le travail dentaire
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le travail dentaire
JOURNAL DE BORD : LE TRAVAIL DENTAIRE! JANVIER 2012 LE TRAVAIL DENTAIRE: POU RQU OI , QUA N D, COM M E N T! ? La dentition du cheval est propre à cette espèce, sa particularité étant que les dents définitives poussent tout le long de sa vie. A l’état sauvage, le cheval passe quasiment la moitié de son temps à manger, ce qui lui permet d’user ses dents au fur et à mesure de leur pousse. La domestication a rendu le cheval moins herbivore!; ses incisives ne lui servent plus à la préhension et à la section des brins d’herbe et ses molaires mastiquent moins longtemps car son alimentation est moins riche en fibres longues. Voilà pourquoi, entre autres, il faut râper les dents des chevaux pour les user à leur place. INTERETS DU TRAVAIL DENTAIRE d’aliments dans les interstices. A plus long terme, le bénéfice d’avoir un cheval bien dans sa bouche sera que celui-ci mastiquera mieux ses aliments. Ainsi, la ration est mieux digérée et donc le cheval «" profite" » mieux" car la valeur énergétique de la ration est augmentée. La quantité d’aliments nécessaire pour avoir un cheval en état est alors réduite. De plus, la ration étant mieux digérée, le risque de coliques est également diminué. L’examen régulier de la bouche du cheval, encore trop négligé, fait partie de la gestion de la bonne santé de l’effectif, au même titre que les vaccinations et le programme de vermifugation. Il permet également d’exploiter au mieux les qualités athlétiques des chevaux à l’entraînement. Sur la santé du cheval Faire la bouche du cheval présente non seulement un avantage thérapeutique (c’est-à-dire soigner les maladies) mais aussi un intérêt prophylactique (c’est-à-dire prévenir les maladies). Le travail des dents permet tout d’abord d’éviter les ulcères buccaux provoqués par les surdents ou par le mors contre les prémolaires" . C’est donc un bénéfice direct du travail dentaire" . L’examen de la bouche peut aussi mettre en évidence des anomalies d’implantation ou des croissances anarchiques des dents. Le diagnostic de ces problèmes attirera l’attention et permettra de prévenir les inflammations et éventuellement les infections dues à l’accumulation CLINIQUE EQUINE MÈHEUDIN Au travail L’intérêt de râper régulièrement les dents des chevaux à l’entraînement présente plusieurs avantages tant sur la gestion du travail au quotidien que sur l’apparition plus ponctuelle de problèmes médicaux. Un cheval mal dans sa bouche présente des douleurs qui sont dues soit aux ulcères sur les joues soit au contact du mors qui comprime la commissure des lèvres contre les premières prémolaires acérées. Le cheval est d’abord dur dans la bouche puis devient difficile et rétif au travail, car il associe ce dernier avec la douleur buccale. Moins bien exploité, il est alors moins performant. ! D’autre part ce cheval aura une appréhension pour manger et pour travailler, ceci s’ajoutera au stress de la compétition et entraînera une baisse de la prise alimentaire, favorisant des ulcères gastriques. Le cercle vicieux du stress est ainsi enclenché": le cheval est stressé, il mange moins, son contenu stomacal s’acidifie à cause du manque de remplissage, des ulcères gastriques se forment, la douleur gastrique amplifie alors le stress du cheval, etc…. Un autre point important est qu’un cheval qui a une douleur sourde dans la bouche se raidit sur le mors. Il se contracte dans son encolure et dans son dos, ce qui peut induire une dorsalgie". Tout cheval qui se présente en consultation pour un problème de dos devrait donc faire l’objet d’un examen minutieux de la bouche. Après avoir montré les bénéfices qui peuvent ressortir d’un examen régulier de la bouche, il faut savoir qu’à chaque étape de la vie d’un cheval, correspondent des problèmes spécifiques en fonction de l’âge et du travail demandé. 1 JOURNAL DE BORD : LE TRAVAIL DENTAIRE! QUEL TYPE DE TRAVAIL DENTAIRE POUR QUEL USAGE schéma 2). Ce défaut doit être corrigé régulièrement pour permettre un fonctionnement optimal de la mâchoire et éviter les lésions des gencives. Les dents des vieux chevaux sont souvent râpées à la râpe électrique du fait de la dureté de leur dents et de la quantité de matière qu’il faut parfois éliminer. ! De plus ces anomalies sur les molaires ont des répercussions sur les incisives dont la croissance est alors contrariée. Elles s’usent de façon anarchique compromettant là encore le bon déroulement de la mastication, ce qui aggrave davantage l’usure des molaires…Les corrections des incisives sont réalisées à la main si le défaut est peu important ou alors au Dremel ( la «"roulette"») si la correction à apporter est plus significative (cf. photo 1) ! Les entiers feront évidemment l’objet des mêmes attentions avec en plus un détartrage régulier des canines pour éviter les gingivites. L’examen de la bouche du cheval doit être réalisé périodiquement, que ce soit à l’entraînement ou à l’élevage. A l’élevage Dès sa naissance, un poulain peut présenter, entre autres anomalies congénitales, des problèmes buccaux. L’examen de la bouche fait donc partie de la première visite et va permettre de diagnostiquer des anomalies comme la présence d’une fente palatine ou une malformation de la mâchoire. Autre exemple assez fréquent, l’examen précoce peut mettre en évidence un prognathisme (béguité) dont on va pouvoir diminuer l’importance, si le problème est traité au plus tôt. En effet, le râpage des dents peut s’effectuer sous la mère régulièrement et, associé à des mesures prophylactiques, aide à minimiser la malformation. Ce travail est effectué à la râpe manuelle, plus adaptée au travail de précision et moins traumatisante pour le foal que la râpe électrique. Il faut noter que le prognathisme sévère est héréditaire. ! Les mères doivent faire l’objet d’une visite dentaire tous les ans ou tous les deux ans. On évite ainsi les problèmes de surdents qui peuvent troubler la valeur énergétique de la ration donc entraver la croissance harmonieuse du fœtus. Les surdents sont dues à une inclinaison physiologique des tables dentaires qui est liée au fait que le maxillaire (ou mâchoire supérieure) est plus large que la mandibule ( mâchoire inférieure –cf. schéma 1). A ceci viennent s’ajouter des problèmes de perte de dents, elles aussi physiologiquement dues à l’âge. Or, si une dent fait défaut, la dent qui est au-dessus ou en dessous continue sa croissance et dépasse le niveau de la table dentaire créant ainsi une dentition en vague- si la dent manquante était au milieu- ou en rampe- si cette dent se trouvait à une extrémité- (cf. CLINIQUE EQUINE MÈHEUDIN A l’entraînement Là encore à chaque étape de l’entraînement va correspondre un travail dentaire spécifique ientifique d’irido-cyclo-choroidite). • Au débourrage Avant d’entamer cette étape importante dans la vie du trotteur de compétition, il faut s’assurer de l’absence d’anomalies qui n’auraient pas été diagnostiquées plus tôt" . On va pouvoir notamment détecter le poulain bégu, voire commencer à travailler sur ce défaut. Pourquoi est-ce si important" ? Physiologiquement, les dents supérieures et inférieures sont en regard les unes par rapport aux autres et elles s’usent par abrasion réciproque car elles sont en contact. Un cheval bégu a sa mâchoire supérieure trop avancée par rapport à sa mâchoire inférieure. On remarque donc facilement que les incisives supérieures deviennent très longues et que les incisives inférieures s’enfoncent progressivement dans le palais. On comprend l’importance de tra! JANVIER 2012 vailler sur ces dents. Mais ceci n’est en fait que la partie cachée de l’iceberg car il faut également penser que la même chose se produit aussi sur les molaires" ! En effet, les deux premières prémolaires supérieures ( les PM2, en fait) continuent leur croissance car leur extrémité rostrale n’est pas en contact avec les PM2 inférieures. L’excroissance ainsi formée, le crochet, est très vulnérante pour les joues surtout lorsque celles-ci sont coincées entre le mors et la PM2. Mais la correction du cheval bégu ne s’arrête pas là"; il ne faut pas oublier le fond de la bouche où le phénomène inverse se produit". Les dernières molaires supérieures (les M3) étant trop avancées, les M3 inférieures sont libres de croître et forment des crochets susceptibles de léser les gencives supérieures (cf. schéma 3). On comprend maintenant tout l’intérêt de râper les dents d’un cheval prognathe le plus tôt et le plus régulièrement possible. ! L’autre point marquant de la visite pré-débourrage est l’exérèse des dents de loup, qui sont en fait des premières prémolaires vestigiales (PM1). Elles ne répondent à aucun critère et peuvent être présentes ou absentes, comprises entre zéro et quatre, supérieures ou inférieures, sorties ou sous-gingivales, horizontales ou verticales, avec des racines très courtes ou très longues, de très petite taille ou molarisées, faciles à extraire ou pas"! (cf. photo 2)". Leur présence entraîne des symptômes comparables à ceux observés avec les crochets des PM2"; leur exérèse est le plus souvent conseillée. ! Les surdents sont également râpées, à la main ou à la râpe électrique, en fonction des commodités de chacun. Les dents des jeunes chevaux sont très tendres donc les râpes à main sont largement suffisantes" (cf. photo 3) ; il en existe plusieurs types et chacune d’entre-elle possède sa propre utilité (cf. photo 4). Les râpes électriques offrent un travail plus rapide et sont en général bien tolé2 JOURNAL DE BORD : LE TRAVAIL DENTAIRE! rées par les chevaux"; il en existe aussi plusieurs modèles (cf. photo 3). Ce travail ne doit pas être négligé car les dents du cheval ont une croissance continue et donc reforment des surdents toute la vie du cheval. ! A ce stade d’entraînement intensif et de recherche de performances, l’entretien de la bouche permet d’obtenir le meilleur des athlètes. L’élimination des surdents est donc primordiale. Le confort maximal est obtenu par la création de «"bit seat"» (littéralement":" «"assise du mors" ») sur les PM2 (mors d’enrennement pour les supérieures, de guide pour les inférieures. Ceci consiste en l’arrondissement des premières prémolaires, là où vient reposer le mors" : les joues ne sont donc plus coincées entre le mors et les dents. On peut réaliser les bit-seats avec des râpes manuelles, mais la technique la plus courante emploie le Dremel, plus rapide mais parfois mal supporté par certains chevaux • Le jeune cheval Pour bien comprendre l’importance d’un examen régulier entre deux et cinq ans, il faut se rappeler que durant cette période le cheval va perdre 24 dents de lait et qu’il va en «" gagner"» jusqu’à 44"! Il faut donc s’attacher à vérifier le bon déroulement de tous ces changements. Ce travail consiste tout d’abord à inspecter les incisives et à extraire les dents de lait qui tardent à le faire par elles-mêmes"; en effet", la dent de lait persistante gêne l’éruption de la dent définitive qui pousse alors dans une mauvaise direction. En ce qui concerne les dents de lait des molaires, leur extraction soulage le cheval car elle peuvent parfois persister longtemps et entraîner une douleur assez importante, ainsi que d’autres pathologies beaucoup plus rares. CLINIQUE EQUINE MÈHEUDIN • L’adulte Un examen annuel est largement suffisant si le cheval ne présente pas d’anomalies majeures. Le travail consiste en une élimination des surdents et un arrondissement des bit-seats, tout en vérifiant que les incisives ont une croissance harmonieuse et que ! JANVIER 2012 les canines ne s’entartrent pas trop. ! Mais ce travail ne doit pas être routinier et il faudra toujours vérifier l’absence d’odeur suspecte, témoin d’une infection, ou d’une douleur exquise dans la bouche qui peut attester de la présence d’une fracture. ! Si l’examen direct ne permet pas de faire un diagnostic précis, des techniques plus performantes peuvent être mises en œuvre comme la radiographie, l’échographie voire même la fibroscopie. ! L’examen régulier de la bouche du cheval est une mesure de prévention essentielle dans la gestion sanitaire d’un effectif. Il englobe le recueil des commémoratifs, la prise en compte de l’environnement du cheval, le diagnostic des affections et leur traitement" . Celui-ci comprend bien évidemment le râpage des dents, indispensable mais plus efficace quand il est replacé dans le contexte environnemental du cheval. 3