04_chap1_synthèse_biblio
Transcription
04_chap1_synthèse_biblio
TABLE DES MATIERES INTRODUCTION -1- CHAPITRE I – SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE -3- I. MOISISSURES ET ENVIRONNEMENTS INTERIEURS A. GENERALITES SUR LES MICROMYCETES 1. DEFINITION 2. CLASSIFICATION B. DEVELOPPEMENT DES MOISISSURES 1. STADES DU DEVELOPPEMENT FONGIQUE 2. BESOINS NUTRITIONNELS 3. EFFETS DES FACTEURS ENVIRONNEMENTAUX 4. MODELES DE CROISSANCE 5. METHODES DE DETECTION ET DE DENOMBREMENT DES MOISISSURES C. MOISISSURES ET MATERIAUX 1. FLORE FONGIQUE DANS L’AIR ET SUR LES SURFACES 2. HUMIDITE DES LOCAUX 3. MECANISMES DE BIODEGRADATION D. IMPACT SANITAIRE 1. L’ASPERGILLOSE INVASIVE NOSOCOMIALE 2. LES ALLERGIES RESPIRATOIRES 3. LES TOXI-INFECTIONS 4. IRRITATIONS : ROLE DES COMPOSES ORGANIQUES VOLATILS D’ORIGINE MICROBIENNE (COVM) -3-3-3-4-5-5-8- 12 - 16 - 19 - 22 - 22 - 24 - 26 - 27 - 27 - 27 - 29 - 30 - II. PHYSIQUE DES AEROSOLS APPLIQUEE AUX MOISISSURES - 32 - A. AEROSOLS FONGIQUES 1. TAILLE ET FORME 2. PROPRIETES PHYSIQUES DES AEROSOLS FONGIQUES B. ADHERENCE ET REENTRAINEMENT DES PARTICULES FONGIQUES 1. ETAPES DE L’ADHERENCE 2. FACTEURS INFLUENÇANT L’ADHESION 3. REENTRAINEMENT DES PARTICULES FONGIQUES C. METROLOGIE ET TECHNIQUES LABORATOIRE 1. PRINCIPES ET TECHNIQUES D’AEROSOLISATION 2. TECHNIQUES DE COLLECTE - 32 - 32 - 35 - 37 - 38 - 40 - 41 - 42 - 42 - 46 - DEMARCHE - 49 - TABLE DES ILLUSTRATIONS CHAPITRE I FIGURES Figure 1 : Stade du cycle vital (Kiffer et Morelet, 1997) ....................................................................................- 5 Figure 2 : Cycle de vie asexuel d’Aspergillus nidulans (Osherov et May, 2001) ...............................................- 6 Figure 3 : Croissance d’Aspergillus nidulans sur un milieu Agar (Trinci, 1974)................................................- 7 Figure 4 : Représentation des différentes zones d'une culture fongique en phase de croissance ........................- 8 Figure 5 : Effet de la température sur la diamètre de la colonie d’Alternaria sp., de Cladosporium herbarum et de Stachybotrys chartarum après 14 jours d’incubation (Curran, 1980)..................................................- 14 Figure 6 : Effet du pH sur la biomasse de 3 espèces fongiques : Alternaria sp., Cladosporium herbarum et Stachybotrys chartarum (Curran, 1980)...................................................................................................- 15 Figure 7 : Formule développée de l’ergostérol..................................................................................................- 20 Figure 8 : Spectre de l’ergostérol commercial (pureté>98%) - - - et de l’ergostérol;.......................................- 21 Figure 9 : Sources d'humidité dans le bâtiment (Singh, 1994). .........................................................................- 25 Figure 10 : Mécanismes de rétention et de transfert de l’eau dans les pores des matériaux (Quenard, 2001) ..- 26 Figure 11 : Structure de quelques mycotoxines (Salvaggio et Aukrust, 1981) .................................................- 29 Figure 12 : Sphères équivalentes d’une particule de forme irrégulière (Renoux et Boulaud ; 1999)................- 32 Figure 13 : Effet de l’humidité relative sur la taille des aérosols fongiques (Reponen, 1996) (n=6)Erreur ! Signet non défin Figure 14 : Distribution granulométrique de l’aérosol de Penicillium brevicompactum généré à partir : A. suspension liquide ; B : milieu agar solide sans orifice de désaggrégation ; C : milieu agar solide avec orifice de désaggrégation (n=3) (Reponen 1996). ...................................................................................- 34 Figure 15 : Morphologie des conidies. Les représentations ne tiennent pas compte de la taille réelle des conidies (Botton et al., 1985)...................................................................................................................- 34 Figure 16 : Ornementation des spores (Botton et al., 1985)..............................................................................- 34 Figure 17 : Tailles relatives de différents bioaérosols.......................................................................................- 35 Figure 18 : Prévision thermodynamique de l'adhésion......................................................................................- 40 Figure 19 : Générateur d’aérosol à partir de suspension liquide (A.) séchage au niveau de la génération (générateur à 2 flux d’air). (B.) séchage au niveau de la sortie (générateur à 1 flux d’air) (Ulevicius et al., 1997)..................................................................................................................................................- 44 Figure 20 : Schéma de principe d’un générateur d'aérosols à ultrasons (Marple, 1980). ..................................- 44 Figure 21 : Disperseur à tube d’agar (Reponen et al., 1997).............................................................................- 45 - TABLE DES ILLUSTRATIONS CHAPITRE I TABLEAUX Tableau I : Relation entre activité de l’eau, humidité relative et potentiel hydrique à 25°C [(1) 1MPA = 9.87bar] (Viitanen et Ritschkoff, 1991)............................................................................................. - 11 Tableau II : Activités hydriques minimales et températures de croissance optimales de quelques espèces fongiques isolées dans les environnements intérieurs (Yang et Johanning, 1997; Clarke et al., 1999).... 12 Tableau III : pH minimum et maximum de croissance fongique (Viitanen et Ritschkoff, 1991) ............... - 15 Tableau IV : Modèles de croissance des moisissures.................................................................................. - 18 Tableau V : Techniques de détection et de dénombrement des moisissures ............................................... - 19 Tableau VI : Concentration d’ergostérol par spore fongique (Miller et Young, 1997). .............................. - 22 Tableau VII : Moisissures isolées dans les environnements intérieurs ( Verhoeff et al., 1992). UFC : Unité Formant Colonie ................................................................................................................................ - 23 Tableau VIII : Espèces fongiques isolées de divers matériaux (Botton et al., 1985; Samson et al, 1994; Beguin et Nolard, 1994; Beguin, 1995)............................................................................................. - 24 Tableau IX : Deutéromycètes reconnus comme allergisants (Malléa et Charpin ; 1986) ........................... - 27 Tableau X : Allergènes majeurs de moisissures (Gumowski, 1997)........................................................... - 28 Tableau XI : Moisissures toxiques, métabolites secondaires et manifestations cliniques associées (Yang et Johanning, 1997). .............................................................................................................................. - 30 Tableau XII : Composés organiques volatils émis par les moisissures (Korpi et al., 1997) ...................... - 31 Tableau XIII : COV émis selon le mélange fongique et la nature du substrat (Korpi et al., 1998)............ - 31 Tableau XIV : Diamètres statistiques (Renoux et Boulaud ; 1999). ........................................................... - 33 Tableau XV : Nombre de spores fongiques remises en suspension selon le taux d’humidité et la vitesse de l’air (d’après Pasanen et al. ,1991) .................................................................................................... - 42 Tableau XVI : Générateurs d’aérosols fongiques........................................................................................ - 43 Tableau XVII : Echantillonneurs d’aérosols fongiques (Crook , 1995 ; Pasanen, 2000 ; prEN13098 , 2000) 48 -4- CHAPITRE I SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE Pendant longtemps l’existence de l'allergie induite par l’inhalation de pollen de graminés a été suspectée. Cette relation est démontrée expérimentalement, pour la première fois, en 1873, par Blackley. L'auteur démontre également que l’inhalation de spores de Penicillium provoque le même type de réaction. Toutefois, les études menées sur l’impact sanitaire des moisissures restent anecdotiques jusqu’au début du XXème siècle. En 1924, Van Leeuwen expose l’existence d’une corrélation entre les particules fongiques et l’asthme, relation confirmée en 1935 par Feinberg et Little. C’est à cette époque que Gregory modélise la déposition sur le sol d’un nuage de spores fongiques et que les premiers appareils d’échantillonnage des conidies aéroportées (impacteur en cascade à 4 étages) apparaissent (May, 1945). De nos jours, la plupart des études réalisées sur la thématique « moisissures – habitat », sont menées dans les pays nordiques. Parmi les laboratoires les plus actifs dans ce domaine : le département des sciences environnementales de Kuopio (Finlande) (Pasanen et al., 1991 ; 1992 ; 1993 ; 1999 ; 2000) ou encore le centre de recherches techniques de Finlande (Viitanen, 1991, 1997, 2000). A Bruxelles, l’équipe du docteur Nolard travaille également sur ce sujet depuis de nombreuses années (Nolard et al., 1995; Nolard, 1997). I. MOISISSURES ET ENVIRONNEMENTS INTERIEURS A. GENERALITES SUR LES MICROMYCETES 1. Définition Un micromycète est un organisme eucaryote porteur de spores et dépourvu de chlorophylle. Contrairement aux végétaux, il est incapable de synthétiser la matière organique à partir du gaz carbonique atmosphérique. Il utilise la matière organique puisée dans le substrat, comme source d’énergie, de carbone et d’électrons : ces microorganismes sont dits chimiohétérotrophes. Les nutriments nécessaires sont absorbés au travers de la paroi de son appareil végétatif. -3- Une moisissure ou champignon filamenteux, est constituée de filaments longs, fins et ramifiés, à structure cellulaire, dénommés hyphes. Ceux-ci forment une masse emmêlée appelée mycélium ou thalle. Les hyphes sont composés d’une paroi cellulaire externe faite de fibrilles de chitine ou de cellulose, plongées dans une matrice de polymères de glucose (les glucanes) ou de mannose (mannanes) et de protéines. Selon les classes fongiques, les hyphes peuvent être segmentés (septés) par des cloisons transversales solidaires de la paroi (septum) qui se forment à intervalles irréguliers. La reproduction des mycètes peut être sexuée ou asexuée. Le développement normal d’une moisissure comprend une phase végétative de croissance, et presque simultanément, une phase reproductive au cours de laquelle se forment des spores assurant la dispersion. La germination des spores est à l’origine de la forme végétative. 2. Classification Le nombre d’espèces fongiques isolées est estimé à 1 500 000 dont environ 76 000 référencées (Kiffer et Morelet, 1997). La taxonomie la plus courante est basée sur les modalités de reproduction. Elle classe les mycètes en quatre grands embranchements : les Zygomycètes, les Ascomycètes, les Basidiomycètes, et les Deutéromycètes (Fungi imperfecti). Les Zygomycètes, dont la plupart vivent dans le sol sur des matières organiques animales ou végétales en décomposition, ont des hyphes non septés. Leur reproduction asexuée est le plus souvent assurée par des sporocystospores ou parfois par des « conidies exogènes » se développant dans des sporanges à l’extrémité d’hyphes aériens. Leur reproduction sexuée résulte de la fusion de gamétocystes conduisant à la formation de spores dormantes permettant aux microorganismes de résister aux conditions défavorables de croissance. Lors de leur germination, les zygospores s’ouvrent et forment un sporange asexué. Les Ascomycètes ont un thalle septé ou unicellulaire (levure). Si leur reproduction peut être sexuée, avec formation, dans des asques en forme de massue ou de sac, de spores méïotiques (ascospores), beaucoup d’Ascomycètes se reproduisent par multiplication asexuée (conidies). Les Basidiomycètes, comme les Ascomycètes, ont un thalle septé ou unicellulaire (levures). La reproduction de ces champignons est, soit sexuée avec formation de spores méïotiques (basidiospores) sur des basides, soit asexuée (conidies). -4- Les Deutéromycètes, dont le cycle de vie est représenté sur la Figure 1, regroupent les moisissures pouvant vivre et se multiplier sans phase sexuée, et la plupart des formes asexuées ou « imparfaites » (anamorphes) des Ascomycètes et des Basidiomycètes. La multiplication des Fungi imperfecti se fait généralement par production de spores mitotiques (issues d’une mitose) appelées conidies. Les éléments de cette classe sont le plus souvent terrestres, saprophytes ou parasites de plantes. a : unité de dissémination : basidiospore, ascospore (produite par la téléomorphe) ou conidie (produite par l’anamorphe) ; b :germination de l’unité de dissémination ; c : mycélium issu de la germination ; d : mycélium ne produisant pas de conidies ; e : production de conidies par des conidiophores ; e1 : conidiophores isolés portés par le mycélium ; e2 : conidiophores groupés en conidiome issu du mycélium ; f : mycélium non bouclé des Ascomycètes et de certains Basidiomycètes ; g : mycélium dicaryotique à boucles (ou anses d’anastomose) de certains Basidiomycètes ; h : baside à basidiospores externes ; i : asque à ascospores internes ; j : levure unicellulaire (multiplication sans production de mycélium) Figure 1 : Stade du cycle vital (Kiffer et Morelet, 1997) B. DEVELOPPEMENT DES MOISISSURES 1. Stades du développement fongique Trois phases interviennent lors du développement des moisissures : la germination, la croissance et la sporulation. En 2001, Osherov et May étudient et décrivent les différentes phases du cycle de vie asexuel d’Aspergillus nidulans (Figure 2). Les conidies sont produites par une structure spécialisée, le conidiophore. Après dispersion et contact avec un milieu adéquat, les conidies germent et donnent naissance à un hyphe. Le développement de cette structure forme un mycélium ramifié dont émerge un hyphe aérien porteur de conidiophores. -5- Figure 2 : Cycle de vie asexuel d’Aspergillus nidulans (Osherov et May, 2001) a) La germination Cette étape comporte deux phases. Dans un premier temps, la spore enfle (elle s’hydrate), son diamètre et sa biomasse augmentent. Lors de cette croissance sphérique, de nouvelles couches sont formées et recouvrent uniformément la surface intérieure de la spore. Les propriétés de surfaces sont modifiées, l’adhérence spore-spore et sporesubstrat augmente. L’apparition d’un hyphe à partir de la spore hydratée correspond à la seconde phase de la germination. b) La croissance En 1994, Carlile et Watkinson décrivent précisément cette étape. L’hyphe ayant émergé de la spore, après quelques heures, croît de manière exponentielle jusqu’à atteindre une vitesse d’élongation maximum de l’ordre du mm/h pour ensuite s’allonger à vitesse linéaire. A l’arrière de l’apex, des ramifications se forment, s’allongent et se divisent à leur tour, constituant un enchevêtrement d’hyphes appelé mycélium. La situation des ramifications par rapport à l’apex et l’angle qu’elles forment avec l’hyphe principal sont caractéristiques de l’espèce (Davet, 1996). En 1974, Trinci suit la cinétique d’Aspergillus nidulans sur un milieu nutritif par observation de l’allongement d’un hyphe d’environ 40 µm de long jusqu’à un mycélium d’environ 2500 µm (Figure 3). La longueur d’un hyphe simple et par la suite du système hyphal, croît exponentiellement (du moins pendant les 16 premières heures -6- d’observation). La fréquence d’apparition des ramifications est discontinue dans un premier temps puis devient exponentielle lorsque le nombre de nouveaux embranchements devient important (supérieur à 8). Parallèlement à ce phénomène, la longueur de chaque nouvel hyphe montre des variations de plus en plus réduites jusqu’à approcher une valeur constante d’environ 160 µm. Figure 3 : Croissance d’Aspergillus nidulans sur un milieu Agar (Trinci, 1974) La consommation des nutriments par le microorganisme aboutit à l’établissement de gradients de concentration de nutriments, probablement à l'origine du développement concentrique de la colonie. Quatre zones, bien qu’elles ne soient pas clairement délimitées, peuvent être distinguées sur une culture fongique en phase de croissance (Figure 4) : • la zone «âgée» (1) de la colonie, au centre, où les hyphes sont souvent creux, du fait de la migration de leur contenu protoplasmique dans les spores ou dans des parties plus jeunes de la colonie. Dans cette région, des autolyses entraînent la disparition des parois cellulaires. • la zone de fructification (2), la biomasse y est stationnaire et les spores en formation sur les hyphes émergents de la surface du milieu, • la zone productive (3), où se produit l’augmentation de biomasse la plus importante, • la zone extérieure (4) de la colonie, dite extensive, correspond à la région dans laquelle les hyphes progressent dans un milieu inexploité, -7- Figure 4 : Représentation des différentes zones d'une culture d'Aspergillus niger, sur milieu avoine, en phase de croissance. c) Sporulation et dissémination Ultime phase du développement fongique, la sporulation consiste en la formation de particules de taille comprise essentiellement entre 3 et 30 µm, enveloppées d'une paroi épaisse avant séparation (chlamydospores), enfermées dans des "sacs" à l'extrémité de l'hyphe (sporangiospores), produites sur les extrémités ou les côtés de l'hyphe (conidiospores), ou générées par bourgeonnement d'une cellule mère végétative (blastospores). Les conidies sont disséminées par des mécanismes actifs ou passifs. Dans des conditions optimales de croissance, une spore unique de moisissures peut germer et produire une colonie fongique avec des centaines de milliers de spores en quelques jours. L'émission des spores n'est pas un phénomène continu mais dépend des conditions environnementales et du stade de croissance du microorganisme. 2. Besoins nutritionnels Microorganismes généralement aérobies, les moisissures sont susceptibles de se développer partout où de la matière organique est disponible. Les micromycètes sont capables de sécréter un fluide exocellulaire. Celui-ci contient des enzymes hydrolytiques qui décomposent les substrats (polysaccharides, protéines, acides nucléiques, lignine, lipides…) en monomères facilement assimilables par le microorganisme (Griffin, 1994). Les besoins nutritionnels requis sont divisés en deux catégories : • les nutriments constitutifs, parmi lesquels figurent le carbone, l'hydrogène, l'oxygène, le phosphore, le potassium, l'azote, le soufre et le magnésium, sont nécessaires à des concentrations d’environ 10-3 mol/l. Le carbone, combiné à l’hydrogène, l’oxygène et l’azote, est l’élément structural majeur de l’organisme -8- (Griffin, 1994). L’hydrogène provient de l’eau contenue dans le support, l’oxygène est puisé dans l’ambiance (Janinska, 2000). • les oligonutriments, parmi lesquels figurent le fer, le cuivre, le manganèse, le zinc et le molybdène sont nécessaires à des concentrations de 10-6 mol/l au maximum (10-6 mol/l pour le fer à 10-9 mol/l pour le molybdène). Certains sont des cofacteurs essentiels au bon fonctionnement enzymatique de la cellule. Des vitamines, telles que la thiamine (B1), la biotine (B7), l’inositol (C16H12O6) (Griffin, 1994), sont également requises par ces microorganismes. a) Le carbone Principale source d’énergie pour les micromycètes (Garraway et Evans, 1991), le carbone est indispensable à la synthèse des éléments constitutifs et fonctionnels de la cellule. Il est issu des polysaccharides, des acides organiques et alcools, des lipides, et des acides aminés. Le glucose, présent notamment dans la cellulose et l’amidon, constitue un matériel de choix pour obtenir une croissance rapide. Son assimilation est instantanée : elle est facilitée par les systèmes de transport et enzymatique constitutifs de la cellule fongique. D'après Griffin (1994), seules deux moisissures, Leptomitus lacteus et Araiospora spp, seraient incapables d'utiliser le glucose. La croissance obtenue avec le fructose, le mannose ou le galactose est aussi rapide et étendue. Néanmoins, leur assimilation nécessite la synthèse préalable d'enzymes, qui engendre une période d'adaptation retardant le développement fongique. b) L’azote L’azote est nécessaire pour synthétiser, en particulier, les acides nucléiques, les acides aminés ou encore la glucosamine et la chitine. Comme tous les eucaryotes, les champignons sont incapables de fixer l’azote moléculaire. Ils peuvent assimiler l’azote des nitrates, de l’ammoniaque, des acides aminés, de l'urée, des amines et amides, et des polypeptides. D’autres formes telles nitrites et hydroxylamines pourraient être utilisées si elles n’étaient toxiques pour la cellule. c) Le rapport Carbone sur Azote Si plusieurs auteurs s'accordent sur l'importance de ce ratio sur le développement des microorganismes, les publications sur le sujet sont peu nombreuses. Pour Carlile et Watkinson (1994), un rapport C/N inférieur ou égal à 10 assurera une teneur protéinique forte; un rapport bien supérieur, par exemple 50, favorisera -9- l’accumulation d’alcools, de métabolites secondaires dérivés d’acétates, de lipides et de polysaccharides extracellulaires. Les auteurs notent l’importance de ce rapport dans les processus de fermentation. Dans un milieu de C/N faible (6,5) telles que les poussières (Korpi et al.,1997), les microorganismes peuvent utiliser les composés complexes (aldéhydes, acides et alcools), une fois les sources carbonées primaires consommées (Dix et Webster, 1995). Les substrats de l’environnement contiennent rarement les différents nutriments dans les proportions idéales : l’azote directement assimilable est souvent le facteur limitant du développement fongique. Les composés carbonés, généralement présents en excès, sont stockés dans les cellules fongiques sous forme de glycogène, polyols et polysaccharides. Par la suite, ces réserves pourront être utilisées comme source d’énergie. Le tarissement de l'un des nutriments stoppera sa croissance, ce phénomène affectant tout ou partie du mycélium selon le nutriment épuisé, et conduisant généralement à la sporulation des microorganismes (Klebs, 1899). d) Besoins en eau Les moisissures, comme tous les organismes ont besoin d’eau comme solvant en concentrations élevées. Les substrats et les enzymes sont tous en solution ou en suspension colloïdale, et aucune activité enzymatique n’existe en absence d’eau. Le mouvement de l’eau, au travers des parois semi perméables des cellules et des hyphes, se fait par osmose. Parmi les différents termes utilisés pour décrire les forces impliquées dans ce phénomène figurent : la pression osmotique, le potentiel osmotique, le potentiel hydrique et l’activité de l’eau (aw). Tous ces termes sont corrélés (Tableau I). L’activité de l’eau est assimilable à l’humidité relative, exprimée en pourcentage, lorsque l’équilibre entre le substrat et l’air adjacent est atteint. Elle correspond au rapport de la tension de vapeur d'eau du produit sur la tension de vapeur de l’eau pure à la même température. Elle varie de 0 (absence d’eau) à 1 (eau pure). La relation entre l’aw et le potentiel hydrique est donnée par l’équation: Potentiel hydrique (MPa) = k × ln aw où k est un coefficient dépendant de la température (k = 1,35 et 1,37 à 20 et 25°C respectivement). - 10 - Tableau I : Relation entre activité de l’eau, humidité relative et potentiel hydrique à 25°C [(1) 1MPA = 9.87bar] (Viitanen et Ritschkoff, 1991). La teneur en eau des substrats peut être assimilée, à l’activité de l'eau ou à l’humidité relative de leur environnement, dans la mesure où le développement fongique est initialement un phénomène de surface et que l’existence d’hystérésis lié à l’historique du support ne permet pas de définir précisément, à partir des isothermes de sorption, ce facteur (Adan, 1994). Si la disponibilité en eau de la phase liquide environnante est importante pour le microorganisme, la teneur en humidité de la phase gazeuse adjacente l’est tout autant. Le microorganisme possède, en effet, la capacité de lier l’eau atmosphérique. Cette propriété explique ainsi la présence d’espèces xérophiles telles qu’Aspergillus penicilloide et Eurotium repens dans la poussière de maison (Kallioski et al., 1996). La quantité d’eau disponible pour le microorganisme influence chaque phase du développement fongique. Ainsi, des études réalisées sur des espèces d’Aspergillus, de Penicillium et de Cladosporium, ont montré que l’aw minimum requise pour la germination est inférieure à celle nécessaire pour la croissance, elle-même inférieure à l’humidité indispensable à la sporulation asexuée. Le facteur entre les quantités minimales d’humidité pour chaque phase est d’environ 0,02. Les limites théoriques du développement fongique correspondent pour la valeur supérieure à une aw égale à 1 et pour la valeur inférieure à une aw égale à 0,55, où l’ADN est probablement dénaturé (distorsion de la structure hélicoïdale de la molécule) (Tableau II). Toutefois à ce jour, aucun développement fongique n’a été constaté pour des valeurs d’aw inférieures à 0,62 (germination d’Eurotium echinulatum) (Scott, 1957). - 11 - Espèce fongique aw Absidia corymbifera Alternaria citri Aspergillus candidus 0,88 0,84 0,75 Température (°C) 25 25 25 A. flavus A. fumigatus A. niger A. ochraceus A. restrictus A. sydowii A. terreus A. versicolor A. wentii Eurotium amstelodami E. chevalieri 0,78 0,82 0,77 0,77 0,75 0,78 0,78 0,78 0,84 0,70 0,71 33 25 35 25 25 25 37 37 25 25 33 Emericella nidulans 0,78 37 Espèce fongique Mucor circinelloides Paecilomyces variotii Penicillium brevicompactum P. chrysogenum P. citrinum P. expansum P. frequentans P. griseofulvum P. spinulosum Rhizopus microsporus R. stolonifer R. oryzae Stachybotrys chartarum Syncephalastrum racemosum Wallemia sebi aw 0,90 0,84 0,81 Température (°C) 25 25 23 0,79 0,80 0,83 0,81 0,81 0,80 0,90 0,84 0,88 0,97 0,84 25 25 23 23 23 25 25 25 25 5-30 25 0,70 25 Tableau II : Activités hydriques minimales et températures de croissance optimales de quelques espèces fongiques isolées dans les environnements intérieurs (Yang et Johanning, 1997; Clarke et al., 1999). La nature de la flore fongique varie selon la teneur en eau du support. Une humidité croissante du substrat entraîne l'apparition successive de genres fongiques dits de première (Aspergillus, Penicillium), deuxième (Cladosporium, Ulocladium) et de troisième colonisation (Stachybotrys) (Grant et al., 1989). 3. Effets des facteurs environnementaux a) Température Les moisissures ne possédant aucun moyen de réguler leur température interne, la température cellulaire est déterminée par celle de l’environnement. Les effets, au niveau moléculaire, de ce facteur sur la croissance sont mal connus. En 1980, Gaudy suggère que ces effets sont liés aux fonctions des lipides et des protéines dans la cellule. Les lipides sont les éléments structuraux essentiels de la membrane cytoplasmique et des membranes internes. La membrane cytoplasmique doit maintenir un équilibre approprié entre sa fluidité et son intégrité structurale pour assurer le contrôle du passage des molécules tout en empêchant la perte des constituants cellulaires essentiels. A haute température, les lipides membranaires peuvent se mélanger, provoquant une perte de l’intégrité structurale de la membrane et une fuite des constituants cellulaires. A basse température, la diminution de la fluidité de la membrane bloque le fonctionnement des systèmes de transport. La vitesse de pénétration des molécules dans la cellule est alors tellement ralentie qu’elles ne peuvent assurer une vitesse de croissance même faible. - 12 - Au sein de la cellule, les protéines interviennent dans davantage de processus que les lipides. Ce sont des éléments structuraux des membranes et des ribosomes (ARN) et, de plus, certaines fonctionnent comme des enzymes catalysant des réactions requises par la croissance. Pour chacune de ces fonctions, la protéine impliquée possède une structure tridimensionnelle précise. Une augmentation de la température peut, modifier la conformation de la molécule, causant la perte d’une fonction enzymatique essentielle, et provoquer l’altération des structures membranaires ou l’inactivation de la synthèse protéinique par l’altération de la conformation ribosomale. Une température élevée peut ainsi inactiver de nombreux processus essentiels. Les moisissures tolèrent néanmoins une large gamme de température. Ainsi, la température minimale requise par la plupart des moisissures est comprise entre 0 et 5°C, tandis que les espèces des environnements intérieurs nécessitent pour germer et croître des températures plus élevées (5-10°C). Généralement, des températures inférieures à la température minimale affectent principalement la croissance et non la viabilité du microorganisme, le champignon pouvant rester dormant pendant de longues périodes. Concernant la température optimale de croissance mycélienne de ces mêmes espèces, elle est généralement comprise entre 22 et 35°C (Ayerst, 1966 ; Panasenko, 1967 ; Carpenter, 1972). Pour cette même phase de développement, la température maximale des espèces les plus couramment isolées dans les locaux, est comprise entre 35 (Panasenko, 1967 ; Weersink, 1987) et 52°C (Ayerst, 1966). La croissance et la survie ne sont pas nécessairement affectées de la même manière. Généralement les spores résistent mieux aux températures élevées que le mycélium végétatif. Toutefois, d’après plusieurs auteurs, une température de 60 à 63°C tue en 30 minutes la plupart des spores, exceptées les ascospores des espèces thermo résistantes (Carpenter, 1972 ; Gaudy, 1980 ; Bravery, 1985). En 1980, Curran étudie l’effet de la température sur la croissance radiale de trois espèces fongiques (Figure 5). L’auteur constate qu’Alternaria et Stachybotrys chartarum se développent bien à 30°C, tandis que cette température limite le développement d’autres espèces telles que Cladosporium herbarum. - 13 - Figure 5 : Effet de la température sur la diamètre de la colonie d’Alternaria sp., de Cladosporium herbarum et de Stachybotrys chartarum après 14 jours d’incubation (Curran, 1980). b) Effet du pH Contrairement à la température, le pH cellulaire n’est pas uniquement déterminé par l’environnement. La cellule peut contrôler le passage des ions, y compris des ions hydrogène. De plus, les moisissures sont également capables de modifier le pH de leur environnement, en particulier, par la consommation de certains ions du substrat (Adan, 1994). Gaudy (1980), attribue l’augmentation du pH, au métabolisme des protéines. Généralement, la vitesse de croissance fongique est maximum pour des substrats de pH acides à neutres (entre 4 et 7). La gamme de pH permettant la croissance est toutefois bien plus étendue avec des valeurs limites comprises entre 2,2 et 9,6 pour les espèces les plus communes, Penicillium variabile possédant même des valeurs limites égales à 1,6 et 11,1 (Adan, 1994) (Tableau III). En 1980, Curran, étudie l’effet du pH sur la croissance de plusieurs espèces fongiques (Figure 6). Il constate que le pH agit différemment sur le développement selon l’espèce considérée. Les effets du pH du milieu sur la vitesse de croissance et la viabilité fongique ne sont pas encore connus. Toutefois, on le soupçonne de conditionner l’activité enzymatique ou encore d’inhiber le système de transport membranaire notamment en modifiant la configuration de protéines responsables du transfert de composés. - 14 - Tableau III : pH minimum et maximum de croissance fongique (Viitanen et Ritschkoff, 1991) Figure 6 : Effet du pH sur la biomasse de 3 espèces fongiques : Alternaria sp., Cladosporium herbarum et Stachybotrys chartarum (Curran, 1980). c) Luminosité L'impact de la lumière sur le comportement fongique est un phénomène complexe, qui conduit Hawker à établir, en 1966, une classification des moisissures selon leur comportement vis-à-vis des radiations lumineuses. Cette répartition consiste en 4 groupes : • les moisissures sporulant uniquement dans l'obscurité, • celles sporulant aussi bien dans l'obscurité qu'à la lumière, • celles ne formant pas de spores dans l'obscurité, - 15 - • celles dont la sporulation est inhibée par la lumière à certaines étapes de leur développement. Les rayonnements lumineux peuvent donc avoir un effet stimulant ou inhibiteur sur la germination et la croissance fongique selon la longueur d'onde et l'espèce considérées. Cette propriété est d'ailleurs utilisée comme technique potentielle de stérilisation. Ainsi, Nakamura (1987), a démontré que 79 % des spores d’Aspergillus niger soumises, durant 1 seconde à une irradiation de longueur d’onde égale à 254 nm, sont inactivées. 4. Modèles de croissance Parmi les quelques travaux que nous avons pu référencer, la majorité tente de modéliser l’impact de l’humidité ambiante ou du substrat sur la croissance fongique. Les détails de ces études sont reportés dans le Tableau IV. - 16 - Non précisée Aspergillus repens; Aspergillus versicolor; Penicillium chrysogenum; Cladosporium sphaerospermum, Ulocladium consortiale; Stachybotrys atra Penicillium chrysogenum; Cladosporium cladosporioides; Alternaria alternata, Aspergillus flavus Wallemia sebi Idem Détermination de la probabilité de croissance fongique dans les locaux à partir des données fournies par un modèle « architectural » Adaptation à la croissance fongique du modèle de Rosso, utilisé pour décrire l'impact de la température et de l'aw sur la croissance bactérienne. Influence de l'activité de l'eau et de la température sur la croissance de Wallemia sebi et détermination des aw optimal et minimal pour la germination et la croissance de cette espèce Espèces étudiées Aspergillus versicolor, A. niger, Penicillium sp., Cladosporium sphaerospermum, Aureobasidum pullulans, Trichoderma sp., Cladosporium sp. Objectifs Détermination de l'effet de l’humidité relative sur la croissance fongique sur des supports à base de bois Expressions du modèle tms = exp( −0,74 ln T − 15,53 ln HR + 73,79) tvs = exp( −0,76 ln T − 13,2 ln HR + 63,8) où T est la température exprimée en (awopt − awmin)[(awopt − awmin)(aw − awopt) − (awopt − awmax)(awopt + awmin − 2aw )] µopt(aw − awmax)(aw − awmin)2 bw = 1 − a w - 17 - et C0; C1; C2 ; D0; D1; et D2 des coefficients déterminés par régression linéaire d'après les résultats expérimentaux où de l'inoculum initial ln(tv ) = D0 + D1bw D2 bw2 où tv le temps nécessaire à l'apparition d'une colonie à partir ln(k r ) = C0 + C1bw C 2 bw2 où kr est la vitesse moyenne de croissance radiale où µ représente la vitesse de croissance µ= °C et H.R. l’humidité relative au voisinage du support pour Aspergillus versicolor . la germination. H . Rc . = 0,0001T 3 + 0,0219T 2 − 1,2649T + 94,871 H.R.c= 80% quand T>20°C pour T : 5-40°C où H.R.c est l’humidité relative critique pour HRc = −0,00267T 3 + 0,16T 2 − 3,13T + 100 pour T≤20°C où tHRb est la durée d'exposition à une humidité relative faible (75%) et tHRh, la durée d'exposition à une humidité relative élevée (>97%). t m = −0,38t HRb t HRh + 2,86t HRb + 1,8 - pour des périodes d'expositions longues (1-28 jours) : t m = exp( −0,72t HRb − 2,15t HRh + 2,58) t m = −6,13t HRb + 8,46t HRh + 1,9 où HR : humidité relative et T la température, tm et tv sont les temps de réponse nécessaires, respectivement, à la germination et à l'apparition du développement fongique. Pour des conditions environnementales variables: pour des périodes d'exposition courtes (12-48 heures) : Sur l'épicéa : tvp = exp( −0,71 ln T − 12,32 ln HR + 59,5) Pour des conditions environnementales constantes: Sur le pin : t mp = exp( −0,67 ln T − 13,15 ln HR + 62,6) Références Patriarca et al., 2001 Sautour et al., 2001 Clarke et al., 1999 Hukka et Viitanen, 1999 Viitanen, 1997 Objectifs Définir un modèle statistique capable de décrire les cinétiques de germination des spores Espèces étudiées Expressions du modèle où p(t) : proportion de spores germant parmi les spores considérées Ce modèle, pour être réaliste est assorti d'un facteur de synchronisation des spores lors de la germination. Ce facteur joue sur la pente de la courbe p(t) λ: temps nécessaire pour atteindre 50% de la germination maximale (t / λ ) p (t ) = K 1 + (t / λ ) - 18 - Tableau IV : Modèles de croissance des moisissures Metarhizium anisopliae, Beauvaria bassiana Aspergillus foetidus. Références Bosch, 1995 5. Méthodes de détection et de dénombrement des moisissures On distingue deux types de méthodes pour détecter et quantifier les microorganismes fongiques : les méthodes directes et indirectes (Tableau V). Nous développons ici, plus particulièrement, les techniques indirectes basées sur le dosage de marqueurs biochimiques (Parat, 2002). Méthodes directes Après prélèvement sur milieux de culture ou lames, observations et dénombrement réalisés au microscope : à fluorescence après coloration des à fond clair microorganismes par un marqueur fluorochromique Méthodes indirectes Dosage de marqueurs biochimiques (métabolites : composés organiques volatils et mycotoxines ou constituants spécifiques de la cellule : glucans, chitine, ergostérol) Biologie moléculaire (PCR) Tableau V : Techniques de détection et de dénombrement des moisissures a) Dosage des composés organiques volatils d'origine microbienne (COVm) Ces composés sont plus particulièrement utilisés pour détecter des problèmes de biocontamination non apparente dans des immeubles faisant l'objet de plaintes (odeurs, malaises, irritations). Suite à leur prélèvement sur tubes absorbants (de type Tenax ou charbon actif), les COVm sont extraits par désorption thermique ou à l'aide d'un solvant, puis dosés par chromatographie gazeuse avec détection par spectrométrie de masse ou ionisation de flamme (Pasanen, 2001; Elke et al., 1999). b) Dosage des mycotoxines Métabolites secondaires d'origine fongique, les mycotoxines peuvent être retrouvées dans les spores, le mycélium et les supports de croissance des champignons. A l'heure actuelle aucune méthode n'est réellement adaptée au mesurage dans l'air (Tuomi et al., 2000; Pasanen, 2001). c) Dosage des glucans Constituants spécifiques des spores fongiques de la plupart des moisissures, les β-1,3-D glucans, fortement soupçonnés d'être irritatifs et de jouer un rôle dans la réponse immunologique (Wan et al., 1999), sont dosés par le test LAL (Limulus Amoebocyte - 19 - Lysate) modifié ou le test immunochimique EIA (Enzyme ImmunoAssay) (Pasanen, 2001). Si la méthode LAL est assez simple (disponible sur le marché) et sensible, elle est peu spécifique, contrairement à la méthode par EIA qui est également plus reproductible mais présente l'inconvénient d'être trop peu sensible pour les recherches dans l'air (Douwes et al., 1996). d) Dosage de la chitine Poly-β-1,4-N-acétyl glucosamine, la chitine est présente dans la paroi des micromycètes et est absente du matériel végétal. Le principe du dosage de cette molécule, mis au point par Donald et Mirocha, en 1977 pour évaluer l’importance de la contamination fongique des grains, repose sur l’hydrolyse de la chitine en glucosamine, dosée par colorimétrie ou chromatographie. Les résultats obtenus en 5-6 heures rendent compte de la chitine du mycélium vivant et mort, mais peuvent être biaisés dans la mesure où les moisissures ont des teneurs en chitine variables (de 1 à 25% du poids sec du mycélium) selon les espèces, l’âge du mycélium et la nature du substrat. La présence de certaines substances du substrat, tels que des hexosamines, peuvent également fausser le résultat (Matcham et al., 1985). e) Dosage de l’ergostérol Les moisissures contiennent dans leur membrane cellulaire un ester d’ergostérol. Constituant spécifiquement fongique et stérol majeur chez presque tous les champignons, cette molécule est principalement un composé architectural de la membrane cytoplasmique fongique (Figure 7). Figure 7 : Formule développée de l’ergostérol Elle y joue un rôle prépondérant et participe, avec les phospholipides à la régulation des échanges transmembranaires. Le dosage de l’ergostérol a été utilisé pour déterminer la contamination de substrats solides : céréales (Seitz et al., 1979), sols (Grant et West, 1986), matériaux (Pasanen et al., 1999), poussières de maisons (Axelsson et al., 1995), et fut employé par Miller et - 20 - Young, en 1997, pour estimer la concentration fongique aéroportée des environnements intérieurs. L’intérêt de cette technique réside dans l’existence d’une réelle indépendance entre les conditions de croissance et le taux d’ergostérol. Tous les protocoles de dosage sont explicités dans la norme NF V 18 112. Ce dosage permet une mesure quantitative rapide (2-3 heures) de la biomasse formée. L’autre intérêt de cette technique est de pouvoir détecter a posteriori des altérations fongiques dont les microorganismes responsables auraient été détruits par un traitement ultérieur (Cahagnier, 1998). Les techniques de dosage de l’ergostérol s’appuient sur une caractéristique de cette molécule : son absorbance U.V. à 282 nm (Figure 8). Figure 8 : Spectre de l’ergostérol commercial (pureté>98%) - - - et de l’ergostérol; extrait de moisissures colonisant l’humus d’un ruisseau (Gessner et Schmidt, 1997). La littérature fait état de différentes méthodes de dosage : • La chromatographie liquide haute performance (HPLC) (Seitz et al., 1979 ; Zill et al., 1988 ; Gessner et Newell, 1996) • La chromatographie en phase gazeuse (CPG) associée à la spectrométrie de masse (Axelsson et al., 1995) • La spectrométrie U.V. (Zill et al., 1988) qui se révèle difficilement exploitable dans le cas de la contamination de céréales, compte tenu du spectre d’absorbance U.V. des autres substances présentes (Matcham et al., 1985). La méthode utilisant la chromatographie en phase liquide est la plus largement utilisée. La quantité d’ergostérol par spore ou par masse sèche de mycélium peut varier jusqu’à 25% d’une espèce à l’autre (Tableau VI) (Miller et Young, 1997). - 21 - En 1986, Grant et West ont réalisé trois mesures d’ergostérol sur des sols. Les résultats obtenus sont compris entre 4 et 7 ng d’ergostérol/µg de mycélium. Espèce fongique Cladosporium cladosporioides Aspergillus niger Aspergillus sydowii Aspergillus ustus Aspergillus versicolor Eurotium herbariorum Penicillium brevicompactum P. chrysogenum P. commune P. olsonii P. viridicatum Concentration d’ergostérol (pg/spore) 3,11 ± 13,5 1,71 ± 19,9 1,71 ± 15,9 1,88 ± 14,5 2,54 ± 7,5 2,17 ± 13,6 2,55 ± 4,7 5,11 ± 26,6 3,34 ± 14,2 2,12 ± 6,4 2,21 ± 8,4 Tableau VI : Concentration d’ergostérol par spore fongique (Miller et Young, 1997). C. MOISISSURES ET MATERIAUX 1. Flore fongique dans l’air et sur les surfaces des locaux Dans l’air des environnements intérieurs, les espèces fongiques les plus couramment isolées appartiennent aux genres Penicillium, Aspergillus, et Cladosporium (Hunter et al; 1988; Pasanen et al., 1992). En 1992, Verhoeff, réalise des prélèvements atmosphériques dans une maison présentant des problèmes de moisissures (Verhoeff et al., 1992). Les résultats de cette étude sont reportés dans le Tableau VII. Les moisissures sont capables de coloniser la plupart des matériaux dés l'instant où le microorganisme dispose d’une quantité d'eau suffisante (Tableau VIII). En 2002, Hyvärinen, définit et quantifie les genres fongiques isolés au sein de 1140 échantillons de matériaux de construction récupérés in situ. L'auteur répartit ces matériaux dans 8 catégories : papier, produits céramiques, matériaux d’isolation d’origine minérale, peintures, colle, plastiques, bois, et panneaux de construction en gypse (Hyvärinen et al., 2002). Parmi les genres observés au sein de ces produits, Penicillium est le genre le plus fréquemment isolé. Papiers et isolants minéraux apparaissent favorables à la croissance de Cladosporium tandis que Stachybotrys est observé le plus souvent dans les panneaux en gypse. Aspergillus et Acremonium ne semblent, quant à eux, pas spécifiques d’un substrat et sont identifiés sur des produits en céramique, peinture, colle ou encore produits à base de bois. - 22 - Intérieur (UFC/m3) 24 6 4 1 2 245 65 59 2 3 2 4 154 2 15 6 2 8 1 5 669 Espèce fongique Aspergillus (total) A . penicillioides A. versicolor Aureobasidium pullulans Botrytis cinerea Cladosporium (total) C. cladosporioides C. herbarum C. macrocarpum C. sphaerospermum Eurotium amstelodami E. herbariorum Penicillium (total) P. aurantiogriseum P. brevicompactum P. glabrum P. jensenii P. olsonii Ramularia deusta Wallemia sebi total UFC/m3 Tableau VII : Moisissures isolées dans les environnements intérieurs (Verhoeff et al., 1992). UFC : Unité Formant Colonie MURS ET REVETEMENTS MURAUX Matériaux colonisés Murs Peintures Papier peint Bois Espèces fongiques isolées Cladosporium cladosporioides, Eurotium herboriorum, Paecilomyces variotii, Penicillium glabrum Aspergillus penicillioides, Penicillium brevicompactum, P. chrysogenum, P. glabrum Alternaria alternata, Aspergillus penicillioides, A. versicolor Cladosporium cladosporioides, Paecilomyces variotii, Penicillium brevicompactum, P. chrysogenum, P. glabrum Trichoderma harzianum, Penicillium brevicompactum Colle Caoutchouc des cadres de fenêtre Aspergillus versicolor Cladosporium cladosporioides - 23 - Matériaux colonisés Plastiques Espèces fongiques isolées Aspergillus niger, A. sydowii, Cladosporium cladosporioides, C. herbarum, C. sphaerospermum, Emericella nidulans, Eurotium herboriorum, Penicillium brevicompactum, P. chrysogenum, Trichoderma harzianum, Wallemia sebi, Emericella nidulans, Eurotium herboriorum, Paecilomyces variotii, Penicillium chrysogenum Aspergillus niger, A. penicillioides, A. sydowii, Cladosporium sphaerospermum, Paecilomyces variotii Eurotium herboriorum Aspergillus sydowii, Stachybotrys chartarum Cladosporium sphaerospermum, Penicillium brevicompactum Aspergillus versicolor Penicillium glabrum, Wallemia sebi Penicillium glabrum Polyuréthanne, tapisserie renfermant de l'arsenic Aspergillus niger, Cladosporium sphaerospermum Filtres et conduits des systèmes de traitement d'air Aspergillus fumigatus Réservoir d'eau, humidificateur Exophiala jeanselmei Textiles PRODUITS DE DECORATION Tapis Cuir Archives Matériaux cellulosiques Caoutchouc vulcanisé Produits céramiques TRAITEMENT D’AIR SYSTEMES DE Papier Tableau VIII : Espèces fongiques isolées de divers matériaux (Botton et al., 1985; Samson et al, 1994; Beguin et Nolard, 1994; Beguin, 1995) 2. Humidité des locaux Essentiellement liée au bâti (erreurs de conception, mauvaise isolation, ventilation insuffisante ou inadaptée) et aux occupants (vapeur générée par le métabolisme et les activités quotidiennes : cuisson, nettoyage…), la teneur en humidité d’un local peut également résulter de dégâts des eaux (Déoux, 2001). Quelques unes des sources d'humidité dans le bâtiment sont représentées sur la Figure 9. - 24 - Figure 9 : Sources d'humidité dans le bâtiment (Singh, 1994). Au sein du matériau, deux principaux phénomènes interviennent dans la relation eausupport : les condensations de surface et capillaire. La fixation de la vapeur d'eau dans un matériau poreux s'avère complexe, plusieurs phénomènes fondamentaux apparaissent successivement ou simultanément tels que l'adsorption physico-chimique mono ou plurimoléculaire, la condensation capillaire, le mouillage ou la capillarité. Les quantités d'eau fixées par adsorption surfacique sont généralement très faibles et seul le phénomène de condensation capillaire explique la quantité d'eau importante pouvant être adsorbée par certains matériaux comme ceux à base de ciment, de bois ou d’argile. Selon la nature du matériau (composition chimique, porosité), l'eau est plus ou moins fortement liée, et de ce fait plus ou moins disponible pour le microorganisme (Figure 10). - 25 - Figure 10 : Mécanismes de rétention et de transfert de l’eau dans les pores des matériaux (Quenard, 2001) 3. Mécanismes de biodégradation Les mécanismes mis en œuvre dans la détérioration des supports sont de deux types : • Action physique liée au développement des hyphes dans le matériau conduisant à la rupture de sa structure. • Action chimique imputable à la production de divers métabolites qui agissent par assimilation ou dissimilation. Lors des processus d’assimilation, les constituants du matériau sont utilisés comme nutriments après avoir été réduits par diverses enzymes extracellulaires qui facilitent la pénétration des hyphes dans le matériau. Les processus de dissimilation sont liés à la production d’acides organiques et de pigments. Les acides organiques sont capables de réagir avec le substrat par dissolution des cations ou par chélation des ions métalliques présents dans les peintures, par exemple. Cette dernière réaction peut conduire à la formation de sels. Ainsi, l’acide oxalique réagissant avec le calcium donne naissance à des oxalates de calcium. Le dioxyde de carbone produit par tous les organismes aérobies et notamment les moisissures lors de la respiration joue également un rôle dans la dégradation des supports. En effet, à partir d’un certain taux d’humidité, ce gaz peut se transformer en acide carbonique, capable de dissoudre le calcium et le magnésium pour former des bicarbonates de calcium et de magnésium hydrosolubles. Outre l’action directe de ces acides, leur production favorise la croissance d’espèces fongiques acidophiles qui pourront poursuivre la dégradation du support (Singh, 1994; Garg et al., 1995; Sand, 1997). - 26 - D. IMPACT SANITAIRE L’exposition des occupants aux moisissures, à leurs fragments et produits de leur métabolisme, est responsable de maladies : infections (Aspergillose invasive nosocomiale), allergies immédiates ou différées, toxi-infections et irritations diverses (syndrome des bâtiments malsains : SBS). 1. L’aspergillose invasive nosocomiale Il s’agit d’une maladie dont l’agent infectieux est une moisissure ubiquiste appartenant au genre Aspergillus et isolée notamment dans le sol et les débris végétaux en décomposition. La contamination se produit essentiellement par voie aérienne, l’inoculation directe lors d’interventions chirurgicales étant toutefois possible. Les personnes atteintes sont le plus souvent des immunodéprimés sévères, des patients, hospitalisés pour greffe de moelle ou transplantation, atteints d'aplasie, ou malades du SIDA. Le pronostic de la maladie est très sévère avec 50 à 100% de décès. La survenue d’épisodes d’aspergillose est souvent associée aux travaux de terrassement, durant lesquels la concentration d’Aspergillus dans l’air et sur les surfaces augmente considérablement (Aisner et al., 1976; Arnow et al., 1978; Bocquet et al., 1993; Veyssier et Domart, 1996). 2. Les allergies respiratoires Selon Miller (1990), « l’exposition aux moisissures et levures produit toujours une allergie. C’est une question de durée et de quantité». Aujourd’hui, on estime entre 10 à 15 % de la population, les personnes allergiques aux moisissures. Généralement, cette sensibilité est décelée au moyen de tests cutanés. A ce jour, les tests les plus couramment utilisés concernent les allergies à Cladosporium cladosporioides, C. herbarum et Alternaria alternata. Ces tests apparaissent, néanmoins, insuffisants au vu du nombre de moisissures allergisantes identifiées (Tableau IX). Genre Espèces Penicillium P. frequentans ; P. notatum ; P. expansum ; P. italicum ; P. digitatum ; P. purpurogenum Aspergillus A. niger ; A. fumigatus ; A. versicolor ; A. repens Alternaria A. consortiale ; A. alternata ; A. chartarum ; A. tenuissima Cladosporium C. cladosporioïdes ; C. herbarum Epicoccum E. nigrum Tableau IX : Deutéromycètes reconnus comme allergisants (Malléa et Charpin, 1986) - 27 - Ainsi, inhalés, les conidies, viables ou non, et les fragments fongiques peuvent causer des maladies d’hypersensibilité ou allergies (asthme allergique, rhinites, maladies professionnelles telles que la maladie du poumon de fermier) (Burge, 1985; 1989). Deux types d’hypersensibilité résultent de cette exposition : • l’hypersensibilité de type I ou immédiate est liée à une réponse IgE contre des antigènes sans toxicité propre et est caractérisée par une réaction allergique survenant immédiatement après le contact avec l’antigène. Les manifestations cliniques de ce type d’hypersensibilité sont regroupées sous le terme d’atopie. Elles comprennent l’asthme, l’eczéma, le rhume des foins et l’urticaire et surviennent chez des personnes ayant des antécédents familiaux et réactives à un test cutané aux pneumallergènes. • l’hypersensibilité de type III est classée parmi les maladies à complexes immuns et apparaît quand de grandes quantités de ces macromolécules sont formées ou quand elles ne peuvent être éliminées correctement par l’organisme. La formation de complexes immuns à partir d’anticorps et d’antigènes « externes », par exemple dans les poumons après inhalation répétée de fragments ou de spores fongiques, est à l’origine notamment d’alvéolites allergiques extrinsèques. Parmi ces pathologies on trouve la maladie des poumons de fermiers et celle des éleveurs d’oiseaux (Roitt et al., 1985). Les allergènes fongiques sont des protéines de poids moléculaire compris entre 10 et 80 kilodaltons. Ils sont isolés aussi bien dans les spores que dans le mycélium. Leur caractère hydrosoluble va permettre à ces particules biologiques de se dissoudre aisément dans les mucosités des voies aériennes respiratoires supérieures. Le Tableau X répertorie quelques espèces fongiques dont les allergènes ont clairement été identifiés. Tableau X : Allergènes majeurs de moisissures (Gumowski, 1997) - 28 - 3. Les toxi-infections Il s’agit de maladies provoquées par l’exposition à des métabolites secondaires produits par les moisissures, les mycotoxines (Tableau XI). Ce sont des molécules de faible poids moléculaire (154 Da pour la patuline, 403 Da pour l’ochratoxine A (Nesheim et Stack ; 2001), non volatiles à température ambiante, contenues dans les fragments fongiques ou adsorbées sur les poussières (Tuomi et al, 2000). Les structures de quelques mycotoxines sont représentées sur la Figure 11. Figure 11 : Structure de quelques mycotoxines (Salvaggio et Aukrust, 1981) La fonction de ces molécules dans l’environnement est de permettre aux moisissures de combattre d’autres microorganismes présents sur le même substrat. Au laboratoire, en culture fermée, ces substances, comme tous les métabolites secondaires, sont synthétisées et excrétées dans le milieu dès la fin de la phase exponentielle de la croissance fongique. Dans les environnements intérieurs, adsorbées sur les poussières ou contenues dans les spores et les fragments fongiques, ces mycotoxines, inhalées, pénètrent plus ou moins profondément dans l’arbre bronchique, selon la taille des particules (Schiefer, 1990) et agissent sur les macrophages pulmonaires. Ainsi, in vitro, des microconcentrations de certaines mycotoxines inactivent les macrophages des alvéoles pulmonaires (Sorenson 1989; 1990), la phagocytose de ces cellules étant, par exemple, inhibée par la patuline et l’acide pénicillique respectivement à 10-7 M et 10-5 M. (Sorenson et al., 1986 ; Sorenson et Simpson, 1986). Outre les mycotoxines, les conidies contiennent une substance biologiquement active : le β-1,3- glucan. Composant de la paroi des spores et des hyphes, cette molécule entraîne la réduction du nombre de macrophages et inhibe, plus généralement, la phagocytose pulmonaire (Rylander et Goto, 1991). On prête également à cette substance des propriétés irritantes (Samson et al., 1994). - 29 - Mycète Mycotoxines Patuline Manifestations cliniques Hémorragie du poumon et du cerveau Dommages rénaux, vasodilatation, Citrinine constriction bronchique, augmentation du tonus musculaire Penicillium Ochratoxine A Néphrotoxique, hépatotoxique Citroviridine Neurotoxique (150 espèces) Emodine Réduction de l’oxygène cellulaire capturé Gliotoxine Maladies pulmonaires Verruculogène Neurotoxique, tremblements chez l’animal Acide sécalonique D Pneumotoxique, tératogène chez le rongeur Cancer du foie, cancer respiratoire Aspergillus flavus Aflatoxine β1 Ochratoxine A Néphrotoxique, hépatotoxique Aspergillus Stérigmatocystine Cancérigène parasiticus Patuline Hémorragie du poumon et du cerveau Trichothécènes T2, Suppression immunitaire et Nivalénol dysfonctionnement cytotoxique Déoxynivalénol Saignement, nécrose dermique Stachybotrys Mortel à haute dose ou à faibles doses chartarum Satratoxine H chroniques, tératogène, abortif chez l’animal. Altération possible des fonctions Zéaralénone immunitaires Tableau XI : Moisissures toxiques, métabolites secondaires et manifestations cliniques associées (Yang et Johanning, 1997). 4. Irritations : rôle des composés organiques volatils d’origine microbienne (COVm) Si les COVm produits par les champignons sont connus pour être toxiques pour l’animal, en revanche leurs effets sur l’Homme sont encore méconnus, même si certains auteurs les soupçonnent de jouer un rôle dans le syndrome des bâtiments malsains (SBS) (Ström et al., 1990). Dans de nombreuses études, la survenue d’irritations ou la présence d’odeurs déplaisantes a été associée à une contamination fongique de l’environnement. Les substances incriminées dans l’apparition d’odeurs dans les environnements intérieurs ont été référencées : géosmine, produit notamment par Chaetomium, 1-octen-3-ol, 2-octen1-ol, 3-octanol, 3-octanone (Ström et al., 1994). Penicillium commune est également susceptible de produire le 2-méthyl-iso-bornéol, dont l’odeur de moisi est caractéristique (Gravesen et al., 1994). Toutefois, certaines odeurs sont à imputer à une croissance bactérienne, notamment à l’actinomycète Streptomyces. - 30 - De nombreux autres COVm aux caractéristiques non odorantes sont émis par les champignons microscopiques durant toute la croissance du champignon (Miller, 1990). Plus de 500 COV ont été isolés à partir de cultures fongiques (Wilkins et Larsen, 1995). Nature chimique Alcools Cétones Terpènes COVm 1-octanol, 2-octanol, 3-octanol, 3-méthyl-2-butanol, 3-méthyl-1-butanol, 2éthyl-1-hexanol 1-octen-3-ol 2-pentanone, 2-hexanone, 2-heptanone, 3octanone α-pinène, β-pinène, camphène, limonène et 2méthylfurane Tableau XII : Composés organiques volatils émis par les moisissures (Korpi et al., 1997) Parmi les COVm produits le plus fréquemment, l’éthanol possède un fort pouvoir synergique, augmentant les effets irritants et toxiques des autres COV (Schmidt Etkin, 1994). Korpi en 1998, a étudié la nature des COV émis par quelques espèces fongiques selon leur substrat (Tableau XIII). Espèces fongiques Aspergillus fumigatus, Aspergillus furcatum Eurotium herbariorum Penicillium brevicompactum Aspergillus versicolor, Cladosporium globosum, Fusarium culmorum, Penicillium variotii Exophiala dermatitidis, Aspergillus furcatum et Sporobolomyces roseus Composition du substrat COVm émis Carton/papier peint/film plastique 3-méthyl-1-butanol 3-méthyl-2-butanol Panneau de particules/laine de verre 3-méthyl-1-butanol Dalle céramique/parpaing 1-pentanol 1-hexanol Tableau XIII : COV émis selon le mélange fongique et la nature du substrat (Korpi et al., 1998). Dans chaque cas, le support seul ne produisant pas ces substances, l’auteur a attribué la présence de ces produits à la croissance fongique (Korpi et al., 1998). - 31 - II. PHYSIQUE DES AEROSOLS APPLIQUEE AUX MOISISSURES A. AEROSOLS FONGIQUES On désigne par aérosol, des particules solides, liquides ou les deux, en suspension dans un milieu gazeux, dont la vitesse limite de chute est négligeable (≤25 cm/s). Leur taille est comprise entre 10-3 et 100 µm (Renoux et Boulaud, 1998). Un bioaérosol implique que l’aérosol ainsi désigné est de nature biologique et possède des propriétés spécifiques : viabilité, caractère infectieux, voire allergénique. 1. Taille et forme En physique des aérosols, les théories sont établies, le plus souvent pour des particules sphériques. Cependant, les aérosols rencontrés habituellement dans l’air sont loin d’avoir cette forme idéale. Le terme le plus communément utilisé pour définir la taille des aérosols est le diamètre équivalent ou statistique. Ce diamètre correspond à celui d’une sphère ayant les mêmes propriétés physiques que la particule, de forme irrégulière, considérée. Toutefois, la diversité de forme des aérosols biologiques implique des écarts importants entre ces différents diamètres (Figure 12). La notion de facteur de forme (géométrique, dynamique) est utilisée par les physiciens afin de mieux appréhender le comportement d’un aérosol quelconque. Figure 12 : Sphères équivalentes d’une particule de forme irrégulière (Renoux et Boulaud, 1998) Les diamètres statistiques les plus usités sont présentés et définis dans le Tableau XIV. - 32 - Diamètre équivalent Martin Féret Stokes (ds) Aérodynamique (da) Optique (dopt) Electrique Volume équivalent Diamètre projeté Définition Longueur moyenne d’une droite divisant la particule en 2 surfaces égales, suivant une direction fixe donnée. Distance moyenne séparant 2 point opposés de la particule, suivant une direction fixe donnée, Diamètre d’une sphère ayant une vitesse de chute et une masse spécifique identiques à celles de la particule considérée Diamètre d’une sphère ayant la même vitesse de chute que la particule et dont la masse spécifique est égale à 1 g/cm3. Diamètre d’une sphère diffusant la lumière avec la même intensité que la particule Diamètre d’une sphère ayant la même mobilité électrique que la particule Diamètre de la sphère dont la masse est identique à celle de la particule et ayant la masse volumique du matériau Diamètre d’un cercle ayant la même surface que la particule étudiée Tableau XIV : Diamètres statistiques (Renoux et Boulaud ; 1998). Parmi ces diamètres statistiques, le diamètre aérodynamique est le plus utilisé. Il intervient pour déterminer le comportement atmosphérique des spores fongiques, dans le système respiratoire humain et dans les appareils d’échantillonnage (Baron et Willeke, 2001). Cependant, selon Reponen (1994), le diamètre aérodynamique des particules fongiques varie et dépend des conditions environnementales, notamment de l’humidité () (Reponen et al., 1996; 1997) et du mode de génération utilisé (Figure 14). Figure 13 : Effet de l’humidité relative sur la taille des aérosols fongiques (Reponen et al., 1996) (n=6) - 33 - Figure 14 : Distribution granulométrique de l’aérosol de Penicillium brevicompactum généré à partir : A. suspension liquide ; B : milieu agar solide sans orifice de désaggrégation ; C : milieu agar solide avec orifice de désaggrégation (n=3) (Reponen et al., 1996). Dans le cas des aérosols fongiques, les formes et les états de surfaces rencontrées sont variés (Figure 15 et Figure 16). Figure 15 : Morphologie des conidies. Les représentations ne tiennent pas compte de la taille réelle des conidies (Botton et al., 1985). Figure 16 : Ornementation des spores (Botton et al., 1985) Leur taille diffère considérablement d’une espèce à l’autre. Le diamètre de la majorité des conidies est compris entre 3 et 30 µm (Madelin, 1994; Gravesen et al., 1994). Pour comparaison, la taille moyenne de différents bioaérosols est présentée dans la Figure 17. Les fragments fongiques, potentiellement impliqués dans l’apparition de maladies sont - 34 - vraisemblablement de taille plus faible que les conidies, toutefois, à ce jour, ce domaine reste inexploré. Figure 17 : Tailles relatives de différents bioaérosols 2. Propriétés physiques des aérosols fongiques Les aérosols fongiques sont soumis aux mêmes lois que les particules inertes. Les phénomènes physiques impliqués dans le comportement des aérosols sont : • mouvement brownien, • sédimentation, • diffusion et forces d’inertie, • forces électriques • thermophorèse. • photophorèse Toutefois, compte tenu de la taille et de la masse volumique des particules fongiques, le mouvement brownien et la thermophorèse peuvent être négligés par rapport aux autres forces. a) La sédimentation Dans l’air, les particules ont des vitesses de chute liées à leur masse et à leurs dimensions. Les particules aéroportées sont soumises à la pesanteur, et leur comportement, en l’absence de turbulence, est régi par différentes lois dont le domaine d’application dépend essentiellement de leur taille. La vitesse limite de chute des particules sphériques, déduite de la loi de Stockes-Cunningham, est donnée par l’équation : ρ p d p2 gCu V = (en cm/s ) 18η - 35 - où ρp correspond à la masse volumique de la particule (g/cm3), dp au diamètre de la particule (cm), g à l’accélération de la pesanteur (9,81 cm/s2), η à la viscosité de l’air (g/cm.s-1) et Cu au facteur de correction de Cunningham, dont il existe plusieurs expressions. Pour des particules de diamètre supérieur à 1 µm, Cu est égal à 1 (Renoux et Boulaud, 1998). A 20°C, une particule sphérique de 10 µm et de masse volumique unitaire aurait une vitesse limite de sédimentation de l’ordre de 0,31 cm/s. D’après Gregory (1973), la masse volumique des spores fongiques échantillonnées dans l’air extérieur varie de 0,56 à 1,44 g/cm3 : 1,34 pour Peronospora destructor contaminant oignons et échalotes; 0,56 pour Ustilago nuda responsable du charbon nu du blé et de l’orge (Webster, 1980). A l’heure actuelle il n’existe aucune donnée concernant la masse volumique des moisissures les plus couramment isolées dans les environnements intérieurs (Aspergillus, Penicillium, Cladosporium). b) Diffusion turbulente et forces d’inertie Le déplacement rapide d’une masse d’air, par opposition à un écoulement régulier ou laminaire, est dit turbulent ou instable. La transition entre ces deux régimes est quantifiée par le nombre de Reynolds. En pratique, les turbulences entraînent un mouvement aléatoire s’ajoutant à l’écoulement de l’air. Le comportement aérodynamique et les propriétés de transport des particules sont modifiés selon le régime dans lequel elles sont placées. Ce phénomène est important lors du déplacement des particules dans l’atmosphère, dans une gaine de ventilation ou toute autre canalisation. Dans un conduit de diamètre Dc, le coefficient de Reynolds du gaz, noté Rec s’exprime par : Re c = U s Dc ν où Us est la vitesse moyenne dans le conduit et ν représente la viscosité cinématique du fluide. Par convention, l’écoulement est : laminaire si Rec<1200 ; turbulent si Rec>2500. A proximité d’un aérosol, on considère le nombre de Reynolds de la particule qui se traduit par le rapport entre les forces d’inertie et les forces dues à la viscosité du milieu et est défini par la relation : Re p = ρ gVd p η - 36 - où ρg : masse spécifique du gaz porteur de viscosité dynamique η et dp le diamètre de la particule de vitesse V. Un Rep proche de 1 traduit le caractère turbulent du flux d’air autour de la particule se déplaçant dans le gaz. Par ailleurs, les bioaérosols sont soumis à leur inertie qui intervient quand le flux d’air, vecteur des particules, change de direction. Si les particules ont une inertie trop importante, elles pourront s'impacter sur les obstacles rencontrés. Ce phénomène est utilisé dans les appareils de collecte des microorganismes. c) Les forces électriques Les particules aérosolisées possèdent des charges électriques qui peuvent entraîner leur déposition rapide sur des surfaces et leur coagulation (Renoux et Boulaud, 1998). C'est pourquoi, dans certains cas, il est intéressant de neutraliser ces charges à l'aide d'une source radioactive (85Kr par exemple) afin d’obtenir une charge globale proche de zéro (distribution de Boltzmann). Néanmoins, cette neutralisation est susceptible d’entraîner un effet létal sur les cellules. d) La photophorèse Les rayonnements lumineux provoquent le déplacement (attirance ou répulsion) des particules en suspension dans l’air. Ce phénomène est lié à l’apparition d’une distribution non uniforme de la température à la surface de l’aérosol. Suivant les cas, on observe une photophorèse positive ou négative quelle que soit la dimension de la particule. Dans le cas d’un aérosol fortement absorbant, l’échauffement sera plus important sur la face exposée au rayon d’où une photophorèse positive, la particule allant des zones chaudes vers les froides. A l’inverse, une particule translucide selon sa taille pourra se diriger vers les sources chaudes dans la mesure où elle se comporte comme une lentille focalisant l’énergie sur sa partie distale. Ce phénomène est perturbé par la présence de champs électriques ou magnétiques (Renoux et Boulaud, 1998). B. ADHERENCE ET REENTRAINEMENT DES PARTICULES FONGIQUES La fixation des micro-organismes s'observe quel que soit le milieu de suspension (air ou liquide). Ce phénomène naturel protège les particules biologiques contre les agressions biotiques et abiotiques du milieu. L'adhésion facilite les échanges entre les cellules et les surfaces d'accueil. Cette faculté, qu'ont la plupart des micro-organismes à adhérer, peut être recherchée (bio-réacteur à cellules fixées) ou combattue (cathétérisme infectieux, - 37 - contamination des réseaux de fluides, prolifération sur les matériaux de construction...) (Moreau, 1998). 1. Etapes de l’adhérence L'étape préliminaire à la fixation des microorganismes est conditionnée par différents phénomènes : sédimentation, mouvement brownien, turbulences du milieu, qui vont éloigner ou rapprocher les particules biologiques du support. La fixation résulte de deux processus successifs : l’immobilisation d'une première couche de cellules, puis la stabilisation et le renforcement de la position du microorganisme sur la surface. La première étape ne dure que quelques secondes et met en jeu un phénomène physique, avec adsorption d'une couche de micro-organismes résultant d’interactions intermoléculaires. Les forces de Van der Waals prédominent dans le cas où la distance particule-surface est de l’ordre de quelques centaines de nanomètres à 50 nm, quand cette distance est réduite à 10-20 nm, les interactions électrostatiques s’ajoutent aux forces de Van der Waals. Pour une distance inférieure à 10 nm, des interactions supplémentaires, telles que les forces acido-basiques au sens de Lewis, et les forces de capillarité, interviennent. • Les forces de Lifshitz-Van der Waals Elles consistent en des interactions intermoléculaires non covalentes et non électrostatiques. Plusieurs interactions sont à prendre en compte pour décrire ces forces : 9 les interactions entre dipôles permanents ou forces d'orientation décrites par Keesom, 9 les interactions entre un dipôle permanent et un dipôle induit ou forces d'induction décrites par Debye, 9 et les interactions entre un dipôle fluctuant et un dipôle induit ou forces de dispersion décrites par London (Van Oss, 1996). • Les forces électrostatiques Il existe deux types de forces électrostatiques, celles induites par la charge électrique de la particule ou de la surface, appelées forces images ou coulombiennes, et les forces de double-couche dues à la différence de potentiels entre les surfaces en contact. Toutefois, ces forces sont négligeables devant les - 38 - interactions de Van der Waals notamment pour les particules inférieures à 50 µm (Bowling, 1988). • Les forces de capillarité L’adhérence d’un aérosol augmente avec l’humidité relative de l’air ambiant, ce phénomène ne devenant appréciable que lorsque l’humidité relative est supérieure à 60-70%. (Renoux et Boulaud, 1998). Ceci est dû à l’apparition d’un film, par condensation capillaire, entre la surface et la particule, se traduisant par l’augmentation de l’attraction entre les deux corps. • Interactions acido-basiques au sens de Lewis Elles correspondent aux interactions existant entre un accepteur et un donneur de doublet d’électrons. Parmi ces interactions figurent la liaison hydrogène. • Les interactions hydrophobes En 1996, van Oss les définit comme étant des interactions entre deux molécules ayant plus d’affinité l’une pour l’autre que pour l’eau. Des travaux réalisés par O’Shea (1991), traitant de l’adhérence de Candida sur une surface en verre (titanate de baryum), conduisent l’auteur à évaluer la contribution des interactions électrostatiques dans ce phénomène. L’évaluation du potentiel de chaque des 2 surfaces inerte et biologique met en évidence leur électronégativité dans les conditions opératoires. D’après ces mesures, il devrait y avoir répulsion entre les deux surfaces si les interactions électrostatiques étaient les forces dominantes, qui dans ce cas sont négligeables par rapport aux forces électrodynamiques ou au caractère hydrophobe des surfaces testés. Cette première étape peut également être considérée selon un modèle thermodynamique. Il y aura adhésion des micro-organismes aux surfaces si la variation d'énergie libre du système constitué par le microorganisme, le solide et le fluide ( ∆Fadh ) est négative. Dans cette approche, l'existence de récepteurs spécifiques est négligée et la présence de charges électriques superficielles n'est pas directement prise en compte. Cette variation d'énergie libre peut être calculée : ∆Fadh = γ SM − γ SF − γ MF où γ est l'énergie libre inter faciale; S : le Solide, M : le Micro-organisme fongique, F : le Fluide environnant (air ou liquide). Les différentes énergies interfaciales intervenant - 39 - dans cette équation n’étant pas directement accessibles, de nombreuses théories ont été proposées pour les évaluer, à partir, par exemple des mesures d'angles de contact avec des liquides de tensions de surfaces connues (Bellon-Fontaine, 1986; Bellon-Fontaine et al., 1990; Bellon-Fontaine et Cerf, 1991; Gauthier et Isoard, 1989 ; BoulangePettermann, 1993; 1996; Boulange-Pettermann et al., 1994, ; Dubois-Brissonnet et Leveseau, 1994). Figure 18 : Prévision thermodynamique de l'adhésion La seconde étape consiste en la consolidation de la position du microorganisme. Il s’agit d’une fixation irréversible due à des exopolymères synthétisés par les microorganismes eux-mêmes. Dans le cas des fongiques, cette phase de fixation résulte de l’activation métabolique et de la synthèse protéinique (Osherov et May, 2001). 2. Facteurs influençant l’adhésion On distingue les facteurs liés aux micro-organismes et aux supports solides. Les propriétés physico-chimiques des surfaces biologiques résultent de leur constitution pariétale et de leur métabolisme. Elles leurs confèrent des propriétés électriques et un caractère hydrophobe ou hydrophile. En 1991, O’Shea démontre le caractère électronégatif de la paroi cellulaire fongique dans diverses conditions environnementales. D’après les expériences réalisées sur Candida pour des pH compris entre 3 et 10, ce potentiel électrostatique est fortement influencé par les conditions de culture et les conditions environnementales, Hazen (1990), rappelle le caractère hydrophobe des conidies d’Aspergillus, et notamment d’Aspergillus niger. Cette propriété est attribuée à la constitution de la paroi externe et notamment à la présence, à sa surface, d’une couche anamorphe dont la composition chimique n’a pu être déterminée jusque là. La présence d’une telle couche, - 40 - composée d’un complexe de glycoprotéines et de lipides, a également été mise en évidence pour le dermatophyte Trichophyton mentagrophytes. La concentration cellulaire peut également jouer un rôle dans l'adhésion (forces cohésives ayant pour origine principale les forces de Van der Waals). Le temps de contact semble aussi être un paramètre important. En effet, il existe, un temps optimal pour une adhésion maximale (Busscher et al., 1986). Au même titre que les micro-organismes, les charges électriques et le caractère hydrophile/hydrophobe du support jouent un rôle clef dans le processus d'adhésion. Ainsi un matériau hydrophobe tel que le polystyrène, fixerait davantage les microorganismes à caractère hydrophobe, les matériaux hydrophiles tels que le verre et certaines pièces plastiques fixeraient plus les micro-organismes hydrophiles. Cependant, les propriétés physico-chimiques des matériaux peuvent évoluer selon les conditions du milieu. De plus, le nettoyage d'une surface est susceptible de faire varier son hydrophobicité (Boulange-Pettermann, 1993). L’encrassement de la surface, l’adsorption de composés organiques (protéines), entraîne des modifications de ses propriétés physico-chimiques (énergie libre, charge de surface) (Pratt Terpstra et al., 1987). Dans ce cas, les interactions responsables de l’adhésion fongique n’ont plus lieu entre le support et la moisissure mais entre le microorganisme et le film organique adsorbé par le matériau. Outre les propriétés physico-chimiques, il est généralement admis que la rugosité des supports joue un rôle dans l'adhésion. Une surface rugueuse favorisera le piégeage des micro-organismes. Cependant il est difficile d'établir une relation directe entre la mesure de rugosité moyenne d'une surface et le taux d'adhésion au support (Garry, 1997). La caractérisation de la topographie de la surface et notamment, l'observation d'éventuelles anfractuosités, est un critère qui doit venir compléter la mesure de rugosité moyenne. 3. Réentrainement des particules fongiques Ce phénomène est essentiellement dû aux flux aérauliques (forces de portance et de traînée). Du fait des mouvements de l'air, la particule est soumise à une force d'entraînement dont l'action s'oppose aux forces d'adhésion. Sous l'action de la force aérodynamique, la particule peut rouler ou glisser sur la paroi, se logeant dans un endroit où la force d'adhésion est plus faible ou acquérant une énergie cinétique suffisante (correspondant à la vitesse critique) pour être arrachée de la surface. On constate - 41 - généralement que la vitesse critique est inversement proportionnelle à la taille des particules : plus cette dernière est fine, plus il est difficile de l'arracher par un flux d'air (Alloul-Marmor, 2002). En 1991, Pasanen étudie le nombre de conidies d'Aspergillus fumigatus, de Penicillium sp. et de Cladosporium sp. mises en suspension à partir des structures conidiogènes, selon la vitesse et l'humidité de l'air (Tableau XV). Vitesse (m/s) H.R (%) Aspergillus fumigatus Penicillium sp. Cladosporium sp 0.5 12 - 18 100 600 <25 0.5 37 - 42 200 100 <25 0.5 71 - 73 < 25 400 <25 1 12 - 18 700 1800 25 1 37 - 42 500 16000 <10 1 71 - 73 200 400 <10 1.5 12 - 18 1000 52100 25 1.5 37 - 42 2600 1900 <10 1.5 71 - 73 200 1100 200 Tableau XV : Nombre de spores fongiques remises en suspension selon le taux d’humidité et la vitesse de l’air (d’après Pasanen et al.,1991) Cette étude indique que la libération des spores à partir d'un substrat est contrôlée par la vitesse et l'humidité de l'air et qu'elle dépend de l'espèce fongique. C. METROLOGIE ET TECHNIQUES DE LABORATOIRE 1. Principes et techniques d’aérosolisation Les aérosols sont généralement produits selon 2 modes : dispersion liquide et sèche. Dans les études nécessitant la production d’un aérosol fongique, les auteurs utilisent indifféremment les deux modes de dispersion. Les appareils utilisés sont listés dans le Tableau XVI. - 42 - DISPERSION LIQUIDE Générateur Microrganismes aérosolisés Références bibliographiques Générateur à 2 flux d’air Aspergillus fumigatus; A. versicolor Cladosporium cladosporioides Penicillium brevicompactum; P. melinii Reponen et al., 1996 Nébuliseur ultrasonique Aspergillus niger Nakamura, 1987 Simple glass atomiser Penicillium expansum Griffiths et al., 1996 Aspergillus fumigatus; A. versicolor Cladosporium cladosporioides Penicillium brevicompactum; P. melinii Aspergillus fumigatus; Cladosporium sp.; Penicillium sp. Reponen et al., 1996 Penicillium brevicompactum Reponen et al., 1997 Penicillium citrinum Lin et Li, 1998 Stachybotrys chartarum Sorenson et al., 1987 Penicillium chrysogenum Buttner et Stetzenbach, 1993 Penicillium brevicompactum Reponen et al, 1997 DISPERSION SECHE Disperser « tube agar » Vibrations acoustiques (Pitt 3). Disperseur de poudre commercial (Amherst Process Instruments) Pasanen et al., 1991 Tableau XVI : Générateurs d’aérosols fongiques a) Dispersion humide : barbotage et nébuliseurs ultrasoniques Le principe du barbotage (Figure 19) repose sur l’éclatement de bulles en surface d’un liquide. Les gouttelettes formées sont véhiculées par le courant d’air jusqu’à la sortie du générateur. Les aérosols produits par ce type de générateurs ont des diamètres aérodynamiques compris entre 0,73 et 5,1 µm. L’absence de reflux des micro-organismes dans ce générateur, réduit considérablement le stress lié classiquement à la phase de production des aérosols biologiques en particulier lors de l’utilisation d’atomiseur de type Collison (Ulevicius et al., 1997). - 43 - Figure 19 : Générateur d’aérosol à partir de suspension liquide (A.) séchage au niveau de la génération (générateur à 2 flux d’air). (B.) séchage au niveau de la sortie (générateur à 1 flux d’air) (Ulevicius et al., 1997). Dans les nébuliseurs ultrasoniques, l’énergie nécessaire pour atomiser un liquide est obtenue à l’aide d’un cristal piézoélectrique (Figure 20). Dans ce type d’appareillage, le flux d’air est utilisé comme vecteur. L’application d’un courant électrique à un cristal piézoélectrique engendre une vibration de fréquence comprise entre 1 et 7 MHz (Grundy et al., 1990), ce qui provoque l’apparition d’une fontaine à la surface du liquide, initiant ainsi la formation de l’aérosol. Figure 20 : Schéma de principe d’un générateur d'aérosols à ultrasons (Marple, 1980). Le diamètre de la goutte peut être calculé à l’aide de la relation : 8πγ d = ρF 1/ 3 où d est le diamètre médian de la particule (en m), γ la tension de surface (en N.m-1), ρ la densité du liquide (en kg.m-3), et F la fréquence d’excitation (en Hz). Les aérosols obtenus par ce procédé ont, généralement, un diamètre moyen en masse compris entre 6 et 9 µm pour un σg de 1,4 à 1,7 (John, 1993). - 44 - Dans le cadre d’une expérience menée par l’équipe de Grundy, il a été démontré que ce type d’atomiseur permet de générer des micro-organismes viables. Cependant, la taille réduite des particules liquides obtenues avec des fréquences élevées (calcul théorique pour 7 MHz, diamètre de 1,1 µm) suppose que les micro-organismes de dimension supérieure ne peuvent être transportés par ces micro-gouttelettes (Grundy et al., 1990). b) Dispersion sèche La dispersion de particules inertes (fibres, poussières…) utilise traditionnellement l’action abrasive d’un racloir sur un support solide; les particules libérées sont alors entraînées sous l’action d’un flux d’air. La production d’aérosols biologiques peut utiliser le même principe, un conditionnement préalable du matériel biologique étant néanmoins nécessaire dans ce cas (lyophilisation, microencapsulation). Ce prétraitement peut cependant s’avérer létal pour de nombreux microorganismes fragiles. Les moisissures se prêtent plus facilement à ce mode de dissémination, dans la mesure où elles peuvent être directement atomisées à partir de leur milieu de culture. • Dispersion de poudre par vibration ou agitation Ce système nécessite d’extraire les microorganismes de leur milieu de culture. Ils sont ensuite introduits sous forme de lyophilisats de bactéries ou de moisissures dans un récipient ou un sillon. Le « Pitt3 » utilisé dans différentes études est un exemple de ce type de générateur (Sorenson et al., 1987; Buttner et Stetzenbach, 1993). • Le «disperser tube-agar» (Figure 21) L’aérosolisation se fait directement à partir d’une culture microbienne balayée par un flux d’air stérile. La forte turbulence engendrée entraîne la plus grande partie des particules biologiques, mais très rapidement le milieu s’épuise, limitant ainsi une éventuelle production continue d’aérosols. Figure 21 : Disperseur à tube d’agar (Reponen et al., 1997). - 45 - De plus, ce type de système engendre de nombreux agrégats qu’il est possible de dissocier par l’utilisation d’un orifice sonique calibré (Reponen et al., 1996). 2. Techniques de collecte Les méthodes de prélèvement sont basées sur l’inertie des particules (sédimentation, impaction) et la filtration (interception, impaction): La méthode basée sur la sédimentation, consiste à récupérer les particules sur une surface adhésive (scotch ou boite de Pétri contenant un milieu nutritif). Il s’agit d’un prélèvement passif, non volumétrique, qui limite la collecte aux particules sédimentables. L’impaction utilise les propriétés d’inertie des particules. Elle peut se faire soit sur milieu solide (gélose), soit en milieu liquide. L’impaction sur gélose permet d’estimer la concentration de microorganismes cultivables aérosolisés (UFC/m3 d’air prélevé). L’air est aspiré et accéléré par passage au travers de trous (impacteurs à crible type Andersen). Les particules entraînées par le flux d’air peuvent, suivant leur inertie, dévier des lignes de courant et venir s’impacter sur une surface placée sous la plaque perforée. L’avantage majeur de cette technique est sa simplicité d’utilisation. En revanche, le stress occasionné lors du prélèvement (vitesse d’impaction, dessèchement de la gélose) peut altérer la viabilité des microorganismes et conduire à une sous-estimation de leurs concentrations. Lors de l’impaction en milieu liquide, l’air, aspiré au travers d’un tube capillaire est propulsé à la surface d’un milieu liquide. Cette technique présente l’avantage du choix du milieu de récupération (eau, tampons, bouillon de culture), de la mise en œuvre de différentes méthodes d’analyses (culture, microscopie, tests biochimiques et immunologiques) et de pouvoir travailler en ambiances fortement contaminées. L’inconvénient est l’évaporation du milieu liquide, et le réentraînement des fines particules lors du prélèvement. La filtration est largement utilisée pour mesurer les aérosols. La collecte des particules repose sur l’action simultanée de plusieurs mécanismes : impaction inertielle, interception, diffusion, dont l’importance relative dépend de la dimension des particules et de la vitesse de l’écoulement. Ainsi, dans le cas d’une particule de 5 µm, les deux phénomènes intervenant sont l’interception et l’impaction. - 46 - L’air est aspiré au travers d’un média filtrant qui assure la séparation des aérosols du fluide vecteur. Le choix du média filtrant (porosité, matériau) dépend de la nature des particules échantillonnées (formes, taille) et des analyses ultérieures. Généralement, pour l’échantillonnage des bioaérosols, le support filtrant consiste en une membrane de polycarbonate dont les pores ont un diamètre de 0,2 ou 0,45 µm. En 2002, Willeke développe un précipitateur électrostatique adapté à la collecte des microorganismes aéroportés. La collecte des particules repose alors sur leurs charges électriques, qu'elles soient produites naturellement ou artificiellement. Dans un précipitateur électrostatique conventionnel, l'aérosol, une fois chargé grâce à un ioniseur d'air, est soumis à un champ électrostatique. Les particules, par passage au travers d'un champ électrostatique, vont, selon leur charge, suivre ou quitter le flux d'air porteur et venir s'impacter sur une surface de collection. Nous avons répertorié, dans le Tableau XVII, les techniques de prélèvement les plus couramment utilisées dans le cadre de la collecte des aérosols fongiques. - 47 - Principe Exemple de dispositif Analyses possibles Mise en culture : Analyses microscopiques Analyses biochimiques Tests immunologiques Mise en culture Analyses microscopiques Analyses biochimiques Tests immunologiques Débit d’air : 0.1 – 55 l/min Durée d’échantillonnage : de quelques minutes à plusieurs heures Débit d’air : 1-1000l/min. Durée d’échantillonnage plusieurs heures Mise en culture Analyses microscopiques Analyses biochimiques Tests immunologiques Débit d’air : 40 – 1000 l/min Durée d’échantillonnage : de quelques minutes à plusieurs heures Débit d’air : 2 – 180 l/min Mise en culture Durée d’échantillonnage : de Analyses microscopiques quelques minutes à plusieurs heures, voire plus d’une semaine (Spore trap). Capacité d’échantillonnage - 48 - Tableau XVII : Echantillonneurs d’aérosols fongiques (Crook, 1995 ; Pasanen, 2000 ; NF EN 13098, 2000) - Burkard, - Rotorod, - Andersen (de 1 à 6 étages), - SAS, - Casella, - May, - Sierra Marple, - Hirst spore trap Echantillonneurs Centrifugation des particules - Reuter Centrifugal Sampler centrifuges conduisant à leur impaction sur - Cyclone Aerojet une surface de collection ou directement sur les parois de l’appareil Impinger Combinaison de l’impaction sur - Echantillonneur Shipe (l’air entre dans la une surface et de la dispersion qui chambre avec un certain angle) s’ensuit dans un milieu liquide - AGI-30 - Micro et mini-impingers - Impingers à multi-étages Echantillonneur à Diffusion, interception, et Filtres de gélatine, PTFE, PVC, ester de filtre impaction inertielle cellulose, ou polycarbonate Impacteurs à Impaction sur : crible ou à fente - milieux de culture - surface adhésive, - lame de verre Echantillonneur 49