. Favoriser l’autonomie est également une dimension exprimée par les professionnels, notamment par ERGO 1 (« permettre à quelqu’un de faire ses transferts seuls au lieu d’être mis dans un lève malade, ça joue aussi »), SOCIO-E 2 (« peut-être dans leur autonomie ») et la kinésithérapeute (« plus d’apprentissages, de redonner certains gestes aux patients » « être plus autonome, ça favorise aussi l’image du corps »). De ce fait, l’ergothérapeute est réellement le professionnel compétent en la matière. Afin de favoriser cette autonomie, des compensations et adaptations peuvent être mises en place, comme « mettre des velcros pour qu’une femme puisse continuer à porter ses robes » ou « leur apporter des outils ». Certains professionnels mettent également en avant la relation et le temps que peut passer l’ergothérapeute avec une personne dans ses activités de soins corporels. Ainsi, ERGO 3 nous dit qu’ « on est dans une autre dimension de la relation avec le patient », et la kinésithérapeute qu’ «un ergothérapeute il prendra plus le temps ». De ce fait, l’ergothérapeute aurait sa spécificité dans la prise en compte de l’image du corps dans les soins corporels par la réalisation de bilans, la relation qu’il met en place et les moyens mis en œuvre pour favoriser l’autonomie du patient en soins palliatifs. Cependant, il est important de noter qu’ERGO 2 et SOCIO-E 1 ne voient pas un rôle spécifique de l’ergothérapeute. Pour ERGO 2, les autres professionnels « sont peut-être plus sensibilisés » à la notion de l’image du corps. Quant à SOCIO-E 1, elle nous dit qu’on peut déjà « le noter et le remarquer, et après faire appel à quelqu’un ». Le rôle de l’ergothérapeute dans cette situation n’est donc pas évident pour une partie des professionnels. 3.2.3.5. Quelle utilisation de la MCRO-P par les ergothérapeutes ? Cette question a été posée uniquement aux ergothérapeutes, car c’est un bilan très spécifique. D’ailleurs, aucun d’entre eux n’utilise la MCRO-P auprès des personnes en soins 37 palliatifs, ni même en général. Cela peut s’expliquer par une méconnaissance de l’outil : ERGO 2 nous dit ainsi qu’elle « ne connait pas », et ERGO 3 « que ça lui dit quelque chose ». ERGO 1, quant à lui, n’en voit pas l’utilité et nous dit que « quand on arrive avec sa fiche de bilan, on ne met pas les gens à l’aise ». ERGO 3 nous dit de plus que le bilan « se fait plus au fil de la discussion ». Ces trois professionnels se basent donc sur la discussion et des bilans personnels pour recueillir les attentes de la personne plutôt que sur une grille d’entretien validée. Ils n’évaluent pas de ce fait de manière reconnue la qualité de vie en se basant sur la satisfaction. 38 4. DISCUSSION 4.1. Conclusion du recueil de données La réalisation de ces différents entretiens a permis de mettre en avant différentes pratiques des soins auprès des personnes en soins palliatifs. En effet, quatre catégories professionnelles ont été interrogées. De plus, les sept professionnels travaillent dans un panel de 5 structures différentes. Du fait de ces considérations institutionnelles, certaines distinctions auraient pu se présenter quant à la vision des soins palliatifs. Cependant, il apparait qu’elle est sensiblement la même pour tous les professionnels interrogés, et correspond à la première définition de l’OMS de 1990. Néanmoins, deux notions sont évoquées spontanément par très peu des professionnels, alors qu’elles apparaissent dans la définition de L’OMS de 2002 : il s’agit de la qualité de vie et de la prise en compte de la famille. Nous pouvons donc remarquer que l’accompagnement de la famille n’est pas identifié spontanément alors même qu’elle est impactée par l’approche de la fin de vie (KEMP, 2002). Cela peut être dû au manque de lien entre les professionnels interrogés et les proches des patients. En effet, ils sont pris en compte de manière plus évidente par le médecin ou encore l’assistante sociale, du fait de l’approche pluridisciplinaire observée par tous les professionnels. La notion de qualité de vie n’est pas quant à elle associée immédiatement aux soins palliatifs par les professionnels, alors qu’elle est peut être sa notion la plus importante. Pour autant, les différentes dimensions pouvant influer sur elle ont été identifiées. Nous pouvons donc remarquer que la qualité de vie des personnes est prise en compte par les différents professionnels, en travaillant sur différentes dimensions de celle-ci identifiées par AARONSON (CELLA, 2007). Ainsi, même si ce terme n’est pas évoqué par les personnes interrogées comme étant une notion importante en soins palliatifs, nous pouvons observer qu’elle est en réalité bien un élément moteur pour la prise en charge des patients. Cette notion de qualité de vie constitue un élément majeur de la prise en charge en ergothérapie en soins palliatifs, même si elle est prise en compte différemment par les professionnels selon leur lieu d’exercice. Ainsi, les trois ergothérapeutes réalisent des positionnements et adaptations, mais seuls deux d’entre eux travaillent sur les activités de vie quotidienne. Enfin, un seul réalise des activités de groupe. Ces différences de pratiques peuvent s’expliquer par des considérations institutionnelles. En effet, certains ergothérapeutes ont moins de temps à consacrer à cette catégorie de patients. Des ergothérapeutes travaillant exclusivement auprès de cette population auraient peut être apporté des réponses plus en 39 adéquation avec l’approche holistique privilégiée en soins palliatifs (BURKHARDT et al, 2011). De plus, aucun des trois ergothérapeutes interrogés n’utilise la grille d’entretien de la MCRO-P avec les patients en soins palliatifs pour évaluer leur qualité de vie, alors qu’elle se base sur les activités signifiantes pour la personne. Cela est concordant avec les réponses apportées à la question portant sur les dimensions favorisant la qualité de vie. En effet, la satisfaction n’a été énoncée par aucun des professionnels comme impactant significativement sur elle, alors qu’elle peut être le facteur permettant de l’évaluer (GUEGUEN, 2001). L’image du corps est quant à elle indiquée par les professionnels comme influant sur la qualité de vie, mais uniquement après sollicitation. Elle est donc repérée spontanément par très peu de professionnels. Pour autant, cette notion est plutôt bien distinguée du schéma corporel par les différentes personnes interrogées. Certains professionnels ont tout de même mis en avant l’impact que peut avoir cette image du corps si elle est altérée. Elle aurait ainsi des répercussions sur l’autonomie de la personne dans les soins corporels et sur les relations sociales et familiales. De ce fait, les professionnels nous disent globalement prendre en compte l’image du corps dans leur pratique, par le biais d’une posture d’écoute, du regard et de la valorisation de la personne. Les soins corporels sont quant à eux jugés utiles à mettre en place en soins palliatifs. Regroupant une grande quantité de composantes dont la socioesthétique, les soins d’hygiènes et d’apparence sont tout de même identifiés, en majorité par les ergothérapeutes, comme importants pour les patients. Pour autant, les contraintes de temps et institutionnelles ne permettent pas toujours aux ergothérapeutes de réaliser des accompagnements dans ce domaine. Néanmoins, les différents professionnels identifient des comportements favorisant la prise en compte de l’image du corps dans les activités de soins corporels. Une relation de soin apparait tout d’abord comme nécessaire à la mise en place de cette activité, afin de respecter la personne (ANDRIEU, 2007). Le toucher, le regard et l’écoute des demandes du patient sont également des éléments mis en place par les professionnels, afin de les revaloriser et de favoriser le lien social (ANDRIEU, 2008). Enfin, favoriser l’autonomie du patient est primordial afin qu’il soit pleinement acteur du soin. Cette dernière composante nous permet ici de mettre en avant le rôle de l’ergothérapeute pour traiter de la notion d’image du corps dans les soins corporels. En effet, l’ergothérapeute est le professionnel le plus compétent dans ce domaine, par le biais des bilans qu’il peut réaliser ou des moyens qu’il peut mettre en place afin de favoriser son 40 indépendance dans les activités de soins corporels. Certains professionnels soulignent également que l’ergothérapeute prendra plus le temps pour réaliser cette activité, permettant ainsi d’instaurer une relation de confiance favorisant la parole et l’écoute. Ainsi, la spécificité de l’ergothérapeute est de mettre en place des activités de soins corporels signifiantes pour la personne. Les activités de soins corporels apparaissent donc ici comme un médiateur permettant d’influer sur l’image du corps de la personne et sur sa qualité de vie. 4.2. Vérification des hypothèses Nous allons maintenant vérifier si la mise en relation des apports théoriques et de l’analyse des entretiens permet de vérifier les hypothèses. Hypothèse 1 : Les soins corporels sont le médiateur privilégié pour aborder les notions d’image du corps en ergothérapie auprès de patients en soins palliatifs Les apports théoriques nous permettent de valider cette hypothèse. En effet, les soins corporels apparaissent comme une activité faisant partie intégrante des occupations de la personne. De ce fait, ils peuvent être signifiants pour la personne. De part cette présence dans les habitudes de vie, les ergothérapeutes peuvent être amenés à effectuer un accompagnement autour des soins corporels. De plus, il apparait que les soins corporels sont un domaine influençant l’image corporelle (PAASSCHEN et al, 2014) car ils sont l’activité mettant de manière privilégiée la personne en confrontation avec son corps. Elle est également celle pour qui les notions de toucher et de relation de soins sont primordiales. La mise en place d’un accompagnement aux soins corporels par l’ergothérapeute semble donc légitime pour aborder au mieux l’image corporelle de la personne en soins palliatifs. Au niveau du recueil de données, nous pouvons déjà remarquer que les soins corporels sont présents et considérés importants par tous les professionnels intervenants en soins palliatifs. Ils identifient les soins d’hygiène (toilette, habillage, soins de présentation) comme composante majeure de ces soins corporels. Une partie des professionnels identifie spontanément les soins corporels comme mettant en jeu de manière importante des questions d’image du corps. Cependant, nous pouvons remarquer qu’ils ne sont pas identifiés préférentiellement à d’autres situations, comme les relations de groupe. Des comportements sont identifiés comme favorisant la prise en compte de l’image du corps, comme un toucher respectueux, la relation de soin ou un regard bienveillant. 41 Néanmoins, ces attitudes ne sont pas spécifiques aux soins corporels. Ils sont nécessaires dans l’accompagnement de soins global de la personne. L’ergothérapeute est pour sa part identifié par une partie des professionnels comme un intervenant essentiel autour des questions de soins corporels, par son approche favorisant l’autonomie par la réalisation de bilans et la relation particulière qui se met en place lors de ces mises en situation avec le patient. Cette hypothèse est donc partiellement vérifiée. En effet, les soins corporels mettent en jeu l’image du corps. Cependant, ils ne sont pas identifiés comme un médiateur privilégié par rapport à d’autres types de prise en soins. Hypothèse 2 : Les soins corporels sont un domaine important de prise en charge auprès des patients en soins palliatifs afin de favoriser leur satisfaction Les apports théoriques vérifient cette hypothèse. En effet, ils peuvent être signifiants pour la personne. Dans ce cas de figure, la passation de la MCRO-P par les ergothérapeutes met en évidence cette activité comme étant importante pour la personne. Après un accompagnement adapté autour des soins corporels, la MCRO-P permettra de mettre en évidence une variation dans la satisfaction de la personne. En considérant la satisfaction comme indicateur de la qualité de vie (GUEGUEN, 2001), nous pouvons donc ici considérer que les soins corporels, s’ils sont signifiants pour la personne, sont un domaine permettant de favoriser la satisfaction. L’analyse des entretiens permet de mettre en avant que la MCRO-P n’est pas utilisée par les ergothérapeutes. La satisfaction n’est également pas identifiée comme étant une dimension impactant sur la qualité de vie. Cependant, un accompagnement en ergothérapie autour des soins corporels est repéré comme favorisant l’autonomie des personnes. Cela peut leur permettre d’être plus acteurs des soins malgré un mauvais état fonctionnel. Or « l’état fonctionnel » est une dimension de la qualité de vie identifiée par AARONSON (CELLA, 2007). De ce fait, les soins corporels peuvent permettre de favoriser la qualité de vie, et donc la satisfaction de la personne en soins palliatifs. De plus, la première hypothèse, partiellement vérifiée, met en évidence que l’image du corps est sollicitée dans les soins corporels proposés en soins palliatifs. Elle influence 42 également la qualité de vie (CELLA, 2007). Cela appuie donc l’hypothèse que les soins corporels favorisent la satisfaction de la personne en soins palliatifs. 4.3. Critique Différents éléments de critique peuvent être pointés dans ce travail. Dans un premier temps, le choix des professionnels interrogés comporte des biais. En effet, aucun des ergothérapeutes ne travaille spécifiquement auprès de personnes en soins palliatifs. Des ergothérapeutes travaillant en Unités de Soins Palliatifs, ou à domicile, auraient apporté des réponses différentes. Toutefois, ces types de services comportent peu d’ergothérapeutes. De plus, aucun des autres professionnels interrogés ne côtoie d’ergothérapeute dans sa pratique en soins palliatifs. De ce fait, les questions portant sur l’ergothérapeute ou son rôle ont pu en être impactées. Interroger d’autres catégories de professionnels, par exemple des médecins, des infirmiers ou des aides-soignants, aurait également permis d’enrichir le recueil de données. Compte tenu de ces remarques, nous pouvons également observer que sept professionnels ne représentent pas un panel important de professionnels. De ce fait, leurs réponses ne doivent pas être généralisées. Questionner un nombre plus important de professionnels aurait pu apporter une vision supplémentaire dans certains domaines assez complexes. De plus, le point de vue de personnes bénéficiant de soins palliatifs aurait pu apporter un éclairage différent de celui des professionnels des soins. Des biais peuvent également être notés concernant la grille d’entretien. Celle-ci présentant dix-sept questions est assez longue, ne permettant pas parfois aux personnes de développer leur point de vue. Certaines questions sont de plus relativement fermées ou mal formulées, notamment celle cherchant à montrer des situations mettant en jeu l’image du corps. Cela ne contribue pas au recueil des données nécessaires. Enfin, quelques questions ne sont pas cohérentes avec les hypothèses que l’on cherche à démontrer. Les premiers entretiens réalisés ont également comporté des biais. En effet, questionner des professionnels sur un sujet de recherche suppose d’être attentif aux réponses apportées afin de demander des précisions si nécessaire. Or, ces premières expériences n’ont pas permis d’amener des réponses abouties en raison de la pression engendrée par la réalisation de ce recueil de données. 43 4.4. Pistes d’ouverture La réalisation de cette étude permet de mettre en avant le manque d’ergothérapeutes travaillant dans des structures spécialisées de soins palliatifs de type USP (unité de soins palliatifs). En effet, il n’a pas été possible de trouver des ergothérapeutes travaillant dans ces services qui acceptent de répondre aux entretiens. Ceux-ci avaient en effet de petits temps de pratique en soins palliatifs, ou n’étaient appelés que ponctuellement pour des problématiques de positionnement. Un cadre de santé travaillant dans un service où des entretiens ont été réalisés a d’ailleurs déclaré qu’il ne connaissait pas notre profession et nos compétences. Pour cette raison, il n’envisageait pas d’engager un ergothérapeute. Cela est prégnant dans de nombreuses équipes pluridisciplinaires où les rôles de l’ergothérapeute ne sont pas toujours clairement identifiés (KEESING et ROSENWAX, 2011). Un travail de communication semble donc nécessaire afin que l’ergothérapie en soins palliatifs se développe. Quant aux ergothérapeutes travaillant en soins palliatifs, ils ont tous déclarés ne pas utiliser la MCRO-P dans leur pratique. Certains ne la connaissaient pas, et d’autres n’en voyaient pas l’intérêt. Cependant, celle-ci est préconisée dans les secteurs de soins palliatifs (GUEGUEN, 2001). Or, l’utilisation d’une grille d’entretien basée sur les habitudes de vie de la personne permettrait de valoriser la pratique de l’ergothérapie en soins palliatifs. Elle favoriserait de plus une approche axée sur les « occupations » et activités signifiantes. En effet, certains ergothérapeutes exerçant en soins palliatifs mettent en avant un rôle uniquement centré sur les aides techniques, du fait d’une méconnaissance et d’un manque de temps, alors que les patients et leurs aidants mettent en avant un désinvestissement dans les activités signifiantes pour la personne, et un manque de communication vis-à-vis de cela. (KEESING et ROSENWAX, 2001). L’utilisation de la MCRO-P en soins palliatifs par les ergothérapeutes permettrait aux autres professionnels de reconnaitre ses rôles au-delà du positionnement et des aides techniques. Elle permettrait aux ergothérapeutes d’instaurer un dialogue avec le patient autour d’activités importantes pour lui, et ainsi de les réinvestir. Une dernière piste de réflexion est également apparue lors des entretiens. Une des socioesthéticiennes interrogées a mis en avant l’intérêt d’un travail en collaboration entre socioesthéticienne et ergothérapeute. Cette interprofessionnalité n’apparait pas immédiatement, et pourtant plusieurs éléments pourraient permettre un développement des accompagnements de groupes animés par ces deux corps de métiers. Nous pouvons remarquer que le référentiel d’activité socioesthétique met en avant les compétences de « travailler en équipes pluridisciplinaires » et d’ « animer des ateliers collectifs et participatifs » (Répertoire National des Certifications Professionnelles). Le référentiel d’activité ergothérapique expose 44 les activités suivantes : « Animer et conduire des groupes selon différentes techniques», « Coopérer au sein d’une équipe pluriprofessionnelle et avec les différents acteurs […] afin de faciliter l’activité et l’implication sociale » (Bulletin Officiel Santé, 2010). Ces deux professionnels sont donc compétents pour mener des activités de groupe avec des patients, tout en travaillant en pluridisciplinarité. De ce fait, la création d’un groupe autour des soins corporels, animée par un ergothérapeute et une socioesthéticienne, peut être une piste d’accompagnement en soins palliatifs. Nous pouvons prendre pour référence l’atelier « Soin de Soi » mis en place par Annie PAULIN, ergothérapeute et esthéticienne, auprès d’adolescents (2010). En choisissant un groupe fermé non mixte de trois à quatre personnes, il a pour objectif de favoriser l’expression sur les soins corporels et sur le rapport au corps, tout en créant une dynamique de groupe propice à la socialisation (PAULIN, 2010). Certains de ces éléments pourraient être réutilisés en soins palliatifs. Il faudrait néanmoins veiller à respecter l’autodétermination de la personne, et son état de santé. 45 CONCLUSION Cette étude avait pour objectif de montrer en quoi les soins corporels sont un médiateur privilégié en ergothérapie pour aborder la notion d’image du corps, et ainsi favoriser la qualité de vie des personnes en soins palliatifs. La mise en relation des apports théoriques et des résultats du recueil de données a permis de mettre en évidence plusieurs éléments. En effet, si du point de vue théorique, l’image du corps est un élément crucial à prendre en compte par les professionnels du soin, il apparait que ceux-ci sont en pratique peu sensibilisés à cette notion. Néanmoins, ils essaient de la prendre en compte en favorisant la verbalisation, en mettant en place une relation de soin, un toucher et un regard bienveillant. Les données théoriques mettent également en avant l’intérêt des soins corporels pour aborder la notion d’image du corps, par la proximité et la confrontation au corps qui est mise en jeu lors d’accompagnement à la toilette ou à l’habillage notamment. Toutefois, les professionnels interrogés ne repèrent pas immédiatement cette activité comme média préférentiel pour la prise en compte de l’image du corps. Les comportements mis en place par rapport à cette notion ne sont ainsi pas spécifiques aux soins corporels. Les soins corporels apparaissent donc comme un média parmi d’autres pour prendre en compte l’image du corps. Cependant, la corrélation entre les apports théoriques et les entretiens permet de mettre en avant que les soins corporels impactent la qualité de vie. En effet, ils peuvent permettre de favoriser l’état fonctionnel et l’image du corps de la personne en soins palliatifs, influençant ainsi sur ses interactions sociales. Ces trois éléments sont des dimensions impactant la qualité de vie. De plus, si les soins corporels sont une activité signifiante pour la personne, ils peuvent également favoriser sa satisfaction, et de ce fait sa qualité de vie. Les ergothérapeutes, par la passation de la MCRO-P ainsi que par leurs compétences ayant pour but de favoriser l’autonomie de la personne, peuvent être des intervenants essentiels afin de permettre l’autodétermination et le bien-être de la personne en soins palliatifs. Enfin, cette étude a permis de mettre en évidence la nécessité d’un travail en pluridisciplinarité autour de la question des soins corporels et de l’image du corps. La possibilité d’interprofessionnalité a également été énoncée, notamment entre socioesthéticienne et ergothérapeute. Celle-ci pourrait être intéressante à développer, par le biais d’activités de groupe, afin de favoriser la qualité de vie des personnes en soins palliatifs. 46 BIBLIOGRAPHIE ANDRIEU B, Toucher, se soigner par le corps, Editions les Belles Lettres, Paris, 2008 ANDRIEU B, Prendre le soin de toucher, in Ethique & santé, décembre 2007, volume 4, p 180-183, ANDRIEU B, La nouvelle philosophie du corps, éditions Erès, 2002 Association Nationale Française des Ergothérapeutes, La Profession, ANFE [en ligne], 10 septembre 2014. 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KINE Afin de favoriser leur qualité de vie, quelles seraient les dimensions à prendre en compte ? PSYCHO Selon vous, quelles seraient les attentes ou demandes principales d’une personne en soins palliatifs ? SOCIO-E 2 Les rôles des différents professionnels sont-ils bien définis ? SOCIO-E 1 Comment s’organise la prise en charge des personnes en soins palliatifs ? ERGO 3 Comment définiriez-vous les soins palliatifs ? Il s’agit de noter la vision qu’ils ont de leur profession et leurs champs d’intervention par secteur. ERGO 2 Pouvez-vous vous présenter et présenter votre rôle auprès des personnes en soins palliatifs ? Eléments attendus ERGO 1 Questions X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X Il s’agit d’observer si la définition est claire et partagée par les différents professionnels, et également suivant les secteurs d’activités. Il s’agit de percevoir le parcours de soins des personnes au sein du service, et auprès de ce professionnel Il s’agit de constater si les rôles des professionnels sont identifiés par leurs collègues Il s’agit de distinguer si les professionnels sont à l’écoute des besoins de la personne et s’ils ont identifié des besoins récurrents, notamment en terme d’image du corps X X Il s’agit de retrouver ici les différentes composantes citées par AARONSON, et s’ils identifient l’image du corps comme en faisant partie Il s’agit de compléter la question précédente si la notion d’image du corps n’a pas été énoncée Il s’agit de repérer si la notion d’image du corps est connue des professionnels, et de vérifier si la terminologie est concordante avec celle énoncée ici Il s’agit ici d’observer s’ils ont identifié l’image du corps comme prégnante dans certaines activités, en particulier autour des soins corporels. Il s’agit ici de remarquer si les professionnels la prennent en compte consciemment ou inconsciemment X Avez-vous déjà travaillé avec un ergothérapeute ? Quelles pourraient être les actions d’un ergothérapeute auprès de patients en soins palliatifs ? Pensez vous que des activités autour des soins corporels pourraient être proposées aux patients ? Quelles seraient les différentes composantes des soins corporels ? Comment pensez-vous que l’image du corps peut-être prise en compte dans les activités de soins corporels ? Comment pensez-vous que l’ergothérapeute pourrait traiter de la notion d’image du corps dans ces activités ? Avez-vous déjà utilisé la grille d’entretien de la MCRO-P ? Il s’agit de mettre en évidence la présence ou non d’ergothérapeutes dans les différents services de soins palliatifs. X X X X Il s’agit de voir si les compétences et les rôles de l’ergothérapeute sont connus des autres professionnels X X X X X X X Il s’agit de noter si des activités de ce type sont mises en place, et si non, s’ils en voient la nécessité X X X X X X X X X X X Il s’agit de distinguer si les professionnels identifient la toilette, l’habillage et les soins de présentation comme faisant partie des soins corporels. Il s’agit de mettre en avant si des comportements ou postures favorisant la prise en compte de l’image du corps sont repérés par les professionnels X X X X X X X X X Il s’agit de remarquer s’ils identifient un rôle spécifique de l’ergothérapeute, et en quoi peut-il se distinguer des autres professionnels. X X X Il s’agit d’observer la fréquence d’utilisation de cette mesure et si elle est connue par les ergothérapeutes. X X X Du coup pour vous, c’est quoi les attentes principales d’une personne en soins palliatifs ? ENTRETIEN ERGO 1 ERGO 1 : C’est quoi votre définition des soins palliatifs ? C’est la bonne Pour moi leur attente principale est la constitution de leur projet, quel qu’il soit. J’ai eu un patient qui C’est des soins donnés à une personne, à partir du moment où on ne cherche plus la guérison avait 40 ans, qui avait des difficultés pour les repas, à qui on me demandait de faire un bilan, mais moi mais le confort et le bien être. je préfère voir le patient en situation et en parler avec lui avant de faire un bilan, si il n’est pas demandeur, c’est pas la peine de l’embêter avec ça. Bon finalement j’ai quand même fait un petit bilan Voilà, ce n’est pas forcément des gens qui vont mourir. Je précise parce que moi j’interviens, j’ai et je ergo mais bon. fais une formation douleur / soins palliatifs sur l’hôpital et sur le département, c’est moi qui fais le petit topo. Vous faites quoi comme bilans ? D’accord Ça dépend, moi je ne suis pas très bilan. On va dire que c’est basé sur la MIF. En gros les bilans c’est simple, ça dépend de la pathologie ; si le patient il ne marche pas, on ne va pas lui demander s’il va aux Qu’est ce que je fais en soins palliatifs ? Donc oui on a la même définition. On va parler de cas toilettes tout seul. Par rapport au patient ça va être les transferts, l’habillage, la toilette, les repas. Là j’ai concrets, c’est souvent des cas lourds, c’est rarement un paraplégique il va être en soins palliatifs parce eu une dame la semaine dernière qui a un cancer, qui m’a dit « moi j’adore écrire », donc tout ce que qu’il ne remarchera pas. Donc qu’est ce que je fais. Vous avez des questions peut-être ? j’ai fait pour elle c’est de travailler sur l’écriture, et elle était super contente. Allez-y, parce que ma première question était celle-là C’est en fonction de ses attentes ? Donc on fait pleins de choses. Je fais tout ce que ferait un ergothérapeute « standard ». Ça peut être du Oui, parce que le reste ne l’intéressait pas. Moi je trouve que la question pertinente en soins palliatifs positionnement, par rapport à un handicap, une douleur, souvent les deux ensembles, aussi du c’est « qu’est ce que vous souhaitez ? », parce que c’est des gens qu’on ne va pas rééduquer. Enfin positionnement à visée pas corrective mais posturales, ça j’en fais pas mal. Après c’est vrai que quand voilà ce qui me parait être le meilleur bilan. Mais bon, j’en fais quand même des bilans, le Braden par on a des gens qui sont vraiment en phase prémortem, qui ne mangent pas, qui ne bougent pas c’est plus exemple, ça m’arrive de le faire avec l’infirmière, afin de voir pour le positionnement. compliqué. Je fais aussi pas mal d’adaptations rapport aux besoins des patients. Ça peut être des aménagements de domicile, de la mise en place de FR. Après en terme de traitement de la douleur il y a D’accord. Du coup par rapport à ce que les patients peuvent vous demander, est-ce que l’image le positionnement, après je fais un peu de physio, mais c’est plus les kinés qui s’en occupent. Voilà en du corps est une notion qui revient fréquemment dans les demandes ? gros, pas mal d’aides techniques Dans ce que je vois, non. Parce que il y a deux catégories de patients en soins palliatifs : ceux qui vont D’accord. Et au niveau de la prise en charge des patients en soins palliatifs, comment ça mourir rapidement et ceux qui ne vont pas mourir dans l’immédiat. Donc l’image du corps, pour des s’organise ? Qui intervient ? patients qui ne sont pas loin de mourir, donc qui ne sont pas forcément conscients, là la question ne se pose même pas. Donc oui, l’image du cops, je n’y suis pas vraiment confronté. Même par rapport à la Au niveau des personnes de l’hôpital ? Ici on a un service douleur et soins palliatifs. Il y a l’équipe nudité, comme ils sont à l’hôpital, ils sont habitués à montrer leur corps. J’ai quand même eu une mobile de soins palliatifs, composée d’une infirmière, une psychologue et un médecin, qui se déplace femme, qui m’avait parlé de problèmes pour se maquiller, mais ce n’était pas un problème fonctionnel, dans tout l’hôpital. On travaille beaucoup en pluridisciplinarité. Souvent, ce qui est assez curieux, c’est c’était surtout parce qu’elle n’avait pas ce qu’il fallait, et elle m’en parlait à moi comme elle aurait pu la psychologue qui me demande d’intervenir, parce que c’est elle qui reçoit les plaintes des patients, et en parler à n’importe qui ! Après il y a des patients qui ont des maladies nécrosantes, qui ne sentent pas comme j’y interviens de façon ponctuelle, c’est elle qui voit les patients et entend leurs demandes. bon, mais qui ne m’ont jamais exprimé ça. Peut-être qu’ils n’osent pas m’en parler, j’ai peut-être pas le C’est pas incohérent, parce qu’il n’y a pas d’assistante sociale, et c’est une équipe qui intervient dans bon abord pour ça, en tout cas en soins palliatifs. Mais sur d’autres pathologies j’ai pu y être confronté. tous les services. Mais du coup est ce que vous pensez que ce serait quand même une dimension à prendre en Pour moi cela comprend la toilette, l’habillage, les soins d’apparence, pour un homme se raser, compte ? pour une femme se maquiller… Je pense que ça dépend des personnes et des services. Dans un vrai service de soins palliatifs peut être D’accord, parce que je sais aussi que j’ai des collègues qui font des massages, mais pas moi. Je suis un plus, parce que les professionnels connaissent bien les patients, moi c’est des gens que je vais voir 3, 4 ergo très « fonctionnel ». Moi je travaille en rééducation, donc je suis vraiment rééducateur de base. Je fois au plus, donc ce n’est pas pareil. Après en long séjour où je travaille également il y a des lits de suis pas du tout « psy », ou « neuropsy », enfin forcément un peu, mais bon. Je sais que les kinés ont pu soins palliatifs, mais où c’est vraiment de la fin de vie. Mais avec des patients conscients, on va quand mettre en place des «bains relaxants » avec certains patients, mais je n’y participe pas. Mais bon, pour même plus pouvoir agir, par exemple sur l’habillage, le positionnement, ces activités pourquoi pas, après c’est toujours pareil, c’est à la demande du patient. Après je suis intervenu plusieurs fois pour des patients à qui on demandait de se doucher tous les jours alors qu’ils ne Quelle différence faites-vous entre image du corps et schéma corporel ? Pour moi, le schéma corporel est plus analytique alors que l’image du corps correspond plus au vécu. On peut avoir un trouble du schéma corporel et avoir quand même une bonne image du corps, et l’inverse aussi. L’image du corps est plus subjective. C’est pour ça que pour aborder ce type de sujet, il faut que les patients aient confiance, et que c’est pour ça que je n’y suis pas confronté, parce que je les le faisaient pas chez eux. Ça devient une agression pour eux la douche dans ces cas là. Je pense que c’est un peu notre rôle de dire ces choses là, surtout en soins palliatifs. Après, c’est différent quand on connait bien les patients, parce que moi je les vois très peu de fois. Pour vous, dans les soins corporels, comment l’ergothérapeute pourrait prendre en compte l’image du corps ? vois peu. A la limite, c’est plus présent en rééducation, parce que je suis les patients sur un plus long terme, et je les vois une à deux heures tous les jours. Alors là, bonne question ! Alors quelle que soit la pathologie, moi je demande au patient ce qui est important pour lui, même pour une fracture du poignet, si la personne est maçon, le poignet n’aura pas Avec les personnes en soins palliatifs, quelles activités pouvez-vous mettre en place ? J’interviens souvent autour de la communication verbale et non verbale. La toilette très peu, car les personnes sont soit dans l’incapacité physique d’exprimer cette demande ou de réaliser l’activité, soit c’est une maladie évolutive mais qui n’handicape pas dans ce domaine pour l’instant. Les repas reviennent pas mal aussi, je regrette d’ailleurs de ne pas travailler avec une orthophoniste. Après je peux leur proposer des activités de rééducation, en sachant que parfois c’est presque plus de l’animation, car par exemple avec un patient ayant une tumeur cérébrale évolutive, on ne pourra pas rééduquer l’hémiplégie, mais si le patient fait cette demande, alors je mets en place des actes de rééducation. Du coup, elles n’ont pas de vrai but thérapeutique. C’est plus pour eux, psychologiquement, que ça a un intérêt. Il faut bien comprendre qu’avec les gens en soins palliatifs, on ne va pas faire de rééducation. la même importance que si elle est chef d’orchestre. Sinon, pour toutes les activités qu’on fait où on est en contact avec le corps, moi je suis un homme, ce qui fait que ce sera différent si je suis face à un homme ou a une femme. Du coup, ça m’est arrivé de faire des autonomies toilette par « procuration », en demandant à une aide soignante de regarder les différents points, parce qu’il faut faire attention aux ressentis du patient. Donc après l’image du corps, on ne parle pas du schéma corporel… je pense qu’il faut prendre en compte les demandes du patient, si il n’a pas envie de se raser, il ne se rase pas, encore plus dans les soins palliatifs, on s’en fout si il n’est pas rasé. Après on peut aussi être vigilant au choix des vêtements, on peut intervenir pour des adaptations par exemple couper une robe et mettre des velcros pour qu’une dame puisse continuer à porter ses robes. Pour moi ça ça touche l’image du corps, même si ce n’est pas le corps « en direct », ça touche aussi l’image de soi. Je suis pas mal intervenu sur des choses comme ça. Sur le choix des fauteuils roulant aussi, j’avais une dame qui voulait un fauteuil de la même couleur que sa voisine de chambre, donc on avait réussi à en trouver un. Après je pense Est-ce que des activités autour des soins corporels, de la toilette, de l’habillage, seraient des qu’il y a d’autres choses que je fais, mais qui ne me sautent pas aux yeux, parce que c’est intriqué dans choses que vous pourriez mettre en place ? d’autres activités. C’est aussi valoriser le patient sur son corps, parce que mine de rien, permettre à quelqu’un de faire ses transferts seul au lieu d’être mis dans un lève malade, ça joue aussi. Toilette, habillage oui, après soins corporels c’est quoi ? Au final quand on réfléchit, dans tout ce qu’on peut faire il y a l’image du corps derrière. Pour l’autonomie repas, la propreté c’est important, il y a des gens qui ne mangent pas par peur de se salir. C’est comme je me suis battu pour que les poches à urines qui pendent à côté des fauteuils roulants soient cachées dans des sacs opaques, je pense que c’est l’image du corps aussi. C’est comme quand on met des contentions, on essaye de les mettre sous la robe. C’est des détails qui sont finalement importants. Ma dernière question : vous avez beaucoup parlé d’être attentif aux demandes du patient, du coup avez-vous déjà songé à utiliser la MCRO ? Je ne connais pas bien, mais ça me dit quelque chose. Je pense qu’on arrive bien à cerner les besoins des patients sans avoir besoin d’un bilan. Surtout en soins palliatifs. Moi je pense que le plus important c’est le contact. Quand on arrive avec sa fiche de bilan, on ne met pas les gens à l’aise. Déjà, même avant de faire la rééducation, je vais les voir dans la chambre, je me présente, on discute quelques minutes. En soins palliatifs, il faut prendre le temps. Je pense que le meilleur bilan, c’est les paroles du patient. Moi je fonctionne toujours de la même manière pour recueillir mes informations : toilette, habillage, repas, loisirs. […]. Mais je pense que si tu veux avoir accès à ça, il faut que les gens aient un rapport de confiance. ENTRETIEN ERGO 2 Ici nous avons une équipe pluridisciplinaire très complète, avec médecin, infirmier, aide soignant, kiné, ergo, neuropsychologue, diététicienne, orthophoniste ponctuellement. Il y a également une coiffeuse Pour construire le recueil de données, on a besoin de conduire des entretiens, d’envoyer des qui vient, ainsi qu’une esthéticienne. Il y a également un service de bénévoles en soins palliatifs qui se questionnaires pour répondre à notre question et voir ce qui est possible ou ce qui n’est pas déplace à la demande. De plus, cet établissement étant à l’origine un couvent, une religieuse peut possible en pratique. accompagner les personnes qui le souhaitent, en respectant les croyances de chaque personne. Pouvez-vous présenter votre rôle au sein du service en général et auprès des patients en soins Selon vous, pour une personne en soins palliatifs, quelles sont ses attentes ou demandes palliatifs ? principales ? En tant qu’ergo on s’occupe de leur environnement dès l’entrée : si il y a nécessité de matelas pour le Soulager la douleur, qu’elle soit physique ou morale. Et tout ce qu’on apporte sur le plan humain, ils traitement des escarres, des aides à la marche (fauteuil roulant, rollator ou cannes).On s’en assure par apprécient. Ce que je veux dire par là, c’est la posture d’écoute de la part des soignants. rapport aux équipes pour qu’elles sachent comment les prendre : s’ils ont besoin d’aller au WC, pour les levers le matin, pour les emmener en salle à manger dès le second repas dans la structure (car le Pour vous, pour favoriser leur qualité de vie, quelles seraient les différentes dimensions à premier se fait en chambre). Donc on s’occupe de tout ce qui est environnement, chaise garde robe si prendre en compte ? nécessaire. Ça c’est le jour où ils rentrent, et derrière on fait un bilan d’entrée, qui comprend l’environnement à la maison (comment il est fait, l’architecture de la maison), et quelle était leur La prise en charge de la douleur, l’écoute, le respect de leurs croyances, leurs directives anticipées (je autonomie à la maison, et comment est-elle à ce jour. A partir de là on fixe les objectifs. Après on fait veux voir ma famille ou pas, je veux du sucré ou du salé…). Finalement, c’est respecter la dignité de la la rééducation / réadaptation nécessaire, et pour finir on prépare la sortie en fonction de ce qu’ils nous personne. ont dit de la maison, de ce qu’ils ont récupéré, on conseille le matériel nécessaire. On fait des visites à Pensez-vous que l’image du corps est une dimension qui favorise leur qualité de vie ? domicile si besoin. Et c’est le même fonctionnement pour la prise en charge des patients en soins palliatifs ? En soins palliatifs, j’essaye de maintenir un bilan d’entrée, même si parfois c’est un peu délicat de leur demander, selon l’avancement de leur état, si on sait qu’ils ne vont pas rentrer à la maison, c’est vrai Oui, moi j’y crois, au moins certaines personnes. Pas forcément toutes, mais pour quelques unes d’entre elles, ça peut être important. De ce fait, quelles différences faites-vous entre image du corps et schéma corporel ? que je maintiens tout ce qu’ils font en autonomie, la maison… ça dépend je m’adapte. L’image du corps c’est l’image qu’on renvoie, et le schéma corporel est plus dû à une dynamique Après si ils veulent rien que s’asseoir sur le bord du lit, on fait que ça, c’est à la demande. cognitive on va dire, le côté proprioceptif. Du coup, comment vous définiriez les soins palliatifs ? Dans le cas des personnes en soins palliatifs, comment pensez-vous que l’image du corps est Pour moi les soins palliatifs c’est quand il n’y a plus de soins curatifs, donc on fait des soins de confort. Ce n’est pas obligatoirement une fin de vie, ça peut durer 2 ans. questionnée, dans quel contexte cette question est-elle mise en jeu ? Ça dépend de l’histoire et du caractère de la personne, qui y contribue. Dès l’instant où on est dans l’écoute, dans le respect de la personne, dans le dialogue, on peut y être confronté. Après il y en a qui Auprès des patients en soins palliatifs, est-ce les mêmes professionnels qui interviennent que pour une prise en charge plus « classique » ? n’aiment pas s’imaginer, se voir comme grabataire, quand ils commencent à sentir qu’ils deviennent dépendants pour tout, l’image qu’ils se donnent, ils demandent d’alléger les souffrances, de les apaiser par rapport à ça Dans votre pratique, prenez-vous en compte la notion d’image du corps ? Je pense que c’est systématique au sein de notre équipe. Je m’occupe beaucoup d’environnement donc c’est plus les équipes soignantes qui y sont confrontées. Est-ce que vous mettez en place des « activités » avec les patients en soins palliatifs ? Pas vraiment, ce qu’on fait c’est qu’on respecte leurs choix, on leur demande par exemple s’ils veulent s’asseoir aujourd’hui, au bord du lit ou au fauteuil, avec le lève-malade, planche de transfert ou en actif. Après s’ils veulent aller marcher, sortir, on fait ce qu’on peut pour eux Du coup est-ce que ça vous arrive de mettre en place des activités autour des soins corporels avec ces patients ? Ça ne m’est pas arrivé, mais si besoin pourquoi pas. Pour vous quelles seraient les différentes dimensions des soins corporels ? Ça ferait partie de l’environnement, de l’écoute. Ce ne serait pas sur un plan rééducatif, mais plus une notion d’accompagnement. Du coup, si une activité autour des soins corporels était mise en place, comment pensez-vous que l’image du corps pourrait être prise en compte par l’ergothérapeute ? C’est par le bon positionnement au lit, au fauteuil, qu’ils soient bien habillés, bien peignés, respecter leurs envies. Pensez-vous que l’ergothérapeute peut vraiment traiter de la notion d’image du corps par ces activités ou ce serait plutôt la place d’autres professionnels ? Nous on travaille beaucoup en complémentarité, donc il y a l’ergo, mais aussi les autres, par exemple aides soignants, infirmiers, qui sont peut-être plus sensibilisés. Pour faire le bilan d’entrée, est ce que vous avez déjà utilisé la MCRO ? Non, je ne connais pas. ENTRETIEN ERGO 3 Pouvez-vous vous présenter et présenter votre rôle auprès des personnes en soins palliatifs ? J’ai régulièrement des prescriptions médicales… Après mes collègues aides-soignantes viennent me voir aussi pour me demander de voir les personnes. Après aussi la kiné régulièrement qui me demande si je peux voir pour l’installation, ou même par rapport à des situations d’anxiété, d’angoisses. Du Je suis ergothérapeute dans un Soins de Suite de Rééducation et de Réadaptation. On a également une coup elle voit un peu ça et moi je n’attends pas d’avoir une prescription, je vais voir les gens. Et après unité de soins de longue durée et une unité d’hébergement renforcé… Donc au niveau du service de des fois c’est à la demande, mais en soins palliatifs c’est plutôt rare qu’ils soient en demande. Disons, rééducation on a quand même une population assez âgée et souvent rééducation et beaucoup de que moi je suis souvent alertée par les collègues ou par une prescription. réadaptation. Et puis après il y a quelques retours à domicile et sinon beaucoup de départ en maison de retraite ou en long séjour. Et du coup vous avez aussi des personnes en soins palliatifs ? Au sein du service, les rôles des différents professionnels sont bien définis ? On travaille régulièrement ensemble avec les kinés quand c’est des situations de fin de vie avec des installations. En général on intervient à deux pour faire les installations. A deux c’est quand même Oui, on a dix Lits Identifiés de Soins Palliatifs. Voilà. Donc régulièrement on a des personnes dans mieux par rapport aux douleurs, parce que quand on est seule pour mobiliser quelqu’un dans un lit ce cette situation, que je prends en charge. J’ai fait le DU de soins palliatifs, un peu compliqué pour une n’est pas forcément évident. Moi je préfère qu’on soit à deux dans ces situations-là. En fin de vie où la ergo, mais très intéressant quand même ! personne est alitée et où il n’y a même plus de levers au fauteuil. Sinon après pour des personnes qui sont en soins palliatifs mais au plus long court, on travaille aussi beaucoup ensemble sur l’installation. D’accord. Du coup c’est en un an cette formation ? On a la réflexion en fait ensemble avec les kinés en fait ! Non, c’est sur deux ans. Normalement c’est plus pour les infirmières et les médecins. D’accord ! Donc selon vous par rapport à ce que vous pouvez entendre des personnes et ce que vous observez, quelles seraient les attentes ou les demandes principales d’une personne en soins Du coup, qu’êtes-vous amenée à faire avec ces personnes ? Déjà, c’est beaucoup beaucoup d’installation : recherche de positions antalgiques, travail sur les palliatifs ? Le confort et la non-douleur. Après sinon ça c’est moins verbalisé mais ce sont des personnes qui ont postures aussi ou sur la façon de réaliser les transferts, de se mobiliser. souvent beaucoup d’angoisses et d’anxiété. Elles ne vont pas forcément avoir la demande mais derrière D’accord les douleurs, il y a la douleur physique et psychique on va dire. Ce sont des personnes qui vont plus parler de leurs douleurs physiques. Donc elles vont plutôt nous demander par rapport aux douleurs Et après tout dépend après de la situation de la personne, mais je fais des ateliers de mandalas, je fais des ateliers cuisine, je fais des ateliers de danse en position assise. Après, tout dépend comment est la personne. Ok. Du coup comment définiriez-vous les soins palliatifs ? … Pfou ! Une prise en charge d’une personne en fin de vie dont on sait que la pathologie n’est pas…, il n’y a pas de guérison possible. Ce sont des soins de confort. Je ne sais pas si ça vous va ! Oui ! Du coup au niveau de la prise en charge de ces personnes, comment s’organise-t-elle ? physiques mais finalement derrière il y a aussi autre chose. Et ce serait de l’anxiété par rapport à quoi ? Par rapport à leur situation de fin de vie, par rapport à leur perte d’autonomie, de devoir demander de l’aide, d’être tributaire de quelqu’un pour des choses qu’elles faisaient seules. D’accord. Et ça ce sont des choses qui ne sont pas exprimées en fait ? Non, je ne pense pas forcément. Pour moi je pense que ce n’est pas forcément exprimé, enfin si la perte d’autonomie oui, mais après elles ne vont pas venir forcément me voir, me parler de ça. Il faut que moi je leur parle de ça, qu’on pose les choses ensemble. Pour vous, afin de favoriser leur qualité de vie, ce serait quoi les différentes dimensions à prendre Du coup, y aurait-il des contextes ou des situations particulières où vous pensez que l’image du en compte ? corps de la personne elle peut vraiment influencer leurs relations sociales ou leur autonomie ? Bon alors on va dire leur confort déjà, et maintenir leur autonomie…Et puis les relations sociales aussi, Oui je pense. leur permettre d’être en lien avec d’autres, de ne pas être isolé. Et ça pourrait être quoi par exemple ? Ou comme moment de la journée ou situations ? C’est dans ce but que vous faites certaines activités ? Ce sont des personnes… vous pouvez répéter la première question ? Dans mes groupes, je n’intègre pas forcément que des personnes en soins palliatifs. Ils sont du coup Est-ce qu’il y aurait des contextes ou des situations particulières où l’image du corps serait mélangés avec le reste de la population de l’établissement. particulièrement mise en jeu ? Pensez-vous que l’image du corps est une dimension qui favorise leur qualité de vie ? Hum… Dès qu’il s’agit d’être en groupe, avec d’autres patients. Quand il s’agit de sortir de la chambre Alors ça c’est une très bonne question ! Heu… c’est compliqué de répondre d’une façon générale. Je quoi, et puis par rapport aux familles. L’image que l’on peut renvoyer à sa famille, même si on est dans pense que c’est important de… pour certaines personnes oui c’est important l’image qu’elles peuvent la chambre. Quand la famille vient, même par rapport aux petits-enfants. On a peur de l’image qu’on va avoir, enfin l’image qu’elles peuvent donner d’elles-mêmes. Je pense que, après c’est vraiment renvoyer. Je pense aux enfants, j’ai eu cette discussion avec une personne hier qui me disait qu’elle compliqué de parler en général, mais c’est aussi l’image des autres sur eux, le regard des autres sur eux. n’amène plus les petits-enfants parce qu’elle veut qu’ils gardent l’image de leur grand-mère encore Par exemple une personne qui a perdu ses cheveux, ou bien quelqu’un qui maigri et qui voilà… belle, voilà. Moi je n’arrive pas à avoir un avis là-dessus, et puis qu’est-ce qu’il faut faire en effet. Mais je pense que pour les personnes qui se rendent compte de la dégradation, qui voient qu’ils sont Ça pourrait impacter sur les relations sociales ? Je pense oui, si ces personnes-là n’arrivent plus à maitriser leur image, oui. Et du coup si elles perdent amaigris, ou chauves, même qui ne sont plus capables de faire certains mouvements ou gestes, je pense que ça impacte sur leurs relations, même avec leur famille. en autonomie et qu’elles n’arrivent plus à se coiffer comme elles le souhaitent, ou bien mettre la D’accord. Du coup est-ce que vous prenez en compte l’image du corps dans votre pratique, est ce perruque. Oui je pense que ça impacte sur leur sortie de la chambre. Ça devient plus compliqué. qu’il y a des choses que vous mettez en place ? Du coup, pour vous, quelles seraient les différences entre l’image du corps et le schéma Si c’est possible, si il y a une réelle souffrance par rapport à ça oui, on essaie de valoriser la personne, corporel ? et on essaie de faire attention à justement… Après on aura beau faire, je pense que la personne qui est Alors là… Moi je parle de l’image du corps vraiment les soins d’apparence. Le schéma corporel, non. C’est la position du corps dans l’espace. Pour moi c’est complètement différent. Après il y a des personnes en situation palliative chez qui on va travailler le schéma corporel, pour des personnes qui ont encore la capacité de se verticaliser, ou de toute façon, rien que de passer de la position allongée à la position assise, on travaille aussi ça. On fait aussi attention à ça, aux installations, si on incline trop le fauteuil en arrière, on perd aussi tout ce qui est en rapport avec le schéma corporel, les capteurs, voilà… C’est pris en compte aussi dans la prise en charge, mais c’est complètement différent de l’image du corps. en souffrance, on n’arrivera pas à la réconcilier avec l’image qu’elle peut renvoyer. Oui, c’est pris en compte, après quand ils ont des douches ils ont un petit brushing, les aides-soignantes, moi personnellement non, mais les aides-soignantes quand elles ont le temps elles peuvent maquiller un peu les gens. Quand c’est des personnes qui étaient coquettes, qui ont encore leur petite trousse de maquillage, si la personne n’y arrive pas on peut faire pour eux, ou on les stimule. Après ce n’est pas moi spécifiquement qui vais faire ça quoi, c’est l’équipe. Vous ça vous est arrivé de faire des autonomies à la toilette ? Oui, pour des propositions d’aides techniques, de mise en sécurité rien que ça. Et puis voir un petit peu Et du coup l’ergothérapeute c’est vraiment par ce côté autonomie qu’il peut traiter de l’image du ce qui pose vraiment difficulté et essayer de… Si il y a une personne qui est demandeuse, parce qu’il y corps, c’est ce qui le différencie des autres professionnels ? a aussi des personnes qui vont se laisser faire, mais il y en a d’autres qui ne vont pas supporter qu’on fasse pour eux. Disons qu’on est dans une autre dimension de la relation avec le patient. On est vraiment dans une intimité particulière, donc oui c’est… Même si un kiné va faire un massage et que du coup la personne Pour vous du coup toutes ces activités autour des soins corporels ça comprend quoi comme va être en partie dénudée, ce que nous on peut faire pour la toilette ou l’habillage, c’est spécifique et composantes ? On a parlé des perruques, de se maquiller, qu’est-ce qu’il y aurait d’autre ? c’est assez particulier quand même… En fait on se situe entre aide-soignante et kiné je trouve. Le passage chez la coiffeuse, le vernis à ongles, pour les hommes être bien rasé… Qu’est-ce qu’il y Surtout sur cette activité-là oui. aurait d’autre… L’habillage aussi, pouvoir garder ses habitudes aussi à ce niveau-là. Eviter les blouses d’hôpital ou les pyjamas toute la journée quoi ! Etre habillé en fait, c’est important. Après pour des Oui, après sur les autres activités non, c’est moins spécifique. Mais du coup quand on perçoit la personnes vraiment alitées, voilà il n’est plus question de ça. personne dans cette activité-là, ça change la relation je trouve. Parce qu’on n’a pas la même relation que… je ne sais pas… Selon vous, l’ergothérapeute a vraiment sa place dans tout ce qui est autonomie à la toilette, à l’habillage ? Il a vraiment un rôle « à part » on va dire ? Oui, ce n’est pas la même manière d’entrer en relation. Oui, je pense qu’on peut apporter un plus. Oui. Ce n’est pas évident. Personnellement je ne vais pas aller voir une personne, qu’elle soit en soin palliatif ou pas, et lui dire que demain je viens pour voir comment elle se débrouille pour la toilette. Ça Comment pensez-vous que l’image du corps peut être prise en compte dans ces activités de soins ne va pas être la première chose que je vais faire avec la personne. corporels ? Vous faites des bilans avec les personnes en soins palliatifs ? Hum… Ce que je fais, c’est faire attention aux attentes de la personne, heu, lui permettre de faire ellemême, lui demander son avis. Ça répond à votre question ? Ça a déjà dû m’arriver oui je pense. Oui ! Est-ce qu’il y aurait des gestes ou des attitudes à avoir par rapport à cette image du corps? Ça vous est déjà arrivé d’utiliser la grille d’entretien de la MCRO ? Il faut vraiment doser entre laisser faire la personne et lui venir en aide. Donc ça après il faut connaitre Heu non ! ça me dit quelque chose mais j’avoue que les grilles d’évaluations… Forcément quand je un peu la personne et savoir un peu ce qu’elle attend. Et après adapter son comportement par rapport à vois les personnes je passe souvent par le questionnaire, mais sans suivre une grille particulière. Après la personne. Après, il faut arriver à doser jusqu’où on l’aide, et jusqu’où on la laisse faire, et toujours je vois comment la personne me répond, et ça guide un peu les questions. Je guide un peu les questions être dans l’empathie, dans une relation d’aide. Et puis on n’est pas là pour faire pour la personne, on est en fonction de ce qu’elle va me répondre, mais c’est plus au fil de la discussion je pense ! là pour lui montrer qu’elle arrive encore à faire, et qu’elle est encore jolie. C’est vraiment la revaloriser ? Oui, la revaloriser, mais à travers… ça parait un peu idiot quand on le dit comme ça, mais revaloriser la personne rien que par une toilette et un habillage. ENTRETIEN SOCIO-ESTHETICIENNE 1 à avoir une aide c’était en long séjour, on m’avait demandé de faire une épilation, et la personne je ne pouvais pas et l’épiler, et la mobiliser en même temps, il fallait que quelqu’un m’aide. Depuis que je Pouvez-vous vous présenter et présenter votre rôle au sein du service de soins palliatifs ? Je suis socioesthéticienne, j’ai fait une école avec la certification, et donc au niveau de l’équipe, je suis travaille, c’est la seule fois où j’ai eu besoin de quelqu’un. Du coup pour vous, quelles seraient les attentes principales d’une personne en soins palliatifs ? à l’USP, à la demande de l’équipe mobile de soins palliatifs et aussi en permanence fixe en oncologie. Et donc je travaille autour de l’image de soi, du bien-être, de l’altération de l’image, du regard qu’on a C’est du bien-être, du confort, c’est restaurer l’image. Des mains bien soignées sur les draps quand on sur soi et aussi, puisque j’interviens en oncologie, de tous les conseils d’hygiène cutanée avec les est allongé, c’est important je trouve, la personne se regarde les mains, elle les trouve jolies. Je leur fais traitements de chimiothérapie. C’est de l’accompagnement, parce que comme il y a des traitements qui choisir la couleur qu’elles veulent. Après ça peut être aussi un léger maquillage pour « rehausser » la ont des répercussions cutanées avec des thérapies ciblées assez importantes, c’est essayer de minimiser personne. toutes les réactions avec une action pour utiliser les bons produits, faire attention au soleil, etc… Vous intervenez surtout auprès des femmes ? Quelle serait votre définition des soins palliatifs ? Les hommes aussi. Pour eux on m’envoie aussi pour couper les ongles. Ce sont des soins d’accompagnement et des soins de confort, donc qui ne sont plus à visée curative. C’est justement les accompagner, comme je dis : tant qu’il y a de la vie, la personne est une personne à Pour favoriser la qualité de vie de ces personnes, quelles seraient les différentes dimensions à part entière, et elle a le droit d’avoir tout ce qu’on peut lui apporter en terme de bien-être, de réconfort, prendre en compte ? et comme écoute, puisqu’il y a aussi l’écoute à travers ce que l’on fait. Voilà. Comment s’organise la prise en charge des patients au sein de l’unité de soins palliatifs ? Il y a plusieurs possibilités. Je vais les voir directement, je passe toujours par l’équipe soignante partout où j’interviens. Sur l’USP, il y a une réunion par semaine, des dossiers, où on parle des dix patients de l’unité, et là on me dit que ça serait bien d’aller voir telle ou telle personne pour telle chose, et puis … Pour améliorer leur qualité de vie ? Oui. On a parlé de la prise en compte de l’image du corps, y-a-t-il d’autres domaines importants ? après moi je fais mon tour dans le service et je vais voir les personnes. Mais j’ai toujours une référence Alors là vous me posez une colle. Je trouve qu’on est un service avec énormément de choses médicale ou paramédicale. Ça peut être à la demande de la famille aussi. Systématiquement, elle voit proposées. La sophro… là je ne vois pas ! Il y a des choses à faire, moi dans mon entretien annuel j’ai sur le dossier d’entrée qu’il y a possibilité d’avoir sophrologue, socioesthéticienne… dit que j’aimerais faire de l’olfactothérapie, la réflexologie, je trouve que ce sont des choses intéressantes à faire, surtout l’olfactothérapie je trouve que ça serait bien pour faire travailler la Pour vous, les rôles des différents professionnels au sein du service sont bien définis ? mémoire olfactive des personnes en fin de vie, ça fait remonter des souvenirs. Moi ça ce sont des Oui. projets que j’aimerais faire, mais bon voilà. Quand vous faites des soins aux patients, êtes-vous seule ou y-a-t-il parfois une aide- soignante ? Du coup pour vous l’image du corps est une dimension favorisant la qualité de vie des personnes ? Non, jamais. Je suis seule. Après je n’empêche pas les soignants de rentrer, je ne mets pas la présence parce que ça fait du bruit, je trouve ça très désagréable. Parce que c’est quand- même du cocooning ce que je fais, donc si on entend la sonnette ça perturbe. Même en hôpital de jour, je n’empêche pas les infirmières de venir, de toute façon elles viennent, elles posent les perfs. La seule fois où j’ai demandé Oui, bien sûr ! Quelles différences faites-vous entre l’image du corps et le schéma corporel ? Je pense qu’ils sont imbriqués l’un dans l’autre. Le schéma corporel, c’est comment on perçoit le corps, c’est essentiel, laver la tête c’est important. Et puis après il y a tout ce que je peux apporter, parce que et l’image de soi c’est ce que nous renvoie le miroir. Moi je trouve que tout est imbriqué l’un avec je peux faire des soins de la tête jusqu’au pied. Soit en morcèlement même des fois. l’autre il me semble. Pensez-vous que l’ergothérapeute pourrait avoir sa place dans la mise en place de ces activités ? Dans quels contextes pensez-vous que l’image du corps est plus mise en jeu ? Peut-être. Pour la douche au lit ou la baignoire, moi je suis intervenue une fois pour quelqu’un qui était Dans les pathologies psychiatriques, dans les psychoses par exemple. Avec les psychotiques la dans le bain pour lui faire un massage du visage en même temps, mais autrement… Mais après il faut socioesthéticienne ne travaille jamais seule, il y a toujours un infirmier. Et puis il y a des précautions que tout le monde soit libre et disponible au moment voulu. Mais autrement je ne sais pas, oui qu’on nous a inculquées quand on a fait notre formation. Il faut savoir qu’ils ont une idée de certainement. C’est une prise en charge pluridisciplinaire. morcèlement du corps, et qu’il faut être très prudent par rapport à ce que l’on fait. Voilà c’est ça, strictement dans ce cadre-là, sinon je ne vois pas… Du coup comment pensez-vous que l’image du corps peut être prise en compte dans ces activités par les professionnels qui interviennent ? Vous arrive-t-il de travailler avec un ergothérapeute ? Moi j’ai une expérience que de socioesthéticienne, mais je pense que dans ce service ils sont assez Non, parce que ça ne s’est jamais présenté. Après ça pourrait se faire, parce qu’avec notre métier on attentifs par rapport à ça, parce qu’on a des gens qui sont quand-même amaigris parfois. Je pense… peut faire des ateliers. Donc par exemple sur les longs séjours où je vais et où je n’ai pas beaucoup de C’était quoi la question ? temps, c’est vrai qu’on pourrait faire un atelier de socioesthétique avec une ergothérapeute, ce serait même très intéressant je pense. Est que qu’il y a des attitudes ou des gestes à avoir pour favoriser la prise en compte de l’image du corps dans les activités comme la toilette, la douche… ? Quelles pourraient être, selon vous, les actions de l’ergothérapeute auprès de personnes en soins palliatifs ? Je pense qu’il faut être vigilant pour ne pas faire ressentir à la personne qu’elle est très maigre. Je pense qu’il faut faire très attention, et puis après je pense qu’ils le font, parce qu’ils sont attentifs, on ne fait Je ne connais peut-être pas assez votre métier par rapport à ça. En soins palliatifs l’ergothérapeute si, de pas du soin palliatif par hasard. Ils sont attentifs, et puis au même titre que d’envoyer une toute façon quand les gens… je vois on avait une personne qui avait une cuillère adaptée… A ce socioesthéticienne, c’est vrai qu’il y a des personnes qui disent « mais à quoi bon ? », « regarder dans niveau-là, quand les personnes ont un problème, un déficit d’un côté. Oui pareil, ça peut être aussi en l’état où je suis ». C’est déjà les revaloriser par rapport à leur corps, et leur apporter justement, en collaboration avec la kiné par rapport à tout ça. De toute façon toute profession a un rôle. Après un faisant de la socioesthétique, qui est de l’esthétique, que même jusqu’au bout de la vie, que même en temps plein peut-être pas, mais des interventions ponctuelles. On a des cas certainement où étant amaigris ils peuvent encore avoir un soin qui est réservé soi-disant aux bien-portants. Oui c’est ça, l’ergothérapie serait intéressante. ça veut dire qu’on pense que les soins esthétiques sont réservés aux bien-portants, ça a une connotation quand-même de frivolité, pour moi c‘est autre chose, sinon je ne ferais pas ce métier ! C’est vrai que ça Au niveau des activités autour des soins corporels, quelles sont celles qui sont ou qui pourraient a une image de frivolité, de luxe, la beauté, etc. Alors que là on offre ça justement à des gens malades, être proposées ? et ça a beaucoup plus d’impact. Donc voilà c’est leur apporter quelque chose qui parait réservé aux A mon niveau ? En général, dans le service bien-portants à des gens qui sont dans la dernière ligne droite de leur vie. Et à travers ça on les considère toujours comme des êtres humains, voilà c’est ça, on ne ferme pas la porte. En plus la famille est très sensible à ça, parce que justement ça permet de laisser une image plus agréable pour la fin de vie, ça leur fait voir aussi qu’on peut les toucher, parce que c’est vrai que parfois ils n’osent plus les Dans les soins corporels il y a la baignoire à bulles, je ne sais pas s’ils l’utilisent beaucoup, ça c’est important. C’est une question de temps. Et il y a tous les soins d’hygiène, ne serait-ce que la douche, toucher, parce que ça fait peur. C’est aussi humaniser le service, on n’est pas dans un mouroir, on est dans un endroit où il y a de la vie. Pour vous, est-ce que l’ergothérapeute, ou tous les professionnels peuvent prendre en compte l’image du corps, valoriser la personne ? Tous les professionnels peut-être pas, mais au moins le personnel paramédical. Il faut y être attentif, et je pense qu’il faut quand-même ressentir quand quelqu’un a une mauvaise image d’elle-même, et après éventuellement faire appel aux personnes pour apporter quelque chose de plus. Au moins déjà le noter et le remarquer, et après faire appel à quelqu’un. ENTRETIEN SOCIO-ESTHETICIENNE 2 Pouvez-vous vous présenter et présenter votre rôle au sein du service ? Mon rôle aussi c’est d’aider les patients à mieux accepter les soins médicaux, et puis aussi d’essayer de redonner dans la mesure du possible le désir de s’occuper d’eux en fait, et puis de se redonner des désirs, enfin c’est hyper important. C’est aussi le fait de réactiver un peu le désir de vie quelque part. Déjà avant de vous donner mon rôle, je vais vous expliquer un peu ce que c’est que la socioesthétique, Voilà. Même si nous on a une approche différente des infirmières, etc, on a quand même un rôle très rapidement, parce que tout le monde ne sait pas forcément de quoi il s’agit. Nous les complémentaire avec les autres professionnels. socioesthéticiennes en fait on est déjà esthéticienne à la base, et on a un diplôme de socioesthétique, on a fait une formation supplémentaire pour pouvoir vraiment avoir une approche psychologique de la Comment définiriez-vous les soins palliatifs ? personne fragilisée et la meilleure prise en charge possible. On pratique des soins, bien sûr, des soins Comment je définirais les soins palliatifs ?... alors déjà les soins palliatifs pour moi, quand on parle de d’esthétique, qu’on va adapter justement aux personnes fragilisées, aux personnes souffrantes, alors soins palliatifs, on entend souvent dedans, heu, ça a une résonance un peu de fin de vie quoi. Les soins soit sur des personnes qui sont malades, cancer, etc, âgées, avec des handicaps physiques, mais aussi palliatifs c’est ce qui existe quand on a tout essayé et que c’est ce qui reste à la fin en fait, quand on des personnes qui ont des problèmes psychologiques. Par exemple on peut s’occuper de personnes qui parle de palliatif. Bon, dans les soins palliatifs c’est tout un réseau de professionnels qui interviennent, ont des maladies mentales, des personnes qui sont en état d’alcoolisme ou de toxicomanie, et puis aussi depuis l’infirmière ou l’aide-soignante jusqu’au médecin, en passant par la sophrologue, par la on a un rôle social puisqu’on peut travailler auprès des personnes qui sont en détresse sociale, au psychologue aussi qui est un relais important, et la socioesthéticienne. C’est toute une chaine de chômage, en détention, etc. personnes qui sont mises autour de la personne pour la prendre en charge dans sa globalité. Alors bon Donc le rôle de la socioesthéticienne c’est déjà d’écouter les gens et puis voilà, d’accueillir les maux du corps, parce que là on est vraiment dans les soins palliatifs, puisque c’est votre sujet je crois. C’est aussi bien sûr de détendre, d’apaiser les gens, et puis aussi de les embellir, parce que c’est le rôle de l’esthétique. Voilà, alors donc on donne des conseils mais en soins palliatifs ce n’est pas vraiment le plus important, mais ça peut faire partie aussi de nos prérogatives. On va faire des soins de beauté, c’est des soins de visage, des mains, des manucures, c’est des massages aussi, des massages relaxants, de tout le corps. On travaille quand même pas mal par segment, par exemple les mains, les pieds, les jambes, le dos, le cuir chevelu, le visage, et puis aussi des épilations, ça peut arriver, et puis aussi un peu de maquillage, on termine souvent par le maquillage. Voilà, alors justement je regardais un petit peu ce que c’était que l’ergothérapie, parce que c’est vrai que moi jusqu’à présent j’ai rarement rencontré des ergothérapeutes, et pourtant j’ai l’impression que leur rôle est vraiment essentiel. Et justement je me disais que la socioesthétique c’était un peu comme l’ergothérapie, c’est-à-dire que nous, en tant que socioesthéticienne, on va utiliser l’esthétique comme un outil pour la prise en charge du patient. Et maintenant la socioesthétique c’est un soin de support, ça s’organise autour du patient, les soins palliatifs ça se fait en institution hein, en établissement hospitalier, mais ça se fait aussi à domicile, et c’est le cas du réseau dans lequel je travaille. Ce que je disais tout à l’heure, on voit « fin de vie », mais il y a des gens qui sont inclus dans un réseau de soins palliatifs depuis longtemps, et qui ont une qualité de vie que je qualifierais de « bonne », parce que justement c’est toute cette chaine qui s’est installée autour d’eux, et qui leur permet d’être en sécurité, de se sentir mieux, de se sentir accompagné. Voilà, il y a cette notion d’accompagnement, et puis avec la socioesthétique il y a une notion affective aussi. Voilà, on accompagne dans la douceur, dans l’empathie, etc. Et puis pas forcément dans la tristesse aussi, c’est aussi des moments de joie, des moments de gaité, des sourires, voilà, ce n’est pas que de la tristesse. Et puis aussi les soins palliatifs c’est, comme je le disais tout à l’heure, redonner une pulsion de vie, et puis c’est donner à la personne malade le sentiment que même très malade, même en soins palliatifs, la personne elle est jusqu’au bout, digne, c’est une personne digne ; c’est une personne en fait. C’est la maintenir dans sa dignité, et puis c’est le fait de se sentir bien jusqu’au bout, malgré la maladie, et voilà Donc du coup vous êtes un service qui va à domicile ? pour une prise en charge globale. Notre présence nous, contrairement aux autres professionnels, puisqu’on travaille bien sur dans une équipe dans un réseau de soins à domicile, c’est d’avoir une Oui, c’est un réseau de soins palliatif, oui, au domicile des patients. approche un peu différente de la personne, c’est-à-dire que nous ne sommes pas des médicaux ni des paramédicaux, et donc ça c’est important pour le patient. C’est la présence, c’est le toucher, c’est l’écoute, tout ça, mais ce n’est pas médicalisé. Comment la prise en charge des patients s’organise-t-elle ? Moi je vais vous parler pour la socioesthétique, parce que c’est ce que je connais le mieux. Bon bah un institut de beauté. Donc voilà, c’est l’inconnu, c’est pour ça que souvent c’est l’équipe qui va les c’est au domicile des gens bien entendu. Après, au domicile des gens… dans mon cas, c’est toujours le orienter. personnel médical, alors ça peut être le médecin, l’infirmière, la sophrologue, qui me contactent par mail, qui m’orientent les coordonnées de la personne. Moi je prends contact avec la personne ou avec Voilà, après les besoins ils sont immenses. Heu…J’ai pensé à des exemples à vous donner. Il y a une ses proches et donc je me rends à son domicile pour lui proposer des soins. Voilà. Au domicile c’est patiente, suite à des traitements de cancer, au lieu d’avoir une alopécie, la perte de cheveux, de poils, au bien parce qu’il y a de l’intimité quand même, c’est plutôt une parenthèse pour la personne. Heu voilà, contraire ça a provoqué chez elle une hyperpilosité. Chez les femmes, souvent il y a des boutons, sur le c’est des besoins qui sont identifiés par l’équipe. torse, le visage, et puis des poils qui poussent : sur les joues, sur le menton, les lèvres, les sourcils qui poussent, les cils… donc là il peut y avoir une demande auprès du médecin en disant « bon moi je ne Les rôles des différents professionnels au sein du service sont-ils bien définis ? peux pas, vous voyez comment je suis devenue, ce n’est pas possible ». Donc à ce moment là le médecin va orienter vers une socioesthéticienne. Nous on va alors procéder à l’épilation du visage, puis … C’est rare que vous travailliez en collaboration avec l’infirmière par exemple ? redonner une image féminine, et une meilleure estime d’elle-même. Voilà, ça fait partie des, comment dire, des objectifs de la socioesthétique aussi ; améliorer l’estime de soi c’est très important. Je prends aussi le cas d’une dame qui est aveugle, qui est alitée, donc elle n’a plus du tout d’autonomie, elle est Oui. Ça n’est jamais arrivé jusqu’à présent. En fait j’ai des contacts avec eux, soit quand il y a des très malade mais ça fait longtemps qu’elle est dans le réseau. Et en fait elle a toujours pris soin de ses réunions, auxquelles je participe peu, et ensuite sinon par mail, voire par téléphone. C’est très rare que mains et de ses ongles, elle a de très belles mains avec des ongles longs. Et pour elle, même si elle n’y je sois au domicile avec… Au contraire, par exemple je donne mon heure et les infirmières se calent, voit plus, si vous voulez les mains c’est sa féminité en fait, le fait de savoir que ses ongles sont propres, par exemple si je prévois de passer à onze heures, elles vont faire tout leur possible pour passer avant. limés, et surtout vernis avec un vernis rouge, c’est extrêmement important parce que c’est pour elle, Voilà, c’est important la complémentarité, mais en fait on ne fait que se croiser. mais c’est pour son entourage aussi. Et puis quand le personnel soignant lui dit « oh, que vous avez de belles mains », pour elle c’est vraiment très important. Donc elle il y a une demande forte de manucure Vous vous coordonnez en fait ? et de soins des ongles. Voilà, la coordination c’est ça. Et puis après je note tout sur les patients et puis, je ne l’ai jamais fait Donc du coup pour vous l’image du corps c’est vraiment une dimension qui favorise la qualité de jusqu’à présent parce que ça fait moins d’un an que je suis dans le réseau, mais je vais faire une vie des personnes ? synthèse des patients que j’ai vu, ce que j’ai fait etc. Après la demande elle peut venir des patients euxmêmes, une fois que je les connais, c’est les patients qui demandent même le passage de la Absolument. L’image du corps, et puis voilà, avant d’être l’image, c’est d’abord le toucher, pour le socioesthéticienne, ou les proches aussi. confort de la peau, mais ça on en reparlera, parce que je vais vous parler des dimensions, et puis aussi c’est un moment d’échange. Nous, si vous voulez, l’infirmière elle va passer beaucoup, moi des fois je Du coup, par rapport à ce que vous entendez avec les patients, quelles seraient leurs attentes ou ne vais passer qu’une fois chez la personne, alors qu’une infirmière elle va passer tous les jours, matin, demandes principales ? midi et soir, mais moi quand je vais passer je vais rester, je vais m’asseoir, je vais toucher la personne, je vais lui parler, donc il va y avoir un contact qui va se créer. Et puis il y a des paroles, il va y avoir Alors oui, par rapport à ça, on va dire que les attentes ne sont pas toujours verbalisées par les patients eux-mêmes. Bon d’abord les gens ne sont pas forcément au courant, quand ils sont inclus dans un réseau de soins palliatifs, qu’il y a une socioesthéticienne, même si on leur a dit, ils n’ont pas forcément entendu. Donc ils ne sont pas forcément au courant… donc ces attentes elles ne sont pas forcément connues par eux-mêmes, surtout s’ils n’ont pas l’habitude d’avoir accès à des soins d’esthétique. Il y a beaucoup de gens qui n’ont jamais vu une esthéticienne de leur vie, qui n’ont jamais mis les pieds dans des confidences possibles. Voilà, puis on est là aussi comme les infirmières pour briser la solitude, des fois les gens ils sont seuls chez eux, ça arrive. On va apporter un peu de réconfort, ça c’est important. D’accord. Donc vous vouliez parler des dimensions ? Oui voilà, je vais vous en parler. On va les distraire les gens, on va leur donner des sensations, on va vont avoir meilleure mine tout de suite, le maquillage ça va les embellir, ils vont se voir différemment stimuler leurs sens, parce que bon la socioesthétique aussi c’est le toucher, dès fois ils vont nous dire dans le miroir. Voilà. Et puis si les proches sont présents, ils vont arriver et dire « ohlala, oui, « oh, c’est tout frais », ou « ça, ça m’apporte de la chaleur ». Il y a l’odorat aussi qui va être stimulé, wouah ! », elles vont avoir une meilleure image d’elle-même, les proches ou même les infirmiers. Vous avec les crèmes, les produits, et puis aussi je vais arriver, je vais étaler tous mes produits, si c’est une voyez tout de suite le regard de l’autre va changer, et puis bon voilà c’est aussi le miroir, tout de suite femme elle va dire « oh, toutes ces crèmes », voilà vous voyez ? Tout ça va les sortir de leur isolement. c’est revalorisant. C’est la dignité de la personne, c’est l’identité, et c’est pour ça que je vous disais tout à l’heure que l’ergothérapie c’est un peu ça aussi, c’est retrouver une dignité, retrouver une identité. Et Pour vous, quelles sont les différences entre l’image du corps et le schéma corporel ? tout ça passe par l’image du corps évidemment. Alors ça c’est une question que je voulais vous poser ! Parce que pour moi c’est à peu près la même Du coup pensez vous qu’il y a des contextes ou des situations particulières où la question de chose. Pour moi, je ne sais pas si c’est ça, mais pour moi le schéma corporel en fait, je me dis que ces l’image du corps est vraiment mise en jeu ? personnes qui sont dans la souffrance, qui sont dans la douleur du corps… Il y a deux choses qui se produisent que j’ai remarqué. Soit elles ont fait une dissociation complète entre leur corps et leur esprit, Oui, ne serait-ce que le fait d’être en soins palliatifs, le fait de savoir, même si ce n’est pas exprimé, en fait leur corps les a lâché, c’est un objet de souffrances, de douleurs. Elles ont abandonné leur corps qui s’ils rentrent dans un réseau de soins palliatifs c’est que voilà… c’est que vous le savez vous aussi. aussi, elles l’ont laissé au corps médical, du coup le corps c’est les piqures, les soins médicaux, la Je me mets à la place de ces personnes, ils se disent qu’ils viennent de rentrer dans une autre étape. toilette faite par le personnel le matin, etc. Elles vont l’avoir abandonné, elles ont complètement Voilà. C’est souvent la dernière étape quoi. Heu donc oui oui oui, heu… le contexte, le fait de dire délaissé le corps. Voilà, donc elles sont morcelées finalement. Pour moi c’est ça le schéma corporel il qu’on est dans…, donc ça veut dire que c’est la fin, donc voilà. Et puis ce que je vous disais tout à va être morcelé, endommagé. La maladie et les soins en fait, tout le côté thérapeutique, parce que c’est l’heure, la maladie ça entraine… ça entraine des déficits sur le corps, les traitements, très lourds qui vrai que les effets secondaires sont énormes, ils sont très importants, voilà. Pour moi c’est ça, le peuvent avoir des effets secondaires délétères, même plus que délétères on va dire très très impactants schéma corporel va être complètement détruit par la maladie et les traitements. Et donc, avec la sur le corps. Donc là oui effectivement l’image du corps est mise en jeu. Alors pour la socioesthétique, socioesthétique, on va essayer d’abord de reconstituer ce corps, de le réunifier, ne serait-ce qu’en je ne sais pas si j’ai le temps de vous en parler, je ne voudrais pas être trop trop longue… massant les bras, en massant les pieds, on va essayer de le réunifier ce corps. Ils vont le ressentir, retrouver des sensations quoi, et trouver dans ce corps une source de plaisir qui était oublié : « ah, ça c’est agréable », « ah, ça c’est bien ». Je me souviens d’une patiente il y a longtemps qui m’avait dit « j’ai l’impression de réhabiter mon corps ». C’est cette sensation de le retrouver quoi. Voilà, pour moi c’est ça. Et après donc, à travers la maladie, c’est un corps souvent décharné, en soins palliatifs il y a un amaigrissement total, ou alors des gens qui ont énormément grossi –mais ça je le vois plus rarement-, et là bien sûr l’image du corps elle est négative, ils ne se regardent même plus dans un miroir. Et puis bon quand les infirmières viennent, elles se dépêchent de faire la toilette, c’est normal hein, elles font tout ce qu’elles peuvent mais elles sont prises par le temps, et donc là voilà on a plus le temps de se regarder dans un miroir et puis on en a plus envie surtout ! Donc l’image du corps elle est plutôt négative quoi. Allez-y ! Pour l’image du corps, par exemple sur les cheveux, l’alopécie souvent comme c’est souvent des gens qui ont un cancer, ils ont perdu les cheveux, ils ont perdu les poils… Il y a des effets d’amaigrissement, il y a des effets sur la texture de la peau. Heu… sur les ongles, des fois ils ont des stomies, et puis elles ne prennent plus soin d’elles, soit elles n’en ont plus la possibilité physique, soit elles sont fatiguées… Et puis la séduction n’en parlons plus, c’est tout ça, on va les aider à… on va faire des soins du visage, on va voir un effet ! On va redessiner les sourcils, on va maquiller voilà pour redonner une meilleure mine. Tout ça pour essayer de leur redonner plus de plaisir, voilà. Voilà, «regarde comme je suis devenu », « je me souviens que j’étais coquette », donc ça, le fait de D’accord. Vous me l’avez dit tout à l’heure, mais ça ne vous est jamais arrivé de travailler avec redonner… comment dire… de redonner… une image de soi meilleure, de maquiller un petit peu, de un ergothérapeute ? redonner des sensations, du confort, du plaisir. La personne à la fin du soin je vais lui dire « regardez dans le miroir », je vais la recoiffer un peu parce qu’elles sont souvent couchées, la remaquiller un petit Ah non. Alors ça justement vous me demandiez le lien, mais il n’y en a pas. Bon pour avoir travaillé peu. Et puis c’est vrai que le soin, le fait de la masser ça va stimuler la circulation sanguine, donc elles quand même en milieu médical, j’ai travaillé en coopération avec des psychologues, des diététiciennes, des kinés, des sophrologues, des sexologues… mais des ergothérapeutes peu, et pourtant ça a l’air D’accord ! Du coup, pensez-vous que des activités axées sur les soins corporels, autres que ce que effectivement important. Et puis, je pense à l’anorexie mentale, ce n’est pas le même sujet avec les vous pouvez proposer, pourraient être mises en place avec ces patients ? soins palliatifs, mais je sais qu’il y a des ergothérapeutes qui peuvent intervenir auprès des anorexiques. Chez les anorexiques justement il y a cette dissociation, pour moi, entre le corps et l’esprit, et l’ergothérapeute va permettre aussi cette réunification du corps, remettre en phase le corps et le mental. Du coup quelles pourraient être pour vous les actions d’un ergothérapeute auprès de patients en soins palliatifs ? Oui Et par qui, et de quelle manière ? Alors par qui ? Par des professionnels comme vous je pense. De quelle manière je ne sais pas, parce que je ne connais pas exactement… mais vous l’ergothérapeute pour redonner, toujours pareil hein, Alors qu’est- ce que ça pourrait être dans un soin palliatif ? Heu… bah pour moi c’est aussi… je ne sais essayer de réunifier ce corps qui est en souffrance, et puis aussi pourquoi pas des réflexologues pas exactement parce que moi je ne connais pas trop votre travail, mais bon…comment dire… peut être plantaires, dans le cadre des soins palliatifs. Quels autres professionnels aussi… Heu… Oui par développer l’autonomie ? Nous aussi notre but c’est de développer l’autonomie, avoir envie de se exemple, je connais une association […] ou vous avez des intervenants qui s’occupent de personnes remaquiller, avoir envie de se recoiffer, de se faire belle pour elle-même et pour les autres. Vous peut âgées ou malades ou atteintes de pathologies chroniques, qui axent tout sur l’activité physique adaptée. être que ce serait plus dans les gestes de la vie du quotidien, je ne sais pas trop… On reprend de l’activité physique mais bien sûr, même si on est en fauteuil, et bien on va réapprendre à utiliser son corps, faire un petit peu d’activité. Je ne sais pas moi, des personnes âgées pour qu’elles ne C’est ça oui perdent pas l’usage de leurs mains, vous voyez… L’activité corporelle, et à travers ça se sentir mieux derrière aussi. Etre mieux dans sa tête. Et aussi, je reprends la dimension sociale parce qu’on en a pas parlé, mais si vous voulez nous comme on vient de l’extérieur, heu c’est recréer un lien avec l’extérieur. Ce n’est pas le médical quoi, c’est Pour vous l’ergothérapeute aurait sa place dans la mise en place de ses activités ? recréer un lien avec l’extérieur, avec le monde des biens-portants. Peut-être que c’est ce que vous pouvez leur apporter aussi vous. C’est évident. Et puis vous voyez je n’y pensais pas parce que je n’en connais pas, mais c’est vrai qu’on en voit pas beaucoup des ergothérapeutes. Bon moi je n’ai pas une expérience non plus Oui, c’est vrai importante en soins palliatifs, mais du peu que je connaisse, je n’ai jamais croisé, même en cancérologie, des ergothérapeutes. Mais bon, comme je ne connais pas bien votre activité, je ne saurais Et voilà, avec cette reprise d’autonomie… voilà, après il y a le maintien des capacités fonctionnelles pas vous en parler mieux. aussi. Voilà, c’est certainement ce que vous faites, le maintien des relations aussi avec autrui. Et faire de la prévention aussi, éviter que ça se dégrade davantage parce qu’en fait notre rôle à tous c’est ça Comment pensez-vous qu’il pourrait prendre en compte l’image du corps dans ses activités ? aussi, c’est de maintenir le plus longtemps possible, dans de meilleures conditions possibles, et pour Est-ce qu’il y aurait des choses particulières à faire ? que la personne se sente le mieux possible. C’est que la personne se sente bien, je crois que c’est ça en soins palliatifs, c’est que elles se sentent bien. … Heu, oui alors là vous me posez un peu des colles ! Parce que comme je vous dis je ne connais pas très bien votre activité, mais ce qui est sûr c’est que vous viendriez en complément peut être pour Oui d’accord ! faciliter la vie de ces gens au quotidien… Peut-être dans leur autonomie, peut-être pour utiliser… Je ne sais pas moi, c’est peut-être plus à vous de me dire ce que vous pourriez apporter vous aux gens, en Essayer de diminuer toutes les souffrances physiques et aussi psychologiques par la même occasion. soins palliatifs, et peut être qu’après ça pourrait me donner des idées ! Qu’est-ce que vous pourriez C’est là qu’on rejoint aussi les dimensions physiques et psychologiques de nos actions. apporter vous aux gens ? C’est un peu ce que vous disiez, c’est vraiment favoriser l’autonomie de la personne, donc ça peut être par exemple : accompagner une personne qui aurait du mal à faire sa toilette, ça peut être d’aller avec elle pendant la toilette, voir ce qui va, ce qui ne va pas… Voilà, c’est peut être lui redonner un élan aussi ! Oui voilà, ou lui proposer des solutions. Voilà, parce que les gens ne savent pas toujours, ils ne sont pas toujours au courant. Mais voilà peutêtre que vous vous pouvez leur expliquer heu… comment justement arriver à mieux faire sa toilette, à mieux s’occuper d’elle, en les informant tout simplement, en leur apportant des outils. C’est le premier pas déjà. Et ensuite de leur redonner envie aussi par la même occasion. Pensez-vous qu’il y aurait des gestes ou des attitudes à avoir auprès de ces personnes par rapport à l’image du corps ? Oui, enfin pour moi en temps que socioesthéticienne, je ne sais pas si j’ai raison, mais moi ce qui me vient en premier quand vous me posez la question c’est le toucher, la façon dont on touche la personne. A mon avis c’est très important. C’est la façon dont on aborde la personne, c’est un toucher douceur. Approcher la personne avec douceur et comment dire… cette prise de contact qui est en fait créer du lien, redonner du lien. En fait c’est toute la dimension de la socioesthétique, c’est une dimension humanitaire, c’est-à-dire en soins palliatifs quand on arrive et quand on s’en va, c’est prendre la main de la personne et se toucher je pense que c’est essentiel en fait. Le toucher, c’est le lien qu’on va créer avec les personnes, un lien d’empathie, un lien d’humanité. Il a une solidarité et un toucher douceur. Pour moi c’est vraiment essentiel. Et aussi le regard, en même temps que le toucher regarder la personne dans les yeux. Je crois qu’il y a beaucoup de choses qui passent qui ne sont forcément verbalisées, qui passent par le regard et par le toucher. Pour l’ergothérapeute ça peut être ça aussi. C’est ça aussi avec l’infirmière, mais elles ont un autre rôle aussi, de soins médicaux etc. Et elles n’ont pas toujours forcément le temps d’apporter ça et souvent elles en sont frustrées d’ailleurs. Donc ça, nous, peut-être qu’on peut l’apporter. ENTRETIEN PSYCHOLOGUE Par rapport à ce que vous entendez des patients, quelles seraient les attentes principales des personnes bénéficiant de soins palliatifs ? Pouvez-vous vous présenter et présenter votre rôle au sein du service ? Pour moi ce qui me semble être le plus important, de ce qu’ils disent, ce serait la présence et la chaleur Je suis psychologue dans un réseau de soin à domicile. Mon rôle consiste à aller voir les patients après humaine, honnêtement je crois qu’il faut être assez simple dans ces moments-là, c’est-à-dire que le fait leur inclusion dans le réseau, à leur domicile, pour d’une part accompagner le patient lui-même dans qu’on s’intéresse à eux, qu’on prenne le temps d’essayer d’analyser la situation, déjà je crois que c’est son dernier chemin à vivre, soit accompagner aussi beaucoup les familles, les aidants qui sont autour, énorme. C’est un peu délicat pour moi de répondre parce que avant moi il y a eu l’inclusion, pour le voire même après le décès du patient. coup moi j’interviens après, ce qui est facilitateur, car ils ont déjà eu une réunion dans laquelle ils ont Que sont pour vous les soins palliatifs ? Pour moi les soins palliatifs sont les soins de confort et de bien-être du patient dans la dernière phase qu’il est en train de vivre et qui va l’accompagner vers la mort. Ça peut être des soins corporels, ou déjà été bien écoutés. Afin de favoriser la qualité de vie des personnes, quelles seraient les dimensions à prendre en compte ? physiques, ainsi que psychologiques et moraux, y compris de la famille. C’est une prise en charge Depuis peu, nous avons une socioesthéticienne au sein du réseau qui intervient, et j’ai vu que cette globale, c’est pour ça qu’au réseau je trouve pertinent qu’il y ait plusieurs types de professionnels pour approche était vraiment très importante dans ce rapport au corps qui était déchirant, et du coup elle a justement intervenir selon les besoins, parce qu’il y a toujours des priorités, auprès du patient et de vraiment apporté quelque chose aux patients. En soins palliatifs elle n’a pas besoin d’y intervenir très l’entourage, car la fin de vie ça se vit aussi pour l’entourage. régulièrement, mais des fois une intervention peut faire énormément tant au patient qu’à sa famille. Il Comment s’organise la prise en charge des patients au sein de votre service ? est évident aussi que le confort matériel est quand-même important, quand il y a une perfusion, ou l’arrêt des perfusions, tout ça demande un confort matériel qui me semble également important à mettre L’inclusion se fait, le psychologue n’y participe jamais, avec le médecin et l’infirmière du réseau, ainsi en place. Le soutien moral du patient et surtout de la famille, je trouve aussi que c’est très important de que le médecin traitant, la famille. Tout le monde se réunit un moment pour déterminer que le patient les soutenir. est inclus dans le réseau. Et lors de cette inclusion, toutes les problématiques essayent d’être abordées, et si à ce moment-là il y a une souffrance psychique –là je vous parle pour moi- qui émane du patient ou de sa famille, l’infirmière propose éventuellement que je prenne contact avec aux, et m’avertit après Pensez-vous que l’image du corps est une dimension favorisant la qualité de vie des personnes, et de quelle manière ? en me donnant les coordonnées, en me faisant un petit résumé de la situation, après moi je les contacte En soin palliatif, elle y est, mais en fait dans notre réseau nous nous occupons des soins palliatifs mais afin de fixer un rendez-vous pour que je vienne chez eux. aussi d’autres pathologies qui sont des maladies dégénératives, où là j’ai vu que l’importance de De ce fait, les rôles des différents professionnels sont définis ? l’image du corps était encore plus présente que pour les personnes en soins palliatifs. Je parle de toutes les personnes qui ont des cancers, qui ont des maladies chroniques parfois très lourdes, elles sont Oui, ils sont assez définis, et ce qui régule le tout ça reste l’infirmière coordonnatrice du réseau et le encore plus réceptives à tout ce qui porte autour du corporel et de l’image qu’on a de son corps. Au médecin. C’est elles qui analysent, en fonction de l’analyse globale de la situation, ce qui est de l’ordre niveau du patient qui est en soins palliatifs, c’est important, mais ça l’est encore plus pour la famille il des priorités, ça peut être un aménagement matériel, souvent on met en place des matelas à air, tout ce me semble, de voir aussi un corps qui réagit mieux, qui est beaucoup plus dans la vie j’ai envie de dire, qu’il y a besoin pour le confort physique, et après si effectivement elles voient il y a autre chose ça me semble important. d’associé, elles en parlent à ce moment-là, si elles voient que les personnes sont plutôt ouvertes pour ce type d’intervention, à ce moment- là elles m’en parlent à moi, à la socioesthéticienne, la sophrologue, etc. Quelle différence faites-vous entre image du corps et schéma corporel ? Ah, alors la différence entre image du corps et schéma corporel… c’est pas évident votre question ! On Ça va être très en lien avec ce que je vois de l’ergothérapeute qui travaille où je suis. Etant donné aurait tendance à les associer pourtant j’y vois quand même une différence. L’image du corps je qu’elle y passe très peu de temps, elle s’intéresse essentiellement à tout le matériel qui peut être aidant pense… je réfléchis ! … Je crois que le schéma corporel on l’a uniquement pour soi alors que l’image pour la personne qui se dégrade. Il me semble qu’en soins palliatifs, étant donné qu’il y a une du corps finalement elle est aussi référente avec ce que nous dit l’entourage. C’est la notion que je dégradation, ça en fait partie pour un confort, pour un mieux être. Egalement tout ce qui est de l’ordre, verrais qui est un peu différente, même si pour les patients et moi aussi on mélange un peu les deux. en soins palliatifs peut être moins, mais en lien aussi avec la psychomotricienne, de la coordination Autant le schéma corporel est très propre à soi, autant l’image du corps elle est réglée aussi selon le entre le psychique et le corps. regard des autres. Pensez-vous que des activités axées sur les soins corporels pourraient être proposées, et de quelle Elle est influencée par le lien social ? manière ? Exactement, par les représentations sociales aussi pour le coup, il y a pas mal de choses autour. Oui, pour trouver des techniques pour faciliter à mon avis les difficultés qu’on peut rencontrer pour les gestes quotidiens comme la toilette, le repas, la mise aux WC aussi des fois c’est toute une aventure, Dans quels contextes pensez-vous que l’image du corps est mise en jeu ? Quand il y a une forte dégradation du corps, une personne en soins palliatifs qui a vraiment un corps qui est complètement changé par rapport à ce qu’elle a été, les changements peuvent d’ailleurs être très brutaux, ça peut aller très vite, là ça me semble très important. Ça me semble très présent surtout au autant pour les personnes que pour l’entourage d’ailleurs. C’est-à-dire que finalement l’entourage ne sait pas trop quels gestes et techniques pourraient être utilisés autant pour eux que pour le patient qui est des fois en difficulté. Là je pense qu’il peut y avoir un gros travail à faire. Quelles sont, selon vous, les différentes dimensions des soins corporels ? niveau des femmes, car pour le coup l’image de soi est fortement liée aux représentations féminines. Tout ce qui est aussi déformations du corps, quand on a un corps qui change mais aussi qui se déforme Il y a la toilette, les préventions d’escarres, tout ce qui est toucher-massages, la gestion de la douleur beaucoup, qui empêche l’autonomie de chacun, quand on commence à ne plus pouvoir s’alimenter, aussi, qui peut se faire par les touchers, des soins de nursing quand il y a des soins importants. Il y a les aller aux toilettes, ça devient aussi très important. changements de positions aussi, ça me semble important. Autant en institution c’est quelque chose que les soignants connaissent, autant au domicile c’est parfois la grande découverte. C’est aussi tout De ce fait, c’est une notion que vous prenez en compte dans votre pratique ? Oui, tout à fait. J’y tiens beaucoup parce qu’à chaque fois on essaye de prendre en compte la globalité de la personne et pour le coup on est obligé de voir ce phénomène là aussi. La souffrance morale peut venir de là aussi. Ça fait partie des thèmes que j’essaye d’aborder avec tout le monde. Vous arrive-t-il de travailler avec un ergothérapeute au sein de votre réseau ? simplement se déplacer, aller d’un endroit à l’autre, pouvoir véhiculer en sécurité dans un petit espace qui est la maison. L’image du corps est aussi pas mal atteinte pour tout ce qui est en rapport avec l’incontinence, que moi j’aborde, mais qui est parfois beaucoup plus difficile, beaucoup plus intime, ça peut être aussi ce genre de choses là qui peuvent être en rapport. Du coup, pensez vous que l’ergothérapeute pourrait avoir sa place dans la mise en place des ces activités à domicile ? Au sein du réseau, non, parce qu’il n’y a pas d’ergothérapeute, c’est très difficile pour en trouver là où on est. En revanche dans mon autre activité, je suis en contact avec une ergothérapeute, qui est dans l’institution ou je travaille, dans un EHPAD. Elle y intervient une journée par semaine, donc il arrive qu’on se croise. Quelles pourraient être selon vous les actions de l’ergothérapeute auprès des patients en soins palliatifs ? Oui je pense. En terme de guidage ça peut être important, je veux dire enseigner les bonnes pratiques, ou du moins enseigner quelques pratiques qui peuvent être facilitantes pour tout le monde oui. Comment pensez-vous que l’image du corps pourrait être prise en compte dans des activités de soins corporels ? Je pense que ça se passe dans le toucher, et puis quand on passe un moment intime avec une personne, dans le déshabillage, faire petit à petit, passer par le visage dans un premier temps, ou le haut du corps… Des choses comme ça pour permettre une intimité qui se dévoile peu à peu. Oui, dans tout ce qui passe dans le toucher, dans le respect de la personne aussi, voilà il y a toute une approche à avoir qui me semble importante et qui valorise pour le coup l’image aussi du corps. Redécouvrir son corps, oser le redécouvrir quand on est en fin dans vie, c’est quand même une aventure. Donc effectivement à mon sens le thérapeute va être là, que ce soit l’ergothérapeute ou un autre d’ailleurs, et va progressivement, avec douceur, parce que ce sont des corps qui sont quand même douloureux et meurtris, revenir à du toucher, du regard, un effleurement de peau. Néanmoins, tout dépend du rapport qu’on a soi-même au toucher et à ce genre de choses là, c’est vrai qu’il y a des personnes qui sont qui sont en contact et qui apprécie, et d’autre qui effectivement ont plus de difficultés, le tout c’est d’essayer de se sentir à l’aise avec ce qu’on est. Le toucher, s’il est amené avec vraiment bonne intention il est apprécié. Ce sont des choses comme ça qui font qu’à mon avis l’image de soi et l’image du corps se réapprend. De ce fait, chaque personne, chaque professionnel qui interviendrait auprès des personnes en soins palliatifs aurait un rôle à jouer pour favoriser l’image du corps ? Tout à fait, je pense que chacun dans sa partie peut le faire. Si on y est sensible, ça peut être vraiment quelque chose qui peut être très aidant autant pour le patient lui-même que pour la famille autour, qui a besoin aussi de ce soutien corporel. Souvent ça fait très peur le corps, l’image du corps et ce qu’il renvoie, surtout quand il est dans ces moments-là pas forcément le plus regardable. Le prendre en compte, ça rassure un peu tout le monde, ça joue beaucoup. Du coup pour vous la prise en compte de la famille par les différents professionnels c’est quelque chose d’important ? Oui, et puis c’est secondaire, parce que si la famille voit effectivement qu’on est dans de l’attention auprès du patient, souvent rien que ça c’est déjà énorme. De voir aussi leurs difficultés à eux, de supporter, d’accompagner jusqu’au bout une personne en soins palliatifs qui reste à domicile. Moi je vous parle vraiment du domicile, parce qu’en institution ça reste quand même un peu différent dans le sens où les familles sont souvent un peu plus éloignées, le rapport n’est pas le même. ENTRETIEN KINE Pouvez-vous vous présenter et présenter votre rôle au sein du service de soins palliatifs ? Oui, ils sont bien définis, et en même temps, moi je parle pour moi, mais je pense que le kiné est celui qui est le plus au milieu de l’équipe. Donc moi je travaille beaucoup avec les infirmiers et les aidessoignants. C’est réciproque, on s’aide mutuellement, on travaille très souvent ensemble. Ici on a 10 patients, et donc on a un mi-temps de kiné, ce qui n’est pas beaucoup quand même, avec un travail qui est très irrégulier, donc des périodes où il y a beaucoup de patients et d’autres où il y en a Ça arrive que pour des prises en charge vous soyez deux par exemple ? moins. Ce sont des patients qui sont très précaires, très fragiles, donc d’une journée à l’autre ça peut Oui, pour des levers, parce que souvent le problème qu’il y a ici c’est qu’il y a beaucoup de matériel, changer. Le kiné a un rôle très important dans l’équipe et il est vraiment intégré dans l’équipe donc il y a des sondes, des seringues, des PCA, beaucoup d’entraves, et du coup c’est parfois un peu soignante, plus que dans d’autres services. difficile quand on est tout seul. Moi je fais les premiers levers avec les aides-soignantes, et après quand Que sont pour vous les soins palliatifs ? Souvent les gens imaginent que les soins palliatifs ce sont vraiment les derniers moments de la vie, alors qu’en fait ce n’est pas tout à fait ça. Ça peut l’être, pour beaucoup malheureusement ça l’est. Mais après on a des gens qui viennent en amont pour des problèmes de douleurs, des prises en charge de il y a des marches un peu difficiles, pour aider… Il faut vraiment avoir un travail d’équipe, moi c’est ce que j’aime. Selon vous, quelles seraient les attentes ou demandes principales des personnes hospitalisées dans votre service ? douleurs rebelles, des hospitalisations de répit aussi pour la famille ou pour d’autres services. Et après Le plus souvent ce sont des massages, les membres inférieurs et le dos en particulier, et après la c’est toujours un accompagnement parce que généralement il n’y a plus vraiment de traitement curatifs, mobilisation, parce que souvent ce sont des personnes qui ne bougent pas, qui sont un peu ankylosées, mais sachant qu’il y a quand-même d’autres traitements, tous les traitements à visée de confort. Par donc aiment bien se sentir bouger, revivre un peu leurs muscles. Souvent ce sont des gens qui sortent exemple, si quelqu’un a une infection, on va la traiter, même s’il est en soins palliatifs. Souvent les d’hospitalisation ailleurs, qui ont eu des traitements très lourds, et qui ont une image d’un corps un peu gens croient qu’en soins palliatifs c’est quand on ne fait plus rien, alors que ce n’est pas du tout ça. morcelé. Du coup nous on leur permet de retrouver un peu d’intégrité, un toucher agréable… Ce sont Du coup, comment s’organise la prise en charge des patients au sein du service ? Normalement, les kinésithérapeutes travaillent sur prescription médicale. Enfin c’est obligatoire. Donc on a une feuille qui est un peu particulière, il n’est pas comme dans les autres services. Donc pour les prescriptions, il y a une feuille où tous les intervenants sont marqués, et le médecin cochent le des gens qui ont souffert beaucoup, qui sont parfois un peu dans la crainte du toucher, et justement le massage ça permet de retrouver un peu d’unicité dans le corps Du coup, afin de favoriser la qualité de vie de ces personnes, quelles seraient les différentes dimensions à prendre en compte ? psychologue, le kinésithérapeute, etc. Donc soit un avis kiné pour savoir éventuellement ce que j’en Souvent les demandes c’est de se lever, de marcher. Ce n’est pas toujours possible ni facile, donc après pense, soit une prescription spécifique pour un soin particulier, par exemple de la kiné respiratoire, du quand c’est possible on le fait, ne serait-ce que de s’asseoir au bord du lit, de se mettre un peu debout, drainage lymphatique, voilà, une prescription qui est vraiment ciblée. Et sinon c’est un avis kiné, et de faire quelques pas, ça peut s’arrêter à ça. Ça peut aussi être marcher un peu plus, par exemple là en moi je vois ce que je peux faire avec le patient, sachant que ce qui est un peu particulier, c’est qu’on ce moment on a une petite dame âgée qui est arrivée avec un gros problème de hanche, très n’oblige jamais les gens à participer, c’est laisser le choix du patient. Moi je lui dis ce que l’on peut douloureuse, on ne pouvait pas la toucher, et en fait maintenant elle n’a plus mal, donc on l’a assise au faire, et puis lui il choisit. Si il dit non, je n’insiste pas, je lui demande si je peux repasser, voilà. C’est bord du lit, et elle remarche. Elle par contre qui est arrivée étiquetée « soins palliatifs » va repartir en un service où le patient choisit un petit peu les soins qu’il a envie d’avoir, les heures des repas, les rééducation, parce qu’elle remarche, après ça reste précaire, ce sera peut être pour un temps donné. heures des toilettes aussi, ce qui ne se fait pas du tout ailleurs. Mais au moins elle aura eu la joie de remarcher un peu. Souvent ça se passe comme ça, même des De ce fait, les rôles des différents professionnels au sein du service sont bien définis ? personnes qui sont en fin de vie, qui ont envie ne serait-ce que de faire un mètre du lit à la fenêtre Du coup pour vous l’image du corps c’est vraiment une dimension qui favorise leur qualité de vie Il n’y a pas d’ergothérapeute malheureusement. J’ai quand même fait appel, ça m’est arrivé d’appeler au sein du service ? l’ergo du service de rééducation. Je pense oui. Après il y a tout le reste autour. Il y a les infirmières et les aides-soignants avec qui on Du coup pour vous, quelles pourraient être les actions d’un ergothérapeute dans votre service ? travaille tout le temps, mais après il y a aussi la socioesthéticienne avec qui on échange beaucoup, qui Que pourrait-il apporter ? n’apporte pas la même chose que moi mais dans un autre domaine. On arrive à se compléter, et aussi avec la sophrologue, avec qui on s’arrange souvent. Par exemple moi je commence à faire mon Ça pourrait apporter beaucoup au niveau du positionnement des patients, parce que nous on a des massage de détente, et puis elle elle vient après faire sa séance de sophrologie, et donc du coup la connaissances, mais elles sont limitées par rapport aux vôtres quand même… Vous savez des gens qui personne qui a eu le massage, et puis la séance de sophro après, ça fait une continuité, ça prépare. C’est souffrent dans des fauteuils… oui, beaucoup au niveau de l’installation et au niveau des repas très intéressant de le faire justement, de s’entendre pour arranger nos horaires. C’est très très bien. également, le matériel, les gens qui ont des déficits, qu’ils puissent manger seuls, etc. Quelles différences faites-vous entre l’image du corps et le schéma corporel ? Pensez-vous que des activités axées sur les soins corporels pourraient être proposées par l’ergothérapeute ? Alors… à mon avis ce n’est pas la même chose. Ça se rejoint quand même, parce que le schéma corporel c’est l’idée qu’on se fait de soi-même, de son corps dans l’espace… Et l’image corporelle, à mon avis c’est plus extérieur, c’est l’image aussi qu’on donne, ce n’est pas seulement l’image qu’on a de soi, c’est l’image qu’on donne aux autres. Et souvent justement des personnes qui ont subi des Oui bien sûr. … Du coup, quand on parle des soins corporels, quelles seraient pour vous les différentes composantes ? traitements lourds avec des chimiothérapies qui leur ont fait perdre les cheveux, qui altèrent les ongles, qui entrainent amaigrissement, les opérations qui sont un peu mutilantes parfois. Ce sont des gens qui Il y a la socioesthéticienne… après ici on n’a pas… tout le monde fait plus ou moins du massage, ont du mal à se regarder, qui ont du mal à supporter le regard des autres aussi. Ce qu’on entend souvent souvent en prévention de décubitus, tout ça. Même la nuit ça leur arrive de faire des massages pour dire ici c’est « vous ne me jugez pas, vous ne me regardez pas comme je suis ». Voilà, essayer de voir apaiser quelqu’un. Donc je pense que oui la partie massage pourrait être plus développée peut être. la personne pas telle qu’elle est, mais essayer d’imaginer comment elle était, de la regarder avec empathie, de les toucher, de leur redonner justement le sentiment que l’on peut les regarder, qu’on peut Pensez-vous que la toilette par exemple peut rentrer dans les soins corporels ? les toucher, qu’ils ne sont pas repoussants. Aussi oui. Y-a-t-il des contextes où l’image du corps est plus mise en jeu qu’à d’autres ? Moi je n’ai pas eu souvent de soucis. Je fais attention à préserver la pudeur des gens, donc quand je fais des massages dans le lit, je déplace le drap de façon à ce qu’ils soient quand même toujours couverts. Après moi j’ai remarqué pour des femmes qui ont des cancers du sein, elles mettent souvent leurs bras devant… Mais après je pense qu’avec nous elles sont plus libres, on ne les regarde pas comme ça. Du coup, vous prenez vraiment en compte cette notion dans votre pratique ! Comment pensez-vous que l’image du corps peut être prise en compte dans les activités de soins corporels ? Je pense qu’ici le personnel prend le temps qu’il faut parce qu’il y a un infirmier et un aide- soignant pour 5 patients. Ce qui est bien, mais ce n’est pas toujours évident non plus parce que ça dépend des patients qu’il y a aussi. Donc je pense qu’au niveau de la toilette ici on fait très attention au patient, à justement quand on peut l’amener dans la salle de bain, que ce soit lui qui fasse le maximum. Souvent, ce sont des gens qui aiment bien faire eux-mêmes parce qu’ils n’aiment pas trop qu’on les voit, ou qui Oui, absolument veulent garder leur autonomie jusqu’au bout, parce qu’on a quand-même des gens jeunes. Je pense qu’ici quand-même c’est bien pris en compte. Je pense qu’on essaye justement de préserver cette Vous arrive-t-il de travailler dans le service avec un ergothérapeute ? dimension-là. Du coup, comment pensez-vous que l’ergothérapeute pourrait traiter de la notion d’image du corps dans ces activités ? Qu’apporterait-il de plus ? Je ne pense pas que ça empiéterait sur le travail des aides-soignants, ce n’est pas la même chose. Moi j’ai travaillé beaucoup en gériatrie avec des ergos, et donc je pense qu’il y a déjà un côté bilan, savoir ce que fait la personne. Et puis j’avais remarqué aussi que l’ergothérapeute va prendre une heure pour faire une toilette, alors que les aides-soignants n’auront pas une heure pour faire une toilette. Ici c’est un service un peu particulier, parce que ça peut arriver qu’ils prennent une heure pour faire une toilette. Mais je pense que les ergothérapeutes auraient leur place en soins palliatifs ! Largement. Je pense que oui. C’est vrai qu’il y a des jours ici où c’est difficile, parce que tout le monde sonne, tout le monde est mal, et donc ce n’est pas toujours fait comme on voudrait que ce soit fait. Et en plus l’avantage et la difficulté d’ici, c’est que la personne va sonner pour dire « maintenant je veux bien la toilette », ce n’est pas comme ailleurs où la toilette est faite tout de suite. Là si la personne est fatiguée ou si elle dort, on ne va pas la réveiller, on va la laisser dormir. Donc la toilette peut être faite à 11h du matin, à midi, ou l’après-midi. Donc c’est sûr que après si le moment est difficile, ce sera plus vite fait, alors qu’un ergothérapeute il prendra plus le temps, avec peut-être plus d’apprentissages, de redonner certains gestes aux patients qui les ont perdus lors de l’hospitalisation. Je vois que souvent on leur fait la toilette alors que d’être plus autonome, ça favorise aussi l’image du corps. TABLEAUX D’ANALYSE DES ENTRETIENS Question 1 : Pouvez-vous vous présenter et présenter votre rôle auprès des personnes en soins palliatifs ? Professionnels interrogés Eléments de réponse Analyse descriptive comparée Présentation du professionnel ERGO 1 : « je fais tout ce que ferait un ergothérapeute « standard » » Ergothérapeutes ERGO 2 : « en tant qu’ergo » ERGO 3 : « je suis ergothérapeute […] j’ai fait le DU soins palliatifs » SOCIO-E 1 : « je suis socioesthéticienne, j’ai fait une école avec la certification » Socio esthéticiennes Psychologue Kinésithérapeute SOCIO-E 2 : « nous les socioesthéticiennes en fait on est déjà esthéticiennes à la base, et on a un diplôme de socioesthétique, on a fait une formation complémentaire pour pouvoir vraiment avoir une approche psychologique de la personne fragilisée » « je suis psychologue » Sept professionnels travaillant auprès de personnes en soins palliatifs, avec 4 catégories différentes Chaque professionnel énonce son rôle. Les socioesthéticiennes ont plus détaillé leur formation que les autres professionnels. ERGO 3 est le seul des sept professionnels à avoir fait une formation complémentaire « on a un mi-temps de kiné » Présentation de la structure ERGO 1 : « hôpital » Ergothérapeutes Socio esthéticiennes Psychologue Kinésithérapeute ERGO 2 : / ERGO 3 : « un Soins de Suite de Rééducation et de Réadaptation […] on a dis Lits Identifiés de Soins Palliatifs » SOCIO-E 1 : « je suis à l’USP, à la demande de l’équipe mobile de soins palliatifs, et aussi en permanence fixe en oncologie » SOCIO-E 2 : « une équipe dans un réseau de soins à domicile » « réseau de soins à domicile » « ici on a dix patients » Deux professionnels travaillent à domicile et cinq en structures Deux professionnels ne précisent pas le type de service dans lequel ils travaillent Les trois ergothérapeutes travaillent en structure Présentation du rôle ERGO 1 : positionnement / adaptations / aides techniques : « positionnement par rapport à un handicap, une douleur […] aussi du positionnement à visée pas corrective mais posturale » « je fais aussi pas mal d’adaptations » « ça peut être des aménagements de domicile, de la mise en place de fauteuil roulant » « voilà en gros, pas mal d’aides techniques » Ergothérapeutes ERGO 2 : positionnement / adaptations / aides techniques : « s’il y a nécessité de matelas pour le traitement des escarres » « des aides à la marche » « donc on s’occupe de tout ce qui est environnement, chaise garderobe si nécessaire » Activités autour des AVQ : « tout ce qu’ils font en autonomie » ERGO 3 : positionnement / adaptations / aides techniques : « beaucoup d’installation : recherche de positions antalgiques, travail sur les postures » Activités autour des AVQ : « sur la façon de réaliser les transferts, de se mobiliser » « des ateliers cuisine » Ateliers de groupe : « je fais des ateliers de mandalas, je fais des ateliers cuisine, je fais des ateliers de danse en position assise » SOCIO-E 1 : image de soi / image du corps : « je travaille autour de l’image de soi, de l’altération de l’image, du regard que l’on a sur soi » écoute : « il y a aussi l’écoute à travers ce que l’on fait » « c’est de l’accompagnement » Socio esthéticiennes Psychologue Kinésithérapeute SOCIO-E 2 : soins de beauté : « on va faire des soins de beauté, c’est des soins de visage, des mains, des manucures » détente / bien-être : « des massages relaxants de tout le corps » écoute : « écouter les gens, […] accueillir les mots du corps » désir : « redonner […] le désir de s’occuper d’eux et puis de redonner des désirs », « réactiver un peu le désir de vie » média : « la socioesthétique c’est un peu comme l’ergothérapie, […] on va utiliser l’esthétique comme un outil pour la prise en charge du patient » Accompagner le patient : « accompagner le patient lui-même dans son dernier chemin à vivre » Soutenir les proches : « accompagner aussi beaucoup les familles, les aidants qui sont autour, voire même après le décès du patient » / La kinésithérapeute est le seul professionnel qui n’a pas expliqué son rôle Le rôle de l’ergothérapeute est différent suivant les structures, mais le positionnement et les aides techniques sont des composantes qui reviennent systématiquement Certaines différences existent également dans la présentation du rôle de la socioesthéticienne SOCIO-E 2 a émis un parallèle entre sa profession et celle d’ergothérapeute par l’utilisation d’un média pour le soin Question 2 : Comment définiriez-vous les soins palliatifs ? Professionnels interrogés Eléments de réponse Analyse descriptive comparée ERGO 1 : « ce n’est pas forcément des gens qui vont mourir » Ergothérapeutes ERGO 2 : « plus de soins curatifs » « soins de confort » « ce n’est pas obligatoirement une fin de vie, ça peut durer deux ans » ERGO 3 : « il n’y a pas de guérison possible » « soins de confort » SOCIO-E 1 : « qui ne sont plus à visée curative » « soins de confort » « soins d’accompagnement » Socio esthéticiennes Psychologue Kinésithérapeute SOCIO-E 2 : « c’est ce qui existe quand on a tout essayé » « il y a des gens qui sont inclus dans un réseau de soins palliatifs depuis longtemps » « c’est toute une chaine de personnes qui sont mises autour de la personne pour la prendre en charge dans sa globalité » « il y a cette notion d’accompagnement » « soins de confort et de bien être du patient » « prise en charge globale » « accompagner » « il n’y a plus vraiment de traitement curatif » « traitements à visée de confort » « souvent les gens imaginent que les soins palliatifs ce sont les derniers moments de la vie, alors qu’en fait ce n’est pas tout à fait ça » « c’est toujours un accompagnement » Différents éléments de la définition ressortent chez les professionnels : - Pas de guérison - Soins de confort - Pas forcément une fin de vie - Prise en charge holistique - Accompagnement La composante d’accompagnement n’a été énoncée par aucun des ergothérapeutes. La notion de prise en charge holistique est ressortie uniquement chez les professionnels travaillant dans le réseau de soins à domicile. Question 3 : Comment s’organise la prise en charge des patients au sein de votre service Professionnels interrogés Eléments de réponse Analyse descriptive comparée ERGO 1 : « on travaille beaucoup en pluridisciplinarité » « il y a l’équipe mobile de soins palliatifs […] qui se déplace dans tout l’hôpital » « c’est la psychologue qui me demande d’intervenir » ERGO 2 : « nous avons une équipe pluridisciplinaire très complète » « « orthophoniste ponctuellement », « il y a également une coiffeuse qui vient, ainsi qu’une esthéticienne », « il y a également un service de bénévoles en soins palliatifs qui se déplacent à la demande », « de plus […] une religieuse peut accompagner les personnes qui le souhaitent » Ergothérapeutes ERGO 3 : « j’ai régulièrement des prescriptions médicales », « moi je suis souvent alertée par mes collègues ou par une prescription » SOCIO-E 1 : « je passe toujours par l’équipe soignante partout où j’interviens », « ça peut être à la demande de la famille aussi » Socio esthéticiennes SOCIO-E 2 : « c’est toujours le personnel médical […] qui me contacte par mail », « la demande peut venir des patients eux-mêmes, une fois que je les connais » Trois grandes dimensions de la prise en charge sont identifiées par les professionnels : - La pluridisciplinarité - La présence d’intervenants extérieurs - La hiérarchisation Les deux socioesthéticiennes ne mettent pas en avant la composante pluridisciplinaire Seuls deux ergothérapeutes notent la présence des intervenants extérieurs. « tout le monde se réunit » Psychologue « il faut vraiment avoir un travail d’équipe Kinésithérapeute Question 4 : Les rôles des différents professionnels sont-ils bien définis au sein du service ? Professionnels interrogés Ergothérapeutes Eléments de réponse ERGO 1 : / ERGO 2 : / ERGO 3 : « on travaille régulièrement ensemble avec les kinés » SOCIO-E 1 : « je suis seule » Socio esthéticiennes Psychologue Kinésithérapeute Analyse descriptive comparée SOCIO-E 2 : « on ne fait que se croiser » « oui, ils sont assez définis » « je travaille avec les aides soignantes » « je travaille avec les infirmiers » Tous les professionnels interrogés identifient bien les rôles des autres professionnels. ERGO 3 et la kinésithérapeute signalent travailler en collaboration avec d’autres professionnels, au contraire des deux socioesthéticiennes qui travaillent seules. Question 5 : Selon vous, quelles seraient les attentes ou demandes principales d’une personne en soins palliatifs ? Professionnels interrogés Eléments de réponse ERGO 1 : « leur attente principale est la constitution de leur projet, quel qu’il soit » « je trouve que la question pertinente en soins palliatifs c’est « qu’est ce que vous souhaitez ? » » Ergothérapeutes ERGO 2 : « soulager la douleur, qu’elle soit physique ou morale » « la posture d’écoute de la part des soignants » ERGO 3 : « le confort et la non douleur » « derrière les douleurs, il y a la douleur psychique », anxiété « par rapport à leur situation de fin de vie, à leur perte d’autonomie, de devoir demander de l’aide, d’être tributaire de quelqu’un pour des choses qu’elles faisaient seules » « elles ne vont pas forcément avoir la demande » SOCIO-E 1 : « du bien être, du confort » « restaurer l’image » Socio esthéticiennes Psychologue Kinésithérapeute SOCIO-E 2 : « améliorer l’estime de soi » « les attentes ne sont pas toujours verbalisées par les patients eux-mêmes » « la présence et la chaleur humaine » « personnes qui aiment bien se sentir bouger, revivre un peu leurs muscles » « image d’un corps un peu morcelé » Analyse descriptive comparée Plusieurs attentes sont énoncées : - La constitution du projet de fin de vie - La gestion de la douleur physique - La gestion de la souffrance psychologique - La posture d’écoute des soignants - Le respect des volontés du patient ERGO 1 est le seul à parler de projet de fin de vie et de respect des volontés de la personne. ERGO 3 et SOCIO-E 2 nous disent que ces attentes ou besoins ne sont pas toujours verbalisés. La prise en compte de la famille n’est énoncée par aucun professionnel. Question 6 : Afin de favoriser leur qualité de vie, quelles seraient les dimensions à prendre en compte ? Professionnels interrogés Eléments de réponse ERGO 1 : / ERGO 2 : « prise en charge de la douleur » « l’écoute » Ergothérapeutes ERGO 3 : « leur confort » « maintenir leur autonomie » « les relations sociales aussi, leur permettre d’être en lien avec les autres, de ne pas être isolé » SOCIO-E 1 : / Socio esthéticiennes Psychologue Kinésithérapeute SOCIO-E 2 : « stimuler leurs sens » « « on est là aussi comme les infirmières pour briser la solitude », « tout ça va les sortir de leur isolement » « confort matériel » « soutien moral du patient et surtout de sa famille » socioesthétique « cette approche était vraiment très importante dans ce rapport au corps qui était déchirant » « se lever, de marcher » Analyse descriptive comparée Cinq des six dimensions de la qualité de vie énoncées par AARONSON se retrouvent ici : - Les symptômes pathologiques et effets secondaires des traitements - L’état fonctionnel - La détresse psychologique - Les interactions sociales - La sexualité et l’image corporelle La satisfaction par rapport à la prise en charge n’est exprimée par aucun des professionnels La dimension d’image corporelle n’est émise que par la psychologue, lorsqu’elle parlait de la socioesthétique. La kinésithérapeute a fait uniquement ressortir l’état fonctionnel Question 7 : Pensez-vous que l’image du corps est une dimension impactant sur la qualité de vie ? Professionnels interrogés Eléments de réponse ERGO 1 : « dans ce que je vois non » « « l’image du corps, pour des patients qui ne sont pas loin de mourir […] la question ne se pose même pas » « j’ai peut-être pas le bon abord » « dans un vrai service de soins palliatifs peut-être plus […] parce que les professionnels connaissent bien les patients » Ergothérapeutes Socio esthéticiennes Psychologue Kinésithérapeute ERGO 2 : « oui moi j’y crois » Analyse descriptive comparée ERGO 1 est le seul professionnel qui n’identifie pas l’image du corps comme influençant la qualité de vie, mais il nuance en notant l’importance structurelle sur la prise en charge. ERGO 3 : « si elles perdent en autonomie et qu’elles n’arrivent plus à se coiffer comme elles le souhaitent […] ça impacte sur leur sortie de la chambre » SOCIO-E 1 : « oui bien sûr » ERGO 3 justifie cet impact par les répercussions que l’image du corps a sur l’autonomie de la personne dans les activités de soins corporels, et son retentissement sur les relations sociales. SOCIO-E 2 : « absolument » La psychologue met en avant que cette notion influe également sur la qualité de vie de la famille. « ça l’est encore plus pour la famille » « je pense oui » Question 8 : Selon vous, quelle est la différence entre l’image du corps et le schéma corporel ? Professionnels interrogés Eléments de réponse Analyse descriptive comparée ERGO 1 : « le schéma corporel est plus analytique » « l’image du corps correspond plus au vécu » « l’image du corps est plus subjective » Ergothérapeutes ERGO 2 : « le schéma corporel est plus dû à une dynamique cognitive on va dire, le côté proprioceptif » image du corps « c’est l’image que l’on renvoie » ERGO 3 : schéma corporel « c’est la position du corps dans l’espace » image du corps « c’est vraiment les soins d’apparence » SOCIO-E 1 : « le schéma corporel c’est comment on perçoit le corps » « l’image de soi c’est ce que nous renvoie le miroir » Socio esthéticiennes Psychologue Kinésithérapeute SOCIO-E 2 : « pour moi c’est à peu près la même chose » « le schéma corporel va être morcelé, endommagé » image du corps « ils ne se regardent même plus dans un miroir » « le regard de l’autre va changer » « le schéma corporel on l’a uniquement pour soi », « le schéma corporel est très propre à soi » image du corps « par les représentations sociales aussi du coup » « « l’image du corps finalement elle est aussi référente avec ce que nous dit l’entourage », « l’image du corps elle est réglée aussi selon le regard des autres » schéma corporel : « c’est l’idée que l’on se fait […] de son corps dans l’espace » « c’est l’idée que l’on se fait de soi- même » image du corps « c’est plus extérieur », « ce sont des gens qui ont du mal à se regarder » « c’est l’image que l’on donne aux autres », « ce sont des gens qui ont du mal à supporter le regard des autres » Des différences entre schéma corporel et image du corps sont identifiées par tous les professionnels. Le schéma corporel : - Correspond à la proprioception ( les trois ergothérapeutes et la kinésithérapeute) - Est interne à la personne (tous les professionnels sauf les trois ergothérapeutes) L’image du corps : - Est liée aux normes et représentations sociales - Est impactée par les relations sociales et affectives ERGO 1 nous dit également qu’elle est subjective et en lien avec l’histoire de vie. Cependant, la différence entre image du corps et image de soi ne semble pas claire pour SOCIO-E 1 Question 9 : Pensez-vous qu’il existe des situations / contextes particuliers ou l’image du corps est particulièrement mise en jeu ? Professionnels interrogés Eléments de réponse ERGO 1 : / Ergothérapeutes ERGO 2 : « il y en a qui n’aiment pas s’imaginer, se voir comme grabataire » ERGO 3 : « dès qu’il s’agit d’être en groupe, avec d’autres patients […] et puis par rapport aux familles » SOCIO-E 1 : / Socio esthéticiennes Psychologue Kinésithérapeute SOCIO-E 2 : « la maladie ça entraine des déficits sur le corps, les traitements, très lourds […] donc là oui effectivement l’image du corps est mise en jeu » « quand on commence à ne plus pouvoir s’alimenter, aller aux toilettes » « moi je n’ai pas eu souvent de soucis » Analyse descriptive comparée Quelques situations sont identifiées par les professionnels : - Les relations sociales (ERGO 3) - Les soins corporels (ERGO 2, psychologue) - Les conséquences des traitements (SOCIO-E 2) La kinésithérapeute n’identifie pas de situations particulières. Les soins corporels ne sont pas clairement identifiés comme étant un vecteur privilégié de mise en jeu de l’image du corps Question 10 : Prenez-vous en compte l’image du corps dans votre pratique ? Professionnels interrogés Eléments de réponse ERGO 1 : / Ergothérapeutes ERGO 2 : « c’est plus l’équipe soignante qui y est confrontée » ERGO 3 : « on essaie de valoriser la personne » SOCIO-E 1 : / Socio esthéticiennes Psychologue SOCIO-E 2 : / « ça fait partie des thèmes que j’essaie d’aborder avec tout le monde » « on ne les regarde pas comme ça » Kinésithérapeute Analyse descriptive comparée L’image du corps est prise en compte consciemment par certains professionnels par: - L’écoute (la psychologue) - Le regard (la kinésithérapeute) - La valorisation de la personne (ERGO 3) ERGO 2 ne pense pas le prendre en compte, car considère que ce sont les soignants qui y sont confrontés La question n’a pas été posée aux socioesthéticiennes car c’est leur cœur de métier et elles avaient exposé précédemment qu’elles y étaient très sensibles. Question 11 : Avez-vous déjà travaillé avec un ergothérapeute ? Professionnels interrogés Socio esthéticiennes Eléments de réponse SOCIO-E 1 : « non, parce que ça ne s’est jamais présenté » SOCIO-E 2 : « ah non » « des ergothérapeutes peu, et pourtant ça a l’air effectivement important » Psychologue « au sein du réseau il n’y a pas d’ergothérapeute » Kinésithérapeute « il n’y a pas d’ergothérapeute malheureusement » Analyse descriptive comparée Aucun de ces professionnels n’a travaillé en collaboration avec un ergothérapeute pour la prise en charge de patients en soins palliatifs, car il n’y en a pas dans les services où ils travaillent. Question 12 : Quelles pourraient être les actions d’un ergothérapeute auprès de patients en soins palliatifs ? Professionnels interrogés Eléments de réponse SOCIO-E 1 : « une personne qui avait une cuillère adaptée » Socio esthéticiennes Psychologue Kinésithérapeute SOCIO-E 2 : « diminuer toutes les souffrances physiques et aussi psychologiques » « recréer un lien avec l’extérieur » « développer l’autonomie » « plus dans les gestes de la vie au quotidien » « maintien des capacités fonctionnelles » « maintenir les plus longtemps possible, dans les meilleures conditions possibles, et pour que la personne se sente le mieux possible » « coordination entre le psychisme et le corps » « tout le matériel » « apporter beaucoup au niveau du positionnement des patients » « au niveau des repas également, le matériel » Analyse descriptive comparée Les différentes compétences de l’ergothérapeute ne sont pas identifiées par tous les professionnels. Néanmoins, on peut retrouver : - La gestion de la douleur ( SOCIO-E 2) - Favoriser le lien social (SOCIO-E 2) - Prise en compte de la souffrance morale (SOCIOE 2 + psychologue) - Favoriser l’autonomie (SOCIO-E 2) - Les compensations et adaptations (tous les professionnels) - Le positionnement (kinésithérapeute) Question 13 : Pensez vous que des activités autour des soins corporels pourraient être proposées aux patients ? Professionnels interrogés Eléments de réponse Analyse descriptive comparée ERGO 1 : / Ergothérapeutes ERGO 2 : / ERGO 3 : « non, ça ne m’est pas arrivée » SOCIO-E 1 : / Socio esthéticiennes Psychologue Kinésithérapeute SOCIO-E 2 : « oui » Les professionnels trouvent en majorité un intérêt à la mise en place d’activités de soins corporels, mais ne justifient pas ce point de vue « autant pour les personnes que pour l’entourage d’ailleurs » « Oui bien sûr » Question 14 : Quelles seraient les différentes composantes des soins corporels ? Professionnels interrogés Eléments de réponse Analyse descriptive comparée ERGO 1 : « la toilette, l’habillage oui » « les kinés ont pu mettre en place des bains relaxants » Ergothérapeutes ERGO 2 : / ERGO 3 : « non, ça ne m’est pas arrivée » « le passage chez la coiffeuse, le vernis à ongles, pour les hommes être bien rasé » « l’habillage aussi, pouvoir garder ses habitudes à ce niveau là » Socio esthéticiennes SOCIO-E 1 : « il y a tout ce que je peux apporter » « tous les soins d’hygiène, ne serait-ce que la douche » « la baignoire à bulles » SOCIO-E 2 : « oui » « activité physique adaptée » Psychologue Kinésithérapeute « la toilette, les préventions d’escarres » « toucher-massages » « Il y a la socioesthéticienne » « massages pour apaiser quelqu’un » soins d’hygiène « aussi » Différentes composantes sont ressorties : - La socioesthétique - La relaxation - Les activités physiques adaptées Les soins d’hygiène sont identifiés par une grande partie des professionnels : - Toilette - Habillage - Soins de présentations - Prévention d’escarres Question 15 : Comment pensez-vous que l’image du corps peut-être prise en compte dans les activités de soins corporels ? Professionnels interrogés Eléments de réponse ERGO 1 : « il faut prendre en compte les demandes du patient » « ce sera différent si je suis face à un homme ou à une femme » Ergothérapeutes ERGO 2 : / ERGO 3 : « revaloriser la personne rien que par une toilette et un habillage » « faire attention aux attentes de la personne » « il faut arriver à doser jusqu’où on l’aide, et jusqu’où on la laisse faire » SOCIO-E 1 : « les revaloriser par rapport à leur corps » « on les considère toujours comme des êtres humains » « il faut être vigilant pour ne pas faire ressentir à la personne qu’elle est maigre » Socio esthéticiennes Psychologue Kinésithérapeute SOCIO-E 2 : « le toucher, la façon dont on touche la personne » « le toucher, c’est le lien qu’on va créer avec les personnes » « et aussi le regard » « je crois qu’il y a beaucoup de choses qui passent qui ne sont pas forcément verbalisées, par le regard et par le toucher » Analyse descriptive comparée Les professionnels identifient différents éléments permettant de prendre en compte l’image du corps : - Revaloriser - Ecouter les demandes de la personne - Le toucher - Créer une relation de soins - Respecter la personne - Le regard - L’autonomie Le toucher est mis en avant par les professionnels travaillant dans le réseau de soins à domicile L’écoute des attentes de la personne est uniquement mise en avant par des ergothérapeutes « connaitre un peu la personne » « dans tout ce qui passe dans le toucher, dans le respect de la personne aussi […] valorise pour le coup aussi l’image du corps » « revenir à du toucher, du regard » L’importance du regard est émise par les socioesthéticiennes et la psychologue. « le personnel prend le temps qu’il faut » « que ce soit lui qui fasse le maximum » ERGO 1 fait également ressortir la composante homme/femme dans les soins Question 16 : Comment pensez-vous que l’ergothérapeute pourrait traiter de la notion d’image du corps dans ces activités ? Professionnels interrogés Eléments de réponse Analyse descriptive comparée ERGO 1 : « on peut intervenir pour des adaptations, par exemple mettre des velcros pour qu’une femme puisse continuer à porter ses robes » « permettre à quelqu’un de faire ses transferts seuls au lieu d’être mis dans un lève malade, ça joue aussi » Ergothérapeutes ERGO 2 : « on travaille beaucoup en complémentarité » « les autres […] sont peut-être plus sensibilisés » SOCIO-E 1 : « déjà le noter et le remarquer, et après faire appel à quelqu’un » Certaines spécificités de l’ergothérapeute sont mises en avant : - Les bilans - Le temps - Favoriser l’autonomie - Des compensations et adaptations - Relation différente SOCIO-E 2 : « peut être dans leur autonomie » « en leur apportant des outils » Certains éléments évoqués correspondent également aux autres professionnels ERGO 3 : « revaloriser la personne rien que par une toilette et un habillage » « faire attention aux attentes de la personne » « on est dans une autre dimension de la relation avec le patient » Socio esthéticiennes Psychologue Kinésithérapeute « connaitre un peu la personne » « dans le respect de la personne aussi » « revenir à du regard » « il y a déjà un côté bilan, savoir ce que fait la personne » « un ergothérapeute il prendra plus le temps » « plus d’apprentissages, de redonner certains gestes aux patients » « être plus autonome, ça favorise aussi l’image du corps » Question 17 : Avez-vous déjà utilisé la grille d’entretien de la MCRO-P ? Professionnels interrogés Eléments de réponse ERGO 1 : « je en connais pas bien, mais ça me dit quelque chose » « quand on arrive avec sa fiche de bilan, on ne met pas les gens à l’aise » Ergothérapeutes ERGO 2 : « non je ne connais pas » ERGO 3 : « ça me dit quelque chose, mais j’avoue que les grilles d’évaluations… » « c’est plus au fil de la discussion je pense » Analyse descriptive comparée Aucun des ergothérapeutes interrogés n’utilise la MCROP: - Soit parce qu’ils ne connaissent pas (ERGO 2) - Soit parce qu’ils n’en voient pas l’utilité (ERGO 1)