Le réseau des attachés fiscaux - Gestion et Finances Publiques

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Le réseau des attachés fiscaux - Gestion et Finances Publiques
Le réseau des attachés fiscaux
L
a Direction générale des Finances publiques (DGFiP) dispose d’un réseau de six attachés fiscaux
installés à Berlin, Bruxelles, Londres, Madrid, Rome et Washington qui la représentent dans douze
pays.
Ces attachés fiscaux ont pour mission de faciliter la coopération avec les administrations fiscales
étrangères. Ils sont plus particulièrement en charge de l’échange de renseignements à des fins fiscales
ainsi que des études comparatives ou prospectives sur des sujets du ressort de la DGFiP, tant en matière
de fiscalité et de gestion publique que de pilotage, de management et de ressources humaines.
Ponctuellement, ils peuvent être amenés à réaliser des études pour le compte d’autres directions des
ministères du Budget ou de l’Economie et des Finances.
Régulièrement, les attachés fiscaux établissent des notes de synthèses sur différents thèmes d’actualité.
PAYS-BAS
RÉFORME COMPTABLE DE L’ÉTAT
La rationalisation des pratiques budgétaires et comptables est
au centre des préoccupations depuis plusieurs années. Cet
objectif répond au souci de transparence et de fiabilité de l’information elle-même, gage d’efficience et de responsabilité. En
matière comptable, deux grands systèmes existent : la comptabilité de caisse (historique en ce qui concerne les pouvoirs
publics) et la comptabilité d’engagement (droit constaté)
empruntée au monde de l’entreprise intégrant l’approche et la
valorisation patrimoniales. C’est en ce sens que tentent d’évoluer
la plupart des Etats à des rythmes et selon des besoins divers. La
DGFiP a souhaité, au printemps 2010, disposer d’une étude
comparative sur les pratiques en la matière. Les Pays-Bas étaient
au nombre des pays choisis. Cette fiche résume brièvement les
résultats de cette recherche (1).
Les Pays-Bas mettent en œuvre
une comptabilité de caisse améliorée
. S’agissant de l’Etat, les Pays-Bas utilisent depuis 1992 pour le
gouvernement central (ministères) un système comptable mixte
qualifié de système de caisse amélioré ou modifié (liabilities/
cash system).
Les opérations enregistrées au niveau de chaque ministère donnent lieu à deux types d’écritures :
– l’une pour constater l’engagement juridique de l’opération ;
– l’autre passée lors du flux financier effectif (décaissement/
encaissement).
Cela étant, l’enregistrement en temps réel de l’engagement juridique n’est effectué que pour les dépenses importantes (investissement) s’inscrivant dans un cadre pluriannuel, afin d’assurer
le parallélisme avec les documents budgétaires. Dans l’organisation administrative néerlandaise, les dépenses d’investissement sont normalement confiées à des agences ou à des fonds.
Selon le ministère des Finances, seuls 3 à 4 % des dépenses des
ministères concernent ainsi des dépenses d’investissement.
Par ailleurs, toujours dans le cadre de ce système mais avec une
« approche comptable d’engagement », les Pays-Bas tiennent
également un bilan de l’Etat (State balance) donnant une image
de son actif net. Ce « bilan » n’est pas directement relié à la
comptabilité (de caisse) de l’Etat mais est le fruit d’un travail
spécifique de présentation de la part du ministère des Finances.
. Les personnes publiques autres que les ministères (agences
notamment et par ailleurs provinces et communes) mettent en
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œuvre une comptabilité d’engagement, largement fondée sur
le modèle standard IFRS.
Les Pays-Bas en restent donc à une approche pragmatique
compte tenu du bilan coûts/avantages qu’ils font du système en
fonction de leurs besoins. A cet égard, il leur apparaît que la
rigueur du processus budgétaire batave (encadrement strict des
marges de manœuvre des ministres et évaluation périodique du
respect du cadre budgétaire pluriannuel fixé dans le cadre du
contrat de gouvernement) permet déjà un suivi rapproché.
Par ailleurs, la généralisation de la comptabilité d’engagement
(au-delà de l’existant) ajouterait de la complexité et aurait un
aspect en partie théorique compte tenu des enjeux nationaux.
Le passage des services fiscaux à une comptabilité d’engagement avait été envisagé, mais il a été considéré que cette administration n’était pas encore tout à fait prête pour évoluer vers un
statut d’agence.
Périmètre des états financiers
Des comptes séparés sont produits par chaque département
ministériel (2). Comme en France, il n’y a pas de comptes consolidés aux Pays-Bas. Les comptes de l’Etat donnent toutefois une
vue d’ensemble des recettes et des dépenses ainsi que du bilan
de l’Etat. Le ministère des Finances a une responsabilité particulière dans la supervision des comptes du Gouvernement central.
Cadre normatif et éléments d’actifs spécifiques
L’Etat néerlandais utilise son propre référentiel et ses standards.
Les règles comptables néerlandaises, établies par le Dutch
Accounting Standard Board, ne diffèrent qu’à la marge des standards internationaux IFRS (3). S’agissant des éléments bilantiels,
les Pays-Bas utilisent le référentiel SEC 1995 (4). En principe, c’est
la valeur du marché qui prévaut, tel est le cas du patrimoine
immobilier non spécifique (ex. : les immeubles de bureaux), à
défaut elle est estimée. En pratique est retenu le coût historique
diminué des amortissements.
Les monuments historiques ne sont pas évalués (évaluation à
l’euro symbolique) à défaut de valeur de marché pertinente disponible pour ces actifs. En outre, les monuments nationaux n’ont
pas vocation à être vendus. Ils n’ont donc pas besoin d’être
évalués.
(1) Cf. en annexe une typologie sommaire des différentes situations actuelles
(source : étude néerlandaise commandée par le Parlement et remise en septembre 2010).
(2) Il en est de même pour les plus hautes autorités de l’Etat ainsi que la Couronne
Sénat, Chambre des représentants, Conseil d’Etat, Cour des comptes et médiateur
national (Ombudsman).
(3) International financial reporting standards.
(4) Système européen des comptes nationaux et régionaux (1995).
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international
L’armement proprement dit ne figure pas au bilan, à la différence
des bâtiments et des terrains affectés à la mission de défense qui
eux y apparaissent (évalués comme indiqué précédemment).
Les transferts correspondent à des dépenses engagées par l’Etat
dans le cadre de sa politique économique et sociale (5). Toutes
ces opérations sont enregistrées dans les comptes de l’Etat selon
le système de comptabilité de caisse, à charge pour les collectivités bénéficiaires de tenir une comptabilité d’engagement.
Les provisions et les dettes sont comptabilisées selon les normes
précitées. Le bilan de l’Etat distingue les catégories de dettes
suivantes : masse monétaire en circulation (également à l’actif),
bons de Trésor néerlandais, effets commerciaux (de moins d’un
an), obligations d’Etat (de plus d’un an), emprunts à court terme,
emprunts à long terme, emprunts commerciaux et emprunts
transitoires.
Le système de retraite néerlandais est fondé sur une retraite de
base (AOW) versée sans condition de revenu et sous forme d’allocation à tous les Néerlandais, complétée par une retraite par
capitalisation à travers des fonds de pension. Les pensions des
agents publics ne figurent pas au bilan de l’Etat.
Contenu et valorisation
de l’information financière
Aux Pays-Bas, les comptes de chaque ministère sont publiés
annuellement. Il n’y a pas d’éléments sur la soutenabilité des
finances publiques dans les comptes annuels et les rapports. Toutefois, le Bureau néerlandais d’analyses des politiques économiques (CPB) rend compte régulièrement de ces sujets. Les
comptes de l’Etat ne comprennent pas d’informations sectorielles, lesquelles figurent dans d’autres documents économiques
et financiers.
L’information est diffusée dans les comptes publics, les rapports
des différents ministères, un rapport financier de l’Etat, un rapport
de la Cour des comptes. Ces documents, qui donnent lieu à une
lettre de couverture dite « lettre comptable » du Premier ministre,
sont présentés au Parlement lors de l’accountability day qui est
suivi d’un débat à la Chambre basse. Pour le grand public, un
communiqué de presse du ministère des Finances, une synthèse
des rapports financiers et un site Internet rendent l’information
accessible. Le rapport de chaque ministère, qui contient des éléments financiers, est mis en ligne sur Internet.
Aux Pays-Bas, le reporting de gestion est effectué par chaque
ministère selon des méthodes qui peuvent en partie varier selon
les usages propres à chaque département. Cela étant, un processus de rationalisation et d’homogénéisation des méthodes
est en cours sous l’égide du service d’audit du Gouvernement
central qui dépend du ministère des Finances en liaison avec les
services d’audit de chaque département.
ALLEMAGNE
LES PROJETS DE RÉFORMES EN COURS
EN MATIÈRE FISCALE
ET BUDGÉTAIRE
Fin 2010, un train de mesures consacrées à la simplification fiscale (Steuervereinfachung) fera l’objet d’une loi en 2011. Il s’agit
d’un catalogue de dispositions qui ont vocation à alléger et simplifier l’impôt pour les contribuables mais aussi pour l’Administration (« débureaucratisation »).
Trois mesures significatives sont présentées avec un coût budgétaire total estimé à 590 Mg :
– les frais professionnels qui peuvent être déduits forfaitairement
(Arbeitnehmer-Pauschbetrag) passent de 920 à 1 000 g par an
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(au-delà, les frais professionnels sont déduits au réel sur présentation de justificatifs) ;
– la déduction des frais de garde d’enfant (Kinderbetreuungskosten) qui est limitée à 4 000 g par an et par enfant âgé de
moins de 14 ans sera désormais admise même si ces frais sont
engagés pour des motifs privés (seuls les frais engagés pour des
motifs professionnels sont à ce jour admis en déduction) ;
– allocations familiales (Kindergeld) ou abattements en base
(Kinderfreibeträge) pour enfants majeurs : les contrôles portant
sur les revenus des enfants majeurs rattachés seront supprimés.
Dans le cadre actuel, le versement des allocations familiales ou
le bénéfice de l’abattement pour enfant à charge est soumis à
un examen du centre des Finances (Finanzamt) à partir de justificatifs et de calculs parfois complexes lorsque l’enfant est majeur
et perçoit un revenu.
Les autres mesures sont présentées comme n’ayant pas d’impact
financier. Y figurent des mesures de toilettage du droit fiscal
(abrogation de dispositifs qui ne trouvent plus à s’appliquer en
pratique), de nombreux allégements en matière d’obligations
déclaratives et de production de justificatifs ainsi qu’un ensemble
d’engagements forts mais parfois encore vagues où figurent
notamment :
– la possibilité de déposer une déclaration de revenus tous les
deux ans pour les contribuables n’exerçant pas d’activité
commerciale ;
– la mise en place d’une déclaration préremplie d’ici 2013 pour
la majorité des contribuables (vorausgefüllten Steuererklärung) ;
– le développement d’un contrôle fiscal plus proche de l’activité
des entreprises (zeitnahe Betriebsprüfung). En effet, le contrôle
fiscal en Allemagne concerne des années beaucoup plus
anciennes. La période vérifiée est de trois à quatre ans, ce qui
signifie quatre à six ans entre le dépôt de la déclaration et l’imposition ultime. Il s’agit là d’essayer de donner satisfaction à une
demande récurrente des entreprises et d’obtenir en contrepartie
une plus grande coopération en phase de contrôle.
Le nouveau mécanisme constitutionnel de frein à l’endettement
est entré en vigueur en 2011. Il prévoit la suppression progressive
du déficit structurel. Cette mesure s’appliquera à la fois au Gouvernement fédéral (Bund) et aux Etats (Länder). A partir de 2016,
le déficit au niveau fédéral ne pourra être supérieur à 0,35 % du
produit intérieur brut (PIB). A partir de 2020, les Länder ne seront
plus autorisés à s’endetter. La loi fondamentale permet, toutefois,
une exception pour les situations d’urgence telle qu’une catastrophe naturelle ou une crise économique.
L’Etat fédéral s’était, en effet, engagé sur la voie d’une réforme
budgétaire, retenant le passage à une « comptabilité de caisse
enrichie », complétée par des données de « consommation des
ressources » et de « budgets de produits » ainsi que d’éléments
de comptabilité patrimoniale et de calcul de rentabilité. Ce
modèle devait être testé à partir de 2010 dans des projets pilotes,
conduits dans deux ou trois ministères pendant trois ans, avant
généralisation de 2013 à 2018.
Cela étant, un communiqué du BMF (Bundesministerium der
Finanzen) de juillet 2010 indique que les crédits nécessaires à la
mise en place de ces projets pilotes n’ont pas été votés, ces
projets sont donc ajournés. Le projet MHR sera piloté différemment par le BMF qui doit réfléchir à une autre façon de mettre
en œuvre les projets jugés les plus importants comme comptabilité patrimoniale et calcul de rentabilité.
(5) Les budgets versés aux collectivités locales comprennent principalement les
dotations générales de l’Etat aux provinces et aux communes (équivalent de dotations de fonctionnement que les collectivités gèrent librement) et les dotations
spéciales destinées à des objectifs particuliers (ex. : investissements).
No 5 - Mai 2011 -
international
ROYAUME-UNI
L’APPROCHE ADOPTÉE
PAR L’ADMINISTRATION FISCALE
BRITANNIQUE
A L’ÉGARD DES PERSONNES FORTUNÉES
La mise en place de schémas d’optimisation est une préoccupation constante de l’administration fiscale britannique. Or, l’un
des segments de la population dans lequel ces schémas sont le
plus souvent développés est celui des personnes fortunées.
HMRC a donc décidé, dès 2009, de développer une stratégie
spécifique visant cette population et de mettre en place une
direction dédiée : l’unité des personnes fortunées.
La logique qui sous-tend la création de ce service est la suivante :
le contrôle fiscal est un outil très efficace pour améliorer le
civisme des personnes fortunées mais cette activité a un coût
significatif. HMRC souhaite donc inciter cette population à respecter spontanément ses obligations fiscales en améliorant la
qualité du service qu’elle lui rend afin qu’elle adopte un comportement plus coopératif.
Trois autres raisons justifient une approche particulière à l’égard
de ce groupe :
– les enjeux fiscaux sont plus importants que dans d’autres segments de la population ;
– la situation de ces personnes est plus complexe car les investissements qu’elles réalisent sont sophistiqués et ils peuvent
concerner un grand nombre d’entités. Le régime fiscal applicable aux transactions qu’elles réalisent est donc plus incertain ;
– l’impact sur l’intégrité du système fiscal est significatif car la
population dans son ensemble attend de l’administration fiscale
que ce groupe fasse l’objet d’une attention particulière.
La stratégie adoptée par HMRC repose sur deux volets
complémentaires :
– rendre un service sur mesure aux personnes fortunées pour les
amener à coopérer davantage ;
– mieux connaître leurs comportements pour recentrer le
contrôle fiscal sur les situations les plus risquées.
La mise en place d’un service
dédié doit permettre d’améliorer
les relations entre l’Administration
et les personnes fortunées
. HMRC a décidé de se concentrer sur un portefeuille de
5 000 dossiers, ce qui correspond à un montant d’actifs minimum
de 20 M£ et au seuil de richesse à partir duquel les banques, en
général, différencient la nature du service qu’elles rendent à leurs
clients. L’unité, composée d’environ 400 personnes, assure la gestion et le contrôle de l’ensemble des impôts dont ces personnes
sont redevables. En revanche, l’unité ne suit pas les entreprises
dans lesquelles elles ont des intérêts et n’assure pas le
recouvrement.
. Dans ce cadre, la stratégie d’HMRC vise à rendre un service
sur mesure : chaque usager dispose d’un interlocuteur unique,
un inspecteur expérimenté qui s’appuie sur une équipe de sept
agents pour garantir un service de qualité à environ cent cinquante personnes.
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Selon HMRC, ce niveau de service doit conduire à un changement dans la nature des relations qui prévalent entre l’Administration et ces personnes :
– rendre un service de qualité en apportant des informations
précises, y compris dans les domaines les plus complexes, est
essentiel pour créer des relations de confiance ;
– ces usagers ne doivent plus considérer l’Administration comme
une source de difficultés mais comme un centre d’expertise leur
permettant de sécuriser leurs choix. Il est d’ailleurs légitime, selon
HMRC, que ces personnes qui investissent beaucoup au RoyaumeUni bénéficient d’un service particulier.
La qualité du dialogue favorise le développement de relations
de coopération et le contribuable est davantage incité à solliciter l’avis de l’Administration sur le traitement fiscal d’opérations
futures. Ces demandes d’avis réduisent les risques d’erreurs et
rendent moins utiles les contrôles a posteriori.
L’enrichissement du dialogue entre l’unité et ses usagers doit
donc permettre d’améliorer le civisme fiscal de cette population
et d’économiser des ressources qui peuvent être redéployées sur
de vraies zones de risque.
Un service amélioré va de pair
avec le renforcement de la capacité
de l’Administration
à maîtriser les risques spécifiques
que présentent les personnes fortunées
. La mise en place d’une offre de services spécifiques pour une
fraction réduite de la population pourrait laisser penser que ces
personnes bénéficient d’un régime de faveur. Selon HMRC, la spécialisation de l’unité permet de développer des compétences qui
auparavant étaient disséminées au sein du réseau. Or ces compétences sont indispensables pour analyser finement la situation de
chaque contribuable, mieux comprendre l’organisation de son
patrimoine, son évolution et la nature de ses revenus.
. L’unité est donc capable de faire preuve de vigilance aux
moments stratégiques de la vie des dossiers : au moment de la
cession d’une entreprise ou lorsque, compte tenu de l’âge de
la personne, l’organisation de sa succession devient une
préoccupation.
L’unité recherche avant tout à anticiper ces événements et à interroger le contribuable dès qu’une opération fait l’objet d’un traitement fiscal discutable. Il y a donc peu de décalage dans le temps
entre la déclaration et son contrôle, ce qui facilite d’autant plus le
dialogue entre l’Administration et la personne contrôlée.
. L’unité des personnes fortunées n’est pas jugée sur le nombre
de contrôles qu’elle mène : son but est d’appréhender finement le
comportement de chacune des personnes de son fichier et notamment sa propension à mettre en place des schémas d’optimisation. Une meilleure connaissance des profils de ses 5 000 usagers
lui permet très tôt d’en classer certains comme représentant un
faible risque et donc de se concentrer sur les comportements les
plus risqués, c’est-à-dire essentiellement des comportements d’optimisation, les situations de fraude étant peu courantes.
. Enfin, les relations étroites que les personnes fortunées entretiennent avec l’administration fiscale britannique les amènent à
comprendre assez vite qu’elles sont, en réalité, sous surveillance
permanente, ce qui doit également les inciter à mieux respecter
les règles.
En définitive, l’unité des personnes fortunées doit permettre
d’améliorer le civisme fiscal d’un segment de la population à
très forts enjeux au Royaume-Uni : en effet, les recettes d’impôt
sur le revenu constituent plus de 40 % des recettes totales (contre
20 % en France). L’existence d’une structure dédiée est donc
particulièrement pertinente dans le contexte britannique.
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international
ITALIE
LA POLITIQUE IMMOBILIÈRE DE L’ÉTAT
L’Agence du domaine, établissement public économique, est
devenue l’interlocuteur unique des administrations en matière
immobilière. Créée en 2000, elle administre les biens immobiliers
de l’Etat tout en rationalisant et valorisant leur usage. Elle gère
également les biens confisqués à la criminalité organisée, le
domaine maritime, certains biens à caractère historique ou
culturel. Ses activités sont supervisées par le ministère de l’Economie et des Finances qui fixe ses orientations à travers un contrat
de services triennal.
L’Agence a aujourd’hui une priorité : mieux connaître le patrimoine immobilier utilisé par les administrations publiques pour
son optimisation et sa rationalisation.
Une priorité : mieux connaître
le patrimoine immobilier utilisé
par les administrations publiques...
Appartenant à l’Etat
La loi de finances pour 2010 a prévu l’obligation, pour les administrations publiques, de communiquer à l’Agence du domaine
avant le 31 janvier 2010 leurs besoins triennaux en matière immobilière. Cette opération doit notamment permettre la rédaction
du compte rendu patrimonial de l’Etat. Chaque immeuble se
verra attribuer une donnée cadastrale et une valeur estimée par
l’Agence du domaine. La photographie de tous les immeubles
sera mise à jour chaque année.
Il n’existe pas de conventions d’utilisations entre l’Etat propriétaire
et les administrations. Les loyers budgétaires sont néanmoins évalués et représenteraient environ 3 milliards d’euros par an.
L’Agence produira prochainement un plan de rationalisation des
espaces utilisés destiné à l’optimisation des ressources matérielles et financières.
Par ailleurs, le décret législatif du 28 mai 2010 relatif à la mise en
place du fédéralisme domanial a prévu que les administrations
publiques transmettent, de manière télématique, la liste des
biens de l’Etat dont elles veulent conserver l’usage.
Appartenant à des propriétaires privés
La loi de finances pour 2010 a prévu que les administrations occupant des locaux privés doivent non seulement transmettre à
l’Agence du domaine leurs besoins triennaux en matière immobilière mais également les dossiers relatifs à leurs baux en cours
avant le 31 mars 2011. Depuis le 1er janvier 2011, l’Agence du
domaine est seule habilitée à rédiger ou renouveler des contrats
de locations pour le compte des administrations publiques, sous
peine de nullité du bail. Elle doit vérifier la conformité et le montant du contrat ainsi que sa pertinence au regard de la surface
sollicitée. Les administrations sont tenues, pour leur part, de
déclarer qu’elles disposent des fonds nécessaires pour honorer
les échéances locatives. La demande de bail de l’Administration doit être conforme à sa prévision triennale en besoins
immobiliers.
... pour son optimisation et sa rationalisation
Entretien
La loi de finances pour 2008 a fixé des limites de dépenses pour
l’entretien habituel (1 % de la valeur du bien) et extraordinaire
(2 %) des immeubles propriétés de l’Etat ou en location privée
utilisés par des administrations. La loi de finances pour 2010 a
prévu que les administrations publiques communiquent tous les
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six mois (avant le 31 janvier et avant le 31 juillet de chaque
année) la liste des travaux effectués sur les propriétés de l’Etat
ou privées ainsi que leurs montants.
Cessions
L’Agence du domaine procède régulièrement à des cessions
(immeubles, gares, casernes...). Son objectif de cessions s’est
établi à 300 millions d’euros pour 2010.
Mais c’est surtout par la mise en place du fédéralisme domanial
que l’Agence va prochainement céder des biens de l’Etat aux
collectivités locales. Près de 19 000 biens pourront être transférés
à titre gratuit aux communes, provinces, villes métropolitaines et
régions pour un montant de 3 ou 4 milliards d’euros.
L’objectif est de favoriser leur valorisation. Le transfert sera réalisé
à partir d’une liste de biens définie dans un décret du président
du Conseil des ministres après accord de la conférence unifiée
Etat - régions - collectivités locales. Les acteurs locaux présenteront des requêtes qui mentionneront la finalité, les modalités d’utilisation et la destination des biens. Les critères retenus pour le
transfert sont la territorialité, la capacité financière et la valorisation environnementale notamment. Les ports, aéroports, biens
appartenant au patrimoine culturel, réseaux d’intérêt national,
voies ferrées propriété de l’Etat, parcs nationaux et réserves naturelles sont exclus. Une grande partie des biens devrait revenir aux
communes qui pourront ensuite les vendre sous conditions. Les
ressources des collectivités locales provenant de l’éventuelle
aliénation du patrimoine qui leur sera attribué leur seront
acquises à hauteur de 75 %. Elles seront destinées à la réduction
de leur dette ou bien à l’investissement. La part résiduelle de 25 %
reviendra au fond d’amortissement des titres de l’Etat. Les biens
pour lesquels le transfert ne sera pas demandé seront attribués
à l’Agence du domaine.
On constate aujourd’hui une accélération du processus de valorisation, rationalisation et cession d’immeubles publics par l’Etat
italien qui détient 45 000 immeubles, pour 65 milliards d’actifs.
ESPAGNE
ADOPTION D’UN CODE
DE BONNES PRATIQUES FISCALES
ENTRE L’ADMINISTRATION
ET LES GRANDES ENTREPRISES
En 2008, au titre de l’actualisation du plan de prévention de la
fraude fiscale, l’agence fiscale espagnole a souhaité rechercher
une nouvelle relation coopérative avec les grands contribuables
par le biais de la création d’un « forum des grandes entreprises »
dans lequel sont présentes les grandes entreprises et l’administration fiscale. Il s’agissait d’établir un cadre de confiance et de
transparence permettant de réduire les risques fiscaux et les
litiges pour les entreprises. Un forum de discussion avec les
grands contribuables a donc été créé et l’aboutissement de ses
différents travaux est l’adoption, le 20 juillet 2010, d’un code de
bonnes pratiques fiscales, dont l’objet est d’améliorer l’application du système fiscal espagnol en offrant une sécurité juridique
accrue.
Le code de bonnes pratiques fiscales est une coopération réciproque entre l’agence fiscale et les entreprises fondée sur la
bonne foi, la transparence, la confiance mutuelle et sur l’application de politiques fiscales responsables au sein des entreprises.
Cette démarche s’inscrit dans les objectifs de l’Agence fiscale,
dont les lignes directrices sont l’information et l’aide aux contribuables dans une relation de proximité, afin d’engager entre
l’Administration et les entreprises une réelle coopération. Cette
meilleure gestion des risques inhérents à l’accomplissement par
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international
les sociétés de leurs obligations fiscales doit conduire in fine à
renforcer leurs résultats économiques, en minimisant les risques
tout en améliorant l’efficacité des contrôles de l’Agence fiscale.
– l’Agence fiscale intégrera, dans la pièce de procédure motivant les rectifications, les observations du contribuable formulées
lors des opérations de contrôle.
Le code de bonnes pratiques fiscales s’articule autour des trois
principes suivants :
Les entreprises devront s’efforcer de répondre le plus rapidement
possible ou, si elles le souhaitent, elles pourront demander un
délai complémentaire de réponse de préférence par voie électronique. L’Agence fiscale fera en sorte que toutes les questions
de fait issues du contrôle soient discutées durant les opérations
de contrôle, avant l’envoi de la proposition de rectification.
. Transparence, bonne foi et coopération avec l’Agence fiscale
dans les pratiques fiscales des entreprises
En vue de réduire les risques fiscaux, les entreprises devront éviter
l’utilisation de sociétés écrans, à but exclusivement fiscal, localisées dans des paradis fiscaux et permettant d’occulter les bénéficiaires réels.
Les entreprises et l’Agence fiscale devront collaborer dans la
détection et la recherche de solutions de manière à prévenir
l’extension de pratiques frauduleuses déjà existantes ou qui pourraient se développer sur les marchés où elles sont présentes.
Le conseil d’administration ou l’organe équivalent devra être
informé des pratiques fiscales appliquées par la société par le
responsable de la fiscalité ou par le biais de la commission
d’audit, et ce avant la publication des comptes annuels et le
dépôt de la déclaration de l’impôt sur les sociétés.
Une information sur l’impact fiscal des opérations soumises à
l’approbation du conseil d’administration sera communiquée
dès lors qu’elles auront une importance significative.
. Transparence et sécurité juridique dans l’application et l’interprétation des dispositions fiscales par l’Agence fiscale
L’Agence fiscale fera en sorte d’appliquer, dans ses contrôles,
les interprétations provenant de la doctrine administrative et de
la jurisprudence et, si besoin, demandera des informations au
service de la législation fiscale.
Les directeurs des départements de l’Agence fiscale informeront
le Comité permanent de direction des critères interprétatifs qu’ils
comptent appliquer dès lors qu’ils sont en présence de questions
litigieuses et pour lesquelles il n’existe pas de critère établi par le
service de la législation fiscale, le service du contentieux (un
tribunal économico-administratif central indépendant de
l’Agence en Espagne) ou les tribunaux pénaux.
L’Agence fiscale devra également rendre publics les critères de
portée générale appliqués dans le cadre de ses procédures de
contrôle et mettra en œuvre des procédures appropriées permettant de répondre rapidement aux interrogations des contribuables sur certaines opérations.
De plus, les contribuables pourront annexer une note explicative
à leur déclaration fiscale, présentant les critères suivis et les faits
sur lesquels ils se sont appuyés, lesquels, s’ils sont rationnellement
fondés, permettront à l’Agence fiscale de déterminer s’il existe
une fraude à la loi.
. Réduction des litiges et des situations conflictuelles
L’Agence fiscale et les sociétés ont comme objectif d’entretenir
des relations constructives, transparentes et basées sur la
confiance mutuelle. Ainsi, l’Agence fiscale et les entreprises utiliseront toutes les possibilités offertes par le caractère contradictoire de la procédure de contrôle fiscal en appliquant les bonnes
pratiques suivantes :
– l’Agence fiscale informera le plus tôt possible le contribuable
des faits susceptibles de faire l’objet d’une rectification, de sorte
que soient favorisés les échanges d’analyses durant le contrôle,
et que, dans l’avenir, l’entreprise ne renouvelle pas les mêmes
erreurs ;
– l’Agence fiscale communiquera, dans le cadre de l’entretien
avant la proposition de rectification, les faits qui déterminent une
éventuelle rectification et, à titre indicatif, le montant des suppléments d’impôts ;
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De plus, et en vue de réduire la charge fiscale indirecte que
représente ce type de procédures pour les contribuables,
l’Agence fiscale s’efforcera de cibler l’objet de ses demandes et
s’efforcera de limiter la durée du contrôle au temps strictement
nécessaire pour réaliser son contrôle. Les entreprises devront, de
leur côté, faciliter l’information et la documentation sollicitées par
l’Agence fiscale, nécessaires au contrôle, de la manière la plus
rapide et la plus complète possible.
Procédure d’adhésion
L’adhésion au code de bonnes pratiques fiscales est formalisée
par un accord du conseil d’administration de l’entreprise qui sera
communiqué à l’Agence fiscale. La société pourra cesser à tout
moment son adhésion.
Il est aussi nécessaire de noter que l’Agence fiscale rendra public
le nom des sociétés adhérentes sauf désaccord express de ces
dernières. Les entreprises doivent adhérer à la totalité du code.
Commission de suivi
La séance plénière du Forum des grandes entreprises déterminera
la création d’une commission de suivi de l’application du code.
Celle-ci sera composée de six membres nommés tous les ans par
l’Agence fiscale et les entreprises participantes ; les décisions seront
adoptées de manière consensuelle entre tous les membres.
La commission de suivi se réunit une fois par semestre et son
action est guidée par les principes de transparence, de
confiance mutuelle, de bonne foi et de loyauté qui président au
code. Si cette commission veille à l’application et au respect
dudit code, elle ne pourra néanmoins avoir connaissance des
situations particulières des entreprises adhérentes et ne pourra
pas non plus intervenir dans une procédure fiscale en cours.
Entreprises qui adhèrent à ce code
de bonnes pratiques fiscales
Les noms des entreprises qui adhèrent à ce code de bonnes
pratiques fiscales sont rendus publics sur le site de l’Agence fiscale espagnole : http://www.agenciatributaria.es (fonctionnement, réunions, participants, groupes de travail, codes des
bonnes pratiques, entreprises...).
Liste des entreprises ayant adhéré au code de bonnes pratiques
fiscales (11 janvier 2011) : Abengoa, Acerinox, Acs, Banco de
Santander, Banesto, Bolsas y Mercados Españoles, Cofares, El
Corte Inglés, Endesa, FCC, Gas Natural Fenosa, Generali España,
Iberdrola, Inditex, Mapfre, Michelin, Renault, Repsol YPF, Seat,
Telefónica.
ÉTATS-UNIS
LA RÉORGANISATION DE LA DIVISION
DES MOYENNES ET GRANDES ENTREPRISES
L’accent mis sur l’international
(administration fiscale)
Le 1er octobre 2010, la division des moyennes et grandes entreprises de l’administration fiscale américaine (Internal Revenue
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international
Service [IRS]) est devenue la division des grandes entreprises
et de l’international. Ce changement de nom est la conséquence d’une réorganisation de cette division dont le but est
d’accorder davantage d’attention et de moyens aux problématiques liées à l’international et notamment à celle des prix
de transfert. Renforcer ses capacités d’action à l’international
est l’une des grandes priorités stratégiques de l’IRS pour la
période 2009-2013.
Ce qui ne change pas
à l’issue de cette réorganisation
La division des grandes entreprises et de l’international continue
de servir la même population de contribuables, à savoir les
sociétés ayant plus de 10 millions de dollars d’actifs ainsi que
certains contribuables fortunés.
Elle reste structurée autour de six secteurs d’activité (6) et d’un
bureau en charge des fonctions d’appui aux vérificateurs (consultants financiers, consultants informatiques, économistes...).
Ce qui change
à l’issue de cette réorganisation :
une concentration des moyens
et une priorité stratégique accordée
aux questions liées au prix de transfert
Redéploiement des effectifs au sein de la division
afin de renforcer les capacités d’expertise de l’IRS
sur les problématiques liées à l’international
Le bureau des affaires internationales (assistance administrative,
prix de transfert, procédures amiables, planification fiscale agressive...) verra son effectif actuel d’environ 600 agents s’accroître
d’environ 875 agents supplémentaires. Cet accroissement
d’effectif proviendra pour l’essentiel d’un redéploiement des personnels de la division déjà spécialisés sur les problématiques
liées à l’international et notamment des vérificateurs internationaux placés jusqu’à présent sous la responsabilité des directeurs
en charge du contrôle fiscal d’un secteur d’activité. L’objectif de
ce redéploiement est de renforcer les capacités d’expertise de
l’IRS sur ces questions, d’harmoniser les positions et d’être plus
réactifs dans la lutte contre la fraude fiscale internationale.
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Avoir une plus grande efficience
dans le traitement des prix de transfert
L’encadrement du bureau des affaires internationales sera renforcé sur les questions de prix de transfert avec le recrutement
d’un directeur directement en charge de ces questions et d’un
chef économiste.
. Le nouveau directeur en charge de la politique en matière
de prix de transfert aura notamment la responsabilité de superviser un nouveau programme pilote lancé au début de l’année
2010 et destiné à améliorer le contrôle des prix de transfert. Avec
ce nouveau programme, l’IRS vise une meilleure utilisation de ses
ressources internes. Il s’agit sur des cas préalablement sélectionnés en raison de leurs enjeux financiers et/ou stratégiques de
faire intervenir très tôt dans la vérification différents spécialistes
(vérificateurs internationaux, économistes, spécialistes d’un secteur d’activité, agents du service juridique en charge des
accords préalables en matière de prix de transfert,...) afin d’être
plus performant dans le contrôle des prix de transfert et de limiter
la charge administrative pesant sur les entreprises.
. Le nouveau chef économiste aura quant à lui la responsabilité de superviser les positions économiques prises sur les dossiers
impliquant des prix de transfert afin de promouvoir une approche
harmonisée au sein de l’IRS.
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L’un des principaux objectifs ayant conduit à la création de la
division des grandes entreprises et de l’international est de permettre au chef du bureau des affaires internationales d’avoir une
vision claire de l’action des vérificateurs internationaux sur le terrain, ce qui n’était pas le cas avec l’organisation précédente.
Cette réorganisation de la gestion des questions internationales
facilitera la définition d’une stratégie globale.
Dans l’avenir, le transfert à la division des grandes entreprises et
de l’international de la gestion des accords préalables en
matière de prix de transfert, aujourd’hui sous la responsabilité du
service juridique de l’IRS, est de plus en plus souvent évoqué. Ce
transfert parachèverait la réorganisation de cette division.
(6) Communications, services financiers, industries lourdes et transport, ressources
naturelles et construction, industries agroalimentaires et pharmaceutiques et contribuables à fort enjeu.
No 5 - Mai 2011 -