Vers une stratégie de « loyauté globale - Marseille

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Vers une stratégie de « loyauté globale - Marseille
EXPERTISE
: : Philippe Gabilliet, professeur-associé ESCP-EAP(Paris)
Vers une stratégie de
« loyauté globale »
Comment manager de façon cohérente la fidélité
de ses vendeurs et de ses clients ?
Pour les dirigeants commerciaux,
la fidélisation durable des partenaires
de l’entreprise est aujourd’hui un thème
stratégique de la réflexion managériale.
C ETTE RECHERCHE DE LOYAUTÉ EST EN
2007 D ’ AUTANT
plus vitale qu’elle concerne désormais l’externe et
l’interne : les clients et les collaborateurs de
l’entreprise, en particulier les commerciaux.
Réflexions marketing et ressources humaines
semblent ici se confondre ; l’univers des affaires rejoint
celui du management des hommes autour d’un
concept issu de la philosophie morale :
la fidélité.
Z
Cette préoccupation de renforcement du portefeuille
de ressources-clefs - meilleurs clients ou vendeurs les
plus performants - constitue depuis longtemps une
préoccupation pour les grandes entreprises ; elle est
aujourd’hui un axe de développement pour nombre
d’organisations petites et moyennes.
3. stratégique enfin : la fidélité des acteurs constitue
un avantage concurrentiel évident, le client devenant
partenaire industriel ou commercial et le vendeur
ambassadeur loyal de son entreprise. Dans tous les
cas de figure, le ticket d’accès pour la concurrence
s’élève d’autant.
Des logiques complémentaires
Une réflexion rigoureuse
Toute politique de loyauté « globale » (se jouant à
l’extérieur et à l’intérieur de l’entreprise) semble obéir
à trois logiques complémentaires :
Si l’exigence de loyauté est aujourd’hui à l’ordre
du jour, la mise en œuvre d’une politique globale de
fidélisation n’en nécessite pas moins une réflexion
rigoureuse. Les dérives sont nombreuses, nourries de
présupposés et pseudo-certitudes. Qui n’a jamais
entendu :
1. économique : la fidélité permet d’amortir le coût
d’acquisition de la ressource (conquête d’un client
ou recrutement et formation d’un nouveau vendeur)
2. managériale : la fidélisation du portefeuille-clients
constitue un enjeu fort de mobilisation des équipes
de terrain, de même que la limitation du turnover
permet d’impliquer fortement les niveaux
d’encadrement intermédiaires de l’entreprise.
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Tout client, quel qu’il soit, mérite d’être fidélisé...
La fidélisation permet de moins investir d’efforts
en conquête...
Dans la conjoncture actuelle du marché du travail,
un vendeur satisfait de son management sera
un vendeur fidèle…
La juste rémunération de sa réussite fidélise à coup
sûr le vendeur performant…
La fidélité est souvent renforcée par l’offre
d’avantages distinctifs…
Il serait certes exagéré d’affirmer que toutes ces
idées sont fausses, disons qu’elles ne sont pas
toujours vraies... La fidélité dépend en effet de facteurs
complexes propres à chaque secteur, marché, type
de produit ou de client. Et la réalité quotidienne du
terrain se nourrit de ces situations en apparence
incompréhensibles : ce client historique, jusqu’à
présent satisfait des coûts, de la qualité et des délais,
nous quitte brutalement pour un de nos principaux
concurrents. Cet attaché commercial si performant,
situé sur la partie haute de l’échelle des salaires,
régulièrement formé, reconnu par sa hiérarchie et qui
pourtant décide
- sans raison apparente
- de quitter l’entreprise…
Une stratégie, deux cibles
Face à cet enjeu, le manager désireux de jouer la
“loyauté globale” devra s’interroger sur trois
problématiques stratégiques essentielles, du double
point de vue client et vendeur :
1. comprendre l’offre de valeur de l’entreprise, pilier
de toute attitude de fidélité durable :
au-delà de notre offre produit ou service, quelle est
la valeur réelle de l’entreprise aux yeux de notre
client ? En quoi travailler avec nous lui permet-il de
développer sa propre position et d’atteindre ses
propres objectifs au sein de son organisation ou
avec ses propres partenaires externes ?
quelle est notre « valeur employeur » pour nos
commerciaux ? En quoi travailler dans notre
entreprise leur permet-il d’atteindre leurs propres
buts professionnels, familiaux, sociaux ? En quoi
offrons-nous des perspectives de progression
et d’évolution, au-delà des règles présentes
de compensation (salaires, primes, avantages
en nature, etc.) ?
2. identifier les leviers réels de fidélisation des
partenaires-clés :
quels sont aujourd’hui les critères de satisfaction
de nos 10-15% de clients les plus fidèles ?
À l’inverse, pourquoi certains nous
quittent-ils pour la concurrence ?
dans notre entreprise, quels sont les critères
de satisfaction et de motivation du noyau des
vendeurs les plus performants
et les plus fidèles ?
à l’inverse, pourquoi certains
- en apparence
satisfaits - nous quittent-ils
pour un autre employeur ?
Les raisons d’une rupture
La séparation d’un fournisseur ou d’un
employeur a plusieurs bonnes raisons.
Tout d’abord parce que l’on en est mécontent,
tout simplement : qualité insuffisante de la
prestation ou mauvaise relation avec
les personnes.
Une relation professionnelle peut aussi cesser
par lassitude, manque de réactivation du lien
commercial ou managérial, faute de signes de
reconnaissance.
Mais également parce que la situation, le
besoin, le contexte a changé.
On peut enfin quitter son fournisseur ou
son employeur sans rien avoir à lui reprocher,
mais dans un souci naturel de progrès, afin
de continuer à améliorer sa performance ou
sa position professionnelle.
3. élaborer une politique raisonnée de « loyauté
globale » autour d’un ciblage stratégique
des populations à fidéliser en priorité, base
essentielle de tout plan d’action cohérent en
la matière.
qui avons-nous intérêt à fidéliser en priorité ?
Quels clients et vendeurs créent le plus de valeur
durable pour l’entreprise ?
quels clients et commerciaux désirons-nous
précisément fidéliser ? Sur quels leviers essentiels
allons-nous jouer pour les uns et les autres ?
notre organisation actuelle est-elle cohérente
avec cette politique de recherche de la « loyauté
globale »? Avons-nous les moyens - commerciaux
pour les uns, managériaux pour les autres de notre ambition ?
autour de quelles offres
commerciales et de quelles actions managériales
concrètes vont désormais se déployer
nos politiques de fidélisation ?
La loyauté ne se décrète pas. Aucune recette ne
permettra jamais d’assurer la fidélité des meilleurs
clients, ni la rétention des collaborateurs les plus
performants. Mais le rôle du management - et en
particulier du management commercial - demeurera
toujours de tenter - par tous les moyens disponibles de créer et renforcer en permanence,
dans une relation quotidienne avec
les acteurs du terrain, les conditions
organisationnelles et relationnelles de
cette loyauté.
La loyauté ne
se décrète pas.
PG
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