Verslag algemene vergadering 20/11/2008

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Verslag algemene vergadering 20/11/2008
Bruxelles, le 15 janvier 2015
Monsieur le ministre de la Justice,
Chers collègues,
Mesdames messieurs les acteurs du monde du jeu de hasard,
En tout premier lieu, la Commission des jeux de hasard tient à remercier monsieur le ministre Geens
pour la confiance qu’il veut bien montrer aujourd’hui pour les travaux de la Commission des jeux de
hasard. Très probablement, cette confiance est basée sur des réalisations des 15 dernières années. Il
y a quinze ans en effet que dans cette salle, la Commission des jeux de hasard a été installée très
solennellement. Il subsiste des fondateurs de cette commission qui sont présents ici. Je citerai
Monsieur Fontinoy.
Cette confiance et cette légitimité doivent être méritées pour la prochaine législature en continuant à
exécuter la loi du 7 mai 1999 complétée par la loi du 10 janvier 2010 et en remettant des avis en vue
d’assurer une parfaite cohérence de la politique publique des jeux de hasard dans un esprit de
limitations des jeux et de rationalisation du monde des jeux. La régulation a pour objet de trouver un
juste équilibre entre la protection des joueurs et la rentabilité des exploitations. Il s’agit d’un défi
permanent remis en question à chaque instant, surtout que la sécurité juridique doit être apportée.
Cette sécurité juridique s’accommode mal de ruptures brutales mais est compatible avec des
évolutions annoncées et prévisibles.
Ces défis nouveaux trouvent leurs places dans l’encadrement politique et donc juridique, et dans les
progrès techniques qui ne peuvent à aucun moment se substituer aux sources classiques du droit : la
loi, les arrêtés royaux, la jurisprudence. Les organisateurs de jeux sur internet ont trop tendance à
vouloir renverser le pouvoir pour se l’attribuer en générant ainsi un déficit démocratique que la
Maison du ministre de la justice ne peut, suivant mon humble avis, tolérer.
Pourquoi un régulateur? Pour répondre à cette interrogation, vous avez, Monsieur le ministre, et ce
depuis longtemps et à juste titre, mis en évidence la complexité de la politique publique des jeux de
hasard avec tous ses disciplines: notamment droit, médecine, informatiques, économie, etc., dans un
environnement financier, international et parfois dans un milieu criminogène. La nature hybride de la
composition de la Commission à la fois politique et administrative garantit une bonne insertion dans
le tissu social, économique et judiciaire d’un organe qui assure la police administrative du monde du
jeu légalisé mais également à l’égard des hors-la-loi.
Pourquoi un régulateur indépendant? Une des missions de la Commission est de remettre des avis
documentés au gouvernement et au Parlement pour permettre l’exécution des lois et des arrêtés.
Une autre mission est de prononcer des décisions motivées impartiales. Le ministre De Clerck avait
constaté que le «core business » de l’informatique de la Commission ne s’intégrait pas dans celui du
SPF Justice et avait dès lors proposé un protocole entre l’ICT du SPF et celui de la Commission des jeux
pour instaurer une gestion indépendante de cet ICT. L’objectif était de réaliser une meilleure
protection des joueurs vulnérables. Des résultats sensibles ont déjà été réalisés dans ce domaine. Il
faut faire un pas supplémentaire dans le sens d’une meilleure responsabilisation du régulateur.
L’accord gouvernemental reflète cette évolution. Il prévoit une modification de la loi en vue de
permettre l’exploitation de 11 casinos et les jeux de hasard sur les bateaux de croisières. L’exécution
de ce passage de l’accord gouvernemental doit se faire avec méthode, avec ambition et sérieux.
Reprenons chacune de ses approches
La méthode: il s’agit, sous cet aspect, d’exécuter la loi actuelle qui a déjà fait l’objet de projets
d’arrêtés royaux qui soit, ont été notifiés à la Commission européenne ou soit, doivent encore être
soumis à l’avis du Conseil d’Etat. Il s’agit notamment des arrêtés relatifs à la surveillance et au
contrôle des jeux de hasard en ligne, à la liste des jeux de hasard qui peuvent être offerts sur internet
et l’arrêté royal relatif au service web. Pour un réel contrôle de la sincérité du jeu, pour une meilleure
protection des joueurs vulnérables et pour la vérification de l’âge, il serait souhaitable que ces arrêtés
soient mis en vigueur après sans doute un nouvel examen par le gouvernement. Ce gouvernement
pourrait, à cette occasion, réintroduire dans les textes des propositions qui avaient été formulées
dans les avis de la commission comme par exemple l’exclusion ou l’encadrement de l’offre de jeux
sociaux. Ces jeux créent en effet la confusion sur le concept de jeux dans l’esprit des jeunes
internautes qui sont deux fois la cible fragile de l’économie mondialisée.
Dans ce premier mouvement, il faut renforcer la chaîne de la protection du joueur et la compléter par
un maillon fort en remplacement d’un maillon faible qui consiste en une exception au droit commun:
il s’agit de l’article 3.3 qui vise les jeux de hasard avec une mise faible et un gain faible. Cet article a
permis le développement d’un large circuit comptant des milliers de machines qui peuvent être
exploitées sans limitation de nombre, accessibles partout au moins de 18 ans, sans screening
préalable du placeur, sans avis du bourgmestre, sans licence ainsi que sans examen technique de la
Commission. Un exploitant de jeux sanctionné peut donc faire placer ces machines dans son
établissement dès le lendemain du prononcé de la sanction sans aucune retenue, faisant ainsi un bras
d’honneur à l’autorité. Cette situation mine donc les décisions de sanction à l’égard du secteur qui se
conforme au cadre réglementaire. La Commission des jeux avait adressé au ministre précédent une
pétition pour remplacer ce maillon faible de la politique publique des jeux par un arrêté royal dont un
projet existe. C’est le moment de se rappeler qu’à la fin de l’année 2000, il y avait eu un véritable
tremblement de terre dans le monde du jeu: 20.000 machines non conformes avaient dû quitter les
débits de boissons sans qu’il y ait d’autres alternatives proposées. Ce fut l’occasion de surcharger les
tribunaux avec une pluie de procédures en référé. Les leçons doivent en être tirées pour éviter de
nouvelles tensions. Il s’agit d’être proactif pour réduire les incertitudes. Ne rien faire à propos de ces
dérives sape la crédibilité de la politique publique des jeux de hasard.
D’autres textes existent sous forme de projets: le code de déontologie, la complétion de l’arrêté royal
des jeux, l’arrêté royal relatif à l’avis du bourgmestre pour les débits de boissons, l’arrêté royal sur la
connexion au registre national pour mieux encadrer les joueurs en ligne, l’arrêté royal relatif à la
métrologie…. Il existe aussi d’autres textes comme les jeux média G2 qui doivent faire l’objet d’une
actualisation pour tenir compte des expériences vécues sur le terrain.
Dans un second volet de la méthode, un avis circonstancié sur la modification législative en vue de
réaliser les objectifs poursuivis par l’accord gouvernemental sera remis aux ministres et donc en
première instance au ministre de la Justice. Cette ambition devrait être alimentée par des études
scientifiques indépendantes relevant de travaux universitaires, à défaut par des travaux de
reconnaissance empirique, pour permettre que le débat de société que cette réforme va engendrer
soit rempli de tout son sens. Si les textes sont débattus et votés avant l’instauration d’une telle chaire
académique, celle-ci continuera à s’imposer pour procéder à l’évaluation de la politique publique
nationale en tenant compte des contraintes imposées par la Commission européenne et surtout de la
jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union européenne.
Les opérateurs qui croient dans la politique publique des jeux de hasard telle que développée et
défendue par les autorités belges ne continueront à investir que si leurs investissements sont assurés
d’une rentabilité pérenne, soutenue par une offre diversifiée et maîtrisée. Ce qui implique une
réflexion sur la destination des fumoirs et une autre sur la palette des machines existantes.
Cette modification législative peut enfin être ambitieuse pour permettre une régulation forte,
légitime, mature et cohérente.
- forte, c’est-à-dire compétente, outillée avec des moyens suffisants
- légitime, c’est-à-dire reconnue et contrôlée par les instances démocratiques
-mature, c’est-à-dire qui tire les leçons de son expérience de 15 années maintenant mais aussi des
autres types de régulation (soit celle du monde financier, soit celle du monde de l’énergie ou
d’autres…) mais également des régulateurs étrangers
-cohérente c’est-à-dire répondant aux critères de la jurisprudence de la cour de justice qui placent
tous les jeux de hasard sur un même pied lorsqu’il s’agit de vérifier le caractère proportionné des
limitations imposées pour assurer l’ordre public ou la protection des joueurs, la lutte contre la fraude
ou la criminalité ainsi que la lutte contre le blanchiment.
1
Les idées sous-tendant cette ambition ont déjà été abordées dans le travail de vos prédécesseurs .
Cette réforme doit essentiellement éliminer les exceptions de droit commun, car elles conduisent à
une politique des jeux de hasard affaiblie et divisée. La politique actuelle aura à pâtir du modèle
1
Andries (K.), Carette (N.) Hoekx (N.) Les jeux et paris. Analyse critique des éléments constitutifs de la
définition légale, Contrats& Patrimoine, 6, Larcier 2008 p.32.
libéral qui prône la concurrence effrénée. Le moment est désormais venu d‘apporter des
changements. La Commission des jeux de hasard n'est pas un despote, mais souhaite assumer toutes
ses responsabilités en cette matière.
Il faut travailler avec ambition. Il faut donc voir plus loin que le bout du nez, d’une manière durable et
à long terme. Il ne s’agit pas de rêver comme Icare et se brûler les ailes à la chaleur du soleil mais il
s’agit de rester les pieds sur terre avec une approche pragmatique et disposer des moyens
budgétaires ainsi qu’en personnel strictement nécessaires.
La réalisation de l’accord de gouvernement doit s’exécuter avec sérieux et j’ajouterai avec modestie
et détermination. Le résultat doit être bouclé. La faisabilité du projet doit faire l’objet d’échanges
ouverts sans arrière pensée. Après ce brainstorming, des arbitrages raisonnés et fondés sur le « bon
sens » doivent intervenir pour finalement être débattus au sein des plus hautes sphères de l’Etat car
ils débouchent sur des changements concrets de manière de vivre dans divers cercles et donnent
aussi plus largement un véritable contenu de civilisation. Surtout lorsque le jeu est associé aux médias
en ligne. Le rôle des autorités locales doit être revalorisé. Ce sera le sujet d’une journée d’étude au
cours de cette année.
Il faut travailler avec sérieux. Le sérieux comprend la prise en compte de la dimension internationale.
En 2000, la Belgique était tolérée pour écouter les modèles dans les pays qui nous entourent.
Aujourd’hui , la Belgique y est attendue pour contribuer aux débats sur la régulation avec des
arguments riches et montrer des résultats concrets qui peuvent soutenir la contradiction dans
différents domaines comme la manipulation sportive, la lutte contre la fraude, contre le blanchiment,
pour promouvoir surtout la protection des joueurs.
Quelques mots à propos de cette fraude justement, et des jeux illégaux ou clandestins. Sans lutte
efficace contre les jeux offerts depuis l’étranger sur notre territoire, sans serveur en Belgique, sans
intervention dans les arrières salles, il n’y a pas de garantie d’une politique publique de jeux de hasard
digne de ce nom qui conforte les opérateurs qui confient leur intérêt à l’autorité publique. Si l’état fait
défaut, il perd sa crédibilité dans un domaine où tant au plan belge qu’au plan étranger, le monde
économique et social est attentif aux initiatives nouvelles.
La Commission des jeux de hasard se trouve sur la ligne de départ et dans les starting blocks. Elle
attend votre coup d’envoi pour courir non pas un cent mètres ni un marathon mais une course de
10.000 mètres qui demande de bonnes jambes, un bon cœur , de l’endurance, de la persévérance et
surtout un bon mental pour atteindre le but. Faisons le pari de pouvoir monter sur le podium.
Je vous remercie Monsieur Le ministre pour votre contribution au succès de la journée d’aujourd’hui
et au succès des travaux qui nous attendent. Je remercie également les représentants des ministres
fédéraux et régionaux, messieurs les magistrats, les diplomates, les fonctionnaires de police et les
journalistes ainsi que les représentants des services d'aide pour l’attention qu’ils veulent accorder à
ce domaine de l’activité économique et sociale.
E. Marique
Président de la Commission des jeux de hasard