Telle mère, tel groupe - Cécile Geoffray

Transcription

Telle mère, tel groupe - Cécile Geoffray
Cécile GEOFFRAY
222 Route de St Didier
69760 LIMONEST
APPROFONDISSEMENT P.R.H.
TELLE MERE,
TEL GROUPE
ARFATSEMA – 90 Cours Tolstoï – 69100 VILLEURBANNE
Année 2007/2008
1
SOMMAIRE
L'ASSOCIATION TEMPS JEUNES
L'association Temps Jeunes
Mes fonctions à Temps Jeunes
Les personnels volontaires
Page :
3
3
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5
INTRODUCTION
6
PREMIERE PARTIE :
La Fonction narcissique du groupe enfanté
8
1/ Un groupe, une équipe en général,
en centres de vacances en particulier
8
2/ Devenir mère
8
3/ Choisir l'enfant en vue d'être le parent
que l'on désire être
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4/ Enfanter le même que soi et être la bonne mère,
le bon père
11
DEUXIEME PARTIE :
Un contrat narcissique
14
1/ Qu'est ce le contrat narcissique ?
14
2/ Rupture du contrat par l'animateur du groupe
16
TROISIEME PARTIE :
Endettement généalogique
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1/ Affronter la fantasmatique institutionnelle
18
2/ Ni mère, ni fille
19
CONCLUSION
21
BIBLIOGRAPHIE
22
2
L'ASSOCIATION TEMPS JEUNES
L'Association Temps Jeunes :
L’association TEMPS JEUNES, régie par la loi 1901, a été déclarée en préfecture en
1988. Association d’éducation populaire, agréée par les ministères de la Jeunesse et de
l’Education Nationale, des Sports, du Tourisme, elle organise des centres de vacances
pour les 4/17 ans, des classes de découvertes et des formations BAFA et BAFD.
Son siège social se situe au 99 rue de Merlo, 69600 OULLINS.
Le bureau est constitué d’un président, d’un vice-président, d’un trésorier et d’un
secrétaire. Le conseil d’administration réunit des adhérents actifs (directeurs de Centres
de Vacances et de Loisirs, formateurs BAFA-BAFD), des représentants de collectivités
partenaires (comités d’entreprises, municipalités…), des experts compétents concernant
le monde du loisir et des jeunes.
Les salariés sont au nombre de 29 dont 21 au siège, 2 sur l’antenne de Paris, 2 sur
l’antenne de Grenoble, 4 sur les centres permanents (en Rhône-Alpes).
L'organigramme est comme suit : 1 directeur et 5 cadres, chacun responsable d'une
équipe de salariés. Je fais partie de l'équipe "Séjours et Formations".
9000 enfants et jeunes de 4 à 17 ans sont accueillis chaque année pendant les vacances
scolaires, soit 305 séjours organisés en France et à l’étranger. 6000 élèves partent en
classe transplantées. 1400 animateurs et directeurs de centres de vacances et de loisirs
sont formés par Temps Jeunes.
Chaque activité est en lien avec les autres, soit par les personnes, soit par le patrimoine
immobilier : la formation alimente le réseau Directeurs et Animateurs des centres de
vacances et des classes de découvertes. Toutes les activités partagent le patrimoine,
composé de 5 structures d’accueil.
La plupart des enfants accueillis en centres de vacances sont d’origine rhône-alpine,
parisienne. Ils appartiennent essentiellement aux classes sociales aisées ou aux classes
défavorisées (public très aidé). Beaucoup sont aidés par des comités d’entreprise, des
mairies, des conseils généraux.
Les élèves en classes de découvertes viennent essentiellement de région Rhône-Alpes et
certaines de région parisienne. Les stagiaires BAFA et BAFD sont originaires de la
région Rhône-Alpes.
Les ministères de la jeunesse et des sports, du tourisme sont les ministères de tutelle.
Financièrement, Temps Jeunes est autonome puisqu’elle ne reçoit aucune subvention
pour l’organisation et la mise en oeuvre de ses activités.
Le Projet Educatif est directement inspiré par les fondements et les valeurs de
l’association, qui se proposent de :
- permettre à tous, dans une volonté de mixité sociale et culturelle, de participer
à des activités éducatives de qualité, favorisant le développement harmonieux
de leur personnalité et l’accession à l’autonomie.
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-
favoriser la participation et la prise de responsabilité de chaque adhérent,
adulte ou mineur, par l’apprentissage de la vie collective et de la démocratie.
Mes fonctions à Temps Jeunes :
Je suis impliquée dans l’association Temps Jeunes depuis 1997. D’abord en tant
qu’adhérente, animatrice, directrice et formatrice. Après une participation active aux
différentes commissions de réflexion, militante pour les valeurs éducatives de
l’association, j’ai été embauchée en septembre 2000 sur le poste d’animatrice du réseau
Formateurs.
Ma fonction à Temps Jeunes est d’abord et avant tout consacrée au secteur formations
BAFA et BAFD dont je suis responsable.
Mes missions se répartissent en plusieurs axes. Une mission de recrutement, de formation
et d’accompagnement des formateurs vacataires. Un travail de mise en place des stages :
constitution des équipes en fonction des diplômes, compétences, aptitudes et personnalité
des formateurs (au nombre de 3 par équipe), organisation pédagogique (travail avec les
formateurs à partir de leur projet pédagogique de stage, des méthodes, bilans de
formation), réservation des maisons d’accueil. La programmation des stages consiste en
l’élaboration de la brochure, le suivi des différents partenaires commanditaires de
formations (centres sociaux, municipalités...). De plus, j'ai une responsabilité financière
du secteur : budget prévisionnel, bilan financier, validation des dépenses.
Au delà du secteur formation, j’ai en charge l’élaboration ou le pilotage pour la création
d’outils pédagogiques concernant les stages mais aussi les centres de vacances, les
classes découvertes ou tout ce qui fait lien avec notre secteur d’activités et notre public.
J’assume une autre mission plus globale et transversale concernant l’ensemble des
activités de l’association : je coordonne le recrutement, l’animation et la formation des
personnels vacataires et saisonniers.
Cela se décline donc dans la mise en place et le suivi d’une procédure de recrutement des
directeurs vacataires de centres de vacances et des personnels saisonniers sous contrat
pour les classes transplantées. Mais aussi l’animation, la formation de ces acteurs ainsi
que l’animation de temps de formation, de commissions de réflexion, d’analyse de la
pratique.
Les personnels volontaires :
Il s'agit de personnes se proposant de participer à l'encadrement, à la direction des séjours
de vacances, des formations BAFA et BAFD. La plupart de ces volontaires s'engagent
sur ces actions sur leurs temps de congés. Globalement, je peux répartir ces volontaires
selon les catégories socio-professionnelles suivante :
- 55% sont enseignants
- 27% sont animateurs socio-culturels, travaillent dans le secteur
éducatif
- 14% sont étudiants
- 4% autres professions / sans profession
Après six ans d'expérience dans le recrutement, je peux affirmer qu’il m’est aisé de
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percevoir rapidement, lors d’un entretien d’embauche la personnalité, les compétences,
les besoins en formation mais aussi les moteurs personnels, transversaux du candidat à
s’engager dans l’animation volontaire, ceci grâce aux outils de recrutement que j’ai au fil
des ans affinés ainsi qu’à l'expérience acquise dans la perception et l’appréhension de ce
que me donne à voir, à entendre le directeur, l’animateur ou le formateur postulant.
Voici quelque temps, notamment à partir des différents travaux liés à la formation
DEFA, des questionnements apparaissent, concernant les moteurs à l’engagement
volontaire des personnels vacataires ou saisonniers.
Qu'est-ce qui motive des formateurs BAFA/BAFD et des directeurs de centres de
vacances à encadrer des actions durant leurs vacances, leur temps libre ?
J’ai pu constater des intérêts, des revendications différentes en l’espace de 10 ans, depuis
mon implication volontaire ou professionnelle à Temps Jeunes. En effet, il me semble
que les personnels volontaires ont une appréhension plus professionnelle de leur
investissement. On parle beaucoup moins de volontariat, de militantisme que de travail,
de temps de travail. A écouter, échanger quotidiennement avec les formateurs, je ne peux
que subodorer une mutation du militantisme, ce dernier laissant place à une évidence où
le temps, c’est de l’argent. N’ayant pas les compétences, les moyens de mener une
enquête sociologique et d’en analyser les résultats, je ne peux en aucun cas affirmer ce
ressenti lié à des paroles et des conversations informelles.
Depuis quelques temps, je peux observer de nouvelles revendications, de nouvelles
attentes de la part des personnels occasionnels. En effet, il apparaît certain que
l’indemnisation liée à des temps d’implication soit centrale dans le choix ou non de
participer à telle ou telle action. Quand je parle d’indemnisation, celle-ci peut revêtir des
aspects financiers mais aussi symboliques : choisir son séjour, le lieu de la formation à
encadrer, avoir plus de matériel à disposition, faire valoir son pouvoir d’action, la
reconnaissance d’un savoir-faire…
Par exemple, un directeur qui choisit de diriger un centre de vacances accueillant un
nombre élevé d’enfants demandera aujourd’hui une indemnité financière pour couvrir le
temps important de préparation (recrutement d’une quinzaine d’animateurs, élaboration
des menus et commandes alimentaires…). Il y a encore 3 ans, de telles demandes
n’étaient pas évoquées.
Il est évident que dans le don de soi, de son temps… rien n’est gratuit. Un bénévole, un
militant vient toujours chercher quelque chose dans son implication. Mais aujourd’hui
l’argent est primordial dans l’engagement des volontaires. Il semble que la rémunération
proposée pour une direction de centres de vacances ou une formation ne vaut pas le
temps d’investissement et les risques en terme de responsabilité.
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INTRODUCTION
Maintenant que ces considérations ont été posées, concernant la motivation, les moteurs à
l’investissement, à l’engagement des personnels vacataires, il me paraît essentiel
d’aborder le versant de l’animateur, du recruteur.
Ce cheminement de réflexion a été jalonné par mon cursus DEFA. D'abord un travail en
unité PRH sur l'ouvrage de Didier ANZIEU, Le Groupe et l'Inconscient, m'amenant à des
interrogations sur ma façon d'être face aux volontaires de l'association. Puis le dossier de
Technique d'Animation, lié à l'animation et à la formation de ces volontaires, m'a, à
l'identique, questionnée sur ma façon d'habiter mes fonctions, notamment celles en lien
avec le recrutement, l'animation des formateurs, des directeurs de centres de vacances.
Cela appelle donc à interroger la façon dont je recrute et anime ce réseau, à écouter les
questionnements liés à mon fonctionnement, moi qui suis aux manettes des procédures
de recrutement.
Si l’on prend en compte les éléments en lien avec les motivations à devenir formateur,
directeur proposés plus haut, quelle place doit-on accorder aux moteurs obscurs, plus
inconscients à l’engagement lors du recrutement ?
Il est évident que le savoir-être, les valeurs éducatives portées par les volontaires sont
centraux dans le cadre de nos actions. Comment rester neutre lors du recrutement,
lorsque ces « essentiels » du recruté ne font pas écho à ceux du recruteur ? Comment
néanmoins refuser le candidat qui répond aux compétences et aptitudes attendues pour le
poste ?
Puis vient une question qui me paraît primordiale dans ma mission et l’appréhension du
réseau, son animation, son accompagnement : dans quelle mesure, à plus au moins long
terme, le réseau des volontaires serait-il tout à fait différent de mes attentes personnelles,
de mes représentations de l’engagement militant ? Ce réseau ne me ressemble-t-il pas ?
Progressivement, suite à des regroupements de travail avec les volontaires, je me suis fait
des remarques concernant leur moteur à l'engagement, leur militantisme. J'ai comparé
avec ma propre évolution, mon engagement quand j'étais, comme eux, engagée
volontairement sur des actions de Temps Jeunes (Animations, directions de séjours
vacances, formations BAFA/BAFD).
Cette constatation m'a ensuite poussée à m'interroger sur ce que je pouvais chercher chez
les nouveaux candidats. J'ai alors pris conscience que j'étais assez encline à embaucher
des directeurs et des formateurs dont les valeurs, les intentions pédagogiques voire les
parcours dans l'engagement volontaires faisaient écho aux miens.
De plus, il apparaît que ces personnes en qui je peux en quelque sorte "me" retrouver, me
renvoient bien souvent des signes de reconnaissance positifs sur mon travail, mes
aptitudes, me donnent du crédit et de l'estime.
Suite à ces diverses considérations, à ces précédents questionnements, je propose donc la
problématique suivante :
En quoi une équipe a-t-elle une fonction narcissique pour celui qui la recrute, la
constitue et l’anime ?
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Bien que ces questionnements aient pour point de départ une réflexion sur mon travail,
mon positionnement personnel sur mon recrutement, la constitution des réseaux auxquels
je participe, j'élargirai ici l'interrogation à tout animateur d'une équipe d'animateurs, de
formateurs… Animateur qui recrute, constitue une équipe de volontaires.
Elargissement nécessaire puisque je situe mon action et la réflexion qui lui est
concomitante au centre d'un fonctionnement de Temps Jeunes de type filial, traversant
l'organigramme : de la direction, aux salariés, aux personnels volontaires. En effet, j'ai la
sensation que l'institution s'organise, vit telle une grande famille avec ses rites, ses codes,
ses interdits…
Je traiterai cette problématique à partir du champ théorique de la psychanalyse, lié à la
dynamique de groupe.
Je proposerai trois hypothèses, que j'illustrerai par des faits et des exemples tirés de mon
contexte professionnel, eux-mêmes étayés par des références théoriques.
Dans un premier temps, j'émettrai l'hypothèse selon laquelle l'animateur, à l'initiative
d'un groupe, est dans une démarche d'enfantement et se place plus précisément dans un
rôle de mère.
Puis je ferai l'hypothèse qu'enfanter une équipe situe d'emblée les acteurs dans un contrat
narcissique.
Enfin, j'interrogerai la possibilité qu'a ce contrat narcissique d'être rompu et combien cela
peut mettre en évidence un endettement généalogique au sein d'une institution.
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La fonction narcissique du groupe enfanté
J'avance alors l'hypothèse suivante :
L’animateur à l’initiative du groupe est dans une démarche d’enfantement : il met
au monde une équipe qu’il va nourrir et protéger. A son tour, et en retour, le
groupe aura pour ce leader une fonction narcissique.
1/ un groupe, une équipe en général ,
en centres de vacances en particulier:
Qu'est-ce qu'un groupe ? C'est au moins 3 personnes réunies autour d'un objectif, d'un
but, d'un point commun. Ce dernier serait l'occasion de développer un sentiment
d'appartenance de ces individualités à un groupe donné.
Lorsque l'on réunit plusieurs individus, aux personnalités, aux vécus, aux expériences
divers, il va falloir faire naître l'équipe, il va falloir fédérer ces individualités qui
formeront un tout, un temps donné, pour un objectif donné. Au-delà de la mission pour
laquelle chacun est recruté (animateur, formateur, stagiaire), une vie affectée, des
échanges interpersonnels vont prendre corps.
Le cadre des centres de vacances est particulièrement propice à vivre ces expériences de
groupes, lieu d'affects, d'émotions, de sentiments, corollaire des fonctions, prétexte
premier à la réunion de ces individus. Œuvrer pour des intentions pédagogiques voire
philanthropiques, vivre en collectivité durant plusieurs jours, plusieurs semaines, sur son
lieu de travail, avoir que très peu de contact avec son entourage familier : voici les
ingrédients qui font qu'une colonie de vacances est parfois une microsociété. Alors des
règles propres à cette petite société s'instaurent, des rôles sont endossés (les meneurs, les
suiveurs…), des liens se tissent entre certains, on peut y tomber amoureux, s'y faire des
amis, des ennemis…
Qui a vécu une telle expérience d'équipe, a vécu la fin du séjour comme un deuil,
désespoir de la fin d'une société idyllique dans laquelle on se sent tellement en sécurité,
bien avec les autres, bien dans son rôle. Et c'est l'irréversible que l'on subit : "voilà c'est
fini, c'était ma meilleure colo, on sera toujours ami, rien ne sera jamais plus comme
avant…". Et puis quelques mois plus tard, chacun des membres de cette équipe a repris le
cours de sa vie, retrouver sa famille, ses amis, ses occupations, ses préoccupations… Les
animateurs tant attachés les uns aux autres s'appellent de plus en plus rarement, n'ont plus
le temps de se voir autour d'un verre… le groupe est mort.
2/ Devenir « mère » :
Ce qu'il y a de plus étonnant quand on est dans une équipe, où que l'on observe une
équipe d'animateurs, ce sont les rôles que chacun va spontanément endosser et jouer tout
au long du séjour.
La plupart du temps, le leader, dans sa façon de diriger son équipe, va donner le ton des
relations, va influer sur les relations interpersonnelles et les rôles que chacun intégrera.
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A voir le fonctionnement de certains directeurs de centres de vacances ou encore de
formateurs, on perçoit rapidement une relation très affective avec leur équipe
d'animation, leur groupe de stagiaires. Ils établissent avec l'équipe une relation qu'ils
pourraient vivre avec leur propre enfant : ils sont aux petits soins avec leurs animateurs,
ils les protègent, les chérissent, les gâtent…
On pourrait faire ici le lien avec les fonctions de "holding" et de "handling" développées
par WINICOTT (1).
Le "Holding" désigne tous les moyens qui donnent un support au Moi naissant de
l'enfant. La mère et l'enfant sont tout d'abord imbriqués sur un plan psychique, puisque
l'enfant s'appuie totalement sur sa présence. Le soutien, le portage fournis par la mère
comprend tous les soins quotidiens adaptés à l'enfant, le protégeant contre les
expériences angoissantes. Le "holding" est à la base de l'intégration du Moi en un tout
unifié.
Tout comme la mère, l'animateur d'une équipe soutient son équipe dans son travail, dans
les relations qui s'établissent, il porte l'équipe dans ses actions. Mais la porte-il
psychiquement ? La pense-t-il, l'associe-t-il à sa vie interne ?
Le "Handling" est la manière dont l'enfant est traité, manipulé, soigné par sa mère. Il
permet l'installation de la psyché (l'ensemble des phénomènes psychiques, formant l'unité
personnelle) dans le soma (corps) ainsi que le développement du fonctionnement mental.
La mère donne les soins à son enfant, tout comme l'animateur du groupe, le directeur du
séjour se préoccupe du confort des animateurs, propose des "réunions –casse-croûte" où
sont proposés des bonbons, gâteaux, mets de qualité…, a des mots gentils et
encourageants pour chacun, écoute les coups de blues, facilite l'initiative des plus
timides….
C'est comme si venait se jouer ici une carence de maternité, comme si ne pouvant être
mère dans les faits, des volontaires engagés trouvaient dans l'animation d'une équipe
l'épanouissement souvent vécue par la mère dans ses fonctions : nourrir, protéger,
aimer…
Et puisque c'est inhérent à un groupe de se trouver une mère, une rencontre nécessaire se
fait alors entre des individus réunis et une personnalité en mal de maternité.
Je prendrais ici l'exemple de Carole C. . Cette femme de 40 ans est ingénieur en
formation, investie dans diverses actions en tant que bénévole, membre active de Temps
Jeunes depuis longtemps. Elle est mariée, n'a pas d'enfant. Directrice de centres de
vacances et formatrice BAFA/BAFD, elle a un relationnel très particulier avec les
personnes avec qui elle collabore, et adopte un fonctionnement très manichéen.
Lorsqu'elle est directrice de séjour de vacances, qu'elle est aux commandes d'une équipe
d'animateurs qu'elle a recrutée, elle peut osciller entre une attitude très aimante, dévouée
avec certains et adopter un comportement très dur, autoritaire avec d'autres. Ceux qu'elle
affectionne sont, selon Carole, exceptionnels, très compétents, travailleurs… Elle ne tarit
pas d'éloges à leur égard. Elle peut même les aider en dehors du séjour dans leur vie
personnelle, professionnelle (leur trouver du travail, les aider à préparer un concours…).
Ils sont alors très liés avec elle, voire redevables.
Les animateurs qui, par contre, ne lui conviennent pas sont "fainéants", "manipulateurs",
dangereux psychologiquement", "brassent du vent"… Ils subissent alors des remarques
acerbes de la part de Carole, celle-ci ne leur donnant même pas la chance et les moyens
de progresser dans leurs fonctions.
(1) WINICOTT, De La Pédiatrie à la Psychanalyse
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C'est comme s'il y avait l'enfant prodige, doté des meilleurs qualités et promis aux soins
les plus attentionnés, et à l'inverse, l'enfant indigne, celui qui ne remplit pas son rôle, qui
n'est pas à la hauteur de ce que l'on attend de lui, promis aux réprimandes, pire à
l'indifférence.
Ce clivage en "bon" ou "mauvais" animateur, comme un "bon" et un "mauvais" objet
semble avoir une autre fonction pour Carole. C'est comme s'il s'agissait du clivage d'elle
même en tant que sujet : celle qui n'est pas mère pour des raisons qui lui appartienne
("j'ai assez des enfants des autres à m'occuper" a-t-elle dit un jour) et peut-être celle qui
en aurait le désir profond.
Autre personnalité très marquée du réseau des volontaires : Pierre P. Marié, il a deux
petites filles et est directeur d'école primaire.
A Temps Jeunes, il exerce principalement des fonctions de formateur, de responsable de
formations générales BAFA, première approche de l'animation pour des jeunes dont la
moyenne d'âge est de 17/18 ans.
Aux dires de ceux qui ont été stagiaires dans les formations de Pierre et de ceux qui ont
travaillé avec lui, c'est un "gourou". Très aimant, sympathique, empathique, il permet à
chacun de réussir, propose à chacun de tirer le meilleur de soi-même.
On pourrait dire que Pierre nourrit spirituellement les stagiaires. Il les fait travailler,
réfléchir sur leurs valeurs personnelles, leur engagement. Ces stagiaires de 17/18 ans en
moyenne parlent d'eux et on leur parle d'eux. Pierre parle ainsi à la sensibilité de ces
individus dont la personnalité adulte est en construction. Il les aide à grandir.
René KAES(1) décrit l'affinité profonde qui existe entre l'activité formative et les
fantasmes qui ont pris corps dans le rapport à la mère. La formation serait d'abord une
affaire qui concerne la mère, son corps, la maternité et le désir de la mère. KAES écrit
"qu'il s'agisse de former comme la mère, en tant que mère ou d'être formé par la mère, le
fantasme commun est toujours de former la mère elle-même, de la reproduire, ou de la
représenter."
Ainsi, animer une équipe serait directement produit par le désir, le fantasme d'être mère,
de retrouver sa mère. En formant les membres d'un groupe, l'animateur se met d'emblée
dans une posture de parent et plus particulièrement dans celle d'une mère.
3/Choisir l’enfant en vue d'être le parent que l’on désire être
Constituer une équipe appelle en amont un travail de réflexion sur ce qu'on en attend ?
quelles compétences doit-elle compter, qui en seront les membres…? Il convient aussi
d'appréhender la façon dont on va l'accompagner, l'animer, l'encadrer, la cadrer…
En choisissant, en recrutant les membres du groupe, l’animateur est comme en position
de choisir l’enfant qui fera de lui le parent qu’il désire être. Faire le choix de recruter des
animateurs débutants, avides de formation, d'expérience, c'est pour l'animateur l'occasion
d'être dans une fonction nourrissante. Recruter une équipe aux aptitudes limitées, aux
caractères marqués, c'est pour l'animateur l'occasion d'exercer des fonctions d'autorité,
des fonctions cadrantes.
(1) KAES, Fantasme et Formation, "Quatre études sur la fantasmatique de la formation et le désir
de former", 3/ La formation et la puissance mère.
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Le profil de l'équipe que l'on constitue n'est donc pas innocent, par rapport aux rôles
maternants que l'on se propose de jouer en tant que leader de ce groupe.
Mathilde L., directrice de centres de vacances, se présente comme quelqu’un de très
dirigiste dans sa manière d’animer une équipe d’animateurs. Elle est très exigeante
envers eux et attend d’eux un travail irréprochable. Or les équipes qu’elle constitue sont
le plus souvent en-deçà de ses exigences et de fait, puisqu’elle recrute des animateurs très
jeunes, souvent sans grande expérience. Les mettrait-elle ainsi d’emblée en échec, et se
proposant alors à une place de « mère autoritaire » dont l’enfant déçoit les espérances ?
Une mère qui aurait le pouvoir, celui de n’être pas remise en cause par une équipe plus
compétente qu’elle ?
Pour être à la hauteur de ce qu'attend Mathilde, les animateurs doivent solliciter cette
dernière dans sa fonction formatrice, doivent accepter les remontrances, corollaires de
l'apprentissage dirigiste et autoritaire.
Dans Recherches sur les petits groupes, selon Wilfried BION(1), les membres d'un
groupe se réunissent toujours pour effectuer un travail, faire quelque chose. Mais cette
activité de travail est soutenue par d'autres activités de nature psychique. Ces activités
psychiques sont réunies sous les termes de présupposés de base : le couplage (émerge de
sous-groupes ou de couples pour lutter contre l'angoisse d'abandon), l'attaque-fuite (lutter
contre l'angoisse de mort, le groupe attaque ou fuit le leader), la dépendance.
C'est cette dernière qui nous intéresse ici : "le groupe se réunit pour être soutenu par un
leader dont il dépend pour sa nourriture matérielle et spirituelle, de même que pour sa
protection".
Selon Bion, dans l'hypothèse de base Dépendance, les individus n'ont pas de relations
entre eux, mais chacun en a avec le leader. Le groupe dépendant a un besoin aussi
impératif d'avoir un individu dépendant qu'un individu dont il puisse dépendre.
L’équipe dépend donc de Mathilde pour sa nourriture matérielle (elle organise le centre,
détient les budgets...) et spirituelle (elle est formatrice, apprend aux animateurs des
techniques de jeux, l’organisation de la vie quotidienne...), de même que pour sa
protection.
4/ Enfanter le même que soi et être la bonne mère, le bon père
En recrutant le réseau des formateurs, j’accorde une importance toute particulière aux
valeurs personnelles, aux moteurs à l’engagement de ceux que je rencontre. Ces points
sont parfois même plus fondamentaux pour moi que les compétences attendues, les
critères d’embauche.
Qu’est-ce qui fait que ces « méta-valeurs » sont si essentielles dans la constitution du
réseau de volontaires que j’anime, forme, volontaires que je décide de recruter ou pas
pour participer à telle ou telle action ? Qu'est-ce qui fait que ces valeurs qui englobent et
dépassent les intentions pédagogiques des volontaires ont une place si capitale dans mon
recrutement ?
(1) BION, Recherches sur les petits groupes, "Rétrospective", page 99
11
Quels mécanismes sont en jeu dans ma procédure de recrutement ? Depuis 7 ans que
j'exerce cette fonction, je n'ai eu recours qu'une seule fois aux petites annonces sur des
sites internet liés aux métiers de l'animation. Généralement, je travaille à partir de
candidatures spontanées (animateurs, directeurs ayant encadré des centres de vacances à
Temps Jeunes, personnes recommandées par tel ou tel volontaire déjà engagé dans notre
réseau…), ces personnes ayant donc déjà cheminé dans leur motivation à devenir
formateur.
A la lecture de leur curriculum vitae, je leur propose ou pas un entretien pour évaluer
leurs compétence et aptitudes à devenir formateur. Je mène l'entretien de façon très
dirigée, à partir d'une grille qui va me permettre d'interroger leur capacité à analyser,
observer, évaluer, accompagner et de connaître quel type d'animateur, de directeur et
donc de formateur ils sont. Je questionne assez peu leurs savoirs, leurs savoirs-faire mais
m'arrête surtout sur leur savoir-être, les faisant parler de leur valeurs, leur engagement
dans l'éducation populaire. A partir de ce que j'aurai perçu durant l'entretien, j'évalue la
façon dont je vais accompagner ces nouveaux formateurs dans leur propre formation, les
clés de réussite à leur donner pour endosser leurs fonctions.
Ensuite, j'enclenche un processus de formation du nouveau formateur : un temps de
travail sur les contenus et méthodes utilisés en stage BAFA, son intégration dans une
équipe qui l'accueillera avec son statut de nouveau … Puis après une première expérience
en situation d'encadrement de stage, une nouvelle rencontre permet de faire le bilan et
envisager des objectifs à atteindre en tant que formateur lors de prochaines sessions
Aujourd'hui, à partir du travail pour ce mémoire, j'ai le sentiment que ma façon de
recruter, d'intégrer de nouveaux formateurs au réseau fait écho avec ma propre
expérience. Je cherche chez ces personnes les valeurs qui me parlent, qui sont
importantes pour moi. J'ai le sentiment que progressivement, ce réseau de volontaires me
ressemble de plus en plus.
Quel mécanisme, processus est alors mis en œuvre dans ma manière de faire ?
Recruter les formateurs sur des critères liés à leurs valeurs, leur savoir-être qui rentrent
en résonance avec les miens propres, nous fait d'emblée nous reconnaître comme
semblables. Et puisque j'ai un ascendant hiérarchique et que je fais autorité par
l'expérience en formation qu'ils n'ont pas, je me situe comme leader de ce réseau des
formateurs.
René KAES(1) écrit que "parmi les expériences structurantes de l'enfance, celle du stade
du miroir est sans doute décisive pour différencier l'activité formative d'hommes d'autres
activités de formation et de création". Le désir du formateur serait d'être lui même désiré
par la personne qu'il modèle, qu'il forme.
René KAES(2) soutient que le groupe est le lieu d'une réalité psychique propre, et qu'il se
crée un "appareil psychique groupal". En se donnant un leader, le groupe se donne un
Idéal du moi c’est à dire un modèle auquel le sujet (ici le groupe) cherche à se conformer.
En vivant l’illusion groupale, il se donne un moi idéal : un idéal de toute puissance
narcissique, rappelant celle de la petite enfance. Puis il se constitue un surmoi : le
censeur qui posera les interdits parentaux, qui ne permettra à aucun membre du groupe de
vivre l’inceste.
Ainsi donc, il existe un inconscient groupal et le groupe se fédère autour d'une
fantasmatique.
(1) KAES, Fantasmes et Formation
(2) KAES, L'Appareil Psychique Groupal
(3) ANZIEU, Le Groupe et l'Inconscient, pages 63 et 64
12
Dans le groupe, il y a un processus inconscient fondamental : des fantasmes individuels
des membres sont entrés en résonance les uns avec les autres ou bien le groupe s’est
cristallisé autour d’une imago commune, c'est à dire la représentation prototypée de la
mère, du père ou encore d’une fonction comme le chef par exemple.
Didier ANZIEU avance que dans le groupe et dans le rêve, les pulsions fondamentales
sont à l’œuvre : pulsions libidinales, pulsions agressives, pulsions de mort. Comme le
rêve, le groupe est l'espace d'un accomplissement imaginaire de désirs et de menaces.
L’illusion groupale agirait comme une protection contre les fantasmes et angoisses
archaïques (morcellement, séparation, castration).
" …le désir réalisé dans le groupe et dans le rêve est un désir réprimé la veille; ce sont
des désirs non satisfaits dans les relations interindividuelles, dans la vie privée et dans la
vie sociale, qui sont reportés sur le groupe." (1)
" Une des résistances à la vie de groupe provient de ce que l'égalité théorique entre les
membres constitue un obstacle au désir oedipien d'entretenir des relations amoureuses
partagées avec le leader… Le désir réalisé dans le groupe et le rêve est un désir réprimé
de l'enfance." (2)
L’illusion groupale manifeste une affirmation inconsciente selon laquelle les groupes
seraient générés spontanément et leurs membres vivraient à l’intérieur du corps d’une
mère féconde et toute puissante. L’espace imaginaire du groupe est la protection du corps
fantasmé de la mère, avec ses organes internes, y compris le phallus et les enfants-fèces
De là naît un état psychique particulier où chacun ressent le groupe, le chef comme bon.
Désirer être en groupe traduit la volonté de guérir ses propres blessures narcissiques par
une identification projective au bon sein. Le groupe comme le rêve produiraient une
régression des instances psychiques, "moi, ça, surmoi". ANZIEU écrit :"Ni le moi ni le
surmoi ne peuvent plus contrôler suffisamment les représentants-représentations de la
pulsion. Les deux instances maîtresses de l'appareil psychique se trouvent alors être le ça
et, mal différencié de lui, le moi idéal, lequel on le sait, cherche à réaliser la fusion avec
le sein, source de tous les plaisirs, et la restauration introjective de ce premier objet
(partiel) d'amour perdu. Le groupe devient pour ces membres le substitut de cet objet
perdu"(3).
Ainsi en se regroupant, chacun exprime le désir de la mère dont il a été dépossédé.
En définitive, constituer, recruter, animer une équipe reviendrait à mettre un enfant au
monde, pour vivre un désir d'être mère, mère idéale, mère de l'enfant idéal. Heureuse
rencontre, puisque le groupe serait le substitut de la mère perdue, premier objet d'amour.
Toutefois, si le leader du groupe est à l'initiative de cette occasion de reproduire la mère,
il attend de la part de ses membres un retour narcissique.
(1) ANZIEU, Le Groupe et l'Inconscient,
(2) idem
(3) idem
13
Un contrat narcissique
Le fondateur et donc l’animateur de l’équipe est dans le fantasme fondateur de
l’enfant idéal en lien avec l’image qu’il veut pour lui de parent idéal.
Je postule donc que l'animateur et les membres de "son" groupe ont établi un
"contrat narcissique".
1/ qu'est-ce que le contrat narcissique ?
Piera AULAGNIER décrit le contrat narcissique comme le processus selon lequel
l'individu est lié à sa famille, au groupe dans la chaîne des générations. Il doit assurer la
continuité de la lignée et de l'ensemble social, et afin de garantir ceci, la famille doit
investir narcissiquement le nouveau membre. Chaque nouveau membre d'une famille,
d'un groupe doit être porteur des valeurs, du discours fondateur, et à cette condition,
l'ensemble famille, groupe donne une place à cet élément nouveau. Ainsi s'établit le
contrat narcissique, qui assigne au futur sujet un lieu social : "le contrat narcissique
s'établit grâce au préinvestissement narcissique par l'ensemble, de l'infans comme voix
future, et qui prendra le poste auquel il a été destiné…"(1)
Le leader qui est à l'initiative du groupe permet à chacune des personnes de venir y
trouver, y jouer quelque chose.
Le leader lui-même membre d'une famille, d'un groupe avec qui il a passé contrat
(contrat narcissique) est le biais par lequel seront intégrées de nouvelles personnes.
Le groupe permet à l'animateur qui le recrute de vivre une maternité, en contre partie les
membres du groupe tirent profit de cette "mère-leader", qui leur procurera ce qu'ils
viennent chercher dans l'expérience de groupe.
Ce qui dépasse les moteurs de ce leader et des personnes de son groupe, de son équipe est
qu'un ensemble, "une famille", une institution plus vaste les englobe et les dépasse.
Nous nous situons ici sur le registre d'un contrat narcissique entre l'institution et les
éléments du groupe. Ces derniers sont endettés et se doivent de tenir, d'habiter la place à
laquelle ils ont été assignés par ce "parent idéal", qui les protège, les nourrit mais qui les
assigne au delà à tenir un rang donné, un rôle à l'échelle de l'institution, de la famille
élargie.
Si dans le contrat narcissique, les membres d'un groupe, d'une famille ont, en contre
partie de l'investissement narcissique de l'ensemble à leur égard, le devoir d'être porteurs
des valeurs, du discours du groupe, que renvoie une personne qui disfonctionne au sein
de l’équipe ? met-elle à mal cette fonction narcissique, cet idéal attendu ? Il peut arriver
qu'une personne qui est intégrée à une équipe ne soit pas à la hauteur de ce que le groupe
attendait, tant sur le plan de ses compétences que de sa personnalité, qu'elle soit toujours
en opposition ou en décalage avec les autres membres.
Il apparaît parfois au sein d'un groupe un élément qui va se démarquer du reste des
membres. Il peut être alors dans un rôle de bouc-émissaire, dans un rôle de bouffon.
Cette personne est-elle dans un dysfonctionnement ou bien joue-t-elle un rôle, une place
que le groupe, l'animateur lui ont inconsciemment assignés ?
(1) AULAGNIER, La Violence de l'Interprétation
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C'est comme si elle ne pouvait participer au groupe qu'à l'unique condition de tenir cette
place. C'est comme si l'équilibre mental, psychologique de groupe ne pouvait se
maintenir qu'à l'unique condition de compter ce bouc-émissaire, ce bouffon. Quelle
fonction cet individu joue-t-il pour le groupe ? Le contrat narcissique prend-t-il ici tout
son sens ?
Alain B. a été pour Temps Jeunes directeur de centres de vacances et a encadré une
formation. Alain a plus de soixante dix ans. Il est retraité de l'éducation nationale,
célibataire, et a un passé conséquent dans l'animation des centres de vacances.
Je peux dire qu'Alain a un caractère fort, il établit des relations interpersonnelles très
difficiles avec les permanents de l'association et le reste du réseau directeurs/formateurs.
A chaque regroupement de travail, il tient une position de râleur, il remet en question le
fonctionnement de l'association, sur un ton autoritaire, agressif. Même quand il n'est pas
invité à des temps de travail, il vient…
Depuis l'année dernière, c'est l'association qui a rompu la collaboration avec lui sur les
actions de direction et de formation, puisque le point d'achoppement concernait les
valeurs de Temps Jeunes, et par conséquence la mise en place du projet éducatif sur les
séjours.
De façon plus distanciée, Alain mettait surtout à mal l'équilibre du groupe , il rompait le
contrat narcissique, c'est comme s'il refusait la nourriture dont Temps Jeunes souhaitait
nourrir son réseau volontaire. Par exemple, lors d'un week-end bilan des séjours d'été
avec les directeurs, les interventions d'Alain ont été très difficiles à cadrer durant un
débat. Alain situait ses prises de position sur une question qui n'avait pas de lien avec le
thème de débat proposé. Mais lui insistait à vouloir emmener le groupe sur le thème qu'il
voulait aborder. Les 80 personnes présentes regardaient d'un mauvais œil cet élément
perturbateur. Le permanent de l'association qui menait le débat à dû censurer Alain en ne
lui donnant plus la parole.
Généralement, lors de regroupements, de temps de travail conviant les volontaires, Alain
n'établit aucune relation sympathique avec telle ou telle personne du réseau. Chacun
papote dans son dos, il est la cible de moqueries, de remarques assassines.
Est-ce à dire qu'Alain endosse le rôle de bouc-émissaire ? dans ce cas quelle fonction a-til pour le groupe ?
FREUD(1) dit du bouc-émissaire qu'il permet l'unité du groupe, dont l'agressivité ne sera
pas mobilisée en direction du leader mais vers un membre du groupe souvent déviant ou
différent (Alain est pour le coup le plus âgé des directeurs, est-ce de ce fait ?). ceci
préserve alors l'unité du groupe.
Le contrat narcissique alors n'est pas rompu, les différentes pulsions en œuvre dans
l'inconscient groupal (dont la pulsion de mort) n'ont pas court mais sont déviées sur le
bouc-émissaire.
ANZIEU décrit le bouc-émissaire comme réceptacle des pulsions agressives, des
pulsions de mort du groupe.
Comme nous l'avons déjà évoqué plus haut, selon ANZIEU, l'illusion groupale agit
comme une protection contre les fantasmes et les angoisses archaïques, les membres de
ce groupe vivant au sein d'une mère féconde et toute puissante.
(1) FREUD, Psychologie des foules et analyse du Moi
(2) ANZIEU, Le Groupe et l'Inconscient
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Mais la situation de groupe peut éveiller le fantasme de destruction des enfants entre eux.
"L'illusion groupale manifeste une défense contre l'angoisse persécutive collective et la
pulsion de mort peut alors être projetée sur un bouc-émissaire"(2).
L'imago du père, de la mère et celui de l'enfant idéal ne peuvent ainsi être préservés qu'au
prix du sacrifice d'un des membres du groupe, mis dans le rôle de bouc-émissaire. Sans
celui-ci, le contrat narcissique serait rompu et l'équilibre psychologique groupal mis à
mal.
2/ Rupture du contrat par l'animateur du groupe :
Et lorsque le contrat n'est plus honoré par l'animateur, le leader du groupe luimême? Et lorsque c'est cet animateur qui met à mal le groupe? Qu'est-ce que cela
signifie ?
Est-ce à dire que l'animateur ne veut plus jouer, assumer son rôle de mère ? Est-ce à dire
qu'il renie, rejette cet enfant idéal qu'il a mis au monde, qu'il a nourri, choyé ?
Je reviendrai ici sur un incident survenu avec un groupe de formateurs que j'animais.
J'avais invité le réseau formateurs à venir une après-midi se regrouper pour échanger,
réfléchir sur différents items liés à leurs fonctions. Je co-anime souvent ces temps avec
une de mes collègues.
Environ 25 personnes étaient présentes. Je souhaitais que l'on réfléchisse sur l'évaluation
des stagiaires en session BAFA, et notamment sur les stagiaires qui pouvaient nous poser
des difficultés dès le début du stage, stagiaires qui ne pourraient aller au bout de la
formation malgré les conditions de réussite proposées à chacun. La question était
"comment accompagner un stagiaire dont on sait dès le début de la formation qu'il sera
invalidé, à qui l'on ne validera pas le stage BAFA ?"
Le groupe me signifie rapidement l'ineptie de ma question et l'impossibilité d'une telle
situation, chaque stagiaire ayant les possibilités d'évoluer au sein d'un stage. J'essaie
d'éclairer mon propos, donne des exemples pour étayer mon interrogation. Le groupe
rejette à nouveau la possibilité de réfléchir sur ce thème, apparaissant comme impossible
puisque, eux, formateurs mettent tout en œuvre pour accompagner les stagiaires vers la
réussite.
Là j'attaque les formateurs en leur renvoyant une malhonnêteté intellectuelle, et leur dis
que malgré leurs efforts pour encourager les stagiaires, malgré leurs compétences,
certains jeunes peuvent, dès le début du stage, présenter des comportements qui seront
d'emblée incompatibles avec la fonction d'animateur.
A nouveau, le dialogue semble rompu. J'ai le sentiment d'avoir attaqué le groupe de
manière frontale dans sa résistance. Il se ferme et je n'ai plus prise sur lui.
J'étais très agacée que les formateurs ne me comprennent pas, qu'ils ne veuillent pas venir
sur le terrain que je leur proposais, alors j'ai attaqué.
Selon BION, l'organisation psychique du groupe peut se décliner selon trois hypothèses
de base, dont la troisième, celle d'"attaque-fuite". Le groupe réaliserait son unité pour
attaquer ou fuir. Le groupe se rallie affectivement à toute proposition qui exprime un
violent rejet de toute difficulté psychologique ou les moyens de l'éviter.
(1) BION, Recherches sur les petits Groupes
16
En attaquant le groupe, le leader lui donne l'occasion de fuir, réaffirmant ainsi sa
groupalité, puisque l'intérêt premier du groupe est de survivre.
En cette après-midi de travail, j'ai donc proposé au groupe de fuir une de mes attaques.
Les formateurs se sont unanimement soulevés contre mes interventions, renforçant le lien
entre eux.
Au-delà de cette hypothèse de base, qu'est-ce qui a fait que je sois rentrée en conflit avec
le groupe ? que s'est-il manifesté de mon coté et qui m'appartienne dans cette attitude
nouvelle face au groupe ?
C'est comme si je signifiais au groupe que je ne voulais plus le nourrir, ou bien lui offrir
des nourritures (ici le thème de travail) toxiques, qui le mettent en danger. Comme si
j'affrontais mon enfant, ne souhaitant plus le protéger.
Je rompais le contrat narcissique, je n'assumais plus ma place de mère.
Et si c'était le groupe qui m'attaquait en étant dans la résistance, comme pour mettre en
évidence mon renoncement à tenir mon rôle de leader ?
Une interrogation s'impose alors : si je ne suis plus en mesure d'habiter cette place de
mère envers le réseau des volontaires est-ce lié au fait qu'aujourd'hui je sois à un moment
de rupture avec l'institution ?
Actuellement, je souhaite changer d'emploi, est-ce à dire que cet incident soit significatif
de ma volonté de m'extraire de la lignée familiale, fonctionnement inconscient de
l'association, de l'institution ?
17
Endettement généalogique
Dans l'idée qu'il existe un contrat narcissique entre le groupe et son animateur, je
soutiens ici que ce dernier doit aussi habiter une place au sein de la lignée familiale,
et honorer une dette généalogique.
1/ Affronter la fantasmatique institutionnelle
En confrontant mes « enfants », j’affronte la fantasmatique institutionnelle de
Temps Jeunes et l’idée de lignée idéale : les formateurs ne répondent plus à mon
attente.
Pour revenir à l'incident m'opposant aux formateurs, décrit plus haut, j'ai vécu
l'affrontement avec le groupe comme traduisant mon attaque envers la fantasmatique
institutionnelle. Ne plus assumer ma place de leader, de mère de ce groupe, c'est dénier la
mission qui m'est impartie, c'est dénoncer mon travail. Après une analyse de la situation,
alliée à un travail de recherche sur les groupes (pour le présent travail), je suis
aujourd'hui en mesure de dire que c'est mon rang familial que je dénonçais.
Temps Jeunes, qui fêtera en 2008 ses 20 ans, a pour directeur, le fondateur de
l'association. C'est un homme charismatique, assumant des fonctions de direction,
d'encadrement de l'équipe de salariés qu'il accompagne, forme, écoute, motive, recadre…
Cet homme est bien souvent admiré et craint par les salariés parce que faisant autorité du
fait de ses compétences, sa claire-voyance, son empathie envers l'équipe salariée.
Depuis quelque temps, je refuse certaines prises de position du directeur, m'interrogeant
sur ses connaissances, compétences, liées à telle ou telle question. Au delà, je commence
à m'ennuyer dans mes fonctions, ayant le sentiment d'en avoir fait le tour, de ne plus
prendre de risque, de n'avoir plus de défi professionnel à relever.
Lors d'un séminaire d'équipe, j'ai exprimé cette difficulté, mes mots étaient :"j'ai besoin
d'émulation pour avancer dans mon poste, j'ai besoin d'être nourrie".
J'ai alors compris que le travail au sein de l'association, les cadres qui jusqu'ici me
formaient, me permettaient d'évoluer, d'apprendre (et notamment, en grande partie le
directeur) ne me procuraient plus cette nourriture spirituelle et professionnelle.
Je suis même en mesure aujourd'hui, équipée par l'expérience, la formation DEFA, de
remettre en question des positions, des orientations de l'association.
Au delà de cette évolution en compétence, d'un esprit critique plus aiguisé dû à la
maturité professionnelle, n'y-a-t'il pas quelque chose de plus fondamental qui se joue ici
pour moi dans l'institution ?
L'incident relaté plus haut lors du regroupement formateurs, le mouvement de résistance
du groupe à mon égard ne serait-il pas l'effet miroir avec ce que je vis au sein de
l'institution ?
René KAES décrit le "formateur-sein"(1), identifié à la mère nourricière, comme répétant
dans le processus de formation le plaisir et l'angoisse liés au rapport au sein et au
(1) KAES, Fantasme et Formation
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sevrage. "En échange de la nourriture qu'il peut, comme sa propre mère l'a pu faire,
donner ou refuser, le formateur entend recevoir de ses "nourrissons" amour et gratitude, à
moins qu'il n'exerce sur eux le plaisir sadique de les en priver ou de les en gaver… Un
refus de sa (le formé) part est ressenti comme une atteinte à la raison d'être de ce seinphallus, tout changement dans l'attitude d'amour du "nourrisson" équivalant pour le
formateur à la perte de l'objet; ce refus et cette perte sont susceptibles de réactiver chez le
formateur l'angoisse dépressive liée à ces propres attaques contre le sein qui l'a lui-même
nourri et qui s'est refusé."
J'ai alors ce sentiment de devenir "adulte", indépendante dans mes opinions, prises de
décision. J'ai besoin de tuer le père afin de quitter la maison pour voir d'autres horizons.
Selon Didier ANZIEU le mythe proposé par Freud se ferait "l'écho de plusieurs
composantes des relations humaines mises à jour par l'expérience psychanalytique
ambivalente (imbrication d'admiration et de jalousie) des enfants envers l'image
paternelle, ainsi que des subordonnés envers ceux qui exercent l'autorité, idéalisation du
père mort…". Le mythe freudien répondrait au questionnement quant à l'existence d'un
point de vue psychologique d'une autre source d'autorité et d'organisation groupale que
l'autorité paternelle ? "peut-on forger une organisation sociale respectant la justice sans
que celle-ci soit induite par l'imago paternelle?"(1)
Je traiterai à nouveau ici du "contrat narcissique" mais non plus me situant dans un rôle
de mère mais de fille dans la lignée familiale, celle de l'institution Temps Jeunes.
J'ai le sentiment de ne plus tenir la place qui m'a été assignée, de ne plus porter les
valeurs, le discours de l'association, notamment en prenant de front la résistance du
groupe des formateurs, en mettant en cause les directives proposées par le directeur de
Temps Jeunes…
Si le contrat narcissique est le résultat d'une assignation immuable à un emplacement de
parfaite coïncidence narcissique, toute transformation, tout écart provoqueraient la mise à
mal de la continuité narcissique.
René KAES évoque le "pacte dénégatif"(2), comme le côté négatif, le versant inconscient
du contrat. Ce n'est pas le non-respect des règles auxquelles il a consenti à se soumettre
qui est cause de rupture entre l'individu et le groupe, mais la mise à jour, par des paroles,
des actes de ce qui est tacitement, implicitement tu dans le contrat. Dire ce qu'il ne faut
pas dire, faire ce qu'il ne faut pas faire, c'est dire et faire ce qui doit rester refoulé.
2/Ni mère, ni fille
Je n’habite plus le rôle de « fille », de descendante. En quittant mon rôle de mère, je
m’exclus de la lignée familiale.
Est-ce à dire que je n'ai plus besoin ou encore que je ne suis plus en cohérence avec
l'investissement narcissique que me propose l'institution-famille ?
Il m'est difficile d'extirper la cause de cette rupture du contrat narcissique : est-ce moi qui
suis à l'origine de la rupture parce que je ne suis plus nourrie narcissiquement dans mes
fonctions de "mère-animatrice" ou bien dans celles de "fille-salariée" ? Suis-je dans une
rupture narcissique ou bien dans un dépassement oedipien ?
Je vis un sentiment similaire à celui d'un individu qui devient adulte et qui ressent la
nécessité de "tuer ses parents" pour "quitter la maison familiale".
(1) ANZIEU, La Dynamique des Groupes Restreints
(2) KAES, Les Théories Psychanalytiques du Groupe
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Durant la période de l'adolescence, le complexe d'Œdipe est réactivé pour que le jeune
puisse définitivement renoncer à l'inceste. En remettant ses parents en question, en
malmenant le lien aux parents, en les confrontant, l'adolescent peut alors sortir de
l'Œdipe. Ce conflit est alors nécessaire sinon il risque d'idéaliser ses parents, de rester
dans l'inceste et de ne pas quitter la maison pour trouver un partenaire autre que son père,
sa mère.
FREUD invente le mythe du meurtre du père pour expliquer la transformation des liens
familiaux en démocratie, dont les interdits fondamentaux font lois (interdit de tuer,
interdit de l'inceste, interdit du cannibalisme). En tuant et en mangeant le "mâle
dominant-père", ses fils l'incorporent, chacun "avalant" ainsi un peu de sa puissance. Ces
enfants mâles, une fois le père mort, peuvent se laisser aller à des relations sexuelles avec
les femmes du groupe, anciennement compagnes du père. Ce mythe serait la
transposition sociale du complexe d'Œdipe.(1)
Ce meurtre du père fondateur serait un travail psychique que tout individu ou groupe
aurait à effectuer sur un plan symbolique pour accéder à sa propre souveraineté.
Il se trouve que mon emploi à Temps Jeunes a été le premier pour moi dans le secteur de
l'animation, début de reconversion pour moi. J'ai appris "les ficelles" du métier, en ai
compris l'environnement, déployé des aptitudes et des compétences que je ne me
connaissais pas…
Aurai-je ainsi atteint un "âge professionnel" qui serait une sortie de l'adolescence
nécessitant ce travail de meurtre, de renoncement, de dénégation pour une émancipation
vers le monde "adulte" ?
En définitive, le groupe de formateurs que j'ai constitué et l'institution ne rempliraient
plus leur fonction narcissique pour moi soit dans mon rôle de "mère" ou celui de "fille".
Le contrat narcissique est de fait rompu. il me reste alors à comprendre les causes
fondamentales de cette rupture.
(1) FREUD, Totem et Tabou
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CONCLUSION
En définitive, l'équipe constituée, animée aurait une fonction narcissique pour
l'animateur. Ce dernier donne l'opportunité aux membres d'un groupe de (re)trouver une
mère, de (re)produire l'objet d'amour perdu et en retour, il attend de ce groupe une
attitude gratifiante, valorisante à son égard. Pour que le besoin de se fédérer autour d'une
mère perdue, pour que le besoin d'être "mère" d'un groupe soient comblés, il est
nécessaire que des fantasmes, des angoisses puissent entrer en résonance entre les
membres et l'animateur du groupe, afin que ceux-ci puissent se rencontrer. C'est ce que
j'ai démontré en insistant sur le fait que l'animateur, pour devenir le parent qu'il veut être,
doit sélectionner les personnes de son équipe, sélection parfois inconsciente fondée sur
des moteurs obscurs.
Un contrat tacite est alors passé, un contrat narcissique : chacun sa place, chacun son
rôle.
En venant au groupe, chaque personne vient chercher et donner quelque chose à
l'ensemble.
Mais au-delà de ce qui va se jouer entre l'animateur et son groupe en terme de
gratification, de reconnaissance dans son rôle inconscient de parent ou d'enfant, chaque
personne est impliquée par un processus qui l'englobe et le dépasse.
Il s'agit d'un contrat narcissique passé entre l'institution et les éléments du groupe. Ces
derniers sont endettés et se doivent de tenir, d'habiter la place à laquelle ils ont été
assignés par ce "parent idéal", qui les protège, les nourrit mais qui les assigne à tenir un
rôle à l'échelle de l'institution, de la famille.
Il semblerait alors que toute personne ne soit que le maillon d'une chaîne, rôle dont elle
ne se doute pas, d'abord préoccupée par cette quête à l'échelle du groupe réduit.
J'ai évoqué dans ce travail comment une institution, une structure peut fonctionner
comme une famille, avec ses parents, ses descendants.
Au cas où ce contrat est rompu par un des contractants, c'est toute la lignée familiale qui
est ébranlée, secouée.
Ce contrat narcissique est alors d'autant plus douloureux à rompre que les liens sont forts
au sein de cette famille professionnelle, que le giron est sécurisant.
Reste à savoir si, dans ce cas, il s'agit d'une rupture narcissique ou bien d'un dépassement
oedipienne.
Mais en changeant de structure professionnelle, en intégrant une autre équipe, ce n'est
pas recommencé à nouveau ce développement : on y trouve certainement des
problématiques liées à notre âge, notre maturité professionnels qui s'inscriraient d'emblée
dans une démarche d'adaptation à une "famille d'accueil".
21
BIBLIOGRAPHIE
ANZIEU Didier,
- La dynamique des groupes restreints, Ed PUF
- Le groupe et l’inconscient, l’imaginaire groupal, Ed DUNOD
AULAGNIER Piera,
La Violence de l'Interprétation, Ed PUF
BION Wilfried,
Recherche sur les petits groupes, Ed PUF
FREUD Sigmund,
- Totem et Tabou, Ed. PAYOT
- Psychologie des foules et analyse du Moi, Ed PAYOT
KAES René,
- Les théories psychanalytiques du groupe, Ed PUF, coll « que sais-je ? »
- L’appareil psychique groupal, Ed DUNOD
KAES R., ANZIEU D., THOMAS L.V.,
Fantasme et formation, Ed DUNOD
WINNICOTT Donald Woods,
De la Pédiatrie à la Psychanalyse, Ed PAYOT
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