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Trame du discours du préfet maritime à la conférence « Safer Seas »
1. Réflexions générales sur les porte-conteneurs
La pointe Bretagne est particulièrement exposée au trafic maritime avec 55 000 navires
empruntant chaque année le dispositif de séparation du trafic (DST) d’Ouessant dont 10 000
sont des porte-conteneurs. Ce sont au total près de 30 000 millions de conteneurs dont environ
15% contiennent des produits dangereux qui transitent chaque année devant nos côtes.
La flotte mondiale de porte conteneurs compte aujourd’hui près d’un tiers de navires pouvant
accueillir plus de 6000 EVP. Nous sommes actuellement dans une course au gigantisme avec
des super porte-conteneurs en construction de 13.000 EVP, et on parle déjà de Mega porteconteneurs type Malacca Max de 18.000 EVP.
Le risque inhérent à la taille de ces bateaux est encore amplifié par l’augmentation de la
vitesse des navires qui est passée de 21 à 26 nœuds.
La perte de conteneurs en mer (entre 650 et 2500 par an selon les sources) représente un
véritable danger pour la navigation et l’environnement. Depuis 2005, une dizaine d’opérations
de récupération de conteneurs ont été conduites en Atlantique, notamment en février 2006 à la
suite de la perte de 182 conteneurs dans le Golfe de Gascogne par 4 navires différents.
Les rapports d’enquête relatifs aux pertes de cargaisons en mer soulignent régulièrement :
- un défaut d’entretien des conteneurs par les propriétaires ;
- un laxisme des armateurs en matière d’acceptation des conteneurs ;
- la présence de nombreux conteneurs en surcharge (18%) ;
- un nombre de conteneurs en pontée supérieur à celui en cale ;
- une usure et des déformations des verrous de verrouillage ;
- des nombreuses chutes de verrous automatiques T4 ;
- un système de saisine insuffisant pour faire face à des mers formées.
Les contrôles par l’Etat du port dans le cadre du Mémorandum de Paris font état de 10% de
saisine et de 30 % de matériel non conformes à la réglementation.
2. Retour sur le MSC Napoli
Contexte : 18 janvier 2007, le MSC Napoli, porte-conteneurs de 275 m de long avec 2400
boîtes à son bord (dont 150 contiennent des produits dangereux) émet un appel de détresse à
55 nautiques au large d’Ouessant à la suite de l’apparition de fissures au niveau de sa coque.
-
phase 1 : gestion de l’opération de sauvetage au travers d’une coopération immédiate
entre le CROSS Corsen et le MRCC Falmouth.
L’équipage de 26 personnes, qui avait pris place dans le canot de sauvetage, est
hélitreuillé par les 3 hélicoptères Sea King britanniques. La France dépêche sur zone 2
Super Frelon, 1 Falcon et des moyens nautiques, l’Abeille Bourbon de Brest puis
l’Abeille Liberté en provenance de Cherbourg, et les navires antipollution Argonaute
et Alcyon.
-
phase 2 : analyse de la situation du navire
o appel de détresse vers le CROSS Corsen le 18 janvier à 11h40
o Mise en demeure de l’armateur le 18 janvier à 13h00 ; l’armateur passe alors
un contrat d’assistance 14h20 avec les sociétés SMIT et Abeilles International
Pour envoyer l’équipe d’évaluation et d’intervention (EEI) dans les meilleures
conditions, il a été décidé :
de positionner l’Abeille Bourbon à proximité du Napoli pour les
premiers éléments d’analyse et pour disposer d’un moyen de
récupération du personnel en cas d’évacuation d’urgence ;
de conserver en permanence un hélicoptère sur zone pour pouvoir
l’évacuer sans délai ;
o Equipe d’évaluation et d’intervention à bord à 15h30 permettant le passage de
la remorque à 18h20
-
phase 3 : coopération franco-britannique : activation du Manche Plan et choix du lieu
de refuge
o L’analyse destinée à choisir un port refuge est facilitée par l’existence d’un
plan d’accueil des navires en difficulté. Il apparaît rapidement que les sites
français sont inadaptés en raison de la taille et du tirant d’eau du Napoli, et des
conditions météo ;
o L’analyse conjointe franco-britannique aboutit à la décision d’échouer le MSC
Napoli dans la baie de Lyme. Le scénario est alors le suivant :
Vendredi 19 : passage en zone britannique à 16h00
Activation du Manche Plan par précaution à 17h10
Echouement samedi 20 en matinée
Au bilan, cette opération :
-
est un succès
est la concrétisation des excellentes relations franco-britannique à tous les niveaux
(MRCC Falmouth/CROSS Corsen ; Premar/Sosrep , Moyens sur zone)
est la preuve de la bonne adaptation de notre dispositif d’alerte et d’intervention
est la première mise en œuvre du plan d’accueil des navires en difficulté
a souligné l’intérêt de l’échouement (souvent la moins mauvaise solution pour éviter
une catastrophe écologique de grande ampleur)
Toutefois, cette affaire a mis en évidence de nombreuses difficultés :
-
accès à la connaissance de la cargaison (une nuit de travail) ;
adaptation des mesures de sécurité vis à vis des matières dangereuses ;
identification et localisation des conteneurs (logiciel non compatible entre les
différents chargeurs) ;
architecture navale (calcul des risques de rupture de la coque) ;
analyse des risques.
3. Conclusion
Devant ces difficultés, il est nécessaire de s’interroger sur plusieurs points :
-
limitation de la taille des navires ;
limitation de la vitesse des navires ;
-
renforcement du dispositif juridique clarifiant les responsabilités des acteurs du
transport maritime et le statut juridique du conteneur ;
obligation du pilotage hauturier dans les eaux resserrées pour les très grands navires ;
création au niveau de l’EMSA d’un réseau d’experts européens spécialisés en produits
dangereux, et du passage de contrats de pré affrètement relatifs aux moyens industriels
de gestion des porte-conteneurs échoués ;
formation et taille des équipages.