Régulation de l`appétit et troubles du comportement alimentaire

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Régulation de l`appétit et troubles du comportement alimentaire
Régulation de l’appétit
et troubles du
comportement
alimentaire
Valérie Godefroy
Coordinateur : Béatrice de Reynal
Décembre 2010
Monographie : Régulation de l’appétit et troubles du comportement alimentaire - Fondation Louis Bonduelle 2010
Tous droits réservés
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Sommaire
Sommaire ............................................................................................................................... 2
Introduction ........................................................................................................................... 4
I. Régulation de l’appétit et de la prise alimentaire ........................................................... 5
A. L’hypothalamus : centre intégrateur des signaux relatifs à la faim et à la satiété ....... 5
B. Les mécanismes de régulation de l’appétit à court et long terme............................... 6
1. A court terme....................................................................................................... 6
2. A long terme ........................................................................................................ 7
3. Le rôle de Angptl4 et de AMPK dans la régulation de l’appétit............................ 8
4. Bilan : les agents orexigènes et les agents anorexigènes .......................................... 8
C. Facteurs modulant l’appétit et la prise alimentaire (à court terme) ........................... 9
1. La prise alimentaire serait-elle programmée avant même la naissance ?.................. 9
2. L’âge et les maladies............................................................................................. 9
3. Les goûts et les facteurs psycho-affectifs, sociaux, familiaux et cognitifs .............. 9
4. Le contenu alimentaire : taille des portions, liquide ou solide, densité énergétique…
10
5. La façon de manger ou boire : fréquence, taille des gorgées, vitesse de
consommation…....................................................................................................... 13
II. Les troubles liés à une dérégulation de la prise alimentaire ......................................... 16
A. Différents types de troubles du comportement alimentaire (TCA) ........................ 16
1. Les troubles du comportement alimentaire « classiques » ................................... 16
2. Les troubles de conduite alimentaire chez les sujets obèses................................. 16
B. Le rôle des auto-anticorps dans l’apparition des TCA (classiques) ........................ 17
C. Un problème lié à la régulation de l’appétit et au comportement alimentaire :
surpoids et obésité........................................................................................................ 19
1. Un problème génétique....................................................................................... 19
2. Un problème dans le réseau neuronal hypothalamique........................................ 20
responsable du contrôle de l’appétit ......................................................................... 20
3. Un problème comportemental............................................................................ 21
4. Un problème de dérégulation de la balance énergétique ....................................... 25
5. L’influence des facteurs âge, sexe et socio-culturels sur l’obésité (Source : ObEpi
2009, France)............................................................................................................ 27
6. L’extrême complexité des facteurs prédictifs de l’obésité.................................... 30
III. Les traitements des troubles liés au comportement alimentaire................................. 31
A. Traitement de l’anorexie mentale et de la boulimie................................................. 31
1. Une prise en charge psychologique et médicale................................................... 31
2. Une hospitalisation fréquente pour l’anorexie mentale........................................ 31
3. Le traitement nutritionnel des carences............................................................... 32
B. Traitement de surpoids et obésité.......................................................................... 33
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1. Mesures diététiques et d’hygiène de vie ............................................................. 33
2. Suivi psychologique........................................................................................... 34
3. Traitements chimiques ....................................................................................... 34
4. Traitements opératoires ..................................................................................... 36
5. L’intérêt d’un traitement à long terme ................................................................ 38
6. Une particularité du traitement du surpoids et de l’obésité infantiles.................. 39
Conclusion ........................................................................................................................... 41
Bibliographie........................................................................................................................ 42
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Introduction
L'appétit existe dans les formes de vie les plus évoluées afin de réguler la quantité d'énergie
nécessaire aux besoins métaboliques. C’est un mécanisme qui est régulé naturellement de
manière très fine pour assurer les besoins énergétiques, les compenser avec les dépenses,
et ainsi, optimiser les chances de survie. Comprendre les mécanismes qui régissent l’appétit,
la satiété… est une affaire importante et complexe, lorsqu’un adulte est concerné, lorsqu’un
être en croissance est concerné, donc, aux différents âges de la vie et dans différentes
situations physiologiques.
Cependant, il semble qu’aujourd’hui, dans les pays développés, cette régulation naturelle de
l’appétit et de la prise alimentaire soit de plus en plus problématique. En effet, c’est tout
d’abord la mode de la maigreur qui implique de plus en plus un diktat des régimes
amincissants, pour lesquels un contrôle cognitif de la prise alimentaire s’impose au détriment
de l’envie naturelle de manger. Par ailleurs, l’obésité étant stigmatisée et socialement rejetée
dans un monde où l’image domine, les sujets obèses ont tendance à rester enfermés dans
une souffrance psychique qui favorise les dérèglements de l’appétit. L’offre alimentaire
pléthorique mais aussi le stress, le surmenage, la fatigue… qui caractérisent les civilisations
occidentales actuelles sont également des facteurs qui ne facilitent pas la régulation
naturelle de la prise alimentaire.
Ainsi, les troubles du comportement alimentaire sont de plus en plus fréquents dans les
sociétés occidentales. Selon la Société de Nutrition et de Diététique de Langue Française,
trois conditions sont requises pour qualifier une conduite alimentaire pathologique :
• Elle diffère de façon importante sur le plan qualitatif ou quantitatif de la conduite
habituelle des individus vivant dans le même environnement nutritionnel, social et
culturel.
• Elle entraîne des conséquences néfastes sur la santé physique (obésité, dénutrition,
carences) ou psychologique (sentiment d’anormalité, exclusion sociale, obsession,
dépression...).
• Elle témoigne d'une difficulté existentielle, d'une souffrance psychologique ou d'une
lésion du système biologique qui contrôle la prise alimentaire.
L’anorexie mentale, par exemple, se manifeste classiquement chez les classes sociales
élevées et moyennes au sein de familles pour lesquelles la promotion sociale et la réussite
scolaire ont une grande importance. Elle touche en particulier les filles (en moyenne 6 à 10
filles pour 1 garçon), dans les tranches d’âge 12-14 ans et 18-20 ans. Il en est de même
pour la boulimie (5 à 7 filles pour un garçon) mais celle-ci se manifeste surtout en fin
d’adolescence, vers 18-20 ans.
Face à ces constats, il est apparu légitime de réaliser cette étude, qui décrit dans un premier
temps les mécanismes d’une régulation normale de l’appétit et de la prise alimentaire puis se
focalise sur les troubles pouvant être associés à cette prise alimentaire (troubles du
comportement alimentaire et surpoids, obésité) et expose, pour finir, les solutions pour traiter
ces troubles.
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I.
Régulation de l’appétit et de la prise alimentaire
A. L’hypothalamus : centre intégrateur des signaux relatifs à la faim et à la
satiété
Il existe dans le cerveau humain des centres régulant à la fois la sensation de faim et la
sensation de satiété. Ils siègent dans une petite glande située au centre du cerveau :
l'hypothalamus. L’hypothalamus, en connexion avec le cortex et le système limbique
est aussi le principal organe cible des informations sur le statut énergétique de
l’organisme.
Les informations permettant de réguler l’appétit sont transmises via des molécules
messagères - des hormones au niveau périphérique et des neuromédiateurs au niveau
du cerveau – ces substances chimiques libérées dans l'environnement neuronal créent une
« ambiance » chimique influant sur le fonctionnement du neurone, ce qui permet le transfert
du « message » d’un neurone à un autre. Notons qu’il existe des molécules qui peuvent être
à la fois des hormones et des neuromédiateurs (par exemple, l’insuline, le neuropeptide Y,
l’alpha-MSH…). En effet, parmi les neuromédiateurs, on distingue : les neurotransmetteurs,
qui sont exclusivement synthétisés et libérés au niveau des fentes synaptiques (lieux de
connexion inter-neuronale) et les neuropeptides, qui ont la particularité de pouvoir être
synthétisés par le soma et ainsi de pouvoir agir comme des hormones peptidiques
circulantes.
Les hormones sont incapables de franchir la barrière hémato-encéphalique sans mécanisme
de transport. C’est pourquoi les structures appelées organes circumventriculaires, qui ont la
particularité de ne pas être protégées par la barrière hémato-encéphalique, sont très
importantes dans la détection des messages hormonaux. Certaines parties de
l’hypothalamus font partie de ces organes circumventriculaires et ont donc un rôle crucial
dans l’intégration des messages hormonaux relatifs à la régulation de l’appétit.
Les centres régulateurs de l’appétit sont multiples et ils ne réagissent pas aux mêmes
signaux moléculaires.
Au sein de l’hypothalamus, on trouve cinq régions régulatrices de l’appétit : le noyau arqué,
l’hypothalamus latéral, le noyau ventro-médian, le noyau dorso-médian et le noyau
paraventriculaire.
Le noyau arqué contient des neurones sensibles à des neuropeptides stimulant la prise
alimentaire tels que le neuropeptide Y ou l’AGRP (Agouti-gene related peptide). Il contient
aussi des neurones sensibles à POMC (pro-opiomélanocortine) et à CART (Cocaine and
Amphetamine Regulated Transcript) exerçant un effet anorexigène (coupe-faim). Il intègre
des messages hormonaux (leptine, ghréline, insuline) et il est sensible à des métabolites
intermédiaires des acides gras.
L’hypothalamus latéral, surnommé « centre de la faim », contient aussi des récepteurs du
neuropeptide Y et des neurones sensibles aux variations glycémiques.
Le noyau ventro-médian est riche en récepteurs à leptine.
Le noyau dorso-médian contient des récepteurs à l’insuline et à la leptine.
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Enfin, le noyau paraventriculaire est un centre intégrateur de données provenant des
neurones NPY (neuropeptide Y), AGRP et POMC.
Il existe également d’autres régions, extra-hypothalamiques mais très liées à l’hypothalamus,
qui sont probablement impliquées dans la régulation de l’appétit (des structures du lobe
temporal, le noyau du tractus solitaire, le noyau para-brachial, le thalamus, le système
limbique…).
Une équipe de chercheurs de l’Université de Cincinnati (Etats-Unis) a récemment mis en
évidence un petit groupe de neurones appelés mTOR, situés dans l’hypothalamus, qui
joueraient un rôle dans la capacité du cerveau à estimer la quantité d’énergie dont le corps a
besoin et donc à réguler l’appétit. La protéine mTOR, qui est activée par les signaux
transmis au cerveau pour l’informer des niveaux d’énergie en stock et nécessaires pour le
fonctionnement de notre organisme, semble jouer un rôle important dans la régulation de
l’appétit.
B. Les mécanismes de régulation de l’appétit à court et long terme
1. A court terme
-
Apparition de la sensation de faim
Le schéma classique fait intervenir la glycémie : lorsque le taux de sucre est trop bas, la
sensation de faim se manifeste. Mais ce n’est pas le seul mécanisme qui intervient dans la
genèse de la sensation de faim : la ghréline, hormone découverte en 1999, apparaît
également essentielle dans la manifestation de cette sensation. Sa sécrétion augmente
avant la prise des repas et diminue dés que l’on commence à se sustenter. Des données
récentes indiquent que l’effet orexigène de la ghréline serait diminué suite à la production
d’autres peptides gastro-intestinaux tels que la cholécystokinine, la bombésine, la désacylghréline, le peptide YY ou encore le GLP (glucagon-like peptide).
-
Apparition de l’impression de satiété
Lorsque l’on mange, arrive petit à petit une impression de satiété qui sera suivie d’une
période de rassasiement, qui explique que nous n’avons pas faim pendant quelques heures.
Ces mécanismes sont déclenchés par de nombreux signaux, particulièrement en
provenance de tout le système digestif : c’est la cascade de la satiété.
Cela commence dès la première bouchée, où les premiers signaux sensoriels liés à
l’aspect du repas, à son goût, son odeur, sa texture… influencent déjà la satiété.
Interviennent ensuite des signaux digestifs provenant de la distension gastrique via le
nerf vague mais aussi de la sécrétion d’hormones et de peptides entériques (insuline,
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cholécystokinine, bombésine, entérostatine, glucagon-like peptide…) et de la présence de
nutriments au niveau de l’intestin grêle, via l’intervention de chémorécepteurs. Le
récepteur de la cholécystokinine, situé au niveau des organes digestifs (pancréas, estomac,
vésicule biliaire, intestin) est très étudié, notamment dans le but de mettre au point des
substances capables de réguler la prise alimentaire.
La cascade de la satiété est complétée par des signaux métaboliques provenant de la
production d’ATP par l’oxydation des substrats au niveau hépatique et cérébral.
2. A long terme
Il existe une régulation à long terme qui nous permet notamment de garder un poids stable
malgré de fortes variations de prise alimentaire. Il s’agit d’une régulation hormonale à impact
hypothalamique qui intervient en fonction des stocks lipidiques, via la leptine, la ghréline
et l’insuline.
La leptine, hormone polypeptidique synthétisée par les adipocytes, active au niveau
hypothalamique les voies anorexigènes POMC et inhibe les voies orexigènes NPY et AGRP.
Quand les réserves adipeuses augmentent, le taux circulant de leptine augmente également,
ce qui permet de diminuer la sensation de faim. A l’inverse, quand les réserves diminuent, la
production de leptine diminue et cela augmente l’appétit.
La sécrétion de leptine dépend également des apports alimentaires : elle est diminuée lors
du jeûne et stimulée 4 à 5 heures après la prise d’un repas. Par ailleurs, sa sécrétion
diminue après une activité physique relativement intense.
La ghréline, polypeptide sécrété par des cellules gastriques et duodénales, possède des
activités antagonistes de celles de la leptine au niveau de l’hypothalamus : elle stimule la
prise alimentaire. Sa sécrétion est diminuée en cas d’obésité et accrue lors d’un
amaigrissement.
L’insuline agit comme un signal de diminution de la prise alimentaire à long terme : les taux
d’insuline circulante sont proportionnels à la masse de tissu graisseux. Toutefois, dans la
mesure où les taux d’insuline subissent des ajustements rapides en fonction des apports
alimentaires, on peut considérer que l’insulinémie constitue un signal intermédiaire entre
régulations des prises alimentaires à court et à long termes.
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3. Le rôle de Angptl4 et de AMPK dans la régulation de l’appétit
L’angiopoietin-like protein 4 (Angptl4) est connue comme un régulateur des lipides
périphériques et du métabolisme glucidique. Une étude récente1 a mis en évidence sur des
souris, que la production de cette protéine était accrue suite à l’administration de leptine,
d’insuline et de nutriments (glucose). De plus, l’effet anorexigène de ces substances était
nettement diminué chez les souris ne synthétisant pas la protéine Angptl4 et il redevenait
normal en leur administrant cette protéine. Cela a permis de déduire que l’effet anorexigène
de la leptine, de l’insuline et des nutriments se faisait via l’action de la protéine Angptl4.
Cette étude a également montré que l’on obtenait des effets anorexigènes similaires à ceux
de Angptl4 en supprimant l’activité hypothalamique de l’AMPK (AMP-activated protein
kinase). De plus, les souris n’ayant pas la protéine Angptl4 avait une activité de l’AMPK
hypothalamique accrue. Ceci suggère que l’Angptl4 exerce une action anorexigène, sous
le contrôle des régulateurs d’appétit tels que la leptine, l’insuline…, en diminuant
l’activité de l’AMPK hypothalamique.
4. Bilan : les agents orexigènes et les agents anorexigènes
Principaux acteurs orexigènes et anorexigènes
Molécules stimulant la prise alimentaire et
réduisant la dépense énergétique
Neuropeptide Y (NPY)
Agouti-related protein AgRP
Galanine
Noradrelanine
Orexines A et B
Oploîdes
Endocannabinoïdes
β-endorphine
Ghréline
Molécules réduisant la prise alimentaire et
augmentant la dépense énergétique
α-melanocyte stimulating hormone
Cocaïne and amphétamine related peptides (CART)
Corticotropin-releasing factor (CRF)
Thyrotropin-releasing hormone (TRH)
Neurotensine
Sérotonine
Leptine
Insuline
Glucagon-like peptide 1 GLP-1
Peptide YY 3-36
Oxyntomoduline
Cholécystokinine , Oleolethanolamide
N-acyl-phosphoethanolamine
Source : « Le contrôle central de la balance énergétique » par Serge Luquet et Céline Cruciani-Guglielmacci,
dans Cahiers de Nutrition et de Diététique 2009, vol 44
1
Hypothalamic Angptl4/Fiaf is a Novel Regulator of Food Intake and Body Weight. Kim HK, Youn BS, Shin MS, Namkoong C,
Park KH, Baik JH, Kim JB, Park JY, Lee KU, Kim YB, Kim MS
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C. Facteurs modulant l’appétit et la prise alimentaire (à court terme)
1. La prise alimentaire serait-elle programmée avant même la
naissance ?
Une étude récente2 a révélé qu’il y avait un rapport étroit entre ce que mange un enfant à
l’âge de 10 ans et ce que mangeait sa mère quand elle était enceinte, que ce soit au
niveau des apports de glucides, lipides ou protéines. Cette relation est même plus forte que
celle qui existe entre l’alimentation de l’enfant et celle de la mère ou des parents après la
naissance…Ainsi, pour éviter d’avoir des enfants qui mangent trop et mal, il serait bon
d’encourager les mamans à surveiller leur alimentation et adopter un régime équilibré dès le
début de leur grossesse.
2. L’âge et les maladies
Avec l’âge, on observe une perte d’appétit liée à une baisse des signaux orexigènes3.
En effet, on observe, chez les rats âgés, une diminution de l’expression hypothalamique du
neuropeptide Y (à effet orexigène) et de ses récepteurs ainsi qu’une détérioration de
l’induction des réponses NPY-dépendantes. De plus, chez les humains comme chez les rats
âgés, l’activité de la ghréline, seul orexigène périphérique (c’est-à-dire non synthétisé dans
le système nerveux central) est supprimée.
Des agressions physiques telles que les infections, les cancers, les maladies
inflammatoires… peuvent perturber le comportement alimentaire via la libération de
cytokines agissant sur le système nerveux central.
3. Les goûts et les facteurs psycho-affectifs, sociaux, familiaux et
cognitifs
Les signaux de satiété sont modulés en fonction de nos goûts, à la fois innés (attirance
innée pour les saveurs sucrées et modérément salées, répulsion pour l’amertume) mais
aussi acquis (expériences gustatives, olfactives et digestives agréables ou non). Le
phénomène d’alliesthésie, qui implique une diminution de l’agrément avec la quantité ingérée
(pouvant aller jusqu’à l’écœurement), joue également sur la sensation de satiété.
Les facteurs psycho-affectifs, autrement dit l’humeur, qui peut impliquer un plaisir anticipé à
l’idée de manger ou une recherche d’apaisement par la nourriture ou au contraire un dégoût
pour celle-ci, sont déterminants dans la prise alimentaire.
Les facteurs environnementaux liés à la condition socio-culturelle et familiale, tels que les
horaires de repas ou encore l’idéal corporel en fonction des cultures, peuvent aussi
influencer la prise alimentaire.
2
3
American Journal of Clinical Nutrition, Volume 91, p 748-756
Central Control of Food Intake in Aging. Kmiec Z.
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Enfin, l’individu peut également exercer un contrôle cognitif sur son alimentation : en effet,
en dépit de tous les signaux qui la régulent de façon intrinsèque et extrinsèque, la prise
alimentaire reste un comportement volontaire et l’individu peut par exemple décider de
restreindre son alimentation dans le cadre d’une volonté de perte de poids.
4. Le contenu alimentaire : taille des portions, liquide ou solide, densité
énergétique…
Rappelons tout d’abord que la disponibilité des aliments et la variété des menus jouent un
rôle important dans la prise alimentaire. On note d’ailleurs de façon constante une
augmentation des prises alimentaires lors du passage d’une alimentation traditionnelle à une
alimentation caractéristique du mode de vie urbain de type occidental, où la disponibilité et la
variété des aliments sont plus grandes.
-
La taille des portions influence la prise alimentaire
Il a été montré scientifiquement par plusieurs études 4 que, lorsque la taille des portions
augmente, la prise alimentaire et l’apport énergétique augmentent et, à l’inverse, même
en conditions de buffet à volonté, si la taille de portion d’un aliment proposé est réduite, alors
la quantité ingérée de cet aliment diminue aussi. Or, on a remarqué depuis les années 70 et
encore plus depuis les années 80-90, que la taille des portions des plats proposés aux
consommateurs avait considérablement augmenté…
La plupart des gens ne sont pas capables d’évaluer visuellement (sans instrument de
mesure) les quantités d’aliments qu’ils ont en face d’eux. Ils se servent inconsciemment
de repères pour déterminer leur portion: le contenu de leur assiette, par exemple ou
encore le contenu de la portion industrielle. Mais l’un comme l’autre ne sont pas des
repères fiables car ils peuvent conduire à augmenter la taille de la portion sans s’en
apercevoir (par exemple, avec une assiette plus grande, on a tendance à augmenter sa
portion). Les diététiciens proposent souvent des repères pour déterminer les portions
adéquates des différents types d’aliments (par exemple, la paume de la main pour la viande,
une balle de tennis pour le fromage blanc…) mais leur efficacité est également discutable.
Connaissant le lien entre taille des portions et importance de la prise alimentaire, des
repères plus fiables devraient être donnés aux consommateurs.
-
L’état physique (liquide / solide) a-t-il un impact sur la satiété ?
Il est couramment admis que les aliments sous forme solide diminuent davantage la
sensation de faim et la prise alimentaire à court terme que sous forme liquide. Sur ce sujet,
les résultats varient en fonction de la population testée et des conditions de test.
4
Mechanisms Behind the Portion Size Effect: Visibility and Bite Size. Burger KS, Fisher JO, Johnson SL.
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Une étude5 s’est fixé pour objectif de comparer l’effet des formes solides et liquides de la
gélatine, du saccharose, d’un mélange moitié glucose / moitié fructose ainsi que de protéines
de lait (acides et sucrées) sur l’appétit subjectif et la prise alimentaire.
Il est alors apparu que la forme solide ne renforçait la sensation de satiété (par rapport à la
forme liquide) que pour la gélatine et les protéines de lait sucrées. De plus, pour les sucres
comme pour la gélatine, ni la forme solide ni la forme liquide ne diminuait la prise alimentaire
par rapport à l’ingestion du contrôle (eau sucrée sans calories) et, pour les protéines de lait,
les deux formes, liquide comme solide, diminuaient autant l’une que l’autre la prise
alimentaire par rapport au contrôle (eau).
Il semble donc que la composition en macronutriments (protéines, glucides, lipides)
des aliments ait plus d’impact sur l’appétit subjectif et sur la prise alimentaire que leur
état physique. D’ailleurs, une autre étude6 a montré qu’il n’y avait aucune différence entre
l’ingestion d’aliments liquides et semi-solides, ayant une valeur énergétique et une
composition en macronutriments similaires, au niveau de la réponse des hormones gastrointestinales de régulation de l’appétit (CCK-8, ghréline et GLP-1).
Néanmoins, notons qu’une étude7 menée chez des sujets âgés (environ 72 ans) a mis en
évidence que la faim et le désir de manger étaient significativement plus élevés et la
satiété réduite après un repas liquide par rapport à un repas solide de même valeur
énergétique. De plus, après un repas liquide, la glycémie et l’insulinémie postprandiales
étaient significativement plus faibles et la concentration de ghréline (hormone orexigène)
plus élevée (par rapport à un repas solide de même valeur énergétique)…
-
La densité énergétique (DE) joue sur la ration énergétique ingérée
La densité énergétique des aliments que nous ingérons est un facteur déterminant de la
ration énergétique des repas.
La notion de densité énergétique (DE) est issue des efforts pour comprendre les différences
de pouvoir satiétogène de différents aliments. La DE d’un aliment correspond à sa charge
énergétique par unité de poids (ou de volume). On peut définir la DE d’un repas ou de
l’alimentation globale selon le même principe (énergie/poids), cependant le rôle des liquides
est difficile à prendre en compte.
Un aliment de forte DE apporte beaucoup d’énergie sous un petit volume; inversement, un
aliment de faible DE apporte peu d’énergie sous un grand volume qui remplit bien l’estomac.
La DE d’un aliment est déterminée par son contenu en eau et en nutriments : les lipides
apportent 9 kcal au gramme, les protides et les glucides en apportent 4. Des substances non
énergétiques comme les fibres ajoutent du poids et du volume mais pas de calories ; elles
contribuent donc à faire baisser la DE d’un aliment. Ainsi, pour limiter la DE d’une
5
Effect of drinking compared with eating sugars or whey protein on short-term appetite and food intake. Akhavan T, Luhovyy BL,
Anderson GH.
6
Effect of viscosity on appetite and gastro-intestinal hormones. Zijlstra N, Mars M, de Wijk RA, Westerterp-Plantenga MS, Holst
JJ, de Graaf C.
7
Food form and portion size affect postprandial appetite sensations and hormonal responses in healthy, nonobese, older adults.
Leidy H.J, Apolzan J.W., Mattes R.D., Campbell W.W. Obesity, 2010, vol.18, No.2, pp.293-299
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alimentation, il est conseillé de limiter les apports en lipides et d’augmenter la consommation
de fruits et légumes.
A court terme, la ration énergétique d’un repas ou d’une journée est corrélée de façon
très étroite avec la DE des aliments consommés au repas ou ce jour-là. A plus long
terme, cette corrélation devient plus floue. 8
Cette corrélation confirme l’hypothèse selon laquelle l’ingestion à court terme est
déterminée par le poids et le volume d’aliments ingérés, plutôt que par leur contenu
énergétique. En effet, si la ration énergétique ingérée avec une alimentation de DE faible
est plus faible qu’avec une alimentation de DE élevée, c’est parce que pour un même
volume (ou poids) rassasiant contenu dans l’estomac, le contenu calorique des aliments à
DE faible est inférieur.
La question de la prise en compte des liquides dans le calcul de la DE est délicate : on peut
se demander si l’ingestion de boissons avec le repas n’est pas susceptible d’affecter la DE
globale du repas et donc de diminuer l’apport énergétique. Plusieurs études ont abordé cette
question et leurs résultats sont concordants : la ration énergétique du repas dépend de la DE
des aliments solides qu’il apporte, et la consommation de boissons n’a que peu ou pas
d’influence. En revanche, si le liquide est incorporé à l’aliment, alors il fait baisser sa DE et
diminue la consommation énergétique.
Notons que la DE de l’alimentation diminue avec l’âge, est plus élevée chez les hommes que
chez les femmes et varie aussi en fonction de l’origine ethnique.
En résumé, à court terme, plus un individu mange d’aliments à faible DE (fruits et légumes)
et moins il mange d’aliments à forte DE (aliments riches en lipides), plus sa ration
énergétique est faible et inversement.
-
L’index glycémique influence-t-il la sensation de satiété ?
La mesure de l'index glycémique (IG) sert à évaluer le pouvoir hyperglycémiant d'un aliment
donné par rapport à un aliment de référence, en général le glucose (IG = 100).
En pratique, deux aliments contenant la même quantité de glucides n'ont pas le même
pouvoir hyperglycémiant, indépendamment de leur structure biochimique.
Des études 9 ont mis en évidence un effet de l’index glycémique de l’alimentation sur la
régulation de l’appétit : il semble qu’un régime à faible index glycémique permette de
réduire la sensation de faim. Cependant, des recherches ont suggéré la possibilité que ce
soit en réalité le contenu en fibres fermentescibles du régime à faible index glycémique
qui détermine son efficacité pour augmenter la satiété. En effet, un nouveau récepteur des
produits de la fermentation glucidique a été mis en évidence sur certaines cellules du côlon ;
or, ces mêmes cellules excrètent beaucoup d’hormones anorexigènes, ce qui pourrait
expliquer l’effet suppresseur de l’appétit des glucides fermentescibles. Ainsi, en réalité, l’effet
satiétogène associé aux régimes à faible index glycémique est probablement dû à
8
9
Densité énergétique et prise alimentaire. France Bellisle. Cahiers de nutrition et de diététique, sept 2010, vol 45, n°4
Glycaemic index, appetite and body weight. Ford H, Frost G.
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l’augmentation de l’apport en glucides fermentescibles, souvent impliquée par ce type de
régime.
-
La palatabilité et la sapidité joue sur le comportement alimentaire et la
sensation de faim
La palatabilité est la caractéristique des aliments agréables au palais. Le plaisir que
procurent les aliments joue ainsi un rôle important sur le comportement alimentaire. Par
ailleurs, la sapidité des aliments joue sur la vitesse de consommation des aliments et sur la
sensation de faim au cours des repas et entre ceux-ci.
-
Des nutriments plus ou moins satiétogènes
Certains nutriments rassasient plus que d’autres pour le même contenu énergétique
car ils ont un volume ou poids plus important. C’est le cas des fibres par rapport aux
autres macronutriments ou encore des glucides et protéines par rapport aux lipides.
Les protéines sont assez réputées pour leur effet satiétogène : une étude10 menée sur des
sujets obèses ou en surpoids soumis à un régime restrictif (750 kcal/jour) a d’ailleurs montré
que le groupe ayant un apport élevé en protéines (25% de l’apport énergétique total) se
sentait plus rassasié tout au long de la journée, avait moins envie de manger et pensait
moins à la nourriture tard dans la nuit que le groupe ayant un apport protéique normal (14%
de l’apport énergétique).
Certaines études avaient suggéré un effet du calcium sur l’appétit et sur la prise alimentaire
mais celui-ci n’a pas été confirmé dans les études récentes.
5. La façon de manger ou boire : fréquence, taille des gorgées, vitesse
de consommation…
-
La fréquence des prises alimentaires ne semble pas influencer la satiété
Une étude11 menée sur des hommes en surpoids ou obèses a révélé que le fait d’avoir 3 ou
6 prises alimentaires par jour en suivant un régime hypocalorique (750 kcal/jour) n’avait
aucun impact sur la sensation de faim et de satiété, sur le désir de manger ou sur la
préoccupation par rapport à la nourriture. Cette observation a permis de conclure qu’il était
inutile d’augmenter la fréquence des repas pour améliorer le contrôle de l’appétit et de la
faim chez des sujets soumis à un régime restrictif.
-
La taille des
rassasiement
gorgées
d’orangeade
influence
la
consommation
et
10
le
The Effects of Consuming Frequent, Higher Protein Meals on Appetite and Satiety During Weight Loss in Overweight/Obese
Men. Leidy HJ, Tang M, Armstrong CL, Martin CB, Campbell WW.
11
The Effects of Consuming Frequent, Higher Protein Meals on Appetite and Satiety During Weight Loss in Overweight/Obese.
Men. Leidy HJ, Tang M, Armstrong CL, Martin CB, Campbell WW.
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Une étude12 a permis de montrer que la consommation moyenne d’orangeade était moindre
lorsque celle-ci était bue par petites gorgées (5 g) peu espacées dans le temps plutôt que
par grandes gorgées (20 g) plus espacées.
De plus, les sujets de l’étude consommaient plus d’orangeade calorique que son équivalent
non calorique uniquement lorsqu’ils l’ingéraient par grandes gorgées tandis qu’aucune
différence n’était observée entre les deux boissons lors d’une ingestion par petites gorgées.
Ainsi, la consommation par petites gorgées, en augmentant l’exposition orosensorielle par unité de temps de consommation (environ 30 sec/min vs 15 sec/min),
permet de réduire la consommation et contrebalance même l’activation du système de
récompense par le contenu calorique. Boire à la paille pourrait donc promouvoir le
rassasiement et réduire la consommation énergétique.
-
Manger trop vite ne permet pas le rassasiement tandis que manger lentement
favorise la satiété 13
Tout d’abord, il faut compter au moins une vingtaine de minutes (à partir du début du
repas) pour que les signaux de satiété commencent à être intégrés par
l’hypothalamus ; ainsi, si la durée du repas est inférieure, la satiété n’a pas le temps de se
mettre en place.
En outre, manger trop vite implique une moindre mastication tandis que manger lentement
permet de bien mâcher. Or, la mastication favorise l’apparition plus rapide de la satiété.
En effet, l’humidification des aliments par la salive permet que ceux-ci occupent une place
plus grande dans l'estomac, ce qui le distend et modère l'appétit. De plus, les enzymes
contenues dans la salive commencent à digérer l’amidon (polymère de glucose) du contenu
alimentaire: le glucose est ainsi plus vite délivré dans l’intestin, ce qui favorise la satiété.
Enfin, les aliments bien mâchés sont mieux imprégnés des sucs gastriques qui commencent
à dissocier les protéines en acides aminés. Les acides aminés sont ainsi plus vite absorbés
au niveau de l’intestin grêle et constituent aussi un facteur de satiété.
-
Les conditions du repas influent sur les apports alimentaires14
Une équipe de chercheurs français a mesuré ces différences en laboratoire, dans des
conditions strictes. Les adolescents, garçons et filles, mangeaient à volonté et jusqu’à
parfaite satiété le même type de repas dans 4 situations : seuls, en groupe, seuls devant la
télé, seuls en écoutant de la musique.
Ce sont seulement les apports alimentaires de ceux qui mangeaient en groupe qui ont différé
des autres, avec de moindres quantités d’aliments, de boissons et de calories. Par ailleurs, il
semble que les jeunes aient tendance à consommer plus de sodas quand ils regardent la
télévision et peut-être plus d’eau en écoutant de la musique.
Les chercheurs observent que le fait de manger en groupe a un effet de contrôle et
d’inhibition sur la prise de nourriture chez les adolescents. Chez les adultes, ce serait
12
Sip size of orangeade : effects on intake and sensory-specific satiation. Weijzen P., Smeets P., de Graaf C. Brit J Nutr, 2009,
vol. 102, pp. 1091-1097
13
www.e-sante.fr, article publié par Paule Neyrat, diététicienne
14
Nutrition Research, volume 29, n°10, p736-742
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plutôt le contraire, avec un effet de facilitation : la convivialité aidant, ils auraient plutôt
tendance à manger plus quand ils ne sont pas seuls.
Au-delà de tous ces facteurs influençant la régulation de l’appétit, il existe un certain nombre
de troubles liés au comportement alimentaire qui sont associés à une altération des
mécanismes naturels de contrôle de la prise alimentaire…
-
S’imaginer que l’on mange aurait un effet satiétogène15…
C’est en effet ce que semble montrer une étude américaine récente publiée dans Science.
L’expérience consistait à demander à deux groupes d’étudiants d’imaginer qu’ils mangeaient
un certain nombre de M&M’s et qu’ils jetaient le reste : le premier groupe devait imaginer
manger 30 bonbons et en jeter 3 et inversement pour le deuxième. Lorsque l’on a ensuite
proposé à chacun de ces étudiants un bol de M&M’s dans lequel il pouvait se servir à
volonté, il a été observé que les étudiants du premier groupe en mangeaient en moyenne
trois de moins, soit 50% de moins, que ceux du deuxième groupe. L’expérience a été
répétée avec des morceaux de fromage et des résultats similaires ont été observés. En
revanche, imaginer avoir mangé 30 M&Ms ne jouait pas sur l'envie de fromage. C'est donc
bien le fait de penser à l'aliment précis que l'on va consommer qui influe sur l'appétit, et non
le simple fait de s'imaginer en train de manger. Un dernier volet de l'expérimentation, conduit
par le biais d'un jeu vidéo, a montré que la gymnastique mentale réduisait les efforts que les
gens étaient prêts à déployer pour se nourrir.
15
Study from Carnegie Mellon University, published in Science
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- 15 -
II.
Les troubles liés à une dérégulation de la prise
alimentaire
A. Différents types de troubles du comportement alimentaire (TCA)
1. Les troubles du comportement alimentaire « classiques »
La terminologie « troubles du comportement alimentaire » est classiquement réservée à des
regroupements de symptômes précis comme l’anorexie mentale restrictive ou l’anorexie
avec boulimie / vomissements ou encore la boulimie.
L’anorexie se caractérise par la triade : restriction alimentaire, amaigrissement et
aménorrhée (absence des règles, de plus en plus rare avec l’usage des pilules
contraceptives). La perte de poids atteint rapidement 10 % du poids initial puis peut aller
jusqu’à 30 % ou 40 %. L’indice de masse corporelle est inférieur à 17,5 kg/m2 mais peut
descendre en dessous de 14 kg/m2, voire de 11 kg/m2 où le risque mortel est majeur.
Dans l’anorexie restrictive, les apports alimentaires sont faibles, voire inexistants, et le sujet
lutte contre la faim, meurt parfois de faim, dans un déni de gravité de sa minceur.
Dans l’anorexie-boulimie (anorexie associée à des crises de boulimie), qui peut intervenir
d’emblée ou secondairement à une anorexie restrictive (plus fréquent), la conduite du sujet
est centrée sur l’amaigrissement et les vomissements sont provoqués pour garder le contrôle
de son poids.
La boulimie nerveuse, ou boulimie vraie, est caractérisée par la survenue d’épisodes
répétitifs et incontrôlables d’hyperphagie, véritables compulsions alimentaires
impératives, impulsives et irrésistibles avec perte de contrôle. Elle est le plus souvent suivie
de stratégies pour tenter de contrôler le poids : vomissements, hyperactivité physique, prise
inconsidérée de diurétiques et/ou de laxatifs. De façon plus précise, la boulimie est définie
par des crises survenant plus de deux fois par semaine avec un poids normal, grâce aux
stratégies de contrôle du poids, le sujet ayant conscience du caractère pathologique de son
comportement (culpabilité et honte).
La moitié environ des anorexiques peuvent développer des épisodes boulimiques et un tiers
environ des boulimiques ont des épisodes d’anorexie nerveuse, c’est dire que les deux
pathologies sont intriquées.
2. Les troubles de conduite alimentaire chez les sujets obèses
En réalité, il existe de nombreuses situations de désordres alimentaires qui ne rentrent pas
dans les définitions précédentes et qui, pourtant, font souffrir certains sujets qui vont parfois
mettre leur corps en danger.
Il en est ainsi de la situation d’obésité, identifiée comme l’un des facteurs de risque de
troubles du comportement alimentaire, en particulier chez les enfants et les
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- 16 -
adolescents. En effet, un enfant obèse n’a pas d’emblée une personnalité pathologique et si
l’on note une plus grande fréquence des troubles de conduite alimentaire chez les enfants
obèses, c’est dans la mesure où ces troubles sont induits par l’obésité elle-même.
Ainsi, certaines dérives peuvent s’installer durablement dans le comportement alimentaire
des sujets obèses, allant du grignotage automatique à l’hyperphagie, la boulimie ou la
compulsion alimentaire en passant par la restriction cognitive.
Le grignotage automatique sans faim (à tous les âges) ne répond à aucun sens, il se fait
sans aucune envie d’un aliment spécifique et il n’est pas, comme le grignotage classique, lié
à une sensation de faim.
L’hyperphagie amène le sujet obèse à absorber d’énormes quantités de nourriture, sans
culpabilité, sans avoir un sentiment de perte de contrôle, donc sans se faire vomir, d’où sa
prise de poids.
La crise de boulimie, quant à elle, conduit le sujet à manger dans l’urgence, n’importe quoi,
en quantité extravagante, sans éprouver de sensation de faim, toujours en cachette, puis à
se faire vomir. Son seul but est l’extinction par écœurement ou par une satiété extrême dans
une complète démesure. Le sujet boulimique, même en surcharge pondérale, surveille son
poids. La personnalité du sujet boulimique est profondément dépressive, voire suicidaire.
Cette conduite, quasiment inexistante chez l’enfant, est très rare chez le jeune adolescent.
La compulsion alimentaire, entre l’hyperphagie et la boulimie, peut être apparentée au
« Binge Eating Disorder ». Un désir non réfréné, une impulsion soudaine, pousse le sujet
obèse à consommer un aliment donné spécifique, sur une courte durée, entre les repas, en
fin de journée… Ce comportement, souvent secret, génère un sentiment de honte jusqu’à
parfois devenir une compulsion masquée. Le sujet obèse compulsif engloutit quand les
autres sont moins attentifs… Lorsque les épisodes de prise alimentaire impulsive se répètent
au moins deux jours par semaine et sur une période de 6 mois, sans stratégie de contrôle du
poids, on peut parler de « Binge Eating Disorder ». Notons qu’il existe aussi un syndrome
appelé « Night Eating Syndrome » (NES), qui associe une impulsivité alimentaire en période
nocturne, une anorexie matinale, des anomalies du sommeil et parfois des troubles de
l’humeur.
La restriction cognitive, qui peut commencer dès l’adolescence, consiste à réduire de façon
de plus en plus importante sa consommation alimentaire, avec pour objectif d’obtenir un
poids inférieur au poids spontané. Il s’agit d’une conduite dangereuse car elle peut générer
des compulsions incontrôlables, comme suivre des régimes restrictifs sans arrêt en induisant
de graves troubles de la régulation (contrôle-relâchement). Ces comportements cycliques
aboutissent en fin de compte à une aggravation de la surcharge pondérale.
B. Le rôle des auto-anticorps dans l’apparition des TCA (classiques)
Il existe certains facteurs de prédisposition à l’apparition de troubles du comportement
alimentaire : ce sont des facteurs biologiques (dispositions génétiques, troubles des
Monographie : Régulation de l’appétit et troubles du comportement alimentaire - Fondation Louis Bonduelle 2010
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- 17 -
neurotransmetteurs…), psychologiques (fréquence de l’anxiété, dépression, mauvaise
estime de soi, ambition, besoin affectif…) ou encore sociaux-culturels et familiaux. Grâce
à une découverte récente, un nouveau facteur biologique, peut-être lié à la nutrition,
impliquant certains types d’auto-anticorps, a pu être mis en évidence.
Les neuropeptides, comme l’α-MSH ou le neuropeptide Y, produits notamment par les tissus
périphériques, peuvent participer à la régulation du comportement motivationnel (appétit et
émotions) en agissant comme des hormones peptidiques circulantes.
Les chercheurs ont récemment découvert que les neuropeptides sanguins coexistaient avec
les immunoglobulines, capables de se lier à eux. Par conséquent, ces immunoglobulines
représentent des auto-anticorps (auto-Ac, c’est-à-dire que ces anticorps sont dirigés contre
des tissus ou constituants de l’individu lui-même et non contre des corps étrangers) dirigés
contre les neuropeptides. Ces auto-anticorps peuvent présenter des affinités différentes
pour l’α-MSH selon leur type (IgM, IgG ou IgA).
Le rôle physiologique et pathologique des auto-Ac dirigés contre l’α-MSH, un neuropeptide
clé impliqué dans la régulation de l’appétit (effet anorexigène) et de l’anxiété (effet
anxiogène), a été étudié par une équipe de chercheurs de Rouen16.
Ainsi, ils ont observé que ces auto-Ac peuvent être induits par le stress et peuvent donc
constituer un mécanisme neuro-immunologique d’adaptation au stress. En effet, les animaux
possédant des auto-Ac de forte affinité dirigés contre l’α -MSH, induits par des
expositions répétées au stress, présentent une anxiété réduite (lors d’un stress ultérieur)
mais aussi des apports alimentaires plus élevés, car l’effet satiétogène et anxiogène de
l’α-MSH est ainsi bloqué. Notons qu’un stress moyen et répété induit des auto-anticorps
avec une forte affinité pour l’α-MSH (entraînant la neutralisation de l’α-MSH) mais un stress
fort et chronique induit des auto-anticorps fixant l’α-MSH avec une faible affinité, ce qui
ne neutralise pas l’α-MSH mais permet son transport vers les récepteurs spécifiques de la
mélanocortine et induit par conséquent un effet satiétogène et anxiogène.
Dans les deux cas, on remarque une satiété physiologique altérée et des troubles de
l’anxiété, symptômes qui caractérisent l’anorexie mentale et la boulimie…
Un premier niveau de preuve de l’implication des auto-Ac dirigés contre l’α-MSH dans les
mécanismes neurobiologiques de ces troubles du comportement alimentaire a d’ailleurs été
obtenu. Les chercheurs ont en effet observé une fixation accrue d’un certain type d’auto-Ac
(les immunoglobulines G ou IgG) contre l’α-MSH, suggérant une plus forte affinité de ces
auto-Ac, chez les patients présentant ces troubles (par rapport aux patients sains). De plus,
les niveaux sériques des différents types d’auto-Ac dirigés contre l’α-MSH (avec
différents niveaux d’affinité) sont corrélés aux résultats des tests « Eating Disorders
Inventory Scale » des patients souffrant de troubles du comportement alimentaire. Les
corrélations observées dans l’anorexie sont opposées à celles observées dans la
boulimie, ce qui suggère que les changements dans les propriétés des auto-Ac dirigés
contre l’α-MSH pourraient être responsables des changements de comportement constatés
dans ces pathologies.
16
« Les auto-anticorps pointés du doigt ». Pr Sergueï Fetissov. Nutrition infos, 2010, n°11
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Ainsi, les auto-Ac dirigés contre l’α-MSH sont naturellement synthétisés par la
microflore intestinale et sont donc normalement présents chez les individus sains mais il
semble que, chez les sujets souffrant de troubles du comportement alimentaire, les
propriétés de ces auto-Ac soient altérées. Il est probable que des facteurs pathogéniques
existent et soient responsables de cette altération.
Des protéines appartenant à certains micro-organismes qui affichent des homologies de
séquences avec l’α-MSH ont été identifiées. Parmi ces micro-organismes, on trouve des
bactéries commensales et pathogéniques, notamment présentes dans la microflore
intestinale. Cette découverte suggère que certains micro-organismes pourraient
déclencher la production d’auto-Ac interagissant avec l’α-MSH (selon le concept de
mimétisme moléculaire) et ainsi être à l’origine de l’altération des propriétés de ces
auto-Ac, mécanisme biologique apparemment impliqué dans le développement de l’anorexie
mentale et de la boulimie. Cela implique aussi que la nutrition, incluant les pré- et
probiotiques ayant un impact sur la composition du microbiote, pourrait influencer
indirectement la production des auto-Ac dirigés contre l’α-MSH. Si ce lien venait à être
confirmé, il pourrait fournir un support au développement de nouvelles stratégies
thérapeutiques, comme les approches pharmaco-nutritionnelles, pour soigner les troubles du
comportement alimentaires tels que l’anorexie et la boulimie.
C. Un problème lié à la régulation de l’appétit et au comportement
alimentaire : surpoids et obésité
Le problème du surpoids et de l’obésité est déterminé par un ensemble de facteurs, à
différents niveaux, plus ou moins liés les uns aux autres, sur lesquels l’individu peut exercer
un contrôle plus ou moins important.
1. Un problème génétique
Si l’augmentation de la prévalence de l’obésité observée ces dernières décennies est, au
niveau des populations, essentiellement due à des changements environnementaux, de
nombreux arguments, y compris l’explosion des formes extrêmes d’obésité à début précoce,
suggèrent, au niveau individuel, l’existence d’une vulnérabilité d’origine génétique. De plus,
les études familiales suggèrent une héritabilité de la corpulence d’environ 70%.
Débutée il y a une douzaine d’années, la recherche des gènes d’obésité a été de plus en
plus fructueuse, puisqu’ont été identifiés 28 gènes, responsables d’obésité extrême
monogénique ou simplement associés à un risque accru d’obésité commune ou
encore modulant l’indice de masse corporelle des populations générales (même non
obèses).
Une obésité monogénique est liée à la présence d’une mutation unique dont la présence
suffit à expliquer un phénotype généralement extrême. Jusqu’à présent, 8 gènes (LEP,
LEPR, MC4R, POMC, PCSK1, BDNF, NTRK2, SIM1) ont été démontrés responsables de
formes monogéniques d’obésité. Il s’agit exclusivement de protéines clés de la voie
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leptine/mélanocortine qui joue un rôle central dans la régulation de la prise alimentaire et du
poids corporel. Quant aux autres gènes identifiés comme associés à un risque d’obésité
accrue ou modulant l’IMC (par exemple, le gène FTO, qui est très étudié), ils sont tous
exprimés dans le cerveau et le peu qui est connu de leur fonction est en faveur d’un rôle
dans la régulation de la satiété et les mécanismes de stimulation de la prise alimentaire.
Au-delà des facteurs génétiques, il existe également des facteurs épigénétiques de
l’obésité, c’est-à-dire des facteurs environnementaux qui peuvent influer sur
l’expression des gènes et provoquer des mutations transmissibles à la descendance. Ainsi,
il semble que l’augmentation progressive du rapport oméga 6 / oméga 3 dans l’alimentation
occidentale soit un de ces facteurs épigénétiques : cette évolution aurait provoqué une
dérive génétique contribuant à l’épidémie actuelle d’obésité. Des études récentes 17 ont en
effet montré que le fait d’administrer à des souris, sur 4 générations, un régime mimant
l’alimentation occidentale avec un rapport oméga 6/oméga 3 élevé entraînait une
augmentation progressive de la masse adipeuse sans que les souris ne mangent plus.
L’hypothèse est que le déséquilibre en acides gras altère le fonctionnement des gènes et
que ce dysfonctionnement se transmet aux générations suivantes, qui deviennent alors
prédisposées au surpoids et à l’obésité.
2. Un problème dans le réseau neuronal hypothalamique
responsable du contrôle de l’appétit
D’après une équipe de chercheurs de l’Université de Yale, l’obésité pourrait être
préprogrammée dans le cerveau dès la naissance18 !
Ainsi, des tests chez des rats, soumis à un régime à haute teneur en graisses et très riche
en calories, ont révélé une différence remarquable dans le centre de nutrition du cerveau des
animaux devenus obèses : en effet, chez ces animaux, les neurones censés signaler la
satiété et le début de la dépense énergétique sont beaucoup plus lents car ils sont inhibés
par d’autres cellules. En revanche, chez les animaux résistants à l’obésité, ces neurones
sont plus actifs pour signaler que suffisamment de nourriture a été ingérée. La
prédisposition à l’obésité serait donc liée au niveau d’efficacité de ce mécanisme de
transmission neuronale régulant l’appétit.
Récemment, lumière a été faite sur le rôle clé de la leptine et de la ghréline dans la mise en
place des connexions neuronales conditionnant appétit et prise de poids, dès le stade in
utero19.
Les résultats des études tendent à montrer qu’une absence de leptine est associée à une
baisse drastique des axones provenant du noyau arqué et innervant le noyau paraventriculaire. Ainsi, cette hormone jouerait un rôle trophique au niveau du noyau arqué pour
promouvoir son développement. Elle favoriserait, au stade postnatal précoce, la pousse des
axones et des neurones responsables, à l’âge adulte, de la régulation de l’appétit et du poids.
17
Journal of lipid research, volume 51, pp 2352-2361
« 1 high-fat diet, 2 different outcomes: The path to obesity becomes clearer », « Synaptic input organization of the
melanocortin system predicts diet-induced hypothalamic reactive gliosis and obesity »
19
De la naissance du contrôle hormonal. D’après un exposé du Dr Sébastien Bouret, à l’occasion du Symposium Nutrition de la
mère et de l’enfant – de la théorie à la pratique. Nutrition infos, 2010, n°13
18
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Etant donné les effets constatés pour la leptine, les chercheurs se sont demandé si la
ghréline (autre hormone de régulation de l’appétit) pouvait également jouer un rôle dans le
développement et la projection des noyaux arqués en tant que facteur trophique au niveau
de l’hypothalamus. Les études faites sur modèle animal semblent appuyer cette thèse : en
effet, en bloquant l’action de la ghréline (avec un agent pharmacologique) à un stade
précoce de la vie (entre J4 et J21) chez des rongeurs, on observe une densité accrue des
axones entre noyau arqué et para-ventriculaire, ce qui suggère que la ghréline inhiberait
cette mise en place. Notons qu’une prise de poids persistante, même au stade adulte, ainsi
qu’une surconsommation alimentaire (entre autres) ont été observées chez ces mêmes
rongeurs, ce qui confirme que la ghréline a un rôle crucial dans la mise en place d’un réseau
neuronal de contrôle de l’appétit fonctionnel.
Au final, le schéma de mise en place du contrôle hormonal de l’appétit à la naissance
est le suivant : dès les stades les plus précoces de la vie postnatale, un premier pic de
leptine promeut la croissance axonale, suivi par une hausse progressive de la
quantité de ghréline qui permet de bloquer cette croissance. Ainsi, les neurones restent
dans les noyaux qu’ils doivent innerver.
Des facteurs génétiques, épigénétiques et environnementaux, tels que la nutrition de la
femme enceinte et du nourrisson au stade néonatal, jouent probablement un rôle dans la
détermination du niveau d’efficacité du système hypothalamique de contrôle de l’appétit.
Ainsi, des travaux menés récemment 20, sur modèle animal, ont permis de montrer que, suite
à l’ingestion d’un lait enrichi en protéines chez des bébés prématurés en retard de
croissance (pour un rattrapage précoce de croissance), on observait une activation de la
mise en place des réseaux hypothalamiques régulant la prise alimentaire mais aussi et
surtout, une résistance à la leptine, favorisant le développement de mauvais comportements
alimentaires (préférence pour un régime hyperlipidique / hypercalorique) et l’apparition de
problèmes d’obésité.
3. Un problème comportemental
-
Une réponse incontrôlable face à un environnement d’abondance alimentaire
Selon une revue américaine 21 , l’obésité résulterait largement de réponses automatiques
incontrôlables à un environnement caractérisé par une accessibilité excessive de nourriture
et un marketing agressif, conduisant les individus à surconsommer sans en être conscient ni
pouvoir se réfréner. Cette étude détaille les 10 mécanismes neurophysiologiques en
cause :
- la sécrétion de dopamine en réponse à la nourriture et à des images de nourriture,
créant une motivation à manger ;
- des préférences innées pour le sucre et les matières grasses, en particulier en
cas de stress, des choix d’aliments fournissant rapidement des calories pour
répondre à une augmentation des besoins énergétiques ;
20
Modulation de l’appétit pendant la période périnatale. Bérengère Coupé, lauréate du Prix Louis Bonduelle 2008 et Patricia
Parnet, INRA-Univ Nantes
21
Neurophysiological pathways to obesity: below awareness and beyond individual control. Cohen D. Diabetes, Jul 2008, vol.
57, pp. 1768-1773
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-
-
des stratégies de survie ataviques, telles que la consommation accrue de
nourriture en réponse à la variété et la nouveauté ;
une inaptitude à estimer visuellement les volumes ou le contenu calorique, des
signaux de satiété internes imprécis basés sur le volume plus que sur la densité
énergétique ;
une préférence pour les produits faciles à manger ;
l’existence de neurones « miroir », dédiés au comportement d’imitation, pouvant
favoriser la surconsommation conviviale ;
des réponses conditionnées à des stimuli associant la nourriture avec d’autres
plaisirs ;
un conditionnement pour certains aliments promus par la publicité, parfois via des
messages subliminaux ;
l’activation de conduites stéréotypées par identification à des célébrités ou des
personnes de l’entourage (le public cible des publicitaires) ;
des consommations impulsives, des choix alimentaires peu judicieux, une maîtrise
de soi caractérisée par une « fatigabilité à l’effort ».
Un comportement alimentaire favorisant les signaux externes (et non internes)
pour s’arrêter de manger
Il semblerait que le fait de suivre des signaux de satiété internes pour arrêter de manger soit
plus favorable au maintien d’un IMC (Indice de Masse Corporelle) correct.
L’étude22 ayant permis ce constat définissait les signaux internes par l’arrêt du repas en
réponse à une sensation de satiété ou pour laisser de la place au dessert ou encore le fait
de continuer à manger quand on a faim même si le repas est mauvais. A l’opposé, les
signaux externes d’arrêt étaient constitués par la quantité jugée normale par la plupart des
gens, la fin de la boisson consommée en accompagnement du repas ou de l’émission de TV
regardée.
Ainsi, l’étude a permis d’observer que les personnes de poids normal étaient plus
influencées par des facteurs internes tandis que les personnes en surpoids l’étaient
plus par des facteurs externes. De même, les étudiants français étaient plus influencés par
des facteurs internes, tandis que les Américains l’étaient plus par des facteurs externes. La
tendance de certains individus à survaloriser les signaux externes pourrait donc expliquer en
partie les variations de l’IMC entre différentes populations, voire différentes cultures.
-
La privation de sommeil, facteur de risque d’obésité ?23
De nombreuses études épidémiologiques (transversales et longitudinales) rapportent, après
ajustement des facteurs de confusion, une association entre une durée de sommeil courte et
un IMC élevé. Certaines de ces études suggèrent même un lien de causalité : elles montrent
22
Internal and external cues of meal cessation: the French paradox redux ? Wansink B., Payne C.R., Chandon P. Obesity, 2007,
vol.15, No. 12, pp. 2920-2924
23
Do all sedentary activities lead to weight gain: sleep does not. Chaput JP, Klingenberg L, Sjödin A.
« Sommeil et regulation du poids ». Pr. Karine Spiegel de l’INSERM
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que les personnes dormant peu prennent plus de poids que celles dormant 7 à 8
heures par nuit. Il semble qu’il existe de plus une relation dose-effet entre la durée de
sommeil et le risque d’obésité.
Par ailleurs, l’impact d’un sommeil de durée insuffisante sur le risque d’obésité semble plus
important chez les enfants que chez les adultes, et plus important chez les adultes jeunes
que chez les adultes plus âgés.
Des données récentes montrent que la privation de sommeil augmente l’appétit et les
concentrations de ghréline (hormone de la faim), tout en diminuant les concentrations
de leptine (hormone de la satiété). Mais d’autres mécanismes peuvent aussi intervenir
pour favoriser la prise de poids en cas de sommeil réduit. Ainsi, le cortisol, dont le taux en fin
de journée est augmenté avec la réduction du sommeil, accroît l’appétit et peut favoriser le
développement d’une obésité abdominale et d’une insulino-résistance.
D’autres facteurs (liés au manque de sommeil), tels que l’augmentation du temps disponible
pour manger, la difficulté à maintenir un mode de vie sain ainsi qu’une fatigue chronique ne
facilitant pas l’astreinte à un régime amincissant, peuvent également expliquer la prise de
poids et le risque d’obésité associés à la réduction du temps de sommeil.
Ces données et la réduction du temps de sommeil, fréquemment associée à la vie moderne,
suggèrent qu’il pourrait s’agir de l’un des facteurs à l’origine de l’épidémie actuelle d’obésité.
-
Le grignotage : un facteur d’obésité ?
Le grignotage est souvent mis en cause dans le développement du surpoids et de l’obésité
chez les adolescents. Mais est-ce vraiment le cas, étant donné que ce lien n’a jamais été
scientifiquement établi ?
Des chercheurs 24 ont utilisé les données issues de l’enquête américaine NHANES (National
Health and Nutrition Examination Survey) 1999-2004. Ils ont classé les adolescents (de 12 à
18 ans) selon la fréquence de grignotage (de zéro à plus de 4 collations par jour) et le
pourcentage d’énergie ingérée provenant des collations (de 0 à plus de 40%), puis ont
déterminé les prévalences de surpoids, obésité et obésité abdominale. Contre toute attente,
les prévalences du surpoids et de l’obésité abdominale diminuaient lorsque la
fréquence de grignotage et le pourcentage d’énergie ingérée provenant du grignotage
augmentaient.
En outre, une autre étude25, dont l‘objectif était de mettre en relation les comportements
alimentaires (y compris la fréquence de prise alimentaire) et les problèmes de
surpoids/obésité chez des femmes âgées d’environ 50 ans, a montré que la fréquence de
prise alimentaire (de même que la fréquence de snacking, la prise de petit déjeuner, le fait
de manger après 10h du soir…) n’était pas associée au surpoids et à l’obésité. D’ailleurs,
24
25
Keast DR, Nicklas TA, O’Neil CE. Am J Clin Nutr. 2010 ; 92(2) : 428-35
Eating Frequency is Associated With Energy Intake but Not Obesity in Midlife Women. Mills JP, Perry CD, Reicks M.
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- 23 -
la fréquence moyenne de prise alimentaire ne variait pas entre les différents groupes d’indice
de masse corporelle (normal, en surpoids et obèse).
En revanche, l’apport énergétique (de même que l’apport en fruits et légumes, en fibres, en
céréales complètes, en produits laitiers et en sucres ajoutés) augmentait avec la fréquence
de prise alimentaire mais à fréquences de prise alimentaire égales, les femmes qui étaient
obèses avaient un apport énergétique supérieur à celui des femmes normales.
Enfin, une dernière étude26 a mis en évidence le fait que la consommation quotidienne
d’un en-cas, même à forte densité énergétique, ne contribuait pas nécessairement à
une prise de poids.
Ainsi, 82 sujets jeunes et minces ont aléatoirement reçu, chaque jour pendant 8 semaines,
un en-cas correspondant à 25 % des besoins énergétiques, de faible (< 4 kJ/g) ou de forte
densité énergétique (>12 kJ/g) au cours du repas ou à 90 minutes d’un repas. Comme l’ont
montré des mesures à 1 semaine et à 8 semaines, il n’y avait pas de différence significative
entre les 4 groupes en termes de prise de poids, de changements de composition corporelle,
de niveau d’activité physique et de consommation énergétique, suggérant que ni le moment
de la consommation, ni la densité énergétique de l’en-cas n’ont d’influence sur les variations
de poids corporel. De plus, seul le groupe consommant l’en-cas le plus dense au cours d’un
repas a montré une prise de poids significative.
Toutefois, les sujets de l’étude consommaient habituellement des en-cas et étaient donc
peut-être habitués à compenser par des apports réduits au cours des repas. En outre, ces
résultats observés chez des sujets jeunes et minces durant 8 semaines doivent être
confirmés à long terme chez des sujets à risque génétique ou comportemental de prise de
poids, chez lesquels la compensation n’est peut-être pas aussi efficace.
-
Un phénomène d’addiction alimentaire chez les obèses?
Les chercheurs 27 ont en effet pu détecter des comportements alimentaires compulsifs chez
les rats obèses, mais pas chez les rats plus maigres. Ainsi, certains rats obèses continuaient
à consommer des aliments palatables malgré la présence d’un stimulus d’aversion
conditionné.
Le développement de l’obésité semble être couplé à l’émergence d’un déficit
progressif des réponses neurales liées à la récompense, mécanisme observé lors de
l’installation d’un comportement addictif (par exemple, lors du passage d’une
consommation occasionnelle de drogue à l’addiction).
Certaines études 28 ont, par ailleurs, démontré que la surconsommation d’aliments palatables
pouvait générer dans le cerveau ces mécanismes de réponses neuroadaptatives semblables
à ceux de l’addiction et conduire à une alimentation compulsive. Les substances identifiées
26
Effects of snack consumption for 8 weeks on energy intake and body weight. Viskaal-van Dongen M., Kok F.J., De Graaf C.
Int J Obes, 2010, 34, pp. 319-326
27
Dopamine D2 receptors in addiction-like reward dysfunction and compulsive eating in obese rats. PM Johnson and PJ Kenny.
Nat. Neurosci. 2010; 13(5):635-41
28
CRF system recruitment mediates dark side of compulsive eating. Cottone P., Sabino V., Roberto M., Bajo M. et al. PNAS, 24
Nov 2009, vol. 106, No 47, pp. 20016-20020
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- 24 -
comme ayant un potentiel addictif sont : les sucreries et les glucides en général, le gras, la
combinaison gras / sucre, et peut-être les plats préparés et/ou très salés.
Ainsi, l’alternance de cycles de consommation d’une nourriture très sapide avec des cycles
de privation provoque un syndrome comportemental très similaire à celui mis en évidence
pour l’alcool, c’est-à-dire une consommation excessive à la suite d’une période d’abstinence
et un état émotionnel négatif (hypophagie, déficit de motivation envers des nourritures moins
sapides, comportement de type anxiogène). Un rôle causal de la corticolibérine (CRH) dans
ce syndrome comportemental, et plus précisément de l’activation du récepteur CRH1 dans
l’amygdale, a été mis en évidence. On observe donc un recrutement de processus antirécompense lors de la consommation compulsive de nourriture très sapide et il
semble que la privation aggrave la situation des mangeurs compulsifs.
-
Une façon de manger à 4 ans prédictive d’obésité ?
Une étude menée29 sur des enfants de 4 ans (32 à risque d’obésité élevé et 29 à risque
faible) a montré que le nombre de bouchées par minute et la quantité totale de calories
consommées par minute (observées au cours d’un repas test) prédisaient un risque accru de
surpoids ou d’obésité à l’âge de 6 ans. Les enfants mangeant plus vite consommaient plus
de calories (d’après un rappel des consommations sur 3 jours effectué par les parents) et
réclamaient plus spontanément pendant le repas test. Inversement, un temps de repas plus
long était associé à un risque de surpoids/obésité diminué. De plus, selon les analyses de
régression, seul le nombre de bouchées par minute prédisait les changements d’IMC
entre 4 et 6 ans.
Ainsi, manger vite pourrait être un marqueur comportemental d’obésité infantile
potentiellement lié au schéma de récompense alimentaire.
4. Un problème de dérégulation de la balance énergétique30
Sans nier les méfaits de la sédentarité, les apports caloriques ont récemment été désignés
comme un responsable majeur de l’évolution pondérale des populations modernes.
Le rôle des macronutriments (protéines, lipides, glucides) dans la régulation de la balance
énergétique (apports – dépenses énergétiques) reste cependant débattu.
En raison de leur haute densité énergétique et de leur palatabilité principalement, les lipides
contribuent à une balance énergétique positive (en augmentant les apports énergétiques).
De plus, contrairement aux protéines et aux glucides, la capacité de stockage des lipides
dans l’organisme est très élevée voire même quasi illimitée. Or, les substrats d’origine
exogène qui sont préférentiellement oxydés en cas d’apport excessif par rapport aux besoins
sont ceux qui ont une faible capacité de stockage (donc les protéines et les glucides). Ainsi,
toute consommation en excès de glucides ou de protides stimule leurs propres
oxydations de sorte qu’à court terme les balances glucidique et protidique sont finement
29
Identification of an obese eating style in 4-year-old children born at high and low risk for obesity. Berkowitz R.I., Moore R.H.,
Faith M.S., Stallings V.A. et al. Obesity, 2010, vol. 18, No 3, pp. 505-512
30
« Calories » et obésité : quantité ou qualité ? Audrey Bergouignan, Stéphane Blanc, Chantal Simon. Cahiers de nutrition et de
diététique, sept 2010, vol 45, n°4
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- 25 -
réglées. En revanche, toute surconsommation de lipides n’entraînera pas une
augmentation de l’oxydation lipidique mais plutôt un stockage des lipides excédentaires
(jusqu’à ce que l’oxydation lipidique finisse par compenser l’excédent de lipides). Il y a donc
une relation positive entre la balance lipidique et la balance énergétique.
Cependant, il faut noter que l’influence des lipides sur la balance énergétique dépend de leur
nature. En effet, les acides gras mono-insaturés et polyinsaturés sont plus oxydés que les
acides gras saturés, ce qui implique que les acides gras saturés contribuent davantage à
une balance lipidique (et donc énergétique) positive.
Néanmoins, les lipides ne résument pas à eux-seuls l’évolution pondérale récente et d’autres
facteurs tels que les sucres simples participent à l’impact de l’alimentation sur l’obésité.
En effet, bien que les glucides semblent avoir un impact plus marqué que les lipides sur la
satiété (à apport énergétique égal), le sucré est l’un des goûts les plus puissants et qui
procure le plus de plaisir (qui lui-même joue sur le comportement alimentaire).
De plus, les sucres rapides, contrairement aux sucres lents (ou glucides complexes), ne
permettent pas de rassasier de manière durable. Notons cependant que des études 31 ont
montré que des individus, de poids normal ou en surpoids, étaient capables de compenser
naturellement un apport en saccharose ajouté à l’aveugle à leur régime alimentaire (sous
forme de sodas sucrés) en réduisant leur apport énergétique volontaire.
Enfin, les sucres simples et notamment le fructose contenu dans les boissons sucrées
inhibent l’oxydation lipidique et contribuent ainsi à la prise de poids (en favorisant une
balance lipidique positive).
Connaissant l’effet des lipides et des sucres simples sur la palatabilité des aliments,
l’industrie agroalimentaire a ainsi élaboré en proportions croissantes des aliments sucrés et
riches en graisse de manière à accroître leur consommation32. L’apparition de ce nouvel
environnement alimentaire dans les pays industrialisés a probablement contribué fortement à
la croissance des apports énergétiques et ainsi des problèmes de surpoids et d’obésité.
Heureusement, aujourd’hui, on observe une nouvelle tendance, consistant à limiter la teneur
en sucres et en graisses des aliments pour les rendre meilleurs d’un point de vue nutritionnel.
Cependant, pour maintenir le goût sucré tout en enlevant le sucre (saccharose) des produits
alimentaires, les industriels ajoutent en général des édulcorants non caloriques ; or, ces
derniers pourraient être à l’origine d’une perturbation de la balance énergétique.
Ainsi, certaines études épidémiologiques évoquent la possibilité d’une association,
apparemment paradoxale, entre la consommation d’édulcorants non caloriques et le
syndrome métabolique, voire l’obésité. Toutefois, association ne signifie pas obligatoirement
relation causale : par exemple, les sujets obèses (dont beaucoup présentent un syndrome
métabolique) pourraient être plus enclins à consommer des édulcorants non caloriques que
les personnes de poids normal33.
31
Effects of sucrose drinks on macronutrient intake, body weight, and mood state in overweight women over 4 weeks. Reid M,
Hammersley R, Duffy M.
32
« Calories » et obésité : quantité ou qualité ? Audrey Bergouignan, Stéphane Blanc, Chantal Simon. Cahiers de nutrition et de
diététique, sept 2010, vol 45, n°4
33
« Les édulcorants non caloriques pourraient perturber la balance énergétique », extrait de Les brèves du sucre, Sept 2010
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- 26 -
Une équipe américaine34 propose un tout autre modèle explicatif faisant appel à la théorie
selon laquelle le goût et les autres stimuli sensoriels déclenchés par les aliments entraînent
une série de réactions hormonales, neurologiques et métaboliques préparant une utilisation
optimale de l’énergie disponible. Le goût sucré serait ainsi interprété, au cours de ces
réponses physiologiques « céphaliques » comme annonciateur de l’ingestion d’aliments à
forte teneur énergétique. Avec les édulcorants non caloriques, le goût sucré perdrait ce
caractère prédictif. Les réponses céphaliques s’en trouveraient dégradées et il en résulterait
une augmentation des quantités ingérées lors de la consommation d’aliments réellement
sucrés et denses en énergie.
A l’appui de leur théorie, les chercheurs américains rapportent que, chez le rongeur, la
consommation d’aliments contenant de la saccharine s’accompagne, comparativement à la
consommation d’aliments sucrés, d’une augmentation des quantités ingérées, d’une prise de
poids, d’une accumulation de tissu adipeux et d’une moindre compensation énergétique
(régulation de la quantité globale de calories consommées d’un repas sur l’autre).
5. L’influence des facteurs âge, sexe et socio-culturels sur l’obésité
(Source : ObEpi 2009, France)
Chez les hommes comme chez les femmes, la prévalence de l’obésité augmente avec l’âge.
Avant 45 ans, l’obésité féminine est plus importante que chez les hommes mais la tendance
s’estompe ensuite, les courbes des deux sexes se superposant passé l’âge de la
ménopause.
34
High-intensity sweeteners and energy balance. Swithers S.E., Martin A.A., Davidson T.L. Physiol Behav, 2010, vol. 100, No 1,
pp. 55-62
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Les professions les plus touchées par l’obésité sont les agriculteurs (18%), les ouvriers
(16%) et les retraités (19%) contre seulement 8% chez les cadres supérieurs ou professions
libérales. La prévalence de l’obésité augmente dans toutes les catégories mais les
augmentations relatives les plus importantes sont observées chez les inactifs, les ouvriers et
les employés. C’est encore chez les cadres que l’augmentation relative est la plus faible.
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En 2009 comme dans chaque étude ObEpi depuis 1997, niveau d’instruction et prévalence
de l’obésité sont inversement corrélés.
En 2009, le Nord est la région ayant la plus forte prévalence d’obésité (20,5%), devant l’Est
(17%) et le Bassin Parisien (16,6%).
Les régions subissant les plus fortes augmentations de l’obésité entre 1997 et 2009 sont la
Région Parisienne (+88,6%), l’Est (+82,8%) et l’Ouest (+81,9%).
La région Sud-Est, quant à elle, enregistre la plus faible augmentation de prévalence de
l’obésité sur ces douze dernières années et elle compte, en 2009, 12,4% d’obèses vs 14,5%
au niveau national (alors qu’en 1997, cette région était proche de la moyenne nationale).
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6. L’extrême complexité des facteurs prédictifs de l’obésité
Les « deux grands » facteurs traditionnels de l’obésité sont : une forte consommation de
lipides et le fait de ne pas pratiquer d’activité physique de façon intense. Une étude35 s’est
fixé pour objectif de comparer l’impact de ces deux facteurs à celui de trois autres facteurs
non-traditionnels (courte durée de sommeil, comportement alimentaire fortement désinhibé
et faible apport en calcium) sur le risque de surpoids et d’obésité au sein d’une population
adulte (18-64 ans).
Ainsi, il s’est avéré que les trois facteurs non-traditionnels contribuaient davantage au risque
de surpoids et d’obésité que les « deux grands » facteurs. Globalement, le risque de
surpoids ou d’obésité était deux fois plus élevé pour les individus combinant ces trois
facteurs que pour ceux qui consommaient beaucoup de lipides et ne faisaient pas de sport
intensif. Le risque était même plus élevé avec n’importe quelle combinaison de deux facteurs
parmi les trois non traditionnels que pour les deux traditionnels associés. Cette étude
souligne aussi le fait que le meilleur prédicteur du surpoids et de l’obésité (à la fois en
prévalence et en intensité) reste la combinaison des différents facteurs de risque.
On ne peut donc se contenter de s’intéresser à deux facteurs de risque pour appréhender un
problème comme l’obésité ; tous les facteurs sont à prendre en compte et c’est
justement la complexité des liens entre tous ces facteurs qui rend le problème du
surpoids et de l’obésité si difficile à traiter.
De nombreux risques pour la santé sont associés aux différents troubles du comportement
alimentaire et en particulier au problème du surpoids et de l’obésité (stress oxydatif,
syndrome métabolique, risques cardiovasculaires…). C’est pourquoi il est essentiel de les
traiter le plus efficacement possible.
35
Risk factors for adult overweight and obesity: the importance of looking beyond the 'big two'. Chaput JP, Sjödin AM, Astrup A,
Després JP, Bouchard C, Tremblay A.
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III.
Les traitements des troubles liés au comportement
alimentaire
A. Traitement de l’anorexie mentale et de la boulimie
1. Une prise en charge psychologique et médicale
Les traitements de l’anorexie mentale et de la boulimie comprennent bien sûr une prise en
charge psychologique plus ou moins facile à mettre en œuvre selon le type de maladie. Ce
soutien psychologique peut revêtir diverses approches comme :
• les thérapies cognitives et comportementales : il s’agit d’une approche concrète
pour apprendre à modifier certains comportements, le but n’est pas d’identifier les
causes profondes des troubles. Ces thérapies permettent aux malades de se situer
par rapport à eux-mêmes, à leur environnement et leur comportement alimentaire et
d’entamer le dialogue ;
• la psychothérapie de groupe : elle rompt avec l'isolement et le secret dont
s’entourent les boulimiques par exemple. Le récit public en cercle fermé peut se faire
avec ou sans médiateur ;
• la psychanalyse : elle recherche les causes inconscientes qui engendrent la maladie
et les fait émerger par la parole. C’est une approche qui demande beaucoup de
temps.
En plus des traitements psychologiques, le médecin recommande une prise en charge
diététique (par un nutritionniste ou un(e) diététicien(ne)) et prescrit éventuellement des
antidépresseurs.
A la différence des personnes atteintes d’anorexie mentale, les boulimiques sont plus
réceptifs à l’aide médicale car elles se rendent compte de leur maladie. Les boulimiques
peuvent ainsi éviter l’hospitalisation si l’état de santé ne l’impose pas et si les risques
suicidaires sont écartés.
2. Une hospitalisation fréquente pour l’anorexie mentale
L'anorexie mentale est une maladie difficile à soigner car elle combine différents facteurs à
traiter : physiques et psychologiques. Une psychothérapie et un suivi de l’état de poids par
un médecin généraliste peuvent donner des résultats mais la principale difficulté est liée
au déni de la maladie : ainsi, comment faire accepter un traitement à une personne qui ne
se considère pas comme malade... ?
La restriction alimentaire perturbe les mécanismes de la faim et de la satiété. La dénutrition
devient pathologique et les carences peuvent mener à la mort. C’est dans ces cas
graves que l’hospitalisation est prescrite par le médecin.
Celle-ci a une double fonction :
• vitale, de re-nutrition ;
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- 31 -
• mais aussi d’isolement, de séparation avec le milieu familial.
Cette séparation d’avec la famille est parfois bénéfique : de nouvelles relations se créent et
d’autres se dénouent. Une psychothérapie familiale peut aider la famille à comprendre ce qui
est en jeu chez la personne atteinte d’anorexie mentale.
Un contrat de poids est mis en place entre la personne et le médecin. L’anorexique mentale
s’engage à se réalimenter progressivement.
3. Le traitement nutritionnel des carences
Le traitement de l’anorexie et de la boulimie relève essentiellement d’une prise en charge
psycho-comportementale et/ou psychiatrique mais la dimension somatique ne doit pas être
oubliée car les enjeux vitaux métaboliques et nutritionnels sont parfois majeurs à côté du
risque suicidaire. Médecins (généralistes ou nutritionnistes) et diététicien(ne)s ont donc un
rôle important à jouer dans le repérage et le traitement de ces troubles nutritionnels.
-
Comment détecter les carences ?
Tout d’abord, une enquête alimentaire s’impose pour mettre en lumière les déficits
nutritionnels orientant vers les carences probables. Mais l’enquête alimentaire ne suffit pas :
elle sous-estime très souvent la restriction car la patiente masque ses apports et cache
souvent ses vomissements.
Les carences peuvent aussi se manifester par des signes cliniques, mais ceux-ci sont
souvent non-spécifiques : sécheresse de la peau, ongles cassants, striés, altérations
dentaires et caries par érosion de l’émail liée aux vomissements acides, chute des phanères
(mais il y a souvent une hypertrichose, c’est-à-dire une pilosité envahissante sur une partie
du corps liée à un dérèglement hormonal, d ans l’anorexie). L’existence d’œdèmes est un
critère de dénutrition protidique sévère. L’hypotension, la bradycardie sont également des
signes de dénutrition. Les fractures de « fatigue » sont le reflet d’une ostéopénie voire d’une
ostéoporose. La fatigue est rarement avouée.
La cassure de la courbe de croissance, qui remplace l’aménorrhée en cas de début
prépubère chez la fille, est un signe de carence d’apport protéino-énergétique.
L’électrocardiogramme peut mettre en évidence des troubles caractéristiques de
l’hypokaliémie (déficit en potassium).
Enfin, des dosages biologiques : bilan lipidique, dosage des protéines plasmatiques,
dosage de protéines marqueurs de la dénutrition (transferrine, transthyrétine…), dosage des
lymphocytes, dosages spécifiques de vitamines et minéraux… permettent de mettre en
lumière de façon encore plus directe les problèmes nutritionnels.
-
Carences spécifiques les plus fréquentes dans les TCA
Notons tout d’abord que, contrairement aux autres dénutritions par maladie générale, le
cholestérol total n’est pas abaissé mais élevé.
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Les TCA impliquent souvent une dénutrition protidique mais aussi un ensemble de
carences spécifiques en minéraux et vitamines.
La carence en fer est liée à la réduction des apports mais elle est souvent « compensée »
par l’aménorrhée. Une valeur de ferritine (protéine de transport du fer) plasmatique inférieure
à 20 mg/L justifie une supplémentation même sans anémie (diminution de la concentration
en hémoglobine).
La carence en magnésium est aussi très fréquente et se traduit par l’asthénie (état de
faiblesse générale) et la faiblesse musculaire.
Le potassium peut également faire défaut, en particulier avec les vomissements.
Des carences en oligoéléments tels que zinc, cuivre, sélénium… peuvent aussi être
observées.
La carence en vitamine B9 est fréquente et liée à une carence d’apport en légumes et fruits
surtout.
La carence en vitamine D est très fréquente du fait de la réduction des apports en produits
laitiers et en beurre, en poisson gras et de l’absence d’exposition au soleil. Elle peut se
traduire tardivement par une hypocalcémie (taux de calcium < 2,25 mmol/l) associée à une
hypophosphorémie.
La carence en vitamine B12 est tardive, compte tenu des réserves (2 à 3 ans) et rare,
compte tenu de la persistance d’apports en produits d’origine animale.
B. Traitement de surpoids et obésité
1. Mesures diététiques et d’hygiène de vie
Pour lutter contre l’obésité / le surpoids, c’est-à-dire perdre du poids, il est recommandé de
diminuer ses apports énergétiques et d’augmenter ses dépenses énergétiques afin d’aboutir
à une balance énergétique (apports - dépenses) négative.
Il est donc préférable de limiter la consommation d’aliments énergétiquement denses
(en particulier aliments riches en lipides) mais aussi la consommation de sucres rapides.
Cependant, l’efficacité d’un régime dans la perte de poids ne dépend pas de la composition
en macronutriments du régime alimentaire mais plutôt de la réduction de l’apport
énergétique et (bien sûr) de la compliance à ce régime ! Ainsi, bien que les conseils
précédents (moins de lipides et de sucres rapides) aident en théorie à réduire l’apport
énergétique, ils ne doivent pas être poussés à l’extrême pour éviter la démotivation face à
un régime trop stricte. En effet, une étude a suggéré que l’amélioration de la qualité de vie
pourrait favoriser l’observance et donc le maintien de la réduction pondérale à plus long
terme. Les résultats de cette étude montrent qu’il est inutile de réduire le sucre au-delà des
10% (de l’apport énergétique) recommandés et indiquent un avantage pour les régimes
incluant des aliments sucrés.
En parallèle, la pratique d’une activité sportive régulière est nécessaire pour augmenter
les dépenses énergétiques.
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2. Suivi psychologique
Des troubles psychologiques sont fréquemment associés à l’obésité, en particulier chez les
enfants. Ainsi, une adaptation sociale insuffisante, l’isolement, une image négative de son
propre corps… sont autant de facteurs qui peuvent contribuer au développement de troubles
du comportement alimentaire entraînant le sujet obèse au cœur d’une spirale infernale.
C’est pourquoi il est utile d’envisager un suivi psychologique abordant des thèmes tels que :
les objectifs de poids non réalistes, les attitudes négatives envers soi-même et son
propre corps, les difficultés de communication avec l’entourage et en particulier avec les
parents dont les stratégies d’éducation sont parfois maladroites…
3. Traitements chimiques
-
Substances anorexigènes
Les nombreuses molécules identifiées dans les mécanismes de la faim laissent espérer des
médicaments qui pourraient être utilisés notamment dans le traitement de l’obésité. Ainsi, la
recherche s’oriente vers différentes stratégies pour diminuer la faim et augmenter la satiété.
On peut tout d’abord faire ingérer directement des neurotransmetteurs / hormones ayant
un effet anorexigène.
Ainsi, les monoamines (dopamine, sérotonine, noradrénaline), neurotransmetteurs agissant
au niveau de l’hypothalamus, permettent de lutter efficacement contre la faim. Les
médicaments à base de monoamines peuvent être classés en deux grandes familles, en
fonction de leur mécanisme d’action : celle des dérivés amphétaminiques qui agissent par
l'intermédiaire des catécholamines (noradrénaline et dopamine cérébrales) et celle des
dérivés fenfluraminiques qui interviennent dans les mécanismes où la sérotonine est le
neuromédiateur.
Les mélanocortines, hormones sécrétées dans l’hypothalamus sous l’action de la leptine,
semblent également prometteuses.
Enfin, l’ingestion artificielle de l’hormone PYY3-36 prolonge la durée de la satiété en mimant
un signal de satiété lié à l’acte de digestion et l’ingestion artificielle de la leptine conduit le
cerveau à un sentiment de satiété fondé sur la base d’une appréciation supérieure à la
réalité de la masse graisseuse.
Une autre solution consiste à faire ingérer des ingrédients tels que les fructanes, qui
influencent la concentration sanguine des hormones gastro-intestinales de régulation
de l’appétit36.
Des études menées chez des rats ayant reçu soit un régime standard (contrôle), soit un
régime à base de fructanes, ont révélé qu’après 3 semaines, les animaux nourris avec des
fructanes présentaient un niveau de peptide intestinal GLP-1 (doté d’un effet coupe-faim)
36
D’après Nicolas Guggenbühl, Diététicien Nutritionniste, " HEALTH & FOOD ", numéro 75, Jan/Fév 2006
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significativement plus élevé et un niveau de ghréline (hormone orexigène) nettement plus
faible, suggérant le maintien prolongé du sentiment de satiété et expliquant la réduction de
masse graisseuse chez ces rats.
Des études ont également été menées chez l’Homme. Dans l’une d’entre elles, 10 femmes
et hommes, âgés de 21 à 39 ans et de corpulence normale, ont pris, lors du petit-déjeuner,
un supplément de 8g de fructanes ou de maltodextrines (placebo). Avec les fructanes, le
sentiment de satiété s’est avéré être significativement plus élevé après le petit-déjeuner et
surtout, après le dîner. De plus, avec les fructanes, le sentiment de faim, les prévisions de
consommations alimentaires et l’apport énergétique quotidien étaient significativement plus
faibles par rapport à ceux du groupe placebo.
Ainsi, l’inuline (qui est un fructane), en marge de ses caractéristiques prébiotiques, présente
apparemment un fort potentiel pour lutter contre la faim. Par ailleurs, l’inuline possède un
atout de taille dans la chasse aux calories issues du gras : elle peut remplacer partiellement
voire entièrement les graisses dans de nombreux produits. Pour chaque gramme de
graisses remplacé par un gramme d’inuline, on épargne ainsi environ 7,5 kcal, ce qui est loin
d’être négligeable.
D’autres ingrédients que l’inuline peuvent également avoir un effet satiétogène.
Par exemple, la fagomine, que l’on trouve en petites quantités dans les graines de sarrasin
aurait le pouvoir de retarder l’apparition de la sensation de faim. Cet alcaloïde (molécule
organique hétérocyclique azotée d’origine naturelle) est en fait un iminosucre, c’est-à-dire un
analogue de sucre, qui va ralentir l’absorption du glucose dans le sang après la prise d’un
repas glucidique, atténuer ainsi les pics de glycémie et permettre une élévation plus durable
de la glycémie ; c’est par ce biais que la sensation de satiété est prolongée. Le procédé
biotechnologique permettant de produire la fagomine a fait l’objet d’un brevet et la molécule
devrait commencer à être commercialisée à la fin de cette année aux Etats-Unis.
De même, des protéines telles que les protéines de lactosérum, de soja, de pois ou
encore les caséines ont un effet satiétogène démontré. Le son d’avoine est également
réputé pour son effet sur la satiété : au niveau de l’estomac, il a la capacité d’absorber l’eau
des aliments ingérés et de former ainsi un gel tapissant les parois de l’estomac, d’où la
sensation de rassasiement.
Par ailleurs, la découverte de l’importance de la protéine mTOR dans le contrôle de l’appétit
pourrait permettre d’imaginer de nouveaux médicaments voire même un nouveau type de
régime alimentaire permettant d’activer cette protéine et ainsi de mieux réguler la faim. Les
scientifiques ont d’ores et déjà découvert que la protéine mTOR était particulièrement
sensible aux acides aminés, et notamment à la leucine. Les études en laboratoire37 ont
montré qu’en administrant directement de la leucine dans l’hypothalamus, les animaux
mangeaient moins. Les chercheurs pensent même à la possibilité de concevoir des
régimes amaigrissants s’appuyant sur des micro-nutriments tels que les acides aminés plutôt
que sur les macro-nutriments tels que les lipides et les glucides.
D’autres stratégies sont étudiées, comme celle qui consiste à élaborer des molécules
mimant l’action des hormones / neurotransmetteurs anorexigènes ou encore élaborer des
molécules bloquant l’action des substances orexigènes.
37
D’après un communiqué de presse de l’Université de Cincinnati publié sur sante-az.aufeminin.com
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Notons qu’un traitement, développé par la société Lightlake Therapeutics, contre les troubles
du comportement alimentaire et l’obésité, basé sur l’utilisation d’un pulvérisateur nasal et la
mise en place d’un programme comportemental, est actuellement en train d’être testé. Ce
traitement est censé réduire les envies compulsives de manger en supprimant les effets
négatifs de l’abstinence forcée qui résulte habituellement des régimes.
-
Autres types de substances pour lutter contre les graisses
Il y a tout d’abord les substances limitant l’absorption des graisses comme les extraits
d’algue brune (les alginates). Ces substances sont déjà largement utilisées dans l’industrie
agroalimentaire en tant qu’agent gélifiant, émulsifiant… En plus d’un effet suppresseur
d’appétit grâce à leur expansion dans l’estomac, les alginates diminueraient l’absorption des
graisses en inhibant l’activité de la lipase (enzyme qui transforme les lipides,
macronutriments, en micronutriments pouvant être absorbés à travers la paroi intestinale).
Il existe également des substances dites « brûle graisse » (ou «fat burner» en anglais) qui
favorisent la lipolyse (utilisation des lipides comme source d’énergie). Cette action peut se
faire de deux façons différentes :
- en augmentant le métabolisme de base (ainsi le corps consomme plus d'énergie) ;
- en favorisant le déstockage des graisses.
Les plantes « brûle-graisse » les plus utilisées (principalement dans les compléments
alimentaires et les cosmétiques) sont : le thé vert, le guarana, le maté, l’éphédra, le citrus
aurantium… Toutes ces plantes contiennent des substances telles que la théine, la caféine,
la matéine… qui ont la particularité d’élever le métabolisme. La L-carnitine est également de
plus en plus utilisée comme « brûle graisse ».
Cependant, ces substances ont une efficacité limitée et il n’y a d’ailleurs aucune allégation
de santé autorisée pour les produits les utilisant.
4. Traitements opératoires
-
La chirurgie bariatrique : une pratique en constante amélioration
La chirurgie de l’obésité (bariatrique) vise non seulement à obtenir une perte de poids
notable, mais aussi à corriger ou faire disparaître les différentes comorbidités (diabète,
hypertension artérielle, troubles respiratoires, complications rhumatologiques…) et à
améliorer la qualité de vie des patients (sur le plan familial, relationnel, professionnel…).
L’étude SOS, publiée en 2007 (N Engl J Med, 2007; 357:741-52), a montré une mortalité
diminuée chez les patients obèses opérés comparativement à un groupe similaire non
opéré. Parallèlement, on note une amélioration, voire une disparition des comorbidités dans
le groupe opéré.
Ces excellents résultats expliquent le développement de la chirurgie bariatrique au cours des
15 dernières années. Il a été pratiqué plus de 350 000 interventions bariatriques dans le
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monde en 2008, dont 220 000 aux Etats-Unis, chiffre multiplié par 10 en l’espace de 10
ans. En France, les données PMSI (Programme de Médicalisation des Systèmes
d’Information) faisaient état de 2700 séjours pour chirurgie bariatrique en 1997, contre
14 600 en 2006. On peut estimer entre 15 000 et 20 000 le nombre d’interventions
bariatriques réalisées annuellement dans notre pays.
Actuellement, il existe tout un panel d’interventions bariatriques avec leurs avantages et
inconvénients respectifs, allant des interventions restrictives pures (c’est-à-dire qui
diminuent le volume de l’estomac) comme la gastroplastie par anneau jusqu’à des
interventions plus complexes avec une composante restrictive et une composante
malabsorptive (c’est-à-dire qui diminue la quantité de nutriments qui peuvent être absorbés
au niveau du tractus gastro-intestinal) comme le bypass gastrique (BPG) ou la diversion
biliopancréatique (DBP).
La perte de poids obtenue avec chacune de ces interventions a été analysée dans une étude
publiée en 2004 par Buchwald. Elle est de 28-30 kg après gastroplastie par anneau ajustable,
43 kg après bypass gastrique, 46 à 52 kg après diversion biliopancréatique.
Le choix entre telle ou telle technique est fonction de la demande des patients, de
l’importance et de l’ancienneté de l’obésité, et des compétences de l’équipe chirurgicale.
Pendant longtemps en France, la gastroplastie par anneau ajustable a été l’intervention la
plus pratiquée, mais progressivement, comme aux Etats-Unis, le BPG a tendance à devenir
l’intervention de référence, en raison de ses bons résultats sur le long terme avec une
réduction stable du poids de quasiment 30% à 15 ans. Cependant, il s’agit d’une intervention
lourde avec une morbidité et une mortalité post-opératoire non négligeables. Aussi, de
nouvelles modalités chirurgicales sont apparues : la gastrectomie longitudinale et le minibypass (MBP), déjà plus ancien mais remis au goût du jour par certaines équipes car plus
facile à réaliser qu’un BPG « traditionnel ».
-
Chirurgie gastrique et troubles du comportement alimentaire : contre-indication ou
non ?
La chirurgie bariatrique est clairement contre-indiquée dans les pathologies
psychiatriques comme les antécédents d’anorexie mentale, les troubles psychotiques non
stabilisés, les troubles graves de la personnalité, certaines dépressions qui parfois
s’accompagnent de troubles du comportement alimentaire, la prise alimentaire ayant alors
une fonction antidépressive ou anxiolytique. Cela justifie que l’état psychique du patient soit
évalué avant l’intervention par un psychiatre ou un psychologue expérimenté dans ces
domaines.
En dehors de ces situations psychiatriques, les TCA sont fréquents chez le sujet obèse,
comme expliqué dans la deuxième partie. On distingue les TCA prandiaux (hyperphagie
prandiale, restriction/désinhibition) et les consommations extraprandiales telles que le
grignotage et les compulsions alimentaires.
La question est de savoir si ces TCA contre-indiquent ou non une intervention bariatrique. La
chirurgie risque-t-elle de les aggraver ? Les TCA risquent-ils de retentir sur le résultat
chirurgical ?
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D’après plusieurs études, les paramètres du comportement alimentaire (faim, restriction
et désinhibition / impulsivité) semblent être globalement améliorés suite à la chirurgie
gastrique : on observe une diminution des scores de faim et de désinhibition et une
augmentation du score de restriction à court et moyen terme (3 ans après la gastroplastie).
Les modifications de ces paramètres observées après chirurgie gastrique pourraient avoir un
support biologique. En effet, il a été observé que la ghréline, hormone qui déclenche la prise
alimentaire, augmente au cours de la perte de poids induite par un bypass gastrique.
D’autres hormones telles que le peptide YY, l’entéroglucagon ou le glucagon-like peptide,
décrits comme des facteurs impliqués dans la satiété, augmentent après bypass gastrique et
pourraient être impliquées dans la régulation du comportement alimentaire après chirurgie.
Par ailleurs, d’autres études portant sur l’évolution des TCA type « Binge Eating Disorder »
(BED) après chirurgie ont montré que la fréquence des compulsions ainsi que le
pourcentage de patients présentant un BED diminuaient, même à long terme.
Enfin, il semble que, parallèlement à l’amélioration du score de BE, l’évolution après
chirurgie soit marquée par une amélioration de certains traits psychologiques associés aux
troubles alimentaires tels que l’altération de l’estime de soi, l’insatisfaction corporelle, une
symptomatologie dépressive, une diminution de la qualité de vie…
Ainsi, loin d’aggraver les TCA, la chirurgie gastrique semble plutôt les réduire.
Mais qu’en est-il des résultats pondéraux après chirurgie ? Sont-ils affectés par la présence
de TCA ? Les résultats des études concernant l’impact des TCA (BE en particulier) sur les
résultats pondéraux sont assez contradictoires. Ceci est probablement lié au fait que les
études sont hétérogènes avec souvent des échantillons de petite taille, un délai de suivi très
variable, une hétérogénéité dans la définition des troubles du comportement et des
différences de moyens diagnostiques (questionnaires différents, entretiens…).
Néanmoins, il semble que plus que le comportement alimentaire de type BE, c’est le
manque d’adhésion aux conseils diététiques avec un comportement de grignotages
ou de compulsions qui est le facteur déterminant de la reprise de poids à distance de
la chirurgie.
5. L’intérêt d’un traitement à long terme
Suite à une thérapie interdisciplinaire de long terme (1 an), des chercheurs 38 ont observé que
des adolescents obèses, atteints de troubles du comportement alimentaire, avaient acquis
une amélioration significative de leur composition corporelle avec une forte réduction des
masses graisseuses et surtout que leurs symptômes boulimiques s’étaient considérablement
réduits. En parallèle, les chercheurs ont remarqué un phénomène assez surprenant : à court
terme, l’activité des hormones orexigènes étaient stimulée mais à long terme, elle était
inhibée tandis que la voie anorexigène se renforçait tout au long de la thérapie.
38
The role of orexigenic and anorexigenic factors in an interdisciplinary weight loss therapy for obese adolescents with
symptoms of eating disorders. Carnier J, de Piano A, de Lima Sanches P, Tock L, do Nascimento CM, Oyama LM, Corrêa FA,
Ernandes RH, Lederman H, de Mello MT, Tufik S, Dâmaso AR. Post Graduate Program of Nutrition, Federal University of São
Paulo - Paulista Medicine School - UNIFESP, São Paulo, Brazil. [email protected]
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On peut donc conclure que l’intérêt d’un traitement à long terme de l’obésité est de permettre
une synergie entre trois effets : perte de poids, normalisation des comportements
alimentaires et amélioration des voies anorexigène et surtout orexigène (contrairement
à un traitement court terme).
6. Une particularité du traitement du surpoids et de l’obésité infantiles
Il semble que le poids de naissance soit un facteur important à prendre en compte dans le
traitement du surpoids, de l’obésité et des complications associées chez les enfants.
Ainsi, une étude Coréenne39 s’est penchée sur la relation entre le poids de naissance et les
hormones de régulation de l’appétit, la résistance à l’insuline, le statut antioxydant chez des
enfants (9-10 ans) en surpoids.
Les résultats ont révélé que les plus petits poids de naissance présentaient une plus forte
résistance à l’insuline et un niveau de ghréline (hormone stimulant l’appétit) plus élevé que
les plus gros poids de naissance. En revanche, ces derniers avaient un niveau de stress
oxydatif accru (niveau moins élevé de coenzyme Q10 et d’activité catalytique) par rapport
aux petits poids de naissance.
En conclusion, pour les enfants obèses ayant un petit poids de naissance, il faut
davantage soigner le problème de résistance à l’insuline et de régulation de l’appétit
que pour les autres enfants obèses tandis que pour ceux qui ont un fort poids de
naissance, c’est le stress oxydatif qu’il faut traiter de façon plus poussée que pour les
autres.
39
Birth weight was negatively correlated with plasma ghrelin, insulin resistance, and coenzyme Q10 levels in overweight
children. Department of Food & Nutrition, Kyungnam University, 449 Woryeong-dong, Masanhappo-gu, Changwon-si,
Gyeongnam 631-701, Korea.
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Tableau récapitulatif des traitements des troubles liés au comportement alimentaire
Anorexie / boulimie
Traitement diététique,
nutritionnel
Traitement
psychologique
Re-nutrition, traitement des
carences (Fe, Mg, vit. B9, B12,
D…)
Thérapies cognitives et
comportementales,
psychothérapies de groupe,
psychanalyse
Traitement chimique
Parfois antidépresseurs
Traitement hospitalier
/ opératoire
Parfois hospitalisation
nécessaire pour les cas
graves d’anorexie
Surpoids / Obésité
- Limiter lipides et sucres (ne
pas réduire le sucre au-delà de
10% de l’apport énergétique)
- Pratiquer une activité sportive
régulière
Suivi psychologique sur les
thèmes : objectifs de poids non
réalistes, attitudes négatives
envers soi-même, difficultés de
communication…
Anorexigènes, substances
limitant l’absorption des
graisses, brûle-graisse
Gastroplastie par anneau,
bypass gastrique, diversion
biliopancréatique, gastrectomie
longitudinale, mini-bypass
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Conclusion
Les sensations de faim et de satiété sont finement régulées par des mécanismes faisant
intervenir des molécules messagères (neurotransmetteurs et/ou hormones) transmettant des
signaux orexigènes ou anorexigènes à un centre intégrateur : l’hypothalamus. La régulation
de l’appétit se fait à court terme mais aussi à long terme par des mécanismes différents. De
nombreux facteurs influencent l’appétit et la prise alimentaire: ce sont des facteurs liés à la
personne elle-même (âge, maladie, goûts, environnement familial et social…) mais aussi des
facteurs liés au contenu alimentaire ou encore à la façon de manger.
Mais la régulation naturelle de la prise alimentaire peut être déficiente pour diverses raisons :
c’est le cas chez les personnes atteintes de troubles du comportement alimentaire mais
aussi chez les personnes en surpoids ou obèses. Au-delà des facteurs génétiques,
psychologiques, familiaux…, la production d’auto-anticorps aux propriétés altérées
(dépendant probablement de l’environnement nutritionnel) pourrait être liée à l’apparition des
troubles du comportement alimentaire (anorexie, boulimie en particulier) en agissant sur la
voie de l’α-MSH (neuropeptide anxiogène et anorexigène). S’agissant du problème du
surpoids et de l’obésité, il y a une multitude de facteurs qui interagissent entre eux, au
niveau génétique, neuronal, comportemental mais aussi au niveau de l’environnement
alimentaire qui contribue à un déséquilibre de la balance énergétique.
Etant donné les conséquences très graves sur la santé que peuvent impliquer les troubles
du comportement alimentaire ainsi que le surpoids / l’obésité, il est crucial de les traiter le
plus rapidement possible. Ces traitements incluent généralement des composantes
pluridisciplinaires : diététiques/nutritionnelles pour traiter les carences et/ou perdre du poids
mais aussi psychologiques pour tenter de modifier les comportements et d’en comprendre
les causes. Certains médicaments (antidépresseurs pour les TCA / coupe-faims, « brûlegraisses »… pour surpoids et obésité) ou même des opérations chirurgicales, en cas
d’obésité, peuvent également aider à la réussite du traitement.
Mieux que de traiter ces troubles, l’idéal serait de les prévenir et d’empêcher leur apparition.
Pour cela, il faudrait s’attaquer aux causes premières favorisant leur déclenchement. Mais la
complexité des interactions entre les facteurs individuels (génétiques, biologiques,
psychologiques, comportementaux…) et les facteurs environnementaux (offre alimentaire,
environnement socioculturel, familial…) rend ce travail très difficile à mettre en œuvre,
surtout au niveau collectif. Pour améliorer la prévention, il est important qu’un maximum
d’acteurs interviennent: les médecins (généralistes, nutritionnistes) et les diététiciens mais
aussi les institutionnels et les pouvoirs publiques pour mettre en place des plans d’action, les
enseignants, responsables éducatifs, les media… pour sensibiliser ou encore les industriels
de l’alimentaire pour optimiser les aspects nutritionnels de l’offre alimentaire.
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