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CATULLE da mi basia mille, deinde centum, Donne moi mille baisers, ensuite cent dein mille altera, dein secunda centum, ensuite mille autres, ensuite une deuxième fois cent, deinde usque altera mille, deinde centum. Ensuite encore mille autres, ensuite cent. (10) dein, cum milia multa fecerimus, Ensuite lorsque nous aurons fait de nombreux milliers bisous conturbabimus illa, ne sciamus, aut ne quis malus inuidere possit, cum tantum sciat esse basiorum. HORACE Odes, livre I, 11 Ne cherche pas à connaître, il est défendu de le savoir, quelle destinée nous ont faite les Dieux, à toi et à moi, ô Leuconoé; et n'interroge pas les Nombres Babyloniens. Combien le mieux est de se résigner, quoi qu'il arrive! Que Jupiter t'accorde plusieurs hivers, ou que celui-ci soit le dernier [1,11,1] Tu ne quaesieris (scire nefas) quem mihi, finem di dederint, Leuconoe, nec Babylonios temptaris numeros. Vt melius quicquid erit pati! Seu pluris hiemes seu tribuit Iuppiter ultimam, [1,11,5] qui heurte maintenant la mer Tyrrhénienne contre les rochers immuables, [1,11,5] quae nunc oppositis debilitat pumicibus sois sage, filtre tes vins et mesure tes longues espérances à la brièveté de la vie. Pendant que nous parlons, le temps jaloux s'enfuit. Cueille le jour, et ne crois pas Tyrrhenum, sapias, uina liques et spatio breui au lendemain. spem longam reseces. Dum loquimur, fugerit inu aetas: carpe diem, quam minimum credula poste TIBULLE ELEGIE 8 [1,8,1] [1,8,1] Ce n'est pas moi qui puis me méprendre sur un signe d'amour ou sur de Non ego celari possum, quid nutus amantis tendres paroles prononcées d'une voix douce. Je n'ai besoin ni des sorts, ni des fibres, interprètes de la volonté des dieux, ni de l'avenir révélé par le Quidue ferant miti lenia uerba sono. 5 chant d'un oiseau. C'est Vénus elle-même, qui, en me liant les bras derrière le dos par un noeud magique, m'a instruit, non sans que j'aie reçu beaucoup Nec mihi sunt sortes nec conscia fibra deorum, de blessures. Cesse de dissimuler: le Dieu brûle plus cruellement ceux qu'il voit succomber à regret. Que te sert d'avoir pris Praecinit euentus nec mihi cantus auis: 5 Ipsa Venus magico religatum bracchia nodo Perdocuit multis non sine uerberibus. Desine dissimulare: deus crudelius urit, Quos uidet inuitos subcubuisse sibi. Quid tibi nunc molles prodest coluisse capillos [1,8,10] soin de tes souples cheveux et d'avoir si souvent varié la façon de te [1,8,20] Cantus et iratae detinet anguis iter, coiffer? D'avoir orné tes joues d'un fard brillant? D'avoir fait arrondir tes ongles par la main savante d'un artiste? C'est en vain désormais que tu changes de vêtements et de tuniques, c'est en vain qu'une chaussure 15 étroite comprime ton pied. Elle te plaît, quoiqu'elle soit venue à toi sans parer son visage, et qu'elle n'ait point lentement arrangé avec art sa chevelure brillante. Est-ce qu'avec des formules, avec des herbes qui font pâlir, une vieille t'a jeté un sort dans le silence de la nuit? Cantus et e curru Lunam deducere temptat Et faceret, si non aera repulsa sonent. Quid queror heu misero carmen nocuisse, quid herba Forma nihil magicis utitur auxiliis: 25 Sed corpus tetigisse nocet, sed longa dedisse Oscula, sed femori conseruisse femur. Nec tu difficilis puero tamen esse memento: Persequitur poenis tristia facta Venus. Munera ne poscas: det munera canus amator, 1,8,20] L'incantation attire la moisson du champ voisin, l'incantation [1,8,20] Cantus et iratae detinet anguis iter, suspend la marche du serpent irrité, l'incantation essaye d'arracher la Lune de son char et y réussirait, sans les coups frappés sur le bronze. Pourquoi Cantus et e curru Lunam deducere temptat me plaindre, hélas! qu'une formule, que des herbes aient causé mon malheur? La beauté n'use point des secours de la magie. 25 Ton malheur, c'est d'avoir touché son corps, c'est de lui avoir donné de Et faceret, si non aera repulsa sonent. longs baisers, c'est d'avoir enlacé ta cuisse avec sa cuisse. Et toi, pense cependant à n'être point cruelle à ce garçon. Vénus poursuit de ses peines les mauvaises actions. Ne réclame pas de présents : c'est à l'amoureux Quid queror heu misero carmen nocuisse, quid herba Forma nihil magicis utitur auxiliis: 25 Sed corpus tetigisse nocet, sed longa dedisse Oscula, sed femori conseruisse femur. Nec tu difficilis puero tamen esse memento: [1,8,30] en cheveux blancs de donner des présents, pour que tu réchauffes [1,8,30] Ut foueat molli frigida membra sinu. ses membres froids contre ton sein tendre. Plus précieux que l'or est le jeune homme dont brille le visage lisse, et dont une barbe dure ne pique pas Carior est auro iuuenis, cui leuia fulgent dans l'étreinte. Suspends à ses épaules tes bras éblouissants, 35 et méprise l'opulence des rois. Vénus s'ingéniera pour te faire coucher secrètement avec ce garçon, qui, tout gonflé d'amour, te serrera sur sa jeune poitrine, et qui halètera en te donnant des baisers mouillés, où les langues s'entrechoquent et en marquant ton cou de la trace de ses dents. Ni les pierres ni les gemmes ne Ora nec amplexus aspera barba terit. Huic tu candentes umero subpone lacertos, Et regum magnae despiciantur opes. 35 At Venus inuenit puero concumbere furtim, Dum timet et teneros conserit usque sinus, Et dare anhelanti pugnantibus umida linguis Oscula et in collo figere dente notas. Non lapis hanc gemmaeque iuuant, quae frigore sola [1,8,40] siéent à celle qui, par le froid, doit dormir seule, et ne doit exciter le 1,8,40] Dormiat et nulli sit cupienda uiro. désir d'aucun homme. Hélas! il est trop tard pour rappeler l'amour, trop tard pour la jeunesse, quand la vieillesse chenue flétrit une tête âgée. Alors Heu sero reuocatur amor seroque iuuentas, on regrette sa beauté; alors, pour dissimuler les années, on se teint 45 la chevelure avec l'écorce verte de la noix. Alors on a soin d'extirper ses Cum uetus infecit cana senecta caput. cheveux blancs et, en effaçant ses rides, de se refaire un jeune visage. Pour toi, tandis que ton printemps est dans sa fleur, hâte-toi d'en jouir : il ne tarde pas à s'enfuir. Et ne torture pas Marathus : quelle Tum studium formae est: coma tum mutatur, ut annos Dissimulet uiridi cortice tincta nucis; 45 Tollere tum cura est albos a stirpe capillos Et faciem dempta pelle referre nouam. At tu, dum primi floret tibi temporis aetas, Utere: non tardo labitur illa pede. Neu Marathum torque: puero quae gloria uicto est [1,8,50] gloire y a-t-il à vaincre un enfant? Réserve tes duretés, jeune fille, pour les vieillards caducs. Épargne, je t'en conjure, un jouvenceau. Ce n'est [1,8,50] In ueteres esto dura, puella, senes. pas la maladie, mais c'est l'excès d'amour qui a jauni son teint. Le malheureux! que de fois, en ton absence n'a-t-il point exhalé des plaintes amères et tout mouillé de ses torrents de 55 larmes? "Pourquoi me dédaignes-tu?" dit-il. "Je pourrais triompher de tes gardiens. Le Dieu lui-même a donné aux amants la faculté de tromper. Je connais la Vénus furtive; je sais respirer tout doucement, et ravir des baisers sans bruit. Je puis, même en pleine nuit, me Parce precor tenero: non illi sontica causa est, Sed nimius luto corpora tingit amor. Vel miser absenti maestas quam saepe querelas Conicit, et lacrimis omnia plena madent! 55 'Quid me spernis?' ait. 'poterat custodia uinci: Ipse dedit cupidis fallere posse deus. Nota uenus furtiua mihi est, ut lenis agatur Spiritus, ut nec dent oscula rapta sonum; Et possum media quamuis obrepere nocte PRO PERCE Elégies, livre II, 15 [2,15] XV. PROPERCE RACONTE SES PLAISIRS. O RAVISSEMENT ! Ô nuit voluptueuse ! ô lit mille fois heureux de mes délices ! que de mots échangés à la clarté d'un dernier flambeau, et quels ébats, quand [2,15] XV. 1 O me felicem! o nox mihi candida! et o tu sa lumière eut disparu ! lectule deliciis facte beate meis! Tantôt elle lutta contre moi le sein découvert, ou elle s'enveloppa contre mes quam multa apposita narramus uerba lucerna, attaques d'un dernier vêtement ; tantôt elle ouvrit d'un baiser mes yeux appesantis par la fatigue et le sommeil, et elle me reprocha ma paresse. Comme quantaque sublato lumine rixa fuit! nos bras s'entrelaçaient en mille noeuds ! comme mes baisers s'arrêtaient sur ses lèvres ! Mais, hélas ! que l'obscurité corrompt les plaisirs et les jeux de l'amour ! Si tu l'ignores, Cynthie, les yeux sont nos guides dans nos transports. Pâris s'enivra, dit-on, des plus doux feux, lorsqu'il vit Hélène sans voile sortir du lit de Ménélas, et Endymion charma par sa nudité même la chaste Diane, qui vint reposer nue auprès de son amant. Si tu persistes à voiler tes attraits sur ta couche, je déchirerai ce lin odieux, et tu éprouveras mes fureurs ; et même, si la colère m'emporte, tu montreras à ta mère les traces qu'elle laisserait sur tes bras. Livre sans crainte à nos jeux ces globes charmants qui se soutiennent d'eux-mêmes, et laisse une honte déplacée à celle qui fut déjà mère. Que nos yeux s'enivrent d'amour, tandis que les destins le permettent : une nuit éternelle s'approche, et le jour que l'on perd ne reparaîtra plus. Oh ! si tu voulais nous joindre l'un à l'autre par des noeuds qu'aucun jour ne saurait rompre ! Prenons pour exemple ces tourterelles, couple heureux que la tendresse unit. On croit qu'un amour violent atteint bientôt son terme : quelle erreur ! l'amour, 5 nam modo nudatis mecum est luctata papillis, interdum tunica duxit operta moram. illa meos somno lapsos patefecit ocellos ore suo et dixit 'Sicine, lente, iaces?' quam uario amplexu mutamus bracchia! quantum 10 oscula sunt labris nostra morata tuis! non iuuat in caeco Venerem corrumpere motu: si nescis, oculi sunt in amore duces. s'il est réel, ne sait jamais finir. La terre trompera le laboureur par ses productions capricieuses ; le Soleil, sur des chevaux noirs, nous ramènera les ténèbres ; l'eau des fleuves voudra remonter vers sa source, et le poisson périra sur le sable aride de l'Océan desséché, avant que je transporte sur un autre objet les feux qui me consument. Mort ou vivant, je veux être à Cynthie. ipse Paris nuda fertur periisse Lacaena, cum Menelaeo surgeret e thalamo; 15 nudus et Endymion Phoebi cepisse sororem Si elle consentait encore à de semblables nuits, une année de vie serait trop longue ; si elle les prodiguait, je deviendrais immortel clans ses bras ; que dis-je dicitur et nudae concubuisse deae. ? il n'en faut qu'une pour élever l'homme au rang des dieux. Si tous les mortels ne voulaient vivre que pour aimer, ou pour se livrer au repos quod si pertendens animo uestita cubaris, dans une douce ivresse, on ne verrait plus de glaives homicides ni de belliqueux vaisseaux ; les mers d'Actium ne rouleraient point les os de nos guerriers, et Rome, trop souvent ébranlée par ses triomphes mêmes, ne se fatiguerait plus à pleurer sur ses fils. Pour moi, la postérité m'accordera du moins une gloire, c'est que jamais nos festins n'ont offensé un dieu. Seulement, ô ma bien-aimée, n'abandonne point, quand tu le peux, les plaisirs de la vie ! Tu donnerais des millions de baisers, que ce serait peu encore ; car, hélas ! semblable à la feuille qui tombe d'une couronne desséchée et qui surnage au hasard dans nos coupes, l'amant, qui se livre aujourd'hui à toute l'ardeur de son amour, verra dès demain peut-être se fermer devant lui la carrière. scissa ueste meas experiere manus: quin etiam, si me ulterius prouexerit ira, 20 ostendes matri bracchia laesa tuae. necdum inclinatae prohibent te ludere mammae: uiderit haec, si quam iam peperisse pudet. dum nos fata sinunt, oculos satiemus amore: nox tibi longa uenit, nec reditura dies. 25 atque utinam haerentis sic nos uincire catena uelles, ut numquam solueret ulla dies! exemplo iunctae tibi sint in amore columbae, masculus et totum femina coniugium. errat, qui finem uesani quaerit amoris: 30 uerus amor nullum nouit habere modum. terra prius falso partu deludet arantis, et citius nigros Sol agitabit equos, fluminaque ad caput incipient reuocare liquores, aridus et sicco gurgite piscis erit, 35 quam possim nostros alio transferre dolores: huius ero uiuus, mortuus huius ero. quod mihi secum talis concedere noctes illa uelit, uitae longus et annus erit. si dabit haec multas, fiam immortalis in illis: 40 nocte una quiuis uel deus esse potest. qualem si cuncti cuperent decurrere uitam et pressi multo membra iacerc mero, non ferrum crudele ncque esset bellica nauis, nec nostra Actiacum uerteret ossa mare, 45 nec totiens propriis circum oppugnata triumph lassa foret crinis solere Roma suos. haec certe merito poterunt laudare minores: laeserunt nullos pocula nostra deos. tu modo, dum lucet, fructum ne desere uitae! 50 omnia si dederis oscula, pauca dabis. ac ueluti folia arentis liquere corollas, quae passim calathis strata natare uides, sic nobis, qui nunc magnum spiramus amantes, forsitan includet crastina fata dies. Olivier de Magny (1529-1561) Vivons, Belle, vivons et suivons notre amour, De cent divers plaisirs bien heurant notre vie, Sans estimer en rien le soleil de l'envie, Qui du bonheur d'autrui se tourmente toujours. Le soleil s'en va et revient chaque jour : Mais depuis que la Mort notre vie a ravie, Et qu'une fois en bas notre ombre l'a suivie, Il ne faut plus, Maîtresse, espérer de retour. Joachim du Bellay (1522-1560), Les Regrets Vivons, Gordes, vivons, vivons, et pour le bruit Des vieillards, ne laissons à faire bonne chère, Vivons puisque la vie est si courte et si chère Et que même les rois n'en ont que l'usufruit. Le jour s'éteint au soir, et au matin reluit, Et les saisons refont leur course coutumière. Mais quand l'homme a perdu cette douce lumière, La mort lui fait dormir une éternelle nuit. Donc imiterons-nous le vivre d'une bête ? Non, mais devers le ciel levant toujours la tête, Goûterons quelquefois la douceur du plaisir, Celui vraiment est fol, qui changeant l'assurance Du bien qui est présent en douteuse espérance, Veut toujours contredire à son propre désir. Georges Brassens, Les amoureux des bancs publics, (1954) Les gens qui voient de travers Pensent que les bancs verts Qu'on voit sur les trottoirs Sont faits pour les impotents ou les ventripotents Mais c'est une absurdité Car à la vérité Ils sont là c'est notoire Pour accueillir quelque temps les amours débutants (Refrain) Les amoureux qui s'bécott'nt sur les bancs publics Bancs publics, bancs publics En s'foutant pas mal du regard oblique Des passants honnêtes Les amoureux qui s'bécott'nt sur les bancs publics Bancs publics, bancs publics En s'disant des "Je t'aime" pathétiques Ont des p'tit's gueul' bien sympatiques Ils se tiennent par la main Parlent du lendemain Du papier bleu d'azur Que revêtiront les murs de leur chambre à coucher Ils se voient déjà doucement Ell' cousant, lui fumant Dans un bien-être sûr Et choisissent les prénoms de leur premier bébé (Refrain) Quand la saint' famill' machin Croise sur son chemin Deux de ces malappris Ell' leur décoche hardiment des propos venimeux N'empêch' que tout' la famille Le pèr', la mèr', la fille Le fils, le Saint Esprit Voudrait bien de temps en temps pouvoir s'conduir' comme eux (Refrain) Quand les mois auront passé Quand seront apaisés Leurs beaux rêves flambants Quand leur ciel se couvrira de gros nuages lourds Ils s'apercevront émus Qu' c'est au hasard des rues Sur un d'ces fameux bancs Qu'ils ont vécu le meilleur morceau de leur amour (Refrain) GRAND CORPS MALADE, MIDI 20 1. Je suis né tôt ce matin, juste avant que le soleil comprenne 2. Qu'il va falloir qu'il se lève et qu'il prenne son petit crème 3. Je suis né tôt ce matin, entouré de plein de gens bien 4. Qui me regardent un peu chelou et qui m'appellent Fabien 5. Quand le soleil apparaît j'essaie de réaliser ce qu'il se passe 6. Je tente de comprendre le temps et j'analyse mon espace 7. Il est 7 heures du mat' sur l'horloge de mon existence 8. Je regarde la petite aiguille et j'imagine son importance 9. Pas de temps à perdre ce matin, je commence par l'alphabet 10. Y'a plein de choses à apprendre si tu veux pas finir tebê 11. C'est sûr, je serai pas un génie mais ça va y'a pire 12. Sur les coups de 7 heures et demie j'ai appris à lire et à écrire 13. La journée commence bien, il fait beau et je suis content 14. Je reçois plein d'affection et je comprends que c'est important 15. Il est bientôt 9 heures et demie et j'aborde l'adolescence 16. En pleine forme, plein d'envie et juste ce qu'il faut d'insouciance 17. Je commence à me la raconter, j'ai plein de potes et je me sens fort 18. Je garde un peu de temps pour les meufs quand je suis pas en train de faire du sport 19. Emploi du temps bien rempli, et je suis à la bourre pour mes rencards 20. Putain la vie passe trop vite, il est déjà 11 heures moins le quart 21. Celui qui veut me viser, je lui conseille de changer de cible 22. Me toucher est impossible, à 11 heures je me sens invincible 23. Il fait chaud, tout me sourit, il manquait plus que je sois amoureux 24. C'est arrivé sans prévenir sur les coups d'11 heures moins 2 25. Mais tout à coup, alors que dans le ciel, y'avait pas un seul nuage 26. A éclaté au-dessus de moi un intolérable orage 27. Il est 11 heures 08 quand ma journée prend un virage 28. Pour le moins inattendu alors je tourne mais j'ai la rage 29. Je me suis pris un éclair comme un coup d'électricité 30. Je me suis relevé mais j'ai laissé un peu de mobilité 31. Mes tablettes de chocolat sont devenues de la marmelade 32. Je me suis fait à tout ça, appelez moi Grand Corps Malade 33. Cette fin de matinée est tout sauf une récréation 34. A 11 heures 20 je dois faire preuve d'une bonne dose d'adaptation 35. Je passe beaucoup moins de temps à me balader rue de la Rép' 36. Et j'apprends à remplir les papiers de la Cotorep 37. J'ai pas que des séquelles physiques, je vais pas faire le tho-my 38. Mais y'a des cicatrices plus profondes qu'une trachéotomie 39. J'ai eu de la chance je suis pas passé très loin de l'échec et mat 40. Mais j'avoue que j'ai encore souvent la nostalgie de 10 heures du mat' 41. A midi moins le quart, j'ai pris mon stylo bleu foncé 42. J'ai compris que lui et ma béquille pouvaient me faire avancer 43. J'ai posé des mots sur tout ce que j'avais dans le bide 44. J'ai posé des mots et j'ai fait plus que combler le vide 45. J'ai été bien accueilli dans le cercle des poètes du bitume 46. Et dans l'obscurité, j'avance au clair de ma plume 47. J'ai assommé ma pudeur, j'ai assumé mes ardeurs 48. Et j'ai slamé mes joies, mes peines, mes envies et mes erreurs 49. Il est midi 19 à l'heure où j'écris ce con d'texte 50. Je vous ai décrit ma matinée pour que vous sachiez le contexte 51. Car si la journée finit à minuit, il me reste quand même pas mal de temps 52. J'ai encore tout l'après-midi pour faire des trucs importants 53. C'est vrai que la vie est rarement un roman en 18 tomes 54. Toutes les bonnes choses ont une fin, on ne repousse pas l'ultimatum 55. Alors je vais profiter de tous les moments qui me séparent de la chute 56. Je vais croquer dans chaque instant, je ne dois pas perdre une minute 57. Il me reste tellement de choses à faire que j'en ai presque le vertige 58. Je voudrais être encore un enfant mais j'ai déjà 28 pijes 59. Alors je vais faire ce qu'il faut pour que mes espoirs ne restent pas vains 60. D'ailleurs je vous laisse, là c'est chaud, il est déjà midi 20.