Tereza Horáčková

Transcription

Tereza Horáčková
PRAGUE, BUDAPEST, PARIS UNIVERSITY
Charles University in Prague
Faculty of Arts
Institute of World History
Les immigrés vietnamiens à Prague avant et après 1989 en perspective
transnationale et transgénérationnelle
Master's Thesis
Tereza Horáčková
Thesis supervisors in Prague, Paris, Budapešť,
doc. Markéta Křížová, Ph.D.
Nancy L. Green
Eszter Gyӧrgy
Budapest, Paris and Prague, 2015
Je, soussignée Tereza Horáčková, atteste que le présent mémoire a été écrit indépendamment,
que ce travail est personnel et que toutes les sources d’informations externes et les citations
d’auteurs ont été mentionnées conformément aux usages en vigueur.
……………………………..
Prague, 24 Mai 2015
Tereza Horáčková
RÉSUMÉ
Ce mémoire de maîtrise présente les résultats d'une recherche sur l'histoire des
immigrés vietnamiens à Prague entre 1974 et 1993. La recherche se base sur les analyses
des entretiens avec des témoins qui ont vécu le programme d’internalionalisme socialiste et
également sur l'étude des documents administratifs tchécoslovaques provenant de la
période entre 1974 ; marquée par la mise en place de la Convention entre le Gouvernement
de la République socialiste tchécoslovaque et le Gouvernement de la République
démocratique du Viet Nam sur la formation des citoyens de la République démocratique du
Vietnam dans les organisations , l'année 1989 en tant que l'année de la chute du régime
communiste ; et l'année 1993 avec la séparation de la République slovaque et la naissance
de la République tchèque
L’étude soutient le postulat que le programme influençait directement l'intégration
de la première génération des Vietnamiens, mais aussi, de façon latente, par les réseaux
ethniques auxquels il donnait naissance, la deuxième génération des arrivées du Vietnam.
L'étude tentait de découvrir les facteurs qui influencent l'adaptation de la première
et la deuxième génération des immigrés vietnamiens à Prague et d‘indiquer l'effet qu‘avait
le cadre normatif du programme internationale socialiste à la création de réseaux sociaux
ethniques. Ce sont en effet ses réseaux basés sur les liens de parenté qui fonctionnent en
tant que fournisseurs du capital sociale et économique et permettent la maintenance de son
isolation de la société majoritaire.
Mots clés : Les immigrants Vietnamiens, l’intégration, la famille, les changements
transgénérationels, le transnationalisme
SHRNUTÍ
Tato diplomová práce prezentuje výsledky historického šetření příchodu a existence
vietnamských imigrantů v Praze mezi lety 1974 a 1993. Metodologicky je výzkum založen
na rozhovorech s pamětníky programu socialistického internacionalismu a ze studie
československých vládních administrativních dokumentů z období mezi rokem 1974 ;
tedy rokem podepsání Dohody mezi vládou československé socialistické republiky a
vietnamské
socialistické
republiky
o
zaměstnávání
vietnamských
občanů
v
československých organizacích1, s mezníkem roku 1989 jakožto rozpadem komunistického
režimu ; a rokem 1993, tedy oddělením Slovenska a vznikem samostatné České republiky.
Práce vychází z předpokladu, že tento program ovlivnil integraci první generace v
československé společnosti a dále ukazuje, že působil na vznik vietnamských sociálních
sítí a tím ovlivnil i druhou generaci přicházející po rozpadu komunistického režimu v
listopadu 1989.
Výzkum si klade za cíl odhalit faktory, které ovlivňují adaptaci první a druhé
generace v majoritním prostředí a naznačit působení normativního rámce programu
internacionálního socialismu na formování sociálních etnických sítí. Právě tyto sítě,
založené na vztazích širší rodiny, které uvnitř diaspory fungují jako poskytovatelé
sociálního a ekonomického kapitálu, umožňují zachování izolace vietnamské populace od
většinové společnosti.
Klíčová
slova:
Vietnamští
imigranti,
integrace,
rodina,
transgenerační
změny,
transnacionalismus
1
NAČR, “Dohoda mezi vládou Československé socialistické republiky a vládou Vietnamské demokratické
republiky o odborné přípravě občanů Vietnamské demokratické republiky v československých
organizacích” signé à Hanoi le 8 avril 1974
SUMMARY
This thesis presents the results of a historical investigation of the arrival and
presence of Vietnamese immigrants in Prague between 1974 and 1993. Methodologically,
the research is based on interviews with witnesses of the program of socialist
internationalism and on the study of the Czechoslovak government administrative
documents from the period between 1974, ie. the year the signing of the Agreement
between the Government Czechoslovak Socialist Republic and the Socialist Republic of
Vietnam about employing Vietnamese citizens in Czechoslovak organizations2, with a
milestone in 1989 as the collapse of the communist regime, and the year 1993, as the
separation of Slovakia and the establishment of an independent Czechoslovak Republic
This work is not only based on the assumption that this program influenced the
integration of the first generation in Czechoslovak society, but it also shows an indirect
influence on the second generation coming after the Velvet Revolution, due to the
program's effect on the emergence of Vietnamese social networks.
The research aims to uncover the factors that influence the adaptation of the first
and second generations in the majority environment and to indicate the effect that the
normative framework of the program had on the formation of ethnic social networks. It is
indeed these networks, based on the (kin-based) relations of the extended family, that
function inside the diaspora as providers of social and economic capital, allowing for the
preservation of the Vietnamese population's isolation from majority society.
Key words: Vietnamese immigrants, integration, family, transgenerational changes,
transnationalism
2
NAČR, “Dohoda mezi vládou Československé socialistické republiky a vládou Vietnamské demokratické
republiky o odborné přípravě občanů Vietnamské demokratické republiky v československých
organizacích” signé à Hanoi le 8 avril 1974
REMERCIEMENTS
Soyons reconnaissants aux personnes qui nous donnent du bonheur ;
elles sont les charmants jardiniers
par qui nos âmes sont fleuries.
Marcel Proust
J'adresse mes remerciements et ma reconnaissance à mes trois directrices de recherche: à
Nancy L. Green pour m'avoir orientée et conseillée, à Eszter Gyorgy pour m'être une
directrice de mémoire attentive et disponible malgré ses nombreuses charges et à Markéta
Křížová pour son appui infatigable dans toutes les étapes de la réalisation de ce projet.
Je tiens à exprimer mes plus vifs remerciements à monsieur Jaroslav Picka qui fut pour
moi non seulement l'informateur clé, mais aussi une inspiration pour sa philosophie de vie
optimiste et plaisir d'aider.
Je souhaite ensuite remercier à mes amis Gil Kent, Alicia Bouchot, Alex, Eléonore Raoulx
et à professeur Eva Kalivodova pour le temps et l'énergie consacrés à la lecture et
correction de ce mémoire.
J’adresse toute ma gratitude à tous mes ami(e)s qui m’ont aidé dans la réalisation de ce
travail par un soutien psychologique.
Je remercie aussi à toutes les personnes formidables d'origine vietnamienne qui m'ont
ouvert la porte à leur communauté qui paraît fermée mais qui est cependant composée par
des personnes ravies de partager leur vie et leurs expériences pour que la majorité les
comprenne mieux. C'est l'admiration pour ces gens qui ont délaissé leurs familles
physiquement, mais jamais oublient leurs obligations morales envers leurs proches. Vivant
dans un pays où l'individualisme règne, pourtant, le Vietnamien n'est jamais seul.
Enfin, j'addresse toute mon affection à mes proches sans lesquels je ne serais rien. Simona
et Roman qui me sont un modèle et un soutien infatigable, à mon frère Michal que j'aime
tant, et Santi pour être ma passion et mon énergie.
L'amour ne connaît pas sa propre profondeur jusqu'à l'heure de la séparation. Je vous aime.
1.
2.
INTRODUCTION ........................................................................................................ 8
CADRE THÉORIQUE ET METHODOLOGIQUE DE LA RECHERCHE ........ 14
2.1.
Orientations Méthodologiques : La Méthode de Recherche et les Sources ................... 14
2.1.1.
3.
4.
Les Sources secondaires : L’état de lieu de la littérature portant sur les Vietnamiens
.................................................................................................................................. 15
2.2.
Les sources primaires :les documents historiques et les témoignages ........................... 17
2.3.
Le Cadre Conceptuel et terminologique .......................................................................... 22
2.3.1.
L’immigrant au pluriel : La collectivité (le groupe et la catégorie) ethnique ........... 22
2.3.2.
Transnationalisme – Translocalité ........................................................................... 25
2.3.3.
Diaspora ................................................................................................................... 28
2.3.4.
Théorie des réseaux (Network Theory).................................................................... 30
2.3.5.
Le capital social ........................................................................................................ 32
2.3.6.
La famille d’immigrés ............................................................................................... 36
LE PANORAMA HISTORIQUE ARTICULÉ AVEC LES ENTRETIENS .......... 39
3.1.
Le programme des travailleurs apprentis 1974-1979 ...................................................... 40
3.2.
Le programme des travailleurs invités, étrangers 1979-1989 ......................................... 44
3.3.
L’Année 1989 et les transformations économique et politique ...................................... 51
ANALYSE DE TROIS NIVEAUX :
4.1.
MACRO, INTERMEDIAIRE ET MICRO SOCIAL. . 62
Les immigrés vietnamiens en République tchèque d’un point de vue macro
analytique . .................................................................................................................................. 64
4.1.1.
Les motifs du gouvernement tchécoslovaque ......................................................... 64
4.1.2.
Décentralisation du système d’organisation ........................................................... 71
4.2. Les immigrés vietnamiens depuis la convention de 1974 au niveau intermédiaire de
l’analyse ....................................................................................................................................... 73
4.2.1.
Les conditions des relations sociales entre les Vietnamiens ................................... 77
4.2.2.
Les réseaux sociaux personnels ............................................................................... 81
4.3.
5.
6.
Les immigrés vietnamiens depuis La convention de 1974 au niveau micro de l’analyse 83
4.3.1.
Les motifs des Vietnamiens pour venir en République tchécoslovaque ................. 83
4.3.2.
L’apprentissage de la langue tchèque...................................................................... 87
4.3.3.
Les envois de fonds aux membres sédentaires des familles vietnamiennes. .......... 90
4.3.4.
Les conditions de la formation de la famille et les relations intimes....................... 93
4.3.5.
Les différences intergénérationnelles...................................................................... 96
CONCLUSION ........................................................................................................... 98
BIBLIOGRAPHIE ................................................................................................... 104
7
L’INTRODUCTION
La présente recherche se base sur mon expérience professionnelle ainsi que
personnelle. Mon intérêt envers les autres êtres humains et leurs comportements associés à
ma licence d'anthropologie sociale ont développé mon intérêt pour la diversité culturelle,
avant tout dans mon propre pays, la République Tchèque. L'objet traditionnel d'étude
qu'était le lointain laissa peu à peu place à une nouvelle approche qui m'a inspirée :
l'ethnologie du proche. Au niveau personnel, mes longs séjours aux États-Unis et en France
m'en ont enrichi et ouvert de nouvelles perspectives dans la mesure où je me suis moimême trouvée dans la position d'une immigrée.
Pendant mes trois années de licence et de ma première année de master, j'ai
concentré mon travail sur l’intégration d'un des plus grands groupes d'immigrés provenant
d'un pays non-occidental : les migrants vietnamiens en France et en Tchéquie.3 Ayant déjà
étudié des trajectoires de vie individuelles dans une perspective micro-sociale, j'ai cherché
ici à aborder le sujet de l'immigration vietnamienne dans une perspective davantage
globale. J’ai ajouté à mon approche anthropologique initiale tout un pan historiographique
grâce à l’analyse du programme d’accueil des travailleurs contractuels en République
socialiste tchécoslovaque. Cela m'a permis d'envisager l’intégration des Vietnamiens à
Prague d’un point de vue transnational d'essayer de comprendre l’influence du programme
de l’internationale socialiste d’échange de main d’œuvre sur la création des réseaux
familiaux des Vietnamiens.
J'aimerais ouvrir cette étude par une interprétation de la vie des Vietnamiens par la
majorité tchèque qui a été publié dans un article de la revue Přítomnost en 1991 écrit par le
poète, musicien, journaliste et représentant du mouvement 'underground' tchèque, Jáchym
Topol et qui témoigne de la perception de la vie des Vietnamiens à la fin des années 1980
et au début des années 1990 par la majorité tchèque.
3
L’influence des parents sur l’intégration des enfants vietnamiens dans la société tchèque, mémoire de
Licence en Anthropologie sociale sous la direction de Josef Kandert, Université Charles de Prague,
2011-2012 ;
Les couples franco-vietnamiens : Négotiation des habitudes culturelles dans un environnement partagé,
mémoire du Master 1 en Anthropologie sous la direction de Paul van der Grijp, Université Lumière
Lyon 2, 2012-2013; Les Vietnamiens en République tchèque avant et après le 1989 (1974 - 2000): Une
perspective transnationale et transgénérationnelle, mémoire du Master TEMA sous la codirection de
Nancy L. Green, Ecole des Hautes Etudes des Sciences Sociales, 2013-2015.
8
« Il y en a en République tchèque et en République slovaque. Ils vivent dans les grandes et
petites villes du pays. Ils se rendent visites entre eux, en se déplaçant beaucoup. Ils se
déplacent souvent dans les gares, dans les transports en commun. On peut les trouver dans
les restaurants (pas tous) n’importe où dans les rues, dans les parcs. Ils publient des
magazines, organisent des conférences. Néanmoins, ils vivent de façon isolée, la plupart du
temps entre eux. De la population du pays dans lequel ils vivent, ils connaissent surtout des
différents fonctionnaires, leurs supérieurs et parfois (involontairement) les flics. Ils
travaillent le plus souvent dans les usines, ils résident dans des dortoirs communs. Ils ne se
montrent pas trop en public. Dans l'esprit des citoyens tchécoslovaques ils sont - à cause
des rapports laconiques de chroniques noires - connus principalement comme des
profiteurs. Bien que des milliers de Vietnamiens vivent et travaillent en Tchécoslovaquie
depuis des années, ils n'ont pas pu se manifester comme une minorité nationale autonome,
comme un groupe qui a ses propres antécédents culturels. L'intérêt des médias pour eux
augmente seulement sur le court terme, quand ils deviennent la cible d'attaques racistes.
Le public ne savait pas ou ne voulait pas savoir pourquoi ils sont chez nous, et dans
quelles conditions ils vivent. Récemment, la communauté vietnamienne commence à
s’animer, à chercher un moyen de sortir du ghetto. »4
Bien que cet extrait est une perception biaisée de la réalité, cet extrait reflète bien la
prise de distance, la marginalisation ou bien l'exotisme des Vietnamiens résidant en
Tchécoslovaquie à l'époque : c'est un exemple de la représentation de cette minorité
ethnique dans la presse tchécoslovaque.
4
“Jsou v českých zemích i na Slovensku. Žijí ve velkých i malých městech, na venkově. Navštěvují se
mezi sebou, hodně cestují. Často se pohybují na nádražích, v dopravních prostředcích. Jsou k zastižení
v restauracích (ne ve všech), kdekoli na ulici, v parcích. Vydávají časopisy, pořádají konference. Přesto
žijí uzavřeně, většinou jen mezi sebou. Z obyvatel země, ve které žijí, znají většinou jen různé úředníky,
svoje nadřízené a sem tam (nedobrovolně) policajty. Pracují nejčastěji ve fabrikách, bydlí ve společných
ubytovnách. Na veřejnosti se příliš neprojevují, v povědomí československých občanů jsou – také díky
lakonickým zprávám černých kronik – známí především jako šmelináři. Přestože tisíce Vietnamců
v Československu žijí a pracují už léta, nemohli se projevit jako svébytná národnostní menšina, jako
skupina s vlastním kulturním zázemím; zájem sdělovacích prostředků o ně krátkodobě vzrostl, jen když
se stali terčem rasistických útoků. O tom, proč u nás vůbec jsou a za jakých podmínek žijí, veřejnost
v podstatě nevěděla ani vědět nechtěla. Poslední dobou začíná vietnamská komunita ožívat, hledat cestu
ven z ghetta.“
Jáchym Topol, “Vietnamci v Československu – konec izolace?”, Přítomnost, 2, num. 6 (1991), pp.
16-18.
9
En 1991, deux ans après la Révolution de Velours, les Vietnamiens étaient déjà
présents dans la société tchécoslovaque depuis quarante ans. Les premiers groupes d’une
centaine de personnes sont venus en tant qu'étudiants dans les différentes universités
tchécoslovaques dans le cadre de l'aide envers un pays “frère” en guerre, donc
idéologiquement motivée. Même si les Tchèques se sont sentis solidaires avec ces
visiteurs, ces derniers sont toujours référés en tant que les « autres », ce qui aboutira en
l'isolation des Vietnamiens de la majorité. La société majoritaire restait peu informée de la
vie de ces ouvriers contractuels provenant de ce pays « exotique », selon des Vietnamiens
immigrés. Ces Vietnamiens étaient eux-mêmes appelés Việt Xu par les autres Vietnamiens
(que Lee Huu Khoa traduit en français comme 'les Vietnamiens d'outre mer') . Tandis que
la majorité tchèque ne s’intéressait tant aux Vietnamiens, pour les immigrés, la
Tchécoslovaquie leur évoque une nostalgie. Ainsi, la trace5 des contacts tchécovietnamiens établie dès les années 1950 est toujours visible au Vietnam. Grâce à leur
expérience dans les usines en Tchécoslovaquie, les rapatriés ont apportés leurs
connaissances de la fabrication et ils ont investi dans les nouvelles entreprises au Vietnam.
Par exemple, la culture tchèque est ainsi représentée au Hanoï par la brasserie de la bière
tchèque. (Kušniráková, 2012)
Depuis les années 1950 des accords concernant les soins médicaux, l'échange
d'experts, des stagiaires et des étudiants, ou de la main-d’œuvre etc. ont été signés entre la
Tchécoslovaquie et le Vietnam6. Jusqu’en 1989, les relations économiques entre les deux
pays socialistes étaient cultivés par les gouvernements. Après 1989, la migration
temporaire déclarée et réglementée par l'état s'est transformée par une migration
économique spontanée. Ainsi, la motivation initiale des citoyens vietnamiens pour
améliorer leurs qualifications s'est transformée dans un désir d'amélioration de leur niveau
de vie. Si nous laissons du côté les lois tchécoslovaques et plus tard tchèques favorables
(lois d'immigration, d'entreprise, etc.), le facteur qui avait influencé le choix de la
République tchèque en tant que destination de nombreux immigrants vietnamiens
modernes était en effet cette bonne expérience et la connaissance des réalités de la
5
6
Tant que appelé par Tereza Kusnirakova, 2013, http://migration4media.net/2013/07/23/ceska-stopa-vevietnamu
Il est nécessaire de mettre accent sur le fait que les relations étaient régionalement conditionnées, parce
que jusqu’en 1975 le gouvernement communiste tchécoslovaque soutenait exclusivement des contacts
avec la République démocratique de Vietnam (le Vietnam du Nord) qui marquait l’unification du
Vietnam sous le pouvoir communiste mené par Ho Chi Minh. Suivant la réunification, les relations
diplomatique sont développées entre la Tchécoslovaquie et la République socialiste du Vietnam dans le
sens de la coopération entre les pays socialistes mutuellement bénéficiaire.
10
Tchécoslovaquie avant l'année 1989. (Kušniráková, 2012).
La problématique de cette recherche est donc centrée sur cette rupture de la
dynamique migratoire d'une ethnie sur le territoire d'un état (d'accueil) dont le système
politique est en voie de transformation, en l'occurrence, la République tchèque. Cette
recherche a pour sujet les réseaux ethniques sociaux et surtout familiaux créés avant 1989.
Ceux-ci permettaient, selon mes hypothèses, l'intégration instrumentale des Vietnamiens
même s'ils étaient aussi une des raisons pour laquelle la première génération de
Vietnamiens resta isolée de la société dominante.
En terme de cadre temporel, cette recherche est délimitée par l'année 1974 (la
signature de la Convention entre la République socialiste tchécoslovaque et la République
démocratique du Vietnam pour l'admission des étudiants, de stagiaires et de l'emploi) et
l’année 1993 (l'année de la séparation de la République fédérale tchécoslovaque). Elle met
l’accent sur l'année 1989, celle de la Révolution de Velours tchécoslovaque et les débuts de
la transformation politique et économique. Pour la diaspora vietnamienne, cette année
signifie plusieurs ruptures au niveau social, économique et légal. La fermeture des
fabriques et entreprises d'ancien régime est étroitement liée avec la transition politique et
économique. Cela a conduit à la perte de travail des travailleurs contractuels car l'ouverture
des frontières leur permettait le choix d'un déplacement supplémentaire à l'ouest. Pourtant,
un grand nombre de Vietnamiens restait en République tchèque et profitait à la fois de la
possibilité d'investissement sur le marché capitaliste et de l'opportunité d'obtenir la
résidence permanente sur la base d’un certificat de licence commerciale grâce à la création
d'une société à responsabilité limitée (SARL) avec un partenaire tchèque. (Broucek, 2003:
16). la diversification de la structure de la diaspora même entre les anciens résidents Việt
Xu et les nouveaux immigrés économiques est une autre conséquence de la transition.
Selon la législation du nouvel état démocratique, les nouveaux arrivants peuvent être
divisés en deux catégories.
En premier lieu, il s'agit de ceux, qui sont venus dans le cadre du regroupement
familial, en particulier les femmes et les enfants des vietnamiens qui étaient déjà bien
installés et économiquement stables. En deuxième lieu, nous observons un grand nombre
de nouveaux immigrés économiques, qui, à cause du manque du réseau familial sont très
dépendants des services internationaux et, à partir de l'arrivée en République tchèque, des
services locaux fournis par ces compatriotes.
11
La question de recherche majeure est donc formulée de façon suivante :
Comment s’est déroulé le programme intergouvernemental d’échange de main
d’œuvre mis-en-place depuis 1974 ? Comment cela a-t-il influencé la première et
deuxième génération de Vietnamiens résidant à République tchèque ?
Comment les réseaux sociaux ont-ils évolué en fonction du programme d’échange
intergouvernemental?
Les hypothèses concernant l'adaptation des Vietnamiens dans le contexte historique sont
les suivants :
-
Le programme d’échange de main d’œuvre a servi comme point d’appui pour les
premières vagues des travailleurs ainsi que comme un outil facilitant la mise en
place des réseaux familiaux, et causa la création de la classe élite au sein de la
future structure interne de la diaspora vietnamienne.
 Les familles se sont formées malgré les accords et réglementations du cadre formel
communiste en mobilisant des réseaux basés sur la consanguinité.
Les deux ethnologues tchèques décrivirent la situation contemporaine avec justesse
dans leur étude menée en 1989: « Une situation particulière s'est créée ici: chaque groupe
(de Vietnamiens) ne reste que quatre ans, au maximum sept, mais comptant tout les
groupes circulant dans l'ensemble, les Vietnamiens vivent et travaillent ici depuis vingt ans.
Pendant ce temps, ils ont appris à nous connaître et à bien profiter de l'expérience de vivre
avec nous. » (Heroldová, Matějová 1987: 201). Les Vietnamiens ont créé des réseaux
sociaux, fournissant le capital social. Ces réseaux facilitaient d'abord leur installation en
République socialiste tchécoslovaque pendant la transformation économique et politique
du pays d'accueil et permettaient ensuite l'arrivée de nouveaux immigrés provenant
notamment du même clan familial. Avant de passer à l'analyse de la dynamique des
réseaux sociaux ethniques et aux actions qui dépassent les frontières nationales à travers
l’optique transnationale, j'aborderai le sujet par ce que j'appellerai l’analyse primaire au
niveau macro-sociale, prenant ainsi en compte le cadre politique et législatif du programme
des travailleurs contractuels mis en place entre le Vietnam et la Tchécoslovaquie.
Mon étude propose de contraster avec les travaux occidentaux se concentrant sur la
migration spontanée car il s’agit ici de la migration dirigée par des gouvernements
idéologiquement liés. Cependant, mon cas d’étude peut servir de point d’appui pour
12
repenser les paradigmes présentés par la « network theory », présentée plus bas. Ainsi, en
plaçant la problématique dans un contexte plus large, ma recherche se pose en contraste
face aux études ethnographiques qui, en raison de leur nature descriptive, perçoivent la
problématique vietnamienne en tant que purement « tchèque ».
Les hypothèses de cette étude ont été formulées sur la base des pré-requis de
l’ouverture du nouvel environnement de la société d’accueil des immigrés et de leur
capacité à choisir eux-mêmes leurs stratégies existentielles. L’étude ne tente pas de
négliger l’« agency » des migrants ; à l'inverse, je propose une approche qui tente de saisir
les comportements des Vietnamiens qui sortent du cadre institutionnel et leurs stratégies
alternatives de l'appropriation du lieu au sein de la structure normative.
Afin de répondre aux objectifs énoncés, ce mémoire est composé de trois chapitres.
Le premier chapitre est une présentation du cadre conceptuel, une présentation de la
méthodologie ainsi que de la méthode utilisée. Afin de placer la famille d'immigrés dans le
contexte théorique, ce chapitre s’appuie notamment sur les concepts du transnationalisme,
de la diaspora et du capital social.
Le deuxième chapitre présente en bref les relations entre la République socialiste
tchécoslovaque et le Vietnam entre 1974 et 1993, en s'appuyant sur les documents
administratifs du pays d'accueil des immigrés Vietnamiens (ces sources primaires seront
présentées en détail dans le chapitre méthodologique). Sur cette base, je serai en mesure de
reconstituer le contexte d'arrivé des immigrants vietnamiens.
Le troisième chapitre analyse les sources primaires. Dans ce chapitre, je tenterai
d'identifier les facteurs qui ont affecté (de façon soit négative soit positive) l'adaptation des
citoyens vietnamiens au sein de la société d'accueil. En outre, ce troisième chapitre
présentera les Vietnamiens en République tchécoslovaque en tant qu’acteurs de l’étude.
13
CHAPITRE I- CADRE THÉORIQUE ET METHODOLOGIQUE DE LA
RECHERCHE
1.1.
Orientations Méthodologiques : La Méthode de Recherche et
les Sources
Une approche interdisciplinaire
En premier lieu, le contexte historique de l’arrivée de la première génération de
vietnamiens en tant que main d’œuvre grâce aux accords socialistes entre la République
socialiste et la République démocratique du Vietnam dans les années 1970 et 1980 sera
examiné, ainsi que les processus d’implantation et de formation organisée. Le contexte
historique sera développé à partir des archives des institutions tchécoslovaques chargées
de la mise en place du programme d’accueil des apprentis et des travailleurs vietnamiens
datant de la période allant de 1970 à 1993. Les processus d’implémentation et de
formation, quant à eux, seront développés en analysant comment les vietnamiens de la
première génération ont trouvé des stratégies et des niches économiques pour survivre et
éventuellement bénéficier de leur connections avec le Vietnam, et ce en dépit du fait qu'ils
étaient fortement surveillés par des cadres communistes tchécoslovaques.
En second lieu, les stratégies d’intégration des Vietnamiens de la deuxième
génération seront analysées à partir des témoignages recueillis au cours de mes entretiens.
Le but de cette analyse micro-sociale sera de comprendre si, et comment, les membres de
la deuxième génération poursuivent ou adoptent des pratiques transnationales, et comment
ces pratiques ont changé après la transformation politique de 1989. Ainsi, en plus des
documents historiques, les témoignages des Vietnamiens résidant à Prague ayant vécu ce
programme d’échange de main d’œuvre constitueront le deuxième type de sources
primaires. Leurs expériences individuelles serviront ainsi à contraster l’histoire macrosociale présentée par les documents officiels. Mon étude tente de démontrer l’importance
de l’individu dans l’histoire, tout en mêlant les approches des deux disciplines que sont
l’histoire et la sociologie.
14
1.1.1. Les Sources secondaires : L’état de lieu de la littérature portant sur les
Vietnamiens
Au cours des dix dernières années, les vietnamiens résidant sur le territoire tchèque
ont fait l'objet de nombreuses recherches non seulement par des sociologues, mais aussi
par d'autres chercheurs en sciences humaines, par exemple en économie, en droit ou en
pédagogie, ainsi que par des étudiants. Les chercheurs tchèques spécialistes dans l’étude
des vietnamiens ne sont pas si nombreux. Il s’agit d’abord d'orientalistes spécialisés dans
l'étude du Vietnam qui publient des ouvrages théoriques. Parmi ceux-ci, les plus connus
sont probablement Ján Ičo (histoire et littérature ancienne du Vietnam), Petra Mullerová
(art vietnamien), Ivo Vasiljev (langue et ethnologie), Eva Pechová (folklore vietnamien) et
Jiří Kocourek (sociologie appliquée à l’éducation interculturelle). Eva Pechová et Jiří
Kocourek sont actifs dans le milieu associatif et organisent des activités visant à
sensibiliser le public tchèque. Ensuite, le deuxième groupe de specialistes est constitué
d'ethnologues comme Iva Heroldová, Vera Matějová, Zdeněk Uherek ou Stanislav
Brouček, employés par l’Institut d'ethnologie de l’Académie des Sciences. Ceux-ci étaient
financés et organisées par l’état surtout avant 1989 ainsi que dans les années 1990.
Une des plus grandes recherches en ethnologie financé par le Ministère de
l'Intérieur fut réalisée par Stanislav Brouček. Les résultats de ses donnés collectées pendant
pas moins de trois ans auprès d'individus d’origine vietnamienne résidant en milieu urbain
en République tchèque furent publiés en 2003 sous le titre de ‘Les problèmes d’adaptation
de l’ethnie vietnamienne en République tchèque’. Brouček présente la diaspora
vietnamienne comme un groupe homogène sans mettre suffisament l’accent sur ses
dynamiques internes. En réalité, des études plus récentes menées par le centre de recherche
géographique Geo-migrace portant sur l’intégration des étrangers en République tchèque et
plus spécifiquement les études menées par Tereza Freidingerová sur la population
vietnamienne révèlent que celle-ci est très hétérogène et intérieurement hiérarchisée en
fonction de la génération d'arrivée à laquelle ils appartiennent.
Par ailleurs, il existe peu de sources ethnographiques portant sur la situation des
vietnamiens en République tchèque avant 1989. Néanmoins, le fait qu’il y ait eu plusieurs
études réalisées dans le cadre d’une initiative gouvernementale à travers l'Institut
d'ethnologie et du folklore à Prague explique que, à côté des statistiques formelles menées
au sein des usines par l'administration tchécoslovaques qui portait uniquement sur le
nombre de vietnamiens employés et le contrôle de leurs conditions de travail, l’étude de la
15
population vietnamienne nécessitait encore une approche qualitative et les autorités
publiques en étaient conscientes.
En 1985, le gouvernement tchécoslovaque a demandé l’Institut d’Ethnologie de
l’Académie des Sciences à aller dans ce sens en encourageant une recherche qui s'est
conclue par le document IX -9-4/05 intitulé Les implications internes et internationales des
processus ethniques : les travailleurs étrangers en République socialiste tchécoslovaque
7
portant sur les travailleurs contractuels. Les ethnologues Iva Heroldová et Vlasta Matějová
ont choisi les Vietnamiens en tant que groupe d’échantillon parmi d'autres groupes de
travailleurs provenant de Cuba, de Pologne ou de Bulgarie, et ce pour deux raisons : « a)
Les travailleurs vietnamiens représentent dans le passé récent, le présent [1985], et
probablement dans les décennies à venir le groupe le plus nombreux provenant d'un pays
non-européen, et vivant sur le territoire depuis le plus longtemps, b) c’est la présence de
travailleurs vietnamiens qui a provoqué la nécessité d'apporter une solution à la
problématique sociale causée par la présence de travailleurs étrangers ». (Heroldová,
Matějová, 1987: 195). L’étude visait à comprendre la manière de vivre et la culture des
vietnamiens résidant sur le territoire tchécoslovaque, notamment à travers l'observation des
attitudes et des relations existantes entre la société dominante et les vietnamiens. Les
ethnologues étaient censés étudier les causes de l' « ignorance mutuelle, l'étrangeté,
l'incompréhensibilité et la méfiance qui en résulte, la crainte que l'arrivée de grands
groupes de travailleurs étrangers puissent perturber nos [les Tchèques] réserves,
l'émergence de ressentis tels que: ils vont tout nous racheter, rien ne restera pour nous »
(Heroldová, Matějová, 1987: 196), tout en cherchant des solutions pour résoudre
l’incompréhension, la méfiance et la tension entre la société dominante et les travailleurs
contractuels.
Ces enquêtes réalisés dans des auberges et des lieux de travail sont des exemples
représentatifs de la vie quotidienne des vietnamiens tout juste arrivés du Vietnam. Une
thèse doctorale de Ngo Van Le, candidat vietnamien au département du folklore à Prague,
constitue une autre source importante dans ce domaine et comble certaines lacunes des
chercheurs tchécoslovaques, notamment en ce qui concerne la contextualisation historique
de la situation au Vietnam, ainsi que la description de la culture spirituelle et matérielle
traditionnelle des ouvriers. Les résultats de ses enquêtes ont exposé les problèmes qui
relèvent des différences culturelles entre la société dominante d'accueil et les vietnamiens
7
Vnitřní a mezinárodní důsledky etnických procesů – zahraniční pracující v ČSSR
16
arrivant dans le cadre des Conventions bilatérales. En dépit de son caractère académique et
de sa valeur descriptive, je suis consciente du fait que ces documents sont malgré tout
idéologiquement chargés et qu'il faut prendre en considération les limites de ces résultats
qui parfois cherchent surtout à promouvoir la fraternité et la fidélité entres les pays
socialistes et être « l’exemple de l'internationalisme prolétaire en pratique » (Ngo,
1989 :8).
Ces sources secondaires sont contrastées et complétées par ma propre étude
qualitative, développée ci-dessous.
1.2.
Les sources primaires :les documents historiques et les
témoignages
Afin de répondre à la problématique de cette recherche, qui porte sur les réseaux
sociaux des immigrés vietnamiens résidant à Prague ayant put partir grâce au programme
promu par l'internationale socialiste, ma démarche a été la suivante. Tout d’abord, il m'a
fallu identifier les institutions qui ont participé à la prise en charge des citoyens
vietnamiens arrivant en République tchèque, et comprendre les dynamiques de pouvoir à
l’œuvre entre celles-ci. Ce programme d'immigration de travailleurs fut mis en place grâce
à des conventions bilatérales, préparées et signées par les Ministères Fédéraux de la
République Tchécoslovaque et par le gouvernement de la République socialiste du
Vietnam. Cette étude se concentre sur le pays d’accueil, c’est-à-dire la République
socialiste tchécoslovaque et sur la prise en charge des migrants vietnamiens. En fonction
du type de convention et de la phase du programme, les ministères suivants furent
impliqués : le Ministère de l’éducation, en charge des étudiants dans les premières phases
du programme les années 1950 ; le Ministère du travail et des affaires sociales, en charge
du programme concernant les apprentis et les travailleurs vietnamiens à partir de 1974 ; et
finalement le Parti Communiste tchécoslovaque, en charge de la propagande idéologique
ainsi que du bon déroulement du programme au niveau de la politique communiste entre
les deux pays. Par conséquent, mes sources proviennent des archives du Ministère du
travail et des affaires sociales, archives qui n’étaient pas du tout classifiées. Celles-ci me
furent mise à disposition par la secrétaire qui avait été employée dans le bureau du
Département des travailleurs étrangers depuis l’année 1973. Les archives du Parti
17
Communiste tchécoslovaque et du Ministère de l’éducation, quant à eux, sont disponibles à
l’Archive nationale.
Le but de ses sources était de communiquer les régulations provenant d'en haut,
c'est-à-dire des ministères fédérales qui ont respectivement dirigés les ministères locales
(de République tchèque et slovaque) et les délégations tchécoslovaques au Vietnam.
Respectivement, il s’agit ici des conventions bilatérales, des protocoles d’application de
ses conventions, des rapports de départements des ministères concernant la mise en place
du programme, des bilans de réunions, de la correspondance provenant des organisations
tchécoslovaques en charge des travailleurs. Les documents sont idéologiquement chargés
et ils ne manquent pas les phrases convenant au marxisme-léninisme et à l'internationale
socialiste. Il est donc nécessaire de tenir conscience de la potentielle distorsion politique,
de la falsification, ou bien la censure imposée, ce qui présente la plus grande limitation de
ces sources. Les lecteurs prévus étaient donc les hautes fonctionnaires, les cadres
politiques, les employés administratifs des départements et les chefs des entreprises
étatiques. Mes informateurs m'ont confiés qu'ils ont jamais vu une convention ou ils on
jamais rempli un formulaire. Le programme suivait strictement la logique de l'approche
top-down. Il s’agit de la source normative et prescriptive – il décrit ce que les cadres
politiques et le pouvoir exécutif prévoyaient de faire.
Mon analyse est ainsi fondée sur les connaissances que j'ai acquises au cours de
8
mes propres études , notamment au cours de mon mémoire de licence et de master 1, ainsi
que sur les résultats d'études menées en République Tchèque par des chercheurs en
sciences sociales, même si celles si sont susceptible d’être actualisées par cette présente
étude. L’analyse des sources historiques est confrontée au micro-niveau
par les
témoignages que j’ai recueilli au cours d'entretiens semi-directifs, ainsi que par des récits
de vie que j’ai recueilli entre les mois de mars et avril 2015. Les témoignages fournissent
ainsi le matériel pour une analyse au niveau local, centrée sur le vécu individuel.
8
Vliv rodičů na integraci vietnamských dětí v české společnosti, [L’influence des parents sur
l’intégrationdes enfants vietnamiens dans la société tchèque], mémoire de
Licence
en
Anthropologie sociale sous la direction de Josef Kandert, Université Charles de Prague,
2011-2012 ;
Les couples franco-vietnamiens : Négotiation des habitudes culturelles dans un environnement partagé,
mémoire du Master 1 en Anthropologie sous la direction de Paul van der Grijp, Université Lumière
Lyon 2, 2012-2013;
Les Vietnamiens en République tchèque avant et après le 1989 (1974 - 2000): Une
perspective
transnationale et transgénérationelle, mémoire du Master TEMA sous la codirection
de Nancy L.
Green, Ecole des Hautes Etudes des Sciences Sociales, 2013-2015.
18
Avant tout, il est important de souligner le caractère artificiel de la situation
d'entretien, construit par les participant-e-s (ici par le témoin et moi, la chercheuse). Les
positions de ‘l’interrogé’ et ‘interrogatrice’ construisent ainsi une situation spécifique
pendant laquelle l’interrogé est susceptible d’adapter ses réponses à ce qu’il pense être les
attentes de la chercheuse et du sujet d’étude. Selon l’historien italien Alessandro Portelli,
“les sources écrites et orales ne sont pas mutuellement exclusives. Elles ont des fonctions
spécifiques ainsi que des caractéristiques autonomes et communes que seulement l'une ou
9
l'autre peut préparer (ou qu'un type de sources satisfait mieux que l'autre)». (Portelli,
1979: 33)
L’entretien est effectivement par nature subjectif, tout comme les autres sources
historiques. Cependant, l'entretien se distingue de ces dernières dans la mesure où il est
provoqué par le chercheur ; la démarche n'est pas initiée par le témoin. La preuve visuelle
de l’histoire orale est la transcription, même si elle n'est qu’une interprétation secondaire
des vraies sources. Portelli explique que la transcription ne peut jamais exprimer toutes les
nuances et notamment la forme (en particulier l’intonation, le rythme, le volume) d'une
source sonore. Or, la tentation de remplacer l’enregistrement par la transcription dans un
but scientifique se rapproche de la tentation de faire de la critique d’art à partir de
reproductions, ou de faire de la critique littéraire à partir de traductions. Mon étude ne
cherche pas à abolir le côté émotionnel de la narration, la façon dont la narration a affecté
le narrateur ou bien comment celui-ci se positionne dans l’histoire. Les enregistrements
seront donc mis à disposition du lecteur comme annexes.
Mes interlocuteurs et leurs narrations sont considérés être des cas uniques, des
exemples des catégories trouvées dans les documents officiels : des étudiants, des
apprentis, et des travailleurs (dont les conventions ont été respectivement mises en place à
partir des années 1950). Il s’agit ici de deux étudiants : une femme et un homme qui
proviennent de différentes régions du Vietnam, de la capitale du Vietnam réunifié Hanoi et
d'un village rural, respectivement ; un homme qui a passé deux ans comme apprenti et
deux années dans une usine en Tchécoslovaquie ; d’un homme de la deuxième génération
d'immigrés qui est venu en tant que travailleur contractuel à l’usine après avoir suivi son
9
“As a matter of fact, written and oral sources are not mutually exclusive. They have common as well as
autonomous characteristics, and specific functions which only either one can till (or which one set of
sources fills better than the other).“
19
oncle, lui aussi en quête de travail ; et finalement un tchèque, qui a participé à ce
programme et qui dès l'origine a fondé une entreprise de conseil juridico-économique pour
les vietnamiens.
Mes interlocuteurs étaient contactés et sollicités pour faire un entretien dans
l'anonymat, pour les besoins d'une recherche académique grâce à la méthode dite « boule
de neige ». Cette méthode permet de trouver des interlocuteurs à partir d'un premier
informant (appelé « informateur clé » en ethnologie) qui connaît bien le cadre de la
recherche et qui est bien inséré dans l'environnement d'étude – en l'occurrence la
communauté vietnamienne travaillant au centre commercial et culturel SAPA à Prague.
Cette personne, à travers son récit, m'a permis non seulement d'avoir un aperçu général de
la structure interne de la diaspora vietnamienne et de leurs histoires d’arrivée , mais aussi
d'obtenir des contacts parmi d'autres Vietnamiens. Ainsi, je fus par exemple accompagnée
par une autre informatrice clé à une soirée de danse qui avait lieu au centre SAPA et où j'ai
eu l’opportunité de rencontrer d'anciens étudiants universitaires tchécoslovaques qui
résident aujourd’hui en Allemagne – des Vietnamiens allemands. Ceux-ci m’ont présentée
à certains de leurs proches, ce qui a permis d'établir a priori une certaine confiance entre
ces informateurs potentiels et moi, ainsi qu'une certaine aise pendant l’entretien.
Naturellement, cette technique se limite à un nombre limité de Vietnamiens et donc ne
permet pas d'obtenir un échantillonnage représentatif de la population vietnamienne en
République tchèque.
Ainsi, cette étude ne cherche pas à généraliser à partir de ces exemples, car celle-ci
ne se base pas sur un échantillon représentatif de la population vietnamienne résidant en
République tchèque ou à Prague. Les témoignages tentent plutôt de restituer la dimension
10
individuelle de l'histoire. Chaque immigré d’origine vietnamienne est considéré être un
agent social ayant une volonté propre et une capacité de choisir. Mon travail s’appuie ainsi
sur l'agency des migrants, même si cette migration a évidement été l'objet des institutions
politiques. L’objectif est de démontrer que les Vietnamiens pouvaient agir d'une façon qui
échappait au cadre normatif du programme politique et idéologique, alors qu'ils ne
représentent qu'un sujet passif dans les documents officiels qui les commodifient comme
"force de travail entièrement mobile", comme l'explique l’historienne Alena Alamgir dans
10
Loriga, Sabina, Le Petit x : De la biographie à l'histoire, Seuil, 2010.
20
11
a monographie . Les actes de débrouillage
12
seront décrits et analysés à partir des
entretiens et des récits de vie afin de voir comment les Vietnamiens ont pu s'émanciper du
cadre relativement strict des règles officielles et trouver une certaine autonomie,
notamment en créant des réseaux sociaux qui leur ont permis d’assurer leur statut de
groupe ethnique « bien adapté » qui persiste encore aujourd'hui. Ayant décrit les sources
primaires et la méthode de la collecte de donnés, il est maintenant nécessaire de présenter
la façon dont celles-ci seront traitées au niveau méthodologique. Je m’appuie sur le modèle
conceptuel qui, à mon sens, répond effectivement aux besoins de l’étude interdisciplinaire
et qui peut permettre de saisir sa complexité.
Pour les besoins de l’analyse, je vais donc m’appuyer sur la division proposée par
Frederick Barth qui, dans son ouvrage intitulé « The Anthropology of Ethnicity: Beyond
13
"Ethnic Groups and Boundaries" » , réitère ses positions datant de 1969 relatives au
concept d’ethnicité. Dans le premier chapitre, traitant du rôle de l'’État comme agent actif
dans la formation des frontières culturelles et dans l’organisation et la partition des sources
disponibles pour différentes catégories ethniques, l’auteur accentue la nécessité de
l’approche comparative dans l’analyse de ces processus. Afin de voir comment des
politiques d’Etats fonctionnent et affectent ou créent les catégories ethniques, il nous faut
travailler sur trois niveaux d’analyse. Il s’agit des niveau micro, intermédiaire et macroanalytique. Le niveau micro d'analyse est nécessaire pour indiquer les processus d'autoidentification, d'acceptation ou de refus de symboles et de communion sociale, ainsi que
les processus d'interaction sociale grâce auxquelles l'individu façonne ses idées, ses
valeurs, et son estime de soi. Ensuite, "un niveau médian est nécessaire pour représenter ce
qui créé des collectivités et mobilise des groupes à des fins différentes par divers
moyens."
14
(Barth, 2000: 21). Chaque groupe a des exigences différentes concernant sa
reproduction, son leadership et son idéologie, son rapport à l'argent et au travail, et à la
formation de divers stéréotypes sur les autres groupes.
11
12
13
14
Alamgir, Alena, Bureaucratic Disgruntling and Intimate Interventions: Vietnamese Trainees and
Temporary Workers in (the Care of) State-Socialist Czechoslovakia, Rutgers University, 2013.
De Certeau, Michel, L'Invention du quotidien, 1. : Arts de faire, éd. établie et présentée par Luce Giard,
Paris, Gallimard, 1990 (1re éd. 1980).
Frederick Barth, « Enduring and Emerging Issues in the Analysis of Ethnicity », in Vermeulen, Hans et
Cora Govers (éd.), The Anthropology of Ethnicity. Beyond « Ethnic Groups and Boundaries ».
Amsterdam: Het Spinhuis, pp. 11-32, 1994.
“A median level and mobilize groups for different purposes by diverse means.”
21
Le dernier niveau d'analyse est le niveau macro des politiques de l’État qui, par la
création de bureaucraties juridiques attribue des droits sur la base de critères formels. Les
activités de chaque régime visent à contrôler et à manipuler l'information publique et le
discours. Tous ces niveaux sont étroitement liés : le niveau micro forme la base du niveau
médian qui, à son tour, créé des contraintes et modèle l'expression et l'action du peuple au
niveau micro. Les organisations et les discours transnationaux et internationaux jouent un
rôle important en particulier en ce qui concerne l'articulation
des niveaux macro et
médian.
1.3.
Le Cadre Conceptuel et terminologique
Les termes employés
Cette partie ne cherche pas à questionner les définitions. En effet, plutôt que de
s’engager dans un débat quant à l’employabilité des différents termes, ce chapitre cherche
essentiellement à montrer la complexité de cas spécifiques d'immigrés d'origine
vietnamienne à Prague à l’intérieur du contexte macro-social. Néanmoins, les termes
constituant le cadre théorique seront présentés et leur emploi justifié, car leur définition ne
va pas de soi. Je vais introduire ces termes dans leur contexte d’application. Aussi, leur
signification sera traité d'un point de vue historique, constitué non seulement par des
chercheurs en sciences sociales, mais aussi par l'auto-identification des agents sociaux et la
société dominante. Pour ce faire, la partie conceptuelle sera complétée avec des exemples
spécifiques. Les termes développés dans la partie descriptive suivante seront utilisés
ensuite à l’intérieur du cadre théorique définit ci-dessous. Il s'agit des termes suivants : la
collectivité (le groupe et catégorie) ethnique, transnationalisme, la diaspora, la famille
d'immigrés, la théorie des réseaux et le capital social.
1.3.1. L’immigrant au pluriel : La collectivité (le groupe et la catégorie)
ethnique
L'émergence du groupe et de l'identité ethnique
Les Vietnamiens à Prague seront appelés immigrés. Il est important de noter que la
perception et les modes d'utilisation de la notion d'immigré diffèrent en fonction du
contexte académique et juridique et varie aussi d'un pays à l'autre. Ce phénomène peut être
22
expliqué par les différences entre les histoires nationales respectives relatives à
15
l'immigration. En France , après une siècle de classification juridique des migrants
seulement en fonction de leur nationalité, la notion d'« étrangers » est remplacée dans les
années 1990
par celle d'« immigrés » dans l'espace social, politique, économique et
culturel français ; la migration est dès lors considérée être un événement fondateur. Les
travaux de M. Tribalat s'inscrivent dans ce contexte, puisqu’il montre les biais qu'apporte
l’usage exclusif de la nationalité dans les classifications officielles. Il propose ainsi un
nouveau critère qui combine le lieu de naissance et la nationalité à la naissance (Tribalat,
1989, 1991 et 1994). En abandonnant le critère de la nationalité au profit de celui du lieu
de naissance, la catégorie de « l’immigré » fait désormais référence aux « origines » ou
« ascendances ».
16
A l'inverse, en République tchèque, le terme d’étranger est toujours
17
employé dans la législation ainsi que souvent dans la plupart des travaux scientifiques.
Les Vietnamiens à Prague constituent une minorité ethnique importante.
Les
Vietnamiens ont toujours été perçu comme un seul groupe homogène et représentent une
des premières opportunités de rencontre de la majorité tchèque avec l'autre. Les
problématiques relatives aux minorités étrangères en général et à la population
vietnamienne en particulier ont longtemps été au centre des études de l’institut
d’ethnologie, tandis qu'en Europe de l’Ouest et aux États-Unis, la question de
l’immigration commença à être traitée par des écologistes humains avec l’école de Chicago
18
dans les années 1920, ainsi que par des sociologues, géographes sociales et des historiens
dès les années 1960. En République Tchécoslovaque, plusieurs études furent menées avant
1989 par l'Institut pour ethnologique et du folklore à Prague à la suite d’une initiative
gouvernementale. Ce travail, pionnier dans le domaine des travailleurs migrants (les
saisonniers), fut réalisé dans les années 1986-7 et portait le nom suivant : Les
15 Depuis l’époque de la colonisation, la thématique d’immigration est devenue assez sensible en France.
16
17
18
Au cours de décennies, des nouvelles taxinomies étaient élaborées dans des travaux scientifiques. Ce
phénomène peut refléter un bouleversement dans des catégories du monde social ce qui, à son tour
reflète des changements dans des cadres de référence s’inscrivant dans le débat publique.
Patrick, Simon, Nationalité et origine dans la statistique française. Les catégories ambiguës. Population
(French Edition). 53e
Année, No. 3 (May - Jun., 1998). pp. 541-567. Institut National d'Études
Démographiques Accessible sur:
« http://www.jstor.org/stable/1534261 » .
Zákon č. 326/1999 Sb., O pobytu cizinců na území České Republiky - La loi traitant la résidence des
étrangers
sur
le
territoire
de
la
République
tchèque.
Accessible sur : http://www.mvcr.cz/soubor/aktualizovane-uplne-zneni-zakona-326-1999-o-pobytucizincu-k-1-5-2013-pdf.aspx
En France, l’immigration et son histoire a suscité l’intérêt des chercheurs surtout dans les années 1980,
avec les pionniers de cette
discipline, qui ont fondé le Musée d’immigratoion. Pour plus
d’informations,
voir les travaux de Gérard Noiriel, Patrick Weil et Nancy L. Green.
23
conséquences internes et internationales des processus ethniques : Les travailleurs
étrangers en République tchèque (Vnitřní a mezinárodní důsledky etnických procesů:
19
zahraniční pracující v ČSSR) . Afin d'analyser l’adaptation des immigrés et leur
cohabitation avec des autochtones tchécoslovaques, les ethnologues ont observé la vie
d'ouvriers vietnamiens, cubains, polonais au sein des usines et fabriques.
Il s'agit maintenant d'exposer dans les grandes lignes ce qu'est l'ethnicité. Les
débats qui évoluent autour de ce terme sont incapables de saisir l'essence même de
l'ethnicité. C’est à travers des études de cas seulement que des éléments de réponses
peuvent être apportés afin de comprendre pourquoi et comment l’ethnicité apparaît dans
des formes si diverses et variées. Par conséquent, ma recherche se doit de clarifier certaines
20
notions, notamment celui de groupe ethnique. Ainsi, dans ses travaux, Richard Jenkins
21
propose de nommer les collectivités humaines grâce aux deux processus mentionnés cidessous : la création de la catégorie telle que définie de l’extérieur, et du groupe en tant
que collectivité, définie par la nature des relations de ses membres. Ce modèle aide à
clarifier les relations de pouvoir et d’autorité à l’œuvre dans la vie quotidienne de la
collectivité ethnique et montre que le fait d'être catégoriser peut influencer l’identité du
groupe. Ainsi, l’objection que Rogers Brubaker, fait dans son livre paru en 2004 nommé
« Ethnicity without groups » est prise en compte. Dans cet ouvrage réputé, l’auteur propose
la substitution dans l’analyse de « common sense groupism », en tant que pratique de la
22
prise-en-soi de la notion de groupe social , par des catégories de pratique
23
(c'est-à-dire
des catégories utilisées dans la vie quotidienne par des agents sociaux). La connaissance de
ces catégories m'aidera à appréhender les connaissances « common sense » des membres
de la société catégorisante, ainsi que des membres du groupe eux-même.
19
20
21
22
23
Heroldová, Iva et Matějová, Vlasta, “Vietnamští pracující v českých zemích: východiska, metoda,
koncepce, cíl”, Český lid, 74 (4), 1987.
Barth, Frederick. 1994. « Enduring and Emerging Issues in the Analysis of Ethnicity », in Vermeulen,
Hans et Cora Govers (éd.), The Anthropology of Ethnicity. Beyond « Ethnic Groups and Boundaries ».
Amsterdam: Het Spinhuis, p. 11-32.
Richard Jenkins, « Rethinking Ethnicity : Arguments and Explorations », SAGE Publications Ltd,
1997, 200 p. Chapitre 5: Categorization and power, pp. 52-74
Non seulement ethnique, car chaque nombre des individus portants les traites sociales similaires,
catégorisés selon quelque critère comme genre, traites biologiques,etc. Il s’agit dans la plupart des cas
des
catégories stigmatisants
In original : Practical category
24
1.3.2. Transnationalisme – Translocalité
Les pratiques dites transnationales sont analysées dans cette partie. Depuis les
contacts diplomatiques entre le Vietnam et les pays soviétiques, la perspective d'étudier à
l'Ouest a été très attractive pour les familles vietnamiennes afin d'améliorer leur situation
économique et aussi, dans certains cas, afin de se promouvoir au sein du parti communiste.
Parfois toutes les économies de la famille élargie étaient mobilisées afin d'assurer la
mobilité du fils aîné. Les plus chanceux sélectionnés pour partir du Vietnam avaient une
dette envers leurs parents et leurs ancêtres, qu'il fallait repayer par des envois réguliers
d'argent ou même de marchandises tchécoslovaques (des vélos, des vélomoteurs, des
machines à coudre etc. étaient promis aux étudiants qui réussissaient). Les règles qui
régissaient les études et le travail à l'étranger ainsi que le comportement et les pratiques du
quotidien des apprentis et des stagiaires étaient déterminées par l'ambassade du Vietnam à
Prague. Les migrants, même s'ils faisaient preuve de bonne volonté, devaient faire face à
des principes impitoyables : par exemple, les étudiant ou apprentis qui avaient de mauvais
24
résultats étaient constamment sous la menace de de devoir retourner au Vietnam . Les
émigrés qui revenaient au Vietnam subissaient une certaine pression de la part de leur
communauté qui exigeait la preuve que leur séjour était réussi. Il s'agissait non seulement
de la réussite individuelle, mais surtout de la sécurisation de la réputation familiale.
En général, même si l’immigré ne retourne jamais dans son pays d’origine
physiquement, il existe toujours des contacts émotifs ( déracinement), économiques
(rémittences), ou sociaux (dans la société vietnamienne, la notion de dette est très
importante et suit la hiérarchie et le statut socio-économique familial).
25
Je m’appuie sur l’approche de Nadje Al-Ali, une doctorante enseignant
l’anthropologie sociale à l’Institut des études Arabes et Islamiques à l'Université d’Exeter,
et dont la recherche se focalise sur les questions des réfugiés, des migrants et du genre ;
ainsi que de Khalid Koser, enseignant de géographie humaine à University College
Londres. Leur approche s’inscrit dans la tradition épistémologique anti-essentialiste et
donc ne néglige pas l’hétérogénéité qui se trouve au sein de chaque groupe diasporique,
que ce soit des travailleurs transnationaux, des réfugiés etc. Dans la préface, les auteurs
stipulent la nécessité de « saisir la différence générant les bases sociales de la formation de
24
25
Brouček, Stanislav, Historie imigrace z Vietnamu do českých zemí. Studenti
http://www.klubhanoi.cz/view.php?cisloclanku=2005040901#1973 –met toujours la page
Le Huu Khoa, Les Vietnamiens en France, L’insertion et l’identité, L’Harmattan, 1985.
25
a
učni.
l'identité et de la pratique sociale et donc à aller au-delà d'une construction homogène des
«communautés transnationales» qui fait peu progresser le domaine au-delà des
conceptualisations traditionnelles des groupes de migrants en tant qu'ensembles ethnonationaux singuliers. ». Ainsi, avec la prise en compte des pratiques transnationales, la
migration n'est plus perçue en tant qu'anomalie mais en tant que représentation du monde
globalisé.
26
Les auteurs aussi font l'analyse du rôle de l'Etat dans la mise en forme,
l'encouragement ou la limitation des pratiques transnationales. (Al-Ali, Khoser, 2002: 3-4).
Ainsi, Stuart Hall, sociologue réputé qui compte parmi les figures centrales des études
culturelles
britanniques, explique que l’expérience de diaspora, parce qu'elle est
historiquement fondée, n’est pas définie par une quelconque essence, mais plutôt par la
recognition d'une hétérogénéité et d'une diversité inévitable, ce que reflète le concept d’«
identité » hybride. Selon Hall, l’identité culturelle se positionne toujours en fonction d'un
contexte. (Braziel and Mannur, 2003: 244). Par ailleurs, force est de constater qu’il existe
beaucoup de niveau à la transnationalité . Cela est reflété dans l'espace social : l'espace
domestique (les pratiques des femmes comme le ménage), l'espace public (l’arène des
hommes– comme le travail), l'espace discursif (l'arène mondiale des droits de l'homme),
les espaces transactionnels (les recruteurs, l’espace culturel et religieux, les courtiers), les
espaces institutionnels (ONG), et l'espace médiatique mondial. (Al-Ali, Khoser, 2002: 3)
La notion de transnationalisme traverse la recherche sur les trois niveaux d'analyse
(micro, intermédiaire et macro) et sur deux échelles temporelles. Au niveau macroanalytique, je vais examiner les contacts institutionnels : les contacts diplomatiques entre
Etats qui conduisent à l'application de lois et à la fondation d'institutions locales qui
influençent les phénomènes migratoires. Au niveau intermédiaire je vais analyser
l’existence et les buts des organisations (but lucratif ou publique, non/gouvernemental)
représentant la communauté et leurs droits ou intérêts ; et questionner si et comment ces
organisations contribuent à la maintenance ou à la création de réseaux transnationaux.
Enfin,, le niveau micro-analytique permettra de comprendre les activités transnationales
individuelles, ou familiales.En ce qui concerne la dimension historique, il s’agit
d'importantes formes de mouvements transnationaux à travers l'espace et le temps, telles
que les circuits de migration de main-d'œuvre entre le Vietnam et d'autres pays socialistes
26
Appadurai, Arjun, Modernity at large: Cultural dimensions of globalisation, Public Worlds, Volume 1,
2005. Chapitre 2 Disjuncture and Difference in the Global Cultural Economy, pp. 27- 47.
26
pendant la guerre froide. Malgré le fait que les mouvements migratoires soient médiatisés
et contrôlés par les institutions d’Etat, ceux constituaient en réalité des mouvements
27
circulatoiresdans la mesure où le taux de migration de retour (return migration) n'était
pas négligeable, affectant la société au niveau communautaire et individuel (le parallèle
peut être fait ici avec ce qui a été déjà dit ci-dessus en ce qui concerne les responsabilités et
dettes des vietnamiens émigrés envers leurs proches : l’individu fait toujours partie
intégrante d’une unité familiale, que ce soit au Vietnam ou dans les pays d’accueil). Selon
le sociologue tchèque Kocourek, la migration de retour peut provoquer ce qu'il appelle « le
mythe de l'Occident » – des images déformées de la vie à l'Ouest, façonnées par l'argent
reçu d'un proche vivant à l'étranger, par le retour de Vietnamiens d’outre mer ou bien Việt
Kieu (y compris ceux qui ne restent pas au Vietnam), ainsi que par les touristes
occidentaux toujours plus nombreux à aller au Vietnam et qui vivent de façon très
ostentatoire (Kocourek, 2008b: 238). En outre, comme le montre Kusnirakova, le nombre
croissant des rapatriés représente une source d'informations positives sur la vie au-delà des
frontières nationales, souvent parce que les vietnamiens n'aiment pas parler des choses
négatives et n'aiment pas admettre l'échec. La sélection de l'information encouragent des
conceptions erronées de la vie à l'étranger (principalement en Corée, à Singapour et aux
États-Unis), ce qui est renforcé par les programmes de télévision qui sont omniprésents au
Vietnam, même dans les régions reculées. (Kusnirakova, 2013: 48). Stanislav Broucek,
ethnologue de l’Académie des sciences qui a participé à l'une des premières études de la
communauté vietnamienne en République tchèque après la chute du régime communiste,
concentre son regard notamment sur les attitudes des citoyens tchèques envers la
population vietnamienne. Il note que «la situation des ouvrièrs vietnamiens face à l'exTchécoslovaquie fait partie d'une conscience continuelle de ce groupe d'immigrants. »
(Broucek, 2003: 19).
Selon Alena Alamgir, les rapatriés vietnamiens sentent une forte appartenance à la
Tchécoslovaquie. « Non seulement ces rapatriés préfèrent associer avec les compatriotes
qui ont subi la même expérience, les liens que leur "deuxième maison" restent très fortes
aussi bien et continuent toute évidence, il construire sur les réseaux développés au cours de
27
Machteld Kuyper, « Return Migration to Vietnam : Monitoring the Embeddedness of Returnees »,
University of Amsterdam, the Netherlands, Nijmegen, January 2008.
27
28
l'ère d’ Etat socialiste ». (Alamgir, 2014: 7).
Dans son étude menée au Vietnam entre juillet 2010 et fevrier 2011 (pour sa thèse
doctorale en géographie sociale), Tereza Kušniráková, cherchait à découvrir quel était
l'impact des migrations de vietnamiens précédent novembre 1989 sur leur propre vie. Elle
cherchait aussi à étudier la relation de ces migrants à la Tchécoslovaquie et à la République
tchèque et au peuple tchécoslovaque. Enfin, elle souhaitait comprendre comment cette
expérience a affecté les migrations des proches de ces migrants, que ce soit leurs
descendants, leurs parents ou leurs connaissances.
Une forte migration de retour a contribué à la formation de réseaux sociaux qui, comme je
vais démontrer dans la partie portant sur le capital sociale, représentent un facteur « push »
très important dans la migration circulaire entre le Vietnam et la République Tchèque.
Cette étude cherche donc à découvrir comment, dans le contexte normatif des relations
inter-étatiques pendant la période communiste, les réseaux se sont formés et comment ils
ont influencé l’adaptation des vietnamiens en République tchèque.
1.3.3. Diaspora
A partir des critères tirés de la littérature portant sur les diasporas et notamment
d'études de cas, est-t-il possible de considérer la population vietnamienne en République
tchèque en tant que diaspora dont l’existence (spatialement contiguë et temporairement
continue) (Ma Mung, 2012) est intériorisée par ses membres?
Les politiques relatives au transnationalisme sont variées et diverses, tandis que la
notion de diaspora tente de réunifier des identités particulières et présuppose un niveau
d’homogénéité qui ne montre pas suffisamment la diversité et le pluralisme des
communautés diasporiques. Par ailleurs, la littérature traite de la diaspora en tant que
«groupe ethnique transnational». Le terme sous-entend donc aussi un certain niveau de
transnationalisme dans la mesure où le groupe est étendu
au travers des frontières
nationales (ce qui peut aussi signifier l’absence d’intégration). La littérature traitant des
politiques relatives aux diasporas
29
vise surtout à comprendre la participation politique
transnationale et les identifications politiques, tandis que la littérature traitant des
communautés transnationales traite aussi des réseaux sociaux et culturels, ce qui constitue
28
29
«Not only do these returnees prefer to associate with the compatriots who underwent the same
experience, the ties to their “second home” remain very strong as well and clearly continue to build on
the networks developed during the state-socialist era »
Milton J. Esman, « Diasporas in Contemporary World », Polity Press, Cambridge, 2009.
28
l’intérêt principal de cette recherche. Fiona B. Adamson définit les diasporas comme étant
des « structures sociales réelles, et non des communautés imaginées, produites par le
mouvement des hommes et des femmes à travers les frontières internationales et par leur
regroupement dans des enclaves résidentielles séparées, composées par des personnes de
provenance ethnique similaire dans un but de protection mutuelle, d'assistance et de
30, 31
fraternité. »
Les diasporas fonctionnent dans un ensemble trilatérale de relations qui impliquent
1) le pays d'origine, la patrie, son gouvernement, les sources d'information (les médias), la
famille élargie et les amis ; 2) le pays d'accueil, le gouvernement et les institutions
économiques, politiques, éducatives et d'information qui affectent la survie, le bien-être, et
l'adaptation de la diaspora à son nouvel environnement, souvent relativement hostile ; 3) la
diaspora elle-même et ses nombreux liens avec le pays d'origine, le pays d'accueil, et les
segments de la diaspora présents dans d'autres pays et dans d'autres villes du pays
d'accueil ». (Esman, 2009: 9).
Alors que la diaspora est largement étudiée dans le contexte de la globalisation, je
tente de retracer les fondements de ce phénomène dans le contexte des contacts entre états
socialistes. En particulier, les réseaux sociaux, leur création et leur fonction au sein de la
diaspora vietnamienne seront développés dans le cadre de cette recherche. Selon Milton J.
Esman, un des plus grands spécialistes dans le domaine des conflits ethniques, la diaspora
est constituée de la génération immigrante originelle et de sa progéniture. La survie de
diaspora dépendend de cette descendance. Les jeunes vietnamiens dont les parents ont
émigré du Vietnam entre les années soixante-dix et quatre-vingts représentent la génération
d’espoir dans laquelle les parents avaient bien investi que ce soit au niveau des finances ou
de l’éducation. Selon Le Huu Khoa, chercheur en sociologie des phénomènes d'exil
vietnamien, dans le confucianisme, l’éducation des valeurs les plus importantes. Aussi, à
travers le culte des ancêtres, les parents tentent de motiver leurs enfants à persévérer pour
dans leur vie familiale, spirituelle et économique. (Le Huu Khoa, 1985). Les parents
vietnamiens font des efforts pour permettre à leurs enfants d'accéder à l’intégration
30 Fiona B. Adamson, “Constructing the Diaspora: Diaspora Identity Politics and Transnational Social
31
Movements”; Paper prepared for the 49th Annual Meeting of the International Studies Association, San
Francisco, CA, March 26-29 2008
“… real social structures, not imagined communities, produced by the movement of men and women
across international borders and the clustering together in separate residential enclaves of persons of
similar ethnic provenance for mutual protection, assistance, and fellowship.” (Esman, 2009 : 9)
29
32
instrumentale dans la société tchèque, tout en planifiant leur cursus d'études supérieures.
De façon assez pragmatique, l’apprentissage de la langue du pays d’accueil est surtout un
moyen de s'intégrer et réussir à l’école. Pour la première génération de vietnamiens qui ne
maîtrisent pas la langue tchèque, il leur est possible de l'apprendre grâce à des nourrices
tchèques, souvent des femmes ou des couples tchèques retraités, qui gardent des enfants
vietnamiens en échange d’une rémunération financière.
33
Ces échanges entre les parents vietnamiens et les pensionnaires tchèques sont plus
en plus fréquents et peuvent être vues comme une intégration sociale réussite au niveau
local (le quartier), ou bien simplement comme le résultat de l'attitude pragmatique des
vietnamiens par rapport à l’éducation.
1.3.4. Théorie des réseaux (Network Theory)
Malgré sa popularité actuelle, le sujet des réseaux sociaux n'est pas nouveau pour
les chercheurs qui s'intéressent aux migrations internationales. Dans les années 1960 et
1970, ceux-ci ont étudié le processus de migration de chaîne et le rôle joué par les parents
et les amis qui fournissent des informations et facilitent ainsi la migration. (Pour plus
d’information, voir Anderson, 1974; Mac- Donald and MacDonald, 1964; Ritchey, 1976;
Hugo, 1981:195-205). Toutefois, selon Monica Boyd, les tendances actuelles de migration
et les nouvelles conceptualisations de la migration s'intéressent dorénavant davantage au
rôle de la famille, des amis et des réseaux communautaire.
34
(Boyd, 1989: 639). Roger
Waldinger est professeur de sociologie et travaille dans la domaine des migrations
internationales. Dans son article traitant des réseaux d’immigrants présents sur le marché
du travail, il démontre l’attractivité de la théorie des réseaux, car celle-ci éclaire
l'intégration de décisions a priori individuelles dans des structures sociales, ce qui à la fois
dépasse les théories individualistes de la migration et fournit un lien entre les niveaux
macro et micro d'analyse. De façon générale, les effets que les réseaux ont sur l'intégration
du groupe minoritaire sont ambigus, comme le montre Elizabeth Grieco, sociologue et
démographe : «les réseaux de migrants renforcent les liens que les migrants ont avec leur
société d’origine, tout en limitant efficacement les contacts avec la communauté plus large
32
33
34
Selon Le Huu Khoa, il s’agit de l’intégration dans le système scolaire et professionnel/économique dans
la société d’accueil
Adela Souralova "She Gave us Family Life": Vietnamese Immigrant Families and their Czech Nannies
Redefining Relatedness, Urban People, 15, 2, 2013.
However, current migration patterns and new conceptualizations of migration underlie more recent
interest
in the role of family, friendship and community based networks.
30
de destination ... Cela maximise simultanément le nombre et la force des liens avec des
membres de la société de l'origine, tout en minimisant le nombre et le besoin de liens avec
35
les membres de la société d'accueil »
(Grieco, dans Cassarino, 2004: 247). Or, étant
donné les réseaux présents sur le marché du travail et le fonctionnement des ressources qui
circulent , Waldinger montre le point faible de la théorie de réseaux.
Tout d’abord, la théorie des réseaux est une théorie de l'offre de l'immigration qui
souligne une «logique universelle qui s'installe quand le réseau est étendu et élaboré ».
Cela est consistent avec ce que Massey et ses collaborateurs (1994) affirment : « tout ce
qui est nécessaire pour qu'un réseau de migrants se développe, c'est que la personne soit au
bon endroit au bon moment (italique ajouté) et ainsi obtienne une position qui lui permette
de distribuer des emplois et des faveurs à d'autres personnes de sa communauté » (Massey,
et al. 1994, 1501 dans Waldinger, 1997: 3). En effet, une fois mis en place, les réseaux
s’auto-reproduisent car chaque membre recrute des amis ou des proches de son propre
groupe, et les entrepreneurs migrants savent saisir les opportunités que leurs associés dans
la communauté ont déjà identifié. Les réseaux mettent en contact des travailleurs
experiencés avec les nouveaux arrivants, permettant une transmission rapide des
informations quant aux opportunités d'embauche et de création d'entreprise. Finalement,
l'étude sur le flux incessant des migrations transnationales de Massey et al., qui repose sur
une analyse de dix-neuf communautés mexicaines, ne réussit pas à décrire les conditions
grâce auxquelles un leader dans le groupe ethnique se forme ou bien comment cette
personne se trouve être « au bon endroit au bon moment ». (Waldinger, 1997).
En m’appuyant sur la critique présentée par Waldinger, mon étude tente de préciser
quelles sont ces conditions qui permettaient l’ascension sociale des immigrés pionniers et
la structuration interne de la diaspora vietnamienne en République tchèque avec une propre
hiérarchie sociale. Il ne s'agit pas ici d’identifier des modèles de l’immigration
vietnamienne en République socialiste tchécoslovaque et République tchèque.
36
Tout
d'’abord, cette étude cherche à décrire les conditions externes qui ont conduit à la
35
36
“Migrant networks strengthen the links migrants have to their sending society while effectively limiting
contacts with the broader destination community … This simultaneously maximises the number and
strength of ties with members of the origin society while minimising the number and need for ties with
members of the receiving society.”
Pour plus d’information sur les tendencies migratoires des Vietnamiens dans le context géo-politique et
économique du Vietnam et les facteurs stimulant la migration internationale vietnamienne voir la
monographie de Tereza Freidingerová, Vietnamci v Čestku a ve světě : migrační a adaptační tendence ,
Sociologické nakladatelství (Slon), 2014, p. 230.
31
formation des réseaux ethniques, notamment dans le cadre de l’internationale socialiste, en
se focalisant sur le pays d’accueil. Ensuite, je tente d’identifier et d'analyser les facteurs
internes qui ont permis la création de ces réseaux et la fondation de la diaspora
vietnamienne au sein de la République Socialiste Tchécoslovaque. Les sujet d’analyse sont
donc les pères fondateurs de la diaspora vietnamienne et leur progéniture. C’est l’existence
de la communauté initiale/pionnière maîtrisant l’environnement social et économique
tchèque qui a ensuite permis la migration circulaire et la perpétuation de l’immigration
provenant du Vietnam. Selon Massey et al.,
« Les connexions à l’intérieur du réseau de relations constituent une forme de
capital social dans lequel les gens peuvent puiser pour accéder à l'emploi en dépit du fait
qu'ils sont étrangers. Une fois que le nombre de migrants atteint un seuil critique,
l'expansion des réseaux réduit les coûts et les risques dus aux mouvement, ce qui augmente
la probabilité de migration et entraîne un mouvement supplémentaire qui étend davantage
les réseaux, et ainsi de suite. Au fil du temps le comportement migratoire se propage vers
37
l'extérieur pour englober des segments plus larges de la société d'origine.» (Massey et al.,
1993: 448).
Le capital social compris dans les réseaux sociaux et familiaux est donc le dernier concept
clef de cette étude.
1.3.5. Le capital social
Au cours des quatre dernières décennies, les chercheurs en études migratoires
essayé de trouver une théorie qui pourrait expliquer le phénomène de la migration
circulaire ou la persistance des courants migratoires. La théorie des réseaux sociaux est
désormais une théorie qui permet d'articuler les théories macro et micro-économiques, et
ce grâce à la juxtaposition d'une part du concept de l’action rationnelle de l'individu
mobilisé par les économistes, et d'autre part, de l'idée de super-imposition de l’organisation
sociale et institutionnelle présenté par des sociologues. Selon Roger Waldinger, « les
réseaux fournissent les mécanismes qui servent à connecter progressivement un premier
groupe, très sélectif, d'immigrés avec une base de plus en plus large d'adeptes dans le pays
37
“Network connections constitute a form of social capital that people can draw upon to gain access to
foreign employment. Once the number of migrants reaches a critical threshold, DOUGLAS S.
MASSEY ET AL. 449 the expansion of networks reduces the costs and risks of movement, which
causes the probability of migration to rise, which causes additional movement, which further expands
the networks, and so on. Over time migratory behavior spreads outward to encompass broader segments
of the sending society.”
32
38
d’origine ». Pierre Bourdieu fut le premier à utiliser le concept de capital social. Dans son
analyse des trois états du capital culturel, Bourdieu présente l'habitus des pratiques
culturelles apprises à force d'exposition à des rôles modèles au sein de la famille et d'autres
environnements, comme une partie intégrante du capital humain, (Bourdieu, 1979). Le
capital social selon Pierre Bourdieu est défini comme « l'ensemble des ressources soit
réelles soit potentielles qui sont liées à la possession d'un réseau durable de relations plus
ou moins institutionnalisées de connaissance mutuelle ou de reconnaissance ».
39
Une trentaine d’années plus tard, Alejandro Portes explique que « le capital social
correspond à l’habilité des acteurs de s'assurer des avantages par l’appartenance à des
réseaux sociaux ou d'autres structures sociales ».
40
Pour éviter les tautologies, il est
désormais important de distinguer les sources acquises à travers des réseaux sociaux et le
capital social en soi. Étant donné que l’éducation est une des valeurs les plus importantes
chez les vietnamiens et qu'elle est perçue comme étant un outil pour l’ascension sociale, les
enfants sont motivés pour réussir à l’école. Dans ce cas là, il s’agit d'un capital culturel
universel, mais le niveau de l’éducation et le prestige de l’école varie selon les ressources
de chaque famille et selon l’insertion économique des parents. Par exemple, les enfants des
parents qui ont acquis une stabilité économique sont motivés pour étudier dans des écoles
privées ou bien à l’étranger, en particulier en économie appliquée, contrairement aux
enfants des familles modestes, qui poursuivent leur éducation dans des écoles publiques.
41
Comme je l'ai démontré au sein de mon mémoire de licence , le conflit intergénérationnel
peut être nourri par différentes visions quant à la spécialisation idéale pour l'enfant.
Comme le décrit le sociologue De Haas dans son quête sur la théorie des dynamismes
internes aux processus de migration, on ne sait pas encore dans quelles conditions les
premières démarches des migrants pionniers provoquent (ou ne provoquent pas)
l'expansion des réseaux de migration et la formation des systèmes de migration. (De Hass,
2010)
38
39
40
41
“Networks provide the mechanisms for connecting an initial, highly selective group of seedbed
immigrants with a gradually growing base of followers back home” (Waldinger, 1997: 2)
“the aggregate of the actual or potential resources which are linked to possession of a durable network
of more or less institutionalized relationships of mutual acquaintance or recognition” (Bourdieu 1985, p.
248; 1980)
“Social capital stands for the ability of actors to secure benefits by virtue of membership in social
networks or other social structures.” (Portes, 1998: 6)
L’influence des parents sur l’intégration des enfants vietnamiens dans la société tchèque, mémoire de
Licence en Anthropologie sociale sous la direction de Josef Kandert, Université Charles de Prague,
2011-2012.
33
L’étude de cas présentée ici a
notamment pour but d’analyser les conditions
d'existence des réseaux sociaux des migrants présenté et de montrer comment les réseaux
vietnamiens se sont formés au sein de l’immigration guidée. Dans cette étude, je voudrais
attirer l'attention sur le fait que les spécialistes des migrations doivent aller au-delà de la
conceptualisation restreinte des réseaux sociaux basée sur la communauté ou les relations
de parenté, car au cours des trajectoires des migrants vietnamiens, il est possible d'observer
des agents sociaux qui se sentent peu solidaires avec la communauté mais sont malgré tout
centraux à son fonctionnement. Il s’agit par exemple des agents de médiation qui ne
cherchent que le profit (ils seront présentés plus loin dans ce travail).
Coleman examine trois formes du capital social : 1) les normes sociales appliquées
par le groupe, 2) les canaux d’information et 3) les attentes et les obligations.
Premièrement, les normes et les sanctions du groupe sont un moteur social important chez
les vietnamiens, étant donné qu’ils déterminent qui va pouvoir émigrer ou pas. Selon la
hiérarchie interne à la famille, le fils aîné est obligé de prendre soin de ses parents âgés et
de s'occuper du culte des ancêtres, tandis que celui qui considéré être le plus ambitieux et
ayant le plus de facilités intellectuelles est soutenu financièrement pour pouvoir émigrer
afin d’améliorer sa condition de vie et celle de sa famille. Chez les vietnamiens,
l’éducation est la base du capital culturel et la valeur la plus transmise entre les
générations. Deuxièment, l'article de Roger Waldinger propose une reconceptualisation du
rôle des réseaux sociaux immigrés sur le le marché du travail, argumentant que
l’information diffusée au sein des réseaux devient souvent très limitée. En effet, les réseaux
fonctionnent en tant que «champs d’informations personnels » qui se canalisent et
contraignent les options disponibles pour les immigrés sur le marché et créent une niche
économique. (Waldinger, 1997: 4)
Finalement, les attentes et les obligations des immigrés sont un élément important
notamment au niveau du clan familial. en ce qui concerne l’insertion des enfants de
vietnamiens sur le marché du travail en République tchèque, il est possible de constater
une rupture entre le capital culturel acquis pendant l’éducation et sa mise en valeur plus
tard. Comme le montrent mes entretiens, les parents attendent que leurs enfants une fois
diplômés réussissent sur le marché du travail. Si ce n’est pas le cas, l’enfant est supposé
travailler au sein de l’entreprise fondée par ses parents. Mon informant, M. Pham, m’a fait
parte d'une métaphore à ce sujet : « les parents attendent de leurs enfants qu’ils prenne le
train en marche : il faut que celui-ci maintienne sa vitesse ou qu’il en prenne davantage. Il
34
ne faut pas ralentir le train ».
42
Ainsi, à travers le capital social, les acteurs peuvent accéder directement aux
ressources économiques (des prêts bonifiés, des conseils d'investissement, des marchés
protégés); ils peuvent augmenter leur capital culturel à travers des contacts avec des
experts ou des individus de référence (appelés par Pierre Bourdieu capital incorporé); ils
peuvent aussi s'affilier avec les institutions qui leur confèrent certains pouvoirs (c’est-àdire le capital culturel institutionnalisé). (Portes, 1998: 4).
Le capital social était perçu par la plupart des chercheurs pionniers comme un outil
qui facilite la réussite, comme le montrent par exemple les études sur l’éducation de Pierre
Bourdieu ou de James Coleman
43.
Cependant, vu sous l'angle du travail et du marché,
certains sociologues comme Roger Waldinger se sont interrogés sur les effets négatifs de
l’insertion des individus dans les réseaux ethniques.
Une des questions que je me suis posée au cours de cette recherche et qui a peut
être été répondue grâce au concept du capital social et à la théorie des réseaux sociaux est
la suivante : est-ce que l’existence de réseaux sociaux conduit à une isolation accrue de la
deuxième génération des immigrés vietnamiens ou bien facilite-t-elle leur intégration dans
la société tchèque ? En ce qui concerne les vietnamiens, il est indispensable d'identifier qui
sont les fournisseurs du capital social, qui sont ceux qui peuvent en profiter et qui
effectivement en profitent, et finalement, qui assure la médiation entre la création du
capital social et son acquisition. En faisant la distinction entre ces trois types de personnes,
il est possible de comprendre davantage la complexité des relations sociales vietnamiennes.
Pourtant, à mon sens, les chercheurs tchèques ne mettent pas suffisamment l'accent sur
cette distinction Celle-ci n'est pas donnée et je souhaite mettre l’accent sur l'agency des
acteurs sociaux, sur leur possibilité de choisir d’accepter ce capital social en fonction de
leurs obligations, de leurs contraintes et des hybridations de leur tradition.
42
43
“Rodiče očekávají, že na ten vlak naskočí a měl by ho udržet a zrychlovat. Rozhodně by ho neměl
zpomalovat”. L’entretien , le 10 mars 2015.
Il est intriguant que malgré son application du concept du capital social au sein d’étude de la réussite
scolaire, James Coleman ne cite pas le pionnieur Pierre Bourdieu et son concept du capital culturel, qui
était aussi mobilisé en tant qu’un outil explicatif des différents résultats des enfants provenant des
différentes classes sociales.
35
1.3.6. La famille d’immigrés
La famille d'immigrés représente un agent principal de ma recherche. Les immigrés
vietnamiens résident à Prague ne sont pas regardé en tant qu'individuels, mais je focalise
sur l'unité familial en totalité avec une prise en compte des réseaux familiaux de la famille
44
élargie au delà des frontières d'état nation. Je suis d’accord avec Jacob Mincer , qui
accentue la famille en tant qu’un moteur décisif dans le processus d’immigration.
L’immigration ne doit pas être une décision strictement individuelle, autant plus au
Vietnam, où l’esprit communautaire et les devoirs envers les parents signifient les valeurs
les plus importants. (Le Huu Khoa : 1985). Selon la doctorante spécialisée dans la
domaine de géo-migration Tereza Kusnirakova, « En particulier, la position des migrants
potentiels dans la famille et d'autres membres de la famille semble être l'un des principaux
facteurs externes qui influent sur les décisions de migration des travailleurs migrants
vietnamiens.
45
(Kusnirakova, 2013(b) : 32) La famille est une unité centrale pour
l’immigré même, quant aux sources économiques, sociales voir émotives. La famille
représente aussi la première fondation du capital sociale de la personne, qui, d'en doté, va
profiter au cours de processus migratoire.
Il est important de considérer la notion de la famille en termes culturels, car
elle se diffère au Vietnam et à la République tchèque. La société Vietnamienne, fortement
collectiviste, contrairement à la société tchèque individualiste, est basée sur la présence de
la famille. Au sein de son étude parmi les interlocuteurs, Broucek arrive à l'observation d'
« une déclaration de conscience que leur immigration vers la République tchèque n'est pas
un acte de l'individualisme, c'est à dire de la priorisation des propres intérêts de l'individu
qui migre, mais plutôt une responsabilité d'une collectivité familiale.» (Broucek, 2003: 24).
Dans son étude des structures familiales au Vietnam, Danièle Bélanger, sociologue et
démographe canadienne avec un intérêt particulier en Asie analyse la composition des
46
ménages en tant qu'un outil pour la connaissance de la société vietnamienne. Ainsi, elle
présente une analyse sémantique : « En langue vietnamienne, le mot famille (dia ginh),
désigne d'abord le groupe familial formé par les parents et leurs enfants célibataires. Ainsi,
44
45
46
Jakob Mincer. 1978. „Family Migration Decisions.“ Journal of Political Economy 86 (5): 749-773
“Především pozice potenciálních migrantů v rodině a k ostatním členům rodiny se zdá být jedním ze
zásadních vnějších faktorů podmiňujících migrační rozhodování vietnamského migrant”
Danièle Bélanger, « Modes de cohabitation et liens intergénérationnels au Vietnam », Cahiers
Québécois de la Géographie, Volume 26, numéro 2, automne 1997, p. 215-245.
36
les relations d'alliance et de filiation directe sont à la base de la représentation de la
famille. » (Bélanger, 1997: 220). La famille vietnamienne est traditionnellement fondée sur
l'ordre du Confucianisme, néanmoins, au cours d'histoire, la réalité était
bien plus
complexe, et variait des principes confucéennes respectés en Chine. « La famille
confucéenne se caractérise par une hiérarchie austère entre les sexes et les générations :
elle est patrilinéaire, patriarcale et patrilocale. » (Bélanger, 1997: 217).
Néanmoins,
le
contexte historique et géographique au Vietnam a modifié et adapté les règles provenant de
la Chine. S’appuyant sur les sources littéraires, j'arrive à constituer que le culte des
ancêtres joue un rôle plus important sur les pratiques familiales que Confucianisme dans le
Vietnam postcolonial moderne. Pourtant, les règles de patrilocalité, patriarchat sont
discutables au contexte d'histoire complexe de Vietnam. Dans certains cas, la fille rentre à
la maison de ses parents, principalement afin de prendre soin d'eux ou de culte des
ancêtres. Deuxièmement, la période longue de la guerre au Vietnam a influencé les
structures démographiques et négocié le statut de chef de ménage. Les femmes
vietnamiennes sont devenues très autonomes et capable de prendre soin non seulement
d'intérieur de ménage (suivant la division de rôles de genre traditionnelle), mais aussi à
l'extérieur, en faisant de la commerce et de s'occuper de budget de la famille. (Bélanger,
1997). En outre, pendant les réformes économiques et agricultures de Doi Moi dans les
années 1980, l'idéologie socialiste tentait de reformer aussi les structures hiérarchiques de
sexe et d'instaurer la société égalitaire. Néanmoins, la notion de la piété filiale et de grand
respect envers les parents, ancêtres, authorités et les personnes âgés
est toujours
omniprésente au sein de la famille vietnamienne. (Khoa : 1985)
Sociologue Eleonor Koffman
47
propose dans son étude une typologie des familles
d'immigrants, divisé en trois catégories. Dans le premier cas il s'agit des familles
nouvellement crées, où les motifs d'immigration sont dans la plupart des cas le mariage. Ce
type peut être distingué aux deux sous-types : soit il s'agit de la deuxième ou troisième
génération des immigrés qui emmènent leur fiancé/e de l’étranger, soit de résident de la
population majeure, qui a emmené une fiancé de pays où il/elle a séjourné. Le deuxième
cas est la famille immigrée quand toute la famille nucléaire surpasse le processus de la
migration et s'installe dans le pays d'accueil. La troisième catégorie, celle qui représente la
plupart des familles incluses dans cette étude est la famille regroupée. Il s'agit des familles
47 Eleonore Kofman. 2004. “Family-Related Migration: A Critical Review of European Studies.” Journal
of Ethnic and Migration
studies 30 (2): 243-262.
37
crées à partir d'un migrant primaire, qui fait venir le reste de la famille. Quant aux
processus légaux, les études migratoires incluent dans cette catégorie surtout les réfugiés et
leurs membres familiaux, tandis que les familles des migrants travailleurs restent
négligées. Pourtant, c'est effectivement cette catégorie là dont je vais analyser dans cette
recherche. Ainsi, les sous-questions de recherche tentent de trouver une réponse en
découvrant quelles étaient les conditions pour créer une famille, encadrées par le
programme d’internationalisme socialiste? Quelles stratégies les Vietnamiens sont ils
adoptés pour la formation du couple? Quelle est la raison d’un nombre très limité des
couples inter-ethniques au sein de la République tchèque?
38
CHAPITRE II – LE PANORAMA HISTORIQUE ARTICULÉ AVEC LES
ENTRETIENS
L’histoire des contacts tchéco-vietnamiens
La construction des relations mutuelles entre les deux pays a commencé le 2 février
1950 lorsque la Tchécoslovaquie a reconnu la souveraineté du Vietnam et les deux pays ont
établie les relations diplomatiques. (Kušniráková, 2012). En raison des dynamiques géopolitiques importantes comme était renforcement du pouvoir communiste en Europe
centrale, la victoire du Vietnam à Dien Bien Phu en 1954, la dissolution du Vietnam au
Nord et au Sud
et en raison de l'offensive des États-Unis, la République socialiste
tchécoslovaque a gagné un nouveau partenaire exotique suivant les relations diplomatiques
établies avec les autres pays comme étaient la Chine, L'Union des républiques soviétiques
socialistes et la Mongolie.
Le début de la migration de la République démocratique du Vietnam vers la
République socialiste tchécoslovaque est marqué par l'arrivée des individuels et du cent
enfants qui sont accueilli dans un orphelinat au nord de la République à côté de la ville du
Liberec. Ce début est symbolique dans le sens qui a pris la politique de l'accueil des
émigrés vietnamiens. L'idée principale derrière cette aide paternaliste envers le pays en
guerre était de côté de la République socialiste tchécoslovaque notamment la propagande
du marxisme-léninisme contre «l’agression impérialiste» américaine. (Alamgir, 2014).
Jusqu'à la fin des années 1970 la migration vietnamienne guidée était mise en place avec
un accent sur l'éducation et l'acquisition de connaissances, l'expérience et les compétences.
La plupart des migrants étaient des étudiants, des apprentis et stagiaires vietnamiens et la
migration a été perçu comme un soutien social au pays pauvre. En 1967, le groupe
composé par des apprentis, stagiaires et étudiants en cours de ses séjours était complété par
à peu prés 2100 travailleurs ouvriers. La nouvelle convention était signée en 1974 en
remettant l'arrivée des neuf lots des Vietnamiens venant pour le programme
d'apprentissage. En 1979 et 1980 la signature des deux autres conventions a amené encore
des nouveaux stagiaires et des apprentis avec les contrats d'une durée limitée permettant
l'emploi/le pratique de fabrication au sein des usines suivant l'apprentissage (Brouček,
2004).
Lors de la migration des années 80 a été présenté comme soi-disant une “win-win39
win” migration, c'est-à-dire qu'elle était bénéficiaire théoriquement pour tous les trois
partis – le Vietnam, la Tchécoslovaquie et les migrants. (Kušniráková, 2012). Leur nombre
a été le plus élevé entre l'année 1980 et 1983, tel que marquées par le séjours du 30 000
personnes d'origine vietnamienne en République socialiste tchécoslovaque. Ce nombre a
progressivement diminué d'un tiers jusqu'à l'expiration des conventions internationales en
1990. (Brouček, 2004: 8). L'expiration et résiliation des conventions présentent une rupture
pour les Vietnamiens, qui n'avait pas encore fini leur contrats et qui ont réussi de rester sur
le territoire de la République socialiste tchécoslovaque malgré la pression du
gouvernement tchécoslovaque visée leur départ. Les réformes économiques de l'ouverture
de marché Doi Moi au Vietnam précédentes ensemble
avec le processus de la
transformation économique et politique en République socialiste tchécoslovaques sont
donc un stimulus importante pour la nouvelle immigration spontanée et la ré-immigration
des retournés. (Kušniráková, 2012: 46)
La présente chapitre serve en tant qu'un panorama historique pour la mise en contexte de
l'arrivée des Vietnamiens, et est donc une ouverture pour la dernière chapitre analytique.
La période traitée est découpée en trois parties suivant les phases importantes du
programme d'internationale socialiste avec la dernière qui met l'accent sur l'année 1989 en
se terminant en 1993, l'année de la séparation de la République fédérale tchécoslovaque en
deux Républiques autonomes.
2.1.
Le programme des travailleurs apprentis 1974-1979
L'année 1973 est marquée par une divergence dans les relations diplomatiques et
dans le programme de la main-d'œuvre vietnamienne sur le territoire tchécoslovaque dans
le sens où le côté vietnamien a intensifié la pression sur le gouvernement tchécoslovaque
afin de leur faire accueillir plus grand nombre des apprentis et des stagiaires qu'avant. Du
18 au 26 Juin 1973 à Prague les négociations étaient menées entre la délégation du
gouvernement de la République démocratique du Vietnam et le ministère fédéral du
Travail et des Affaires sociales de la République socialiste tchécoslovaque sur les
40
possibilités et les formes de la formation des travailleurs – des citoyens vietnamiens48. La
délégation vietnamienne a expliqué ses idées actuelles et futures sur la préparation de
travailleurs qualifiés pour la reconstruction et le développement de leur économie. Puis, la
partie vietnamienne à l'égard de l'expérience positive de formation 2100 citoyens
vietnamiens, qui avait eu lieu depuis 1967, a demandé l'adoption des 12.000 citoyens
vietnamiens pour l'apprentissage dans les années 1973-1975. Même si le côté
tchécoslovaque a exprimé les limites dans la sécurisation du logement pour cet nombre des
citoyens prévu, il a été convenu que au cours de l'octobre et novembre 1973 les premiers
2000 personnes sera accueilli. Au cours de chaque année suivante les 4500 personnes en
1974, les autres 4500 en 1975 et les 1000 en 1976 sera accueilli. Ainsi, les citoyens âgés de
17-25 ans qui ont terminé l'enseignement général de base seront envoyés dans des
organisations tchécoslovaques. Ainsi, les citoyens ayant fini l'apprentissage pourront venir
en
République
socialiste
tchécoslovaque
afin
d'améliorer
leurs
compétences
professionnelles. Vu qu'il a stipulé la nécessité de la mise en œuvre d'une nouvelle
convention traitant cette problématique. Cette protocole a donc servie en tant qu'une base
administrative pour la mise en place du traitement de la coopération entre République
socialiste du Vietnam et République socialiste tchécoslovaque par la Convention entre la
République socialiste du Vietnam et République socialiste tchécoslovaque de la formation
des citoyens vietnamiens dans des entreprises tchécoslovaques signé en 1974.
Les bases idéologiques du programme vu de la perspective tchécoslovaque se
reflète dans la fiche de la réception d'une délégation de l'Assemblée nationale de la
République démocratique du Vietnam au sein de l'Assemblée fédérale de la République
socialiste tchécoslovaque. Á cette occasion, le président de l'Assemblée nationale
tchécoslovaque a résumé le but du programme:
« Nous avons reçu vos jeunes, les
travailleurs et les techniciens qui sont venus ici pour améliorer leurs qualifications comme
de véritables frères. Nous ne voyons pas cela comme quelque chose pour laquelle nous
prétendons crédit, mais - dans l'esprit de l'internationaliste prolétarienne - comme une
obligation naturelle que nous avons envers un peuple qui lutté contre un poste avancé du
48
MPSV, “Protokol z jednání o přípravě občanů Vietnamské demokratické republiky v Československé
republice”, v Praze, 26. června 1973.
41
socialisme en Asie du Sud-Est, et donc ont contribué à la défense de l'ensemble de la
communauté de socialiste pays. »49
La Convention sur la formation et l'amélioration des compétences des citoyens
vietnamiens a stipulé aussi les conditions pour l'accueil des stagiaires et les apprentis,
stipulait l’organisation institutionnelle de la prise en charge des stagiaires vietnamiens.
Ainsi, l'envoi de jeunes citoyens vietnamiens âgés de 17 à 25 ans était accordé,
généralement avec au moins du sept ans d'études terminées, mentalement et physiquement
capables de gérer les professions dans lesquelles ils doivent être formés. En outre, il était
noté que l'âge supérieur de Vietnamiens sélectionnés
sera avantageux pour le côté
tchécoslovaque en termes de performances au travail.
Les citoyens vietnamiens auront d'abord passer par une formation linguistique
intensive pendant six mois, dont trois mois ils passeront dans des centres collectifs de
l'apprentissage de la langue et trois mois dans les entreprises où ils seront aussi appris de se
familiariser avec leur futur lieu de travail et le travail.
Après cela, ils passeront par la formation. La délégation vietnamienne a souligné le
besoin de préparer les cadres hautement qualifiés dans diverses professions dans le pays
tchécoslovaque. Le ratio de la théorie et de formation pratique doit être réglé différemment
et rationnellement selon les exigences de chaque profession. Le cursus restera de la durée
du trois ans, malgré le fait que les citoyens vietnamiens soient d'âge supérieur à 15 ans
contrairement aux apprentis tchèques.
Au cours du programme de l'apprentissage des citoyens vietnamiens nous
constatons de points faibles, présentés par des bilans des institutions comme les centres de
l'apprentissage de la langue tchèque. Par exemple, l’institution sous la Ministère de
l’éducation pour les affaires scolaires étrangères, La Maison du Jiří Wolker, a présenté ses
objections par rapport au programme des l’accueil des apprentis.50 Entre les années 1970 et
1976, à peu près quatre groupes de quinze personnes chaque sont venus en République
tchécoslovaque pour passer une période délimitée à trois ans de la préparation en
pédagogie: une an et demi ils avaient pour la formation en langue tchèque, puis six mois en
49
50
NAČR, “Záznam z přijetí delegace Národního shromáždění Vietnamské demokratické republiky ve
Federálním shromáždění ČSSR dne 16. Května 1974,” présenté le 6 juin 1974 au sein de la réunion de
ÚV KSČ; fond 02/1, sv. 123., ar. j. 123, b. 6.
NAČR, Dům Jiřího Wolkera, Zařízení Ministerstva školství ČSR pro školské styky se zahraničím.
Připomínky k návrhům plánů opatření s VSR, KLDR a MoLR. 26.5. 1977.
42
formation en pédagogie au sein d’Université technique tchèque à Prague et la dernière
année ils ont consacré à observations au sein des différents institutions d’enseignement
secondaire professionnel, aux visites des fabriques, institutions etc. L’argument principale
contre le programme de la formation des stagiaires était que l’effet de ces stages n’était pas
adéquates aux coûts de financement et temps consacré à ce programme. Les stagiaires
étaient plus âgés et au cours de ces trois ans ils ne maîtrisaient pas la langue tchèque et ils
n’avaient pas les capacités conversationnelles.
A côté de la Convention sur la formation et l'amélioration des compétences des
citoyens vietnamiens, visant notamment l'aide matérielle, les deux pays ont débuté la
coopération dans le domaine de la culture et la science.
La Convention sur la coopération culturelle entre le gouvernement de la république
socialiste tchécoslovaque et le gouvernement de la république socialiste du Vietnam était
signée sur le fondement de la Convention sur la coopération culturelle entre République
tchécoslovaque et République démocratique du Vietnam du 20 mars 1957 .51 Cette
convention était signée le 21 mars 1977 à Hanoï dans l’intérêt de la poursuite de la
consolidation et le développement des relations amicales et fraternelles entre les peuples
des deux pays sur la base du marxisme-léninisme et l’internationalisme prolétaire et dans
la constatation, que la convention ancienne a joué une rôle enrichissante par rapport au
développement de l’amitié et la coopération de deux pays. La convention stipulait que les
deux pays auront soutenu la coopération dans le domaine de la culture, l’art, la science,
l’éducation, la presse, le film, la radio et la télévision, le tourisme, l’éducation physique et
le sport.
Ainsi, la réalisation des échanges scientifiques était prévue pour l’amélioration des
compétences et de la qualification des cadres et l’échange de chercheurs, professeurs et les
experts. La partie importante de cette convention stipulait la formation de cadres dans
l’éducation supérieure, secondaire et formation professionnelle, ce qui permettait l’arrivée
de Vietnamiens avec le but de poursuivre ou achever leurs cursus scolaire. Pendant les
années 1976 et 1977 la République tchécoslovaque a assuré la bourse pour 150 étudiants
vietnamiens.
51
NAČR, Federální Ministerstvo zahraničních věcí, Dopis Ministerstvu školství ve věci Kulturní dohody
s VSR zaslání textů ze dne 29. 4. 1977; Ministerstvo školství, Výpis – Dohoda o kulturní spolupráci
mezi vládou Československé socialistické republiky a vládou Vietnamské socialistické republiky je
uzavřena na základě Dohody o kulturní spolupráci mezi Československou republikou a Vietnamskou
demokratickou republikou – ze dne 20. března 1957.
43
Dans le plan de mise en œuvre52 pour la période entre les années 1976 et 1977, il
est indiqué que les matériels pédagogiques comme les études scientifiques, les manuels,
sont mis en disposition pour le Ministère d’éducation vietnamien, notamment les matériaux
concernant l’éducation polytechnique. En outre, dans l’article 7, les institutions
tchécoslovaques et vietnamiens qui entrent en contact bilatéral sont spécifiés. Il s’agit
notamment des lycées tchécoslovaques et les école secondaires vietnamiennes.
Or,
l’article 24 traite les célébrations mutuelles des fêtes nationales, qui tiennent place dans des
deux pays. Au Vietnam, on commémorait la libération de la Tchécoslovaquie le 9 mai,
pendant que en République tchécoslovaque on fêtait une anniversaire nationale de la
République socialiste de Vietnam le 2 septembre. Les universités principales ont contribué
à la mise en place de la version finale de ce plan de mise en œuvre en proposant les
résolutions des problèmes spécifiques et les thèmes de recherche.53
2.2.
Le programme des travailleurs invités, étrangers 1979-1989
Du point de vue du
pays d’origine des immigrés, les changements dans le
programme bilatéral se reflètent dans l’augmentation du nombre de Vietnamiens envoyés,
ainsi que dans la philosophie du programme. En connexion avec le lancement de la
politique d'ouverture Doi Moi, l’historien Andrew Hardy explique qu’après 1980, année
jusqu’à laquelle on distinguait trois catégories de Vietnamiens partant à l’étranger tels que :
« les diplomates, les cadres supérieurs travaillant dans le commerce et quelques étudiants
» ; « Le conflit avec la Chine et le rapprochement du Vietnam avec l'URSS et les pays du
Comecon changea cette situation (Vo Nhan Tri, 1990 ; Evans and Rowley, 1990: 137-9,
151-2) . Dès le 11 février 1980, par la Décision 46-CP du Conseil des Ministres, on rajouta
une quatrième catégorie : les ouvriers. » (Hardy, 2000: 236).
La formation des citoyens de la République socialiste du Vietnam était réalisée
sous deux formes suivantes: l’apprentissage avec le travail de production ultérieure
associée à l'augmentation supplémentaire de qualification après l'apprentissage ou bien
52
53
MPSV, Prováděcí plán kulturní, školské a vědecké spolupráce mezi československou socialistickou
republikou a vietnamskou socialistickou republikou na léta 1976 a 1977. Dáno v Hanoji dne 17. září
1976. ČSSR a VSR na roky 1976 a 1977
Vysoká škola strojní a textilní, Liberec, Vysoká škola ekonomická Praze, Vysoká škola chemicko
technologická , Praha, Vysoká škola zemědělskí v Brně, Vysoká škola báňská v Ostravě, Vysoká škola
zemědělská v Praze, České vysoké učení technické v Praze, Pedagogická fakulta v Hradci Králové
44
l'amélioration des compétences des stagiaires et des apprentis dans le cadre de l'emploi
dans les entreprises manufacturières.54 L'inventaire de l'emploi des travailleurs vietnamiens
en 1981 dans la distribution des travailleurs détachés du ministère du Travail de la
République socialiste du Vietnam et du Comité d’État55 démontre l'augmentation du
nombre des travailleurs accueilli en trois lots des groupes des apprentis et des ouvriers
arrivés en République socialiste tchécoslovaque. Le 31 décembre 1980, il y avait 3298
travailleurs, le deuxième « groupe » (il s’agit ici d’une allocation de participation des
travailleurs à la substitution progressive) datant du 30 juin 1981 comptait 7511 travailleurs
et avec le troisième, la statistique du 31 décembre 1981 indique le nombre total de 11 475
citoyens vietnamiens en République socialiste tchécoslovaque. Du côté de la République
socialiste tchécoslovaque, on a vu un changement dans l’idéologie du programme qui, de
façon latente, s’est orientée vers le modèle de l’ouest et a acquis certaines caractéristiques
du programme de travailleurs invités. (Alamgir, 2014) Selon le protocole d’application,
délivré conformément à la résolution du gouvernement numéro 337 du 19 décembre 1979 :
« ces lignes directrices pour le matériel, l’organisation et le soutien financier à la formation
et l’amélioration des compétences des citoyens de la République socialiste du Vietnam
dans les organisations tchécoslovaques »56 établissent que la formation des citoyens
vietnamiens sera mise en place selon deux formes basiques : en tant qu’apprentissage suivi
par la pratique et la production, associée à d'autres améliorations dans la pratique une fois
en fonction; et en tant que formation et amélioration des compétences des stagiaires au sein
des entreprises de fabrication. Chaque citoyen vietnamien envoyé en République socialiste
tchécoslovaque venait avec son carnet personnel, la confirmation de leur bonne santé, le
certificat hygiénico-épidémiologique et le certificat international de vaccination.
Les Vietnamiens étaient obligés de suivre les lois tchécoslovaques, et avaient les
mêmes droits et obligations que les citoyens tchécoslovaques pour ce qui concernait les
assurances de santé et de travail . Ils pouvaient voyager dans les pays tiers seulement avec
l’accord de l’Ambassade de la République socialiste vietnamienne à Prague. Une
proposition de rapatriement d’un citoyen vietnamien pour des raisons sérieuses pouvait
54 MPSV, Federální ministerstvo práce a sociálních věcí, Státní plánovací komise, Federální ministerstvo
55
56
finance, “Pokyny pro věcné, organizační a finanční zabezbečení odborné přípravy a další zvyšování
kvalifikace občanů Vietnamské socialistické republiky v československých organizacích.”, K Dohodě
ze 21.12. 1979. Daté juin 1980
MPSV, Odbor pracovních sil, “Přehled zaměstnanosti vietnamských pracovníků v roce 1981 v rozdělení
na pracovníky vyslané ministerstvem práce VSR a Státním výborem VSR”
MPSV, Pokyny pro věcné, organizační a finanční zabezpečení odborné přípravy a další zvyšování
kvalifikace občanů vietnamské socialistické republiky v československých organizacích, juin 1980.
45
être délivrée par l’organisation du Ministère du travail et des affaires sociales
républicaines. Les Vietnamiens dans chaque organisation tchécoslovaque pouvaient choisir
une administration locale étant en contact avec la direction de l’organisation
tchécoslovaque ou qui aidait dans la mise en place d’une formation efficace et dans le
développement des relations amicales entre les deux pays. Ainsi, la direction locale était en
contact avec l’organisme du mouvement syndical révolutionnaire et les organismes des
autres mouvements sociaux. Les organisations spécifiques fournissaient aux citoyens
vietnamiens la sécurité matérielle sous forme de logement dans les dortoirs ouvriers avec
les mêmes conditions que pour les citoyens tchécoslovaques, cependant, le coût ne
dépassait pas 50 couronnes tchécoslovaques par mois. Ces organisations fournissaient de
l’aidealimentaire délivrée par les cantines. De plus, l’usage des établissements sportifs et
culturels, les matériaux pédagogiques pour l’apprentissage de la langue et la formation
professionnelle étaient possibles et disponibles. Du côté des droits revendiqués auprès de
l’employeur, l’organisation assurait les deux jours de congés pour les deux grandes fêtes
nationales de la République socialiste du Vietnam : le nouvel An lunaire et le 2 septembre.
Les congés payés étaient assurés sous les mêmes conditions que pour les citoyens
tchécoslovaques, et la longueur était calculée en présumant que les citoyens vietnamiens
avaient travaillé sans interruption depuis l’âge de 18 ans.
La formation suivie par le travail et la production, ainsi que le relevé des
compétences passaient d’abord par une période d’apprentissage de la langue de trois mois
dans les centres linguistiques spécialisés, puis trois mois au sein des organisations chargées
de la formation professionnelle. Pendant cette période là, le citoyen vietnamien touchait
une bourse de 900 couronnes tchécoslovaques (Kcs) par mois congés y compris.. Ensuite,
venait la formation professionnelle de deux ou trois ans validée par le passage d’un
examen de fin d'apprentissage. Pendant ce temps là, l’apprenti était rémunéré avec un
salaire calculé en fonction du travail effectué. Il ne touchait pas de congé maladie, mais
une rémunération minimale de 902 Kcs/ mois était assurée. Finalement, venait la période
de la pratique dans le domaine étudié, pour une durée de deux ans, qui démarrait avec la
signature du contrat de travail. Pendant la période d’apprentissage de la langue, les
Vietnamiens étaient logés et nourris dans les centres de langue, tandis que pendant la
période d’apprentissage de la langue dans les organisations et pendant la formation
professionnelle, les Vietnamiens étaient obligés d’assumer les coûts du logement et de la
nourriture.
46
Pendant la formation professionnelle au sein des organisations de fabrication, le
séjour de trois ans comprenait l’apprentissage intensif de la langue : pour les travailleurs
manuels trois mois, et pour les ingénieurs six mois. La formation théorique et linguistique
était mise en place hors du temps de travail. Les apprentis étaient considérés comme des
travailleurs, et les stagiaires comme des boursiers. Au cours de cette formation de trois ans
les stagiaires recevaient des organisations tchécoslovaques une bourse mensuelle de 1200
Kcs, une garde robe d’une valeur de 1500 Kcs plus nourriture et logement. Les apprentis,
eux recevaient 250 Kcs d’argent de poche par mois, obtenaient un lot de vêtements d’une
valeur de 900 Kcs, et ils étaient nourris et logés.
Le Vietnam de son côté envoyait des interprètes avec une connaissance de la langue
tchèque, slovaque ou russe dans le but d’aider les organisations tchécoslovaques avec la
mise en place de l’apprentissage de la langue. Dans les centres de langue, les interprètes
avaient logement et nourriture, et recevaient en plus la somme de 500 Kcs, dans les
organisations tchécoslovaques, ils recevaient 1100 Kcs à partir desquelles ils devaient
couvrir les coûts de la nourriture et du logement. Cette bourse était obtenue même pendant
la durée des congés ou d’une incapacité au travail. En plus des interprètes, le Vietnam
fournissait aussi des organisateurs, qui exerçaient leur fonction dans les endroits ou le plus
grand nombre des Vietnamiens était concentré. Les tâches des organisateurs étaient
notamment de surveiller la formation professionnelle des citoyens vietnamiens, leurs
moeurs au travail. Les coûts en rapport avec les activités des organisateurs étaient couverts
par les organisations tchécoslovaques, dont le montant était 1400 Kcs/mois.
« Entre 1981 et 1982, un nombre relativement élevé de travailleurs vietnamiens a
été accueilli. Cela a augmenté le nombre de personnes entrant avec des maladies contreindiquées au séjour en Tchécoslovaquie. Ce fait a été mentionné à plusieurs reprises à la
partie vietnamienne, mais sans le résultat souhaité. »57
Les maladies contre-indiquées classifiées dans l’Annexe numéro 2 du document
«Lignes directrices pour le soutien matériel, organisationnel et financier pour la formation
et l’amélioration des compétences des citoyens de la République socialiste du Vietnam
dans des organisations tchécoslovaques » intitulée « Critères d'évaluation de l'aptitude des
57 FMPSV – Odbor práce 21, Dodatek k informaci pro jednání delegace FMPSV v Hanoji s delegacy
Ministerstva práce, válečných invalidů a sociálních věcí VSR . “V letech 1981 – 1982 došlo k přijetí
poměrně vysokého počtu vietnamských pracovníků (cca. 20 000 osob). Tím se zvýšil počet osob s
chorobami kontraindikovanými pro pobyt v ČSSR. Na tuto skutečnost byla vietnamská strana
opakovaně upozorněna, avšak bez žádoucího výsledku.”
47
citoyens à des organismes tchécoslovaques de formation » étaient par exemple la
tuberculose, des maladies vénériennes, des névroses plus lourdes, des psychopathies, des
psychoses, des maladies du foie mais également, la grossesse.58
Cinq années plus tard, pendant la réunion des délégations du ministère fédéral du
travail,des affaires sociales de la République socialiste tchécoslovaque et celles de la
République Socialiste du Vietnam et du ministère du travail, où étaient aussi présents des
invalides de guerre
59
qui a eu lieu le 4. – 17. décembre 1987 à Prague, le problème des
maladies est discuté et des mesures pour régler la situation ont été prises. Ainsi, le côté
tchécoslovaque a prévu d’envoyer du personnel médical au Vietnam censé faire les bilans
de santé avant le départ des citoyens vietnamiens en Tchécoslovaquie. Mais face aux
propositions visant l’amélioration de la situation, nous pouvons constater que d’autres
problèmes ont émergés au cours du temps dans le programme d’emploi des travailleurs
vietnamiens qualifiés ainsi que dans le programme de
formation proposés par les
organisations tchécoslovaques. Les propositions d’amélioration portaient sur la discipline
et la préparation professionnelle et politique. Les cas individuels devaient être pris en
charge par la ministère tchécoslovaque du travail et des affaires sociales ou le département
des soins des travailleurs de l’ambassade du Vietnam.60 L’autre proposition concernait
l’amélioration de la sélection et de la formation des cadres vietnamiens qui dirigeaient les
groupes et les organisateurs, dans le but de l’amélioration du travail. Si en 1982 il était
présent un nombre relativement élevé detravailleurs Vietnamiens, à la fin de l’année 1983,
il
y
avait
26,236
citoyens
vietnamiens
travaillant
en
République
socialiste
tchécoslovaque.61
Selon le Protocole d’application de la coopération entre la République socialiste
tchécoslovaque et la République socialiste du Vietnam dans le domaine de la formation et
58 Voir Annexes : Pokyny pro věcné, organizační a finanční zabezpečení odborné přípravy a další
59
60
61
zvyšování kvalifikace občanů vietnamské socialistické republiky v československých organizacích;
Kriteria pro posuzování zdravotní způsobilosti občanů VSR k absolvování odborné přípravy v
Československých organizacích, c/ Kontraindikace.
L’archive de MPSV, Záznam z jednání delegací federálního ministerstva práce a sociálních věcí a ČSSR
a ministerstva práce, válečných invalidů a sociálních věcí VSR.
« Oddělení péče o pracující velvyslanectví VSR »
MPSV: Zpráva delegací Federálního ministerstva práce a sociálních věcí ČSSR a Ministerstva práce
VSR o výsledcích realizace mezivládní Dohody ze dne 27.11.1980 a o návrzích na zlepšení další
spolupráce, která se předkládá předsedům obou částí Československo-vietnamského výboru pro
hospodářskou a vědeckotechnickou spolupráci, 27 avril 1983.
48
de la future amélioration des compétences des citoyens vietnamiens pour l’année 1987 62, à
la date du 30 juin 1986, 2900 citoyens vietnamiens étaient en formation secondaire et 6700
citoyens vietnamiens étaient en apprentissage. Au cours de l’année 1986, il était prévu
d’accepter 1698 citoyens vietnamiens pour une formation professionnelle au sein des
établissements d'enseignement secondaire des organisations tchécoslovaques, 460 pour une
formation professionnelle incluant une formation en apprentissage et 1242 citoyens
vietnamiens qui suivraient un enseignement secondaire pour une formation professionnelle
au cours du travail. Les Vietnamiens avaient aussi le droit de prendre des congés payés par
le côté tchécoslovaque.de même que l’étaient les coûts de départ de ceux qui avaient fini
leurs contrats. A côté des apprentis venus afin d'améliorer leurs compétences et gagner la
qualification professionnelle, un grand nombre de citoyens vietnamiens étaient accueilli au
sein des contrats du travail dans des usines. Comme l’explique l’historienne tchèque Alena
Alamgir dans son analyse historique du développement de ce programme d'accueil des
Vietnamiens en Tchécoslovaquie, la phase finale de ce programme se détachait de la
philosophie de l'aide paternaliste et se rapprochait du programme des travailleurs invités en
vue d’améliorer les profits pour l'économie tchécoslovaque en déclin. Il y avait donc des
différences décisives et très nettes dans les conditions dans lesquelles travaillaient les
travailleurs invités et les apprentis-travailleurs en Tchécoslovaquie. (Alamgir, 2014)
En 1986, les délégations du Comité nationale de la formation professionnelle de la
République socialiste du Vietnam et du ministère fédéral de la République socialiste
tchécoslovaque sont menées par les résultats négociés de la coopération dans le domaine
de la formation des cadres professionnels. Ministre contemporain Miloslav Boda a évalué
l'intérêt des citoyens vietnamiens à l’acquisition de la formation professionnelle en tant que
très grand et vif. Ainsi, au vue des grandes nombres de citoyens vietnamiens accueillis par
les organisations tchécoslovaques et les départs imprévus en raison de la condition de santé
ou autre, le côté tchécoslovaque a encouragé le côté vietnamien à une meilleure prise de
conscience concernant la sélection des candidats vietnamiens. Ce nombre élevé exigera
aussi, selon le ministre, la nécessité du plus grand nombre d’interprètes et d’ organisateurs
vietnamiens de haute qualité, qui connaissent la langue tchèque et qui appliqueraient
l'autorité sur leurs groupes. De fait, la délégation tchécoslovaque a proposé de sélectionner
pour cet emploi des citoyens vietnamiens diplômés dans des universités tchécoslovaques
62
MPSV, Prováděcí protocol o spolupráci mezi Československou socialistickou republikou a Vietnamskou
socialistickou republikou v oblasti odborné přípravy a dalšího zvyšování kvalifikace vietnamských
občanů v československých organizacích v roce 1987.
49
ou bien des apprentis des années 1976 à 1982. En conséquence, le gouvernement
tchécoslovaque a encouragé le retour des Vietnamiens, qui connaissaient non seulement la
langue du pays d'accueil mais aussi l'environnement social et politique. L’analyse des
droits et des obligations – tels figurant dans la loi - de ces «autorités » Vietnamiens, étant
employés en tant que directeurs de groupes des ouvriers est discuté en détail dans la
troisième chapitre.
Au sein du protocole d’application de la coopération entre la République socialiste
tchécoslovaque et la République socialiste du Vietnam en ce qui concerne l’emploi
temporaire des travailleurs vietnamiens qualifiés lié à un apprentissage pendant l’année
1988, les deux côtés avaient prévu l’acceptation de 7100 travailleurs qualifiés. Sur ce
nombre total de travailleurs, 2945 sont envoyés en Tchécoslovaquie sur la base de la
coopération directe entre le ministère fédéral de la métallurgie et de l'industrie lourde
tchécoslovaque, le ministère de la métallurgie et de l’industrie du Vietnam, le ministère de
l’ingénierie mécanique tchécoslovaque et le ministère des transports et de l’expédition,
ainsi que sur la participation de aussi la principale administration technique du ministère de
la défense nationale du Vietnam. Une autre coopération est rendu effective entre
l’entreprise
étatique
tchécoslovaque
ČKD
Praha-
la
fabrique
Lokomotiva
et
l’administration des chemins de fer du Vietnam sur la question de ces travailleurs. Pour la
totalité de ces travailleurs, il n’avait été prévu d’accepter que 36 organisateurs, 136
directeurs de groupes et 54 interprètes. Pour donner des exemples précis, nous pouvons
mentionner certaines organisations et les bilans stipulant le nombre des travailleurs (T), les
dirigeants de groupe (D) et les interpréteurs (I). Brandýs la machinerie et de la fonderie :
T = 76, D = 2, I = 2; Jablonec les freins d'automobile : T = 116, D = 2, I = 2 ; Strakonice
les moteurs de course : T = 126, D = 2, I = 2 ; Tatra Kopřivnice : T = 430, D = 5, I = 5.
Il est intéressant de contraster ces indicateurs quantitatifs datant de l’année 1988
avec la lettre de l’Université du 17 novembre à Prague, au sein de la faculté de préparation
linguistique et professionnelle où les apprentis vietnamiens avaient étudié
la langue
tchèque en 1970.63 Le gouvernement vietnamien suivant la résolution numéro 74 du
15.3.1970
a
envoyé
à
la
République
tchécoslovaque
un
groupe
de
370
apprentis prédestinés à travailler dans les organisations tchécoslovaques après avoir fini
leur apprentissage. Pour ce nombre d’apprentis, il était prévu d'employer 34 enseignants.
Les nombres des Vietnamiens employés aux postes mieux rémunérés étaient diminués.
63
NAČR, Ministerstvo školství, zahraniční odbor, 5.turnus vietnamských praktikantů: zajištění výuky, k
rukám s.Bezové, 30.7.1970.
50
Aussi, il est à noter que l'année 1980 marque non seulement le début de l'emploi
des ouvriers dans des usines, dont le but de la coopération entre la République socialiste du
Vietnam et la République socialiste tchécoslovaque était bénéfique, mais aussi le début de
l'emploi des Vietnamiennes dans des domaines à priori destinés aux femmes. Le protocole
d'application64 datant en 21 juin 1980 discutait, outre l'examen des échanges d'apprentis et
de stagiaires, l'accord sur quelque 800 personnes qui arrivent en Tchécoslovaquie en 1981
pour travailler dans les industries textiles, caoutchouc, produits chimiques, et de bijoux de
mode.
Il est à noter que, contrairement à la voie de l'apprentissage, une majorité des gens
étaient surtout des hommes qu'ils ont travaillé dans l'industrie lourde, maintenant des
dispositions étaient prises pour les industries qui traditionnellement employées
principalement les femmes. Cette nouvelle forme d'échange de main-d'œuvre, en effet,
signifie un plus grand nombre de travailleuses arrivant à la République socialiste
tchécoslovaque par rapport à avant. Dans le plan des arrivées des apprentis vietnamiens qui
date de l’année 1987, nous observons aussi l’apparition des femmes spécifiquement
indiquée dans le bilan selon le domaine d’étude.65
2.3.
L’Année 1989 et les transformations économique et politique
Après la disparition du socialisme d'État, la résolution du gouvernement 274/1990
invalide le traité 1980 et ses amendements. Les deux gouvernements ont convenu que les
entreprises feraient de leur mieux pour maintenir les travailleurs vietnamiens employés
jusqu'à la fin de leurs contrats,. Si cela était impossible, les entreprises leur trouveraient
un nouvel emploi ou, si les travailleurs avaient moins de cinq mois à gauche sur leurs
contrats, ils recevraient une indemnité de 5 mois.66
L’objectif de la présente partie est de présenter les façons dont l’état
64
65
66
MPSV, Prováděcí protokol o spolupráci mezi Československou socialistickou republikou a Vietnamskou
socialistickou republikou v oblasti odborné přípravy a dalšího zvyšování kvalifikace občanů v
československých organizacích v roce 1981 a návrzích na rok 1982, daté le 21 juin 1980.
MPSV, Sekretariát zahraničních pracovníků, Plán příletů vietnamských učňů v roce 1987.
MPSV, Zpráva o výsledku jednání delegace federálního ministertva práce a sociálních věcí ve
Vietnamu, presenté par le minister du travail et des affaires sociales Petr Miller au sein de la réunion du
gouvernement le 23 October 1990.
51
tchécoslovaque, qui, lors la ‘Révolution de velours’, a subi les changements politiques et
économiques et a du géré autrement le programme de la formation des citoyens
vietnamiens, formulé sous l’idéologie communiste et puis dans les années 1970. Ainsi, les
récits récupérées pendant les entretiens avec les témoins apportent un aspect microsociologique à l’analyse.
Les changements politiques, la mise en place du système législatif des mécanismes
de la migration et la transformation économique qui ont suivi la Révolution de velours
pendant les années 1990 ont déclenché les changements dans la communauté
vietnamienne. L’année 1989 est un point marquant dans l’étude présente, car elle marque
le début de la différentiation de la communauté ethnique (historiquement présente sur le
territoire de la République tchécoslovaque), qui s’est fondée au niveau macro-sociale à
partir des relations diplomatiques des deux pays socialistes et au niveau micro-sociale à
partir de la motivation pragmatique de la maximalisation du profit économique.
Martínková souligne aussi l'influence de l'histoire macro-sociale des changements du
système politique à la diaspora vietnamienne : « Les événements de novembre 1989 ont
affecté significativement, non seulement la vie des Tchèques et des Slovaques, mais aussi
l'organisation existante de la communauté vietnamienne, le caractère de l'immigration
vietnamienne à la République tchèque et les relations tchéco - vietnamiennes en général. »
(Martínková, 2008: 175)
Selon Tran Trong Dang Dan, dans les états de l’ancien bloc de l’Est « les
Vietnamiens se sont adapté rapidement, cherchant les flux de marchandises et de besoins
de la consommation qui ont émergé après les deux systèmes – le capitalisme et le
socialisme - ont ouvert leurs portes pour communiquer l’un avec l’autre. Ils ont découvert
des points faibles dans les systèmes économiques et fiscaux de ces pays et ils ont été en
mesure d'organiser le commerce à grande échelle avec des niveaux de profit élevés.»
67
(Tran Trong Dang Dan, 1997: 93-96)
Au sein de cette étude, je tente de démontrer les possibilités de rester en République
tchécoslovaque à travers des documents officiels. Ces possibilités se sont mises en place
en vertu du cadre étatique formel, ainsi que grâce aux
67
stratégies d’adaptation des
“Vietnamese adapted rapidly, seeking out the flows of goods and consumption needs which emerged
after the two systems – capitalism and socialism – opened their doors to communicate with one another.
They discovered weak points in the countries’ economic and taxation systems and were able to organize
trade on a large scale with high levels of profit”.
52
Vietnamiens au nouvel environnement au cours de l’installation permanente. Les activités
du commerce aux lesquelles le temps libre était consacré a mené à la création des réseaux
d’économie transnationale.
Les réseaux économiques existants ont conduit à un modèle spécifique de
l’économie ethnique construit dans des années 1990. Les Vietnamiens ont profité des
nouvelles opportunités du système de bien-être.
Les réseaux et leurs maintenances étaient fortement influencés par „le mur de fer“ , ce qui
reflète le témoignage présentée par monsieur P., lors de notre entretien dans le bureau de
son entreprise internationale, qui réside à Prague :
« Lorsque le rideau de fer est tombé ici, j’ ai voyagé en Allemagne et là, il est
possible d'observer des différences évidentes entre les personnes, de Boat People qui se
sont rendus en Allemagne de l'Ouest et les gens, pour la plupart en provenance du Nord,
mais pas seulement du Nord, mais il y a aussi des gens du Sud, mais arrivé au sein de ces
conventions; comme ici avec la Tchécoslovaquie et l’Allemagne de l’Est, donc c’est un
groupe similaire; mais la relation est très forte aujourd'hui. Ces gens aimeraient garder
leur distance . »68
Ici, l’aspect du positionnement du narrateur vaut d’être analysé. Apparemment,
mon interlocuteur prend une distance vis-à-vis de l’histoire. Il ne le démontre pas en tant
que son vécu personnel ; il décrit les faits historiques comme s’ il n’y participait pas et
comme s’ il ne s’agissait pas de l’histoire commune. Il ne s’identifie pas avec ces
compatriotes. Cela peut être dû à son appartenance politique, tel qu’il m’a confié que son
appartenance politique réagissait contre le régime communiste du Nord et à cause de ses
activités politiques il s’est fait persécuté.
Selon le protocole de la mise en œuvre de la coopération entre la République
socialiste tchèque et la République socialiste du Vietnam en matière d'emploi temporaire
de travailleurs qualifiés signé en Hanoi le 6 avril 1989 , couplé avec la formation
complémentaire offertes dans les organisations tchécoslovaques69, les deux côtés se sont
68
69
L'informateur P., L’entretien le 20 mars 2015 “Když tady padla Železná opona, tak jsem cestoval po
Německu a tam je možné pozorovat evidentní rozdíl mezi lidma, Boat People co se dostali do
západního Německa a lidmi, převážně ze Severu, ale ne jen ze Severu, ale jsou i lidé z Jihu, ale přijeli
v rámci těch dohod; jako tady s Československem tak tady s NDR, tak to je podobná skupina; ale ten
vztah je do dnes docela ostrý. Ti lidé jako by si drželi odstup. „
L’Archive de la Ministère du travail et des affaires sociales, „Prováděcí protokol o spolupráci mezi
Českou socialistickou republikou a Vietnamskou socialistickou republikou v oblasti dočasného
53
mis d’accord que durant cette année, le Vietnam aurait envoyé 5000 travailleurs qualifiés.
Les annexes de ce document ont déjà désigné le calendrier exact des arrivées des
travailleurs selon les fabriques et la répartition des travailleurs contractuels par le
département et la fabrique spécifique qui relèvent des Ministères étatiques.70
La rupture entre la mise en œuvre de la philosophie et l’intensité du programme
entre l’année 1989 et l’année 1990 est évident dans les documents officiels. Les
transformations politiques touchaient tous les départements de tout les Ministères
fédéraux.Le Ministère du travail et des affaires sociales était conscient de la limitation
provenant des changement structuraux qui prévoyaient les transformations du système
économique. Ainsi, la clôture des fabriques étatiques a effectué tout ses employés - les
citoyens tchèques et les travailleurs étrangers de la façon similaire.
Mon interlocuteur, selon sa propre expérience et les informations qu'il a obtenu des amis
m'a confié qu'il existait des possibilités différentes entre les pays de l'Europe de l'Est.
Comme l'a déclaré monsieur P. ; au sein de la région dont les gouvernements
effondrés étaient sous le pouvoir central de l'Union des républiques socialistes soviétiques,
le contexte politique d'état joue un rôle importent :
« Après 1989, on clôturait non seulement dans les usines, mais même les
coopératives dans les villages. Je suis même allé à traduire une fois et je étais
complètement perdu dans un village nommé Pelhřimov. Quelqu'un rentra chez lui et les
autres se lanceront en affaires. Ce était tout un peu légal. Le plus souvent, j’ai rencontré
des gens sur le registre du commerce à Prague. D'autre part, seulement ici, en République
tchèque, la possibilité d'obtenir des documents officiels était assez grande. Peut-être en
Pologne, ce était pire. Alors que beaucoup de gens n’avaient pas document officiel, puis
ils ont dû demander l’amnistie, et si différent. Je pense que en Pologne pour créer une
entreprise c’est n’était pas facile. En Pologne, beaucoup de gens n’avait pas les
documents officiels . »71
70
71
zaměstnání kvalifikovaných pracovníků Vietnamské socialistické republiky spojeného s další odbornou
přípravou v Československých organizacích v roce 1989.“
Par résorts et les organisations productrices des Ministères tchèques : La Ministère d'ingénierie,
électrique et métallurgie – 2170, La Ministère de l’industrie – 1275, La Ministère de la construction et
génie civil – 365, La Ministère de l’agriculture et la nutrition – 300, La Ministère forestière et de
gestion de l'eau et des produits du bois – 40 ; Les Ministères slovaques : La Ministère de l’industrie –
500, La Ministère de la construction et génie civil – 200, La Ministère forestière et de gestion de l'eau et
des produits du bois – 150.
L'informateur P. , L’entretien le 20 mars 2015. “Po roce 1989 nejen v továrnách ale dokonce i v
družstvech na vesnicích zavírali. Já jsem dokonce šel tlumočit jednou a byl jsem v nějaké úplně
54
Comme nous avons démontrés plus haut, chaque année le Ministère fédéral du
travail et des affaires sociales a mis en œuvre le protocole d’application au titre de la
Convention signée le 8 avril 1974 sur la formation de citoyens de la République socialiste
vietnamienne dans des organisations tchécoslovaques. Les changements structuraux dans
la production industrielle- dans laquelle est employée la plupart des citoyens vietnamiens –
amenaient des évolutions dans la politique de la formation et de l’emploi des étrangers en
fonction de la limitation des postes disponibles et du besoin de requalification des
employés.72 Ici, le document constate que la Convention signée pour dix ans datant de
l’année 1980 fut achevée le 31 décembre 1990 et les Vietnamiens qui ont commencés leur
emploi auront fini conformément aux contrats avant de rentrer au Vietnam. Les groupes de
travailleurs contractuels venus en République socialiste tchécoslovaque en 1989 repartent
en 1994. A ce moment- là, l’intérêt du Ministre du travail et des affaires sociales devait
assurer l’achèvement des contrats pour éviter le retour précoce des travailleurs : dans le cas
échéant, les organisations où les travailleurs sont employés étaient chargés des frais de
voyage. L’attaché vietnamien aussi négociait l’amélioration des conditions d’envoi des
biens au Vietnam. Le côté vietnamien exigeait pour les travailleurs à la fin du contrat la
possibilité d’achat des biens de libre choix avec l’envoi hors taxe et le transfert de leur
salaire par la banque tchécoslovaque.
Or, la question des passages illégaux des Vietnamiens en direction de l’Autrichea
été discutée. A la date de la réunion, le 23 mars 1990, comme confirmait l’attaché Ky,
l’Ambassade vietnamienne a compté 40 passages illégaux.
Effectivement, le départ informel représentait la décision de grande nombre de
Vietnamiens dont l’emploi ancien s'est clôturé en raison de l'effondrement du système
socialiste. La République socialiste tchécoslovaque n'était, pour beaucoup, qu'un pays de
transit en direction de l'Ouest. La dispersion d'informations utiles fonctionnait bien au sein
des réseaux ethniques. Plusieurs citoyens vietnamiens ont pris la décision de prendre le
chemin risqué justement pour tenter leur chance comme leurs prédécesseurs. Cet exemple
72
ztracené vesnici na Pelhřimovsku. Někdo se vrátil domů a zbytek šel do podnikání. To bylo všechno
celkem legální. Nejčastěji jsem potkal lidi na obchodním rejstříku na Můstku. Na druhé straně tady
právě v Čechách možnost získat oficiální papíry byla celkem velká. Třeba v Polsku to bylo horší. Takže
hodně lidí nemělo žádný oficiální papír a pak museli žádat o různé amnestie a tak. Asi v Polsku založit
firmu nebylo jednoduchý. V Polsku bylo hodně, co nemělo oficiální doklady.”
L’Archive de la Ministère du travail et des affaires sociales, „Záznam z jednání ředitele odboru
zaměstnanosti Federálního ministerstva práce a sociálních věci ČSFR PhDr. Štefana Karabína, CSc., s
vedoucím oddělení péče o pracující vietnamského velvyslanectví v Praze ing. Trinh Quoc Ky dne 23.
března 1990.“
55
démontre aussi le comportement collectif au sein de la communauté vietnamienne.
Conformément à ce raisonnement, mon informateur P. a expliqué que:
« Après 1989, chaque groupe de personnes a décidé de faire quelque chose. Un
groupe est allé en Allemagne aux camps de réfugiés. Au début il n’y avait pas d'autre
choix. Si après la Révolution la personne voulait aller en Allemagne ou en Hollande,
c’était classique qui est allé. Avant la révolution, c’est une autre histoire, c’était très
difficile, c’est la route plus au sud par la Yougoslavie et l'Italie, et il demandait tout
simplement d'asile. Ici et en Allemagne après la chute du mur de Berlin, un travailleur
normale qui a fini ici dans ces usines avait deux choix officielles et une option non
officielle. Le premier était de prendre une certaine indemnité de départ et retourner au
Vietnam. La deuxième est de rester ici, mais personne ne se soucie pour vous. Mais la
chose intéressante est que l’état ne vous forçait pas à retourner, non plus. Alors, les gens
ont agi collectivement, quelqu’un a trouvé et les autres l’ont copiés. »
Les documents administratifs servent en démontrant les circonstances au sein de la
nouvellement appelée République fédérale tchécoslovaque, où les anciennes structures
institutionnelles, façonnant formellement les conditions de vie des travailleurs,
commençaient à s'effriter. Dans le document portant sur les informations destinées aux
négociations avec le chef du département des études de l'ambassade vietnamienne l’attaché
Viet qui date du 9 Avril, 1990, nous pouvons constater un des premiers reculs dans
l’acceptation des apprentis. Or, nous constatons une rupture entre le nombre des
Vietnamiens envoyés exigés par l’ambassade du Vietnam et le nombre des Vietnamiens qui
aurait été accepté par le Ministère fédéral tchécoslovaque du travail et des affaires sociales.
Selon ce document, les changements politiques et économiques fondamentaux au
sein de la République fédérative tchécoslovaque ont affecté la situation de l'emploi et de la
formation des citoyens étrangers dans les organisations tchécoslovaques de sorte qu’il soit
nécessaire que la poursuite de la coopération avec le Vietnam dans les années à venir soit
réduite de manière significative. « En ce qui concerne les changements fondamentaux dans
les sphères politiques et économiques de notre pays, certaines organisations ne pourront
pas répondre à leurs engagements au titre du présent protocole. Cela est principalement dû
au fait que le nombre de grandes entreprises qui possèdent les équipements pédagogiques,
sont désormais décomposé en plus petites unités organisationnelles afin d'accélérer la
56
transition vers une économie de marché et l'avenir de leurs écoles n’est pas encore
résolu.»73
Autrement
dit,
la
création
des
ressources
financières
sous
conditions
d’autofinancement des organisations n’assure pas la continuation de la formation des
apprentis sans que les subventions gouvernementales ne soient possible. La finalisation des
contrats d’apprentissage sera gérée par le contrat d’état et les coûts d’organisations seront
donc pris en charge par le budget d’état.
Ainsi, dans la pratique il aurait signifié que les stagiaires et les apprentis
vietnamiens devraient finir leurs apprentissages selon les contrats signés et devraient
repartir au Vietnam. Autrement dit, le côté tchécoslovaque ne comptait pas conclure une
nouvelle convention avec le Vietnam sur la formation professionnelle ou prolonger la
convention actuelle.
Selon le document de référence du Ministère du travail et des affaires sociales de la
République fédérale tchécoslovaque daté du mai 2001, « Les derniers citoyens
vietnamiens, recrutés en République tchèque, sur la base de l’accord intergouvernemental
concernant l'embauche de travailleurs vietnamiens de 27/11/1980, ont achevé leurs
engagements de travail en République tchèque à la date 30/6/1995. »74 Ici, partant de ce qui
était démontré plus haut dans le texte, on voit la rupture avec les prognostics prévus par
la Ministère fédérale socialiste qui datent de l’année 1989 et prévoyaient que les
travailleurs seraient repartis en 1994.
Les Vietnamiens et l'esprit d'entreprise
Pendant l'époque du socialisme réel, le niveau de vie des Vietnamiens à Prague
n’était pas aussi élevé que celui de la majorité tchécoslovaque. En conséquence, afin de
s’assurer des revenus plus agréables, les immigrés ont profité de leurs connexions
transnationales avec le Vietnam. Ils ont découvert tôt qu'il existait un grand intérêt dans les
marchandises de types «occidentaux» comme les vêtements, les montres numériques, le
73
74
MPSV, Informace pro jednání s vedoucím studijního oddělení vietnamského velvyslanectví atašé Vietem
dne 9.4.1990. „V souvislosti se zásadními změnami v politické a hospodářské oblasti našeho státu se
však ukazuje, že některé organizace nebudou moci své závazky, vyplývající z tohoto protokolu, splnit.
Důvodem je zejména skutečnost, že řada velkých podniků, které vlastní učební zařízení, se nyní rozpadá
na menší organizační celky s cílem urychlit přechod na systém tržního hospodářství a budoucnost jejich
učilišť není zatím dořešená.“
MPSV, Vietnamská socialistická republika: Podkladový materiál, čj. : 116086/2001-ASIE, květen 2001,
page 6. « Poslední vietnamští občané, přijetí do zaměstnání v ČR na základě mezivládní dohody o
zaměstnávání vietnamských pracovníků ze dne 27.11. 1980, ukončili svůj pracovní závazek v ČR ke dni
30.6. 1995. »
57
milieu de l'électronique au sein de la société tchèque dans les années 1980. Les activités
transnationales ne s’arrêtaient pas au niveau individuel familial comme le montre l'envoi
de fonds. Les activités économiques comme l’importation des biens d’Asie supervisée et
médiatisée par les employés d’Ambassade vietnamienne et les petites activités
entrepreneuriales sont devenues le monopole du marché noir par les marchandises des
marques falsifiées. (Nožina, 2009: 237). Tout ça était possible grâce aux réseaux
transnationaux élaborés. En outre, pendant le socialisme, les forces gouvernementales et de
sécurités tchécoslovaques fermaient les yeux sur le problème pour des raisons politiques,
tandis que pendant la transition, les Vietnamiens ont profité des trous dans le marché
démocratique. « Le système socialiste au Vietnam permettait bien avant notre Révolution
de velours « de vivre comme tu peux » et en raison de la faiblesse des salaires presque tous
les «travailleurs vietnamiens" avant et maintenant travaillent. Grâce à cela les apprentis
vietnamiens, ainsi les travailleurs et les diplomates dans l'ex-Tchécoslovaquie savaient
aussi "faire du commerce" avec les montres, l’électronique bon marché, les cigarettes et
l'alcool de Tuzex (le magasin spécialisé pour les personnalités mondaines de régime
communiste). Après la création d'un "nouvel ordre" dans notre pays, les Vietnamiens ont
construit sur le site de l’hôtel Košík le premier marché de gros vietnamien en République
tchèque. »75
Comme il a été présenté dans le cadre conceptuel à travers la théorie de réseaux
grâce aux postulats de Roger Waldinger, les connexions qui s’étendent à travers la
communauté d’immigrants constituent une source du capital social fournissant alors les
structures sociales qui, en mobilisant ses flux d’informations facilitent la recherche de
l’emploi et l’acquisition des capacités et des ressources qui sont nécessaires pour monter
l’échelon économique. (Waldinger, 1997: 3). Après la Révolution du Velours, dans le cas
des Vietnamiens venus en République tchécoslovaque, l’information de la possibilité de
l’entrepreneuriat était d’abord transmise par les anciens étudiants, les apprentis, les
travailleurs contractuels maîtrisant la langue tchèque et prenant en compte les possibilités
pour démarrer de nouvelles entreprises. Il s’agissait ici de la transmission d’information de
75
L’Archive de la Ministère du travail et des affaires sociales, Ing.Nguyen Tung, CSc., Problémy s
Integrací Vietnamské komunity v České Republice: úvahy, polemika, návrhy, Praha, 6/2000.
« Socialistické zřízení ve Vietnamu dovolilo dávno před naší sametovou revolucí "žít jak dokážeš" a
vzhledem k nízkým platům skoro všichni "vietnamští pracující" před tím i nyní nějak pracují. Díky
tomu vietnamští učňové, dělníci ale i diplomati v bývalém československu také uměli "obchodovat" s
hodinkami, levnou elektronikou, cigaretami či alkoholem z Tuzexu. Po nastolení "nového pořádku" u
nás pak Vietnamci vybudovali v areálu hotelu Košík první vietnamskou velkotržnici na českém
území. » page 16.
58
bouches à oreilles très rapide et efficace. Selon le sociologue Waldinger (1997) ainsi que
l’anthropologue Alain Tarrius (2000), la confiance inter-ethnique est un facteur importante
en fonction du sentiment de la réduction des risques et fait une liaison entre les
entrepreneurs co-ethniques.
Mon informatrice, madame M., m'a racontée comment son mari a réussi à gagner sa
vie suivant l'expiration de son contrat dans l'usine grâce au réseaux économique ethnique.
« Je pense que les Vietnamiens ont commencé ses activités commerciales en 1991,
très tôt. [...] Ensuite, ils (les autres Vietnamiens à Prague) cherchaient quelqu'un qui
connaissait la langue tchèque et qui savait conduire la voiture. Nous avons une tante en
Allemagne, et elle avait rappelé mon mari qu'il devait faire un permis de conduire. Une
fois l'option, il a passé le permis de conduire, et ça valait le coup. Depuis quelque temps,
quand nous étions à la recherche d'un emploi, il ne savait pas comment gagner sa vie pour
moi, en pensant qu’il ferait un chauffeur de taxi. Puis il a découvert que, pour obtenir une
licence, il devait avoir dix années du casier judiciaire vierge. Donc, il ne pouvait pas
obtenir une licence. »76
L’autre informateur, monsieur V. est venu en tant que travailleur contractuel en
1982 au sein d’un contrat de six ans et était accueilli dans une auberge prévu à cette effet et
ensemble avec 50 d’autres personnes d’origine vietnamienne ils étaient pris en charge par
un organisateur et un interprète vietnamien. Selon cet informant là, la Révolution (comme
il l’appelle) offrait les nouvelles opportunités : il a commencé à mener une petite
entreprise. « on devait utilisé sa propre tête après la Révolution », témoigne le monsieur, en
faisant référence au fait que dans les usines, en faisant le travail de fabrication monotone, il
n’étaient pas seul et il savait qu’il aurait pu demander l’aide des collègues tchèques, qui
étaient selon lui solidaires notamment grâce à la compassion ressentie envers les immigrés,
dont le pays est détruit par la guerre. De l’autre côté, il n’était pas indépendant ou
autonome comme aujourd’hui. Avec des autres Vietnamiens qui sont restés en République
tchécoslovaque, il a fondé en 1992 une entreprise qui se concentre autour de la vente des
vêtements de la mode, et il a débuté ainsi « nous sommes allés en Pologne à la bourse
76
L'informatrice M., L’entretien de 3 avril 2015, « Myslím, že Vietnamci začali podnikat už v roce 1991,
velmi brzo. My jsme se do toho kolotoče vlastně nedostali. Nejsme takové povahy. To nebyli známí.
Tehdy hledali někoho, kdo uměl jazyk a kdo umí řídit. My máme tetu v Německu, a ta připomněla
mému muži, že musí dělat řidičák. Jakmile byla možnost, udělal si řidičák a vyplatilo se to. Nějakou
dobu, když jsme hledali práci, když nevěděl, jak mně uživit, tak přemýšlel, že by dělal taxikáře. Potom
zjistil, že aby dostal licenci, musí mít deset let čistý trestní rejstřík. Takže nemohl dostat licenci.»
59
(burza) ou les Bulgares ont vendus la mode et nous l’avons acheté et revendu ici, et vu
qu’il n’y avait pas de jolis vêtements, le commerce a bien marché. ».77
Le processus de la dispersion de l'information au sein de la communauté était très
rapide et efficace. Ainsi, la possibilité de se faire employé par un compatriote qui
connaissait bien l'environnement économique et législatif du pays avec le marché s’ouvrant
aux capitaux étrangers se relevait d'être le choix convenable pour nombreux Vietnamiens
sans l’importance dans leurs origine socio-économique. Pour notre informant, qui est venu
en République socialiste tchécoslovaque en 1978 en tant qu'étudiant universitaire et qui a
obtenu son diplôme, cette occasion était la seule pour pouvoir gagner sa vie pour lui et sa
femme vietnamienne enceinte à l'époque.
« Alors tout d’un coup tout les Vietnamiens étaient des entrepreneurs. La troisième
option était non officielle: lorsqu’il était difficile de gagner de l'argent, on se rendait dans
un camp de réfugiés et on recalculait l'argent qu'on avait obtenu là en aide sociale, là on
gagnerait plus. Donc, pour beaucoup de gens, c’était tentant. Moi même j’y suis allé, pour
voir de quoi on parlait, mais j’ai su immédiatement que c’était quelque chose à laquelle je
ne survivrais pas. Juste trop de temps libre. Juste ces gens là-bas flânaient dans le camp en
ne faisant rien. Je pensais mourir dans une semaine. Alors, bien sûr ce n’était pas mon
option. Au début, on n’avait aucune idée de comment ça aller se dérouler. Ensuite, il a été
découvert que le business marchait bien ici, donc beaucoup de gens sont retourné
d’Allemagne. Il existait la menace que l'Allemagne ne reconnaîtra pas l'asile politique et
retournera ce gens au Vietnam. »78
77
78
L'informateur V., L’entretien au SAPA - le centre commerciale vietnamien, le 5 avril 2015.
L'informateur J., L’entretien le 31 mars 2015
« Po roce 1989 se každá skupina lidí rozhodla pro něco. Skupina jela do Německa, do těch
uprchlickejch táborů. Ze začátku jiná možnost nebyla. Pokud se po Revoluci člověk chtěl vydat
do
Německa nebo do Holandska, tak to bylo klasické, že se sebere. Před Revolucí to je jiný příběh, to bylo
strašně obtížné, to spíš jižní cestou přes Jugoslávii a potom do Itálie a tam prostě požádat o azyl. A tady
do Německa až po pádu Berlínské zdi, normální dělník co tady skončil v těch fabrikách měl dvě
oficiální možnosti a jednu neoficiální. První byla vzít nějaké odškodné a vrátit se do Vietnamu. Druhá
je zůstat tady, ale tady už se o Vás nikdo nestará. Ale zajímavé je, že ten stat vás taky nenutil, že se
musíte vrátit. Takže hromadně lidé jednali, jeden to našel, druhej to okoukal. Že najednou všichni
Vietnamci byli podnikatelé. A třetí neoficiální : tehdy to bylo těžké vydělávat nějaké peníze a když se
člověk sebere do uprchlického tábora a přepočítá ty peníze, co tam dostane na podpoře, tak by tam
dostal víc. Takže pro mnoho lidí to bylo lákavý. Dokonce jsem se tam taky podíval, abych věděl, co to
je, ale okamžitě jsem věděl, že to je něco, co nepřežiju. Prostě příliš hodně volného času. Prostě ti lidé
se tam toulají po areálu a fakticky nic nedělaj. To jsem si říkal, že takhle umřu za tejden. Takže určitě
tahleta cesta jako ne. Na začátku nikdo neměl žádnou představu, jak to bude dál. Pak se zjistilo, že to
podnikání tady docela šlo, tak se hodně lidí vrátilo do Německa. Tam hrozilo ještě, že Německo vrátí
60
La communauté a saisi complètement un domaine du marché en se dispersant les
informations sur les possibilités et les trous dans le système se formant pendant la
transformation politique et économique de la République socialiste tchécoslovaque. Les
Vietnamiens, comme le suivant informateur, malgré le manque des compétences et de
formation professionnelle, ont saisi leur opportunité de fonder une entreprise et d'acquérir
la carte de séjour pour cinq ans.
« Nous étions mal formés, nous nous entraînions pour autre chose, mais pas dans le
management des entreprises. Maintenant, lorsque je
revois ce que je faisais dans
l'entreprise, je me rends compte que je faisais tout mal. Mais en ce qui concerne les
Tchèques, qui allaient faire du business, la seule explication est que, à cette époque,nous
avons fait tout presque aussi mal. Après 1989, nous avions la possibilité d'établir
Ltd.
79
sous la réserve que qu'un Tchèque soit dans sa gestion. »
Après 1989, tout comme la plupart des Vietnamiens, qui sont restés en
Tchécoslovaquie (Brouček, 2003), les deux de nos répondants se sont lancés dans la
commerce du textile et de la confection. Ils étaient prêts à se déplacer à travers la
République et aller à l’ étranger afin de saisir l'opportunité d'offrir de nouveaux articles sur
le marché tchécoslovaque naissant. L'informateur a raconté à propos de son père:
« Ensuite, il a commencé ses activités entrepreneuriales. Ils prenaient un train à Ostrava
chaque jour, ils ont ouvert les stands. Ce fut un grand marché où ils sont allés les Tchèques
et les Polonais à faire des achats, parce que les tissus n'étaient très pas chers. Les matériaux
étaient originaires de Turquie, et puis du Vietnam. ».80 Ainsi, la véritable niche ethnique et
puis une économie transnationale étaient formées.
79
80
tyhle lidi do Vietnamu s tím, že nemají na uznání politického azylu.“
L'informateur P., L'entretien le 20 mars 2015 ; « My jsme byli špatně školení, byli jsme školení na něco
jinýho, jenom ne na podnikání. Když si teď promítám, co jsem dělal ohledně firmy, tak jsem dělal
všechno špatně. Ale to asi i Češi, co šli podnikat, jediné vysvětlení je, že v té době jsme na tom byli
skoro stejně špatně. Po roce 1989 byla možnost založit s.r.o. a jednatel tam asi musel být Čech.“
L'informateur J., L'entretien le 24 avril 2015 : « Potom začalo to podnikání. Museli vlakem do Ostravy
každý den, měli stánky, byli v boudě. To byla velká tržnice kam chodili Češi a Poláci nakupovat,
protože ten textil byl velice levný. Pocházelo to z Turecka, potom už z Vietnamu. »
61
CHAPITRE III - ANALYSE DE TROIS NIVEAUX :
MACRO, INTERMEDIAIRE ET MICRO SOCIAL.
Le Chapitre précédent a servi de présentation au programme de l’internationale
socialiste qui présente le cadre de l’étude, et qui est mis en articulation avec les entretiens
avec les témoins et leurs vécus individuels. Cette partie tente de prendre en considération
les facteurs qui ont affecté l’adaptation des vietnamiens à leur nouvel environnement, tout
en suivant le fil rouge de cette étude - les réseaux sociaux et familiaux, dont la formation,
selon mon opinion, s’inscrit dans des conditions mises en place par le programme de
l’internationale socialiste. Les réseaux sociaux sont ancrés dans l’existence de l’économie
ethnique et des réseaux familiaux dans la réussite scolaire ; ce sont les deux stratégies les
plus efficaces de l’intégration instrumentale dans le système économique et social des
Vietnamiens résidents en République tchèque. Pour pouvoir répondre à la question posée
au début de la recherche et analyser, comment le programme de l’internationale socialiste a
influencé la création de ces réseaux sociaux et familiaux, l’analyse se base sur les sources
primaires à partir de lesquelles je tire les facteurs, qui ont eu un impact direct ou une
influence plus diffuse sur la communauté et son adaptation.
Il s’agit donc ici dans un premier temps d’une analyse plus profonde portant sur
le rôle de l’état en tant qu’agent actif, dans la formation des frontières culturelles, dans
l’organisation, et dans la répartition des sources disponibles pour les différentes
formations/catégories. Pour voir comment le noyau élaborant les politiques des états
fonctionne et comment il affecte ou crée les catégories ethniques, il faut travailler sur trois
niveaux d’analyse, d’abord le niveau macro, puis intermédiaire et enfin micro-analytique.
Au niveau macro, les facteurs qui ont affectés l’adaptation des Vietnamiens pris en
compte par l’analyse sont : Les motifs du gouvernement tchécoslovaque, Décentralisation
du système d’organisation, Le but de la contrôlabilité et La temporalité du séjour, qui ont
tous influencé l’acculturation et l’adaptation des travailleurs vietnamiens par
l'établissement de normes qui en ont résultées.
Le niveau intermédiaire de l’analyse présente l’ancrage social des activités
vietnamiennes, c’est-à-dire l’influence des groupements sociaux sur l’adaptation des
citoyens vietnamiens. Selon Frederick Barth, "Un niveau médian est nécessaire pour
représenter ce qui crée des collectivités et mobilise des groupes à des fins différentes par
62
divers moyens."81 (Barth, 2000: 21). En effet, les motivations du groupe auxquelles
s’adaptent les motivations individuelles sont ici analysées. Dans la présente partie, je tente
de faire une brève description de l’évolution structurelle de la communauté vietnamienne
au sein de la République tchèque, en donnant des exemples précis de groupements sociaux
regardés à travers le concept du capital social. A mon avis, l’ancrage communautaire et le
positionnement dans la hiérarchie structurelle est un facteur important pour la réussite dans
l’adaptation sociale.
Le niveau micro-social est ensuite présenté à travers des facteurs, qui ont un
impact au niveau individuel. Le niveau micro d'analyses est nécessaire pour indiquer les
processus d'auto-identification, d'acceptation ou de refus de symboles et de communions
sociales, et ceux de l'interaction sociale selon laquelle l'individu façonne ses idées, les
valeurs, l'auto-valeur. Les facteurs, qui influençaient les citoyens vietnamiens au niveau
individuel sont toujours décrits de l’extérieur, comme des conditions qui sont ensuite
articulées par les individus eux mêmes selon leurs propres capacités, motifs et valeurs
personnelles. Il s’agit ici : Des motifs des Vietnamiens pour venir en République
tchécoslovaque, L’apprentissage de la langue, Les envois de fonds, Les conditions de la
formation de la famille et les relations intimes qui résultent en Différences
intergénérationnelles.
Dans un deuxième temps, à partir des témoignages récupérés je propose de
contraster le point de vue des sources de base des archives, afin de mettre l’accent sur la
perception et le vécu individuel.
Tous ces niveaux sont étroitement liés, et ce qui résulte du niveau macro établit la
fondation pour le niveau médian, qui à son tour crée les contraintes, conditions
d'expression et d'action du peuple au niveau micro. Les organisations et les discours
transnationaux et internationaux jouent un rôle plus important dans l'articulation étroite
avec le niveau médian.
La main d’œuvre vietnamienne à partir de 1974
Dans le cas des Vietnamiens arrivant en République socialiste tchécoslovaque en tant que
travailleurs contractuels, apprentis ou stagiaires, les règles imposées par les organisations
étatiques en charge de l’accueil en République socialiste tchécoslovaque, et par
81 “A median level is needed to depict that create collectivities and mobilize groupes for different purposes
by diverse means.”
63
l’ambassade de la République socialiste du Vietnam étaient réévaluées en fonction des
valeurs de la société d’origine.
3.1.
Les immigrés vietnamiens en République tchèque d’un point
de vue macro analytique.
Cette partie analyse les conventions officielles et les relations internationales entre
les deux gouvernements sous politique communiste, leur coopération et l’équilibre
(déséquilibre le cas échéant) au niveau des pouvoirs institutionnels, ainsi que la prise en
charge des Vietnamiens par le côté tchécoslovaque. Ces conventions bilatérales
représentent, au sein de la présente recherche, les facteurs structurels qui conditionnent la
migration internationale. L’autre facteur structurel qui sera présenté plus loin est la
situation politique et économique en transformation pendant la fin des années 1980 et le
début des années 1990, ce qui réglemente les changements dans l’économie locale.
Dans cette partie, l'ancrage du cadre institutionnel, et donc la coordination de toutes
ces questions dans les normes juridiques qui auront force de loi, sera présenté brièvement.
En République socialiste tchécoslovaque, il s’agit de la loi sur la création de ministères et
d'autres organismes gouvernementaux centrale n ° 2 de 1969 loi sur les compétences82.
Cette loi articulait les responsabilités des autorités publiques par rapport au programme
d’internationalisme socialiste. Dans le § 12 de la présente loi, qui articule la responsabilité
du ministère de l'Intérieur, au point h) étant donné la compétence en matière de séjour des
étrangers ou demandeurs d'asile, la protection internationale désormais etc.
Le premier chapitre porte sur le rôle de l’État en tant qu’agent actif dans la
formation des frontières culturelles et dans l’organisation et
répartition des sources
disponibles pour des différentes formations/catégories ethniques
3.1.1 Les motifs du gouvernement tchécoslovaque
Les pratiques politiques et législatives ont pris racine aux idées provenant d'un
contexte géo-politique globale. Cette partie ne tente pas d'analyser l'idéologie qui se
cachait derrière les décrets et règlements concernant le programme des travailleurs
82
Kompetenční zákon z roku 1969
64
vietnamiens, cela pourrait constituer un sujet en soi-disant, qui a déjà inspiré l'historienne
Alena Alamgir dans son thèse portant sur l'évolution de ce programme. La motivation de
cette présente partie de la recherche au niveau macro-sociale était notamment de
comprendre les aspects normatifs institutionnalisés, qui, soit de façon latente ou
directement,
affectaient
l'adaptation
des
Vietnamiens
en
République
socialiste
tchécoslovaque. Toute en suivant l'approche de l'analyse sur trois niveaux étroitement liés,
il est nécessaire de comprendre quels effets à la vie quotidien des immigrés pourraient
avoir ces motifs politiques à travers de ses normes et régulations.
L’aide fraternelle et la dispersion idéologique
L’idéologie de solidarité et d’aide , initialement humanitaire, était déjà apparue en
1956 avec l'arrivée du premier groupe de Vietnamiens en Tchécoslovaquie composé de
cent enfants - descendants de fonctionnaires et de combattants pour l'indépendance et la
liberté du Vietnam. En acceptant de petits Vietnamiens le gouvernement tchécoslovaque a
démontré sa solidarité avec le pays touché par la guerre du Vietnam et il les a placés dans
un orphelinat à Chrastava à côté de la ville du Liberec. Selon le souhait de l'ambassade
vietnamienne, quatre ans plus tard les enfants sont rentrés au Vietnam. Depuis la fin des
années 195083 des conventions culturelles bilatérales avaient été signées entre le
gouvernement de la République démocratique du Vietnam (Nord) et la République
socialiste tchécoslovaque.
Dans les années 1970, plus exactement en 197184 , un rapport diplomatique a été
fait au Vietnam et délivré au Ministère des affaires étrangères pour présenter la discussion
de l’action culturelle et propagandiste, où l’attaché politique traite des relations culturelles,
scolaires et scientifiques entre la République socialiste tchécoslovaque ; et des conditions
politiques au Vietnam pour la propagande idéologique et culturelle de l’état
tchécoslovaque. Les facteurs, qui ont influencé la direction de la politique interne en
République socialiste du Vietnam telle quelle était importante pour les activités des pays
‘frères’, étaient notamment le conflit entre le Vietnam et les États-Unis, et la rupture dans
le mouvement révolutionnaire communiste, créée par la Chine. L’existence de courants
politiques différents au sein du Vietnam avant son unification étaient pris comme
motivation pour tenter de consolider les forces et les tendances du marxisme – léninisme
83
84
La Convention culturelle initiale a été signée le 20 mars 1957- NAČR
NAČR, 200 612/72-OKS„Zpráva o čs.-vietnamských kulturních, školských a vědeckých stycích a
propagačních působení ve VDR v roce 1971“, p.8.
65
communes aux pays frères socialistes, et notamment dans l’Union des républiques
socialistes soviétiques.
En 1976, la toute nouvelle République socialiste vietnamienne a rejoint le Conseil
d'assistance économique mutuelle (Rada vzájemné hospodářské pomoci), dont les
membres s’étaient liés entre eux pour aider le Vietnam dans son re- développement. Pour le
Vietnam, les sommes acquises par les accords bilatéraux avec les «amis socialistes» a été
utilisée pour la reconstruction nationale et le paiement des dettes ; et les nombres des
contrats offerts augmenta tant que l'état en observa le succès.
Or, le but premier de la politique diplomatique envers la République démocratique
du Vietnam était dédié à la protection du Vietnam de ‘l’impérialisme américain’, et des
tendances de la politique chinoise. L’aide de la Tchécoslovaquie était ainsi interprétée
comme ‘une aide matérielle et politique au peuple vietnamien’. Ensuite, un autre objectif
des activités politiques tchécoslovaque était la sensibilisation du public vietnamien avec la
culture et la situation historique et contemporaine de la Tchécoslovaquie. Le rapport stipule
qu’il aurait été nécessaire d’organiser des actions promouvant la culture contemporaine
ainsi que plus ancienne, qui ne soient pas coûteuses, et qui visent des larges couches de la
population vietnamienne, dont le « niveau culturel était relativement faible » (page 4).
Ainsi, la propagande était diffusée par les médias et la presse, notamment le Département
des Affaires étrangères publiait le magazine trimestriel intitulé ‘Tchécoslovaquie’ à plus de
trois milles exemplaires (page 6). Ainsi allait la lutte contre la propagande des ennemis (ici
les États-Unis et la Chine) ; les médias culturels étaient en 1981 évalués comme un outil
efficace quant au travail idéologique et éducatif de l'Ambassade tchécoslovaque à Hanoi.
Par exemple, les conditions pour la projection des films tchécoslovaques étaient très
positives et favorables au sud du Vietnam, où les films étaient utilisés de façon très efficace
dans le cadre de la propagande idéologique. Les filmes tchécoslovaques dans la ville de Ho
Chi Minh avec ses 63 salles de cinéma avaient une très grande popularité, ce que la
diplomatie voulait utiliser pour la propagande du socialisme réel de la République
tchécoslovaque, et le camp socialiste en général.85 Le fait est que les personnes les plus
informées de la situation en Tchécoslovaquie, et la culture tchèque et slovaque étaient les
anciens élèves et étudiants. Pourtant, selon le rapport, les « relations avec eux sont presque
85
NAČR, Ministerstvo školství, Velvyslanectví ČSSR v Hanoi, VSR – správa o ČSR kultúrných,
školstkých, vedeckých a zdravotnických stykov s VSR za rok 1981, le 17 décemnre 1981. pp.5 -9.
66
impossibles »86. Selon le Rapport concernant les relations culturelles, scolaires,
scientifiques et médicales de la Tchécoslovaquie avec Vietnam pendant l'année 1981, «...les
relations avec les diplômés et universitaires tchécoslovaques restent problématiques après
leurs rentrée au Vietnam. Les réunions et la mise en places des événements avec eux est
très difficile à cause des mesures de sécurité des bureaux et des institutions vietnamiens par
rapport à l'état paramilitaire. »87
Cependant, les témoignages de ces anciens élèves tchécoslovaques, de même que le
fait que la délégation politique de la République socialiste tchécoslovaque avait activement
promu une prise de conscience des Vietnamiens par rapport à la culture et la situation en
République socialiste tchécoslovaque, peuvent être un facteur qui a influencé directement
la création du « mythe de l’Occident » (Kocourek, 2008) et peut-être a joué un rôle de push
factor.
Le concept de l’internationalisme prolétaire était originalement perçu comme une
solidarité entre les pays socialistes, et une fidélité aux initiatives de la politique soviétique ;
les auteurs de la fin des années 1980 l’appellent "Euphémisme pour la doctrine Brejnev " à
la suite de l'invasion de 1968 de la Tchécoslovaquie. Autrement dit, une astuce rhétorique
utilisée par l'Union soviétique pour justifier ses interventions dans les affaires politiques
des pays d'Europe centrale et orientale si il jugeait ces affaires être une menace pour la
cause du socialisme mondial.88 L’Internationalisme socialiste, une doctrine qui paraissait
être vide, mais au niveau de l’état fédéral tchécoslovaque, était relayée par trois
institutions (Après les réformes administratives qui ont pris effet le 1er Janvier 1969 et
transformé le pays en une fédération (Alamgir, 2014: 9) : La Ministère tchécoslovaque du
travail et des affaires sociales, les deux Ministères des fédérations de Tchéquie et de
Slovaquie. De côté du Vietnam, le Comité d’état pour la formation professionnelle89 était
en charge.
Selon un candidat doctorant d’origine vietnamienne préparant sa thèse au sein de
l’Institut d’ethnologie et de folkloristique de l’Académie des Sciences, Ngo Van Le,
86
87
88
89
NAČR, 200 612/72-OKS, Zpráva o čs.-vietnamských kulturních, školských a vědeckých stycích a
propagačních působení ve VDR v roce 1971.
NAČR, Ministerstvo školství, Velvyslanectví ČSSR v Hanoi, VSR – správa o ČSR kultúrných,
školstkých, vedeckých a zdravotnických stykov s VSR za rok 1981, le 17 décemnre 1981. p.9.
Dawisha, Karen et C. Valdez, Jonathan, “The New Internationalism in Eastern Europe, Proceedings of
the Academy of Political Science”,36, N. 4, 1987 , Soviet Foreign Policy, pp. 119-131.
Státní výbor pro odbornou přípravu Vietnamské socialistické republiky
67
l’émigration vers les pays bourgeois est un phénomène spontané, tandis qu’au sein du
système socialiste fondé en 1945, la migration était devenue un phénomène dirigé ; en
opposition avec les expatriations vers des pays bourgeois, qui elles reflétaient un conflit
économique ou des nécessités économiques. Deuxième différence importante des émigrés
des pays dits bourgeois qui s’installaient dans le pays d’accueil en permanence est le fait
que le séjour des travailleurs immigrés en République socialiste tchécoslovaque était
impérativement limité par un certain délai introduit et réglementé par les gouvernements.
Comme conséquence de cette limite temporaire il n’était pas permis d’amener sa famille. Il
est intéressant de noter qu’ en 1989, quand sa thèse a été publiée, Ngo Van Le décrit
l’échange déclaré par les gouvernements entre la République socialiste tchécoslovaque et
Vietnam comme étant un exemple de l’application de l’internationalisme prolétarien et
«une réalisation de traités d’amitié et de coopération entre les pays frères»90 (p.8).
Le stimulus de la réalisation de l’enquête ethnographique et une introduction
théorique au sein de cette thèse doctorale ont été des problèmes que les ouvriers immigrés
devaient affronter au sein de la société tchécoslovaque, et le but principal était pour le
jeune ethnographe d’observer le mode de vie des Vietnamiens, et surtout leurs conditions
de travail et de vie dans les environnements comme les résidences et les usines afin
d’appréhender les problèmes. Ainsi, le but était à la fois d’ouvrir de nouvelles possibilités
pour le gouvernement tchèque pour les programmes d’échange du travail, et pour le
gouvernement vietnamien il s’agissait de trouver des options pour soutenir le pays dans les
difficultés économiques, détruit par la guerre.
Le lien indirect entre migration et développement économique du pays d’origine est
analysé sérieusement par des études du développement, dans mon cas d’étude visé
directement de manière manifeste, sous réserve de première étape du programme d’aide
offert par le République socialiste tchécoslovaque qui l’avait présenté en tant qu’une aide
humanitaire amicale.
Les accords qui avaient pour but le développement économique direct étaient
accompagnés par des accords culturels, visant l’apprentissage des aspirants, des stagiaires
et des étudiants universitaires vietnamiens qui seraient formés en tant que futurs cadres
dans des domaines nécessaires à la reconstruction et au bien-être du pays. Les propositions
du nombre d’étudiants et d’aspirants, et leurs spécialités souhaitées étaient présentés
90
…naplnění smluv a o přátelství a spolupráci mezi bratrskými zeměmi
68
directement par le gouvernement de la République Démocratique du Vietnam.91 Il s’agit ici
de la Convention Culturelle signé en 1957.92 Ainsi, les fondements du phénomène de l’aide
officielle encadrés dans la politique de pays d’accueil des immigrés vietnamiens se
reflètent dans la mise en place de la politique d’export de la main d’œuvre du Vietnam
contemporain. Les activités transnationales visant au développement économique
fonctionnent dans la double-logique où se mêlent le niveau macro et micro-social. Les
travailleurs contractuels envoyés dans les pays développés servent non seulement la
politique de la diminution du chômage et l’ouverture du marché à l’investissement
étranger, mais aussi au niveau individuel - ce qui est plus visible dans le court terme –
l’épargne familiale et l’ascension sur l’échelon économique de la famille.
Comme il était mentionné dans la partie théorique, dans la recherche présente, je
réfère aux Vietnamiens vivants en République tchèque en tant que diaspora. En effet, les
Vietnamiens vivant à l’étranger sont dénommés en tant que groupe transnational et
diasporique non seulement dans le milieu académique, mais aussi par les Institutions
officielles au Vietnam. Ce phénomène est étudié par exemple dans l’ouvrage de Dovelyn
Rannveig Agunias, l’analyste des politiques de l’Institut des Politiques de la Migration de
Washington, expliquant que le fait d'entretenir des liens avec le groupe des citoyens
transnationaux peut permettre aux pays en développement de profiter des avantages de la
globalisation et d’engager la diaspora productivement dans le développement (2009: 5).
Dans la Revue de la Migration vietnamienne à l’étranger, les communautés de Vietnamiens
vivant à l’étranger en gardant leur citoyenneté vietnamienne et percevant leur séjour en
tant que temporel sont classées en tant que diaspora. L’accent est mis aussi sur le contexte
du monde globalisant et sur le fait que les communautés signifient un potentiel
économique important. (2012: 29-30). L’existence des Institutions officielles en tant que
Comité national pour les Vietnamiens d'outre-mer, et ses travaux statistiques qui estime les
investissements des Vietnamiens vivant à l’étranger à 5.7 billions de dollars en est la
preuve.93
91
92
93
NA, 7.11.1975, Federální Ministerstvo zahraničních věcí č. 79.459/75-3, Annexe au Aide Mémoire
Spécialités et nombre d’étudiants vietnamiens envoyés pour leurs études en République Socialiste de
Tchécoslovaquie en 1975, Répartition pour l’année scolaire 1975 – 1976 des aspirants de la R. D. Du
Vietnam à envoyer en R. S. Tchécoslovaque.
MPSV, Prováděcí Plán k Dohodě o kulturní spolupráci mezi Československou socialistickou republikou
a Vietnamskou demokratickou republikou, podepsané dne 20.března 1957 na léta 1974 – 1975.
« National Committee for Overseas Vietnamese”, [Review of Vietnamese Migration Abroad, 2012, 30]
69
Le profit tiré des ouvriers Vietnamiens
Dans la deuxième moitié des années 1980,
la Tchécoslovaquie ainsi que les
Vietnamiens commencent à utiliser la situation à leur propre avantage et à en tirer profit.
La Tchécoslovaquie recrute de plus en plus de Vietnamiens pour des emplois peu attractifs,
par exemple dans les lignes d'assemblages des usines, et pour des travaux accessoires afin
de « sauver » le plan socialiste. Du côté vietnamien, la corruption de développe : les
agences de recrutement sont désorganisées et n'hésitent pas à accepter des pots-de-vin.
Vietnamiens utilisent leurs revenus pour envoyer des biens à leurs familles au Vietnam. De
plus en plus de criminels et des enfants de fonctionnaires, habitués à la corruption et au
népotisme, viennent en Tchécoslovaquie. Les motivations qui étaient autrefois d'apprendre
un métier ou d'améliorer la puissance de travail reculent et laissent place à l'idée d'un
enrichissement rapide et facile.(Broucek, 2003: 16).
Mon informateur , monsieur T. m'a aussi expliqué la façon dont il a obtenu son
'billet' pour arriver en République socialiste tchécoslovaque pour sa formation en 1982.
« Mon père était employé au ministère du Vietnam. La famille dont le père ou la mère est
fonctionnaire a la chance de pouvoir demander d'envoyer ses enfants à l'étranger vers
l'Occident, soit en Allemagne de l'Ouest, soit dans l'Union soviétique, en Roumanie ou en
Bulgarie. Vous pouviez choisir pour vos enfants le pays cible seulement si vous aviez du
pouvoir. Les fonctionnaires normaux ne pouvaient pas choisir. »94
Ma recherche dans des documents administratifs montre que les délégations
tchécoslovaques étaient critiques de la sélection des candidats. En effet, à leur arrivée, ils
n'étaient pas bien formés pour travailler dans des organisations tchécoslovaques pour
diverses raisons. A plusieurs reprises, les délégations tchécoslovaques regrettaient le fait
que les citoyens vietnamiens ne satisfaisaient pas les exigences requises telles que stipulées
par les conventions.
Du côté tchécoslovaque, un certain changement dans l'idée du programme débute
dès les années 1970, alors que l'économie planifiée a commencé son déclin et que la maind'œuvre moins qualifiée vient à manquer. Le rapport du 7 avril 1976 portant sur les
possibilités d'emploi de citoyens vietnamiens à l'attention du Cabinet du Premier Ministre,
94
L'informateur T., L'entretien le 30 avril, 2015 ; « Můj otec byl zaměstnán na ministerstvu ve Vietnamu.
A ta rodina, kde je otec nebo maminka státní úředník má tu šanci požádat o zaslání dětí do zahraničí na
Západ. Buď do Západního Německa nebo do Sovětského svazu nebo do Rumunska nebo do Bulharska.
Mohli jste si vybrat pro své děti cílovou zemi jen ti, co měli moc. Normální úředníci si nemohli
vybírat.»
70
il est possible de constater un tournant vers l'idée d'aide mutuelle. Il s'agit ici d'une échange
plus que d'une aide paternaliste sans considération pour le payement de la dette comme
cela était le cas dans les années 1960. Selon Lubomír Štrougal, alors premier ministre :
« L'emploi de citoyens vietnamiens, comme cela est maintenant envisagé, pourrait
contribuer à résoudre le problème du chômage dans la partie sud du Vietnam ; et dans le
même temps, cela pourrait être un moyen de former des cadres qualifiés dans les
professions de cols bleus pour l'économie nationale vietnamienne. D'autre part, l'économie
nationale tchécoslovaque pourrait acquérir une force de travail pour ses entreprises
d'ingénierie et ses industries de construction, ce qui est d'une importance majeure pour la
poursuite du développement de l'économie. »95
3.1.2 Décentralisation du système d’organisation
Dès lors que les travailleurs vietnamiens commencèrent à être accueilli par le
gouvernement tchécoslovaque et que leur nombre augmentait , le système relatif à leur
prise en charge s'élaborait. Au cours des négociations avec la délégation du Vietnam, les
mesures spécifiant les obligations de chaque institution politique concernant le
déroulement du programme
étaient mises en place dans le respect de la hiérarchie
bureaucratique. Le Ministère fédérale du travail et des affaires sociales publia les
instructions de base en accord avec les autres autorités centrales. Ainsi, le ministère menait
ces négociations avec le Comité étatique de la République socialiste du Vietnam et
l’Ambassade vietnamienne, et coopérait avec les ministères républicains tchécoslovaques
(les Ministères du travail et des affaires sociales, de l’éducation, de la santé, ainsi que
divers ministères concernés par la formation des vietnamiens). Les ministères républicains
respectifs (de la République socialiste tchèque et de la République socialiste slovaque)
s'occupaient avant tout de l'accueil et de la formation des citoyens vietnamiens, notamment
en ce qui concerne le logement et la nourriture , et effectuaient un contrôle continue de la
procédure. Ainsi, les ministères républicains étaient chargés de la direction des centres
d’apprentissage de la langue. A l'arrivée des citoyens vietnamiens, ils les accueillaient à la
sortie de l'avion et assuraient leur transfert vers les centres d'apprentissage de langue et les
centres de formation. Ensuite, ils surveillaient le passage de la formation au travail
productif. Enfin, ils avaient la liste des noms des Vietnamiens et effectuaient des bilans
personnels réguliers. Le ministère républicain de l’éducation établissaient les lignes
95 MPSV, “Informace o možnostech zaměstnávání vietnamských občanů v ČSSR a návrh dalšího postupu,”
reçu par le Cabinet du Premier Ministre (Úřad předsednictva vlády) le 7 avril 1976.
71
directrices pour l’apprentissage de la langue tchèque et slovaque et dirigeait la préparation
des programmes d'enseignement. Ils définissaient les critères de sélection des enseignants
et décidaient de leurs qualification. Ils faisaient l’inspection et supervisaient la formation
professionnelle et linguistique des écoles d’enseignement secondaire. Ils préparaient aussi
les examens finaux. Le ministère républicains de la santé déterminait les critères
d’évaluation de l’aptitude de travail et décidait des mesures de santé nécessaires. Enfin, le
ministère du commerce s'occupait de fournir aux citoyens vietnamiens des vêtements, des
chaussures et des biens nécessaires à leur toilette personnelle.
Les instructions administratives élaborées par les institutions nationales étaient
appliquées au niveau régional par les comités nationaux (Národní Výbory). Les Comités
nationaux régionaux suivaient les instructions des ministères relatifs à la formation
linguistique et à la formation professionnelle, et ménageaient le choix et l’emploi des
pédagogues, nommaient les directeurs des centres linguistiques et des institutions
d’enseignement secondaire, et demandaient les subventions nécessaires aux salaires de ces
employés. Ces comités étaient aussi en charge des soins préventifs et médicaux des
citoyens vietnamiens : ils choisissaient les employés médicaux pour les centres de langue
et s’occupaient de leurs salaires. Ainsi, ces comités régionaux garantissaient le contrôle de
l’état dans l’accueil des citoyens vietnamiens en ce qui concerne la formation, le logement,
la nourriture, ainsi que les soins. Finalement, chaque établissement a pris en charge
l’emplacement des étudiants spécifiques96, qui étaient suivi par des tuteurs, nommé par les
ministères de l’enseignement étatiques.
Il s'agissait ici d'un système qui appliquait vraiment une approche descendante (top
down approach). Ainsi, en pratique, les apprentis ne rencontraient que leurs enseignants, et
les travailleurs et les stagiaires n'étaient en contact qu'avec les dirigeants de leurs groupe
respectifs d'origine vietnamienne (dans des cas plus important, avec l'organisateur local).
Les Vietnamiens ne pouvaient pas choisir leurs dirigeants et avaient un contact très limité
avec les autres représentants de la société dominante.
96
Září 1973 Odbor školství Národního Výboru Hl.Města Prahy, Návrh na zařazení vietnamských
absolventů vysokých škol.
72
3.2
Les immigrés vietnamiens depuis la convention de 1974 au niveau
intermédiaire de l’analyse
Cette partie porte sur la question de la communauté vietnamienne et de sa diversité
structurelle, ainsi que sur les réseaux solidaires créés par des stagiaires pionniers venus en
République tchèque. Il s’agissait de réseaux formés à partir de la provenance d’origine, de
l’appartenance politique etc.
Dans cette partie de l'analyse, je prends en considération l'hétérogénéité du groupe
ethnique, et tente d'expliquer la diversité structurelle interne à la diaspora vietnamienne
résidente à Prague. En plus des sources primaires historiques et des témoignages, cette
analyse se fonde sur des sources secondaires (Alamgir, 2013 ; Broucek, 2003 ; Koucourek,
2008 ; Kusnirakova, 2013). Cette analyse ouvre sur ma future recherche doctorale.
Le groupe d'anciens résidents97 venus dans le cadre des accords socialistes ou même
dans les années 1990 ont eu des stratégies de vie similaires. En premier lieu, il est possible
de constater que ceux-ci ont construit les liens ethniaques grâce à leur savoir-faire
pragmatique spécifique. (Balaz, Williams). En effet, ces immigrants pionniers
déterminèrent dans une certaine mesure l'image de leur communauté, la coopération avec
les bureaux tchécoslovaques, la stratégie administrative et finalement l'attitude envers la
majorité tchécoslovaque. En dépit d’attitudes racistes98, les anciens résidents utilisaient les
contacts au sein de la société majoritaire, notamment dans le but d'acquerir une certaine
autonomie entrepreneuriale ou commerciale. En deuxième lieu, ces premières cohortes
migratoires firent preuve d'une cohésion et d'une solidarité interne qui n'est plus visible au
sein de la diaspora aujourd'hui (Broucek, 2003: 19). La cohésion des cohortes migratoires
avant la révolution à Prague peut être expliquée par le fait qu'aucun des arrivants n'avait de
relations familiales déjà installées dans la métropole tchèque. Le fait qu'il ne soit plus
possible de parler de la communauté vietnamienne en tant que telle aujourd'hui peut être
expliqué par une cause naturelle – la croissance démographique : les Vietnamiens passèrent
97
98
« starousedlíci“ en tchèque.
Veronika Kuřinová, Zdeňka Petriláková, Magdaléna Ramešová, Sylva Skřivánková, Tereza Vebrová
Postoj Čechů k vietnamské menšině v ČR [online] Hospodářská a kulturní studia, Provozně ekonomická
fakulta
ČZU
v
Praze,
2010.
Dostupné
z:http://www.hks.re/wiki/postoj_cechu_k_vietnamske_mensine_v_cr
73
de 9633 en 1994 à 61115 en 2010 (Le Bureau Statistique tchèque), mais cette évolution est
beaucoup plus complexe et exige une étude de la structuration interne de la diaspora.99 Il
y a plusieurs aspects selon lesquels nous pouvons diviser la diaspora en groupes
d'appartenance. Deux aspects importants sont facilement détectables : le premier est le
statut socio-économique et le niveau d'études achevé ; l'autre est la province d'origine au
Vietnam.
Contrairement aux premiers arrivants, les nouveaux migrants depuis la moitié de
21ème siècle jusqu'à aujourd’hui sont beaucoup plus dépendant du réseau vietnamien
existant en République tchèque, et donc ont besoin d'utiliser leurs services. Au sein de la
diaspora, il est possible d'observer une professionnalisation de l'aide, ce qui se présente
sous la forme de prestations de services. En Vietnamien, le terme synonyme de ces services
est Dich vu. Grâce aux dich vu, les nouveaux arrivants en République Tchèque peuvent
vivre même sans connaître la langue ou l'ordre juridique tchèque, et ne sont donc pas
obligés de s'intégrer de la même manière que durent le faire les groupes d'anciens
résidents. Dich vu sont utilisés par les deux groupes de nouveaux arrivants – par ceux qui
viennent par des agences intermédiaires et n'ont presque pas de contacts au pays d'accueil,
ainsi que par ceux dont la famille habite déjà en Europe et qui par conséquent profitent de
l'aide de leurs réseaux sociaux personnels. (Kusnirakova, 2013(b): 25-26).
A la suite de ce que j'ai présenté dans les pages précédentes, il est possible de noter
une évolution de la nature des relations au sein de la diaspora. Les relations amicales qui
marquaient les anciens résidents (en fonction de l'origine socio-économique de la famille),
ont généralement été remplacées par des relations purement fonctionnelles et économiques.
Au cours de la formation de la communauté ethnique, la « qualité » du capital social acquis
au sein de la société d’accueil présente une source pour la formation et la légitimation des
rapports de force hiérarchiques au sein de la communauté. L’apparition de ce phénomène
est décrit en détail par Tereza Kušniráková dans son étude de la structure interne de la
diaspora vietnamienne en République tchèque. Souvent, les Vietnamiens qui sont venus
afin de saisir l’opportunité privilégiée d’étudier au sein des universités tchèques dans les
années 1980, sont soit restés, soit retournés au Vietnam pour travailler au poste de directeur
du groupe des travailleurs contractuels.
Tout au long de la présence de la population vietnamienne sur le territoire de la
99
Les membres d'une « communauté » devrait se sentir solidaires et appartenir à cette unité. La diaspora
tchèque manque cette intégrité interne et une identité collective. (Kusnirakova, 2013(b): 20))
74
Tchéquie, il est possible de tracer une évolution interne et structurelle. Tandis qu'avant
1989 la population vietnamienne peut être catégorisée en tant que diaspora ou même
communauté, plus tard, dans les années 1990, on peut observer une évolution de la
structuration interne et la stratification de l’ethnie vietnamienne. (Brouček, 2003)
Le lieu de résidence des travailleurs contractuels pendant les années du programme
se projette dans leur choix de la localité pour la fondation des grandes centres
commerciaux. Autrement dit, par rapport aux dynamiques urbaines, les Vietnamiens
démontrent une préference de monter leur entreprise dans la localité avec laquelle ils ont
déjà familiarisés. Le candidat vietnamien Ngo Van Le dans sa thèse en ethnologie soutenue
en 1989 explique que les travailleurs vietnamiens à Prague sont souvent logés tous
ensemble dans des grands dortoirs. Ainsi, ils peuvent maintenir leurs coutumes et leurs
traditions. Il donne l’exemple de l’arrondissement Praha 4 Chodov, de l’hôtel Košík et de
la résidence de la société de transport tchèque dans Prague 8 Bohnice. (Ngo, 1989 : 21). Et
c’est effectivement dans ces localités, où les Vietnamiens ont investi pour créer des centrer
commerciaux. « Après la révolution est née à Prague le premier centre de gros autour des
anciens dortoirs des travailleurs étrangers Panier d'achat Hôtel à Prague 4 - Chodov. Peu à
peu, a grandi en taille ainsi que pour «l'indépendance». En 1996, les autorités locales
seront abolir. » ( Martínková, 2008: 1)
La hiérarchie interne aux Vietnamiens présents en République socialiste
tchécoslovaque commença à se structurer dès la mise en place de la coopération dans la
mise en œuvre de l'accord de gouvernement du 21 Décembre 1979 sur la formation et le
développement des compétences des citoyens vietnamiens dans les organisations
tchécoslovaques. Dans les années 1980, lorsque les deux gouvernements se sont mis
d'accord sur l'accueil d'un plus grand nombre de citoyens vietnamiens, le côté
tchécoslovaque a mis en œuvre les conditions officielles pour l'emploi des directeurs de
groupes et des interprètes en leurs attribuant, de façon latente, le statut supérieur aux
ouvriers dont ils étaient en charge. Cette hiérarchisation des rôles des citoyens vietnamiens
qui étaient engagés dans le programme est manifestée notamment en 1986100, lors de la
réunion entre les délégations du Comité d’État pour la formation des VSR et le ministère
fédéral du Travail et des Affaires sociales de la Tchécoslovaquie sur la coopération dans la
mise en œuvre de l'accord de gouvernement du 21 Décembre 1979 sur la formation et le
100 MPSV, Zápis z jednání delegací Státního výboru pro odbornou přípravu VSR a federálního ministerstva
práce a sociálních věcí ČSSR o spolupráci při provádění vládní Dohody ze dne 21. prosince 1979 o
odborné přípravě a dalším zvyšování kvalifikace občanů VSR v československých organizacích.
75
développement des compétences chez les citoyens vietnamiens dans des organisations
tchécoslovaques. Ici, le côté tchécoslovaque a encouragé le Comité national pour la
formation professionnelle de la République socialiste du Vietnam de mener la sélection des
futures employés aux postes des directeurs des groupes à partir des vietnamiens diplômés
au sein des universités tchécoslovaques, « avec une bonne connaissance de la langue
tchèque ou slovaque, qui aurait l'autorité nécessaire pour leurs groupes ».101 Le mot
'autorité' renvoi ici à une certaine mise à niveau au sein de la communauté des Vietnamiens
qui étaient les enfants des cadres politiques ou élites, vu qu'ils avaient pu étudier dans une
université européenne. Leurs positions a été ainsi assurée par l'établissement de ses
conditions officielles.
Ainsi, le 27 juin 1984, le ministère fédéral du travail et des affaires sociales
tchécoslovaques, en accord avec les services compétents de l'ambassade de la République
socialiste du Vietnam, édita les termes qui régissaient les organisateurs et les dirigeants des
groupes de citoyens vietnamiens travaillant temporairement dans les organisations
tchécoslovaques.102 Les directeurs des groupes et les organisateurs furent proposés par le
côté vietnamien en accord avec le Ministère du travail et des affaires sociales de la
République socialiste tchécoslovaque et furent subordonnés au service des cadres et du
personnel d'organisation d'employeurs. Tandis que les citoyens vietnamiens étaient obligés
de suivre les instructions des organisateurs, ils avaient aussi le pouvoir de se faire entendre.
C'est-à-dire que selon ces termes, ils pouvaient choisir leurs représentants qui étaient en
contact avec la direction de l'organisation (l'usine ou ils étaient employés) et devaient
« contribuer au bon déroulement de la formation professionnelle des apprentis et des
stagiaires, ainsi que à la promotion des relations amicales entre les deux pays. » (page 3, §
2 b). Les obligations des organisateurs étaient à la fois tangibles et intangibles, même
morales. Par exemple, ils étaient obligés de « surveiller le travail des chefs de groupe des
autorités vietnamiennes dans le domaine du travail politico-éducatif et dans le
renforcement de la discipline du travail et de la moral des citoyens vietnamiens »103,
« organiser des loisirs actifs pour les citoyens vietnamiens; tout en coopérant avec les
101 « … s dobrou znalostí českého nebo slovenského jazyka, kteří by měli ve svým skupinách potřebnou
autoritu », p. 2, § 2.
102 MPSV, Rámcové podmínky pro působnost organizátorů a vedoucích skupin vietnamských občanů
dočasně zaměstnaných v československých organizacích, à Prague, le 27 juin 1984.
103 ch) « sledovat práci vedoucích skupin vietnamské samosprávy na úseku politicko-výchovné práce, při
upevňování pracovní a morální kázně vietnamských občanů »
76
syndicats, les jeunes et autres organismes communautaires »104, « se soucier du
développement des bonnes relations personnelles entre les Vietnamiens et les citoyens
tchécoslovaques »105, « assurer le respect des règlements de sécurité et d'autres, en
particulier l'ordre de l'hébergement et diriger le peuple vietnamien à relation correcte à la
propriété socialiste »106
Avant 1989 les directeurs de groupes étaient spécialisés en fonction du type de
groupe (soit les stagiaires, apprentis, ou bien les ouvriers), tandis qu’une limitation des
postes d’employés s'opérait en unifiant les groupes et minimisant le nombre des
organisateurs locaux.
Ainsi, la rupture dans le régime affectait aussi la structure interne de la diaspora
même entre les anciens résidents, ce qui montre le degré de cohésion interne et prouve que
leur adaptation fut réussite, tandis que les arrivées des nouveaux migrants économiques a
créé une différentiation dans la diaspora en fonction du statut socio-économique (la
diversification selon la provenance géographique était déjà visible auparavant-les
Vietnamiens s'étaient concentrés et organisés selon la province d'origine).(Kusnirakova,
2013(b))
3.2.1 Les conditions des relations sociales entre les Vietnamiens
La présente partie analyse l’émergence et la mobilisation du capital social au sein
de la population vietnamienne en République socialiste tchécoslovaque. Comme le décrit
Alejandro Portes, qui revisite la littérature portant sur le capital social, le consensus peut
être trouvé dans la définition du capital social en tant que l’agilité des acteurs à sécuriser
les avantages en vertu d’être membre de la structure sociale (Portes, 1998: 6). Les
institutions, comme les associations, peuvent devenir l’unité sociale à laquelle les individus
s’affilient et qui valorise les titres des compétences acquises par l’appartenance aux
groupes et réseaux sociaux. Par exemple, les associations sont formées par les membres de
la première génération et leur but ne répond pas aux intérêts des jeunes Vietnamiens. De
façon latente, l’association Van Lang fonde ses intentions sur les manques du Vietnam
provenants du contraste avec la République socialiste tchécoslovaque. Comme l'expliquait
mon informatrice madame M., les motivations pour la fondation de cette association
104 f) « organizovat aktivní využití volného času vietnamských občanů; přitom spolupracovat s
odborovými, mládežnickými a jinými společenskými organizacemi »
105 g) « dbát o rozvoj dobrých osobních vztahů mezi vietnamskými a československými občany »,
106 k) « dbát na dodržování bezpečnostních a jiných předpisů, zejména ubytovacích řád a vést vietnamské
občany k správnému vztahu k majetku v socialistickém vlastnictví »
77
résidaient dans le contraste entre l’environnement social et mental de la Tchécoslovaquie et
son pays natal. Selon mon opinion, elle a été fortement influencée et inspirée par le
mouvement social au cours de la transformation sociale et politique de la République
socialiste tchécoslovaque.
« Parce que je crois qu’il y a une grande différence entre le niveau intellectuel de la
République tchèque et le Vietnam, parce que pendant la Première République la
Tchécoslovaquie était déjà un pays très développé. Les Tchèques étaient déjà très
conscients. Bien qu'à l'époque du totalitarisme la sensibilité a diminué, la nation possède
toujours quelque chose. Le Vietnam n'a jamais été un pays aussi développé. Et en plus
nous avions plusieurs années de socialisme et de communisme, donc c’est vraiment mal
tombé. En fait, à cause du communisme, nous avons perdu le bouddhisme. Maintenant il
s’agit du bouddhisme commercial, pas du bouddhisme spirituel. Ainsi, nous traduisons les
articles portant sur les droits humains, écrits par Vaclav Havel. Notre association Van
Lang avait traduit un recueil d'essais de Havel. Van Lang est officiellement enregistré
depuis environ 3 ans en tant qu'association. »107
Ainsi, les associations peuvent à leur tour faire apparaître la rupture entre les
générations, comme c'est le cas pour l'association Van Lang qui réunit surtout les immigrés
de la première génération qui ont vécu la Révolution de Velours tchécoslovaque. En
revanche, les associations peuvent aussi unifier la première et la deuxième génération de
Vietnamiens dans un objectif commun. C’est le cas de l’association de Klub Hanoi, 108 qui
propose à la fois les activités culturelles traditionnelles, au sein desquelles se réunissent
notamment les anciens immigrés, et les activités qui visent la sensibilisation du public
majoritaire avec la communauté. C'est effectivement la scène des jeunes Vietnamiens, qui
sont intégrés à la société tchèque et qui s'y sentent concernés.109
107 Madame M., L’entretien le 3 avril 2015 „Protože si myslím, že je velký rozdíl v intelektuální úrovni
České Republiky a Vietnamu, díky tomu, že již za První republiky bylo Československo hodně
rozvinutá země. Češi byli už od té doby hodně uvědomělí. I když v době totality ta uvědomělost hodně
klesla, i přesto něco ten národ pořád má. Vietnam nikdy nebyl takhle rozvinutá země. A ještě k tomu
máme kolik let socialismu nebo komunismu, takže je to tam úplně v čudu. Vlastně kvůli komunismu
jsme přišli o budhismus. Teďka je to komerční budhismus, ne čistý, odduchovněný, už ne. Takže
překládáme třeba články o lidských právech, Havla. Naše sdružení Van Lang už překládali nějakou
sbírku Havlových esejů. Van Lang je oficiálně zaregistrované asi 3 roky jako občanské sdružení.“
108 http://www.klubhanoi.cz/
109 L’influence des parents sur l’intégration des enfants vietnamiens dans la société tchèque, mémoire de
Licence en Anthropologie sociale sous la direction de Josef Kandert, Université Charles de Prague,
2011-2012
78
A l'inverse du capital culturel qui réside « dans la tête », le capital économique
réside « dans le compte bancaire ». La possession du capital social est dépendante des
structures sociales médiatisées par les autres, et ce sont les autres êtres humaines qui sont
les porteurs du capital social qui est à saisir lors la mobilisation des contacts sociales. C’est
à travers la relation avec les autres, qu’on peut accéder au capital social. Comme l'explique
Alejandro Portes, tout dépend de la motivation des autres pour rendre les ressources
disponibles à certaines conditions. Il divise ces motivations entre les motivations
consommatoires et les motivations instrumentales110. Les premières sont décrits en tant que
sentiments d’appartenance à une communauté cohésive qui constituent une norme évitent
la rupture. Cette conception est proche de celle des sociologues. Les normes intériorisées
qui rendent de tels comportements possibles sont alors appropriables par d'autres, comme
une ressource. Concernant les motivations instrumentales, les bailleurs de fonds
fournissent un accès privilégié aux ressources dans l'espoir qu'ils seront intégralement
remboursés à l'avenir. Cette conception, concentrée autour de l'accumulation des
obligations des autres en fonction de la norme de réciprocité, est à son tour plus près de
l'image de la nature humaine sous-socialisée de l'économie moderne. Finalement, «Comme
dans le cas des échanges de réciprocité, la motivation des donateurs de cadeaux
socialement médiatisés est instrumentale, mais dans ce cas, l'attente de remboursement
n'est pas basée sur la connaissance du destinataire, mais sur l'insertion des deux acteurs
dans une structure sociale commune. » (Portes, 1998: 8)
Si l'on suit ce propos théorique, on observe un phénomène qui combine à la fois les
motivations instrumentales et consommatoires, et possédant également les traits d'un
échange purement économique.
Il s'agit ici de ce qu'on appelle en vietnamien les dịch vụ. Au niveau administratif, ce sont
de véritables agences de médiation entre la société majeure et les immigrés vietnamiens.
Ces services offerts au niveau communautaire sont toujours payés, et en raison des normes
imposées par une certaine ''habitude'', le prix croissant de ces services indique leur qualité,
ce qui ne devrait pas être le cas en théorie. Néanmoins, pour les clients, le fait de s'offrir le
service le plus coûteux élève leurs prestige. L’activation de ce type de capital exige donc
un investissement délibéré.
110 En originale anglais il s'agit de « Consummatory versus instrumental motivations » (Portes, 1998:7)
79
Ces agences, fournissant des services officiels, mais surtout non-officiels, opèrent
au Vietnam mais aussi en République tchèque. Au Vietnam, les dịch vụ, dans le but de
profiter des clients potentiels, ne donnent que l'information biaisée en présentant
exclusivement les aspects positifs de la migration. Ils transforment ou dissimulent
délibérément l'information qu'ils donnent aux clients par rapport aux conditions des
salaires, des obligations des impôts, le coût réel de la vie etc.(Freidingerová, 2014: 56)
Mon informateur, qui est en République tchèque depuis 1988, m'a expliqué que ces
agences très coûteuses peuvent endetter certaines personnes soit envers leurs familles, soit
envers leurs villages. Paradoxalement, les services que lui-même tente d'offrir à ses
compatriotes, sont, outre autres motivations, également basés sur le profit économique. En
tant que directeur de la section vietnamienne de l’Association de entrepreneurs en
République tchèque, il prévoit la mise en place d’une agence de conseil ayant pour but
l’insertion professionnelle des jeunes Vietnamiens diplômés. Son projet est donc un
exemple d'intention de mise en valeur et d’augmentation du capital social.
Mon deuxième informateur, monsieur N., appartenant à la première génération des
Vietnamiens diplômés en République socialiste tchécoslovaque, m'a expliqué qu'il a aussi
participé à cette forme de réseaux sociaux élaborés, qui se sont initialement formés à partir
des sentiments de solidarité au sein de la communauté vietnamienne. Aujourd'hui, "Il existe
des services différents. Juste si vous voulez tel ou tel papier, quelqu'un va le faire pour
vous. Naturellement, les différents services ont été créés. Dès le début, ils provenaient des
liens amicaux. Moi aussi, j'ai aidé quelques personnes, mais c'est naturellement que les
gens comprennent qu'on ne peut pas toujours aider gratuitement. Ces types de services se
sont créés de manière naturelle, et ils fonctionnent encore aujourd'hui. Par exemple,
aujourd'hui plusieurs entreprises gagnent leur vie grâce aux services qu'elles proposent,
comme par exemple de faire les déclarations de revenus pour les entrepreneurs. Depuis le
début, et nous étions parmi les premiers, nous avons essayer d'aider, mais nous nous
sommes rendus compte que ce n'était pas possible. Les dịch vụ existent encore en tant que
services, mais sous d'autres appellations : en faisant de la comptabilité, finance, bureaux
de représentation et, plus récemment, de l'assurance, et les prêts ".111
111 L'informateur N., L'entretien, le 3 avril, 2015 : „Existují různé službičky. Prostě pokud chcete ten a ten
papír, někdo to za vás udělá. Přirozeně vznikaly různé tyhle službičky. Ze začátku to bylo kamarádské,
já jsem taky pomohl několika lidem, ale to je normální vývoj, že si někdo všimne, že nemůže taky
vždycky pomoct zadarmo. Tyhlety služby vznikaly přirozeným způsobem. A fungují dodnes. Třeba
s daňovými přiznáními, teď několik firem se tím živí. Dokonce ze začátku jsme taky pomáhali jako
80
3.2.2. Les réseaux sociaux personnels
Les réseaux familiaux – basés sur la consanguinité
Quelle est la signification de la consanguinité pour chaque petite famille avec les
nouvelles normes sociales, quand la relation ancienne basée sur la consanguinité était
substituée par les relations avec le voisinage ? Au Vietnam, la famille nucléaire vit et
travaille dans un environnement où elles sont entourées par d'autres familles nucléaires qui
n’appartiennent pas à leur clan. Néanmoins, la tâche majeure de l’existence du clan est de
cultiver et conserver un sentiment d’appartenance commune.
Lorsque je me suis entretenu avec mon informatrice au sujet de sa famille élargie et
de ses visites fréquentes, elle a mentionné son hypothèse sur l’origine de la valeur de la
famille et son importance en rapport avec le village en tant qu’environnement traditionnel
au Vietnam :
« Les villages au Vietnam sont des communautés fermées, dans le vrai sens du
terme. Ils sont fermés et clôturés par des bambous. Les bambous poussent si vite, et ils ont
des feuilles vertes, de sorte que vous ne voyez pas la fin du village. Ainsi, les membres de
la communauté sont très proches et ils sont même tous liés (par le liens de parenté) en
quelque sorte. Les gens peuvent être liés indirectement, lorsqu'une famille marie sa fille
avec quelqu'un d'un village voisin. C’est pourquoi ces relations sont aussi fortes. Cela
provient de cet environnement fermé qui fait que la famille est très importante pour nous.»
112
Ce sentiment mutuel repose sur la parenté de sang et chacun est censé s’investir
afin de maintenir des bonnes relations inter-claniques. Le matériel ethnographique
démontre que le clan avait une valeur très significative au sein de la société vietnamienne.
Les facteurs qui soutiennent l’existence des clans sont les matériels comme la tradition de
la culture du riz et de l'eau, liés à la propriété et la distribution du travail partagé au sein du
clan, et les intangibles comme le partage d’une généalogie patriarcale consistante de toutes
les informations importantes des membres du même clan. Les facteurs tangibles se mêlent
jedni z prvních, ale pak jsme říkali, že jako ne. Jako služby dich vu pořád existují, jenom jde o jiné
služby: účetnictví, finance, zastupování úřadů a v poslední době i pojištění, půjčky.“
112 L'informatrice M., L’entretien le 3 avril 2015 , « Ta vesnice ve Vietnamu je uzavřená komunita, v
pravém smyslu. Je to zavřené a oplocené bambusy. Bambusy rostou tak rychle, a mají zelené listy, tak
vidíte jen na konec vesnice. Takže ta komunita je hodně uzavřená a dokonce všichni jsou si nějakým
způsobem příbuzní. Jestli nepřímo, tak jedna rodina možná dala dceru někomu z vedlejší vesnice. Tak
proto jsou ty vztahy tak pevné. Z toho prostředí je ta rodina pro nás hodně důležitá. »
81
souvent aux intangibles, notamment à cause du fait que le clan partage une propriété de la
terre pour la culture du riz dont les profits servaient au culte des ancêtres lors des
cérémonies et des fêtes pour les anniversaires (commémorations) de la mort des ancêtres.
Une liste généalogique est gardée dans l'autel des temples, souvent avec des photos ou des
images des ancêtres particuliers. A côté des clans, dont les membres étaient souvent
dispersés dans des villages géographiquement éloignés, les voisinages portaient une
signifiance pour les communautés villageoises. L’appartenance clanique était souvent
substituée par l’appartenance communautaire, ce qui se reflète dans l’existence des autels
du village (dinh en Vietnamien). Cependant, les paysans étaient engagés dans la
maintenance des liens communautaires. (Ngo Van, 1985: 32)
Dans son livre, James T. Fawcett précise que «les relations familiales ont un impact
durable sur la migration. Politiques, règles et même les normes peuvent changer, mais les
obligations entre les membres de la famille sont de nature respectueuses » (Fawcett, 1989:
678)
La formation de la communauté est exclusivement dépendante à la cohorte
d’arrivée et aux liens familiaux, formant les rapports de force hiérarchiques au sein de la
population vietnamienne, et le besoin pour les liens additionnels de la co-ethnicité en
dehors de leurs réseaux familiaux ne doivent pas être établis. Les chercheurs en études
migratoires se sont mis d'accord pour dire que : "En garantissant que le réseau social des
nouveaux migrants sera dominé par des liens avec la famille, la migration sous les
auspices de parenté encourage la participation intense continue de groupes de parenté
(Tilly and Brown 1967; Gurak and Caces 1992). Cela renforce la force des liens à des
membres de la société de l'origine et ralentit la création de liens avec les membres de la
société de destination, ce qui retarde l'intégration et l'assimilation."113
En contraste avec la théorie d’économie néo-classique qui perçoit la migration de
retour en tant qu’un échec ou une défaillance des attentes et de la réalisation des bénefits ;
l’approche de la nouvelle économie de la migration du travail (New economics of labor
migration : NELM), « détourne l'attention de la théorie de la migration de l'indépendance
individuelle [...] à l'interdépendance mutuelle », lorsque l’accent est mis sur le ménage ou
113 “By guaranteeing that the social network of new migrants will be dominated by ties with relatives,
migration under the auspices of kinship promotes the continuing intense involvement in kin groupes
(Tilly and Brown 1967; Gurak and Caces 1992). This reinforces the strength of ties to members of the
origin society and slows the establishment of ties with members of the destination society, retarding
integration and assimilation.”
82
la famille (Stark, 1991: 26). Selon ce livre fondateur de Oded Stark, le retour est considéré
comme le résultat naturel d'une expérience réussie à l'étranger au cours de laquelle les
migrants ont atteint leurs objectifs (à savoir, des revenus plus élevés et l'accumulation de
l'épargne), tandis que l'envoi de fonds fait naturellement partie de leurs revenus pour le
ménage (Cassarino:2004). Cette théorie était d’ailleurs mobilisée au sein d’études des
tendances migratoires des Vietnamiens au monde menées par la géographe sociale Tereza
Freidingerova (Freidingerova, 2014).
3.3 Les immigrés vietnamiens depuis La convention de 1974 au niveau
micro de l’analyse
3.3.1 Les motifs des Vietnamiens pour venir en République tchécoslovaque
Les envoi des fonds, les immigrés retournant (y compté ceux qui n'ont pas réussi,
mais qui l’avoueront jamais) avec les réseaux compatriotiques formés avant la Révolution
du velours, soutiennent les images biaisées de la vie en Occident - respectivement de la
République tchèque. Il s'agit ici de phénomène appelé par le sociologue Jiří Kocourek La
mythe de l’Occident (Kocourek, 2008: 238). Ainsi, les rapatriés vietnamiens nourrissent
l'idée, qui perçoit les pays occidentaux comme le paradis de la bien-être ce qui soutient la
future migration. Comme m'a expliqué l'informateur T., provenant d'une famille aisée, les
informations sur l'Europe portaient surtout sur la différence de niveau de vie entre Vietnam
et les pays d'Europe. « Je ne savais pas si la Tchécoslovaquie était bon, mais je savais
qu'en Europe il y avait un meilleur niveau de vie, supérieur à celui au Vietnam. Donc, je
voulais aller en Europe »114. En revanche, l'autre informateur V., qui provienne d'une
famille villageoise, ne savait rien de la Tchécoslovaquie avant son arrivée dans l'usine
tchécoslovaque. « Il n’y avait pas la télé donc je ne savait pas à quoi m'attendre. Tout ce
dont je me rappelle c'est qu’il faisait froid, et que c’était un choc. On ne savait même pas si
ça serait meilleur qu'au Vietnam. »115
L’ethnologue Brouček (Brouček, 2003) présente un prédicat selon lequel la
114 L'informateur T., L'entretien le 15 mars 2015, « Nevěděl jsem, který stát byl dobrý, ale věděl jsem, že v
Evropě je lepší životní úroveň než ve Vietnamu. Tak jsem chtěl do Evropy. »
115 L'informateur V., L'entretien le 15 mars 2015, « Neměl jsem televizi, tak jsem nevěděl, co očekávat.
Jediné, co si pamatuju (z příjezdu) je, že byla hrozná zima. To byl šok. My jsme ani nevěděli, o kolik to
bude lepší, než Vietnam. »
83
migration était strictement orientée vers le profit, et au cours du temps les motifs se sont
transformés en une vision pour l’installation permanente avec la formation de la famille.
En ce qui concerne les motivations pour le départ en Europe de l’Est ou à l’Union
Soviétique, il est vrai que la migration dirigée vers les pays d’Europe de l’Est
(contrairement à l’émigration des réfugiés) était poussée plus que par le simple besoin
d'échapper aux difficultés du pays d’origine détruit par la guerre. Mais, selon l’historien
responsable de l’École française d’Extrême-Orient à Hanoï, Andrew Hardy, la motivation
principale était l’améliorer la situation économique de sa famille. (Hardy, 2000: 241).
En revanche, à partir des entretiens, je tentais de découvrir si ces migrants venant
pour les contrats gardaient véritablement la motivation d'un retour tout au long de leur
séjour. Soutenus par la théorie de la nouvelle économie de la migration du travail, les
facteurs de décisions individuelles sont mis en contraste avec les objectifs collectifs de la
famille. Dans le cas des travailleurs (et surtout les plus jeunes apprentis et stagiaires)
vietnamiens, il est nécessaire de prendre en compte les aspects démographiques de leur
arrivée. La plupart des individus entrant en Tchécoslovaquie au cours des années 1970 et
1980 étaient des jeunes hommes célibataires âgés de 17 à 40 ans. Même s'ils avait délaissé
leur famille élargie au Vietnam, ils souhaitaient pouvoir rester pour profiter de l'occasion
de vivre dans un pays développé. Mon informateur de la deuxième génération m’a confié,
au sujet de son oncle qui est arrivé en 1988 au sein du contrat de travail déterminé a
accumulé son capital économique en Tchécoslovaquie, qu'il «a travaillé très dur et ce qu’il
a reçu, il l'a vendu. Il ne l'a pas envoyé au Vietnam... Il s’agissait de cadeaux des
événements, etc. »116
L'autre informateur qui provient d'une famille bien placée dans l'échelle sociale au
Vietnam (le père était un officier dans le ministère, ce qui signifie un statut économique
assez élevé à l'époque) et qui est arrivé en République socialiste tchécoslovaque pour faire
une apprentissage, m'a expliqué que ses motivations étaient différentes de celles des
Vietnamiens venant en tant qu'ouvriers. «J'étais jeune, donc je n'ai envoyé pas (d'argent à
ma famille). J'ai eu un point de vue différent, je voulais savoir plus de choses et apprendre
le mode de vie européen plutôt que d'avoir de l'argent en poche ".117
Il est important de signaler que les motivations étaient à la fois liées à l'intention
116 “Můj strýc pracoval velmi trvdě a co získal tak zpeněžil. Neposílal to do Vietnamu…Byly to dárky z
různých akcí a tak.”
117 L'informateur I., L'entretien le 30 avril 2015 ; « Já jsem byl mladý, tak jsem nic neposílal. Já měl jiný
pohled, chtěl jsem spíš všechno vědět a poznat evropský životní styl, než mít peníze v kapse.”
84
d'améliorer les conditions de vie, mais aussi, avant la fin de la guerre, d'échapper à celle-ci.
Contrairement aux émigrés politiques qui se sont réfugiés aux pays de l'Ouest, quel que
soit la motivation réelle, la migration vers les pays socialiste devait toujours être conforme
aux normes sociales et politique du régime. Il est également possible que les motivations
aient varié entre les deux générations, c'est-à-dire entre le fils envoyé et les parents
envoyant. «J'avais 19 ans et je ne savais rien de la Tchécoslovaquie. À l'époque, la
Tchécoslovaquie et le Vietnam avaient un contrat d'enseignement sur le principe d'aide
entre les pays communistes. A cette époque, étant donné que j'avais 19 ans, je devais faire
le service militaire. Il y avait une guerre. Je ne savais pas si j'allais mourir ou non. Mon
père était employé au ministère du Vietnam. Et la famille, dont le père ou la mère est un
fonctionnaire, a la chance de pouvoir demander d'envoyer les enfants à l'étranger pour
l'Occident. »118
L'étude menée par Andrew Hardy résume la valeur idéologique et sociale de
l'opportunité d'effectuer un échange au sein des conventions entre les pays du bloc
socialiste. « Dans les années 1980, à la différence d'aujourd'hui, le voyage en mission à
l'étranger représentait beaucoup et dans les administrations vietnamiennes, on jouait des
coudes pour en effectuer un. Une fois l'autorisation acquise, on taisait sa chance par crainte
des jalousies. Le déplacement à l'étranger des administrateurs nous renseigne sur la société
socialiste. Ce système soi-disant égalitaire créait une hiérarchie de privilèges qui jouait un
rôle fort de catégorisation des classes et ouvrait maintes possibilités de manipulation des
privilèges.» (Hardy, 2000: 236 ). Le voyage à l'étranger représentait l'un des plus beaux
achèvements de la réussite sociale et politique, ainsi qu'un gain économique appréciable
(Dang Phong, 1997). En effet, l'idéologie derrière la mise en œuvre du programme affectait
de façon latente les décisions des Vietnamiens, qui étaient déterminés à rentrer en
République socialiste tchécoslovaque.
« Tous ceux qui voulaient revenir après avoir étudié à l'étape post-universitaire ont
dû aller au Vietnam pour une orientation politique. J'ai eu quelques semaines au Vietnam
pour la formation politique et pour montrer aux gens quelle est la différence entre la
Russie et la Tchécoslovaquie. Il y a eu un groupe de la Tchéquie, de la Pologne, de la
Hongrie et les fadaises politique ne nous intéressaient pas. Alors que les étudiants qui ont
118 L'informateur T., L'entretien le 30 avril 2015 ; « Bylo mi 19 let a o Československu jsem vůbec nevěděl.
Tenkrát Československo s Vietnamem mělo učební smlouvu na principu pomáhání komunistické zemi.
Tenkrát jsem v 19 letech musel na vojnu. Byla tam válka. Nevěděl jsem jestli umřu nebo ne. Můj otec
byl zaměstnán na ministerstvu ve Vietnamu. A ta rodina, kde je otec nebo maminka státní úředník má tu
šanci požádat o zaslání dětí do zahraničí na Západ. »
85
étudié en Russie se sont présentés si activement. Donc, nous avons dit que nous avons un
peu de chance. En effet, une virgule (attestant la participation) est important. »119
Tandis que certains des immigré avaient des idées sur la République socialiste
tchécoslovaque, les motivations des immigrés étaient aussi influencé par des rumeurs. Mon
informatrice m'a expliqué :
« Comme tous les étudiants qui viennent étudier en République tchèque, nous avons
subi quelques tests et ils nous ont envoyé en aveugle. Certains ont été envoyés en Tchéquie,
une partie en Union soviétique, et je me suis retrouvé en Moldavie. Mes parents étaient
d'accord avec cela. Parce qu'il a été dit qu'il fallait que la fille aille dans un endroit où elle
aura le calme pour les études. Ensuite, il a été dit que ceux qui vont à l'Allemagne y vont
pour l'argent, et ceux qui vont en Tchéquie y vont pour la flânerie. Mes parents ne
voulaient pas que je reste à Moscou parce que c'est une grande ville, il y a beaucoup de
plaisirs et je n’aurais pas eu le temps pour étudier. Alors ils étaient heureux que je sois
dans un village. »120
Malgré leurs nouvelle formation, les rapatriés, qui ont passé par l'apprentissage
en République socialiste tchécoslovaque ont eu des problème avec l'insertion au marché du
travail dans leur pays natale, où l'économie était détruit par la guerre. Ce fait peut être un
facteur important pour le retour des membres de la première génération en
Tchécoslovaquie. L'ethnologue Ngo Van Le a aussi constaté ce limite de la réussite du
programme, qui a visé l'amélioration de la situation économique du Vietnam. En revanche,
celui ci avaient des effets contradictoires, lorsqu'il a intensifié l'émigration de ses cadres
formés.
« En réalité, après leur retour, certains des travailleurs vietnamiens ne peuvent pas
se remettre au travail, car après avoir quitté l'usine, un autre travailleur est déjà inclus à
leur place. Nous savons que certains travailleurs vietnamiens qui ont travaillé à Prague, ne
119 L'informateur P., L'entretien le 20 mars 2015 ; „Všichni, kdo se chtěli ještě vrátit po studiu na postgraduální stadium, museli do Vietnamu na politické soustředění. Musel jsem na několik týdnů do
Vietnamu na politické školení a tam si člověk uvědomil, jaký je rozdíl mezi Ruskem a
Československem. Tam vznikly skupiny z Česka, Polska, Maďarska a to politické žvanění nás
nezajímalo. Kdežto studenti, co studovali v Rusku tak se aktivně hlásili. Tak jsme říkali, že asi máme
štěstí. Museli jsme, čárka je důležitá.„
120 L'informatrice M., L'entretien le 3 avril 2015 ; « Jako všichni studenti co přijeli do Čech na studium,
absolvovali jsme nějaké zkoušky a poslali nás naslepo. Některé poslali do Čech, některé do Sovětského
svazu a já jsem se ocitla v Moldávii. Moji rodiče s tím souhlasili. Protože se říkalo, ať dcera letí někam,
kde bude klid na studium. Tehdy se říkalo, že ti, co jedou do Německa, jedou za penězi, a ti co do Čech
za flákáním. Rodiče ani nechtěli, abych zůstala v Moskvě, protože je to velké město, je tam hodně
zábav a už by mi nezbyl čas na studium. Tak byli spokojení, že jsem v nějaké vesnici.“
86
peuvent pas se remettre au travail après leur retour dans leur pays d'origine pendant un an
et demi. Ainsi, dans certains cas, les gens ne trouvent pas d'endroit commode pour leur
future famille après leur retour. » (Ngo, 1989: 135)121
Mon informateur monsieur P. a affirmé ce fait :
« Après être retourné au Vietnam, on est préoccupé par la façon dont on peut gagner sa
vie, mais personne ne s'y intéresse. Même si le socialisme a été critiqué ici, l'Homme avait
obtenu des choses de base. Ça n'a jamais été le cas au Vietnam. Ils ont déclaré un état
socialiste, et maintenant à nouveau un état communiste, mais les choses de base que l'on
attend de ces pays n'ont jamais été là. »122
3.3.2 L’apprentissage de la langue tchèque
Les facteurs affectant la maîtrise de la langue tchèque étaient non seulement la
qualité de l’apprentissage institutionnalisée au Vietnam avant leur arrivée et au sein des
centres de langues en République tchèque, mais les facteurs individuels comme le niveau
d’instruction obtenu au Vietnam et l’habitude de l’apprentissage de la langue ont aussi joué
un rôle important. En conséquence, le niveau de la maîtrise de la langue est dépendant de
l’intensité du programme d’apprentissage organisé par les autorités tchécoslovaques et
vietnamiennes après et avant le début du contrat. Aussi, il serait très pertinent d’analyser le
milieu socio-économique des citoyens vietnamiens qui sont venus en tant qu’étudiants, et
celui de ceux qui sont venus au sein de la vague des années 1980 en tant que travailleurs
contractuels. Pour le moment, je peux constater que le niveau de l’éducation acquise est un
des facteurs le plus parlant en ce qui concerne l’aisance de l’apprentissage. Les sources
provenant du Centre de langue Holešov qui relevait de l’Université de 17 novembre123
démontrent le processus de placement des diplômés vietnamiens dans des établissement
spécifiques selon leur domaine d’études pour le stage de deux ans. Chaque candidat était
énuméré et évalué selon les compétences dont il a fait preuve au cours de l’année
121 « Ve skutečnosti se něktěří z vietnamských pracujících po návratu do vlasti nemohou zařadit do práce,
protože po odchodu ze závodu je na jejich místo už zařazen jiný dělník. Víme, že někteří vietnamští
pracující, kteří pracovali v Praze, se po návratu do vlasti už rok a půl nemohou zařadit do práce.
Samozřejmě v některých případech po návratu do vlasti nenajdou výhodné místo pro budoucí rodinu.”
122 L'informateur P., L'entretien le 20 mars 2015 ; „Po vrácení do Vietnamu se zabývám tím, jak se dál
uživím, tam se tím nikdo nezabývá. Ten socialismus byl tady kritizovanej, ale člověk měl zajištěné
základní věci. To ve Vietnamu nikdy nebylo. Oni deklarovali socialistický stát a teď zase komunistický,
ale ty základní věci, co člověk očekává od takových států tam nikdy nebyly.“
123 NAČR, Vyřízení 1., Odbor školství Národního Výboru hl.města Prahy, září 1973, les annexes au
“Dodatek k našemu 138 57/73-21 z 26.7. 1973”, “Umístění vietnamských stážistů na SEŠ”.
87
d'apprentissage de la langue tchèque. Les compétences linguistiques étaient notamment
décrites et l'accent était mis sur l’évaluation du niveau de langue, ainsi que sur les qualités
et caractéristiques personnelles. Comme deux exemples contrastés, on peut mentionner le
cas de l’étudiant née le 3 juillet 1937, diplômé dans le domaine de l’électrotechnique
provenant du Hanoi qui a travaillé en tant qu’enseignant de l’électrotechnique dans l’école
technique secondaire et qui excellait au cours de son année de préparation pour le stage.
L’évaluation par le centre de l’apprentissage Holešov décrit que:
«Il est le plus intelligent de l’équipe de classe. Ce qui lui est caractéristique est sa
très bonne pensée logique et son raisonnement, un accès indépendant à traiter les tâches
(par exemple, lors de la création des présentations sur des sujets donnés et dans la
conversation) ... Au cours de la même année, il a acquis une bonne partie de fonds
essentiels du vocabulaire de la langue tchèque et de sa grammaire, et maîtrisé une certaine
quantité du vocabulaire de sa spécialisation ... Il est très actif dans les matières
professionnelles, il a une bonne connaissance des mathématiques, de la chimie, et de la
physique. Il a un grand intérêt pour la littérature tchèque qu'il étudie lui-même afin de
perfectionner sa connaissance de la radio- technique. »124. L’autre cas est l’étudiant né le
28 novembre 1942 en Haiphong, diplômé dans le domaine de la polytechnique,
spécifiquement dans la production et transformation de l’énergie électrique. Il a travaillé en
tant qu’enseignant des équipements électroniques dans des centrales au sein de l’école
technique secondaire. Selon son évaluation,
«Il a un cœur tendre, il est très gentil, mais lent et moins réceptif. Après toute
l’année, il n’a pas appris à lire correctement. Il est capable de mémoriser des paragraphes
entiers, mais lorsqu’il est demandé une question des plus faciles à propos d'un texte, il est
en échec, il ne réagit pas. En conséquence, tenir une conversation avec lui en tchèque est
quasi-impossible. Naturellement, il ne maîtrise pas d’autres langues étrangères. Ainsi, ses
propos écrits sont très simples et brefs. Il est très assidu et tenace, capable d’étudier sans
arrêt plusieurs heures pendant la nuit et la journée, désormais avec des résultats mais plutôt
légers. Dans les matières professionnelles, il se manifeste assez passivement, il ne
124 NAČR, Ministerstvo školství, dne 19.6. 1973, Studijní středisko University 17.Listopadu, Holešov, třída
Obránců míru, « Je nejchytřejší a nejinteligentnější ve třídním kolektivu . Příznačné je pro něho velmi
dobré logické myšlení a uvažování, samostatný přístup ke zpracování úkolů (Např.při tvoření referátů
na daná témata či při konverzaci). Během roku si osvojil dosti široký základní slovní fond českého
jazyka a jeho gramatiku, zvládl i určité kvantum odborné slovní zásoby.V odborných předmětech je
velice aktivní, má dobré znalosti jak v matematice, tak v chemii a fyzice. Má velký zájem o studium,
sám se odborně zdokonaluje ve studiu české radiotechnické literatury. »
88
s’implique pas dans l'enseignement, il n'est guère possible de communiquer avec lui.»125
Nous observons des variations d’intégration de la langue parmi les Vietnamiens qui
sont venus en tant qu’étudiants et ceux qui sont venus en tant que travailleurs contractuels.
Comme mentionné plus haut, la maîtrise de la langue tchèque représentait un avantage
pour la première génération de Vietnamiens. Cette maîtrise, avec des autres aspects du
capital culturel, comme la connaissance de l’environnement économique et législatif de la
société d’accueil, étaient mobilisés afin d’assurer leur position au sein de la communauté.
Selon mes observations, la structuration interne de la diaspora dépendait fortement
de cet aspect. C’est-à-dire, selon mon analyse des témoignages personnelles, que le niveau
de la langue acquis avant l’arrivée en République socialiste tchécoslovaque était un facteur
décisif pour le niveau d’insertion à la société tchécoslovaque. Selon la documentation
limitée disponible pour mon analyse historique, l’intensité et la qualité de la formation en
langue tchèque était incomparablement meilleure dans le cas des Vietnamiens venus pour
l’éducation supérieure que pour ceux arrivant sous les contrats de travail. Les conditions de
l’insertion étaient donc établies différemment par rapport au but du séjour en République
tchécoslovaque. Les Vietnamiens qui sont venus en tant qu'étudiants dans des universités
ont eu deux années d’éducation linguistique.126
Les Vietnamiens vivant en République tchèque ont même créé une désignation pour
la communauté dans son ensemble, et beaucoup de différents termes et comparaisons qui
servent pour la désignation de certains groupes de leurs propres communautés.
Cette auto-désignation, selon la théorie du Richard Jenkins (Jenkins, 1997), était
fondée à partir de la catégorisation d'une part de la population majoritaire. Par exemple,
l’expression Việt Xu, qui se réfère à la signification d’un Vietnamien tchèque, que les
Vietnamiens utilisent entre eux comme une propre désignation. Cependant, l'adjectif "Xu"
125 NAČR, Ministerstvo školství, dne 19.6. 1973, Studijní středisko University 17.Listopadu, Holešov, třída
Obránců míru, « Je dobrosrdečný, slušný, ale dost těžkopádný a méně chápavý. Za celý rok se nenaučil
dobře číst. Dovede se mechanicky naučit celé dlouhé odstavce zpaměti, ale při sebelehčí otázce k
danému textu ztroskotává, vůbec nereaguje. Z toho vyplývá, že běžná konverzace s ním vedená česky je
skoro nemožná. Samozřejmě neovládá žádný jiný cizí jazyk. Též jeho písemné projevy se vyznačují
značnou jednoduchostí a prostotou. Je velmi pilný a houževnatý, dovede se učit mnoho hodin ve dne i v
noci, bohužel s výsledkem velmi nepatrným. V odborných předmětech se projevuje dosti pasivně, do
výuky se nezapojuje, težko se dá s ním domluvit.
126 Mon informant, qui est venue en tant qu’étudiant a subi « une année de l’apprentissage de la langue au
Vietnam et ensuite encore une année en Tchéquie. Chaque classe a eu une enseignante ou un enseignant
qui avait étudié ici (il réfère à la République socialiste tchécoslovaque) et puis encore un locuteur natif
en alternance dans des classes. » « Rok jazykové výuky ve Vietnamu, a pak ještě rok v Čechách. Každá
třída ve Vietnamu měla jednu učitelku nebo učitele co studovali tady (v ČSSR) a pak ještě jeden
rodinnej mluvčí a ten střídal třídy.“
89
[Sou] n’est pas né de la traduction du mot "tchèque" (SEC), mais par la dérivation
phonétique de la syllabe finale du mot "vietnamien" en tchèque. Les Vietnamiens l’ont
entendu quand ils ont parlé «des Vietnamiens » et ils l’ont vu comme un mot séparé, et la
lettre "ts" distingués comme "s". (Vasiljev, 2006: 123). Ainsi, pour être capable de
comprendre cette formation de l’identité ethnique, il nous faut prendre en compte les
situations sociales dans lesquelles elle se produit et se reproduit, reprenant les termes de
Jenkins ; les contextes de la catégorisation ethnique, lesquels il classifie en tant que
formels et informels. Il est important de comprendre que ce ne sont pas seulement les
« catégorisateurs » dont les propos influencent l’identité de catégorisés. L’action de
donner un nom aux autres influence aussi la formation identitaire de soi. Les
expressions vietnamiennes ne reflètent pas seulement l’appartenance au groupe
ethnique, mais aussi la place au sein de la structure hétérogène de ce groupe là.
Ce phénomène est décrit par la géographe Tereza Kušniráková dans son étude
portant sur la structure interne de la diaspora vietnamienne en république Tchèque.
Parmi les sous-groupes particuliers de la communauté vietnamienne sommes parfois
ceux qui sont dans la République tchèque pendant une longue période (nous pouvons
dire des décennies). L'expression utilisé pour les désigner est 'les moisis' - en termes de
la métaphore tchèque, quelque chose qui est si vieux qu'il est moussue. Les deux termes
indiquent que ces gens sont, en raison de la durée de leur séjour en République tchèque,
très bien informés sur l'environnement local. Les autres termes qui se réfèrent également
à la durée du séjour, indiquent que ces gens sont en République tchèque depuis si
longtemps qu'il est plus ou moins dans les yeux du compatriote vietnamien comme
Tchèques Tay Hoa (Occidentalisation) et Mat Goc (signe négatif pour ceux qui ont déjà
perdu leur racines). (Kušniráková, 2013: 22)
3.3.3 Les
envois
de
fonds
aux
membres
sédentaires
des
familles
vietnamiennes.
Une activité transnationale
« Les envois de fonds se produisent à la suite de la participation des migrants à ces réseaux
et représentent l'effort des migrants pour construire et maintenir le capital social. Le capital
social se réfère à la capacité des individus à obtenir des ressources par le biais de leurs
90
relations continues avec d'autres membres du réseau.» (Grieco, 2004: 245).127
La tentation des travailleurs vietnamiens pour la réalisation d’envois de fonds se
reflète aussi dans les documents officiels du Ministère du travail des affaires sociales à
travers des demandes de l’ambassade du Vietnam qui lui étaient adressées.
Le point important dans cette étude est le fait que les envois de fonds étaient dans le
cadre du programme d’internationalisme socialiste formellement dirigés et organisés.
Selon les rapatriés résidant à Hanoi, interrogés par l'historien responsable de l’École
française d’Extrême-Orient à Hanoi, Andrew Hardy, les fonds reçus par la famille au
Vietnam étaient perçu comme une sorte d'investissement pour la famille élargie. « Parce
qu'ils voulaient faire des achats et les revendre. On ne pouvait pas faire de versements
d'argent à cette époque. Ils touchaient donc leur salaire, faisaient la queue au magasin de
l'État, puis expédiaient leurs achats par la poste. La famille les réceptionnait et les
revendait. On ne pouvait pas envoyer des dollars — des devises étrangères interdites — à
l'époque. » (Hardy, 2000: 242)
Dans le document du Ministère du travail et des affaires sociales portant sur la mise
en place de la formation et l’amélioration des compétences annuellement actualisé pour
l’année 1980, nous pouvons trouver le parti qui réglemente l’envoi de fonds en République
socialiste du Vietnam par les employés vietnamiens. Il stipule que les citoyens vietnamiens
peuvent envoyer les économies de revenu mensuel qui dépassent 900 Kcs/mois en
République socialiste du Vietnam. Ainsi, ils peuvent envoyer les économies épargnées
pendant les mois précédents. La commande de transfert pouvait être donnée exclusivement
à l’organisation tchécoslovaque au sein de laquelle les citoyens vietnamiens sont employés,
et cela pouvait se faire seulement une fois par mois, le jour de paie. Ensuite, la Banque
nationale tchécoslovaque mettait en place les transfert selon la division entre les montants
destinés à leurs famille et ceux consacrés (accordés) au développement de l’économie
nationale de la République socialiste du Vietnam.128
Les répondants vietnamiens interrogés au cours de ma recherche m’ont expliqué que les
conditions formelles n’étaient pas si pratiques au niveau individuel. « Quand on avait
127 Remittances occur as the result of migrants’ participation in these networks and represent the migrants’
effort to build and maintain social capital. Social capital refers to the ability of individuals to obtain
resources through their continued relationships with other network members (Portes 1995, 1998).
128 Archives du Ministère de travail et des affaires sociales, “Pokyny pro věcné, organizační a finanční
zabezpečení odborné přípravy a další zvyšování kvalifikace občanů vietnamské socialistické republiky
v československých organizacích”, juin 1980.
91
quelque chose à envoyer, ils savaient déjà comment l’organiser : soit par le cargo avec les
aérolignes tchécoslovaques, soit par les conteneurs de fret. Normalement, par le train et le
bateau, le déplacement dure environ un mois et demi. Habituellement, quelqu'un du groupe
s’en est chargé et il a ordonné l'ensemble du conteneur. Et personne n’avait assez d'argent
pour le conteneur entier, alors on a dû s’organiser pour que le plus de monde y participe. »
129
Ici, on constate l'importance de la coopération au sein de la communauté
vietnamien, lorsque les immigrés ont partagés les frais de transport du cargo. Or, le partage
ne comprend pas seulement l'aspect matériel, mais aussi intangible, vu les informations
concernant les possibilités et les astuces visant l'adaptation des normes officielles. Ces
pratiques s'inscrivent encore dans les motifs de séjour provisoire, lorsqu'on met en avant le
fait que ces Vietnamiens ont investi dans leurs ''avenirs'' au Vietnam. Néanmoins, ceux qui
ont décidé de s'installer en Tchécoslovaquie de façon permanente continuent de soutenir
leurs familles élargies au Vietnam. Comme me l'a rapporté mon informateur : « Les
Vietnamiens qui étaient en Tchécoslovaquie en tant que travailleurs ou pour l'apprentissage
sont ont beaucoup travaillé, puis ils ont économisé et acheté des choses qu'ils pouvaient
revendre au Vietnam. Tout cela dans le but d'améliorer les conditions de vie des
familles. »130
Cette pratique sociale se projette dans les rapports macro-économiques entre les
deux pays. Effectivement, le candidat vietnamien en ethnologie présente dans sa thèse un
propos selon lequel : « Pendant leur séjour à l'étranger, les travailleurs gagnent et
économisent le plus possible d'argent pour acheter des marchandises pour le montant
maximum autorisé et les envoient à leur patrie, où ils devront en quelques années
contribuer à l'élévation économique de leur famille. »131 (Ngo, 1989: 135). Comme il a été
démontré au sein de sous-chapitre portant sur les motifs des Vietnamiens pour venir en
République tchécoslovaque, on peut constater que la différence entre les niveaux de vies
129 L'informateur I., L’entretien au sein du SAPA – le centre commercial vietnamien, le 10 mars
2015. « Když člověk měl co posílat, tak oni to tak už uměli organizovat: jednak kargo s ČSA nebo
kontejnerama. Normálně kontejner a pak vlakem a lodí, cestuje tam asi měsíc a půl. Obvykle se někdo
ze skupiny toho ujal a objednal se celej kontejner. A nikdo neměl peníze na celej kontejner a muselo se
organizovat, aby bylo více lidí.“
130 L'entretien le 15 mars 2015 ; « Vietnamci, co tu byli jako pracovní síla v Československu nebo na učení
tak většinou chodili do práce a šetřili a nakupovali věci, aby je mohli ve Vietnamu prodat. Protože to
zlepšovalo životní úroveň rodiny. »
131 « Během pobytu v cizině pracovníci co nejvíce vydělávají a našetří peníze, za které nakoupí zboží za
maximální povolenou částku a posílají je do vlasti, kde mají za několik let přispět k ekonomickému
povznesení rodiny. »
92
du Vietnam et de la Tchécoslovaquie peut avoir des effets sur les réseaux sociaux
diasporiques, à la fois de façon directe et indirecte. Toutefois, il s'agit d'un facteur
important dans la maintenance et l'intensification de la mobilité. Cependant, ce n'est pas un
hasard si, au sein de mon analyse, l'envoie des fonds est placé au niveau micro-sociale. Je
ne tente pas ici de mener une étude sur les effets du développement de la migration ou de
la mobilité humaine. Le but de cette partie était de souligner l'importance de la nature
communautaire de la diaspora vietnamienne en Tchécoslovaquie et de l'appartenance au
clan. Chez les Vietnamiens, les fonds sont directement destinés soutenir exclusivement la
famille. Les tendances humanitaires centrées au public plus large, qui sortaient de
l'appartenance communautaire, sont, malgré les effets massifs de la guerre, très rares.
En nous fondant sur la base des propos de la théorie des réseaux, on peut donc dire
que l’envoi de fonds est étroitement lié au processus de la réunification familiale.
3.3.4 Les conditions de la formation de la famille et les relations intimes
Les nouvelles familles se forment
Cette partie tente de répondre aux questions suivantes : Quelles étaient les
conditions de création des familles, dans le cadre du programme d’internationalisme
socialiste? Quelles stratégies les Vietnamiens ont ils adoptés pour la formation des
couples? Quelle est la raison du nombre très limité des couples inter-ethniques en
République tchèque?
La parenté transnationale est également étudié par les chercheurs spécialisés, et ils
ont identifié des changements importants dans la structure sociale de la famille, le sexe, les
rôles, ceci résultant de la nécessité pour les migrants de maintenir des liens dans des
conditions différentes. Les auteurs mentionnent la notion d'économie morale transnationale
parentale, qui implique des stratégies de mobilité collective, de renforcement des réseaux
de parenté par des mariages et l'accumulation du capital social dans la société d'accueil.
«Parce que les migrants ont besoin de maintenir des liens de sorte qu'ils aient des contacts
sociaux et du soutien sans devoir retourner dans leurs pays d'origine, réseaux de parenté
peuvent être utilisés de façon exploité, un processus de différenciation de classe
transnationale dans laquelle le travail d'extraction plus prospère de personnes définie
comme parenté ». (Ballard 2001, Bryceson & Vuorela 2002, Chamberlain 2002 in Lewitt,
Jaworski: 2007, 137)
93
Dans le cas des Vietnamiens à Prague, le réseau social est passé d’un réseau
communautaire à un
réseau basé sur la consanguinité, c’est-à-dire qu’on parle
d’appartenance au clan. Suivant mes hypothèses, le cadre normatif institutionnel présentait
un facteur important dans la formation de ce réseau de parenté. Considérant le statut légal
des premiers stagiaires, les Vietnamiens sont venus en Tchécoslovaquie en tant que
célibataires ou mariés en laissant leur conjoints et enfants au Vietnam, ainsi ils ne
pouvaient voir leurs familles que sporadiquement et ils étaient en contact par courrier.
Comme cela a été démontré à partir des documents et des comptes rendus des
réunions des cadres communistes, l'administration tchécoslovaque établissait des règles
totalitaristes concernant la vie quotidienne, et ce meme dans la vie intime des travailleurs
vietnamiens. Par exemple, les stagiaires et les ouvriers vietnamiens étaient logés dans des
résidences étudiantes séparées par sexe, les dortoirs, avaient des règles qu’ils devaient
suivre. Une de ces règles par exemple, définissait l’interdiction de l’accueil des invités
pendant la nuit.132 Et il y avait même des sanctions envers les ouvrières qui tombaient
enceintes ; la grossesse était considérée comme étant irresponsable, une limite au travail, et
présentée dans la plupart des cas comme une cause justifiant une déportation précoce.
Ainsi, mon informant m’a expliqué que les stagiaires vietnamiens n’avaient pas beaucoup
d’occasions de rencontrer des collègues tchèque en dehors de l’apprentissage.
"Ils n'avaient pas beaucoup de contacts. Les vieux Tchèques, qui ont fait
l‘apprentissage vous diront qu'ils voulaient échanger quelques mots ou aller quelque part
avec les étudiants vietnamiens mais que ce n’était pas trop possible. Ils avaient un accès
limité. L'année 1980 a été une percée en ce qui concerne le relâchement des règles.
Auparavant, il y avait un régime très strict. Lorsqu’ils voulaient aller quelque part, ils
devaient revenir à 21h, afin de ne pas faire de bêtises. Le Vietnam a officiellement déclaré
qu’ils étaient des pays amis, mais ils ont pris terriblement soin de ne pas gâter leurs
élèves.“133
132 MPSV, “Pokyny pro věcné, organizační a finanční zabezpečení odborné přípravy a další zvyšování
kvalifikace občanů vietnamské socialistické republiky v československých organizacích”, „Ubytovací
řád na ubytovnách », juin 1980.
133 L'informateur P., L’entretien le 20 mars 2015, «A taky nebylo moc kontaktů. Staří Češi, co studovali na
kolejích vám řeknou, že chtěli s Vietnamských studentem prohodit pár slov nebo někam jít a to moc
nešlo. Oni měli omezený styk. Rok 1980 byl zlomový v tom, že se to hodně uvolnilo. Předtím tady měli
velice přísný režim. Když někam šli, tak se museli v 9 vrátit. Bylo to, aby ten člověk něco neprovedl.
Vietnam oficiálně prohlásil, že to jsou přátelské státy, ale strašně dávali pozor, aby nepokazili své
studenty.“
94
Dans la société d’accueil nous avons pu observer une transformation des rôles
sociaux traditionnels, des hiérarchies au sein de la communauté en formation, ainsi qu’au
sein de la famille. Les sources secondaires ethnographiques historiques nous sont utiles
pour faire une description des relations sociales au sein de la société vietnamienne. Un des
principaux vietnamologues tchèques, Ivo Vasiljev, résumait l’antique influence du
Confucianisme sur la société vietnamienne, où les relations fondées sur la subordination et
l'obéissance étaient un facteur puissant, de la façon suivante : « Cette doctrine inculqué
depuis des millénaires a profondément affecté les relations entre les personnes au Vietnam
comme ailleurs en Extrême-Orient. Bien que l'histoire soit d'un côté une lourde charge, elle
a d’autre part de bons côtés. C’est le fondement de ce qui était au Vietnam et l'ExtrêmeOrient, pas toujours injustement considéré comme des valeurs positives humaines, des
mœurs douces et de bonnes manières. »134 (Vasiljev, 1999: 241). Les valeurs confucéennes
restent toujours présentes, et mes informateurs et contacts m’ont confirmé que ce sont en
effet ces valeurs là, qui les différencient de la majorité tchèque.
Une transformation des rôles sociaux traditionnels et des hiérarchies au sein de la
société ainsi qu’au sein de la famille a pu être observée. Les nouvelles familles se
formaient dans le contexte du nouvel environnement. Il s'agissait d'une conséquence de
l'approche nouvelle de la société d'accueil, qui devenais dès lors motivée par l'idée d’une
implantation permanente en République socialiste tchécoslovaque. Néanmoins, les familles
inter-ethniques ne sont qu'un phénomène très exceptionnel. A partir de l'année 1989, le
cadre de la nouvelle législature de la République fédérale aurait pu encourager la formation
de ses unions. En revanche, la propagande vietnamienne visait le retour des cadres formés,
et la formation de couples sur le territoire du pays d'accueil n'était donc pas souhaitable.
Les témoignages confirment ce propos :
« Avant 1989, la possibilité de rester ici était presque nulle. Seulement si on fondait
une famille avec une ou un Tchèque. Mais nous n’étions pas inquiétés à ce propos, c’était
quelque chose qui allait au-delà de nous. Néanmoins, de temps en temps quelqu'un fondait
une famille mixte, mais ce n’était que peu répandu.. C’était en raison de l'éducation et de
134 « Toto učení vštěpované po tisicíletí hluboce poznamenalo vztahy lidí ve Vietnamu jako i jide na
Dálném východě. Jakkoli minulost je na jedné straně velikou zátěží, na druhé straně má i své dobré
stránky. Je totiž základem toho, co se ve Vietnamu i na Dálném východě nikoli neprávem dodnes
považuje na kladné lidské hodnoty, jemné mravy, a krásné obyčeje. »
95
la propagande, que le fait de trouver un conjoint tchèque était perçu comme quelque chose
qu'on essayait d’éviter plutôt que de faire. »135
S'adaptant à leur nouvel environnement, et étant séparés de leurs conjoints et
enfants, ils pouvaient trouver un nouveau compagnon parmi les autres travailleurs
vietnamiens qui se trouvaient dans une situation similaire. Pourtant, ils ne quittaient pas
leur partenaires au Vietnam et continuaient à être en contact et leur envoyer les fonds.
Ainsi, parmi ses interlocuteurs arrivant avant l'année 1993 marqué par la loi de
regroupement familial, Brouček a observé un phénomène de coexistence transnationale
synchronique des couples vietnamiens. (Brouček, 2003: 22-25)
Au cours des années de présence de la diaspora sur le territoire tchèque des changements
démographiques ont pu aussi être observés relatifs aux individus célibataires qui étaient
venus en tant que représentants de leur patrie, à leur appartenance politique et à une
certaine unité familiale – les familles en elles-même, liées par des relations familiales.
3.3.5.
Les différences intergénérationnelles
Comme il en a été question dans les parties précédentes de cette étude, il existe des
différences internes
au sein de la population vietnamienne. Mais malgré toutes ces
différences et ces séparations dans la diaspora, il existe une unité sociale spécifique de
référence qui est universelle pour tous les Vietnamiens. Il s'agit de la famille, dont le sens
d'appartenance est incontestable. Cependant, ces différences internes peuvent se projeter
dans les relations entres les familles spécifiques, et spécialement elles peuvent influencer la
formation de la structure de la diaspora des 1,5 et deuxième générations. S'appuyant sur les
résultats obtenus dans la recherche portant sur l'influence de l'éducation mise-en-place par
les parents Vietnamiens sur leurs enfants136, j'ai déjà constaté certaines stratégies
employées par des parents, fortement fondées sur leur statut socio-économique, ce qui a, de
manière diffuse, influencé les choix et l'intensité d'intégration des enfants à la majorité
tchèque. Il s'agissait par exemple de l'influence sur les choix scolaires des enfants, quand
135 L'informateur J., L'entretien le 21.3. 2015, „Před rokem 1989 zůstat tady bylo skoro nulové. Jedině
člověk musel založit rodinu s Čechem nebo Češkou. Ale to nás tehdy nezajímalo, to je něco, co jde
mimo. Tedy někdo jednou za čas založil rodinu, ale to nebylo rozšířené. Bylo to výchovou a asi
propagací, že to je něco, čemu se člověk snaží spíše bránit než to udělat.“
136 Tereza Horáčková, Le mémoire de la Licence, “Vliv rodičů na integraci Vietnamských dětí v české
společnosti », Université Charles de Prague, Institute des études sociologiques, Prague, 2012.
96
les enfants des familles aisées étaient placés aux lycées et universités privés, ou ils
restaient parmi leurs amis Vietnamiens, alors que les jeunes provenant des familles
moyennes sont systématiquement envoyés en scolarité dans les lycées nationaux, où ils se
mêlent avec les jeunes tchèques dans les relations quotidiennes. L'éducation est considérée
comme la clé de la réussite dans la vie par les Vietnamiens aux revenus faibles ou moyens
en République tchèque, tandis que les Vietnamiens qui ont réussi économiquement (il s'agit
des managers et propriétaires de grandes entreprises) comptent sur leurs enfants pour
reprendre, maintenir et faire prospérer leur entreprise.
Au cours de cette étude j’ai essayé de saisir les différences intergénérationnelles en
tentant de répondre à la question : est-ce que les réseaux sont-t-ils acceptés et maintenus
par la deuxième génération?
De façon générale, on peut constater une rupture entre le capital social acquis
pendant l’éducation et sa mise en valeur. Les enfants sont poussés à réussir à l’école et une
fois qu’ils finissent leur diplôme ils sont sensés continuer à diriger la petite entreprise
commerciale initiée par leurs parents, et assurer et approfondir son existence sur le marché.
Le choix d’université est fait en accord avec la possibilité de continuer la profession
commerciale commencée par ses parents137, il s’agit donc de motiver ses enfants à choisir
un cursus économique. Néanmoins, les parents ne prennent pas en considération le fait de
savoir si l’enfant a la capacité de prendre la responsabilité de la direction et de plus, la
question de hiérarchie familiale se pose. En conséquence, l’enfant est dans une position
inférieure aux autres dans l’entreprise en fonction de son âge, sexe et on lui manque de
respect. C’est ainsi, que les valeurs traditionnelles se projettent dans le fonctionnement des
réseaux.
137 Selon Monsieur P. « le 95 % des Vietnamiens sont des enterpreneurs ».
97
CONCLUSION
Les Vietnamiens en Tchécoslovaquie– une rétrospective et une perspective a l´avenir
La visite de la délégation gouvernementale de la République démocratique du
Vietnam, en République socialiste tchécoslovaque en 1974 s'est achevée dans un grand
espoir mis dans la préparation des cadres de masse prévue en Tchécoslovaquie. Les
conditions en étaient prometeuse en raison du niveau élevé du développement 'économique
et technologique de ce pays de l'Est, et en raison du bon rendement de travail de 2.1 milles
stagiaires vietnamiens formés dans des entreprises locales depuis 1967.
138
Depuis cette
date là, au sein du programme programme de l´incorporation de la nouvelle main d´oeuvre
vietamienne, dont contrôle et la qualité d'organisation a diminué, plus que 30 000
personnes d'origine vietnamienne sont passées par l'apprentissage en République socialiste
tchécoslovaque, Leur séjours étant initialement prévus être temporellement limités et
strictement surveillés, ils se sont pourtant transformés en vie permanente en quête de la
croissance économique au sein du pays d'accueil transformé.
Dans ce mémoire, j'ai tenté de démontrer, que la connaissance du contexte
historique de la formation des réseaux sociaux-ethniques, encadrée par le programme
intergouvernemental de l'échange de la main-d'œuvre,
est très importante pour la
compréhension de la forme actuelle de la population immigrée vietnamienne en
République tchèque. Mon travail visait à déterminer l'impact du programme sur
l'adaptation des immigrés vietnamiens à la société d'accueil, respectivement la République
socialiste tchécoslovaque.
La recherche a été basée sur les l'analyse des entretiens avec des témoins, qui ont
vécu ce programme, et sur l'étude des documents administratifs tchécoslovaques provenant
de la période entre 1974 et 1989/93. La première date étant, l'année de la mise-en-place de
la Convention entre le Gouvernement de la République socialiste tchécoslovaque et le
Gouvernement de la République démocratique du Viet Nam sur la formation des citoyens
138 MPSV, “Ujednání mezi federálním ministerstvem práce a sociálních věcí ČR a ministerstvem práce
VDR o odborné přípravě občanů VDR v československých organizacích,” signé à Hanoi le 8 avril 1974
par le ministre du travail tchécoslovaque monsieur Michal Štanceľ et le ministre vietnamien de travail,
monsieur Khieu.
98
de la République démocratique du Vietnam dans les organisations tchécoslovaques 139.
L'année 1989 fut l'année de la chute du régime communiste et enfin l'année 1993 vit la
séparation de la République slovaque et la naissance de la République tchèque.
L'étude soutient le postulat que le programme influençait directement l'intégration
de la première génération des Vietnamiens, mais aussi, elle montre que de façon latente, le
programme influençait la deuxième génération des arrivées du Vietnam par les réseaux
ethniques dont il donnait naissance.
L'analyse des sources primaires, faite dans le premier ère chapitre et ancrée dans un
cadre théorique constitué par des concepts de la collectivité (le groupe et catégorie)
ethnique, transnationalisme, la diaspora, la famille d'immigrés, la théorie des réseaux et le
capital social était basée sur trois niveaux, afin de saisir les facteurs qui affectaient
l'adaptation de la première génération. Le deuxième chapitre propose un point d'appui pour
l'analyse, en présentant le programme de façon descriptive. Au niveau macro-sociale, les
facteurs, que j'ai découvert d'être importants pour l'adaptation des immigrés vietnamiens
sont les aspects normatifs institutionnalisés. Comme présenté plus haut, les règles de
l'Ambassade vietnamienne à Prague étaient strictes et très pesants dans la vies des ces
immigrés pendant la durée des leur contrats. L'état vietnamien n'hésitait pas d'intervenir
même dans la vie intime des ses citoyens travaillant en République tchèque. Les apprentis
et stagiaires étaient logés dans les résidences étudiantes et les ouvrières dans des auberges
spécialement prévus pour cet effet. La vie quotidienne des immigrés était programmée
selon les normes de l'ambassade vietnamienne et les fabriques spécifiques dans lesquelles
les Vietnamiens étaient employés. Les hommes et les femmes étaient séparés et au cas
indésirable de la grossesse d'une des travailleurs, la déportation immédiate était presque la
seule solution.
140
Selon ma recherche, il est indispensable de percevoir le rôle de l'Etat
comme un agent actif dans la création de frontières culturelles et dans l'organisation et la
répartition des ressources disponibles entre les différentes catégories ethniques.
La sous-partie du chapitre III, portant sur les immigrés vietnamiens en
139 NAČR, “Dohoda mezi vládou Československé socialistické republiky a vládou Vietnamské
demokratické republiky o odborné přípravě občanů Vietnamské demokratické republiky v
československých organizacích” signé à Hanoi le 8 avril 1974
140 Aussi, le gouvernement tchécoslovaque a procédé à une quête d’acculturation des immigrés pour leur
faciliter l'adaptation a l´ environnement tchèque et augmenter ainsi leur efficacité au travail. Ils ont reçu
des vêtements, sous-vêtements; articles de toilette dés leur arrivée à Prague, tous en style
tchécoslovaque, occidental, ainsi qu'ils étaient seulement offert la nourriture vietnamienne au début de
leur séjour. (Alamgir, 2013: 8-9).
99
Tchécoslovaquie au niveau intermédiaire d’analyse est consacrée à la question de la
structuration interne de la diaspora, telle qu’elle est marquée par différents flux migratoires
(Les Vietnamiens provenant des familles aisées d’élites éduqués venus avant 1974, Les
Vietnamiens de la classe moins aisée dans le but d’un enrichissement économique rapide).
Dans cette partie de l'analyse, qui s’appuie sur les propos précédents de la hétérogénéité de
groupe ethnique, je me suis efforcée d'expliquer la diversité structurelle interne à la
diaspora vietnamienne résidente à Prague. Cette analyse se fonde notamment sur les
témoignages sur la base des sources secondaires (Alamgir, 2013; Broucek, 2003 ;
Koucourek, 2008 ; Kusnirakova, 2013).
Le groupe de résidents anciens141, ceux venus dans le cadre des accords socialistes
ou même dans les années 1990 se présente par des stratégies de la vie. En premier lieu,
nous pouvons constater une orientation de la construction de sentier en créant un savoirfaire pragmatique spécifique. (Balaz, Williams). En effet, ceux immigrés pionniers
devaient construire l´image de la communauté, grâce a la coopération avec les bureaux
tchécoslovaques, adoptant une stratégie administrative conforme ainsi que l'attitude envers
la
majorité
tchécoslovaque.
La
cohésion
des
flux
migratoires
vietanmiens
prérévolutionnaires à Prague peut être expliquée par le fait que personne parmi les
premiers immigrés n'avait des relations familiales préliminaires dans la métropole tchèque.
Le fait que à nos jours, il n'est plus possible de parler de la communauté
vietnamienne (en fonction du sentiment de l'appartenance de ses membres) en tant que telle
peut être expliqué par une cause naturelle – celle de
croissance démographique de
Vietnamiens en République tchèque– leur nombre dans le pays est passé de 9633 en 1994 à
61115 en 2010 (Le Bureau Statistique tchèque). Les membres d'une « communauté »
devrait se sentir solidaires et appartenant à cette unité. La diaspora tchèque manque
l'intégrité interne et une identité collective. (Kusnirakova, 2013(b): 20), mais cette
évolution est beaucoup plus complexe est exige une étude de la structuration interne de la
diaspora. Il y a plusieurs aspects selon lesquels nous pouvons diviser la diaspora en
groupes d'appartenance. Il y a deux aspects importants, qui sont facilement détectables.
L´un est le statut socio-économique et le niveau d'études achevé des immigrants, et l'autre
est leur province d'origine au Vietnam En revanche, les nouveaux arrivés depuis le début
du de 21ème siècle jusqu'au aujourd’hui sont beaucoup plus dépendant du réseau vietnamien
existant en République tchèque, et leur intégration nécessite donc d'utiliser les « services
141 « starousedlíci“ en tchèque.
100
d´hospitalité » de la communauté vietnamienne. Au sein de la diaspora, nous observons
une professionnalisation d'aide qui se présente en prestation des services. Au Vietnamien,
le terme qui est le synonyme de ces services est Dich vu. Graçe aux dich vu, les nouveaux
arrivants venus en la République tchèque peuvent exister sans la connaissance de la langue
ou l'ordre juridique tchèque, et ne sont donc pas obligés de s'intégrer même par de
circonstances, comme ce fut le cas des groupes de anciens résidents. Dich vu sont utilisés
par les deux groupes de nouveaux arrivants – par ceux qui viennent par des agences
intermédiaires et n'ont presque pas de contacts avec la population et la culture du pays
d'accueil, ainsi que par les membres des familles des résidents locaux et dans le processus
de migration et d'adaptation qui profitent d'aide des réseaux sociaux personnels.
Ensuite, j´ai pu signalé dans mon étude une évolution dans la nature de relations
au sein de la diaspora - les relations amicales dans lesquelles se sont engagés les résidents
anciens ( en fonction de la substitution de la famille), sont généralement remplacées par les
relations purement fonctionnelles, économiquement-basés.
Au niveau micro-sociale, j'ai identifié des facteurs importants en tant que les motifs
personnels pour l´immigration en République socialiste tchécoslovaque, qui étaient
souvent liés à la différence de niveau de vie entre les deux pays. A partir d'analyse plus
complexe, j´ai pu constater que la propagande étatique et les motivations familiale
représentaient 'la troisième variable' qui affectait le choix.
Ainsi, l’origine socio-économique de l’individu était-elle très marquante et liée à la
phase du programme de L'internationale socialiste : dans les années 1970. Nous pouvons
encore observer les enfants des élites, provenant des familles vietnamiennes qui étaient
économiquement stables ayant l’autre motifs et leurs objectifs n’étant pas strictement -basé
sur le profit. Pendant les années 1980, les ouvriers de la campagne vietnamienne ont
commencés d'arriver, souvent illettrés même dans leur langue maternelle. Cela renvoi à
l'autre facteur important, ce qui est selon moi la maîtrise de la langue. Celle ci était
dépendante des différentes possibilités de l'apprentissage offertes aux étudiantes des
universités, apprentis et finalement les ouvriers.
Comme démontré plus haut, la migration vietnamienne est perçue dans ma
recherche en tant que migration familiale, même si il ne s’agit la plupart du temps que d’un
seul membre mobile dans la famille. Or, le capital sociale chez les Vietnamiens est
concentré dans la famille, est les liens de parenté ont une tres grande valeur, si pas la plus
101
importante. En conséquence, les réseaux transnationales basés sur ces liens de parenté sont
ceux qui résisteront le plus à la régulation extérieure imposée par l’état. L´argent envoyé au
Vietnam par des jeunes travailleurs célibataires est destiné prinicpalement pour les familles
qui se sont restaurées avec le regroupement familial en début des années 1990. Les motifs
des Vietnamiens pour fonder un commerce transnationale informel à l’échelle familiale du
clan et du voisinage étaient décrites dans la sous-partie de chapitre III, au niveau microsociale (les biens mérités en République tchécoslovaque envoyés au Vietnam et revendus).
En conclusion, je propose d'éclaircir la continuité, à la fois latente et manifeste,
entre les pratiques culturelles et socio-économiques passées et actuelles des Vietnamiens en
République tchèque. Ainsi, cette approche aide à comprendre les tendances des nouveaux
courants d'immigration en République tchèque. Selon l'étude sur la différentiation interne
de la diaspora vietnamienne, ces derniers courants représentent les immigrés le moins
préparés à l'adaptation et le moins impliqués dans les réseaux crées par les flux migratoires
précédents. (Kusnirakova, 2013).
En outre, même après la chute des gouvernements de pays de l´est, nous observons
la continuité dans l'intensité des stratégies formelles dans la politique de la main-d'œuvre
du Vietnam contemporaine. Les nouveaux accords, prenant source dans l'ancienne
coopération, sont établis avec les gouvernements des pays d'ancien bloc de l'Est. En plus,
l'ouverture des frontières a permis une mobilité plus facile de la main d’œuvre (formelle et
informelle). Les pratiques du gouvernement vietnamien favorisent - semblablement à
d'autres "pays émergents"- l’exportation de la main d’œuvre comme une stratégie de la
construction de la nation pour réduire la pauvreté endémique du pays et de permettre le
développement d´ un pays du socialisme continu. Au sein de la stratégie national xoa doi
giam ngheo (l'éradication de la faim et de réduction de la pauvreté), le gouvernement
vietnamien a identifié la stratégie d’exportation de la main-d'œuvre en tant qu'essentielle
(Schwenkel, 2014). Comme l´explique Schwenkel, « la migration des travailleurs pendant
l’ère socialiste a fourni les bases de la politique et des attentes économiques de la récente
industrie d'exportation ». (Schwenkel, 2014: 240). Selon Pham Van Dinh, un haut
fonctionnaire du Département consulaire des Affaires Étrangères du Vietnam, « à l'heure
actuelle, il y a 3,2 millions Vietnamiens vivant de manière permanente à l'étranger (400
000 d'entre eux sont diplômés ou meme post-gradués) et 500 000 travailleurs migrants
102
vietnamiens qui travaillent dans plus de 40 pays et territoires différents partout dans le
monde sous contrats de travail à durée limitée.»142
L'origine de statut ancien, obtenu au moment de l´arrivée en République socialiste
tchécoslovaque est toujours visible chez les Vietnamiens d’aujourd’hui. En général, les
étudiants, qui sont venus en tant que pionnierss privilégiés au sein du programme, et qui
ont donc 'mérité' plus d'attention, sont mieux intégrés dans la société thèque que ceux, qui
sont venus postérieurement grâce aux réseaux déjà établis. Contrairement aux étudiants des
années 1970, les derniers arrivés, ceux des années après 1990 ne se sentent pas obligés
d'apprendre la langue et de sortir des niches ethniques, qui se sont économiquement établis
suite à la transformation économique et politique du début des années 1990.
Une étude comparative, prenant en considération les facteurs que j'ai proposé au
sein de ce mémoire, serait nécessaire pour éclaircir les aspectes qui restaient inexploités et
qui sont liés par exemple à la législature spécifique de l'état socialiste de l'Europe de l'Est.
Ma recherche doctorale serait donc une continuation de cette étude, mettant l'accent sur
l'année 1989 et la transformation politique, qui est, comme annonce le présent mémoire,
une véritable rupture dans la structure interne de la diaspora vietnamienne. Cette date
marque le début des vagues d'arrivées des immigrés économiques, qui profitèrent des
réseaux ethniques établies. Ainsi, la mise à jour des recherches portants sur des règlements
sur les migrations est nécessaire pour expliquer la cause des nombres indéniables de
l'immigration clandestine et de la contrebande faite par des immigrants, la traites même
avec des êtres humaines, les ouvriers désertés et les contrats rompus, les femmes
vietnamiennes qui se marient et sont mariées avec des étrangers, moyennant une somme
d´argent ou les mères célibataires.143
142 Pham Vu Dinh, « International Migration and Labor Migrants in Vietnam. Disponible sur:
https://www.iom.int/jahia/webdav/shared/shared/mainsite/microsites/IDM/workshops/return_migration
_development_070708/pres_dinh.pdf
143 L'autre document officiel traite certains des problèmes mentionnés. Il s'agit du Bilan de l'année 2012,
publié par le Département consulaire du ministère des Affaires étrangères du Vietnam, traitant La
migration
vietnamienne
à
l'étranger.
Disponible
sur :
file:///C:/Users/Tereza/Desktop/vietnam_migration_abroad_en.pdf
103
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kultúrných, školstkých, vedeckých a zdravotnických stykov s VSR za rok 1981, le 17
décemnre 1981
NAČR,
Federální
ministerstvo
zahraničních
věcí
č.
79.459/75-3,
Annexe
au
Aide Mémoire : Spécialités et nombre d’étudiants vietnamiens envoyés pour leurs études
en République Socialiste de Tchécoslovaquie en 1975, Répartition pour l’année scolaire
1975 – 1976 des aspirants de la R. D. Du Vietnam à envoyer en R. S. Tchécoslovaque.
7.11.1975
NAČR, Záznam z přijetí delegace Národního shromáždění Vietnamské demokratické
republiky ve Federálním shromáždění ČSSR dne 16. Května 1974, présenté le 6 juin 1974
au sein de la réunion de ÚV KSČ; fond 02/1, sv. 123., ar. j. 123, b. 6.
MPSV, Protokol z jednání o přípravě občanů Vietnamské demokratické republiky v
Československé republice, v Praze, 26. června 1973.
MPSV, Informace o možnostech zaměstnávání vietnamských občanů v ČSSR a návrh
dalšího postupu, reçu par le Cabinet du Premier Ministre (Úřad předsednictva vlády) le 7
avril 1976.
MPSV, Prováděcí Plán k Dohodě o kulturní spolupráci mezi Československou
socialistickou republikou a Vietnamskou demokratickou republikou, podepsané dne
113
20.března 1957 na léta 1974 – 1975.
MPSV, Zápis z jednání delegací Státního výboru pro odbornou přípravu VSR a federálního
ministerstva práce a sociálních věcí ČSSR o spolupráci při provádění vládní Dohody ze
dne 21. prosince 1979 o odborné přípravě a dalším zvyšování kvalifikace občanů VSR v
československých organizacích.
MPSV, Prováděcí plán kulturní, školské a vědecké spolupráce mezi Československou
socialistickou republikou a Vietnamskou socialistickou republikou na léta 1976 a 1977.
Dáno v Hanoji dne 17. září 1976. ČSSR a VSR na roky 1976 a 1977
MPSV ČSR, Odbor pracovních sil, Přehled zaměstnanosti vietnamských pracovníků v roce
1981 v rozdělení na pracovníky vyslané ministerstvem práce VSR a Státním výborem VSR
MPSV, Federální ministerstvo práce a sociálních věcí, Státní plánovací komise, Federální
ministerstvo finance, Pokyny pro věcné, organizační a finanční zabezbečení odborné
přípravy a další zvyšování kvalifikace občanů Vietnamské socialistické republiky v
československých organizacích., K Dohodě ze 21.12. 1979. Daté juin 1980
MPSV, Pokyny pro věcné, organizační a finanční zabezpečení odborné přípravy a další
zvyšování kvalifikace občanů Vietnamské socialistické republiky v Československých
organizacích, juin 1980
MPSV, Prováděcí protokol o spolupráci mezi Československou socialistickou republikou a
Vietnamskou socialistickou republikou v oblasti odborné přípravy a dalšího zvyšování
kvalifikace občanů v československých organizacích v roce 1981 a návrzích na rok 1982,
daté le 21 juin 1980.
MPSV, Státní plánovací komise, Federální ministerstvo financí, Pokyny pro věcné,
114
organizační a finanční zabezbečení odborné přípravy a další zvyšování kvalifikace občanů
Vietnamské socialistické republiky v československých organizacích., K Dohodě ze 21.12.
1979. Daté juin 1980
MPSV, Zpráva delegací Federálního ministerstva práce a sociálních věcí ČSSR a
Ministerstva práce VSR o výsledcích realizace mezivládní Dohody ze dne 27.11.1980 a o
návrzích na zlepšení další spolupráce, která se předkládá předsedům obou částí
Československo-vietnamského výboru pro hospodářskou a vědeckotechnickou spolupráci,
27 avril 1983.
MPSV, Rámcové podmínky pro působnost organizátorů a vedoucích skupin vietnamských
občanů dočasně zaměstnaných v československých organizacích, à Prague, le 27 juin 1984.
MPSV, Prováděcí protocol o spolupráci mezi Československou socialistickou republikou a
Vietnamskou socialistickou republikou v oblasti odborné přípravy a dalšího zvyšování
kvalifikace vietnamských občanů v československých organizacích v roce 1987.
MPSV, Odbor pracovních sil, Přehled zaměstnanosti vietnamských pracovníků v roce 1981
v rozdělení na pracovníky vyslané ministerstvem práce VSR a Státním výborem VSR.
MPSV, Prováděcí protokol o spolupráci mezi Českou socialistickou republikou a
Vietnamskou socialistickou republikou v oblasti dočasného zaměstnání kvalifikovaných
pracovníků Vietnamské socialistické republiky spojeného s další odbornou přípravou v
Československých organizacích v roce 1989.
MPSV, Zpráva o výsledku jednání delegace federálního ministertva práce a sociálních věcí
ve Vietnamu, presenté par le minister du travail et des affaires sociales Petr Miller au sein
de la réunion du gouvernement le 23 October 1990.
115
MPSV, Záznam z jednání ředitele odboru zaměstnanosti Federálního ministerstva práce a
sociálních věci ČSFR PhDr. Štefana Karabína, CSc., s vedoucím oddělení péče o pracující
vietnamského velvyslanectví v Praze ing. Trinh Quoc Ky dne 23. března 1990.
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MPSV, Záznam z jednání delegací federálního ministerstva práce a sociálních věcí a ČSSR
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Republice: úvahy, polemika, návrhy, Praha, 6/2000
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NAČR – Národní archiv České republiky – L’Archive national de la République tchèque
MPSV – Ministerstvo práce a sociálních věcí - L’Archive de la Ministère de travail et des
affaires sociales de la République tchèque
116

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