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Cours d’Algèbre II Prof. E. Bayer Fluckiger Bachelor Semestre 4 26 mars 2014 Série 18 Exercice 1. Montrer que tout corps est un anneau intègre. Solution. Soit K un corps. Si x ∈ K est un diviseur de zéro, alors il existe y ∈ K ∗ tel que xy = 0. En multipliant par l’inverse de y, on trouve que x = 0, une contradiction. Définition 1. Soit A un anneau. On appelle nilpotent de A tout élément x de A pour lequel il existe n ∈ N \ {0} tel que xn = 0. Exercice 2. Soit n ≥ 2 un entier. Donner la liste des niplotents de Z/nZ. Solution. Un élément [x]n ∈ Z/nZ est nilpotent si et seulement si il existe un entier m m > 0 tel que [x]m n = 0, c’est-à-dire si n | x . Par le théorème fondamental de l’arithmétique, on remarque qu’il existe m > 0 tel que n | x si et seulement si tout nombre premier divisant n divise x. Par conséquent, l’ensemble des nilpotents de Z/nZ est {[x]n : p | n ⇒ p | x}. Par exemple, si n = 6, cet ensemble est égal à {[0]6 }, et si n = 8, cet ensemble est égal à {[0]8 , [2]8 , [4]8 , [6]8 }. Exercice 3. Soient p, q deux nombres premiers distincts, et n = pq. Soit e un entier premier à ϕ(n). (1) Que vaut ϕ(n) ? (2) Soit x ∈ (Z/nZ)∗ . On note y = xe . Montrer l’existence de d ∈ N tel que x = y d . En déduire que y est une unité de Z/nZ. Remarque culturelle : Si n est très grand, calculer x à partir de y et e sans connaı̂tre les deux facteurs p et q de n est un problème chronophage. Cette remarque est à la base du protocole cryptographique RSA. 2 Solution. (1) Par le théorème chinois, il existe un isomorphisme Z/pqZ ∼ = Z/pZ×Z/qZ, puisque p et q sont premiers entre eux. Cet isomorphisme se restreint en un isomorphisme (Z/pq)∗ ∼ = (Z/pZ)∗ × (Z/qZ)∗ . = (Z/pZ × Z/qZ)∗ ∼ Par conséquent, ϕ(pq) = |(Z/pqZ)∗ | = |(Z/pZ)∗ × (Z/qZ)∗ | = |(Z/pZ)∗ ||(Z/QZ)∗ | = ϕ(p)ϕ(q) = (p − 1)(q − 1) (2) Comme e est premier à ϕ(n), il existe une relation de Bézout de+aϕ(n) = 1, pour des entiers d, a ∈ Z. Montrons que y d = x dans Z/nZ. Par abus de notation, écrivons encore y (resp. x) un représentant de la classe de y (resp. x) modulo n. Par l’isomorphisme Z/pqZ ∼ = Z/pZ × Z/qZ, [m]pq 7→ d ([m]p , [m]q ), il suffit de montrer que y ≡ x modulo p et modulo q. Par le premier point, y d = xed = x1−aϕ(n) = x1−a(p−1)(q−1) . Or, xa(p−1)(q−1) = (xa(q−1) )p−1 ≡ 1 (mod p) par un théorème de Lagrange dans (Z/pZ)× . Par symétrie, y d ≡ 1 (mod q), ce qui implique le résultat. Puisque y = xe et x ∈ (Z/nZ)∗ , il est clair que y ∈ (Z/nZ)∗ . Exercice 4. Soient n un entier et G un groupe cyclique d’ordre n. (1) Montrer que G a exactement ϕ(d) éléments d’ordre d. X (2) En déduire que n = ϕ(d). d|n Solution. (1) Puisque est cyclique d’ordre n, on a G ∼ = Z/nZ et on peut supposer sans perte de généralité que G = Z/nZ dans la suite de l’argument. Rappelons que les sous-groupes de G sont cycliques, de la forme Ha = aZ/nZ, pour a ≥ 1 un diviseur de n. Puisque, |Ha | = n/a, ce sous-groupe est généré par un élément d’ordre n/a. D’autre part, tout élément d’ordre n/a de G génère un sous-groupe H d’ordre n/a. Comme Ha est le seul sous-groupe de cet ordre, on a H = Ha . Ainsi, Gd := {g ∈ G : g a ordre d} = {g ∈ G : g génère Hn/d }. Or, Ha ∼ = Z/(n/a)Z, qui possède |(Z/(n/a)Z)∗ | = ϕ(n/a) générateurs. Par conséquent, |Gd | = ϕ(d) pour tout d | n. Si d ∤ n, un théorème de Lagrange indique que Gd est vide. 3 (2) L’ensemble G peut être partitionné comme l’union disjointe des ensembles Gd définis ci-dessus (pour d | n). Par le premier point, on obtient que X X |G| = |Gd | = ϕ(d). d|n d|n Exercice 5. Soient p ≥ 3 un nombre premier, et n un entier. On admettra que (Z/pZ)∗ est un groupe cyclique. (1) Montrer par récurrence sur n l’existence de mn ∈ N premier à p tel que n (1 + p)p = 1 + mn pn+1 . En déduire l’ordre multiplicatif de [1 + p]pn ∈ (Z/pn Z)∗ . (2) Montrer l’existence d’un homomorphisme de groupes f : (Z/pn Z)∗ −→ (Z/pZ)∗ surjectif et de noyau engendré (multiplicativement) par 1 + p. (3) Montrer l’existence d’un élément x ∈ (Z/pn Z)∗ d’ordre (multiplicatif) p − 1. (4) Montrer que (Z/pn Z)∗ est isomorphe à Z/ϕ (pn ) Z. Solution. n (1) Si n = 0, on a (1 + p)p = 1 + p, donc mn = 1 convient. Supposons le résultat vérifié pour un entier n − 1 ≥ 0. On a alors p pn pn−1 (1 + p) = (1 + p) = (1 + mn−1 pn )p p X p = min−1 pni i i=0 p−1 X p p np min−1 pni = 1 + mn−1 p + i i=1 ! p−1 X p = 1 + pn+1 mpn−1 pn(p−1)−1 + min−1 pn(i−1)−1 . i i=1 Puisque p ≥ 3 et n ≥ 1, la somme entre parenthèses dans la dernière expression est un entier, que nous notons mn . Observons que : • On a mpn−1 pn(p−1)−1 ≡ 0 (mod p), car n(p − 1) − 1 > 0. p p i! = . En effet, • Pour tout i = 1, . . . , p − 1, le premier p divise i i p de i! sont p · · · (p − i + 1), d’où p | i i!. Or, tous les diviseurs premiers strictement inférieurs à p. Par conséquent, p divise pi . 4 • En utilisant le point précédent et le fait que n ≥ 3, on trouve que p−1 X p i=1 i min−1 pn(i−1)−1 = min−1 ≡ min−1 p−1 X p p 2 n−1 min−1 pn(i−1)−1 mn−1 p + + i 2 i=1 (mod p). Ceci montre que mn ≡ min−1 6≡ 0 (mod p), puisque mn−1 est premier à p par hypothèse. En d’autres termes, mn est premier à p comme souhaité. n−1 Ainsi, on a (1+p)p ≡ 1 (mod pn ). Par conséquent, l’ordre de [1+p]pn ∈ k (Z/pn Z)∗ divise pn−1 . D’autre part, si k est un entier tel que (1 + p)p ≡ 1 (mod pn ), alors 1 + mk pk+1 ≡ 1 (mod pn ), d’où mk pk+1 ≡ 0 (mod pn ). En d’autres termes, pn | mk pk+1 . Comme (p, mk ) = 1, cela implique que pn | pk+1 , donc k ≥ n − 1.. On en déduit que l’ordre de [1 + p]pn ∈ (Z/pn Z)∗ est égal à n − 1. (2) Définissons f : Z/pn Z −→ Z/pZ par f ([x]pn ) = [x]p . Il s’agit d’un homomorphisme de groupes bien défini, puisque si x ≡ y (mod pn ), alors x ≡ y (mod p). Par le cours, cet homomorphisme induit par restriction un homomorphisme surjectif (Z/pn Z)∗ −→ (Z/pZ)∗ , que nous noterons aussi f . Son noyau contient [1 + p]pn , donc également le sous-groupe d’ordre pn−1 (par le premier point) engendré par cet élément. Par le premier théorème d’isomorphisme, | ker f | = |(Z/pn Z)∗ || ϕ(pn ) = = pn−1 |(Z/pZ)∗ | ϕ(p) où la dernière égalité provient de l’exercice 3 de la série 17. Par conséquent, ker f = h[1 + p]pn i puisqu’une inclusion d’ensembles finis de même cardinalité est une égalité. (3) Suivant l’énoncé, nous admettons que (Z/pZ)∗ est cyclique. Par conséquent, ce groupe possède un élément x d’ordre |(Z/pZ)∗ | = ϕ(p) = p − 1. Comme f est surjective, soit y ∈ (Z/pn Z)∗ tel que f (y) = x. Par l’exercice 1 de la série 4, p − 1 divise l’ordre de y. Soit r un entier tel que ord(y) = r(p − 1). L’élément y r a alors ordre p − 1. (4) Par définition, l’ordre de (Z/pn Z)∗ est égal à ϕ(pn ). Afin d’obtenir l’isomorphisme souhaité, il suffit par le cours de montrer que (Z/pn Z)∗ est cyclique. Pour cela, il suffit, à nouveau par le cours, de montrer que (Z/pn Z)∗ possède un élément d’ordre égal à sa cardinalité ϕ(pn ). 5 Par l’exercice 3 de la série 17, ϕ(pn ) = pn−1 (p − 1). Par le premier et le troisième point de l’exercice, le groupe (Z/pn Z)∗ possède un élément x d’ordre pn−1 et un élément y d’ordre p − 1. Lemme 1. Soit G un groupe commutatif. Si x, y ∈ G ont ordre m, respectivement n, avec (m, n) = 1, alors xy a ordre mn. Démonstration. Comme (xy)mn = (xm )n (y n )m = e, l’ordre r de xy divise mn. En élevant l’équation (xy)r = 1 à la puissance n, on trouve que xrn = 1 (en utilisant la commutativité), d’où m | rn. Comme (m, n) = 1, on a m | r. Par symétrie (en utilisant la commutativité), il vient que m, n | r. Comme (m, n) = 1, conclut que mn divise r, d’où r = mn. Attention : ce fait n’est en général pas vrai si le groupe n’est pas commutatif. Par contre, notons qu’il suffit de supposer que x et y commutent. Comme pn et p−1 sont premiers entre eux (si d | pn , p−1, alors d | p, p−1, donc d | p − (p − 1) = 1, d’où d = ±1), on conclut du lemme que xy a ordre pn (p − 1), ce qui termine la démonstration.