Texte_Mazeron_Curietherapie vaginale
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Curiethérapie vaginale post-opératoire dans les cancers de l’endomètre R Mazeron 1, W Khodari, J Gilmore, J Champoudry, I Dumas, P Morice, C Lhommé, C HaieMéder. Institut de Cancérologie Gustave Roussy 114, rue Edouard Vaillant 94805 Villejuif Cédex. 1 Auteur correspondant Tel : 01 42 11 45 66 Fax : 01 42 11 52 08 [email protected] Titre court : curiethérapie vaginale 1 Résumé Plusieurs études randomisées publiées ces dernières années ont largement modifié la prise en charge post-opératoire des cancers de l’endomètre, en particulier pour les lésions de pronostic intermédiaire. La curiethérapie vaginale est désormais le standard de traitement pour ces lésions, au détriment de la radiothérapie externe, qui malgré une amélioration du contrôle loco-régional, n’a pas d’impact sur la survie globale. Cette mise au point a pour objectif de faire le point sur les nouvelles indications de curiethérapie vaginale en détaillant ces essais randomisés. Mots clés : cancer de l’endomètre, curiethérapie vaginale, radiothérapie, morbidité. Abstract Several randomized studies published in recent years have greatly changed the management of postoperative endometrial cancer, especially for lesions of intermediate prognosis. Vaginal brachytherapy is now standard treatment for these lesions at the expense of external beam radiation, which, despite an improvement in locoregional control, has no impact on overall survival. This review aims to take stock of new indications for vaginal brachytherapy detailing the trials that led to change standards or care. Key words : endometrial cancer, brachytherapy, radiotherapy, morbidity. 2 Note : Les études citées ayant été menées avant la modification de la classification FIGO en 2009, la revue se réfère sauf mention contraire à la précédente classification avec notamment pour les stades 1 une division en 3 sous groupes en fonction de la profondeur d’invasion myomètriale (tableau 1). 1- Introduction Le cancer de l’endomètre est fréquent dans les pays occidentaux. On estime qu’il touche plus de 80 000 femmes dans l’Union Européenne, et son incidence est en cours d’augmentation 1. Dans trois cas sur quatre, le diagnostic est réalisé à un stade précoce si bien que le taux de survie globale, tous stades confondus, est élevé, de l’ordre de 80% à cinq ans 2. La prise en charge des cancers de l’endomètre repose sur la chirurgie, qui permet outre le geste thérapeutique d’identifier les facteurs pronostiques de la tumeur de la classifier selon l’échelle de la FIGO (Fédération Internationale de Gynécologie Obstétrique). La décision d’un traitement post-opératoire est prise au regard des éléments ainsi obtenus. Ces dernières années, plusieurs essais randomisés ont modifié les habitudes de prise en charge adjuvante, notamment pour les cancers de pronostic intermédiaire. A ces changements, se sont ajoutées une modification de la classification FIGO en 2009 sur laquelle les études ont été bâties et les cliniciens s’appuyaient depuis de nombreuses années pour décider de la prise en charge postopératoire des cancers de l’endomètre, et la remise en question de la lymphadénectomie pelvienne dans la prise en charge des tumeurs de bon pronostic 3-5. Cette revue de la littérature a pour objectif de faire le point sur la place de la radiothérapie en situation adjuvante et plus particulièrement de la curiethérapie vaginale dont les indications sont désormais plus fréquentes. 3 2- Radiothérapie externe et curiethérapie En situation adjuvante, deux modalités d’irradiation sont discutées : - la radiothérapie externe, traitement loco-régional permettant de couvrir le fond vaginal et les aires ganglionnaires pelviennes voir pelviennes et lombo-aortiques en cas de lésion très avancée. - la curiethérapie vaginale, dont le volume de couverture est limité au fond vaginal. La radiothérapie externe est fractionnée, et délivre habituellement 45 à 50 Gy en 23 à 28 fractions selon les protocoles, soit environ 5 semaines de traitement. La curiethérapie est quant à elle limitée au fond vaginal, et plus particulièrement à la cicatrice de colpectomie, un des principaux sites de récidives des cancers de l’endomètre. Son recours limite les volumes d’irradiation, notamment des organes à risque (rectum, vessie et intestin grêle) et est donc mieux tolérée. Contrairement aux cancers du col localement avancés, sa mise en œuvre ne nécessite pas d’anesthésie générale, mais une simple prémédication voire l’utilisation de protoxyde d’azote. Elle peut être réalisée à bas débit de dose, nécessitant alors une hospitalisation de quelques jours, mais peut aussi être proposée à haut débit de dose, en ambulatoire, nécessitant de fractionner la dose en 2 à 4 séances de quelques minutes, ce qui semble avantageux pour des patientes âgées, en situation post-opératoire, et souvent atteintes de comorbidités cardiovasculaires. Il existe plusieurs types d’applicateurs, symétriques ou personnalisés, porteurs de 1 à 3 vecteurs de source. La prescription se fait généralement à 5 ou 7 mm de profondeur, parfois à la surface de l’applicateur ou des muqueuses. La dose délivrée varie selon les équipes en conséquence de la profondeur de prescription choisie, et de l’association ou non à une irradiation pelvienne. A titre d’exemple, nous délivrons 20 Gy en 4 séances de 5 Gy espacées d’une 4 semaine, prescrits à 5 mm de profondeur en cas de curiethérapie exclusive ou 10 Gy en 2 séances après une irradiation externe de 45 Gy. Le choix de la technique d’irradiation, externe ou par curiethérapie repose donc sur l’évaluation du risque de rechute ganglionnaire. 3- Facteurs de risque de récidive et groupes pronostiques La connaissance des résultats anatomo-pathologiques de la pièce d’hystérectomie permet d’évaluer le pronostic. Elle fournit notamment le type historique de tumeur, son grade et le stade FIGO. A partir de ces données, les tumeurs peuvent être réparties en trois groupes pronostiques (voir tableau 2) facilitant la prise de décision 6. Deux facteurs de risque ne sont pas inclus dans cette classification mais doivent cependant être pris en compte dans la discussion de la prise en charge thérapeutique : la cytologie péritonéale, exclue de la nouvelle classification FIGO (anciennement stade IIIA), et la présence d’emboles tumoraux dans le myomètre. La valeur pronostique de la cytologie péritonéale est incertaine, d’où sa disparition de la classification par stade. Elle ne semble pas être un facteur indépendant et ne doit pas être prise en compte lorsqu’isolée 7. La présence d’emboles lymphovasculairess est en revanche un facteur pronostic fort comme l’ont démontré plusieurs études 8-10. Dans une série de 239 patientes opérées, Briet et al. ont rapporté des emboles chez 25,6% des patientes opérées, se traduisant pat un risque de rechute 2,6 fois supérieur en comparaison des patientes atteintes de tumeurs sans emboles, et ce quelque soit le stade tumoral 11. La présence d’emboles, bien que ne faisant pas partie des critères de classification en stades pronostiques doit être prise en compte et discutée dans le choix d’un traitement post-opératoire. 5 4- Groupe à faible risque : Les lésions limitées à l’endomètre (1A de l’ancienne classification FIGO), sont d’excellent pronostic comme le montrent les séries de patientes traitées par chirurgie exclusive 12-14. Pour les adénocarcinomes endométrioïdes de grade 1 ou 2, aucun traitement complémentaire n’est donc recommandé. Pour les lésions infiltrant la moitié interne du myomètre (1A de l’actuelle classification de la FIGO, anciennement 1B), de garde 1 ou 2, le risque de récidive vaginale post opératoire est faible, de l’ordre de 3 %, et une curiethérapie vaginale adjuvante peut-être proposée, ramenant ce risque à 0-2%, compte tenu du risque de complication très faible (tableau 3) 15-23. 5- Groupe de pronostic intermédiaire Dans ce groupe, les lésions sont limitées à l’utérus, n’envahissent ni le col, ni les annexes ou les aires ganglionnaires de drainage. Il regroupe une grande partie des patientes et s’est finalement révélé hétérogène au fil des essais randomisés qui ont largement remodelé leur prise en charge. Pendant de nombreuses années, le seul essai disponible était celui publié en 1980 par Aalders et al, randomisant 540 femmes atteintes de cancer de l’endomètre de stade 1 et traitées par hystérectomie puis curiethérapie vaginale (radium, 60 Gy) entre radiothérapie pelvienne à la dose de 40 Gy avec cache médian du lit de curiethérapie à partir de 20 Gy et observation 24. Les investigateurs avaient rapporté une diminution du taux de récidive locale à 5 ans de 7% dans le groupe « observation » à 2% dans le bras « radiothérapie », sans toutefois observé d’impact sur la survie globale (respectivement 91 et 89%). Des analyses de sous-groupes avaient révélé que les patientes atteintes de tumeurs de stade IC et de grade 3 bénéficiaient le 6 plus de la radiothérapie post opératoire. Cette dernière constatation a servi de base pour poser les indications de radiothérapie externe pendant de nombreuses années. 5.1- Première série d’essais randomisés « modernes » : radiothérapie externe contre observation Ces dernières années, trois essais regroupant plus de 2 500 ont été publiés, auxquels s’ajoutent un essai publié sous forme d’abstract par Soderini et al (123 patientes) et une étude nord américaine menée par Lukka et al. (NTC00002807) dont les données ont été exploitées dans l’essai ASTEC 25. - Essai PORTEC 1 (Post Operative Radiotherapy Endometrial Cancer) L’objectif de cet essai, comme des suivants, était d’évalué l’intérêt de la radiothérapie (46 Gy en 23 fractions) en post opératoire pour les patientes atteintes de tumeurs de pronostic intermédiaire, ici stade IA/B grade 2-3, ou IC grade 1-2. L’hypothèse testée était que la radiothérapie permettrait une réduction du taux de récidive loco-régionale de 10%. Afin d’obtenir une puissance de 98%, 600 patientes devaient être incluses. Au final, 714 patientes ont participé à l’étude. Les résultats ont été publiés en 2000 montrant une diminution du taux de récidive loco-régionale en cas d’irradiation post-opératoire, de 14 à 5% (p < 0,001), mais sans traduction en terme de survie globale 26. La relecture centralisée des lames réalisée secondairement n’a pas modifié ces conclusions malgré un nombre conséquent de modifications à postériori du grade tumoral initialement retenu 27. Autre constatation qui guidera l’essai PORTEC-2, le site principal de rechute des patientes du bras « surveillance » était le vagin, dans 3 cas sur 4, et les récidives pelviennes ganglionnaires étaient finalement rares. 7 Récemment les investigateurs ont publié une actualisation des résultats avec 15 ans de recul. Les taux de rechutes loco-régionales étaient de 6% en cas de radiothérapie pelvienne contre 15,5% dans le bras « abstention » (p<0,001), mais toujours sans traduction dur le survie globale (52 et 60% respectivement, p = 0,14, voir tableau) 28. - Essai GOG 99 (Gynecology Onclogy Group) L’essai nord américain du GOG avait le même objectif que l’essai néerlandais du PORTEC. Les critères d’inclusions variaient légèrement cependant : stade IB/C et stade IIA/B, occultes. 448 patientes ont été incluses et randomisée entre radiothérapie externe (50,4 Gy en 28 fractions) contre surveillance. Avec un recul médian de 69 mois, les auteurs ont rapportés une diminution significative du taux de rechute à 2 ans de 12% à 3% dans le bras « radiothérapie » (p = 0,007), à nouveau sans traduction sur les taux de survie globale (respectivement 86 et 92%) 29. - Essai MRC ASTEC/ NCIC EN.5 (Medical Research Council, National Cancer Institute of Canada) Troisième essai « moderne », l’étude ASTEC proposait une double randomisation : premièrement lymphadénectomie pelvienne ou non au moment de l’hystérectomie et radiothérapie pelvienne ou non en adjuvant 3. Neuf cent six patientes issues de deux études (ASTEC d’un côté et EN.5 de l’autre) ont été incluses dans les analyses du rôle de radiothérapie adjuvante. Dans le bras radiothérapie, 40 à 46 Gy en 10-25 fractions étaient délivrés. Une curiethérapie vaginale pouvait aussi être réalisée, à la discrétion des investigateurs, dans un bras comme dans l’autre, mais seul l’ASTEC en définissait les modalités pratiques. Finalement, 54% des patientes du bras « radiothérapie » et 53% du bras « observation » en ont bénéficié, expliquant probablement le faible taux de récidive locale 8 rapporté dans le bras « observation ». Deuxième facteur de confusion, une observance médiocre du traitement alloué: seules 92% des patientes ayant tiré le bras « radiothérapie » ont effectivement eu une irradiation, et pour seulement 82% d’entre elles, 40 Gy ou plus. Avec ces limites, les auteurs ont rapportés une diminution du taux de rechute d’un facteur 2 : de 6,1 à 3,2% en cas de radiothérapie externe avec un suivi médian de 58 mois. Là encore, les taux de survies globales n’étaient pas différents : 84% dans les deux bras. 5.2- Conclusion des essais randomisés « radiothérapie contre observation » Les trois essais randomisés publiés récemment arrivent, malgré des critères d’inclusion légèrement différents, à des conclusions similaires de celles de l’essai d’Aalders et al.: diminution significative du risque de rechute loco-régionale avec la radiothérapie externe post-opératoire, mais sans impact sur la survie globale (tableau 4). Cela a d’ailleurs été confirmé par une méta-analyse menée par le groupe Cochrane évaluant l’intérêt de la radiothérapie adjuvante dans les cancers de l’endomètre. Quatre essais avaient été inclus : Alders et al., PORTEC 1, GOG 99 (décrits ci-dessus) et l’étude de Soderini et al. Le taux de rechute pelvienne était diminué par la radiothérapie de 72%, soit un gain absolu de 6%, sans impact sur le taux de survie globale 30. Ainsi, en admettant que la radiothérapie ramène le taux de récidive loco-régionale de 20 à 5%, Creutzberg et al. ont estimé qu’il faudrait traiter 6 patientes pour éviter une rechute, et ce sans impact sur la survie globale 31. Si la radiothérapie externe n’a pas d’impact sur la survie globale, elle est en revanche clairement responsable d’effets indésirables. En situation adjuvante, la cavité pelvienne est « remplie » par l’intestin grêle qui prend la place anciennement occupée par l’utérus, et les aires ganglionnaires iliaques « encadrent » la vessie et le rectum. Une dose non négligeable est dès lors délivrée à ces organes, responsable d’effets aigus de la radiothérapie et parfois de 9 séquelles invalidantes. Dans l’étude PORTEC 1, les investigateurs ont observé une augmentation du taux d’effets secondaires évalués à 60 mois de 4% dans le bras « observation » contre 26% dans le bras « radiothérapie ». Par ailleurs, tous les événements de grade 3-4 concernaient des patientes du bras radiothérapie 32. De même, les scores des questionnaires de qualité de vie retournés par les patientes irradiées étaient significativement plus bas que ceux des patientes du bras contrôle. Une actualisation des données de morbidité publiée l’été dernier rapporte avec près de 15 ans de recul un recours à des protections urinaires significativement plus fréquent chez les patientes du bras radiothérapie : 42,9% vs 15,2%, p < 0,001 33. De la même manière, toutes les toxicités de grade 4 (n = 9) ainsi que la majorité des toxicités de grade 3 (18 vs 11 événements) observées dans l’essai du GOG concernaient des patientes du bras radiothérapie. Dans ce même essai, la différence entre les deux bras était significative pour les toxicités gastro-intestinale, génito-urinaire, hématologique et cutanée 29. Dans l’étude ASTEC, 61% des patientes ont rapporté des effets indésirables tardifs après radiothérapie contre 45% dans l’autre bras 34. Cette différence de morbidités entre les patientes des bras « radiothérapie » et « observation » aurait cependant été estompée par le recours aux techniques d’irradiation modernes. Il faut rappeler que la majorité des patientes incluses ont été traitées dans les années 1990 et n’ont pas toutes reçu une irradiation conformationnelle. Un tiers des patientes du bras radiothérapie de l’étude PORTEC 1 a ainsi été traité avec des champs antéro-postérieurs, balistique ne correspond plus aux standards actuels d’irradiation externe. Les investigateurs du PORTEC ont d’ailleurs montré que ces patientes avaient un risque accru de complications digestives en comparaison de celles traitées avec une technique à 4 champs. La tolérance à la radiothérapie pelvienne devrait être encore améliorée par l’utilisation de la radiothérapie conformationnelle avec modulation d’intensité (RCMI), qui permet une meilleure épargne des organes à risque 10 (rectum, vessie et intestin grêle) 35, 36. Des études dosimétriques comparant radiothérapie conformationnelle avec ou sans modulation d’intensité ont montré un avantage clair de la RCMI sur la conformationnelle, et les premières études cliniques sont encourageantes 37. Il est aussi apparu que les patientes ne bénéficiaient pas toutes de la radiothérapie. En se basant sur des études de sous-groupes, et afin de tenter de sélectionner au mieux les patientes les plus à risque de rechute, les investigateurs du PORTEC 1 ont dégagé un groupe de patientes ayant un taux de risque de récidive loco-régionale ≥ 15 % : âge > 60 ans et stade 1C grade 1-2 ou stade IB grade 3 26. Dans l’étude du GOG, 3 facteurs de risque ont été retenus : une infiltration tumorale dépassant le 1/3 externe du myomètre, grade 3, et présence d’emboles vasculaires. Les auteurs ont recommandé de maintenir l’indication de radiothérapie en fonction de l’âge et la présence de ces facteurs : > 70 ans et 1 facteur présent, > 50 ans et 2 facteurs, ou quelque soit l’âge en présence des 3 facteurs 29. 5.2- Essai PORTEC-2 : curiethérapie vaginale contre radiothérapie pelvienne En se basant sur les analyses de leur premier essai, le groupe PORTEC a mené une seconde étude randomisée, PORTEC 2, comparant radiothérapie pelvienne et curiethérapie vaginale en situation adjuvante. Le rationnel de cette étude reposait sur les conclusions du PORTEC 1 : d’une part la majorité des récidives est vaginale, et d’autre part la radiothérapie n’a pas d’impact sur la survie globale mais engendre des toxicités. Il s’agissait donc de démontrer que la curiethérapie, habituellement bien tolérée, pouvait assurer un contrôle local «équivalent » à la radiothérapie externe, avec une tolérance supérieure. Les investigateurs ont donc mené une étude de non infériorité. Estimant le risque de récidive vaginale à 3 ans à 2 % en cas de radiothérapie pelvienne, et assumant qu’une majoration de ce risque de 6 % serait acceptable, 400 patientes devaient être recrutées pour garantir une puissance de 85 % à l’essai. 11 Au total, ce sont 427 patientes opérées de lésions IB grade 3, IC grade 1 et 2 ou IIA grade 1 à 3 mais dont l’infiltration myométriale était limitée à 50 %, qui ont été randomisées, entre radiothérapie (46 Gy en 23 fractions dans le pelvis) et curiethérapie (21 Gy en 3 fractions à 5 mm de profondeur à haut débit de dose ou 30 Gy en bas débit de dose). Ces résultats sont parus au mois de mars 2010 dans The Lancet, confirmant les résultats préliminaires présentés à l’ASCO quelques mois auparavant 38 . Avec un recul de 45 mois, 3 rechutes vaginales ont été rapportées dans le bras curiethérapie et 4 dans le bras radiothérapie. Le risque estimé de rechute vaginale à 5 ans était de 1,8 % en cas de curiethérapie et 1,6% en cas de radiothérapie (p = 0,74). Le taux de récidives loco-régionales était logiquement plus élevé dans le bras curiethérapie, mais sans différence significative : 5,1 % (2,8-9,6) contre 2,1 % (0,8-5,8) (HR = 2,08 0,71 – 6,09, p = 0,17). Aucune différence en termes de taux de survies globale ou sans progression ou de taux de risque de survenue de métastases à distance n’a été observée (figure 1). En revanche, la toxicité digestive aiguë de grade 1-2 était moindre dans le bras curiethérapie : 12,6 contre 53,8 %. Cette différence s’amenuisait avec le temps et n’était plus significative à 2 ans. Des toxicités digestives tardives de grade 3 ont été rapportées pour 2 % des patientes du groupe radiothérapie et < 1 % du bras curiethérapie. A noter qu’une relecture centralisée des lames et une correction du grade tumoral montaient que 24 % des patientes incluses n’étaient rétrospectivement pas éligibles pour l’essai, mais sans impact sur les résultats. Les données de qualité de vie des patientes traitées dans l’essai ont été publiées séparément. Les patientes devaient remplir des questionnaires de qualité de vie avant la chirurgie et le traitement adjuvant puis dans le mois suivant le traitement adjuvant et enfin à 6, 12, 18, 24, 36, 48, 60 mois. Après 2 ans de suivi, 86 % des participantes avaient rempli et retourné le questionnaire avant traitement et au moins un questionnaire de réévaluation. Les analyses réalisées après deux ans de suivi montraient elles aussi un avantage significatif de la 12 curiethérapie exclusive sur l’irradiation pelvienne, notamment pour la qualité de vie digestive 39 . Il n’y avait pas de différence en ce qui concerne les séquelles sexuelles. 6- Groupe à haut risque de récidive Pour ces patientes, les indications de radiothérapie externe sont maintenues. La curiethérapie vaginale est habituellement proposée à doses moindre en complément de l’irradiation pelvienne afin d’augmenter la dose délivrée au fond vaginal tout en limitant la dose délivrée à la vessie, au rectum, ou à l’intestin grêle. Cette attitude est fortement conseillée en cas d’infiltration cervicale initiale. Par ailleurs, les résultats décevants rapportés poussent à intensifier le traitement. A titre d’exemple, les patientes atteintes de lésion de stade IC grade 3 n’étaient pas incluses dans PORTEC 1 randomisant l’irradiation adjuvante, mais ont fait l’objet d’un enregistrement prospectif. Les résultats de 99 patientes ont ainsi été rapportés séparément en 2004. Malgré une irradiation pelvienne post opératoire systématique, le taux de récidives loco-régionales observées à 5 ans était largement supérieur à celui du bras radiothérapie du PORTEC 1 : 14 % contre 3 %, et la survie globale n’était que de 58 % contre 81% à 5 ans, incitant à maintenir l’indication de radiothérapie adjuvante 40. Le taux de rechutes métastatiques rapporté était de 31% à 5 ans, soulevant la question d’un traitement systémique. Ces résultats ont amené les membres du PORTEC à mener une nouvelle étude randomisée, PORTEC 3, actuellement en cours. Elle inclue les stades IB grade 3 avec emboles, IC et II grade 3, IIIA/IIIC et les adénocarcinomes à cellules claires ou papillaires séreux de stade 1B à III, est. Le bras expérimental comporte une irradiation pelvienne (48,6 Gy en fractions de 1,8 Gy) potentialisée par deux injections de cisplatine 50 mg/m² (J1-J22) suivie de 4 cycles adjuvants de carboplatine AUC 5 et paclitaxel 175 mg/m² et est comparé à la même 13 radiothérapie, exclusive. Une curiethérapie complémentaire est proposée en cas d’infiltration cervicale. 7- Conclusion Plusieurs essais randomisés ont modifié la prise en charge post-opératoire des cancers de l’endomètre. Pour les tumeurs de pronostic intermédiaire, tous vont dans le sens d’une désescalade thérapeutique, faisant de la curiethérapie vaginale le standard de traitement pour ce groupe de patiente, au détriment de la radiothérapie externe, plus toxique 41. La présence d’emboles tumoraux sur la pièce d’hystérectomie, exclue de la classification par groupe pronostique, doit cependant amener à nuancer cette attitude. Pour les lésions plus avancées ou les types histologiques plus agressifs, la radiothérapie suivie d’une curiethérapie reste le standard de traitement. Des essais thérapeutiques, comme le PORTEC 3, sont actuellement ouvert, proposant une intensification des traitements avec l’adjonction d’une chimiothérapie concomitante. L’institut du Cancer (INCa) a publié des recommandations de bonnes pratiques pour la prise en charge des cancers de l’endomètres, librement accessible sur son site internet 42. 8- Références 1. Cancer Research UK. CancerStats: Corpus uteri cancer http://info.cancerresearchuk.org/cancerstats/types/uterus/incidence/index.htm#geog (accessed 13 aug 2010). 14 2. Amant F, Moerman P, Neven P, Timmerman D, Van Limbergen E, Vergote I. Endometrial cancer. Lancet 2005;366:491-505. 3. 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Recommendations & Référentiels. http://wwwe-cancerfr/soins/recommandations/cancers-gynecologiques 2010. 9- Légendes des tableaux et figures - Tableau 1 : Classification FIGO, révisée en 2009 [5]. - Tableau 2 : répartition des lésions de stade 1 en groupes pronostiques [6]. - Tableau 3 : Résultats de curiethérapie post opératoire exclusive à haut débit de dose. * 3,4 % d’adénocarcinome à cellules claires ou papillaires séreux - Tableau 4 : Résultats des études randomisées comparant radiothérapie post-opératoire à observation. - Figure 1 : Etude randomisée PORTEC 2 : curiethérapie vs radiothérapie. 18 Stades I : limitée à l’utérus II : infiltration cervicale III : Dissémination locale ou régionale Ancienne classification FIGO 2009 A Limitée à l’endomètre Limitée à l’endomètre ou infiltrant < 50 % de l’épaisseur du myomètre B Infiltrant < 50 % de l’épaisseur du myomètre Infiltrant > 50 % de l’épaisseur du myomètre C Infiltrant > 50 % de l’épaisseur du myomètre -- A Glandes endocervicales uniquement B Invasion du stroma cervical Infiltration du stroma cervical A Séreuse / annexe / cytologie péritonéale positive Séreuse ou annexe B Métastases vaginales Métastases vaginales ou atteinte des paramètres C Métastases ganglionnaires pelviennes ou C1 : adénopathie pelvienne lombo-aortiques C2 adénopathie lombo-aortique IV Dissémination aux organes de voisinage ou à distance A Invasion de la vessie ou du rectum Invasion de la vessie ou du rectum B Métastase à distance Métastase à distance Tableau 1 : Classification FIGO, révisée en 2009 [5]. Groupes Stade grade histologie Bas risque I A/B 1-2 endomètrioïde Risque intermédiaire IC 1-2 Endomètrioïde I A/B 3 endomètrioïde IC 3 Endomètrioïde Haut risque I A/B/C Tableau 2 : répartition des lésions de stade 1 en groupes pronostiques [6]. Papillaire séreux / cellules claires / indifférencié Auteurs Année N Prescription Stade Suivi médian Contrôle loco- Rechutes régional vaginales (n) Onsrud [22] 2001 217 4 x 5,5 Gy à 3-5 mm 1 & 2b (1) & 3(1) ≈ 63 -- 1,8 % (4) Complications tardives grade 34 0 Chadha [18] 1999 38 3 x 7 Gy à 5 mm 1b grade 3 & 1c 30 100 0 0 Atahan [17] 2008 128 5 x 5,5 Gy à 5 mm 1b grade 2-3 & 1c 48 98,6 0,8 % (1) 0 Macleod [21] 1998 141 4 x 8,5 Gy à la surface 1 & 2b - 3a (6) 83 97,9 1,4 % (2) 0 Petereit [23] 1999 191 2 x 16,2 Gy à la surface 1 38 100 0 1 fistule colovaginale Horowitz [20] 2002 164 3 x 7 Gy à 5 mm 1b/c & 2 65 97,6 1,2 % (2) 0 Anderson [16] 2000 102 3 x 5 Gy à 5 mm 1b/c 49 97 1,0 % (1) 0 Chong [19] 2008 173 4 x 5,5 Gy à 5 mm 1-2a * 38 96 -- -- Alektiar [15] 2005 382 3 x 7 Gy à 5 mm 1b-2b 48 95 1,8 (7) 1 nécrose vaginale (grade 4) Hématuries grade 4 Sténose urètrale grade 3 Tableau 3 : Résultats de curiethérapie post opératoire exclusive à haut débit de dose. * 3,4 % d’adénocarcinome à cellules claires ou papillaires séreux Aalders et al.[24] PORTEC 1 [28] GOG 99 [29] ASTEC [34] N 540 714 392 905 Année de publication 1980 2011 2004 2009 Critères d’inclusion Stade 1 1B G2-3 1B/C 1A/B G3 1C G1-2 Suivi médian (mois) Bras 1C/IIA G1-3 160 Chir + Chir + curie curie + chir 69 Chir + RT Chir 58 Chir + RT Chir Chir + RT RT Récidive Loco-régionale (%) 7 2 15,5 6 8,9 1,6 7 4 vaginale -- -- 2,5 11 6,9 1,6 4,4 1,9 pelvienne -- -- 3,4 4,5 2,5 0,5 3,3 2,7 Récidive à distance 10 5 9,3 7,1 6,4 5,3 6,8 7,5 Survie globale 91 89 60 52 86 92 Tableau 4 : Résultats des études randomisées comparant radiothérapie post-opératoire à observation. 84 84