etude de plins le jeune avec trajan

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etude de plins le jeune avec trajan
STUDIA
HIST ORI CA
109
LADISLAV VIDMAI01
ETUDE
SUR LA CORRESPONDANCE
DE PLINS LE JEUNE
AVEC TRAJAN
EDIZIONE ANASTATICA
"L'ERMA" di B RETSCHN E I DER ROMA
1972
-
ΑΙ S ΤΑΜΡΑ ANASTATICA INVARIATA DELL ' EDIZIONE PRAHA
196Ό
ROZPRAVY ε ESKOSLOV ΕΝSKΈ AKADEMIE VÉD
Ioda sροleeenskÿch vëd
RoYník 70 — Sess"it 14
Présenté le 10 février 1959
Discuté le 26 février 1959 dans la séance de la VIIIe sectior
de l'Académie Tchécoslovaque des Sciences
Soc. Multigralica Editrice - V.le del Quattró Venti, 52/a - Roma
.
INTRODUCTION
Dans mon trava il , je me suis borné à l'explication objective de la correspondance de Pline le Jeune avec l'empereur Trajan. Dans les éditions, on la désigne,
généralement, comme le livre R des Lettres de Pline, quoique son destin ait
été différent de celui des neuf livres précédents et qui contiennent ses lettres
à ses amis. E ll e a aussi un caractère différent de celui des lettres littérairement
polies, et c'est la raison pour laquelle elle mérite une attention toute particulière. A côté de cela, elle est une source précieuse pour faire connaître l'administration des provinces romaines du début du IIème siècle. C'est cette
époque que nous pouvons' considérer comme une période de transition, car
elle marque le début des changements administratifs opérés en vue de remplacer l'ancien système provincial, ou, le cas échéant, celui de l'administration
municipale; quelques-uns de ces changements étaient, il est vrai, à peine
sensibles, mais ils ont abouti à des résultats très importants.
J'αί prêté mon attention surtout aux problèmes auxquels il est possible
d'ajouter quelque chose de nouveau ou à ceux qui n'ont pas été suffisamment appréciés. De plus, il état nécessaire d'émettre aussi un avis sur quelques
autres questions importantes, bien qu'on en ait déjà beaucoup parlé. Là, οù
un problème a été résolu de faim à peu près satisfaisante, j'ai considéré comme
inut ile de m'étendre là-dessus; je fais seulement un renvoi à l'ouvrage traitant
ce sujet. Il ne s'agissait pas pour moi de faire le commentaire sur le livre Χ
de Pline, même si un tel commentaire détaillé s'avérait nécessaire. J' αί tâché
d'éviter aussi la simple paraphrase des lettres; je suis persuadé qu'on ne peut
les expliquer d'une façon satisfaisante qu'en les comparant aux autres sources•
antiques, tout d'abord documentaires (inscriptions, textes juridiques, monuments archéologiques). Il est évident que ce n'est que le texte de Pline même,
bien compris, qui peut servir de base à une explication adéquate, car chez Pline
le Jeune une mauvaise compréhension du texte a mené parfois à de fausses
conclusions de la part de certains historiens.
Dans mon trava il , je me suis servi de l'édition de Schuster (C. Plinii Caeciliï,
Secundi Epistularum libri neuem, Epistularum ad Traiznum liber, Panegyricua.
Rec. M. Schuster, ed. tertiam curavit R. Hanslik, Lipsiae, Teubner, 1958);
quand je me suis écarté du texte, j'en avertis toujours le lecteur. Parmi les.
3
éditions commentées du livre Χ, c'est le commentaire de Durry qui est le plus
récent (Pline le Jeune, Tome IV: Lettres, Livre X, Panégyrique de Τταjan.
Texte établi et traduit par M. Durry, Paris, Les Belles Lettres, 1947) et qui
fait suite aux premiers trois volumes des lettres de Pline à ses amis, publiés
par A. M. Guillemin (Paris, 1927-1928); le commentaire en est très soigné,
mais trop bref et il n'est pas possible d'être toujours d'accord avec lui. Et c'est
la raison pour laquelle nous pouvons nous servir, encore aujourd'hui, avec
succès, du vieux commentaire de Hardy (C. Plinii Caecilii Secundi Epistulae
zd Traianum i mperatorem cum eiusdem responsis. Edited, with notes and
introductory essays by E. G. Hardy, London—New York, 1889), dont la
suρériοríté est évidente par la quantité d'ouvrages cités par lui. Je me suis
aussi réferé aux commentaires sur les lettres choisies de Pline, tout d'abord
à celui de Merrill (Selected Letters of the Younger Pliny, London, 1903) et de
Kukula (Briefe des júngeren Plinius, Wien, 1904, 19092, 1911$). En Russie
soviétique, on prête, ces derniers temps, une grande attention à notre auteur:
la traduction "russe du Χ livre avec Introduction et Notes a été publiée par
V. S. Sokol&v (Plinij 1VlladIij, Perepiska s Trajanom, VD' 1946, 2, 215-272),
qui a aussi collaboré à la traduction de tout le Pline (Pis'ma Plinija Μίαdfegο.
Perevod M. E. Sergejenko, A. I. Dovatura i V. S. Sokolova. Prímeçanija
Μ. E. Sergejeńko i V. S. Sokolova, Moskva—Leningrad, 1950). Les notes
qui y sont incluses, sont trop générales et parfois un peu vieillies.
Plusieurs aperçus littéraires sur Pline ont été successivement publiés dans
les „Bursians Jahresberichte" (on trouve une sorte de récapitulation dans
l'éditiοń de Schuster, p. XXX; la littérature ultérieure y est aussi incluse,
p. ΧΧΙΙ — ΧΧΧ). Les derniers aperçus ont été présentés par R. Hanslik
(Bursians Jahresberichte 282, 1943, 38-77; Ans. fttr Altertumswiss. 8, 1955,
1-18), qui a finement apprécié les nouveaux travaux concernant ce sujet;
K. Büchner ne s'est borné qu'à un court article, dans lequel il renvoie à Hanslik
(K. Büchner - J. B. Hofmann, Lat. Literatur 'und Sprache in der Fοrschυng seit
1937, Bern, 1951, p. 170-171). E.din un aperçu résumant nos connaissances
sur Pline a été présenté par M. Schuster (RE XXΙ, 1, 1951, 439 -459).
• Il existe encore peu de travaux monographiques sur la correspondance
de Pline avec Trajan; sauf les commentaires cités plus haut, il n'existe, à vrai_
dire, que deux dissertations a llemandes: Joh. Meyer, Der Brie f wechsel des
Plinius und Trajan ale Quelle rómischer Kaisergeschichte, Diss. Strassburg,
1908; A. Hannemann, Der dussere und innere Sti l in Τrajαns Brie/en, Diss.
Giessen, 1935. Ce sont des étuies très minutieuses. Meyer a classé les éléments
particuliers de la correspondance selon un point de vue objectif en paraphrasant les lettres; Hennemami n'a exs,miné, dans son excellent travail, que les
réponses de Trajan, leur forme et l'ethos. Les auteurs qui se sont occupés de
toutes les oeuvres de Pline se sont aussi naturellement occupés du dixième
livre de ses Lettres, comme p. ex. E. Allain (Pline le Jeune et ses héritiers
4
I III, Paris, 1901-1902), ou V. S. Sokolov (Plinij Mladίij, Izdatel'stv ο
Moskovskogo uníversiteta, 1956). Tous les deux sont verbeux et se limitent,
en général, à la paraphrase des lettres; pour mon travail je me suis servi de la
première partie de l'ouvrage d'Allain. Quant à l'autre littérature, il faut
citer, à la première place, l'étude fondamentale de Th. Mommsen, Zur Lebensgeschichte des j Ιλngeren Plinius (Hermes 3, 1869, 31-139 =. Ges. Schr. IV,
366-468); beaucoup de ses conclusions .ont été corrigées. et rendues plus
précises par W. Otto (Zur Lebensgeschichte des jíingeren Plinius, SB Μτincher
1919, 10. Abh.). L'oeuvre synthétique de David Magie (Roman Rule in Asia
Minor I—II, Princeton, 1950), dans laquelle j'ai trouvé une riche bibliographie,
est une, source précieuse pour la partie la plus importante de cette correspondance, c'est-à-dire en ce qui touche l'administration de Pline du Pont et de la
Bithynie. Pour l'époque de Trajan il faut consulter le livre de R. Paribení,
Ορtimus princeps I—II, Messina, 1926-1927.
Comme il n'existe pas encore une monographie moderne qui résume. les
nouvelles vues sur la correspondance de Pline avec Trajan, j' αί tâché de rassembler et d'apprécier tous les travaux concernant les problèmes dont je me suis
occupé. Poursuivant ce but j' αί consulté tout le matériel épigraphique accessible (il est, malheureusement, dispersé dans une quantité de publications).
Les inscriptions de Pont et de Bithynie, principalement en grec, n'ont pas
été publiées, en complet, dans les derniers temps. C'est la raison pour laquelle
il est nécessaire de se servir encore aujourd'hui du Corpus inscriptionum
Graecarum (CIG); il s'agit de sa 2bme et de sa 3ème partie. Elles ne sont pas
comprises dans la publication plus récente des Inscriptions Graecae (IG),
r dans les recueils de l'Asie Mineure publiés en Autriche (Tituli Asiae Minoris =
TAM) ou en Angleterre (Monuments Asiae Minons antiqua = MAMA).
Il est vrai que le plus grand nombre d'entre elles est contenu dans le recueil
de Cagnat Inscriptions Graecae ad res Romands pertinentes (IGR), surtout
dans le troisième volume de l'année 1906; néanmoins, on n'a pas réussi a y
grouper tout et il est à recommander de se servir de ce recueil avec attention
et de contrôler les inscriptions d'après d'autres publications Je prends comme
base les inscriptions citées dans l'IGR, mais après les avoir comparées avec
d'autres sources; je ne cite une autre édition que si je constate une différence
entre celle-ci -et 1' IGR ou si l'inscription dont il s'agit ne se trouve pas chez
Cagnat, ou encore, si elle est d'une date postérieure. C'est pourquoi même
les éditions plus anciennes ne perdent pas leur valeur, comme p. ex. Le Bas —
Waddington (Ph. Le Bas-W. R. Waddington, Voyage archéologique en Grèce
et en Asie Mineure, Inscriptions III, 1, Paris, 1870), ou le livre de Perrot (G.
Perrot-E. Guillaume-J. Delbert , Exploration archéologique de la Galatie et de la
Bithynie I—II, Paris, 1872). Les inscriptions latines, trouvées avant 1902,
quand le dernier supplément a paru, dont groupées dans la 3ème partie du
Corpus inscriptionum Latinarum (CIL Ill).
—
5
Le plus grand nombre de nouvelles inscriptions est publié par G. Mendel:
BCH 25, 1901, 5-92; 27, 1903, 314-333; 33, 1909, 245-435 (catalogue des
monuments à Prousa). D. M. Robinson a présenté une liste précieuse des inscriptions de Sínope (AJA 9, 1905, 294-333). Il faut aussi mentionner E. Kalínka (Jϋ.I 28, 1933, Beibl., col. 45-112) et L. Robert, qui s'est concentré
spécialement sur l'émendati οn et l'explication des textes déjà publiés (p. ex.
Études anatoliennes, Paris, 1937). Les travaux publiés par l'Institut archéologique allemand de Constantinople sont très importants parce qu'ils contiennent
des matériaux touchant les inscriptions et la topographie relatives: A. M. Schneider-W. Karnapp, Die Stadtmauer von Iznik-Nieaea (Istanbuler Forschungen 9),
Berlin, 1938; F. K. Dörner, I nschri f ten und Denkmäler aus Bithynien (Istanb.
Forsch. 14), Berlin, 1941; Α. M. Schneider, Die römischen und byzantinischen
Denkmäler von iznik-Nicaea (Istanb. Forsch. 16), Berlin, 1943. Après la guerre,
F. K. Dörner a fait paraître une autre publication de grande valeur: Bericht
über eine Reise in Bithynen (Oesterr. Akad. d. Wiss., Phil.-hist. Klasse, Denkschriften LXXV, 1) Wien, 1952. Par ces travaux on a comblé, au moins partiellement, une lacune sensible; mais malgré tout cela, le matériel épigraphique
est loin d'être complet.
La Bithynie a été négligée si on la compare aux autres provinces, même
au point de vue des recherches numismatiques et archéologiques. Le récent
travail de Cl. Bosch sur les monnaies bithyníennes (Die kleinasiatischen Münzen
der rδm. Kaiserzeit. Teil II. Einzeluntersuchungen. Band 1. Bithynien. 1 Hál f te,
Stuttgart, 1935) est assez bon. Α côté des travaux archéologiques mentionnés
plus haut, il existe une étude russe, plus ancienne, mais qui mérite notre attention; gest la première étude consacrée uniquement à Nicomédie (P. D. PogodinΟ. F. Vul'f, Nikomidija, Izvëstij α Russkago Αrcheοlogiceskago Instituts v Konstαntinορolë 2, 1897, 77-184). Un autre travail de valeur est celui de 111. I.
Maksimova, contenant un riche matériel sur trois villes du Pont (Anticnyje
gonds juge-vostocnogo Pricernοmοr'ja. Sinopa. Amis. Trapezunt. Moskva—Leningrad, 1956).
En parlant du Pont et de la Bithynie, je me suis aussi servi du matériel
concernant les autres régions (le plus important se trouve surtout dans certains
papyrus égyptiens) et de certains travaux d' un caractère plus général; íl n'est
pas possible de les énumérer tous ou en faire un choix convenable. Parmi
les problèmes plus généraux se trouvent aussi des questions juridiques et
religieuses. Les travaux, mentionnés dans l'introduction, seront cités, plus
tard, en abréviation. Autrement, chaque étude sera citée séparément dans
chaque chapitre. En citant le livre dix de Pline je ne mets que le chiffre arabe,
éventuellement en liaison avec ép. (p. ex. éρ. 27).
s
Τ
CARACTÉRISTIQUE DU RECUEIL
La correspondance de Pline avec l'empereur Trajan diffère substantiellement
des autres neuf livres des Lettres, adressées à ses amis, et cela pour plusieurs
raisons 1) le destinataire est toujours l'empereur, dont nous possédons aussi
les réponses; elle est rangée chronologiquement; il ne s'agit pas des lettres
„littéraires", rangées d'après le contenu, pour faire ressortir la varietas, mais,
au contraire, il s'agit d'une correspondance officielle qui n'est pas sans valeur
au point de vue littéraire, mais où l'on ne met pas un tel accent sur la forme
d'un style châtié; dans les autres neuf livres, Pline s'occupe dans chacune des
lettres exclusivement d'un motif; c'est ce qu'il n'a pas pu respecter toujours
dans la correspondance officielle, en posant à l'empereur plusieurs questions
la fois; très souvent, on y trouve les mêmes expressions et tournures de
phrase — p. ex. il répète indulgentiα, indulgere; les lettres sont pour la plupart
laconiques. Pline évite ce style officiel dans sa correspondance privée, il
l'appelle lui-même inlitteratissimae litterae (I, 10, 9): nar distringor of ficio
ut maximo sic molestissimo: sedeo pro tribunali, subnoto libellos, con f icio tabulas,
scribi plurimas, sed inlitteratissimas lifteras. Même ces lettres, si laconiques
soient-elles, ne sont pas tout à fait dénuées d'une certaine valeur littéraire;
on y sent, dans la fagοn de s'exprimer, le talent de Pline. La lettre sur les
chrétiens (ép. 96) est la seule sur laquelle on ait établi des parallèles linguistiques avec d'autres lettres à ses amis (p. ex. K. Línek, Religionsgesch. Versuche
und Vorarbeiten XIV, 1, 1913, 43-46). Ces parallèles on peut les trouver aussi
dans d'autres lettres du dixième livre: p. ex. le goût de Pline pour les
diminutifs se manifeste dans l'épître 17a (febriculis vexatus) etc. (cf. mon
compte-rendu du livre de J. Niemirska-Pliszczy ńska De elocutione Pliniana ..
LF 5 [80], 1957, 139).
Les réponses de Trajan étaient toujours considérées comme des directives
laconiques, claires et précises destinées à l'administrateur d'une province.
Elles avaient leur importance du fait qu'elles expliquaient le droit, même s'il
n'était pas question de créer une nouvelle norme juridique; à ce point de vue,
Trajan était très prudent, il conseillait de respecter les coutumes régionales
et de juger les faits d'après les cas particuliers (cf. ip. 97, 113). Néanmoins
on peut les considérer, comme l'affirme Durry (p. IX), comme un recueil
. ,
1 ) H. Peter, Der Brief in der römischen Literatur (Abh. der Kgl. Sachs. Ges. d. Wies. XX,
3), 1901, 121-124, 198 a très bien traité le caractère de la correspondance officielle
de Pline (du point de vue littéraire). L'anu:yse stylistique des lettres de Trajan est présentée par A. Hennemani, Der dussere und innere Stil in Trajans Briefen, Diss. Giessen,
1935. H. Bardon, Les Empereurs et les lettres latines ..., Thèse Paris, 1940, p. 374-376
s'est occupé le plus minutieusement du •style de Pline dans son livre X.
7
de lois administratives (cf. Ulpien, Dig. I, 4, 1,1 quodcumque igitur .imperator per
epistulam et subscriptionem statuit ... , leger esse constat). Durry est d'avis
que la correspondance de Pline avec Trajan n'a pas été publiée comme preuve
d'estime pour l'é ρistοlοgraρhe Pline, mais plutôt pour des raisons pratiques:
pour que le recueil serve de manuel de droit. Même si je ne considère
pas tette raison comme raison principale, elle a sûrement aidé à la publication des lettres après la mort de Pline, qui ne les a probablement pas préparées pour la publication (cf. la conclusion du chapitre III,
p. 34). Nous devons être reconnaissants à Pline de ne pas les avoir remaniées
et adaptées, car c'est ainsi qu'elles reflètent fidèlement les problèmes que le
gouverneur du Pont et de la Bithynie avait à résoudre, ainsi que nous devons
l'auteur leur suite chronologique précise, même dans la première partie
relative aux années 98-102, comme nous le démontrerons dans le chapitre
suivant.
Avant Η. Peter (cf. note 1) on ne doutait pas que l'auteur des réponses
aux lettres de Pline était Traja ń lui-même. Mêre si Peter considérait Trajan
comme un illustre chef militaire et grand organisateur, il comprenait que
celui-ci ne pouvait pas posséder toutes les connaissances des procédés officiels
et de ce fait il ne pouvait pas écrire toutes les lettres, dent il confiait le soin
des membres de son bureau (p. 123); ensuite il a démontré que dans les
réponses de l'empereur les paroles de Pline se répètent souvent, fait qui
pourrait faire croire qu'il ne s'agit pas des lettres écrites de la propre main
de l'empereur, mals qu'il s'agit d'une rédaction due à son bureau. E. Allain
(Pline le Jeune I, p. 429-432) présente d'autres raisons de ce que Trajan
n'est pas l'auteur de ces lettres: il souligne (mals pas trop convenablement)
la brièveté des réponses; mais c'est surtout cette brièveté qui est considérée
par les .érudits comme la qualité la plus précieuse du style de Trajan (cf.
le compte-rendu de différentes opinions antérieures chez AJIain, p. 429 s.).
Rirschfeld le premier s'est déclaré contre les opinions de Peter (Die kais.
Verwaltungsbeamten, Berlin, 1905 2, p. 323, note 2), mais seulement dans une
petite remarque, où il considère les raisons de Peter peu probantes. Les opinions
de Peter sont reconnues justes par C. Kukula dans son introduction aux
lettres choisies, où il souligne, comme W. Weber 2) ou R. Paribení (Optimus
princeps I, p._ 14), le rôle du bureau de l'empereur bien qu'admettant que le
style des lettres soit caractéristique pour Trajan. La question est traitée,
mais non • résolue, p. ex. par N. Terzaghí (La letteratura latina da Tiberio
a Giustiniano, Milano, 1934, p. 394 avec la note 38). Ces derniers temps, V. S.
-
.
2) Festgabe
K. Müller, Tübingen, 1922, p. 26. D'après Weber le chef du bureau
de l'empereur ab epistulis aurait pu être à ce moment-là Titínius Capito (Cn. Octavius
Títinius Capito) ami de Pline. Cette supposition est très peu fondée, ear Capito était
chargé de cette fonction déjà sous Domitien (cf. Stein, RE XV1I, 2, 1856, no 89). A voir
plus loin note 3.
,.
8
Sokolov dans l'introduction à sa traduction du livre R (VD' 1946, 2, 219)
et dans son dernier livre (Plinij Mladéij, 1956, p. 238) suppose que les lettres
proviennent du bureau de l'empereur, où, d'après lui, Servilius Calvus a joué
un rôle très important. Sokolov arrive à cette conclusion par une fausse interprétation de la lettre 57, dans laquelle Trajan annonce à Pline qu'il va lui-même
questionner l'ancien proconsul Servilius Calvus; dans le commentaire sur cette
lettre (p. 265) Sokolov déclare que Calvus a été le rédacteur de la plupart,
sinon de toutes les ré ροnses'de Trajan aux lettres de Pline. 3)
Les érudits cités ont admis les opinions de Peter, sans prendre en considératien les opinions opposées. Les adversaires de l'hypothèse de Peter sont,
au contraire, d'avis que la plus grande partie de réponses ou bien toutes les
réponses sont écrites par Trajan et non par son bureau. Joh. Meyer (Der
Briefwechsel, p. 38-40) fonde son opinion (mais pas très heureusement) sur les
termes par lesquels l'empereur s'adresse à Pline; il juge, d'après les mots
mi Secunde carissime, que la lettre venait de l'empereur, tandis que les autres
seraient l'oeuvre de son bureau. M. Schanz (Gesch. d. röm. Lit. II, 23, 1913,
p. 363), qui prend aussi la défense de l'auteur Trajan, attire l'attention sisrle fait
que l'empereur, même s'il n'était pas capable de préparer un discours solennel,
était très capable de ré ροτ dre personnellement, d'une façon laconique, aux
lettres de Pline; Hosius, dans l'édition postérieure du livre de Schanz (11 4,
1935, p. 668), ayant mentionné les opinions de Peter et de Meyer, remarque
avec beaucoup de prudence que dans bien des passages on peut sentir un
certain ton personnel.
Une preuve excellente contre la thèse de Peter est présentée par Ti. Wikken
(Hermes 49, 1914, 128, note 1j qui avertit que non seulement l'empereur
emploie dans ses lettres les termes de Pline, mais que Pline emploie, à son
tour, les termes de l'empereur (cf. ép. 7 et 10). Un certain Corp: rus se manifeste chez A. Hennemann clebs sa thèse mentionnée (p. 21-26): Pline était
sûr qu'il écrivait directement à l'empereur, étant donné que le bure au n'avait
pas encore, à ce moment-là, le pouvoir de formuler des lettres officielles lui-même;
les employés du bureau préparaient des lettres pour l'empereur uniquement
au point de vue du matériel respectif; ensuite ils les redigeaient selon les
propres directives de l'empereur; ce ne sont que les lettres forme ll es de remer3 ) P. Servilius Calvus est connu seulement de ces lettres 56-57 et nous ne possédons
pas d'autres indications sur lui. Il est absolument impossible de juger, d'après le contenu
de la réponse de Trajan, si Calvus a été dans le bureau de l'empereur. Nous savons que
Trajan se servait de L. Licinius Sura pour la mise en forme de ses déclarations (Julien,
Caes. 327 A) et après sa mort, qu'on peut mettre peu après l'an 110 (Groag, RE ΧΙΠ,
1, 485), il se servait de Hadrien (SHA, Hadr. 3, 11). Nous savons de Calvus qu'il a été,
moins trois ans avant l'arrivée de Pline en Bithynie, son gouverneur: cf. Mommsen dans
l'index à Ι 'édítion de Pline par Keil (1870); Ges. Sehr. ΙΙ, p. 431, note 1; Dessau, PIR ΙΙI,
p. 226, no 412; C. Stech, K lii, Beiheft R (1912), 85, no 1082; A. Garzetti, Nerva (Roma,
1950), p. 194, no 132.
9
ciements qui sont l'oeuvre de son bureau (ép. 36, 53, 89, 101, 103), tandis
que les autres sont dues à Trajan lui-même; il n'est pas possible, comme le
faisait Meyer, de se baser uniquement sur la manière dont l'empereur s'adresse
à Pline. Le critique du livre de Hennemann, M. Schuster, auteur de l'article
le plus récent sur Pline dans la RE, a approuvé toutes les conclusions de' Hennemann (PhW 56, 1936, 919-921). Durry, comme Hennemann, dans l'Introduction à son édítíon ‚le 1947 (p. VIII—IX) est d'avis que Trajan a dicté
la plupart des lettres. H. Bardon met en relief d'une manière encore plus
logique que Hennemann (Les Empereurs et les lettres latines, Paris, 1940,
p. 347-350) qu'il est impossible de nier que Trajan soit l'auteur des lettres
excepté celles de remerciements: Pline savait bien que ses lettres parvenaient
directement à l'empereur et il s'adresse donc dans ses lettres à celui-ci,car il
mentionne expressément celle qu'il doit écrire sur l'ordre de l'empereur aux
affranchis du bureau im ρéríal (éρ. 6); on voit par là que l'empereur ne s'identifiait pas avec son bureau. Mais Bardon indique aussi comme une autre preuve
l'importance du poste de Pline en vue des préparatifs de la guerre contre les
Parthes; mais on ne peut pas consentir, car la supposition des préparatifs
secrets d'une guerre n'est pas justifiée, comme on le verra plus tard. R. Hanslik
(Anz. j. Altertumswiss. 8, 1955, 15) est du même avis que Bardon quant à
Trajan comme auteur des lettres; ΗansΙik avait déjà auparavant critiqué
Hennemann (Surs. Jahresber. 282, 1943, 63 ss.). Mentionnons encore une
ορiníon très juste de J. i. Hough sur quelques insuffisances de l'administration
romaine ce qui se reflète, de son avis, aussi chez Pline (Class. Journ. 35, 1939,
25-26): Pline envoie quelquefois à Trajan les copies des édits qui devaient
être déposés aux archives de Rome; dans la lettre 73 c'est Trajan lui-même
qui demande Pline de lui envoyer le senatus consultum; Hough le considère,
tout d' ύbοrd, comme insuffisance de l'administration romaine, mais, en même
temps, comme preuve que Pline était ρresuadé qu'il correspondait directement
avec Trajan et pas seulement avec son bureau.
Prêtons nôtre attention aux témoignages d'après lesquels Trajan avait
besoin d'un aide en composant ses manifestes! Il s'agit du passage mentionné
de l'empereur Julien sur Sura et de Spartianus sur Hadrien (voir note 3),
mais dans les deux cas on ne parle que des discours et pas des lettres. Un certain manque de forme, reproché à Trajan (cf. aussi Cass. Dio 68, 7, 4), ne peut
servir d'une raison pour laquelle nous pourrions contester que Trajan ne soit
pas l'auteur de ces lettres écrites en style très serré, dans lesquelles se reflète
justement le caractère de l'empereur. Nous croyons que les preuves, données
par les érudits de ce que Trajan en était auteur, sont probantes. Et l'empereur
devait sûrement tenir à être bien renseigné sur la conduite de Pline dans sa
mission extraordinaire dans, la province sénatoriale, où 1uí-même l'avait
envoyé pour y supprimer les désordres. Pline a fait grand cas de la correspondance avec l'empereur et c'est la raison pour laquelle nous sont conservées
10
même les lettres qui n'appartiennent pas à l'époque de l'administration de la
Bithynie; ces lettres ont aussi un caractère un peu plus privé que la correspondance officielle de Bithynie. Pour moi celle-ci n'est pas seulement „Urkundenbuch", comme on la nomme souvent, car ce sont les lettres privées
de Pline et de Trajan qui n'ont pas été originairement destinées au pub lic;
Th. M. Wehofer (SB Wien 143, 1901, Abh. XVII, p. 104) a par exemple souligné
le caractère individuel du recueil. J. N. Hough, dans son étude mentionnée
(p. 18), prend même en considération que Pline n'a parfois écrit que pour
quí'il puisse se vanter de sa correspondance avec l'empereur, même quand
il n'avait pas besoin de son conseil. Cette opinion est exagérée; dans le chapitre
IV, dédié à la mission de Pline en Bithynie, nous montrerons que la conscience
de Pline' n'était pas toujours dirigée par son excessive anxiété, mais qu'elle
suivait les intentions de Trajan.
Les documents authéntiques sont seulement joints en annexe, la plupart
en ont été égarés ou se trouvent mentionnés comme revus par Pline: dans
l'épître 2 Pline remercie du jus trium liberorum, en parlant en même temps
d'un rescrit (ex rescriρtο intellego). D'après mon avis, il n'y a dans la correspondance que des epistulae κατ' εξοχήν et pas de rescrits. Ces deux catégóríes,
indiquées quelquefois sommairement sous le nom de rescrits de l'empereur,
sont à différencier, comme le souligne surtout U. Wilcken (Hermes 55, 1920,
1-13), qui désigne la deuxième catégorie, à l'opposé des lettres, par le mot
subscriptiones. L'empereur répondait aux lettres par des lettres, tandis qu'aux
présentations nommées libelli il répond par les rescrits proprement dits,
joints 'probablement directement au-dessous des présentations, d'où vient
aussi leur nom. Même Wenger (Die Quellen des róm. Rechts, Wien, 1953, p. 427
s.) approuve cette différenciation. Les epistulae touchaient, pour la plupart,
les employés, les subscriptiones les personnes privées.
Il faut compter aussi les mandata principis, dont on parle souvent dans la
correspondance de Pline ένec Trajan, comme documents authentiques, car ce
sont les directives officielles, données par écrit par l'empereur aux légats
avant leur départ pour les provinces. Des mandata on parlera plus largement
dans le chapitre I.V. Ni ces mandata ni les rescripta ne figurent pas dans le
recueil; ce ne sońt que des epistulae, concernant les conseils de l'empereur
sur les cas singuliers et spéciaux et n'ayant pas, pour cela, une valeur générale.
Naturellement, elles peuvent servir de modèle à ceux qui se trouvent dans une
situation pareille; ce sont les précédents juridiques, exemples. Cl. Bosch (Die
kleinasiat. Münzen II, 1 1, p. 88, note 87) soit même dans cette correspondance
la tendance d'avoir dans les réponses de l'empereur les précédents qui juridiquement obligent la future administration impériale des provinces, dont
Pline était le premier représentant. Il est sûr que ce recueil a eu une grande
in fluence sur l'évolution postérieure, mais on ne peut pas mécaniquement
appliquer tous les problèmes que nous y trouvons sur d'autres provinces.
.
'
,
11
Ce nivellement n'arri νe que plus tard_ Le passage mentionné d'IIlpién (Dig_
I, 4, 1,1) ne peut pas être expliqué, à l'époque de Trajan, comme s'iI s'agissait
dans ses lettres de réglementations légitimes. Le recueil de Pline garde un
caractère personnel.
12
ΙΙ
PROBLÈMES CHRONOLOGIQUES
La correspondance de Pline avec Trajan ne touche p as seulement l'époque
où Pline administrait la province du Pont et de la Bithynie, mais elle date
dès l'avènement de Trajan. Vo ilà la raison pour laquelle il faut mettre au
clair tout d'abord les problèmes chronologiques des années 98-102; dans l'an 102
il faut, sans doute, mettre l'épitre 14; c'est la dernière lettre avant la prise
des fonctions de gouverneur de Bithynie. Il ne s'agit pas seulement des dates
des lettres, mais aussi des grands procès de repetundis dans lesquels apparait
Pline (les accusés étaient Marius Príscus, Caecilius Classicus) ainsi que de
quelques questions concernant la carrière officielle de Pline.
W. Otto (SB Mitnchen 1919, Abh. 10) a démontré très soigneusement et,
comme je le juge, d'une façon irréfutable, que tout le hure X, inclusivement
les lettres 1-14, est classé chronologiquement. Mommsen a admis un classement chronologique du début du livre X, à quelques exceptions près, (Hermes
3, 1869, 54 = Ges. Schr. IV., 389). Déjà H. F. Stobbe (Philologue 30, 1870,
355 et 364) a, par contre, souligné, que toutes les lettres sont classées dans
un ordre chronologique sévère; de la même façon, C. Peter s'est opposé aux
exceptions de Mommsen (Philologue 32, 1872, 707). Mais quant aux dates
précises des lettres 1 14, c'est l'amis de Otto qui est, à nos yeux, le seul
valable, car il a très ingénieusement déc οuyert certaines contradictions que
ne savaient éviter ni Mommsen, ní ceux qui l'ont c οrrígé (à côté des érudits
cités, nommons tout d'abord J. Asbach, RhI 36, 1881, 38-49; cf. l'énumération chez Schuster, RE XXI, 1, 440, note).
-
Quant à la carrière officielle de Pline, c'est surtout la ρréture, fonction
que Pline remplissait déjà sous Domitien, qui est digne de notre attention,
parce qu'à cette date se rapporte une mention indirecte, mais très importante,
contenue dans le livre χ (éρ. 3a). Examinons si, sur ce point douteux, la date
fixée par Otto est exacte. Ce dernier, dans l'étude citée (p.43-54), est tout d'abord parti de l'interprétation de l'épitre 3a (§ 1): Ut primum ime, domine, indulgentia vestra promovit ad prae f ecturam aerarii Saturni, omnibus advocationibus,
quibus alioqui numquam cram promiscue f unctus, renuntiavi, ut toto animo delegato
mihi i/ lieu vacarem. En analysant ces mots Otto a tâché de prouver que Pline,
tout en étant avocat, n'avait jamais plaidé, quand il remplissait une magistrature; il souligne surtout les expressions alîoqui et promiscue.1) Comme le procès
contre Baebius Massa (cf. éρ. Ill, 4, 4; VI, 29, 8; VII, 33; Tac., Agr. 45)
eut lieu en 93, Pline ne pouvait pas être préteur la même année. On peut fi±er
1 ) On pourrait se servir aussi du témoignage de la lettre I, 23, où Pline dit expressément
.qu'Y l'époque de son tribunat il s'abstint de toute acti νité d'avocat.
13
la date de sa ρréture d'après les a llusions de Pline dans sa lettre-III, 11; ce
qui est extrêmement impo rt ant c'est § 2, touchant le philosophe Artémíd οre:
Equidem, cum essent philosophi ab urbe summoti, fui apud ilium in suburbano
et, quo notabilius, hoc est periculosius, esset, fui praetor. La deuxième expulsion
des philosophes sous Domitien est fixée par Mommsen, d'après une traduction
arménienne d'Eusèbe (Eus., Chron. II, p. 160 Schiene) en 93, tandis que Otto
la fixe dans l'année 95 2) se référant aux dates de saint Jérôme, parce qu'il
les jugeait plus probables (ibid., p. 163). La seule difficulté qu'Otto rencontre
consiste dans le fait que, dès l'année suivante (96), Pline a été nommé ρrαefectus aerarii militaris, qu'il jouissait donc encore de la faveur de Domitien
jusqu'à la fin de son règne, ce qui est contraire aux paroles de Pline, qui,.
lui, prétend n'avoir pas continué sa carrière officielle, si bien commencée,
à partir de l'avènement du régime -de terreur de Domitien, qu'il faut fixer
exactement en 94-95:... si cursu quidam provectus ab illo insidaoss&riinur
principe, antequam pro f iteretur odium bonorum, postquam pro/essus est, substiti ..
(Paneg. 95, 3); de même, d'après Otto il n'est pas juste d'affirmer qu'il ait
été invisus pessimo principi (ibid. 95, 4). C'est là qu'Otto doute alors de la
véracité des p aroles de Pline.
C'est surtout cette déclaration mensongère attribuée à Pline qui a forcé
W. A. Baehrens à s'opposer à la date de la préture, placée par Otto en 95,
et à revenir à la date indiquée par Mommsen en 93. Entre Baehrens et Otto
s'éleva une violente discussion sur le cours de laquelle on est bien informé par
M. Schuster (REXXI,1, 443-5). 3) Schuster termine son apergu de la discussion
en constatant que les raisons présentées par Baehrens contre l'année 95 sont
très importantes. Cette opinion de Schuster a été critiquée dans le compterendu des épreuves de cet article par R. Hanslík (Bure. Jahresber. 282, 1943,
41), qui défendait les dates d'Otto. Schuster n'a pas indiqué, malheureusement,
d'autres auteurs qui s'étaient occupés, après 1927, de la question de la préture
de Pline. C'est surtout R. H. Harte (JRS 25, 1935, 51-54) qui, pour cette
date, se servit du témoignage découlant de la lettre VII, 16, 2 (ois l'in constate
qu'on a fait à Pline la remise d'un an pour recevoir la ρréture); il a même
pris en considération l'an 90 ou 91 ce qui ne correspond pas aux autres témoig
nages, cités plus haut. Il n'était pas alors difficile pour F. Oertel de réfuter
son opinion dans l'article, dans lequel il entreprend la défense de la date
d'Otto (RhΜ 88, 1939, 179-184); il avertit qu'il faut respecter, si l'on juge
la conduite de Pline envers Domitien, l'époque de sa désignation et non
Otto exclut absolument l'an 94, année dans laquelle E. A11ain, Pline le Jeune I,
p. 268-269 place la préture de Pline.
Il s'agit de ces articles: Baehrens, Hermes 58, 1923, 109-112; Otto, SB München
1923, 4. Abh. (pp. 13); Baehrens, D. Lit. Zeitung 45, 1924, 536-538; Otto, Ph W 46,
1926, 732-735; Baehrens, ibid. 47, 1927, 171-174. Après la dernière réponse d'Otto.
(Schlusswort, ibid. 511-512) Baehrens n'a plus répondu, mais il n'a pas été convaincu..
14
Ι'épοque à laquelle il a débuté dans sa fonction: Pline n'a pas pu refuser cette
charge, après le changement du gouvernement de Domitien „vers le pire",
étant déjà désigné comme préteur au début de l'an 94. Du moins il n'aspirait
plus au consulat, car il lui aurait fallu prendre les mesures nécessaires déjà
pendant la vie de Domitien; bref, l'expression substiti (Paneg, 95, 3) signifie
qu'il a renoncé à implorer la grâce de l'empereur; en vue de sa charge, on ne
peut donc pas le traiter de menteur. L'opinion d'Oertel a été reçue par Durry
dans son commentaire sur le Panégyrique (ad 95, 1 et 95, 3). Pline a pu aussi
exagérer — ce qui a été déjà souligné par Otto — et styliser un peu son opinion
sur Domitien. D'ailleurs, la comparaison du „pive" et du „meilleur" empereur
était jadis locus communs chez tous les écrivàíns (cf. H. Bardon, Les Empereurset les lettres 'latines, Paris, 1940, p. 371-372).
Comme d'un côté Oertel a mis au clair la question de la sincérité de Pline
en faveur de la date de la préture, figée par Otto en 95, de l'autre côté Hanslík, 4) se basant sur une nouvelle date du diplôme CIL XVI, 38, 6) ce qui lui
permettait de déplacer toutes les autres dates entre 92-95, a prouvé que la
persécution des philosophes sous Domitien ne peut pas être placée en 93 ,.
mais seulement en 94-95, ce qui correspond à la date de la prétuue de Pline,.
proposée par Otto, c'est-à-dire à 95.
11 semblerait que par le raisonnement de Hanslík le problème soit résolu_
C'est aussi H. Fuchs qui dans son supplément à l'édition nouvelle de Norden
(E. Norden, Die rSm. Literatur, Leipzig, 19546, p. 188) prend sa date de 1a.
ρréture de Pline pour définitive. Mais en 1957 Α. N. Sherwin-White (JRS 47,
1957, 126-130) essaie de nouveau, par des raisons très spirituelles, de renverser la date d'Otto; il revient à l'an 93, proposé par Mommsen. Malheureusement, il ne se servait ni de l'article d'Oertel ni de celui de Hai>Çlik, de sorteque quelques-uns de ses arguments sont déjà en avance réfutes, quoiqu'il
y ait aussi d'autres qui sont très importants. On pourrait même admettre
que Pline ne reniflait pas par principe à son activité d'avocat, tout en
remplissant une charge, et qu'il n'abandonnait ce principe qu'au moment
où il était tribun, vu le caractère particulier de cette magistrature; on pourrait
même admettre que les procès de Baebius Massa et Senecio n'ont duré que
peu de temps (quoique Otto ne croit pas qu'ils auraient pu être terminés
pendant les quatre derniers mois de l'année 93). 11 n'en découle cependant
pas encore que Pline ait été préteur en 93, et no n en 95.
4) Wiener Studien 63, 1948, 126-127. Hanslik avait condamné déjà auparavant
l'opiní n de Harte et il accepta avec joie l'opinion d'Oertel (Surs. Jahresber. 282,
1943, 42 s.).
6 ) Diplδme CIL XVI, 3b daté déjà de l'an 93, après 1a découverte du ,fragment des
fastes d'Ostie de l'an 94; cf. A. Degrassi, I. It. XIII, 1, p. 222; L. Vidman, Fasti Ostienses
(Rοzρrανυ ί SΑ V 67, 1957, 6), ρ. 48.
15.
Naturellement une forte objection est constituée par la preuve (p. 129)
que Pline, au cours des années 96 et 97 (spécialement en 97), menait, d'après
les lettres du Ier livre, la vie d'un homme privé qui pouvait séjourner, même
pendant un temps assez long, éloigné de Rome, sans demander la permission
de son office, quoique juste en 96-9 8, d'après Otto, il eût dû être chargé par
la préfecture du trésor militaire. Il est difficile de réfuter cete objection;
au moins on peut démontrer que la praefectura aerarii Saturnit, que Pline
exer9ait dans les -années 98-100, a été, au point de vue de dignité, plus élevée
que celle du trésor militaire et a été liée à beaucoup plus d'obligations officielles
(cf. W. Ensslin, RE XXΙΙ, 2, 1260); c'est pourquoi Pline a dû demander la
permission de congé (éρ. 8) — pour la permission de congé de la charge du
préfet du trésor militaire nous n'avons aucun document-;-; et en ce temps
il a renoncé à l'exercice de sa profession d'avocat (ép. 3a). Tout cela n'aurait
pas été nécessaire s'il avait administré le trésor militaire.
Il est très important que la date de Hanslik concernant la deuxième expulsion
des philosophes de Rome n'a pas été ébranlée, car c'est aussi celle de la préture
de Pline, même si Hanslik et Otto se sont trompés dans l'interprétation du
passage de saint Jérôme (voir plus haut); Sherwin-White indique (p. 127)
que, dans la traduction de saint Jérôme, il s'agit, vu les années du gouvernement de Domitien, de l'an 95-96 et pas de l'an 94-95, comme l'a exposé
Otto (et d'après lui aussi Hanslik). Μόis tout cela ne change rien à ce fait.
Prenons donc l'an 95 comme -date de la préture de Pline, même si l'on se
rend compte des difficultés qui découlent de cette date pour les deux années
suívantessa). La ρréture de Pline a été le point le plus litigieux dans la chronologie d'Otto; les exemples suivants nous prouverons que, pour les premières
quatorze lettres de la correspondance de Pline avec Trajan, on peut l'accepter
sans réserve.
Quant à la première lettre du recueil, il n'existait pas de doute qu'elle fût
écrite. au début de l'année 98, car elle contient les félicitations à Trajan pour
son élection pour empereur. Il ne s•'agit que du jour où` cette élection a eu lieu
au sénat, fait qui se rattache à la date de la mort de Nerva. La mort du vieil
empereur aurait eu lieu le 25, le 27 ou le 28 janvier 98. Les opinions litigieuses
ont été soigneusement analysées dans les derniers temps par A. Garzetti
(Nerva, Roma, 1950, p. 94-96); celui s'appuie tout d' abord, pour résoudre
ce problème, sur le fait que le dies imperii de Trajan est donné par le 28 janvier
dans le Feriale Duranum (Fink-Hoey-Snyder, Yale Class. &net. 7, 1940, 79).
Alors ce jour-là a eu lieu la première session du sénat après la mort de Nerva que
nous pouvons fixer avec la plus grande vraisemblance au jour précédent
(le 27 janvier). La solution de Garzetti est probante: nous pouvons alors
b6) Le livre de R. Syme (Taeitus, Oxford, 1958) m'est parvenu trop tard de sorte que
je ne peux que constater que Syme, lui aussi, date la préture de Pline en 93 (p. 76, 656 à
658); mais il n'a pas pu utiliser encore l'article de Sherwin-White. - -
16
accepter la date du 28 janvier comme le dies imperii et cela même dans les
lettres de Pline X 52 et 102 (Durry désigne toutes ces lettres par la date du
27 janvier). La lettre elle-même a dû être expédiée de Rome bientôt après
cette date, et cela, comme il semble, par un courrier officiel du sénat.
Quant aux lettres 3-11, elles datent, d'après Asbach (RhM 36, 1881,
39-41), de 98 (pas de 99, comme on croyait avant), mais ce n'est qu'à Otto
qu'appartient le mérite d'avoir prouvé cette date par une analyse détaillée
(p. 65-83). Il est surprenant qu'il y ait des commentateurs qui acceptent
la date de Mommsen, ou qui indiquent au moins les deux dates pour que
chacun en puisse choisir à volonté. C'est ainsi que A. M. Guillemin dans
l'Introduction de son édíti οn indique, dans la plupart des cas, les dates de
Mommsen et seulement dans une note les dates d'Otto; Durry le' fait de la
même façon acceptant les deux dates, comme si c'était tout égal de choisir
n'importe quelle date; à la fin, cependant, il se range de côté de Mommsen.
Quant à Sokolov (1946, 1956), nous ayons. déjà attiré l'attention sur le fait
qu'il n'avait pas évité plusieurs imprécisions. Le schéma d'Otto de la carrière
officielle de Pline est déjà accepté par les manuels, fondamentaux, p. ex.
Schanz-Hosius (Gesch. d. röm. Lit. II 4, 1935, 657) et M. Schuster (RE XXI,
1, 442); celui-ci a cependant certains doutes, comme nous l'ayons déjà vu,
sur la date de la ρréture. .
Accordons maintenant plus d'attention à la lettre 3a que nous avons déjà
mentionnée en rapport avec la préture de Pline. Dans le § 1 est mentionnée
expressément la praefectura aerarii Saturni, dont Pline n'était pas chargé
depuis longtemps, comme il semble d'après le contenu de la lettre. Très importants sont les mots indulgentia vestra (Ut primum me, domine, indulgentia
vestra promeut . ..) qui, également comme l'expression delegati a vobis of ficii
(ép. 8,3), ne peuvent se rapporter qu'à Nerva et Trajan. Dans l'emploi du
pluriel, il y a une certaine difficulté, que Mommsen a résolue par la supposition
que Pline est entré en fonction encore pendant la vie de Nerva (alors avant
-le 27 janvier 98), mais Trajan a dû le confirmer dans cette fonction après son
avènement (Ges. Sehr. IV, p. 424). Merrill a bien senti la faiblesse de cet
argument: il objecte qu'il est vrai que le nouvel empereur pouvait démíssioner
des magistrats, mais il ne les confirmait pas (AJPh 23, 1902, 403). C'est la
raison pour laquelle il suppose que Pline a été seulement désigné par Nerva,
mals que ce n'est que sous Trajan qu'il est entré en fonction. Otto a bien démontré (op. 1., 59 ss.) que nous pouvons plutôt prendre en considération la
corégence de Nerva et de Trajan, ce dont nous ne possédons pas de témoignages
directs, mais seulement les indices (Panég. 8, 6), ce qui est bien compréhensible
pendant ,la corégence relativement courte, qui ne durait que du mois
d'octobre 97 jusqu'à la mort de Nerva; en même temps, avec une certaine
inconséquence, il croit que Pline, après avoir à peine pris possession
de ses fonctions avant la mort de Nerva, a été désigné par les deux souverains.
17
Il est pos s ible de prendre la corégence de Nerva et de Trajan comme un fait
prouvé, pas seulement comme une supposition comme le fait Otto en expliquant le pluriel dans les lettres 3a et 8. La corégence a été prouvée par une
analyse détaillée du passage relatif du Panégyrique par E. Kornemann (Doppelprinzipat, Leipzig, 1930, p. 69-71); c'est aussi A. Garzetti qui n'en doute
pas (Nerva, p. 86 ss).
Pline et Cornutus Tertullus n'avaient pas encore terminé leur deuxième
année de préfecture, qui précédait ordinairement la charge de consulat,
quand ils ont été désignés consuls le 9 janvier de 100 (Panég. 91, 1): Nondum
biennium compleveramus in of ficio laboriosissimo et maximo, cum tu nobis,
optime principum, f ortissime imperatorum, cbnsulatum obtulisti. Comme Mommsen a fait remarquer (p. 423), Pline a pris possession de la préfecture tout
de suite après le 9 janvier 98 et non seulement au moment oti son précurseur
dans la préfecture, Bittius Proculus, est entré en fonction de consul. Merrill
croit, au contraire (p. 404 s.), que les préfets n'ont donné leur démission
qu'à la veille de leur entrée en fonction de consul; il suppose aussi, d'après
la lettre IX, 13 (tout d'abord vu le § 23: nam collega Certi consulatum, successorem Certus accepit) que Publicius Certus a été privé de la préfecture prématurément et qu'il a été provisoirement remplacé et que les deux, c'est-à-dire le
substitut et Bittius Proculus, n'ont été relevés de leur fonction que dans la
deuxième moitié de l'an 98 par Pline et Cornutus Tertullus, juste avant le
moment où Proculus a pris la charge de consul.
eοmparοns donc cette théorie avec les indications de temps fournies dans
-les derniers temps par les nouveaux fragments des fastes d'Ostie (cf. mon
art icle, LF, 3 [78], 1955, 183-4): le procès avec Publicius Certus, dont
on parle dans la lettre IX, 13, n'a eu lieu que vers le début de l'an 97, plus
précisément entre le 9 janvier et le ler mai; alors Bittius Proculus n'a pu être
chargé du consulat plus tôt que dans le dernier nundinium de 98, c'est-à-dire
le ler novembre. On ne peut pas supposer que Pline soit entré en fonction
de préfet immédiatement avant cette date, car nous savons par la lettre X, 8
(classée par Otto avec certitude dans l'année 98) qu'il a demandé à l'empereur
le congé de cette charge déjà pour le mois de septembre 98. Il ne nous reste que
d'accepter la date de son entrée en fonction de préfet proposée déjà par Mommsen
et reconnue par Otto, c'est-à-dire entre le 9 et 27 janvier 98. Otto comme
Mommsen prennent en considération plutôt sa désignation que son insta llation.
Mais Pline a pu être désigné préfet ainsi que consules suf fecti (parmi ceux-1à
aussi Bittius Prοculus) déjà le 9 janvier; et tout de suite après, encore avant
la mort de Nerva, il a pu entrer en fonction. La supposition que les préfets
du trésor de Saturne aient été désignés déjà vers la fin de l'année courante et que
leurs prédécesseurs (comme Bittius Proculus) n'ont été désignés comme consuls
qu'après cette date, c'est-à-d ire le 9 janvier, est très attirante; bientôt après
cette date, désignés comme consuls, ils ont pu remettre définitivement le
18
trésοι à leurs successeurs. Il est peu vraisemblable qu'un autre ait été en
fonction jusqu'à cette époque au lieu de Publicius Certus, comme le juge
Merril; il n'est pas nécessaire de le déduire de la lettre en question IX, 13.
Il reste encore à savoir jusqu'à quelle époque Pline a exercé la préfecture.
Cela dépend tout d'abord de la date de la lettre 8, qu'on ne peut pas p incer
dans l'année 1 0 1, comme l'a demandé Mommsen, mais dans l'année 98, vu les
raisons persuasives d'Otto (p. 77 ss.). Par cette lettre, Pline demande à l'empereur le congé pour le mois de septembre, probablement de la charge de préfet
du trésor de Saturne. Nous apprenons par une autre lettre ( ΠΙ, 4, 2) que les
ambassadeurs de la Bétique sont venus demander à Pline de prendre à leur
charge l'accusation contre Caecilius Classicus. Mommsen (p. 377) était de
l'avis que Pline n'a pu plaider qu'en 101; c'est alors pendant cette année
qu'a terminé sa charge de préfet, qu'il avait exercée même pendant son consulat durant l'année 100. Pour cette dernière affirmation Mommsen s'appuie
sur l'explication du Panégyrique (92,1): Illud vero guam insigne, guod nabis
prae f ectis aerario consulatum ante guam successorem dedisti! A.ucta est dignitas
dignitate, nec continuatus tantum, sed feminatus est honor, f inemque potestatis altenus altera) , tamguam parum esset excipere, praevenit. Mais Otto a soutenu aise
conviction que l'épître 8 date de 98 et que, même en se basant sur le passage en question du Panégyrique, on ne peut pas affirmer que Pline aurai.
pu exercer à la fois la charge de consul et de préfet; il déclare que tout de suite
après la préfecture il est entré en fonction de consul. D'après cela la praef ectura•
aerarii Saturni de Pline aurait duré environ deux ans et demi.
On peut supposer qu'il était tout à fait extraordinaire de devenir consul
(désigné) avant la nomination du successeur de la charge de préfecture (ante
guam successorem dedisti); c'est la raison pour laquelle Pline a tellement•
souligné ce fait, car il était, probablement, plus courant de nommer les nouveaux préfets ou simultanément (le 9 janvier?), ou peut-être encore plus tôt•
(c'est-à-dire vers la fin de l'année) pour qu'ils puissent tout de suite au début•
de l'année (le 9 janvier?) entrer en fonction (voir plus haut). Cela signifierait.
alors que dans le cas de la désignation de Pline on procédait tout autrement que
dans le cas de la désignation de Bittius Proculus en 98. Malheureusement,
on ne sait rien sur la date de l'entrée dans ces fonctions; il ne nous reste done
que des suppositions. Il est évident que l'opinion d'Otto sur la durée de 1 &
préfecture de Pline est juste; je renvoie à son argumentation. Durrp commet.
une erreur en fixant, sans en indiquer les raisons, la date de l'épître 8 (avec
un point d'interrogation) dans l'année 101. De même dans un des derniers.
volumes de RE (XXII, 2, 1954, 1259 s. v. ρraefectus aerarii Saturni) W. Ensslin•
défend l'avis de Mommsen, en indiquant que la préfecture de Fi ne durait
quatre ans (98-101).
(
Dans la même lettre 3a on parle du procès de Marius Príscus: les habitants
19
de la province d'Afrique sont venus pour demander à Pline de devenir lem
patron pendant le procès contre Marius Priscus qui venait de terminer ses
fonctions de gouverneur de la province. Pline refusa tout d'abord, indiquant
les raisons, contenues dans le § 1. de la lettre; mais ensuite, cédant à l'insistance
du consul désigné qui n'est pas nommé, il prit la décision de protéger Ies habitants de ladite province et demanda à l'empereur de lui en conférer le droit.
Nous allons citer d'autres raisons pour soutenir la justesse de la date de la
lettre et du procès proposée par Otto et nous tacherons de préciser, en même
temps, le nom du consul désigné.
Pour fixer la date du procès, il faut partir de la lettre Π. 11. Nous savons
avec certitude que le procès a été terminé déjà en janvier 100 (ép. II, 11, 10);
c'était déjà la troisième actio. La deuxième actio précédait de peu, comme il
découle du même paragraphe; elle a eu lieu le plus probablement au mois
de décembre de 99. Mais entre la première et la deuxième assignation il y avait
sûrement un intervalle de quelques mois, car il était nécessaire de faire venir
de nouveaux témoins. Se basant sur ces raisons, tous on situé, avant Otto,
l'exception d'Asbach (Rh' 36, 1881, 39-41) la première et la deuxième
assignation, et même le début du procès 'par Pline, dans l'an 99. C'est aussi
Durry qui met la lettre 3a dans la deuxième moitié de l'année 99. Otto a soigneusement analysé le procès dans l'étude citée (p. 70-76) et il est arrivé à la
conclusion que Pline a pris la protection des provinciaux déjà, en 98, et cela
en été, bientôt après que Marius Priscus, vers le ter juin, est rentré de l'Afrique
(malheureusement la date de son gouvernement n'est indiquée nulle part
avec précision); mais depuis ce temps jusqu'à la première assignation a dû
s'écouler un intervalle très long, auquel il faudra aussi ajouter le congé de Pline
en septembre 98. Les préparatifs du procès ont été, d'après Otto, très longs;
la première «ctii n'eut lieu qu'au cours de 99; par ce fait, la date du consulat
de Ti. lulius Ferox en 99 n'est pas douteuse; c'est celui-ci qui est mentionné
au cours de cette assignation comme consul designates (II, 11, 5). Les fastes
consulaires confirment indirectement aussi la date de la deuxième assignation
proposée par Otto: comme j'ai expliqué dans l'étude citée (LF 3 [78), 1955,
183-184), l'année 98 n'est pas, quYnt aux consulats, vacante et lulius Ferox
n'a pu que dans l'an 99 être en charge de ces fonctions; nous savons aussi
qu'il n'a pas été consul Ordinarius en 99; il en découle que la première actio
(II, 11, 2-7) n'a pu avoir lieu qu'après le 9 janvier de 99. La date de la lettre
3a, dans laquelle o i parle de la désignation de Pline comme patron, est plus
que probable: Cela signifie que le procès durait depuis l'été de 98 jusqu'au
janvier de 100.
Il n'y a qu'une seule chose qu'a oubliée Otto: c'est qu'il s'agit du consul
désigné, mais pas nommé (ép. 3a): Se il cum poste« consul designatus censuisset
agendum no3iscum, quorum erat excusztio rece ρt« ... Hardy, qui dans son
édition (1889) a placé la lettre dans la deuxième moitié de 99, pensait que le
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