ASIE DU SUD-EST - Département d`information et de communication
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ASIE DU SUD-EST 10S En Asie du Sud-Est, trois pays font partie de la Francophonie en raison de l'influence exercée historiquement par la France. Le Cambodge, le Laos et le Vietnam participent aux Sommets. Ils ont respectivement le cambodgien, le laotien et le vietnamien comme seule langue officielle. Le français continue d'y occuper une certaine place dans le domaine de l'enseignement, ainsi que dans le secteur culturel (en particulier la littérature et le cinéma), même si le nombre de personnes dont c'est la langue d'usage n'est guère élevé. La décision de tenir le VIle Sommet de la Francophonie à Hanoi, capitale du Vietnam, en novembre 1997 se voulait un symbole du renouveau de l'Asie du Sud-Est. La Francophonie entend participer au développement de ces trois pays, qui compteront bientôt une centaine de millions d'habitants. La présence française en Asie a également laissé des traces à Pondichéry, un territoire de 480 km 2 , situé sur la côte 8 MER DE CHINE de Coromandel en Inde, et qui compte km MÉRIDIONALE 800000 habitants. Il fut rétrocédé à _ _ _ _ _ _10,4°-_ _ _ _ _ __ 1?,-SO_ _--, l'Inde en 1956. (Rappelons qu'outre Pondichéry, il y eut quatre autres comptoirs français en Inde: Mahé, Chandernagor, Karikal et Yanaon) . 0 1 ______ ONPEUTCONSUlTER _ _______________________________ BASILICO Sandrine, Mondialisation et intégration des minorités ethniques au Viêt-Nam: le cas des Muong et des Thaï, Paris, L'Harmattan, 2003, 191 p. BRUNEAU Michel, TAILLARD Christian et al., Asie du Sud-Est, Océanie, Paris/Montpellier, Belin/Reclus (Géographie universelle), 1995, 479 p. CONDOMINAS Georges, L'Espace social: à propos de l'Asie du Sud-Est, Paris, Les Indes savantes, 2004. DE KONINCK R., DÉRY S., MATTHEWS B. et]. NAGARA, Identités, territoires et environnement en Asie du Sud-Estjldentities, territory and environment in Southeast Asia, Québec, GÉRAC, 1999. GIAO Nguyen-Huu et Bernard KOUCHNER, Le Livre du Giao: au cœur du Viêt-Nam, Paris, Table Ronde, 2004, 218 p. HUE Bernard (dir.), Littérature de la péninsule indochinoise, Paris, Karthala/AUF, 1999,461 p. HÛU GNOC, Esquisses pour un portrait de la culture vietnamienne, Hanoi, éd. The Gioi, 1996-1997, 588 p. LECHERNY Christian et Nicolas RÉGAUD, Les Guerres d'Indochine (xe-xxesiècles), Paris, PUF (Que sais-je ?), 1996, 127 p. RICHER P. (dir.), Crises en Asie du Sud-Est, Paris, Presses de Sciences-Po., 1999. TERTRAIS Hugues, Asie du Sud-Est, le décollage, Paris, Marabout/Le Monde-Éd., 1996,208 p. WERLY Richard, Dans les soutes du « miracle» asiatique, Paris, Stock, 1998, 295 p. AFI2006 + 283 ASIE DU SUD-EST Cambodge Laos Vietnam Royaume du Cambodge République démocratique populaire lao République socialiste du Vietnam Phnom Penh Vientiane Hanoi 181040 236800 329560 monarchie unitaire, régime parlementaire république unitaire, régime communiste république, régime communiste Norodon Sihamoni Khamtai Siphamdon Tran Duc Luong 29-10-2004 26-02-1998 24-09-1997 Hun Sen Boungnang Vorachit Phan Van Khai 14-01-1985 27-03-2001 25-09-1997 khmer lao vietnamien Autres langues français, anglais français, anglais, dialectes (taï, phouteung, hmong) anglais, français , chinois, khmer Principales religions et spiritualités identifiées en % de la population bouddhisme (95) bouddhisme (60) animisme et autres (40) bouddhisme (10,8) catholicisme (6,7) cao-daïsme (1 ,1) protestantisme et islam (0,6) Population (en M) Moins de 15 ans en % Plus de 65 ans en % Indice de fécondité Espérance de vie H/F Alphabétisation en % 13,6 37,3 3,1 3,4 55,9/62 73,6 6,2 41 ,6 3,2 4,8 53,1/57,2 66,4 83,5 27,9 5,8 1,9 67,8/73,6 90,3 Nom officiel Capitale Superficie (km 2 ) Politique Chef d'État Entrée en fonction Chef du gouvernement Entrée en fonction Langues officielles IOH (rang/177) PIB (en G PPA)' PIB/hab. (PPA) Monnaie 2 EURO US$ 130 n.d. 108 27 2000 11,3 1900 227,2 2700 riel 0,00021 0,00025 kip 0,00008 0,00010 dong 0,00005 0,00006 Principales exportations vêtements, bois d'œuvre, caoutchouc, riz, poissons, tabac, chaussures Principales importations prod . pétroliers, cigarettes, or, matériaux de construction, machinerie, véhicules, prod . pharmaceutiques Principaux partenaires commerciaux machinerie, automobiles, combustibles, biens de consommation Vietnam, Thaïlande, Chine, Hong Chine, Thaïlande, Vietnam , Kong, États-Unis, Singapour, France, Allemagne, Belgique Corée du Sud, Allemagne, Taiwan, Royaume-Uni ' Taux de change à parité de pouvoir d'achat Taux au 22 septembre 2005, donné à titre indicatif 2 vêtements, bois d'œuvre, café, pétrole brut, prod . aquatiques, électricité, étain riz, café, caoutchouc, thé, vêtements, chaussures machinerie, prod. pétroliers, engrais, acier, coton , grains, ciment, véhicules Singapour, Japon, Honk Kong, Corée du Sud, Taiwan , Chine, Thaïlande, Allemagne, États-Unis, Australie Sources: The World Factbook 2005 L'État du monde 2005 La Francophonie dans le monde 2002 -2003 CAMBODGE membr.e Pierre GILLEITE Rédacteur en chef au quotidien Cambodge Soir [email protected] POLITIQUE L es Il mois de crise qui ont précédé la formation, le 15 juillet 2004, d'un nouveau gouvernement de coalition associant le parti du premier ministre Hun Sen, le Parti du peuple cambodgien (PPC), et celui du prince Ranariddh, le Funcinpec, n'auront pas été sans incidences sur la vie politique du Royaume. Allié du prince Ranariddh durant toute la durée de cette crise, Sam Rainsy, président du Parti Sam Rainsy (PSR) et l'un des plus farouches opposants à Hun Sen, a refusé de suivre son partenaire au sein du gouvernement. Entre les deux camps, le ton a monté pour aboutir le 3 février 2005 à la levée de l'immunité parlementaire de trois députés du PSR, dont celle de son président. Ce dernier et un autre élu sont sous le coup de poursuites judiciaires engagées contre eux par le prince Ranariddh ou Hun Sen Hun Sen pour diffamation. Tous deux ont décidé de quitter le pays, s'estimant menacés, et Sam Rainsy a entrepris une tournée des capitales pour dénoncer les tracas dont il est l'objet. Plus grave, un troisième député du PSR a été jeté en prison dès son immunité retirée : il a été accusé de constitution de forces armées illégales visant à renverser le gouvernement et son affaire est traitée par la Cour militaire. Depuis, les 21 autres députés de ce parti ont décidé de boycotter les sessions de l'Assemblée nationale. Pour eux, le PSR est la cible d'un complot destiné à l'écarter de la vie politique. À cette accusation, PPC et Funcinpec répondent qu'il s'agit là d'affaires strictement judiciaires . Les États-Unis comme l'Union européenne se sont dits préoccupés par cette intrusion de la justice dans le débat politique. Le représentant spécial du seAFI2006 crétaire général des Nations Unies pour les Droits de l'homme au Cambodge est allé jusqu'à s'inquiéter d'une « dérive autocratique » du premier ministre Hun Sen. Fort d'un solide soutien au parlement, d'un exécutif certes pléthorique - plus de 300 ministres, secrétaires et sous-secrétaires d'État - mais uni derrière lui, et d'une relation apaisée avec le nouveau roi Norodom Sihamoni à la neutralité politique affichée, Hun Sen Norodom Sihamoni CAMBODGE Géographie Pays de la péninsule indochinoise, fertilisé par les crues du Mékong. Histoire 1863-1953 Protectorat français. 1941 Norodom Sihanouk au pouvoir. 1970 Lon Nol, soutenu par les ÉtatsUnis, renverse Sihanouk. 1975 Les Khmers rouges renversent Lon Nol. Dictature meurtrière de Pol Pot et Khieu Samphan. 1979-1989 Présence vietnamienne. République proclamée de Kampuchea. 1993 Sihanouk proclamé roi. Monarchie constitutionnelle. 1997 Luttes de pouvoir entre les deux premiers ministres: Hun Sen chasse le prince Ranariddh, remplacé par Ung Huot. 1998 Premières élections démocratiques. Hun Sen dirige un gouvernement de coalition. 2002 Zone de libre-échange avec les dix pays de l'ASEAN (Association des Nations d'Asie du Sud-Est) 285 ASIE DU SUD-EST prend ces critiques-là avec distance, sinon de haut. Sa priorité est de montrer qu'avec la « stratégie rectangulaire » de son gouvernement, centrée sur la « bonne gouvernance » pour parvenir à la réduction de la pauvreté, il reste l'homme qui peut mettre en œuvre les réformes réclamées entre autres par la communauté des bailleurs de fonds. Car celle-ci commence à manifester une certaine impatience, quoique avec mesure. En conséquence, lors de la réunion du Groupe consultatif des pays et institutions donateurs en décembre 2004, une légère baisse des promesses d'aide a été ainsi enregistrée, de 10 millions US $ par rapport à 2002 pour un montant total de 504 millions US $. « Nous n'avons pas constaté les progrès que tout le monde attendait », avait résumé l'ambassadeur du]apon, dont le pays reste malgré tout le premier bailleur de fonds du Royaume. Lutte contre la corruption, réforme judiciaire, transparence dans la gestion des biens de l'État et des ressources naturelles du pays constituent toujours des objectifs à atteindre, de l'aveu même d'un gouvernement qui peut donner le sentiment, à la longue, de se satisfaire de déclarations de bonne intention. Une loi contre la corruption a cependant été promise pour la fin de l'année 2005 et, soi-disant pour faire avancer la réforme judiciaire, le premier ministre, fidèle à sa manière directe de gouverner, a lancé, début 2005, une opération « main de fer » contre des magistrats suspectés de corruption, lesquels font l'objet de poursuites. Unies après huit années de tergiversations et de négociations. Le procès pourrait commencer début 2006, si toutefois les délais administratifs et financiers sont tenus. Certains craignent cependant que le gouvernement fasse traîner les choses, de telle sorte qu'il ne puisse être en mesure de siéger pendant que les principaux intéressés, aujourd'hui âgés, et certains malades, sont encore en vie. Cela, spéculent les sceptiques, pour éviter de déplaire à la Chine, autrefois principal soutien des Khmers rouges et aujourd'hui amie de Phnom Penh, et pour ne pas faire remonter à la surface l'histoire traumatique du génocide dans laquelle bon nombre de personnalités politiques aujourd'hui encore sur le devant de la scène ont été impliquées. Cependant, le gouvernement ne cesse de répéter sa volonté de voir ce processus judiciaire aller à son terme. Avec le renouvellement en janvier 2006 du Sénat au suffrage indirect -les sénateurs seront élus par les membres des conseils communaux -, le pays va entrer dans une période de forte activité politique. En 2007 auront lieu les élections communales et l'année suivante, les législatives. S'il est une question qui pourrait occuper le devant des débats durant ces échéances, ce serait celle des frontières et de la défense de l'intégrité territoriale du Cambodge. Pour répondre à la demande du roi-père Norodom Sihanouk, maintenant « en retraite », qui s'inquiète des grignotages de territoire dont serait victime le Cambodge sur ses frontières avec la Thaïlande et surtout avec le VietCeux et celles qui attendent nam, un Conseil national du procès des anciens dirisupérieur des affaires frontalières, geants khmers rouges qu'il conprésidé par le roi-père, a été créé tribuera à la réforme judiciaire et en 2005 par le gouvernement. à la lutte contre l'impunité Cette institution doit conseiller auront été satisfaits d'entendre l'exécutif dans d'éventuelles négocette année Kofi Annan, secréciations avec les pays voisins pour taire général des Nations Unies, aboutir à des tracés frontaliers redéclarer que le tribunal extraorconnus par tous de manière défidinaire imaginé pour l'occasion nitive. Même s'il y a fort à parier va pouvoir être mis en place. que ce Conseil n'aura que peu L'Assemblée nationale a adopté d'influence sur la politique du l'ensemble des amendements gouvernement dans ce domaine, Koli Annan permettant la création de chamsa création montre que la question bres extraordinaires composées de magis- des frontières, thème récurrent d'agitation trats cambodgiens et étrangers au sein du des opposants à Hun Sen, peut constituer système judiciaire du pays, selon les ter- une ligne de fracture dans le débat politimes de l'accord signé avec les Nations que intérieur. 286 AFI2006 CAMBODGE ÉCONOMIE Le premier ministre devrait avoir bénéficié en 2005 d'une conjoncture économique bien meilleure que prévu. Alors que le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale avaient estimé que la croissance plongerait à 2,5 %, contre 6 % en 2004, celle-ci devrait se situer aux alentours de 5 %, selon les prévisions du FMI. À l'origine de l'appréciation, la résistance du secteur textile, premier secteur exportateur - 80 % et 12 % du PIE - et premier employeur de l'industrie - 270 000 emplois -, plus forte que ne l'attendaient les experts après la fin du système des quotas encadré par l'Accord multifibre. Ceux-ci pensaient que les exportations cambodgiennes souffriraient de la concurrence de la Chine. Mais il semble que les frictions commerciales opposant l'Union européenne et les États-Unis à la Chine ont plutôt encouragé les acheteurs à ne pas dépendre entièrement de Pékin. Le Cambodge a apparemment réussi dans ce contexte à tirer son épingle du jeu, malgré sa faible compétitivité. Nombre de handicaps pèsent sur ce secteur qui pourraient l'empêcher de se maintenir à long terme dans la compétition internationale: formation des employés laissant à désirer, gestion peu efficace et équipements mal adaptés . Autre bonne surprise, le tourisme continue de se développer. L'an dernier, en dépit d'une résurgence de la grippe aviaire dans la région qui a causé la mort d'une personne au Cambodge, le Royaume a atteint en 2004, selon les chiffres officiels, la barre symbolique du million de visiteurs et les premières statistiques de l'année 2005 laissent espérer une croissance de l'ordre de 25 % . La production agricole, dont dépend 80 % de la population, si elle a été affectée en 2004 par la sécheresse, devrait croître d'environ 5 % selon les experts, si toutefois les conditions météorologiques se montrent favorables . En contrepartie de ce tableau plutôt positif, une hausse des prix à la consommation liés à celle du pétrole ne manque pas d'avoir des répercussions néfastes sur les coûts des transports dans le Royaume, déjà très élevés. Ces indicateurs plutôt encourageants ne doivent pas faire oublier que dix années AFI2006 de croissance continue n'ont que peu profité à la population, bien que des progrès indéniables aient été accomplis, par exemple dans les domaines de la sécurité, de l'amélioration des infrastructures et, petit à petit, dans la constitution d'un environnement législatif et juridique sécurisant pour les investisseurs et les échanges commerciaux, conséquence de l'intégration du pays dans l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Le taux de pauvreté stagne toujours autour de 40 %, tandis que les taux de mortalité infantile et maternelle demeurent trois fois supérieurs à ceux de l'Asie de l'Est. Aussi, selon la Banque asiatique de développement (BAD), le Cambodge, ne devrait-il pas être, dans les conditions actuelles, à même de remplir d'ici 2015 les Objectifs de développement du millénaire (ODM) adoptés en 2000 par les Nations Unies, selon lesquels le pourcentage de personnes vivant sous le seuil de pauvreté devait être réduit à 19,5 % à cette date. D'après l'institution financière, dans dix ans, ce taux avoisinera les 25 %, si tant est que le Royaume dispose d'une croissance convenable dans les années qui viennent. Les causes de la pauvreté pointées par la BAD sont nombreuses: secteurs économiques compétitifs très limités, accès à l'éducation et à la santé non assuré, et, dans les zones rurales, manque de terres disponibles pour les habitants pauvres. Sur ce dernier point, plusieurs conflits, opposant des sociétés privées concessionnaires de vastes surfaces de forêts ou de terres cultivables - des « concessions économiques » - à de petits paysans ou des villageois appartenant à des minorités ethniques, ont montré l'acuité de la question foncière et l'ambiguïté du gouvernement sur ce dossier. Les bailleurs de fonds réclament que l'attribution de ces « concessions économiques » ne puissent se faire sans que les communautés locales aient été au préalable consultées et sans que des études d'impacts aient été conduites. Dans les faits, les sociétés concessionnaires sont désignées dans la plus grande discrétion et les populations concernées qui dépendent pour leur survie quotidienne de parcelles qu'elles exploitent souvent depuis très longtemps, sont mises devant le fait accompli, sans beaucoup d'espoir de recours. 287 ASIE DU SUD-EST SOCIÉTÉ Autre domaine dans lequel la sincérité du gouvernement est remise en cause par certains de ses partenaires internationaux, notamment les Américains: la lutte contre le trafic et l'exploitation des êtres humains. Si Washington loue régulièrement l'engagement de Phnom Penh dans le combat contre le terrorisme - six personnes accusées d'avoir fomenté des attentats contre des ambassades occidentales à Phnom Penh ont été condamnées fin 2004 à des peines de prison à perpétuité -, il a rétrogradé le Royaume dans la catégorie des pays ne répondant pas aux standards minimums dans la lutte contre l'exploitation sexuelle ou le travail forcé. À l'origine de cette décision qui a offusqué le gouvernement, l'attaque en décembre 2004 d'un refuge de l'Association pour les femmes en situation précaire (AFESIP) où étaient hébergées des dizaines de jeunes filles « libérées» par l'ONG d'un hôtel où elles auraient été contraintes de se livrer à la prostitution. Selon l'ONG, les agresseurs, arrêtés par la police au moment de l'opération contre l'hôtel, avaient été remis en liberté de façon suspecte, ce qui leur avait permis d'attaquer le refuge. Les résultats de l'enquête diligentée par le gouvernement n'ont pas convaincu Washington, d'où la rétrogradation de Phnom Penh. Signe des temps, le Cambodge ne souffre désormais pas seulement de maux de pays en voie de développement mais aussi de ceux liés à un accroissement du niveau de vie et à l'amélioration des infrastructures. Ainsi, le Royaume a le triste privilège de dénombrer le plus grand nombre d'accidents mortels de la circulation des pays de l'Association des nations du Sud-Est asiatique (ASEAN). Les jeunes sont les plus touchés par ce fléau, plus meurtrier désormais, selon le ministère des Transports, que le sida dans un pays où pourtant le taux de prévalence du VIH varie, selon les sources, entre 2 % et 3 %. Par ailleurs, le gouvernement, soucieux de défendre la culture khmère, a décidé de s'attaquer à un phénomène tout à fait nouveau: la prolifération des images pornographiques qui circulent dans le pays sur Internet et les téléphones portables dernier cri. Les ordinateurs, lorsqu'on est convaincu qu'ils ont transmis du matériel pornographique, que ce soit sur des sites, le clavardage ou les caméras numériques d'ordinateurs, seront bloqués, ont assuré les autorités. Preuve, s'il en était besoin, qu'au Cambodge, le gouvernement sait mettre de l'ordre dans les affaires qui lui déplaisent. CULTURE Le site d'Angkor Wat a été retiré dans le courant de l'année 2004 de la liste du patrimoine mondial en danger où il avait été inscrit 12 ans auparavant par l'UNESCO. Cette décision a couronné l'action menée depuis dix ans par l'autorité Apsara chargée de la gestion du site, ainsi que celle du gouvernement et des pays donateurs pour préserver le visage de l'ancienne capitale angkorienne. Les excavations illégales, le pillage et les mines étaient jusque-là considérés comme les principales menaces planant sur la « Cité des temples» - un parc de 230 km 2 comptant plus de 100 monuments -, justifiant son inscription sur cette liste. Quand l'UNESCO décida de classer Angkor dans la liste du patrimoine mondial de l'humanité en 1993, il n'existait aucune législation pour la protection du patrimoine, pas de plan directeur d'aménagement, sévissait un important trafic de biens culturels et aucun organisme de gestion n'était en place. Mais le site répondait à une condi288 tion essentielle, celle de son importance universelle. Angkor avait donc été parallèlement classé sur la liste du patrimoine mondial et sur celle du patrimoine en danger. Les quatre problèmes ont depuis été résolus avec le vote de la loi en 1996, la création de l'autorité Apsara, la lutte contre le trafic qui a connu ses premiers succès en 1997 et la mise sur pied d'un plan d'aménagement. L'ancienne capitale, fondée au Ixe siècle par Jayavarman II, abandonnée au milieu du XVIIe siècle face aux attaques répétées du royaume de Siam et redécouverte au XIxe siècle par l'explorateur français Henri Mouhot, est un parc vivant où habitent des villageois. L'expansion économique y a attiré de nouvelles personnes. Pour préserver la beauté du site, les autorités s'attachent à mettre en œuvre un plan d'occupation des sols afin d'empêcher la construction de nouvelles villas en béton au pied des temples. AFI2006 me:::Je LAOS Nahed Nadia NOUNEDDINE Université Laval, [email protected] POLITIQUE L es Hmôngs sont un peuple de montagnards installé dans la jungle laotienne depuis 30 ans, qui ont combattu les Français en Indochine et les communistes au Laos et au Vietnam. On estime cette population à 15 000 personnes. Ce peuple, originaire de Chine (selon le pouvoir laotien, il est originaire de Myanmar), a commis une erreur historique : il a soutenu les États-l}nis pendant la guerre du Vietnam. Les Etats-Unis leur avaient promis leur protection, quelle que soit l'issue de la guerre, mais, après le départ des troupes américaines, ce peuple a été livré à lui-même. 200 familles seulement ont pu obtenir un visa pour les États-Unis à ce moment-là. Les autres, 50 000 Hmôngs, pour échapper aux représailles vietnamiennes et laotiennes, se sont enfouis dans la jungle où ils ont formé des foyers de résistance . De nos jours, les Hmôngs ne sont plus que 14000, éparpillés dans la zone spéciale de Xaysomboun, les provinces de Xieng Khouang et de Borikhamsay. Un documentaire de France 2 (chaîne publique française) a révélé leurs conditions plus que misérables. Après une marche de deux jours dans la jungle du nord du Laos, les journalistes ont rencontré des Hmôngs installés dans un village « mobile » . Les Hmôngs sont, par la force des choses, devenus un peuple nomade qui a appris à se déplacer rapidement dès qu'il ya danger. Des milliers de personnes souf- Femmes Hmôngs AFI 2006 LAOS Histoire 1353 Unification des principautés et seigneuries lao en un royaume. 1637-1694 Apogée du rayonnement lao dans la péninsule. 1828 Rébellion laotienne contre la domination siamoise. Vientiane anéantie, et population déportée vers le Siam. 1893-1953 Protectorat français. 1949 Indépendance du Laos en tant qu'État associé à l'Union française. 1964-1973 Guerre civile entre les princes Souvana Phouma (neutraliste) et Souphanouvong (communiste). 1975 Abolition de la monarchie. Proclamation de la République populaire démocratique lao (RDPL), présidée par Souphanouvong (jusqu'en 1986). 1991 Adoption d'une Constitution. 1994 (avril) Ouverture du Pont de l'amitié entre le Laos et la Thaïlande. 1997 Admission du Laos à l'ANSEA (Association des nations du Sud-Est asiatique). frent de malnutrition sévère et sont menacées par la famine. Dans ces conditions, un enfant sur deux pourra espérer dépasser l'âge de cinq ans. De plus, plusieurs personnes souffrent de blessures atroces dues aux nombreux affrontements avec les forces armées laotiennes. Le 4 juin 2005, les Hmôngs décident de sortir de la clandestinité. 3 000 Hmôngs, femmes, enfants et vieillards affamés, ont quitté la jungle de la province de Xieng Khouang pour se rendre aux autorités laotiennes. Par cette reddition, les Hmôngs voulaient négocier un accord de paix avec le gouvernement lao. Mais, les pourparlers avec le gouvernement laotien n'ont pas abouti. Personne ne sait ce qu'il est advenu des Hmôngs qui se sont constitués prisonniers à Mok en 2004. Trois Américains qui 289 ASIE DU SUD-EST avaient assisté à la reddition des Hmôngs ont été arrêtés par les autorités laotiennes et expulsés en Thaïlande. Un autre coup dur est porté à cette communauté le 4 juillet 2005. Ayant fui le Laos pour se réfugier en Thaïlande, 6 000 Hmôngs installés dans la province de Petchabun en Thaïlande ont été expulsés par les autorités de ce pays. Le Laos, pour sa part, refuse de les accueillir, s'appuyant sur le fait qu'ils ne possèdent pas de pièces d'identité, aucun document qui prouve leur appartenance au Laos. Le problème hmông semble donc sans issue. La Thaïlande et le Laos sont inflexi- bles. La Thaïlande demande l'expulsion immédiate des 6 000 Hmôngs vers le Laos. Pour sa part, le gouvernement lao refuse l'accueil de ces réfugiés, prétextant que la population hmông installée en Thaïlande n'est pas d'origine laotienne, mais originaire du Myanmar. Les autorités laotiennes empêchent les organisations humanitaires d'entrer en contact avec la communauté vivant dans la jungle, condamnant ainsi 15 000 personnes à une mort certaine. Officiellement, le gouvernement lao nie l'existence de cette population. Plus de 40 000 Hmôngs seraient morts pendant les dix dernières années. ÉCONOMIE Le 28 octobre 2004 a marqué l'entrée de la République démocratique populaire lao dans la ronde des négociations en vue de son adhésion à l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Portée par le ministre du Commerce, Soulivong Daravong, l'opération devrait, selon l'intéressé, « accélérer le processus de réforme économique entreprise par le gouvernement lao », et avoir « des conséquences importantes pour l'intégration du pays dans l'économie mondiale. » qu'« un travail considérable reste à faire », le respect des règles de l'OMC nécessitant généralement « une réforme à la fois de la législation et de l'infrastructure de mise en œuvre complémentaire dans le pays candidat. » Comme le Vietnam, le Cambodge et le Pakistan, le Laos a reçu l'aide de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), afin de lutter contre la pandémie de grippe aviaire. L'aide d'urgence, offerte par le]apon, dont Les atouts du Laos reposent le montant total s'élève à 1,6 sur un secteur des services (télémillion US $, a permis à ces quaSoulivong Daravong communications et tourisme, tre pays de circonscrire la grippe tout particulièrement) ouvert et compéti- aviaire et de faire en sorte d'empêcher la tif, représentant un quart de l'économie transmission du virus aux humains. Les nationale. En revanche, soucieuse de se principaux bénéficiaires ont été les petits conformer aux exigences de l'OMC dans et moyens éleveurs de volailles, ainsi que des domaines aussi sensibles que la pro- les détaillants et les consommateurs. priété intellectuelle, l'évaluation en douane, les mesures sanitaires et phytosaEn 2004, la fréquentation touristique nitaires, la RDP lao a sollicité l'octroi d'une au Laos s'est accrue de 33 % par rapport à période de transition et fait appel à une 2003. 800000 touristes ont ainsi visité le assistance technique. pays, générant un chiffre d'affaires de plus de 100 millions US $. Le tourisme s'imAu terme de la réunion du 28 octobre, pose ainsi comme l'une des principales le président du groupe de travail, l'ambas- sources de revenus du pays. Désireuse de sadeur Tim Groser de Nouvelle-Zélande, maintenir la tendance, l'Administration s'est déclaré optimiste quant à la bonne nationale du tourisme lao (ANTL) a élamarche du processus, précisant toutefois boré un plan d'action pour promouvoir 290 AFI2006 - LAOS jusqu'à l'horizon 2010 un tourisme respectueux de l'environnement et des collectivités locales. d'une vingtaine de nouvelles activités touristiques et une amélioration significative des infrastructures. Afin de développer l'écotourisme, l'ANTL privilégie les initiatives qui, au plan socioéconomique, ont un impact positif sur les collectivités rurales et qui participent de la politique de préservation des habitats naturels mise au point il y a dix ans par le programme de création des Parcs nationaux pour la conservation de la biodiversité (PNCB). Venue à point nommé, l'organisation d'une exposition intitulée « Écotourisme lao » , qui s'est tenue le 24 juin 2005 a permis aux acteurs locaux de mettre en lumière la variété et la qualité des produits touristiques et écotouristiques proposés par l'ANTL. À plus long terme, un partenariat mis en place entre l'ANTL et la Banque asiatique de développement dans le cadre du projet de développement touristique du Mékong prévoit, dans les quatre provinces de Luang Namtha, Luang Prabang, Khammouane et Champassak, la création La dette extérieure de 18 pays du tiersmonde sera effacée. Le total de ces dettes est de 40 milliards US $ et pourrait atteindre les 57 milliards si les mesures s'élargissent à 20 autres pays dont le Laos. Le Laos ainsi que ces 19 autres pays devront répondre aux mêmes exigences que les 18 bénéficiaires à ce jour pour pouvoir bénéficier de l'effacement de la dette. CULTURE L'Association française d'action artistique (AFAA) a lancé un programme triennal appelé Circasia. Ce programme vise à promouvoir le cirque français tout en créant des échanges avec les pays du SudEst asiatique. Dans ce sens, M. Jean-Marc Granet-Bouffartigue, de l'AFAA, explique que « la France est un pays de référence pour le cirque contemporain aujourd'hui. L'objectif de ce programme de coopération est de créer des liens entre le cirque traditionnel asiatique et le cirque contemporain, et de voir si des échanges sont possibles. » Dans le cadre de ces échanges, la Compagnie Chant de balles a pu bénéficier d'un séjour au Laos. Le programme Circasia pourra financer des bourses de résidence et des ateliers de création dans plusieurs pays de l'Asie du SudEst, dont le Laos. durant tout le mois d'octobre 2005. Cette exposition, sous le thème du café et ses enjeux économiques, vient prolonger l'exposition de l'année dernière qui portait sur le thème du riz. Une exposition de photographies s'est tenue au Centre culturel et de coopération linguistique (CCCL) pendant le mois de novembre 2005. Le photographe laotien Hiên Lam Duc présente ses photographies prises sur le fleuve du Mékong. Le photographe commente son exposition comme une façon de renouer avec les images de son enfance. Après avoir arpenté le monde pendant plus de 10 ans, il effectue son retour aux sources grâce à cette exposition. Dans le même espace, le peintre Christophe Meyer présente ses œuvres, en collaboraSpectacle de la Compagnie Chant de balles tion avec le Centre Pendant l'année 2005, plusieurs événements culturels ont européen d'actions artistiques contemporaines. Parmi les autres expositions de phoeu lieu au Laos et plus précisément dans la capitale Vientiane. Le Cira d, la Faculté tos présentées cette année dans l'espace du de Nabong, le Centre de langue et le Mu- CCCL, le photographe Rasi a pu proposer en avril 2005 une sélection de ses œuvres sée national présentent une exposition au Musée national du Laos qui se prolongera réunies sous le titre « Sombre clarté ». AFI 2006 291 ASIE DU SUD-EST VIETNAM Politique: Michel FOURNIÉ Institut national des langues et civilisations orientales, [email protected] Économie et culture: Mélanie BÉRUBÉ Université Laval, [email protected] POLITIQUE À J:,aube du XXle siècle, le Vietnam mobilise ses forces de développement E voquant le développement de l'Asie, un rapport annuel mondial indique qu'en 2005, le Vietnam « retrouve VIETNAM Géographie Façade maritime orientale de la péninsule indochinoise, étirée sur 1 400 km. Le Vietnam se compose d'une chaîne de montagnes reliant le delta du fleuve Rouge (au nord) et celui du Mékong (au sud). Ressources minières nombreuses. Histoire 1859 Prise de Saigon. Domination française. 1930 Fondation par Nguyên Ai Quôc, devenu plus tard Hô Chi Minh, du Parti communiste. 1946-1954 Guerre d'Indochine. Défaite française à Diên Biên Phu. Accords de Genève: partition du pays, au nord et au sud du 17e parallèle. 1965-1975 Guerre du Vietnam entre le Nord (communiste) et le Sud (soutenu par les Américains). 1975 (avril) Libération de Saigon qui devient Ho Chi Minh-Ville. 1976 Le Vietnam réunifié devient une république socialiste. 1986 Dôi moi (renouveau économique). 1994 Levée de l'embargo américain (1964-1994). 1995 Entrée à l'ASEAN (Association des nations du Sud-Est asiatique). Forte croissance du pays. 1997 (sept.) Trân Duc Luong élu président; Phan Van Khai premier ministre. vue Sommet de la Francophonie à Hanoi (nov.). 2000 Signature de l'accord commercial Vietnam-États-Unis. 2000 (nov.) Visite du président américain Bill Clinton au Vietnam. 292 toute son énergie et son inventivité pour s'insérer dans la compétitivité mondiale » . Ce dynamisme, lié à la politique du Renouveau (Dôi moi) initiée au début des années 1980 par le secrétaire général du Parti communiste vietnamien d'alors, Nguyên Van Linh (1914-1998), s'appuie sur une exaltation systématique des grands moments de la communauté de destin des Kinh (ethnie viêt composant 84 % de la population). En 2004, ce fut le 50 e anniversaire de l'éclatante victoire de Diên Biên phu et la pérennisation d'un « esprit diênbiênphu ». 2005 a permis la commémoration d'un épisode encore plus marquant: les 60 ans de la proclamation de l'indépendance par le président Hô Chi Minh (1890-1969) , le 2 septembre 1945, sur la place Ba dinh, en plein Hanoi libéré. Lors de la cérémonie officielle, le président Trân Duc Luong a magnifié « la grande résonance de la pensée Hô Chi Minh, la mission historique du Parti communiste du Trân Duc Luang Vietnam, la tradition patriotique et l'héroïsme révolutionnaire du peuple vietnamien, facteurs fondamentaux et essentiels de la force invincible du peuple vietnamien pendant la nouvelle ère. » Le président a aussi mis en garde ses concitoyens en soulignant que « l'œuvre d'édification et de défense de la patrie du Vietnam socialiste devrait jouir dans les prochaines années des nouveaux avantages et opportunités, mais rencontrer dans le même temps des difficultés et défis » . Pour dépasser ces difficultés, Trân Duc Luong, ancien ingénieur des mines né en 1937, a affirmé que « tous les Vietnamiens, sans discrimination du passé, d'ethnie, de religion, de couche sociale, réunis dans le bloc de AFI2006 VIETNAM grande unité nationale, sont déterminés à accélérer de manière globale la cause du Renouveau, de l'industrialisation et de la modernisation du pays » en concluant qu'avec l'aide des 3 millions de Viêt kiêu (Vietnamiens de la diaspora), l'avenir de la nation vietnamienne était « très radieux ». Particulièrement fêté à Hanoi, dans le nord du pays, un autre « haut fait d'armes » a été célébré en grande pompe à Hô Chi Minh-Ville, dans le Sud: les 30 ans de la libération totale du Sud et la réunification nationale. Exaltant la victoire du 30 avril 1975 qui a constitué l'apogée de la tradition de défense nationale du Vietnam et qui a été rendue possible par la lutte vaillante du peuple du Nord et du Sud et surtout par le travail idéologique du Parti dans la lutte antiaméricaine, on peut penser que le dessein des organisateurs a été surtout de renforcer la cohésion nationale tant sur le plan des particularismes régionaux que sur celui des clivages générationnels. Ces propos mettent en relief deux aspects de la situation sociétale actuelle du Vietnam: la cohésion nationale et le déséquilibre entre les générations. Par ailleurs, ils soulignent d'une part une volonté affirmée d'insuffler à l'économie un développement en harmonie avec l'internationalisation des échanges, plus spécialement dans les domaines à forte valeur ajoutée, d'autre part une détermination à s'appuyer sur une prise de conscience de la valeur mobilisatrice d'une « identité populaire vietnamienne ». ÉCONOMIE Le taux de croissance du Vietnam pour 2005-2006 est estimé à 7,6 %, ce qui le place devant Singapour, la Malaisie et la Thaïlande. Cependant, le taux d'inflation (près de 6 %) dépasse les évaluations. Le taux de pauvreté a certes diminué (il a baissé de 58 % depuis 1993, atteignant 9 % en 2004), et les revenus globaux de la population ont augmenté, mais l'écart entre les populations rurales et urbaines ne cesse de s'accroître. Par ailleurs, l'indice de développement humain du Vietnam croît rapidement depuis les dernières années: le pays est maintenant classé 108 e sur 177. Le Vietnam prévoit recevoir 5 milliards US $ en investissements étrangers pour 2005. Ces investissements devraient permettre d'améliorer les infrastructures touristiques, de réaliser un projet d'eau propre et d'hygiène dans le delta du fleuve Rouge, d'améliorer l'accès aux technologies de communication et d'avoir accès à un fonds d'urgence en cas de catastrophe naturelle. Après le café et le poivre, le marché du caoutchouc, dont le Vietnam est le quatrième exportateur mondial, prend de l'expansion. Le pays enregistre la deuxième plus forte croissance mondiale dans le domaine des télécommunications, avec une progression de 50 % pour le segment de la téléphonie mobile en 2004. La Bourse de Hanoi a été inaugurée en mars 2005. Deuxième Bourse du pays, elle propose un système de vente aux enchèAFI 2006 res de parts d'entreprises d'États aux entrepreneurs privés, dans le cadre d'une réforme des entreprises d'État, dont une grande partie éprouve des problèmes de gestion. La Bourse de Hanoi se veut complémentaire à celle de Hô Chi Minh-Ville, et devrait permettre de renforcer le marché de la Bourse vietnamien. Hô Chi Minh- Ville Hô Chi Minh-Ville, connue autrefois sous le nom de Saigon, joue un rôle de locomotive dans l'économie vietnamienne. La ville, qui célébrait cette année le 30 e anniversaire de la fin de la guerre contre les États-Unis, affiche en effet des performances remarquables. Avec seulement 8,6 % de la population totale du pays, elle représente 20 % de son PIB, et 40 % de sa production industrielle et de ses exportations. En 2004, Hô Chi MinhVille enregistrait une croissance de 10 %, accélérant considérablement le développement du pays. Tourisme Le secteur du tourisme est en croissance. En 2004, 2,9 millions de touristes étrangers se sont rendus au Vietnam, en plus des 14 millions de touristes vietnamiens. Avec une augmentation de 27 % depuis 2003, ce secteur représente 3,7 % du PIB, avec une recette de 1,7 milliard US $. Le pays adopte plusieurs politiques pour attirer les investisseurs et les visiteurs au pays. 293 ASIE DU SUD-EST Ainsi, les touristes en provenance du Japon, de la Corée du Sud ou des pays membres de l'Association des nations du Sud-Est asiatique (ASEAN) n'auront plus besoin de visa pour entrer au Vietnam. Le pays lance également une campagne de promotion à travers le monde. Le nombre de vols en direction du Vietnam a été augmenté, et des festivals sont organisés tout au long de l'année afin de valoriser le patrimoine culturel vietnamien tout en attirant touristes et investisseurs. Enfin, la diversité et la richesse des sites touristiques contribuent à l'essor de ce secteur. Société La grippe aviaire frappe durement le Vietnam: selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), 47 Vietnamiens en sont décédés depuis le début de l'épidémie en Asie. Face à la progression du VIH/sida, un projet de loi a été examiné par les autorités vietnamiennes visant à aider les personnes contaminées. Les questions d'assurance-maladie, de soin des malades et de couverture sociale, entre autres, ont été soulevées. Jusqu'en septembre 2005, plus de 100 700 cas de séropositifs et de sidéens ont été recensés au Vietnam. Le quatrième Forum de l'emploi francophone s'est tenu le 6 avril, à Hô Chi Minh-Ville, afin d'aider les étudiants bilingues à connaître les possibilités d'emploi dans les entreprises françaises en opération au Vietnam. À ce jour, 10 000 Vietnamiens travaillent dans 250 de ces entreprises. À l'occasion de la Journée de la Francophonie, une série d'activités ont eu lieu à Hanoi: présentation de films canadiens, de spectacles d'artistes francophones du monde, séminaire sur le marketing culturel, colloque sur la société de l'information ainsi que des débats sur la francophonie, la formation et l'emploi ont été organisés. Une Semaine culturelle se tenait du 2 au 10 octobre pour souligner le 99se anniversaire de Hanoi: fête populaire autour du lac de l'Épée, présentation d'œuvres caractéristiques et de séminaires ont eu lieu à cette occasion. CULTURE Nguyên Huy Thiêp, nouvelliste et conteur très apprécié du public vietnamien, vient de publier son tout premier roman, À nos vingt ans. Celui-ci raconte, à la première personne, les démêlés d'un jeune Vietnamien avec la drogue. Il s'agit d'une œuvre presque autobiographique, puisque l'auteur se met ici dans la peau de son propre fils pour raconter son expérience. Nguyên Huy Thiêp a souvent eu maille à partir avec les autorités pour sa dénonciation des maux de la société vietnamienne. Ici aussi, il fait un violent réquisitoire contre l'échec d'un régime qui a conduit toute une génération à faire face à de graves problèmes sociaux telles la drogue, mais aussi la prostitution, la corruption et l'hypocrisie. Le cinéma vietnamien connaît de plus en plus de succès: Kin dàn ông co bâtu (Les Hommes enceints) a battu tous les records pendant la Fête du Têt à Hô Chi Minh-Ville, avec une recette de 6 milliards de dôngs ; Gai nhay (Les Cavalières), un drame sur le sida et la toxicoma294 nie, est resté longtemps en tête des cotes de succès; Mùa Zen trâu (Le Gardien de buffles), du réalisateur Nguyen Vo Nghiem Minh, a remporté de nombreux prix cinématographiques à travers le monde. Ce dernier film, qui continue de récolter les honneurs, se déroule en 1940 sous l'occupation française et raconte le voyage initiatique de Kim, 15 ans, qui doit mener ses deux buffles, seule richesse de la famille, loin des terres inondées du Sud. En traversant son pays, Kim apprend la vie d'adulte. En février, une troupe du Théâtre de la musique impériale de Huê a été invitée par l'UNESCO pour une tournée européenne pour offrir des œuvres de nha nhac, la musique rituelle de la Cour du Vietnam. Cette tournée a amené les artistes en France, en Allemagne et en Belgique. À cette occasion, l'UNESCO a remis, lors d'une cérémonie officielle, un certificat du Patrimoine immatériel et oral de l'humanité à la ville de Huê. AFI 2006 BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE Sauf indications contraires, tOlites les références citées sont datées de l'année 2005. [S.A.L Contes philosophiques d'Asie, Traduits du vietnamien par Lê Mông Nguyen, Paris, L'Harmattan, 138 p. BAFFIE jean, Histoire d'eau et de feu. Contribution à ['étude de la dernière génération des nobles de la marine siamoise et leur rôle en politique, Paris, Les Indes savantes. DE KONINCK Rodolphe, L'Asie du Sud-Est, Paris, Armand Colin, 361 p. GLOAGUEN Philippe, Cambodge, Laos. Guide du routard 2006-2007, Paris, Hachette. GODEMENT François (dir.), Asie, Paris, La Documentation française- Centre Asie de l'Institut français des relations internationales, 190 p. VIETNAM [S.A.L Anthologie de la littérature vietnamienne, tome III. 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Le perfectionnement du mécanisme du taux de change de RMB a pour but de réduire le déséquilibre du commerce extérieur de la Chine, d'accroître les besoins internes, d'augmenter la combativité des entreprises chinoises sur le plan international. Cette vigueur de l'économie chinoise ne se reflète pas seulement par des chiffres abstraits; elle se perçoit aussi dans la vie quotidienne: plus de voitures particuliè- res. plus de touristes chinois à l'étranger. On commence à apprendre le français non seulement pour faire des études en France, en Belgique ou au Québec, mais aussi pour y voyager ou, tout simplement, par plaisir. Le nombre de voyages des Chinois à l'étranger a augmenté rapidement. De plus, la France a donné son accord à la Chine pour ouvrir un consulat à Papeete (Polynésie française), destination touristique de rêve. La Chine compte 103 millions d'internautes. Par le truchement d'Internet, elle s'est ouverte au monde entier. N'oublions pas que le grand public chinois a accédé à Internet beaucoup plus tard que celui des États-Unis, du Canada et de la France. Or, la Chine a aussi besoin de se faire mieux connaître par le monde extérieur. La mise en service de différents médias en langues étrangères y contribuera. INDE Romey BORGES Borges Institute for French and the Francophonie, New Delhi [email protected] L a collaboration entre l'Inde et certainspays francophones progresse. Les rapports économiques, scientifiques et culturels avec la France sont solides. L'Inde collabore depuis quelques années avec plusieurs autres pays francophones. Avec le Burkina Faso, le montant du commerce bilatéral atteint 40 millions US $. L'Inde et le Maroc ont aussi lancé une entreprise conjointe à 200 km au sud de Casablanca, Indo-Maroc phosphore SA. Le Festival international de la Francophonie a été fêté avec beaucoup d'enthousiasme par les communautés francophones et francophiles dans plusieurs villes du pays et surtout à New Delhi. À Delhi, le Festival s'étendant sur une douzaine de jours (12 au 24 mars 200S) comprenait une soirée de poésie, une table ronde de jeunes francophones à l'Université]awaharlal Nehru, des soirées musicales avec la participation de 296 - représentants de plusieurs pays francophones. Le point culminant du Festival a été le grand Carnaval francophone qui a eu lieu le 19 mars dans les nouveaux locaux de l'Alliance française de Delhi. Des kiosques de toutes les ambassades francophones et non francophones, comme la Roumanie, étalaient curiosités et mets typiques. JawaharLal Nehru University a tenu à New Delhi, en décembre 200S, un séminaire international sur les littératures et cultures francophones de la diaspora indienne. Vient d'être lancé en mai 200S à New Delhi le Borges Institute for French and the Francophonie. Premier en son genre en Inde, il se donne pour principal objectif la promotion des cultures et civilisations des pays francophones par tous les moyens possibles, conférences et séminaires, ateliers et enseignement de la langue française, l'une de ses principales activités. AFJ 2006 AU-DELÀ DES PAYS FRANCOPHONES JAPON Nobutaka MIURA Professeur à l'Université Chûô, administrateur délégué de la Maison franco-japonaise, [email protected] « Inapte au calcul, il est normal que le français soit disqualifié comme langue internationale. » C'est en ces termes que Shintaro Ishihara, gouverneur de Tokyo, connu pour ses formules politiquement incorrectes, aurait attaqué publiquement la langue de Molière. Il visait expressément le Département de littérature française de l'Université municipale de Tokyo, qui s'opposait à son projet de restructuration de cet établissement, réputé pour sa tradition d'excellence dans les études en humanités . Depuis le début des années 1990, l'enseignement supérieur au Japon a connu une série de réformes en profondeur sous le triple signe de compétitivité, d'efficacité et de rentabilité. Les effets en sont négatifs pour l'enseignement des langues. Au Japon comme ailleurs, la mondialisation rime avec le tout anglais. L'apprentissage d'une seconde langue n'est plus obligatoire dans plus de 500 universités japonaises. Les effectifs d'apprenants du français sont sensiblement réduits d'après les statistiques des ventes de manuels de français. L'augmentation du nombre de lycées qui offrent l'enseignement d'une seconde langue (200 sur 5000) ne compense pas, loin s'en faut, la baisse des effectifs d'étudiants de français dans le premier cycle universitaire. Mais il faut mettre un bémol à ce constat pessimiste: le français se défend beaucoup mieux que l'allemand pour faire face à la concurrence du chinois et du coréen, et les instituts et alliances attirent encore beaucoup de Japonais qui prennent plaisir à apprendre cette langue qui n'est pas directement utile dans la vie ni pour la carrière. L'enseignement du français est de moins en moins populaire depuis dix, voire 15 ans. Dans les années 1980, il était encore dans sa phase ascendante . L'approche communicative étant introduite pour compléter la méthode classique de « grammaire et traduction », la compétence de AFI2006 communication orale était enfin prise en considération dans les classes de langue. Le Congrès mondial de la Fédération internationale des professeurs de français (FIPF) organisé à Tokyo en 1996 marque cette prise de conscience et l'ouverture d'esprit de la part des enseignants de français au Japon. Où en est aujourd'hui la stratégie pour la défense et l'illustration de la langue française? Le Japon n 'a pas « bénéficié » de ces transferts linguistiques et culturels que la colonisation française lui aurait apportés. Pourtant, la France représentait une des grandes civilisations qui ont fait l'objet des « études occidentales » , moteur de la modernisation duJapon après son ouverture au milieu du XIxe siècle. Il est vrai que la France a cédé la place à l'Angleterre dans la bataille d'influence dans les années devant conduire à la Restauration de Meiji (1868), puisque le Second Empire soutenait le shôgounat finissant. La République française n'était pas un bon modèle à côté du Reich allemand, lorsque le Japon allait définir sa monarchie éclairée par la Constitution de Meiji (1889). L'influence des États-Unis a été prépondérante dans la grande réforme du pays au lendemain de la Seconde Guerre mondiale : elle a été dictée par les quartiers généraux de l'armée d'occupation américaine. Mais la culture française n'a cessé d'intéresser les élites intellectuelles, juristes, écrivains et artistes. Aujourd'hui, la France n'est plus une puissance coloniale. Elle a certes brillé, pendant la période de guerre froide, par son esprit d'indépendance comme par son avant-garde philosophique et littéraire. Longtemps locomotive de la construction européenne, son poids semble avoir diminué dans l'Europe élargie et dans le monde globalisé dominé par la superpuissance américaine. Le français n'est plus une langue dominante ni de domination, mais il est aujourd'hui une langue de résistance 297 AU-DELÀ DES PAYS FRANCOPHONES et de « contre-pouvoir » , comme a déclaré Lionel Jospin en 2000 devant 3000 professeurs de français du monde réunis à Paris. Dans le contexte japonais, il n'est pas réaliste d'espérer voir le français devenir une langue de communication de masse. Mais il a son rôle à jouer comme langue d'ouverture au monde, comme langue d'information et de réflexion critique, et comme langue de formation intellectuelle des jeunes bien ciblés. La stratégie pour la promotion du français dans l'enseignement supérieur au Japon pourrait se résumer en quatre points: - troisièmement, il faudrait établir un dialogue intellectuel entre Français etJaponais, un vrai échange dans les deux sens. Les francisants japonais se contentaient par le passé d'étudier et d'assimiler les choses françaises de façon toute passive comme s'ils étaient élèves fidèles aux leçons du maître. Or, nos relations ne sont plus celles de maître-disciple ou de supérieur-subalterne. Nous sommes tout simplement différents, mais égaux. Vous apprenez notre langue et nous apprenons la vôtre. Mais en attendant une vraie réciprocité, nous devons essayer de notre côté de devenir bilingues et biculturels. Mais il faudrait une révolution des mentalités en nous débarrassant de la modestie et de la réserve traditionnelles. Ce qui fait cruellement défaut dans l'éducation au Japon, c'est l'entraînement à l'exposé et au débat public; - premièrement, il faudrait développer la filière d'études françaises pluridisciplinaires en privilégiant les sciences humaines et sociales. Les études françaises au Japon étaient par le passé trop centrées sur la littérature. Tous les chefs-d'œuvre de littérature française sont disponibles en japonais. Mais aujourdhui, le Département de littérature française ne pourra pas survivre sans se convertir en Département d'études françaises, tant est grande l'inadéquation entre l'offre et la demande. Le recruteur d'un professeur de français exige de plus en plus une double formation combinant la compétence de communication en français et la capacité d'enseigner une discipline en sciences humaines et sociales (histoire, sociologie, science politique, etc.). Il est bon d'apprendre le français par amour pour la langue, mais il est encore meilleur de le faire pour étudier en français. L'expérience de la formation en double cursus s'inscrit dans cette perspective; - quatrièmement, nous nous proposons d'utiliser le français comme langue d'intercompréhension entre les peuples asiatiques. Nous sommes conscients que ce n'est pas un créneau prometteur, étant donné la faible présence des francophones en Asie. Mais nous savons qu'il en existe dans tous les pays d'Asie. La coopération régionale dans le domaine économique se fait le plus souvent en anglais, mais le français gagnerait à devenir une langue de coopération intellectuelle en Asie. C'est un projet méritoire déjà entamé par le biais d'un ouvrage comme La Modernité française dans ['Asie littéraire - Chine, Corée, Japon (sous la direction de Haruhisa Kato, Presses universitaires de France, 2004). - deuxièmement, il faudrait développer les études francophones pour faire découvrir l'étendue et la variété des pays et régions francophones dans le monde. Le français est nécessaire pour communiquer avec Français, Belges, Suisses, mais il l'est aussi pour discuter avec Québécois, Antillais, Africains, Maghrébins, etc. Dans les études francophones, on ne peut pas éviter d'étudier le passé colonial de la France et l'histoire de la décolonisation dont la mémoire constitue souvent la toile de fond des littératures francophones. C'est une culture de base indispensable pour vivre ensemble dans le monde postcolonial d'aujourd'hui, dans le respect de la diversité des langues et des cultures; Le Congrès Asie-Pacifique des professeurs de français de Taipei, prévu pour la fin avril 2006, s'inscrit dans la même perspective. Le projet de création d'une Communauté est-asiatique sur le modèle de la Communauté européenne s'ébauche. Sauf que ce n'est pas le rapprochement, mais la rivalité hostile, qui est à l'œuvre actuellement dans les relations entre Chine, Corée et Japon. Si les rencontres en français se multiplient dans la région, quoique dans des milieux restreints, elles contribueront à établir la confiance réciproque entre les peuples, puisque ceux qui parlent français partagent tous plus ou moins la culture humaniste et une certaine vision du monde. 298 AFI2006 J