Points de repère - Avant Scène Opéra
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Points de repère - Avant Scène Opéra
Points de repère À 79 ans, Verdi prend congé de l’opéra et de son siècle dans les éclats de rire d’une comédie. Amoureux de Shakespeare, le musicien va puiser dans son théâtre pour en extirper un personnage débordant de naïveté et de forfanterie. Son Falstaff ne songe qu’à conquérir le cœur et la fortune de riches bourgeoises pour réparer ses finances et pour… ne pas maigrir. Lire l’argument, page 8 À l’attention des spectateurs. Dans Falstaff, qui ne comporte même pas de Prélude ou d’Ouverture, aucun passage purement orchestral ne dépasse une cinquantaine de mesures (rapides) ou une minute de durée… Cet orchestre, si riche et si raffiné soit-il, ne couvre jamais les voix, car dans cette œuvre au débit si enlevé, la compréhension du texte est plus que partout ailleurs nécessaire : il n’y a presque pas de vocalises, et la déclamation est syllabique quasiment partout ! C’est pourquoi le spectateur même le plus disponible ne retirera jamais d’une seule représentation scénique de Falstaff la totalité de la jouissance purement musicale que cette partition unique rend possible. Lire le commentaire de Harry Halbreich, pages 10 à 97 Ci-contre : LES JOYEUSES COMMERES DE WINDSOR. Gravure de G. Goldberg d’après H. Makart. B.N. Paris. Ci-dessus : Giuseppe Verdi, photographié en 1901. Pour le plaisir. Toutes ces qualités particulières font que Falstaff n’est pas, et ne sera jamais une œuvre populaire, mais demeurera le régal des connaisseurs et des mélomanes ayant déjà une certaine culture, tant littéraire que musicale d’ailleurs. Verdi n’affirmait-il pas qu’il avait composé l’œuvre uniquement pour son propre plaisir ? Lire le livret dans la traduction de Pierre Malbos, pages 15 à 97 D.R. En couverture : Barbara Frittoli (Alice) et Bryn Terfel (Falstaff), mise en scène de Graham Vick, Covent Garden de Londres, 1999. Clive Barda. Falstaff, œuvre gaie ou œuvre triste ? Ce n’est pas une farce truculente comme on nous la sert parfois. Ce n’est pas non plus une œuvre débordante de joie et de santé par laquelle Boito espérait réconforter ses compatriotes. C’est un vibrant hommage à la vie, de la part d’un homme qui s’apprête à la quitter, à la vitalité, à la démesure, à la déraison ou à la folie. Lire l’étude de Gilles de Van, page 112 3 L’attrait de Shakespeare. Falstaff compte au nombre des chefs-d’œuvre absolus du théâtre lyrique, et l’admiration passionnée que lui vouent les amateurs d’opéra en conduit beaucoup à lire ou relire Les Joyeuses commères de Windsor, la comédie de Shakespeare dont a été tiré son scénario. Très peu en revanche ont la curiosité de lire également les deux Henri IV du même Shakespeare dont Falstaff est déjà un personnage majeur, voire son Henri V, ce qui est dommage car le Falstaff de Windsor n’est que l’avatar de celui que mettent en scène ces trois grands drames historiques. Lire l’étude de Jean-Michel Brèque, page 98. Une harmonie limpide et latine. Mais si Falstaff est effectivement « écrit » comme aucun opéra de Verdi avant lui, ce n’est pas seulement, tant s’en faut, au niveau du contrepoint. L’harmonie verdienne y atteint également un apogée de raffinement et d’originalité, car à sa manière il fut l’un des plus grands harmonistes, finalement plus libre et donc moins « prévisible » même que Wagner. Il s’agit d’une harmonie spécifiquement latine, limpide, diatonique, basée sur la couleur et la surprise. Lire le commentaire de Harry Halbreich, pages 10 à 97 Victor Maurel, le premier Falstaff. Qui était ce Marseillais à la carrière si internationale, né le 17 juin 1848 et mort à New York en 1923, qui conféra à ses rôles et à ses mises en scène lyriques une étoffe dramatique alors insoupçonnée mais préfigurant nos attentes les plus actuelles? Lire l’article de Sylviane Falcinelli, page 122 Une fugue ! Toute sa vie, Verdi se battit avec l’idée d’un Roi Lear finalement irréalisé, et il avait songé aussi à La Tempête. Mais après le juvénile Macbeth de 1847, « ravalé » dix-huit ans plus tard, il fallut attendre l’arrivée providentielle de Boito dans la vie de Verdi pour faire naître successivement Otello (achevé quarante ans après le premier Macbeth !), puis Falstaff. On notera d’ailleurs avec intérêt que Macbeth, premier essai shakespearien, est aussi le seul opéra de Verdi avant Falstaff qui se termine par une fugue !… Lire l’étude de Caroline Bouju, page 125 4 HENRY IV de Shakespeare, acte II. Falstaff et la prostituée Doll. Gravure de Von Mechel d’après Füssli. Coll. ASO. page de gauche : Finale du deuxième acte lors de la création à la Scala de Milan en 1893. Dessin paru dans L’ILLUSTRAZIONE ITALIANA du 19 février 1893. Coll. ASO. La genèse. La correspondance de Verdi avec Boito et Ricordi jalonne la genèse et l’écriture de Falstaff. L’énorme Sir John l’occupe de 1889 à 1893. À la lecture de ces lettres on voit comment Verdi parle de Shakespeare. Comment Boito construit l’intrigue et répond aux demandes du compositeur. Enfin, comment est née cette merveille d’imagination musicale et théâtrale, créée à la Scala en 1893. Lire les extraits de la Correspondance, page 108 Le temps d’un film tourné en 1964, Orson Welles pose un regard sans pitié sur Sir John Falstaff. Par la présence physique de Welles lui-même dans le rôle de Falstaff, ce film devient une ample méditation humaniste sur le pouvoir et l’amitié, sur la pureté et le vice, thèmes chers au cinéaste Welles, grand shakespearien du Septième Art. Lire l’étude de Fernand Leclercq, page 128 Discographie. S’il suffisait d’un grand chef pour faire un grand Falstaff, notre périple discographique au pays du Pancione tiendrait de la course alpine. Que de sommets en perspective : Toscanini, Reiner, Solti, Bernstein, Karajan, Giulini, Muti... excusez du peu ! Il est de fait que l’œuvre, éminemment concertante, est l’une des plus heureusement servies par le disque et que la plupart de ces têtes d’affiche tiennent leurs promesses. Lire la Discographie de Jean Cabourg, page 132 Vidéographie. Des grandes incarnations de l’après-guerre, on croisera Tito Gobbi, hélas bien trop tardif, Bacquier heureusement, Van Dam quand même, et, tout récent dans le rôle, Bryn Terfel. Mais pas le légendaire Evans. Lire la Vidéographie de Pierre Flinois, page 147 5