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23 Juillet 2015
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LES POINTS CLÉS DE L’ACCORD SUR LE NUCLÉAIRE IRANIEN
Les grandes puissances mondiales (les cinq membres
capacités, le site d’Arak, qui dispose d’un réacteur qui
permanents du Conseil de Sécurité de l’ONU plus
peut potentiellement produire du plutonium, sera
l’Allemagne) et l’Iran ont conclu, le 14 juillet dernier
certainement détruit ou déplacé.
à Vienne, un accord visant à résoudre les questions
autour du nucléaire iranien. Cet accord, dont certains
Au cours de ces dernières décennies, l’Iran a été l’un
points clés sont proches d’une version préliminaire
des pays les plus lourdement sanctionnés. Les
qui a été discutée en avril à Lausanne, stipule que
sanctions à l’égard de l’Iran ont porté entre autres sur
l’Iran est dans la quasi impossibilité d’acquérir l’arme
la libre circulation des capitaux, l’échange de biens et
atomique en échange de quoi le pays obtient la levée
de services et tout particulièrement sur l’exportation
des sanctions mises en place à son égard. L’Iran
de produits pétroliers. En ce qui concerne la levée de
préserve le droit d’exploiter le nucléaire à des fins
ces sanctions, aucun calendrier n’a été spécifié. Cette
civiles, mais son programme nucléaire fera l’objet
levée des sanctions dépend de plusieurs éléments.
d’un contrôle très strict de la part de l’Agence
Tout d’abord, cet accord devra obtenir l’aval des
Internationale de l’Energie Atomique (AIEA) et
différentes instances impliquées (ONU, Parlement
restera donc très limité. Pour des raisons de sécurité
iranien, Congrès américain, …). Le 20 juillet, le
nationale il a cependant été convenu que l’accès par
Conseil de Sécurité de l’ONU et les ministres des
l’AIEA aux sites militaires sera restreint.
Affaires étrangères de l’Union européenne ont déjà
validé l’accord.
L’accord présenté le 14 juillet dernier comporte un
certain nombre de détails techniques qui limitent les
En outre, un rapport de l’AIEA qui sera publié en
capacités de l’Iran à développer l’arme nucléaire et
décembre de cette année devra confirmer que l’Iran
donc de donner un caractère militaire à son
ait mis en œuvre les mesures techniques mentionnées
programme nucléaire. Il a été ainsi décidé d’allonger
plus haut et ait donc tenu ses engagements. Dans le
le breakout time, c’est-à-dire le temps nécessaire pour
cas contraire, les sanctions seront maintenues. Ce
fabriquer assez d’uranium enrichi pour la production
n’est donc qu’au plus tôt en fin d’année (donc d’ici 4
de l’arme atomique, de réduire le stock d’uranium
à 5 mois) que les sanctions pourront être levées.
enrichi, mais aussi de mettre à l’arrêt un nombre non
négligeable de centrifugeuses et ce pour plusieurs
Même en cas de levée des sanctions à l’égard de
années. De plus, un certain nombre d’installations
l’Iran, l’embargo sur les armes conventionnelles et les
nucléaires
voire
missiles balistiques sera maintenu pour plusieurs
détruites. Alors que les sites de Natanz et de Fordo
années (respectivement 5 ans et 8 ans). Il convient
devraient être maintenus, mais limités dans leurs
également de souligner que l’accord prévoit que les
seront
restructurées,
fermées
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différentes sanctions pourront être rétablies à tout
Malgré cette anticipation des marchés, le surplus
moment en cas de viol des termes de l’accord. C’est le
d’offre en provenance de l’Iran pourrait mettre sous
fameux mécanisme de snapback. Ce mécanisme
pression les prix des hydrocarbures lorsque les
devrait être appliqué pendant une dizaine d’années.
sanctions seront levées. En effet, ce surplus d’offre va
Mais une nouvelle résolution, déjà annoncée par les
arriver sur un marché du pétrole qui est déjà très
grandes puissances, devrait porter la durée de
excédentaire, car de nombreux pays producteurs (p.ex.
l’application de ce mécanisme à quinze ans.
Irak) essayent continuellement de compenser la baisse
des cours par une augmentation de la production et
Une
fois
validé,
l’accord
devrait
avoir
des
des exportations de produits pétroliers. Il en résulte
implications plus économiques que politiques. En
que l’excédent sur le marché sera encore plus
effet, même si l’accord permet d’éviter que l’Iran ne
considérable, de sorte que les prix du brut pourraient
se dote de l’arme nucléaire, il ne restaure pas pour
connaître des pressions baissières encore plus
autant totalement les relations diplomatiques entre
importantes ou au moins être maintenus durablement
pays. Des divergences persistent, notamment quant au
à des niveaux faibles. Ceci s’inscrit dans un contexte
rôle joué par l’Iran dans certaines guerres (notamment
où l’Agence Internationale de l’Energie (AIE) prévoit
en Syrie et au Yémen). À court terme, l’accord
même un ralentissement de la croissance de la
permettra, au mieux, une certaine stabilisation des
demande mondiale de pétrole. En effet, l’AIE prévoit
alliances au Moyen-Orient.
une croissance de la demande de 1,2 millions de barils
par jour (Mb/j) en 2016 contre une croissance
D’un point de vue économique, la levée des sanctions
moyenne de 1,4 Mb/j en 2015.
qui résulte de l’accord devrait surtout permettre une
remontée de la production et de l’exportation de
Ce surplus d’offre doit cependant être relativisé et
pétrole iranien et donc pourrait avoir un impact sur les
dépend de certains facteurs. Certes, selon des
marchés internationaux des hydrocarbures. Qu’en est
statistiques publiées par British Petroleum (BP), les
-il vraiment? Il convient de faire remarquer que les
réserves de pétrole iraniens sont impressionnantes
prix du pétrole avaient déjà fortement anticipé
(157,8 milliards de barils). De plus, la production de
l’annonce de l’accord et donc intégré en partie
pétrole iranien s’élevait à un peu plus de 3,6 Mb/j en
l’impact potentiel de ce dernier dans leurs prix. En
2014. Mais seulement 1 à 1,3 Mb/j ont été exportés.
effet, après avoir entamé une reprise au cours du mois
Selon les dirigeants du pays, la levée des sanctions
de mars et atteint un plus haut de l’année au début du
devrait permettre d’accroître la production de pétrole
mois de juin, les prix du pétrole étaient ces dernières
et en même temps d’accroître les volumes exportés.
semaines plutôt orientés à la baisse, le WTI (West
Le surplus de pétrole exporté, une fois les sanctions
Texas Intermediate) ayant même franchi à un certain
levées, pourrait se situer entre 0,4 et 0,8 Mb/j. Mais ce
moment le seuil psychologique de 50 dollars par baril.
surplus de pétrole exporté dépendra de la capacité du
pays à reconstituer l’outil de production, donc de
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l’investissement. Comme la levée des sanctions
fournisseurs de services impliqués dans l’industrie du
devrait permettre à l’Iran d’avoir accès à une manne
pétrole et du gaz profiteront fortement de cette
financière importante (grâce à la vente de pétrole), ces
« ouverture » du marché iranien. Le secteur des
investissements pourraient être facilement financés.
infrastructures devrait également tirer profit de cette
La reconstitution de l’outil de production nécessitant
levée des sanctions, car pour reconstituer son pouvoir
un certain temps, l’accroissement des volumes de
économique
production ne sera toutefois que très graduel.
investissements importants. Riche d’une population
le
pays
devra
effectuer
des
d’un peu plus de 77 millions d’habitants (selon des
Les pressions baissières sur les prix du pétrole ne
données de 2013) et majoritairement âgés de 15 à 34
devraient également pas passer inaperçues du côté de
ans (cohorte un peu plus ouverte aux nouveaux
l’inflation et pourraient donc retarder le rebond de
produits), l’Iran constitue un marché intéressant pour
l’inflation. Dans le contexte de la zone euro, cet effet
d’autres industriels.
pourrait être en partie contrebalancer par certains
éléments qui soutiennent l’inflation, tels que par
Dans le secteur des biens de consommation et tout
exemple la reprise du marché du crédit. Mais cette
particulièrement des produits laitiers, le marché
contribution négative des prix de l’énergie pourrait, à
iranien peut s’avérer profitable. Les producteurs de
travers son impact sur les anticipations d’inflation,
produits laitiers, notamment ceux confrontés aux
influencer l’orientation des marchés obligataires.
sanctions en Russie, à l’affaiblissement de la
croissance chinoise et à la fin des quotas laitiers dans
À côté du pétrole, le gaz naturel est également très
l’Union
européenne
(donc
à
un
surplus
de
abondant en Iran. Selon des données de BP, les
production), pourraient considérer le marché iranien
réserves de gaz naturel de l’Iran représentaient à la fin
comme une alternative intéressante, qui rappelons-le
de l’année 2014 environ 18,2% du total des réserves
est le 10e marché dans ce secteur et pourrait valoir
de gaz dans le monde, donc légèrement supérieures à
plus de 10 milliards de dollars d’ici la fin de la
celles de la Russie (17,4%). Ceci signifie que la levée
décennie. Le secteur automobile pourrait également
des sanctions à l’égard de l’Iran pourrait offrir la
tirer son épingle du jeu. Par exemple, pour Peugeot,
possibilité à l’Union européenne de diversifier ses
l’Iran constituait le second marché le plus important
sources de gaz naturel et donc de réduire sa
avant l’instauration des sanctions. Les entreprises
dépendance en énergie importée de la Russie.
actives dans l’aéronautique pourraient aussi profiter
d’une levée des sanctions en Iran, car le pays dispose
Enfin, cet accord devrait également permettre à
d’une flotte aérienne vieillissante. Le marché iranien
certaines entreprises occidentales de tenter de renouer
pourrait aussi s’avérer profitable pour les producteurs
des relations commerciales avec l’Iran. En raison des
de cigarettes. Selon des données de British American
ressources naturelles dont dispose le pays, il est clair
Tobacco, les Iraniens consomment près de 52,6
que les entreprises et tout particulièrement les
milliards de cigarettes chaque année. Certaines
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marques de luxe pourraient également voir d’un bon
œil la levée des sanctions.
Certes, les sanctions ont eu des effets importants sur
la population. Une devise faible et une inflation
galopante ont fortement réduit le pouvoir d’achat des
Iraniens et n’ont pas favorisé la constitution d’une
épargne (source de consommation future). Mais une
levée des sanctions devrait provoquer un changement
et amener à un moment ou un autre les ménages
iraniens à consommer davantage.
Dr William Telkes
Economiste/Stratégiste
BCEE Asset Management
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