16 janvier

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16 janvier
16 janvier
Campagne d’Indochine
Cambodge – Les troupes japonaises et thaïes à l’est du Mékong se regroupent. Le génie
japonais tente de jeter un pont de bateaux sur le fleuve, mais deux attaques des P-40 de
l’AVG gênent son travail.
………
Annam – Les unités japonaises qui progressent sur la côte entrent à Phan-Rang et
commencent à avancer vers Da-Lat. Dans la nuit, la garnison japonaise de Binh-Khe est
harcelée par des tirs de mortier de 81 et de 60 mm. Au lever du jour, une compagnie
d’infanterie part à la recherche des attaquants, mais elle tombe dans une embuscade sur la
RC-19 à cinq km à l’est de Binh-Khe. Le commandant de la garnison de Binh-Khe appelle
l’aviation au secours et trois Ki-36 basés à Tourane viennent lâcher quelques bombes légères
dans les environs, sans autre résultat que de voir l’un d’eux se faire endommager par des tirs
de mitrailleuses lourdes.
………
Tonkin – Les troupes japonaises qui ont pris Haiphong poursuivent leurs “représailles” sur la
population. C’est notamment le cas dans le quartier du port, car les Japonais rendent les
dockers et les autres employés du port responsables de la destruction quasi totale des
installations portuaires. Björn Lindholm, représentant d’une compagnie maritime suédoise
bloqué au Vietnam depuis de nombreux mois par la guerre, raconte : « J’ai assisté à un
véritable “viol de Haiphong”, comme on avait pu parler, quelques années plus tôt, d’un “viol
de Nankin”. De mes fenêtres, j’ai vu les soldats japonais rafler au hasard de malheureux
civils, les pousser au milieu des rues et les mitrailler sans pitié, hommes, femmes, enfants,
vieillards… » Heureusement pour les habitants, la plupart des troupes japonaises commencent
à faire mouvement vers Hanoi avant d’étendre leurs exactions à l’ensemble de la ville.
Campagne de Malaisie
La bataille sur la frontière – Au Kedah, la bataille pour Jitra se poursuit. Le temps assez
nuageux limite l’activité des bombardiers en piqué japonais, mais l’artillerie australienne,
réduite à cinq obusiers de 4,5 pouces et vingt “25-pounders”, a du mal à répondre aux canons
et obusiers de 105 mm et 150 mm des Japonais.
Mais le major-général Gordon Bennett n’est pas prêt à lâcher prise après ses succès du mois
de décembre. Faisant confiance à ses troupes pour maîtriser les infiltrations japonaises sur son
aile droite, il se préoccupe de monter une contre-attaque vers Pisang pour casser la tentative
d’enveloppement de son aile gauche. Grâce au très bon système de communication de
l’artillerie britannique, ses canons survivants peuvent concentrer leur tir pour un barrage
roulant très efficace déclenché à l’aube, avant l’attaque de la 27e Brigade d’Infanterie
australienne. Une féroce bataille d’infanterie fait rage toute la matinée et à midi, les
Australiens sont en position de prendre Pisang, puis de progresser vers la ligne de chemin de
fer, à l’ouest, encerclant les forces japonaises qui ont pris Budi la veille.
12h45 –Des obus de gros calibre commencent à tomber sur le centre des positions de défense,
tandis qu’il apparaît que les Japonais infiltrés sur l’aile droite ont continué d’avancer et ont
atteint le niveau de Jitra.
14h00 – Gordon Bennett se résout à rappeler la contre-attaque de son aile gauche et les
troupes reviennent sur leurs positions de départ.
Dans l’après-midi, la situation s’aggrave au centre de la défense. L’artillerie australienne doit
faire face à un tir de contre-batterie intense venant de canons de gros calibre qui restent hors
de portée des “25-pdr”.
17h25 – Le temps s’étant un peu amélioré, les bombardiers en piqué D3A1 effectuent une
violente attaque destinée à neutraliser la position centrale de défense. Plusieurs officiers
supérieurs sont blessés.
18h00 – Il devient clair que les troupes japonaises ont repris leur avance le long de la voie
ferrée, menaçant les Australiens d’encerclement. Gordon Bennett n’a plus le choix : il faut
s’apprêter à battre en retraite vers Alor Setar.
20h00 – La route menant vers le sud est déjà la cible d’un tir d’artillerie assez imprécis mais
venant de l’ouest, ce qui montre que des unités d’artillerie se sont avancées jusqu’à Budi ou
même plus au sud.
………
La bataille en Malaisie du sud – Bien que les Japonais ne contrôlent toujours pas
Jemaluang, où les tirs continuent, leurs troupes commencent à faire mouvement vers l’ouest et
atteignent les abords de Kengkar Lenggor en fin d’après-midi. Cependant, à Jemaluang, la
Staffordshire Brigade lance des contre-attaques limitées pour empêcher les unités japonaises
de s’organiser.
Sur la route de Kota-Tinggi, les troupes japonaises se heurtent toute la journée à la 17e
Division Indienne. Dans l’après-midi, il faut à nouveau faire appel à l’artillerie navale pour
réduire certaines positions défensives.
Les forces débarquées à Endau tentent de remonter le cours du Lenggor, mais sont arrêtées
par des troupes du Commonwealth bien retranchées, tandis que la rivière est minée.
………
La bataille aérienne de Singapour – Les chasseurs des porte-avions japonais continuent à
monter une garde sourcilleuse autour des terrains d’aviation. Les bombardiers en piqué du
Kaga et de l’Akagi attaquent par deux fois le port ; ils détruisent la canonnière Dragonfly et
coulent deux vapeurs civils.
Campagne d’Indonésie
Kuching – Près de 90 avions de l’Armée japonaise viennent soutenir les prochaines
opérations à Bornéo. Ce sont 36 bombardiers bimoteurs Ki-21, 27 bombardiers monomoteurs
Ki-30 et 24 chasseurs Ki-27.
Sœrebaya (Java) – Plus de cent avions de la Marine japonaise basés à Kuching attaquent la
ville : 21 G4M1, 45 G3M2/3 et 45 A6M2. Une partie d’entre eux s’en prennent à l’aérodrome
de Perak, sous les yeux d’Yvon Lagadec, en visite à Perak : « L’âne bâté qui dirigeait la
défense aérienne de Sœrabaya ne savait pas qu’on se battait depuis deux ans et demi et que
depuis six semaines, la guerre était sur le pas de sa porte. Il se croyait toujours en 1920, je
pense. Alors que les sirènes d’alerte retentissaient déjà, il n’avait pas encore donné l’ordre
de décoller aux chasseurs de Perak. Quand enfin il estima que les conditions fixées par son
manuel d’engagement des forces aériennes étaient remplies, il était beaucoup trop tard. Les
malheureux pilotes qui réussirent à décoller, avec 8 Hawk-75A7, 11 CW-21 et 6 P-40E de
l’USAAF, se firent coiffer sans pitié par une nuée de Zéro. En cinq minutes, 5 Hawk-75, 9
CW-21 et 4 P-40E furent abattus ou réduits à l’état d’épaves que leurs pilotes purent tout
juste ramener au terrain. Pendant ce temps, les bombardiers nous matraquaient à loisir,
transformant en ferraille deux autres Hawk-75, deux CW-21 et un P-40E. En quelques
instants, les 1e et 2e Afdeling (1 et 2-VLG-IV) avaient été anéantis, plus cinq des neuf P-40E
du 17e Pursuit Squadron de l’USAAF, arrivés la veille. Et sans même pouvoir se battre, à
cause d’un rond-de-cuir qui considérait les avions qu’il dirigeait comme le stock de
trombones de son bureau ! »
De graves dommages sont aussi infligés à la base navale et à la ville. Le destroyer USS Peary,
qui était en cale sèche, est détruit en même temps que son bassin de radoub. Le vieux croiseur
léger hollandais Sumatra, que l’on se hâtait de remettre en état, reçoit deux bombes de 250 kg
et est raté de peu par deux autres.
De plus, les bombardiers japonais ont la chance de tomber sur le HMS Mauritius et les
Français Lynx, Tempête, Tornade et Trombe au moment où ils entrent dans le port, le Tornade
remorquant le sous-marin Centaure, dont les diesels avaient rendu l’âme en chemin. Le
Mauritius n’est que légèrement secoué par deux bombes qui tombent non loin, mais les
Français sont moins heureux. Le Tornade, incapable de manœuvrer, est frappé par deux
bombes de 250 kg et coule à l’entrée du port. Le Centaure, qui n’a plus ni batteries ni diesels,
est alors drossé sur les récifs et piégé par la marée descendante. Son équipage est sauf, comme
une grande partie de celui du Tornade, mais les hommes devront trouver d’autres navires pour
reprendre le combat.
Une partie des quais est en flammes. Les pertes sont lourdes chez les civils, ce qui provoque
dans l’après-midi l’exode d’une grande partie de la population, privant le port d’ouvriers
pourtant bien nécessaires.
17 janvier
Campagne de Birmanie
Mehsoht – Les premiers éléments de la 55e Division japonaise (Lt-général Hanaya) passent la
frontière birmane.
L’Armée impériale a déployé en Thaïlande ses 20e, 6e et 7e Armées. La 20e est engagée en
Malaisie. La 6e, soutenue par le gros des forces thaïlandaises, est engagée dans l’invasion du
Cambodge, de l’ouest du Laos et du sud du Vietnam.
La 7e Armée (Lt-général Jûichi) a été déployée sur le front de Birmanie. Elle se compose des
33e et 55e Divisions d’Infanterie1, de la 5e Brigade d’Artillerie Lourde de Campagne et de la
9e Brigade Blindée (col. Takehi), dont les 5e et 7e Régiments totalisent une centaine de chars.
La 7e Armée possède aussi deux bataillons du génie (les 4e et 20e), deux compagnies de
pontonniers et quatre de transport, des unités de communication, des unités médicales, etc.
L’Armée royale thaïe est représentée sur ce front par une seule division, la 2e DI, appuyée par
une demi-douzaine de petits chars Vickers “Six-toners”.
Ces forces sont soutenues par la 5e Division Aérienne Mixte de l’Armée impériale, qui
compte 165 avions. Le QG de la division est installé à Don Muang, avec le 4e Bataillon
Aérien (43 bombardiers moyens bimoteurs Ki-21 et 30 bombardiers légers bimoteurs Ki-48
déployés à Don Muang, 29 chasseurs Ki-27 à Nakhorn Sawan et 29 bombardiers légers
monomoteurs Ki-30 à Phitsanulok). Le 10e Bataillon Aérien (28 Ki-27 et 6 Ki-15 de
reconnaissance) est à Lampong.
Campagne de Malaisie
La bataille sur la frontière – Dans la nuit, les Wellington de la RAF bombardent des dépôts
ennemis sur la frontière pour perturber les approvisionnements japonais.
Les forces australiennes combattant au Kedah rompent le combat autour de Jitra et se
regroupent au-delà de la rivière, à Kempala Batas. Le temps très nuageux empêche l’aviation
de gêner ce mouvement, et les troupes japonaises sont ralenties par un harcèlement d’artillerie
et par les destructions des voies de communication effectuées par les Australiens en retraite.
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La 33e Division (Lt-général Sakurai) ne compte que deux régiments d’infanterie, les 214e et 215e (le 213e, resté
en Chine avec une partie de l’artillerie régimentaire, ne rejoindra la région que fin mars, il sera alors envoyé en
Malaisie avec le reste de la division). La division aligne aussi son régiment d’artillerie de montagne, une
compagnie antichar (quatre 37 mm), un peloton blindé (quatre tankettes Type 95) et le 33e Rgt du Génie.
La 55e Division (Lt-général Hanaya, puis Takeuchi) n’a elle aussi que deux régiments d’infanterie sur trois, les
112e et 143e (le 144e Rgt de la 55e DI a été envoyé à Guam) S’y ajoutent le 55e Rgt de Cavalerie (en fait de
l’infanterie montée), le 55e Rgt d’Artillerie de Montagne et le 55e Rgt du Génie (tous trois incomplets).
Les deux camps se préparent à une nouvelle bataille autour d’Alor Setar, dont les sapeurs
britanniques commencent à démolir l’aérodrome.
………
La bataille en Malaisie du sud – Des mouvements d’enveloppement des forces japonaises
obligent les troupes du Commonwealth à abandonner leurs positions autour de Jemaluang.
Les Japonais progressent aussi à l’ouest, vers Kluang.
………
La bataille aérienne de Singapour – Les avions de la Marine japonaise maintiennent leur
pression sur les terrains de Singapour. La ville est attaquée pour la première fois par des
appareils de l’Armée japonaise : à 13h50, 27 Ki-21 basés à Kuching bombardent la cité. Deux
d’entre eux sont abattus par la DCA.
Mer de Chine Méridionale – A 17h00, les porte-avions Kaga et Akagi, escortés par le CL
Abukuma et les DD Kasumi, Hamakaze, Isokaze, Tanikaze et Urakaze, mettent le cap sur
Mako pour s’y ravitailler. Les porte-avions Hiryu et Soryu, restés seuls au large de la
Malaisie, se joignent à la 2e Flotte de Kondo.
Les Shokaku, Zuikaku, Hiei et Hyuga et leur escorte arrivent en début de journée à Mako.
Tous les navires commencent à se réapprovisionner en hâte. En fin de journée, les deux porteavions, les destroyers Akigumo, Arare, Kagero et Shiranui, le porte-hydravions Mizuho et les
mouilleurs de mines Okinoshima et Tsugaru quittent Mako et filent cap au sud-est, vers le
détroit de Balabac (entre Bornéo et les Philippines).
Campagne d’Indonésie
Bandœng –En fin de matinée, 54 bombardiers bimoteurs (36 G3M2/3 et 18 G4M1) escortés
par 36 A6M2 frappent la ville. Les avions venus de Kuching bénéficient à nouveau de la très
mauvaise organisation de la défense aérienne des Indes Orientales Néerlandaises. L’alerte
n’est donnée sur l’aérodrome d’Andir que quelques minutes avant le début du bombardement.
Les trois CW-21 qui décollent alors sont surpris par les chasseurs d’escorte pendant qu’ils
tentent de grimper à l’altitude des attaquants et sont rapidement détruits. La ville de Bandœng
subit de gros dégâts. Pire encore (du point de vue des militaires), le bombardement du terrain
détruit 21 Hurricane à peine assemblés et 6 autres encore en caisses.
Campagne des Philippines
Les troupes américaines défendant la péninsule de Bataan sont lentement repoussées par les
Japonais. Les Japonais s’infiltrent autour du mont Natib, et le IIe Corps américain recule vers
la Baie de Manille et Orion.
Au large de Davao, le sous-marin américain Swordfish coule un petit transport japonais.
Campagne du Pacifique Sud
Un raid sur Truk réussit, malgré un temps abominable. Six PBY venus de Rabaul touchent le
terrain de plusieurs bombes, détruisant trois avions, et endommagent un pétrolier. L’un des
PBY (Sqn Ldr Davies) est abattu par des chasseurs.
Campagne d’Indochine
Cambodge – Les forces nippo-thaïes sont toujours en train de se réorganiser.
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Cochinchine – Saigon et Bien-Hoa sont la cible de nombreuses attaques aériennes.
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Tonkin – Les forces japonaises qui ont pris Haiphong approchent de Hanoi, que les soldats
français et les autorités coloniales ont évacué durant la nuit. Pour éviter le massacre de la
population, le Haut-Commissaire Jean Sainteny et le général Martin déclarent Hanoi ville
ouverte. Les avions de l’AVF se redéploient à Viet-Try.
18 janvier
Campagne de Birmanie
Bien qu’elle soit essentielle au ravitaillement de la Chine, la Birmanie est faiblement
défendue. Il semblait que cela ne fût pas nécessaire, car pour avancer sérieusement vers
l’ouest, les Japonais devaient d’abord se débarrasser de la Malaisie – et de la flotte de
Singapour. La disparition de la flotte de l’amiral Phillips remet tout cela en question. Si la
Malaisie tombe, la Birmanie sera en grand danger !
Le commandant en chef en Birmanie (GOC Burma), le lieutenant-général Tom Hutton,
récemment nommé par Wavell (en tant que CiC India) en remplacement du général McLeod,
a fait de son mieux avec ce qu’il a pour obéir aux ordres qu’il a reçus.
La présence de deux “armées” de l’armée républicaine chinoise à l’entraînement dans les états
Shans2 lui permet de déployer sur la frontière la 1ère Division Birmane, mais celle-ci est en
sous-effectifs, sous-équipée, peu expérimentée et même peu fiable. Elle est donc disposée au
nord de la frontière avec la Thaïlande, entre Kemapyu et Papun, dans la zone la moins
menacée, sur la rive ouest de la Salween.
Dans la pointe sud-est de la Birmanie (le Tenasserim) sont dispersés trois faibles bataillons
prélevés sur la 1ère Division Birmane : du sud au nord, le 2e Burma Rifles à Mergui, le 6e à
Tavoy et le 3e devant Ye, couvrant la passe des Trois Pagodes.
La meilleure unité, la 8e Division Indienne (major-général Charles Harvey), est déployée à
Moulmein. Ses trois brigades, les 17e, 18e et 19e, sont à effectifs complets et raisonnablement
bien équipées.
Hutton a réclamé des blindés à Wavell, mais il n’y en a aucun de disponible. Il n’est pas
question de toucher au matériel en transit vers la Chine, et Wavell n’autorise Hutton à utiliser
le matériel moderne des centres d’entraînement qu’en cas d’urgence absolue. Obligé d’être
créatif, Hutton a demandé et obtenu l’autorisation de lever des unités de volontaires
indépendantes et de lancer dans la population un appel à l’aide pour améliorer les capacités du
BVAS. C’est ainsi que, de passage à Calcutta en décembre peu après l’attaque japonaise, il
dînait au Saturday Club quand des gentlemen médaillés d’un certain âge lui ont demandé ce
que pourrait faire pour lui le Calcutta Light Horse. Si, depuis plus de vingt ans, cette unité
n’est plus qu’une sorte de club et si tous ses membres en âge de servir se sont déjà engagés, il
reste encore à Calcutta un certain nombre de vétérans de 14-18 désireux de servir. Début
janvier, 25 d’entre eux, ayant recruté plusieurs centaines de volontaires d’origines variées (par
exemple dans les unités de transport), forment à Rangoon un bataillon blindé avec 22 vieux
chars Vickers Medium et 20 petits Vickers Mk V Light tout aussi antiques. Ces reliques ont
été récupérées dans des centres d’entraînement ou des dépôts en Inde ou en Egypte, à moins
qu’elles n’aient été envoyées d’Angleterre à destination de la Chine et que même les Chinois
les aient jugées dépassées. Pour donner à cette unité une certaine capacité antichar, des canons
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Après d’intenses négociations courant 1941, les Britanniques ont construit trois centres d’entraînement et de
rééquipement à Rangoon, Prome et Mandalay. Chaque centre possède des cadres britanniques chargés
d’entraîner les entraîneurs chinois. Les trois unités de l’Armée républicaine chinoise qui doivent les occuper, les
Ve, VIe et LXVIe Armées (la LXVIe n’arrivera qu’au début de 1942), sont chacune l’équivalent d’une faible
division britannique, mais il s’agit de trois des meilleures unités chinoises, commandées par le Lt-général Lin
Wei (la mission chinoise en Birmanie étant dirigée par le Lt-général Lo Zhuoying). Ces troupes une fois
rééquipées et entraînées doivent repartir vers Chongqing et Changsha pour être remplacées par d’autres en
Birmanie. D’abord sidérés par l’abondance (toute relative pourtant) de l’équipement mis à leur disposition, les
Chinois se sont vite adaptés. Ils sont ravis de disposer d’automitrailleuses sud-africaines Marmon-Herrington, de
chars (très) légers Vickers Mk.VI, de canons de 75 “français” (en fait fabriqués aux Etats-Unis)…
navals de 12 livres sont greffés sur quatre des Vickers medium, sans trop savoir si
l’assemblage ne va pas tomber en morceaux après les premiers coups. Le Calcutta Light
Horse sera officiellement reconstitué début février à Payagyi.
Campagne d’Indochine
Annam – Une partie de la colonne qui avance vers le sud tente de prendre Da-Lat par surprise
au début de la matinée, mais tombe dans une embuscade à 5 km de la ville. Les attaquants
subissent de lourdes pertes quand la route est détruite sous les roues de leurs véhicules par des
mines enterrées. Le reste de la colonne, avançant le long de la voie ferrée côtière, approche de
Phan-Thief en fin de journée.
………
Tonkin – Les troupes japonaises entrent à Hanoi.
Campagne de Malaisie
La bataille sur la frontière – Comme le temps s’améliore au-dessus du Kedah, les
bombardiers en piqué de la Marine japonaise réapparaissent et attaquent les positions
australiennes autour d’Alor Setar. Au sol, une première tentative de percée par un régiment
japonais est arrêtée au confluent des rivières qui arrosent la région. Cependant, la contreattaque australienne est trop faible pour être efficace. Les Australiens doivent utiliser leurs
chars comme une artillerie mobile pour couvrir leur infanterie quand elle se rabat sur une
seconde ligne de défense.
………
La bataille en Malaisie centrale – Les bombardiers Ki-21 de l’Armée attaquent violemment
Kuala-Lumpur et le terrain de Subang. Au même moment, 12 Ki-48 s’en prennent à Taiping ;
la DCA parvient à abattre l’un d’entre eux.
………
La bataille en Malaisie du sud – Les troupes japonaises avancent lentement vers Kluang, à
l’ouest, mais leur progression vers le sud est à nouveau arrêtée avant Kota Tinggi.
………
La bataille aérienne de Singapour – Le port est attaqué dans la journée par des avions des
porte-avions japonais, qui coulent le dragueur de mines Gleaner et deux vedettes Fairmile, les
ML 137 et 138. Les Ki-21 de l’Armée basés à Kuching attaquent la ville pendant la nuit, mais
les Defiant en abattent deux.
………
Mer de Chine Méridionale – Escortés par deux destroyers, les cuirassés Hiei et Hyuga
quittent Mako (Pescadores) pour rejoindre la 2e Flotte de Kondo.
Campagne d’Indonésie
Bornéo – Pontianak et Singkawang sont attaqués par les avions de l’Armée japonaise basés à
Kuching. Le terrain de Singkawang-II est bombardé à deux reprises par des Ki-30.
………
Sœrabaya – Un nouveau raid des avions de la Marine basés à Kuching frappe le port et la
ville. Les bombardiers attaquent sans opposition, car les chasseurs survivants sont concentrés
sur le terrain de Maospati. Des coups directs détruisent les sous-marins hollandais K-VII
(Luitenant ter zee 2e klasse [LV] P.J. Mulder) et K-XIII (CC M.A.J. Derksema), l’américain S36 (Lt J.R. McKnight, Jr), ainsi que le mouilleur de mines Rigel et le dragueur de mines
Pieter de Bitter. Les équipements portuaires sont eux aussi durement touchés.
………
Mer de Célèbes – Les bombardiers G4M1 basés à Jolo se redéploient vers Manado (nord de
Célèbes).
La 4e Force d’Attaque Surprise arrive à Tarakan. L’amiral Kyuji Kubo commande 24
transports, les mouilleurs de mines Itsukushima et Tatsuhara Maru, le ravitailleur
d’hydravions Kamoi (6 F1M2, 4 E13A1, 2 E8N), six chasseurs de sous-marins (les CH-10,
11, 12, 13, 14 et 15) et six dragueurs de mines, plus sept petits patrouilleurs et dragueurs de
mines auxiliaires. Cette force est accompagnée par le groupe de couverture du contre-amiral
T. Tagaki avec les CA Haguro, Myoko et Nachi, le porte-avions léger Ryujo (25 A5M4 et 18
B5N2), le porte-hydravions Chitose (12 F1M2, 8 E13A1, 4 E8N), le DD Shiokaze et un
groupe spécial conduit par le contre-amiral R. Tanaka avec le CL Jintsu et les DD Hayashio,
Kuroshio, Natsushio, Oyashio, Amatsukaze et Hatsukaze.
Une partie des transports déchargent leur contenu à Tarakan.
Tachikawa (Japon) – En présence des représentants du Koku Hombu, le premier Dokuritsu
Sentai (groupe indépendant) de l’Armée destiné à l’appui au sol est mis sur pied. Inspiré par
l’expérience allemande des campagnes de France et de Grèce, soutenu avec enthousiasme par
le général Yamashita et tous les officiers supérieurs de l’Armée en Malaisie, cette unité
autonome doit être formée de deux Chutai comprenant chacun 12 bombardiers en piqué (en
théorie, des D3A1 de la Marine, Ki-89 dans la nomenclature de l’Armée), un Chutai de
reconnaissance tactique et d’appui rapproché avec 6 Ki-51 et 6 Ki-36, et un Chutai de
commandement avec 3 Ki-51. Comptant ainsi 39 avions, dont 24 bombardiers en piqué, cette
unité spécialisée doit être allouée aux forces terrestres chargées d’attaquer des positions
fortement défendues et remplacer l’artillerie à longue portée si les conditions empêchent le
déploiement de celle-ci. Cependant, aucun Ki-89/D3A1 n’étant disponible (tous les
exemplaires produits sont destinés aux unités de la Marine), le premier Dokuritsu Sentai va
commencer son entraînement opérationnel sur quelques-uns des 50 bombardiers en piqué
Aichi D1A2 délaissés par la Marine. De toutes façons, l’état-major de l’Armée estime qu’une
variante du chasseur lourd Kawasaki Ki-45, attendue pour fin 1942 ou début 1943, fera un
parfait bombardier en piqué.
19 janvier
Campagne de Birmanie
Moulmein – Quand il inspecte pour la première fois la position qu’il doit tenir, le majorgénéral Harvey est épouvanté. Hutton lui a ordonné de garder les Japonais à distance de la
Route de Birmanie, qui passe non loin du Sittang en de nombreux endroits, avec sa 8e
Division Indienne. Harvey a donc l’ordre de combattre aussi en avant que possible, à l’est de
la Salween. Mais il découvre que cela veut dire qu’il va devoir livrer bataille adossé à un
fleuve de sept kilomètres de large, sans le moindre pont et avec peu de ferries. Moulmein
même est une ville de 50 000 habitants dont les trois rues principales sont parallèles au fleuve.
Elle est indéfendable. Pour la couvrir, il faudrait au moins deux divisions – mais tout ce qui
est possible, c’est de prélever encore un bataillon (le 4e Burma Rifles) sur la 1ère Division
Birmane.
Harvey fait part de son désarroi à Hutton, qui lui explique qu’il est d’accord avec lui mais
qu’il n’y peut rien et que les ordres sont de se défendre à l’est de la Salween. Malgré ces
ordres, Harvey ordonne à sa brigade la plus récemment arrivée, la 19e (Brigadier Ford) de
rester sur la rive ouest et d’y préparer des positions de défense, sous prétexte qu’elle manque
de moyens de transports. La 18e Brigade (Brigadier Lochner) est déployée devant Moulmein
et la 17e (Brigadier Gracey) plus à l’est, sur la route venant de Kawkareik (en Thaïlande). Par
ailleurs, un bataillon du génie de Rangoon reçoit l’ordre de préparer des lignes de défense très
en arrière : sur la rive est du Sittang, pour couvrir les approches de l’unique pont sur ce
fleuve.
Pendant ce temps, le terrain de Tavoy (chef-lieu du Tenasserim, la pointe sud de la Birmanie)
est occupé par le 3e bataillon du 112e Rgt japonais. La garnison (le 6e Burma Rifles, un exbataillon de police) est dispersée sans difficulté.
A Rangoon arrivent les premiers éléments du 267e Wing (Sqn 17, 135 et 136), avec le Wing
commander Pennington-Leigh et les Squadron leaders Carey et Stone… mais pas d’avions.
Campagne d’Indochine
Cambodge – Il est maintenant clair que les forces nippo-thaïlandaises préparent pour les
prochains jours une attaque de grande envergure.
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Annam – Les Japonais continuent d’avancer vers le sud sur la côte vers Saigon.
………
Tonkin – Les unités japonaises qui se dirigent de Hanoi vers Viet-Try sont harcelées par les
P-40 de l’AVG. Les avions de l’Armée tentent de chasser l’AVG de Viet-Try, mais ils
perdent 5 Ki-48 et 3 Ki-27 en échange de deux P-40. Cependant au crépuscule, l’AVG perd
deux autres avions, abattus lors d’un raid de ceux que l’AVG appelle maintenant « les
nouveaux chasseurs japonais à moteur en étoile » (des Ki-44).
Campagne de Malaisie
La bataille sur la frontière – Comme le temps continue de s’améliorer au Kedah, l’activité
de l’aviation japonaise augmente encore. Les troupes australiennes autour d’Alor Setar,
bombardées à de nombreuses reprises par les D3A1 de la Marine et les Ki-51 de l’Armée,
cèdent lentement du terrain. En fin de journée, les Japonais contrôlent une partie de la ville et
l’aérodrome, mais celui-ci a été dévasté avec soin par le génie britannique.
………
La bataille en Malaisie centrale – Les bombardiers moyens de l’Armée, Ki-21 et Ki-48,
concentrent leurs attaques sur les terrains de Subang et d’Ipoh, qui sont ensuite mitraillés par
des Ki-43. Ces attaques permettent de détruire au sol 4 Hurricane venus de Rangoon via
Sabang. En réponse, la DCA abat deux Ki-43.
………
La bataille en Malaisie du sud – Les Japonais avancent lentement vers Kota Tinggi. A
l’ouest, ils progressent plus vite vers Kluang, qui est en fin de journée sous le feu de leur
artillerie de campagne.
………
La bataille aérienne de Singapour – Les avions des porte-avions continuent de tournoyer
toute la journée dans le ciel de Singapour. Dans l’après-midi, des Ki-21 basés à Kuching
bombardent les terrains d’aviation.
Campagne d’Indonésie
Java – Une puissante formation japonaise venant de Kuching – 18 G3M1/2, 18 G4M1 et 27
A6M2 – attaque le terrain de Maospati. A nouveau, le contrôle local de la défense aérienne
réagit trop tard et seuls six B-339 du ML-KNIL, cinq P-40E de l’USAAF et trois Hurricane de
la RAF peuvent décoller pour intercepter le raid. Les chasseurs alliés abattent trois G3M2,
deux G4M1 et quatre A6M2, mais ils perdent quatre B-339, trois P-40E et un Hurricane –
sans compter trois B-339, trois P-40E, quatre Hurricane et deux bombardiers Martin WH3
détruits au sol. Ce raid laisse Java presque dépourvue de chasseurs en état de vol.
………
Timor – Kupang est attaquée par surprise à l’aube par 72 G4M1 venant de Manado. Les
navires ancrés dans la baie sont la cible de 45 avions, pendant que 27 attaquent l’aérodrome.
Seuls trois P-40E en transit de Darwin à Java peuvent décoller. Ils abattent quatre
bombardiers au prix d’un des leurs, mais 12 P-40E et un DC-3 sont détruits au sol.
Dans la baie, la flotte américaine est surprise en plein ravitaillement. La tourelle arrière du
croiseur lourd Houston est touchée par une bombe qui la met hors service. Les vieux
destroyers Hopewell, John D. Edwards et Whipple sont gravement endommagés par des
bombes. Le Whipple coule rapidement dans le port et les deux autres, en flammes, doivent
être échoués. De plus, le ravitailleur de destroyers Black Hawk est gravement endommagé.
………
Détroit de Macassar – Les sous-marins USS Saury (Lt Cdr J.L. Burnside, Jr) et Pickerel
(Cdr B.E. Bacon, Jr) rejoignent le hollandais K-XIV (LV Th. Brunsting) au large de
Balikpapan pour aller reconnaître la mer de Célèbes, jusqu’à Tarakan.
20 janvier
Campagne de Birmanie
Moulmein – Trois Hurricane s’apprêtant à décoller vers Raheng sont attaqués et détruits par
un raid de Ki-27. Quelques heures plus tard, un Ki-36 en reconnaissance dans le secteur est
surpris et détruit par le FO Mohan Singh, dont c’est la quatrième victoire. « C’est un avion
très manœuvrant et il aurait pu esquiver facilement l’attaque d’un Hurricane ou d’un P-40,
commentera Singh. Mais avec mon vieux Fury, c’était un canard posé ! »
………
Un raid de Blenheim se dirigeant vers Mehsoht (six Blenheim escortés par six P-40 chinois)
est intercepté par hasard au-dessus de Kawkareik par des Ki-27. Un chasseur japonais, un P40 et un Blenheim sont abattus.
Campagne d’Indochine
Cambodge – Les Hell’s Angels, troisième squadron de l’AVG, lancent plusieurs raids contre
les troupes nippo-thaïlandaises massées sur la route de Kompong Cham à Saigon.
………
Cochinchine – Les forces japonaises venant de la côte d’Annam avancent vers Saigon.
« Persuadés d’avoir mis en déroute sur la côte les derniers défenseurs français, les Japonais
sont pris au dépourvu par une contre-attaque menée près de Xuan-Loc par deux bataillons
d’infanterie motorisée, un bataillon de volontaires vietnamiens et les deux dernières
compagnies du GBMS opérant à l’est de Saigon, qui possèdent encore chacune douze chars
moyens Sav-41 et quatre chars légers M2A4. Le Sav-41 de Fernand Naudin et Roger
Carmaux est de la fête : “Tu te rends compte, Fernand ! On est à l’autre bout du monde et on
se bat main dans la main avec des camarades vietnamiens contre les fascistes japonais ! Si
c’est pas le triomphe de l’Internationale Communiste !” lance Carmaux, qui ne se tient plus
de joie depuis qu’il s’est aperçu que l’ossature du bataillon vietnamien était composée de
membres du PC local… Les Japonais subissent de lourdes pertes et sont repoussés de 15 km
vers la côte. » (Pascal N’Guyen-Minh, Guerre et Paix en Asie du Sud-Est).
………
Tonkin – Après en avoir discuté avec le Haut-Commissaire Jean Sainteny, le général
Chennault ordonne au squadron Adam & Eve de l’AVG de se redéployer sur la base
“Epervier” de Muong Theng, où la plupart des installations sont maintenant terminées, tandis
que le Panda Bear s’envole pour Kunming, en Chine. Les forces françaises et locales
commencent à évacuer le sud du Tonkin par la Rivière Noire.
Campagne de Malaisie
La bataille sur la frontière – Des Wellington et des Wellesley attaquent durant la nuit
Singora et les dépôts d’armements japonais de l’isthme de Kra. Ce genre de bombardement
est cependant peu efficace.
A l’aube, les Hudson des Sqn 7 et 8 de la RAAF attaquent les colonnes japonaises en marche
de Jitra vers Alor Setar, avec davantage de réussite.
A ce moment, les troupes japonaises sont déjà durement engagées contre les forces du
Commonwealth autour d’Alor Setar. Une contre-attaque australienne limitée, soutenue par
des chars, repousse un moment les Japonais jusqu’au pont (détruit) de chemin de fer. A
11h00, comme les bombardiers en piqué D3A1 font leur apparition au-dessus d’Alor Setar,
l’opération est interrompue pour éviter d’exposer les précieux blindés. Jusqu’à la nuit, les
lourds “chars d’infanterie” sont utilisés comme des redoutes mobiles, bloquant efficacement
les contre-attaques japonaises. Cependant, le commandant de la 8e Division d’Infanterie
australienne, le major-général H. Gordon Bennett, doit préparer son repli vers Gurun, où la
11e Division Indienne tient une nouvelle ligne de défense.
………
La bataille en Malaisie du sud – Les forces japonaises entrent dans Kaltang aux premières
lueurs du jour, après avoir forcé les troupes du Commonwealth à reculer grâce à une série de
mouvements tournants. Néanmoins, harcelés en permanence par l’artillerie alliée, les Japonais
sont incapables d’empêcher leurs adversaires de se replier en bon ordre vers l’aérodrome de
Kluang. Pourtant, dans le courant de l’après-midi, il devient évident que, les troupes du
Commonwealth continuant de reculer vers l’ouest, une crise sérieuse couve sur ce front.
Par ailleurs, l’avance japonaise vers le sud, en direction de Kota Tinggi, est continuellement
freinée par des barrages, des champs de mines et de petites contre-attaques britanniques.
………
La bataille de Singapour – Les bombardiers Ki-21 de l’Armée japonaise basés à Kuching
attaquent sans escorte les terrains de Singapour. Cette présomption est punie par la perte de
trois d’entre eux sous les coups de deux Hurricane et d’un Martlet solitaire. « Avec mon
départ, écrira Yvon Lagadec, Danny Potter était devenu l’unique pilote de chasse de la FAA
en Extrême-Orient, et même l’unique chasseur d’une des aéronautiques navales alliées dans
le coin ! Il en profita pour égaliser le score de notre duel amical, entamé en Méditerranée. Le
20 janvier au soir, nous en étions à onze partout ! »
En fin de journée, considérant que les Japonais dominent trop nettement l’espace aérien de
Malaisie pour y risquer d’autres pilotes, le commandement local décide de transférer certaines
unités vers l’aérodrome de Palembang-II du ML-KNIL, à Sumatra, pour les reconstituer làbas. Les premiers pilotes transférés sont ceux des squadrons de Hurricane de la RAAF (ainsi
que Danny Potter). Il est prévu d’utiliser Palembang-II pour l’opération de ravitaillement de
Sabang à partir de Rangoon.
………
Singapour – Dans la soirée, revenant de Bandœng où il a conféré avec le général Wavell et
d’autres officiers supérieurs (dont le représentant français, l’amiral Decoux), lord Gort
annonce que l’Air Marshal Brooke-Popham est déchargé de ses responsabilités en Malaisie. Il
ne s’agit pas d’une sanction, mais la création cinq jours plus tôt de l’ABDAF Command ôte
toute justification à l’existence du Far East Command. Par ailleurs, l’Air Marshal donnait
depuis quelques temps des signes inquiétants d’épuisement physique et nerveux.
Le GOC Malaya, le général Percival, n’étant qu’acting lieutenant general, le général Gort
propose à Churchill de prendre personnellement la direction de la défense de Singapour et de
la Malaisie, Percival jouant le rôle d’un chef d’état-major. « Il est clair, Monsieur le Premier
ministre, explique Gort dans le message qu’il lui adresse, que la situation ici évolue de façon
très défavorable. En prenant en personne le commandement de l’Armée de Sa Majesté
Impériale et Royale dans la région, je compte bien obliger l’Armée de l’Empereur du Japon,
dont les officiers placent si haut leur honneur et se conduisent si souvent, m’a-t-on dit, comme
des barbares, à payer le prix le plus élevé pour Singapour et la Malaisie. Dans ce but, je sais
pouvoir compter sur la fidélité à la Couronne des hommes de tout le Commonwealth, qui se
battront jusqu’au bout et qui pourront, jusqu’au bout, compter sur ma présence à leur côté.
Dieu sauve le Roi. »
Churchill est sensible à ces arguments. Cependant, pour ne pas faire d’ombre à Wavell (à
l’ABDAF Command) et pour ne pas paraître dégrader Percival, cette nouvelle organisation du
commandement restera officieuse pendant sept semaines, Gort n’ayant en théorie qu’une
mission d’inspection prolongée.
Campagne d’Indonésie
Mer de Célèbes – Les porte-avions Shokaku et Zuikaku, les destroyers Akigumo, Arare,
Kagero et Shiranui, le porte-hydravions Mizuho et les mouilleurs de mines Okinoshima et
Tsugaru rejoignent à Manado (Célèbes) la force du contre-amiral Takagi, arrivée le 18
janvier. La flotte se met bientôt en route pour la mer de Benda (entre Célèbes au nord-ouest,
les Moluques au nord-est et Timor au sud).
………
Détroit de Macassar – Le sous-marin hollandais K-XIV aperçoit un important convoi
japonais au large de la côte sud-est de Bornéo, près de Balikpapan. C’est la 4e Force
d’Attaque Surprise du contre-amiral Kubo ; ayant laissé une partie de ses navires à Tarakan,
Kubo a avec lui dix gros transports (les transports de l’Armée Ashiyama Maru, Kumagawa
Maru, Kuretake Maru, Sumanoura Maru, Toei Maru, Yukka Maru ; les transports de la
Marine Nana Maru, Tatsukami Maru et Tsuruga Maru), les ravitailleurs d’hydravions Sanyo
Maru et Kamoi, les chasseurs de sous-marins CH-10, 11 et 12, les patrouilleurs PB-36, PB-37
et PB-38 (d’anciens destroyers de classe Momi) et les dragueurs de mines auxiliaires W-15,
W-16, W-17 et W-18. Ce convoi est protégé par le groupe spécial du contre-amiral R. Tanaka
(CL Jintsu et DD Hayashio, Kuroshio, Natsushio, Oyashio, Amatsukaze et Hatsukaze).
Le LV Brunsting réussit à placer son sous-marin en position de tir et coule d’une salve de
torpilles bien ajustée le Tsuruga Maru (6 987 GRT).
En fin de journée, le convoi est pisté par un hydravion Do 24K de la ML-KNIL.
………
Baie de Kupang (Timor) – Averti par le K-XIV de l’existence du convoi japonais en route
vers Balikpapan, ABDAF-FLOAT (l’amiral T.C. Hart) ordonne au contre-amiral W.A.
Glassford, qui a mis son pavillon sur le croiseur léger Concord, de lever l’ancre
immédiatement et de se diriger vers le détroit de Macassar avec la DesDiv58 (DD Barker et
Bulmer) et la DesDiv 59 (DD John D. Ford, Paul Jones, Pillsbury et Pope) pour attaquer de
nuit la force de débarquement ennemie. Les sept navires quittent la baie de Kupang à 15h30.
Aucun n’y reviendra…
Hart ordonne aussi au ravitailleur d’hydravion Childs de quitter Kendari (sur la côte sud-est
de Célèbes), maintenant bien trop exposé. Quant au croiseur lourd Houston, il est envoyé à
Sœrabaya pour y être plus ou moins remis en état. En dépit de la neutralisation de sa tourelle
arrière, le navire est bien trop précieux pour que les forces alliées s’en passent et le renvoient
en Australie pour des réparations plus complètes.
………
Batavia (Java) – L’amiral Decoux, à la demande de l’amiral Hart, ordonne à l’Emile-Bertin
(CV Robert Battet) et au Lamotte-Picquet (CV André Commentry) d’aller poser un champ de
mines défensif devant Bandjermassin (principale ville de la côte sud de Bornéo). Les deux
croiseurs quittent Batavia vers 17h20.
21 janvier
Campagne de Birmanie
Six Blenheim bombardent avec succès Raheng et Kawkareik.
Dans la nuit, Rangoon et Mingaladon sont durement touchées par l’aviation japonaise. Deux
petits caboteurs sont coulés dans le port de Rangoon.
Campagne d’Indochine
Cochinchine – Les troupes japonaises rejetées la veille vers la côte s’efforcent de se
regrouper et de se réorganiser, tandis que les forces françaises et locales préparent la défense
de Xuan-Loc. Le 1er Bataillon de Volontaires Chinois (principalement constitué d’habitants de
Cholon), qui vient d’être officiellement créé, doit participer à cette défense.
Les avions japonais de l’Armée comme de la Marine attaquent à plusieurs reprises Saigon et
Bien-Hoa. Les pilotes du squadron Hell’s Angels de l’AVG et les quatre derniers Hawk-75A4
de l’Armée de l’Air parviennent à abattre trois Ki-27, quatre Ki-48 et un D3A1. Cependant,
trois P-40 et deux Hawk-75 sont détruits et la chasse alliée de Saigon est réduite à dix avions :
deux Hawk-75 et huit Hell’s Angels.
………
Tonkin – Les Japonais qui marchent vers le nord en direction de Viet-Try doivent ralentir
leur avance, car ils commencent à manquer de soutien et de munitions.
Campagne de Malaisie
La bataille sur la frontière – Comme le temps s’arrange un peu, les avions japonais
s’activent frénétiquement dans le ciel du Kedah pour tenter d’empêcher la 8e Division
d’Infanterie australienne de se replier en bon ordre vers Gurun. Les D3A1 de la Marine
donnent l’exemple, mais ils sont pour la première fois imités par les bimoteurs légers Ki-48
de l’Armée. Dans l’après-midi, alors qu’il dirige une contre-attaque de ses derniers chars pour
couvrir le repli de la 27e Brigade d’Infanterie australienne, le major-général H. Gordon
Bennett est blessé par des éclats de bombe. Ses hommes commencent alors à sentir le poids de
huit jours de combat ininterrompu.
En fin de journée, le major-général D.M. Murray-Lyon doit ordonner à des éléments de la
3e Brigade de Cavalerie Indienne de faire mouvement vers le nord pour aider la 27e à
s’extirper des troupes japonaises qui tentent de l’encercler. À la nuit, privées de soutien, les
unités d’infanterie japonaises doivent s’arrêter. Et malgré les épreuves subies, c’est avec un
moral très élevé que les hommes de la 8e Division australienne se glissent à travers les lignes
de défense du Commonwealth pour rejoindre leur zone de rassemblement. Ils savent qu’ils
ont arrêté avec succès de nombreuses attaques japonaises, en infligeant de très lourdes pertes
à l’ennemi.
Malheureusement, le commandant du IIe Corps, le lieutenant-général J. Northcott, est bien
moins optimiste. Les constantes attaques aériennes contre les villes et les principales voies
ferrées ont sérieusement fragilisé la chaîne logistique de ses troupes. Les munitions sont
dépensées à un rythme très élevé et il risque de devenir difficile de soutenir longtemps cette
cadence d’opérations. Comme pour confirmer les craintes de Northcott, les bombardiers Ki21 de l’Armée japonaise ont d’ailleurs attaqué Ipoh dans l’après-midi, visant la gare, déjà
presque détruite pourtant.
………
La bataille en Malaisie du sud – Des unités japonaises atteignent peu avant l’aube les abords
du terrain de Kluang, défendu maintenant par des éléments du Leicester Regiment, aidés par
le bataillon d’infanterie de la Johore Volunteer Force. Deux colonnes japonaises tentent de
déborder les défenseurs, mais sont arrêtées par un tir d’artillerie précis de la 278e Batterie du
122e Field Artillery Rgmt et doivent se regrouper. A midi, aidées par une compagnie de chars
légers comptant une vingtaine de Type-95, elles repartent en avant. Les attaquants sont alors
interceptés près de la voie ferrée principale par une force de cinq chars A10 Cruiser et sept
A11 Matilda Junior du 7th Armoured Hussars (mis au repos au sud de la péninsule après le
repli de la Krohcol). Le combat est acharné, mais à 16h30, l’avance japonaise est bloquée : la
plupart des Type-95 ont été détruits, au prix de quatre Cruiser et trois Matilda (ces derniers,
endommagés non par les chars adverses mais par les explosifs d’équipes suicides, ont été
détruits par leurs propres équipages). Sous le couvert de la nuit qui tombe, des éléments de la
12e Brigade d’infanterie indienne (Brigadier A.C.M. Paris) prennent position entre le principal
axe routier nord-sud et la voie ferrée. A 22h00, les 5/2e Punjab, 4/19e Hyderabad et 2/Argyll
& Sutherland Highlanders commencent à construire des retranchements.
Pendant ce temps, les forces japonaises sont parvenues près de Kota Tinggi, mais ont été
stoppées net par un violent barrage d’artillerie et les tirs d’une infanterie bien retranchée sur
des positions qui se couvrent les unes les autres.
………
La bataille aérienne de Singapour – Nouvelles attaques des avions de la Marine japonaise
basés à Kuching. Cette fois, 54 bombardiers (18 G4M1 et 36 G3M2/2) escortés par 27 A6M2
visent le port. Le petit aviso Mallard, les dragueurs de mines Sharpshooter et Speedwell et les
vedettes lance-torpilles MTB-49 et 50 sont surpris et détruits. La nuit suivante, les Ki-21 de
l’Armée bombardent la ville, mais sont encore moins heureux que la veille, puisque les
Defiant, toujours là, en abattent quatre.
Devant l’évolution de la situation en Malaisie du sud, le général Wavell (en tant que
commandant en chef de l’ABDAFCOM) ordonne qu’une partie des transports du convoi
Long-Sword, ancrés à Tjilatjap (à Java) et encore chargés de matériel pour l’Armée, soient
escortés jusqu’à Port Weld, sur la côte ouest de la Malaisie. Le matériel en question est en
effet destiné aux unités qui se battent en Kedah et Port Weld est plus près du front que
Singapour. A 23h00, sept transports, escortés par le CL Mauritius, les DD Encounter et
Jervis, les avisos AA Black Swan, Erne et Ibis, quitte Tjilatjap. Ce convoi, baptisé
“Substance”, doit aussi être accompagné par la flottille de destroyers d’escorte du Cdr C.T.
Jellicoe. L’Air Vice-Marshal Pullford va s’efforcer d’assurer aux navires une couverture
aérienne dans le détroit de Malacca.
Campagne d’Indonésie
Balikpapan – A l’aube, la 4e Force d’Attaque Surprise japonaise se présente devant la petite
ville, où les installations pétrolières ont été partiellement sabotées par les ingénieurs
hollandais. Les neuf transports restant au contre-amiral Kubo commencent les opérations de
débarquement. A midi, le porte-hydravions Kamoi (6 F1M2, 4 E13A1, 2 E8N) a établi une
petite base d’où ses hydravions peuvent mener des patrouilles de couverture aérienne et ASM.
Mais ils ne peuvent empêcher leur escadre d’être surprise par six Hudson hollandais, qui
aggravent les dommages causés aux installations et touchent sévèrement le transport de la
Marine Nana Maru, lequel coulera un peu plus tard. En revanche, en fin d’après-midi, un raid
de trois Martin WH-3 du ML-KNIL est intercepté par les F1M2, qui abattent un bombardier
et repoussent les deux autres.
Pendant ce temps, la force du contre-amiral Glassford, sous la conduite du CL Concord, a
passé le détroit de Sape et file vers le nord à travers la mer de Flores, entre les îles Postillon.
16h30 – Les sept navires ont laissé loin à tribord la ville de Macassar (pointe sud-ouest de
Célèbes) et dépassé l’archipel de Spermonde. Glassford gouverne alors au nord-est, pour que
les reconnaissances aériennes ennemies pensent qu’il se dirige vers le golfe de Mandar.
17h40 – Un Do 24K hollandais de reconnaissance survole Balikpapan et a le temps de
confirmer la présence dans la baie de plusieurs transports et de petits patrouilleurs, avant
d’être repoussé par deux hydravions F1M2.
19h30 – Une heure après le coucher du soleil, le contre-amiral W.A. Glassford fait mettre le
cap à l’ouest pour s’élancer vers la baie de Balikpapan.
20h00 – L’officier de radio du Concord décode le dernier ordre de l’amiral Hart –
« Attaquez ». Glassford transmet alors en phonie ses instructions tactiques aux commandants
de ses navires : « Attaque à la torpille ; n’ouvrez pas le feu avant d’avoir lancé vos torpilles ;
faites preuve d’initiative et poursuivez l’attaque à fond. » La vitesse de la colonne est accrue à
27 nœuds.
Bataille de la Baie de Balikpapan (Bornéo)
Sur le papier, les forces étaient bien équilibrées, avec de chaque côté six destroyers menés par
un croiseur léger. Cependant, le contre-amiral Tanaka avait quelques avantages sur son
adversaire américain. D’abord, il pouvait s’appuyer sur les petits navires de la force de
surveillance de la baie, qui regroupait, autour du porte-hydravions Kamoi (6 F1M2, 4 E13A1,
2 E8N), trois patrouilleurs, quatre dragueurs de mines auxiliaires et trois chasseurs de sousmarins. Mais surtout, sa flottille de destroyers s’était durement entraînée pendant des mois
avant le début de la guerre ; ces sept navires étaient certainement parmi les plus efficaces de la
Marine impériale et s’étaient essayés de nombreuses fois à toutes les procédures tactiques du
combat de nuit. Par contre, les navires américains étaient notablement plus vieux et moins
bien armés que ceux des Japonais et leurs équipages, bien qu’ils fussent des professionnels de
l’Asiatic Fleet, n’avaient ni l’entraînement collectif, ni la connaissance du combat de nuit de
leurs adversaires ; deux seulement, les Bulmer et Barker, avaient une véritable expérience du
combat, durement acquise en décembre lors de la bataille de Tourane.
La feinte vers le nord-est exécutée par Glassford avant la tombée de la nuit n’avait pas abusé
Tanaka, qui s’attendait à ce que des navires alliés lancent une attaque de nuit contre les
transports qu’il protégeait. L’apparition en fin de journée d’un hydravion hollandais n’avait
fait que confirmer l’intérêt des Alliés pour le débarquement de Balikpapan.
(D’après Jack Bailey : Un océan de flammes – La Guerre aéronavale dans le Pacifique ;
Sydney, 1965 – New York, 1966 – Paris, 1969 ; avec l’aimable autorisation de l’auteur)
………
Bandjermasin (côte sud de Bornéo) – Les croiseurs-mouilleurs de mines rapides EmileBertin et Lamotte-Picquet commencent vers midi la pose d’un grand champ de mines défensif
devant le port. Leur travail terminé, ils embarquent 285 civils hollandais et repartent à grande
vitesse pour Sœrabaya à 16h00.
………
Kupang (Timor) – L’aérodrome est à nouveau attaqué par les bombardiers de la Marine
japonaise basés à Manado. Cette fois, ils ne détruisent au sol qu’un DC-3 et deux P-40E, mais
ils laissent derrière eux un terrain parsemé de cratères et inutilisable pour un bon moment.
Campagne de Nouvelle-Guinée
Les Japonais bombardent Lae et Salamaua, sur la côte nord-est. Sept avions civils (dont trois
Ju-52) sont détruits à Lae, douze à Salamaua.
22 janvier
Campagne de Birmanie
A l’extrême sud du pays, Mergui tombe. La garnison (2e Burma Rifles) est dispersée après
une brève résistance. Sous-estimant encore les Japonais, Wavell envoie ce message à l’étatmajor général de l’Empire : « L’avance japonaise dans le Tenasserim n’aurait pas dû avoir
de pareils résultats. Nos ennuis ont commencé à Tavoy, quand un bataillon de fusiliers
birmans s’est apparemment laissé surprendre et a cédé sans livrer le moindre combat. Puis,
nos troupes stationnées à Mergui, sans jamais avoir été vraiment attaquées, ont décroché en
hâte, craignant sans doute d’être coupées de leurs arrières. »
Wavell ajoute qu’il apparaît que les Japonais auraient dû être, et devraient être dorénavant,
aisément contenus, car ils n’ont engagé que peu de forces. Il se trompe : ce même jour, deux
régiments de la 55e Division sont en marche vers Moulmein. L’un progresse à l’est, par les
collines de Dawna en passant par Kawkareik, l’autre au sud-est, par la passe des Trois
Pagodes, appuyé par six mille soldats thaïlandais.
Dans l’après-midi, sur la route de Kawkareik, un camion de munitions anglais surchargé fait
chavirer le seul ferry de la rivière Kyiang (un affluent de la Salween) alors que la 17e Brigade,
qui bat en retraite vers Moulmein devant les troupes japonaises, commence à la franchir. Le
Brigadier Gracey ne perd pas son sang-froid. Avec une partie de ses hommes – et, bien obligé,
les véhicules et les armes lourdes – il va tenter de ralentir les Japonais, pendant que le reste de
ses troupes traversent la rivière sur des embarcations de fortune et marchent en hâte vers
Moulmein.
Averti, Harvey comprend qu’il ne va pas tarder à être acculé contre la Salween et écrasé.
Pourtant, obéissant à ses ordres, il fait finalement passer la 19e Brigade à l’est du fleuve et se
prépare à défendre Moulmein avec les 18e et 19e Brigades. Il a pris soin de bâtir des bunkers
de troncs couvrant l’ensemble de la zone. Mais en même temps, il a rassemblé des bateaux et
fait tendre des câbles en travers du fleuve pour donner à ses troupes la possibilité de s’enfuir
si sa mince ligne de défense craquait. De plus, il prend la précaution de transférer l’artillerie et
les transports des deux brigades et de sa division à l’ouest du fleuve.
Campagne d’Indochine
Cochinchine – Saigon et Bien-Hoa sont de nouveau bombardés par les avions japonais.
Escortés par six P-40 de l’AVG, les trois derniers Martin-167 d’Indochine attaquent les
embarcations utilisées par les troupes japonaises et thaïes pour traverser le Mékong. Ils en
détruisent en tout quatorze, faisant de nombreuses victimes chez les soldats transportés, pour
la perte d’un P-40 et d’un Maryland abattus par la DCA.
Le Haut-Commissaire, Jean Sainteny, rend visite aux forces françaises et locales qui tiennent
bon à Xuan-Loc. Un nouveau bataillon de volontaires chinois est mis sur pied et envoyé à
Bien-Hoa pour compléter son entraînement et servir de réserve mobile.
Campagne de Malaisie
La bataille en Malaisie du nord – En Kedah, par un temps épouvantable, les forces
japonaises, soutenues par des chars, tentent d’avancer de nuit le long de la voie ferrée malgré
une pluie continuelle et de nombreux orages, mais elles sont arrêtées avant l’aube par un
barrage d’artillerie. Dans la matinée, la 11e D.I. indienne (major-général D.M. Murray-Lyon)
lance une contre-attaque limitée autour de l’axe routier pour empêcher l’avant-garde japonaise
de gêner le repli de la 8e D.I. australienne. Soutenus par les chars A13 du 1er Squadron des
Royal New South Wales Lancers, les hommes de la 6e Brigade d’Infanterie indienne
(Brigadier W.O. Lay, 2e East Surrey Regt, 1/8e Punjab, 2 et 3/16e Punjab) repoussent les
Japonais de plus de quatre km, détruisant dans leur élan une batterie d’artillerie de campagne.
Par ailleurs, l’aviation japonaise étant clouée au sol par les abominables conditions
atmosphériques, l’artillerie britannique peut à loisir démontrer son savoir-faire. Elle exécute
un exercice de “manœuvre par le feu” qui inflige de lourdes pertes aux colonnes japonaises
qui tentent d’avancer.
Au crépuscule, une tentative d’infiltration à l’est de la ligne de chemin de fer est arrêtée sans
difficulté par les 2/1er et 1/2e Gurka.
………
La bataille en Malaisie du sud – Soucieux de ne pas répéter les très coûteuses attaques
frontale contre les défenses de Kota Tinggi, le commandement japonais reporte sur Kluang
l’axe de son effort principal. Une première attaque est repoussée vers midi, mais les pertes
sont lourdes des deux côtés. Les obusiers britanniques de 9,2 pouces commencent alors à
pilonner les lignes japonaises. Comme le temps en Johore est bien meilleur qu’en Kedah, les
avions de la Marine japonaise apparaissent en début d’après-midi au-dessus du champ de
bataille, mais, peu entraînés à l’appui au sol, ils se montrent bien moins efficaces que leurs
collègues basés à Singora.
En fin de journée, une nouvelle attaque japonaise est brisée, mais le 4/19e Hyderabad est
décimé et le 5/2e Punjab subit lui aussi de lourdes pertes. Ils sont alors relevés par des
éléments de la 9e D.I. indienne et, peu avant la tombée de la nuit, une contre-attaque emmenée
par des chars repousse les Japonais hors des limites du terrain d’aviation.
Tard dans la soirée, lord Gort rend visite aux défenseurs de Kluang, n’hésitant pas à aller
jusqu’en première ligne pour féliciter les unités qui ont repoussé les attaques japonaises. Il
explique à tous, hommes et officiers, que cette bataille est capitale. En effet, si les Japonais
parvenaient à couper en deux la Péninsule au niveau de Kluang, les troupes qui défendent le
nord seraient dans une position très difficile.
Par ailleurs, dans le courant de la journée, des avions de la Marine japonaise (27 G3M2
escortés par 18 A6M2) attaquent Johore Bahru, faisant de gros dégâts.
Londres – Bien conscient que, le Japon ayant conquis la maîtrise des mers (et bientôt du ciel)
dans la région, la Malaisie et Singapour seront perdues à terme, le gouvernement britannique
recherche les moyens de limiter les graves conséquences de cette défaite pour la solidité de
l’Empire Britannique (voir Appendice 4).
Campagne d’Indonésie
Palembang (Sumatra) – Les squadrons 21, 30 et 453 de la RAAF sont amalgamés sur le
terrain de Palembang II pour former une unité provisoire dotée de 18 Hurricane convoyés de
Rangoon par Sabang. De la même façon, les squadrons 60 et 62 de la RAF reçoivent 9
bombardiers Blenheim. Les chasseurs doivent protéger le convoi “Substance” dans le détroit
de Malacca.
………
Batavia (Java) – Le vieux garde-côte cuirassé Soerabaja, transformé en bâtiment
d’entraînement, quitte Batavia pour Fremantle.
………
Bataille de la Baie de Balikpapan (Bornéo) [suite et fin]
A 01h47, un projecteur apparut par bâbord avant du vaisseau amiral américain. C’était le
patrouilleur PB-37, envoyé par Tanaka garder l’entrée de la baie. Le Japonais interrogea les
navires alliés au projecteur à éclats. Pour éviter de se démasquer, Glassford ordonna de ne pas
faire feu et de venir au 20 (nord-nord-est) pendant vingt minutes. A ce moment, Tanaka était
sur la branche sud-ouest d’un parcours couvrant le PB-37. Alerté, il ordonna à ses navires de
remettre le cap au nord, pour reprendre position entre Balikpapan et les navires “suspects”.
A 02h07, Glassford ordonna à sa colonne de reprendre la direction de Balikpapan, vers
l’ouest. A 02h10, les navires américains filaient plus de 27 nœuds et leurs lames d’étraves
furent détectées au nord-est par les vigies du Jintsu, qui arrivait du sud. Tanaka décida alors
d’accélérer à 28, puis à 31 nœuds. A 02h24, il donna l’ordre de lancer une demi-salve de
torpilles et d’abattre vers le nord-ouest pour éviter de possible torpilles américaines.
A 02h31, la colonne japonaise, qui filait alors plus de 30 nœuds, fut enfin aperçue par le
Concord, sur bâbord, mais Glassford refusa de lancer ses torpilles, car il espérait déborder les
navires japonais. Il semble aujourd’hui que Glassford ait été inquiet du risque de dépenser ses
torpilles avant d’atteindre les transports japonais, qui étaient l’objectif prioritaire. A 02h35, il
ordonna avec réticence à la moitié de ses bateaux de tirer une demi-salve – « Bateaux pairs
tirent, bateaux impairs non » – pour tenter de repousser les navires japonais. Mais les torpilles
japonaises allèrent au but à 02h36.
Le Concord fut frappé par une “Longue Lance” au niveau de la tourelle arrière. L’explosion
secoua le navire comme une simple barque, détruisant le gouvernail et trois des quatre arbres
d’hélices, bloquant la tourelle arrière et allumant un incendie violent. Le navire sortit
brutalement de la ligne. Le Pope, qui venait en numéro trois, fut touché en plein milieu. Les
24 pouces de la torpille furent trop lourds à digérer pour le vieux “four-piper” qui se brisa
rapidement en deux. Les navires américains furent alors jetés dans la plus grande confusion.
Les John D. Ford, Paul-Jones et Pillsbury abattirent à bâbord, vers le sud, pour éviter la
carcasse en flammes et ingouvernable du Concord. Il semble que le commandant de la
DesDiv 59, le Cdr Paul H. Talbot, à bord du John D. Ford, crut qu’un sous-marin japonais
avait torpillé son vaisseau amiral et le navire qui le suivait ; il ordonna donc à la DesDiv 59 de
revenir au 270. Le capitaine du Bulmer, qui commandait ce qui restait de la DesDiv 58, n’était
pas du même avis. La façon dont le Concord avait été touché lui rappelait trop exactement ce
qu’il avait vu pendant la bataille de Tourane. Il ordonna d’abattre à tribord, vers le nord, et
signala au Barker par projecteur « Suivez-moi ». Ce faisant, il masquait les deux navires de la
DesDiv 58 derrière le Concord en flammes.
A 02h40, Tanaka, qui se trouvait maintenant au nord-ouest de la DesDiv 59, ordonna de
revenir vers tribord, au 90, pour achever le Concord, stoppé et incendié. La colonne japonaise
suivait dès lors le cap inverse de celui de la DesDiv 59. A 02h42, les vigies du Jintsu
signalèrent les Américains, cette fois encore bien avant que ceux-ci n’aperçoivent les navires
japonais. Les deux colonnes filant plus de 30 nœuds, la distance diminuait vite et Tanaka
décida rapidement de lancer une nouvelle demi-salve et de venir au nord pour éviter
d’éventuelles torpilles américaines. A 02h45, il ordonna d’ouvrir le feu au canon, car ses
navires avaient entamé leur virage. C’est à cet instant que les Américains aperçurent les
navires japonais. Le Cdr Talbot ordonna à ses navires d’ouvrir le feu et de lancer leurs
torpilles tribord. Cependant, les Japonais filaient alors parallèlement aux torpilles américaines
et à 30 nœuds. Cette fois, les torpilles japonaises ne firent elles non plus aucun mal, ayant
sans doute été tirées trop tôt. Cependant, les canons japonais, plus nombreux et plus puissants
que ceux des Américains, atteignirent la passerelle du Paul-Jones et les machines du Ford. Le
premier se mit à zigzaguer tandis que le second ralentissait à 22 nœuds – le temps était
compté pour la DesDiv 59.
A 02h53, estimant être à l’abri des torpilles américaines, Tanaka ordonna de revenir vers le
sud, pendant que ses équipages rechargeaient leurs tubes lance-torpilles, capacité dont les
destroyers américains ne disposaient pas. A 03h00, Tanaka s’était rapproché du Concord, qui
fut exécuté par une torpille du Jintsu. Celle-ci frappa le malheureux vaisseau, qui coulait en
fait déjà lentement par la poupe, à la salle des machines. Après une violente explosion, une
gerbe de flammes jaillit entre les cheminées et envahit tout l’arrière du croiseur en quelques
instants.
L’amiral japonais ordonna alors de venir au sud-ouest pour se rapprocher des trois destroyers
de la DesDiv 59, trahis par l’incendie qui brûlait sur l’avant du Paul-Jones. La vitesse des
trois Américains, qui n’étaient plus en ligne, était tombée à 20 nœuds, à cause des avaries du
Ford, et la distance se réduisit en peu de temps. Cette fois, les vigies américaines détectèrent
les Japonais avant que ces derniers ne se soient placés en bonne position pour tirer leurs
torpilles. Ne pouvant accélérer sans abandonner le Ford à la merci de l’ennemi, le Paul-Jones
et le Pillsbury tournèrent vers le nord avec lui, et tous trois ouvrirent le feu de leurs vieux
canons de 4 pouces. Leur tir n’était pas très précis, mais le Jintsu fut touché deux fois, sans
grands dommages. En réponse, des obus plus gros et plus nombreux commencèrent à pleuvoir
sur les navires américains. Le John D. Ford fut à nouveau touché à la salle des machines
pendant qu’un obus de 5,5 pouces du Jintsu détruisait son canon avant. Le Pillsbury ne fut
touché que par un obus, mais le Paul-Jones reçut de nombreux coups, dont l’un détruisit son
canon arrière. Le navire était à ce moment dirigé de la position de commandement arrière par
son troisième officier, qui commanda : « En avant toute ! ». Pour le Cdr Talbot (commandant
de la DesDiv 59), le Lt-Cdr Cooper (commandant du Ford, blessé mais à son poste), comme
pour tous les hommes du Ford, il devint clair que le Paul-Jones avait décidé d’éperonner le
vaisseau de tête japonais. Tanaka comprit aussi l’intention du Paul-Jones. Il ordonna à tous
ses navires de concentrer leurs tirs sur le destroyer enragé et abattit à tribord, venant au 330.
Les hommes du Paul-Jones durent comprendre qu’ils ne pourraient atteindre le croiseur qui
les assommait à coups de 5,5 pouces, et le destroyer se dirigea vers le navire japonais le plus
proche, le destroyer Kuroshio. Le commandant de ce dernier ordonna « Tribord toute ! » en
voyant approcher le brûlot qu’était devenu le Paul-Jones, mais il était évident que ce ne serait
pas suffisant pour qu’il puisse échapper à la collision. C’est alors qu’une énorme explosion,
sans doute due à un obus ayant atteint la soute à munitions avant, arracha la proue du PaulJones. Brutalement stoppé dans son élan, le destroyer commença aussitôt à couler par l’avant.
Il était à moins de 250 mètres du Kuroshio. Malgré la violence de cette nuit terrible, les
Japonais cessèrent aussitôt le feu. « Quand le Jintsu passa près du Paul-Jones, déjà à moitié
submergé, raconta Tanaka dans son rapport, je vis un marin qui hissait à nouveau le drapeau
américain, arraché par un obus. J’ai du mal à comprendre comment une volonté de
combattre aussi forte peut s’accorder avec la douceur (sic) de ces hommes une fois
prisonniers, et le naturel avec lequel ils semblent alors accepter cette situation. »
Le Pillsbury, qui avait été un “bateau impair” lorsque Glassford avait ordonné une demi-salve
de torpilles, profita de la confusion régnant dans la colonne japonaise pour lancer les torpilles
qui lui restaient. Le pari fut payant, car une torpille frappa le Natsushio à la chambre des
machines. Le destroyer, gravement endommagé, s’arrêta net et aurait certainement coulé s’il
avait été en pleine mer. Cependant, les trois derniers destroyers japonais s’en prirent alors au
Pillsbury. Celui-ci reçut sans doute en deux minutes dix obus de 5 pouces qui le laissèrent en
flammes et en panne, ses conduites de vapeur rompues.
Il était 03h12. Pour le John D. Ford, dont la vitesse était tombée à 5 nœuds, c’était l’heure du
coup de grâce. Mais le Jintsu et les cinq destroyers intacts mirent alors le cap au nord, vers
Balikpapan.
Ce qui venait de sauver temporairement les survivants de la DesDiv 59 était l’action des
Bulmer et Barker. Les deux navires de la DesDiv 58 s’étaient éloignés vers le nord, puis
avaient fait route au 320. Les incendies des puits de pétrole allumés par les ouvriers
hollandais et par les bombes tombées dans l’après-midi donnaient à la nuit un aspect infernal.
A 02h56, les deux destroyers aperçurent un bateau par le travers bâbord. C’était le
patrouilleur PB-38, qui montait la garde près des transports. Il ne les vit pas, ou les prit pour
des navires de Tanaka et les laissa passer sans les interroger. Les huit transports ennemis
restants les attendaient, disposés sans défense sur deux rangs. Un rêve de destroyer ? En fait,
ce n’était pas si simple. Dans la nuit, il n’était pas facile de distinguer précisément les
transports et d’évaluer leur distance. De temps en temps, certains se silhouettaient sur le fond
des incendies, avant d’être masqués par la fumée huileuse du pétrole brûlé, puis de ressurgir
comme des vaisseaux fantômes…
A 03h04, les destroyers aperçurent un transport à bâbord et le Barker (qui avait été un “bateau
impair”) lui lança trois torpilles, mais le manqua. En effet, à courte distance, la réussite des
tirs était en grande partie une question de chance, en raison de la vitesse élevée des
destroyers… et il n’était pas question de ralentir. Les deux destroyers continuaient à errer
dans la baie, quand, à 03h06, un bateau ennemi que l’équipage du Barker prit pour un
destroyer fut signalé sur l’arrière. Il s’agissait du petit dragueur de mines W-15, en patrouille
ASM, mais le Barker lui lança trois autres torpilles… et le manqua (le W-15 ne s’aperçut
d’ailleurs de rien !). A 03h10, une autre cible fut signalée par bâbord avant ; le Bulmer mit le
cap au 270, puis effectua un demi-tour afin de pouvoir lancer ses torpilles de tribord. A
03h14, une puissante explosion secoua le silence sépulcral de la baie : le Sumanoura Maru,
chargé de munitions, venait de se désintégrer. Le commandant du Bulmer comprit que,
l’alerte étant donnée, il n’avait plus beaucoup de temps devant lui. A 03h18, le Barker tira ses
torpilles tribord sur un autre transport, qui était en fait sa première cible, mais il eut cette fois
plus de réussite, et le Tatsukami Maru, éventré, coula rapidement.
Les six transports restant au mouillage étaient à présent en alerte, et des tirs d’armes légères
partaient de tous les navires, contre les bâtiments américains ou contre des ombres. Les deux
destroyers remontèrent une nouvelle fois la rangée japonaise, tirant de leurs canons de 4
pouces. Mais leurs obus n’étaient pas assez gros ni assez nombreux (deux canons par navire
seulement) pour faire d’importants dégâts. A 03h30, n’ayant plus de torpilles, les deux
destroyers se dirigèrent vers la sortie de la baie.
Malheureusement pour eux, c’était leur tour de se silhouetter sur le fond des incendies de
Balikpapan. A 03h36, une vigie du Bulmer signala des navires venant à leur rencontre, et se
rapprochant rapidement. Le capitaine ordonna de virer vers l’est, pour tenter de s’échapper
vers le détroit de Macassar, mais comme les deux navires entamaient leur virage, le Bulmer
fut atteint par une, voire deux “Longues Lances”. Le vieux bâtiment se brisa en plusieurs
morceaux sous les yeux horrifiés des marins du Barker. Mais ceux-ci n’eurent pas le loisir de
pleurer leurs camarades, car une pluie d’obus de 5 et 5,5 pouces commença à les arroser. Le
capitaine du Barker ordonna d’émettre un écran de fumée, mais avant que celui-ci ne puisse
cacher le navire, plusieurs obus avaient atteint leur objectif et un incendie brûlait entre les
cheminées 2 et 3, fournissant aux canonniers japonais une excellente cible. A 03h44, le canon
arrière était détruit et à 03h46, au moins deux obus crevaient la chaudière avant et la pression
de vapeur commençait à tomber. Voyant son navire condamné, le capitaine ordonna de faire
face à l’ennemi pour démasquer le canon avant, qui se mit à aboyer rageusement contre le
Jintsu. Il ne fallut pas cinq minutes aux Japonais pour le réduire au silence. Le Barker ne
donnait alors plus que 12 nœuds et commençait à couler par la proue. L’ordre d’abandonner le
navire fut donné à 03h56, après que les valves de sabordage aient été ouvertes.
Tanaka laissa l’Amatsukaze s’occuper des survivants du Barker et s’enfonça dans la baie avec
ses quatre autres destroyers. La confusion était complète. Certains des capitaines des
transports croyaient avoir été attaqués par un sous-marin, alors que d’autres avaient bien vu
les destroyers américains, mais pensaient que leurs ennemis étaient encore à l’affût dans la
baie. Tanaka décida de patrouiller près d’eux jusqu’à 05h30 pour s’assurer que tout allait bien
désormais.
Cette décision donna un peu de répit aux survivants de la DesDiv 59. Les machines du
Pillsbury étaient trop endommagées pour être rapidement réparées et à 03h55, le Cdr Talbot
ordonna de saborder le navire. Le John D. Ford pouvait alors donner 15 nœuds, mais sa radio
était irréparable. A 04h20, après avoir recueilli l’équipage du Pillsbury, le navire mit le cap au
sud. A 05h15, un bateau fut signalé par bâbord avant, mais le contact fut rapidement perdu.
C’était le PB-37, qui continuait de surveiller l’entrée de la baie.
L’aube était proche, et les marins américains savaient qu’elle ne leur apporterait que de
nouvelles épreuves.
(D’après Jack Bailey : Un océan de flammes – La Guerre aéronavale dans le Pacifique ;
Sydney, 1965 – New York, 1966 – Paris, 1969 ; avec l’aimable autorisation de l’auteur)
………
Détroit de Macassar – Les croiseurs mouilleurs de mines français Emile-Bertin et LamottePicquet, arrivés à 02h00 à Sœrabaya, se voient peu après ordonner par l’amiral Hart de
retourner vers le détroit de Macassar pour couvrir la retraite des navires du groupe d’attaque
américain. Les deux vaisseaux ravitaillent en hâte et quittent le port à 04h00, filant vers le
nord à 30 nœuds. A 14h00, ils sont à la hauteur de Bandjermasin quand ils repèrent un avion
de reconnaissance japonais. Craignant une attaque aérienne, le CV Battet, qui commande la
petite escadre, demande à ABDAFFloat la permission de se retirer, mais Hart, qui n’a reçu
que des nouvelles confuses de la bataille de la nuit précédente, croit encore que deux et peutêtre trois destroyers américains sont en train de battre en retraite vers le sud ; il ordonne aux
bâtiments français de poursuivre.
En réalité, le John D. Ford a rendu l’âme près de deux heures plus tôt.
Peu après l’aube, faisant route vers le sud, son équipage aperçoit d’abord quelques avions, qui
se révèlent être alliés : il s’agit d’un DC-3 du ML-KNIL escorté par quelques Buffalo, qui se
dirige vers Samarinda-II pour des vols d’évacuation. Cependant, à 09h30, apparaît un avion
solitaire, qui ne peut être que japonais. Et à 14h40, cette estimation est confirmée par l’arrivée
de 18 bombardiers bimoteurs. Ceux-ci exécutent un bombardement à basse altitude que le
destroyer endommagé ne peut guère éviter correctement. Rapidement touché par trois bombes
de 270 kg et secoué par plusieurs autres qui le ratent de peu, le John D. Ford chavire à 12h10.
Pourtant, les survivants du Ford et du Pillsbury ne finissent pas prisonniers ou dévorés par les
requins : en fin de journée, seuls chanceux de toute l’escadre Glassford, ils sont secourus par
deux sous-marins, l’Américain Saury et le Hollandais K-XIV.
Pendant ce temps, les deux Français n’ont pas eu d’autre choix que de filer aussi vite que
possible vers le nord. Ayant atteint vers 16h00 la latitude du cap Mandar sans avoir rien vu,
ils décident de faire demi-tour. Mais les deux navires ne gouvernent pas au 180 depuis plus de
40 minutes que 27 G4M1 du Takao Kokutai et du 1er Kokutai les repèrent. Montant à 33
nœuds et zigzaguant follement, les deux bâtiments échappent à toutes les attaques jusqu’à
17h20. A ce moment, le Lamotte-Picquet est frôlé par deux bombes dont l’explosion met son
gouvernail hors service. Le navire poursuit sa route en gouvernant aux moteurs, mais il est
touché quelques minutes plus tard par une bombe de 250 kg qui allume un sérieux incendie
sur la plage arrière. Par bonheur, le crépuscule arrive avant que les avions japonais puissent
lancer un nouveau raid et les deux navires parviennent dans la nuit à se mettre à l’abri.
Concluons avec le fameux historien américain Samuel E. Morison, qui a laissé dans le tome
“The Rising Sun” de son histoire de l’US Navy dans la Deuxième Guerre Mondiale une sorte
d’épitaphe aux morts de la bataille de Balikpapan : « A un moment où la nation avait faim
d’annonces d’actions et de victoires, la disparition de l’escadre du contre-amiral Glassford
dans la nuit du 21 au 22 janvier ne fut qu’un désastre de plus dans une longue chaîne de
défaites. Nous semblions incapables de faire autre chose que perdre des navires et des
hommes. Jusqu’à la fin de la guerre, nul ne sut rien de la courageuse attaque des transports
japonais par les Bulmer et Barker. Ce n’est pas avant la libération des survivants du Barker
des camps de prisonniers de guerre, où beaucoup d’entre eux étaient morts, que nous
apprîmes que l’US Navy avait rendu cette nuit-là une partie des coups reçus. Dans la froide
lumière du jour, six ans plus tard, la charge du Paul-Jones tentant d’éperonner le Jintsu
semble n’avoir été qu’un acte suicidaire et un gaspillage d’hommes et de matériel. Pourtant,
dans cette nuit désespérée, au milieu des navires japonais et sous une pluie d’obus, la
décision du troisième officier du Paul-Jones apparaît comme un éblouissant exemple du plus
bel esprit de combat.
Les équipages des destroyers de l’Asiatic Fleet savaient qu’ils étaient dans une large mesure
le meilleur des forces de l’amiral Hart, mais en même temps qu’eux-mêmes et leurs vieux
navires étaient sacrifiables. Il était probablement futile d’envoyer les deux croiseurs français
soutenir nos destroyers sans la moindre couverture aérienne, quand nous avions durement
appris à quel point l’ennemi pouvait utiliser sa maîtrise du ciel pour contrôler la mer.
Néanmoins, l’amiral Hart avait raison de penser que ses hommes méritaient tout le soutien
qu’il pouvait leur fournir, même s’il fut critiqué à la fois par l’amiral Decoux et par l’amiral
Palliser pour avoir mis en danger les deux plus importants navires de la Mineforce de
l’ABDAFFloat. » (S.E. Morison, The Rising Sun in the Pacific, pp. 291/292).
23 janvier
Campagne de Birmanie
Mingaladon – Arrivée des premiers Hurricane IIB du Sqn 136, équipés de réservoirs
supplémentaires non largables. Peu après survient un sweep de 24 Ki-27 du 50e Sentai. Sept
Hurricane les défient et en abattent deux ; trois Hurricane sont très endommagés, mais aucun
n’est abattu. Pendant ce temps, 12 Ki-48 du 8e Sentai attaquent sans opposition les navires
dans l’estuaire, mais ne font guère de dégâts.
Un second raid japonais (24 Ki-27 du 77e Sentai et 12 Mitsubishi Ki-30 “Ann”du 31e) arrive
30 minutes plus tard. Cependant, les Ki-27 ont raté le rendez-vous et les Ki-30, non escortés,
sont pris à partie par 12 P-40 de la ROCAF qui, dans une grande confusion, en abattent un, en
touchent gravement trois (ils seront irréparables) et endommagent plus légèrement tous les
autres. Les Ki-27 arrivent alors pour sauver les bombardiers et abattent trois P-40 sans perte.
Le bombardement est évidemment avorté.
Campagne d’Indochine
Cochinchine – Les forces japonaises et thaïlandaises ont lancé « l’offensive finale » vers
Saigon.
En début de matinée, après une préparation d’artillerie d’une heure et demie, des éléments de
la 7e D.I. japonaise (Lt-général Nobory), soutenus par les survivants des 3e et 4e Régiments
blindés, lancent une attaque massive contre les positions des forces françaises et locales sur la
RC-1, vers Tay-Ninh. L’attaque n’est d’abord ralentie que par des champs de mines et des
barrages, et les troupes japonaises traversent la frontière entre Cambodge et Cochinchine vers
midi. Alors qu’elles approchent de Tay-Ninh par l’ouest, elles sont attaquées dans l’aprèsmidi par les P-40 de l’AVG basés à Tan-Son-Nhut, qui accomplissent deux raids de six avions
et ne perdent qu’un des leurs, pendant le second raid, abattu par la DCA ou par les éclats des
bombes lâchées par l’avion qui le précédait.
Au crépuscule, les forces japonaises subissent une contre-attaque lancée par l’unique
compagnie de chars du GBMS restant à l’ouest de Saigon. Cette unité, réduite à huit Sav-41 et
cinq M3F et soutenue par une compagnie d’infanterie mécanisée, s’attaque à la colonne
japonaise qui progresse vers Tay-Ninh. Désespérément, les chars japonais acceptent le
combat, mais ils démontrent à nouveau l’insuffisance de leur blindage et le faible pouvoir de
pénétration de leur canon. Six Type-97 et cinq Type-95 sont détruits, en échange d’un M3F et
un Sav-41 seulement. Du coup, la poussée japonaise s’arrête 20 km à l’ouest de Tay-Ninh.
Dans la nuit, “ajoutant l’insulte à la blessure”, quatre Potez-25 TOE biplans harcèlent les
lignes japonaises avec des grenades ou des bombes de 10 kg.
………
Tonkin – Le front est toujours calme.
Campagne de Malaisie
La bataille en Malaisie du nord – En Kedah, les troupes japonaises se regroupent devant
Gurun et le front est relativement calme toute la journée, en dehors d’attaques aériennes
sporadiques. Néanmoins, l’aviation de l’Armée maintient sa pression sur les lignes de
communication entre Ipoh et Gurun, avec deux raids sur Ipoh effectués par des bombardiers
légers Ki-48 et des mitraillages constants de chasseurs Ki-27 et Ki-43 sur toute la région.
………
La bataille en Malaisie du sud – Soutenu par l’artillerie et notamment par des obusiers de
9,2 pouces, la 22e Brigade d’Infanterie indienne contre-attaque les forces japonaises, usées par
les combats de la veille. Dans l’après-midi, les Japonais ayant été reconduits jusqu’à 20 km du
terrain de Kluang, le major-général A.E. Barstow, commandant la 9e D.I. indienne, rappelle
l’attaque et les deux camps commencent à se retrancher. C’est la fin de la “Première bataille
de Kluang”, tentative japonaise pour parvenir rapidement jusqu’à la côte ouest en prenant
Kluang d’assaut.
A Kota Tinggi, les troupes japonaises sont toujours arrêtées par les défenses britanniques et la
ligne de front est relativement calme.
………
La bataille aérienne de Singapour – A 11h15, 36 G3M2/3 escortés par 27 A6M2 attaquent
le port ; un bombardier est abattu par la DCA, tandis que le navire atelier Ping Woo, incendié,
est gravement endommagé. A 14h30, 27 Ki-21 sans escorte bombardent la ville de Singapour.
………
Mer de Chine Méridionale – Les porte-avions légers de la 2e Flotte de Kondo se rendent à
Mako (Pescadores) pour y ravitailler et embarquer de nouveaux chasseurs. Les Hiryu et Soryu
restent stationnés au large de la côte malaise pour couvrir les forces engagées contre Kota
Tinggi.
………
Détroit de la Sonde – A 11h00, le convoi “Substance”, en route pour Port Weld, passe le
détroit de la Sonde, cap au nord. Quelques heures plus tard, les sous-marins français de 1 500
tonnes Sfax, Bévéziers, Casabianca et Sidi-Ferruch ainsi que leurs cousins plus petits Aurore
et La Créole, arrivant de Méditerranée, passent à leur tour le détroit, cap à l’est, vers
Sœrabaya. L’évolution de la situation a conduit à dissocier la flottille : les sous-marins
mouilleurs de mines Diamant et Perle, plus lents, ont été laissés en arrière ; progressant à leur
rythme en compagnie du ravitailleur Cap des Palmes, ils prendront le même chemin quelques
jours plus tard.
Campagne d’Indonésie
Mer de Florès – Les croiseurs Emile-Bertin et Lamotte-Picquet passent le détroit de Lombok
(entre Bali et Lombok), en route vers Tjilatjap (côte sud de Java). Le Lamotte-Picquet doit
gouverner aux moteurs et est incapable de donner plus de 10 nœuds.
Pendant ce temps, l’amiral Hart envoie aussi le croiseur lourd Houston à Tjilatajap, Sœrabaya
devenant bien trop exposée aux raids aériens japonais.
………
Détroit de Macassar – A 01h30, le sous-marin USS Sturgeon, qui a détecté un convoi de huit
transports japonais allant de Tarakan à Balikpapan, effectue une approche aux hydrophones et
lance une gerbe de torpilles par la proue. Deux ou trois explosent à grand bruit. L’historien
S.E. Morison devait écrire, bien plus tard : « Le skipper du Sturgeon, le Lt Cdr W.L. Wright,
envoya un message laconique qui offrit aux Américains l’une des rares occasions de sourire
lors de cette lugubre campagne d’Indonésie : “Sturgeon dépucelé”. Malheureusement, aucun
navire japonais ne fut perdu cette nuit-là : il semble que, comme dans de trop nombreux
autres cas, les torpilles aient explosé avant de toucher leur cible. »
L’USS Pickerel est encore beaucoup moins heureux que le Sturgeon. A 05h20, le Cdr Bacon
donne l’ordre d’attaquer le porte-hydravions Kamoi devant la baie de Balikpapan, mais
aucune de ses quatre torpilles ne touche la cible, en dépit de deux explosions clairement
entendues par l’équipage du sous-marin. Le Pickerel est alors contre-attaqué par deux
chasseurs de sous-marins et un dragueur de mines. Gravement endommagé par des grenades
sous-marines, il doit faire surface à 13h20 et est attaqué par deux destroyers. Après avoir tenté
de replonger, le sous-marin doit refaire surface à 14h10 et est sabordé par son équipage.
Pendant ce temps, le destroyer Natsushio, torpillé deux nuits plus tôt par le Pillsbury, est
échoué à marée basse près de l’entrée de la baie de Balikpapan, sa chambre des machines
arrière continuant à prendre l’eau en permanence. Le navire est assisté par le dragueur W-15.
………
Mer des Moluques – Le groupe du contre-amiral T. Tagaki (CA Nachi, Haguro et Myoko,
CVL Ryujo [25 A5M4 et 18 B5N2], porte-hydravions Chitose [12 F1M2, 8 E13A1, 4 E8N],
DD Shiokaze), couvert par les porte-avions Shokaku et Zuikaku (avec les DD Akigumo, Arare,
Kagero, Shiranui), couvre deux débarquements presque simultanés, à l’ouest et à l’est de la
Mer des Moluques.
Tôt le matin, soutenus par les avions du Ryujo et les hydravions du Chitose, le portehydravions Mizuho, les poseurs de mines Okinoshima et Tsugaru et trois transports entrent
dans le port de Kendari (au sud-est de l’île Célèbes) et y débarquent des forces spéciales de la
Marine. Kendari est faiblement défendu et en fin de journée, la ville et son terrain d’aviation
sont entre les mains des Japonais.
A 10h30, après une “préparation d’aviation” effectuée par des G4M1 basés à Manado et par
les bombardiers des Shokaku et Zuikaku, 33 avions de transport de la Marine (des DC-3
construits sous licence par Showa) lâchent 550 parachutistes sur le terrain d’Amboine (au sud
de l’île Céram), pendant que les obus des croiseurs lourds Nachi et Haguro couvrent l’entrée
dans le port de dix transports. Les parachutistes subissent de lourdes pertes sur l’aérodrome,
mais peuvent empêcher son utilisation par les Alliés pendant que deux régiments d’infanterie
de marine japonais débarquent des transports. En dépit des avertissements de l’amiral Hart
(ABDAFFloat), soulignant qu’Amboine était un objectif évident une fois les Japonais bien
installés à Manado, la ville n’est défendue que par deux bataillons australiens et quelques
troupes hollandaises. Trois bataillons hollandais devaient renforcer cette garnison, mais, le 23
janvier, ils attendent encore des transports rapides à Sœrabaya. En fin de journée, l’infanterie
de marine réussit à rejoindre les parachutistes survivants, bien que de furieux combats se
poursuivent dans la ville.
Ces deux débarquements sont protégés par les sous-marins Ro-33 et Ro-34, ainsi que par les
sous-marins mouilleurs de mines I-121, I-122, I-123 et I-124.
Bandœng – Dans la soirée, une réunion de tout l’état-major de l’ABDAF fait le point sur les
récents événements.
L’amiral Hart, encore sous le choc de la perte de sept de ses navires et du contre-amiral
Glassford, relève que les débarquements japonais à Kendari et Amboine ne peuvent signifier
qu’une chose : un autre débarquement est en préparation, et cette fois à Timor.
Le général Wavell reconnaît la menace contre Timor, mais désire maintenir la priorité donnée
à l’opération de ravitaillement du nord de la Malaisie (Substance). « Notre situation est
actuellement stabilisée en Malaisie, et Singapour peut tenir indéfiniment, même si elle ne peut
plus jouer le rôle d’une grande base navale » affirme-t-il, et il ajoute : « Tenir fermement la
partie ouest de la Barrière Malaise me paraît plus important qu’essayer de la défendre sur
toute sa longueur, au risque de tout perdre. »
Cette déclaration soulève de vives objections parmi les officiers américains, australiens,
hollandais et français. « La perte de Timor couperait les liaisons entre Java et Darwin, et
ouvrirait l’Australie à un possible débarquement japonais » arguent les Australiens, soutenus
par les Américains. « La perte de Timor offrirait aux Japonais un point d’appui parfait pour
débarquer à Bali, puis à Java » clament les Hollandais, approuvés par les Français.
Tard dans la nuit, les Alliés parviennent, non sans mal, à un compromis. L’ABDAF Strike
Force de l’amiral Doorman doit se concentrer dans la baie de Denpasar (sur la côte sud de
Bali), qui paraît maintenant moins exposée que Sœrabaya, pour pouvoir attaquer les convois
japonais qui traverseraient la Mer de Banda en allant d’Amboine ou Kendari vers Timor.
Cependant, du fait des dommages infligés au Houston, et pendant que deux croiseurs
australiens et la DesDiv 61 (USS Shubrick, Bailey, Swasey et Meade) sont à Fremantle pour
escorter un convoi de ravitaillement, la Strike Force est réduite à quatre croiseurs légers
(HrMs De Ruyter (amiral), Java et Tromp, HMAS Perth), un CLAA (HrMs Jacob van
Heemskerck) et neuf destroyers (HrMs Banckert, Evertsen, Kortenaer, Piet Hein, Van Ghent,
Van Nes et Witte de With ; USS Alden et Edsall).
Par ailleurs, les avions américains en cours d’assemblage à Darwin doivent être envoyés au
terrain de Kupang, à Timor, dont les défenses doivent être améliorées. Cette mention
provoque un vif échange entre l’amiral Hart et l’amiral Decoux. « Si l’Emile-Bertin et le
Lamotte-Picquet n’avaient pas été inutilement envoyés au secours de la malheureuse escadre
de l’amiral Glassford, en plein jour et dans des eaux dominées par les avions japonais, les
deux navires auraient été disponibles pour transférer rapidement des canons de DCA et leurs
servants jusqu’à Kupang. » rappelle Decoux avec aigreur.
Pour finir, il est confirmé que le vieux garde-côte cuirassé Soerabaja, transportant les écoles
de tir et d’entraînement à la mer de la Marine Royale Néerlandaise (RNN), doit être envoyé à
Fremantle en compagnie des mouilleurs de mines Pro Patria et Krakatau.
Pacifique Central
Au large d’Hawai – Le pétrolier Neches est torpillé et coulé par le sous-marin japonais I-72.
Sa perte va empêcher le porte-avions Lexington de mener un raid sur Wake, ses destroyers
n’ayant pas l’autonomie suffisante pour le trajet aller-retour.
24 janvier
Campagne de Birmanie
Région de Rangoon – Six Ki-21 du 14e Sentai, escortés par 20 Ki-27 du 50e Sentai, attaquent
la région de Mingaladon. Mais les bimoteurs, plus rapides que les chasseurs à train fixe,
arrivent les premiers sur l’objectif malgré les appels du capitaine Ryosuke Motomura (2e
Chutai). Le raid est attendu par des Hurricane et des P-40, 20 machines en tout. Ils sautent sur
les bombardiers isolés et en abattent cinq sans pertes. Les Ki-27 de l’escorte se jettent alors
dans la bataille, mais la chance est avec les Alliés et trois chasseurs japonais sont abattus sans
pouvoir détruire un seul chasseur allié.
Cependant, trois Ki-30 du 31e Sentai et 25 Ki-27 du 77e attaquent d’autres cibles dans la
région, détruisant deux Blenheim en escale sur la route de Singapour, deux Gipsy Moth du
BVAS et un autre dépôt de carburant.
Ces épisodes n’empêchent pas le général Wavell de rendre une nouvelle visite à Rangoon. Il
arrive sur un gros hydravion B-20 Brisbane. Wavell est témoin de l’habituel raid nocturne :
douze 12 Ki-21 et 8 Ki-48 font de graves dommages aux quais.
Moulmein – De petits groupes de Japonais commencent à infiltrer le périmètre défensif,
observant les efforts britanniques pour construire une ligne continue entre les points fortifiés.
Campagne d’Indochine
Cochinchine – A l’ouest de Saigon, les forces japonaises reprennent leur avance vers TayNinh sur une route semée de champs de mines et dont tous les ponts ont été détruits. L’avance
est donc assez lente, mais continue, jusqu’à 15h00. Alors, comme le raconte le journal de
marche de la 1ère Brigade Blindée japonaise…
« Nous avions repris notre marche et avancions depuis le début de la matinée à travers des
hameaux paysans désertés, ce qui décevait beaucoup nos soldats. Le rythme de notre
progression était lent, car nos pionniers et nos sapeurs étaient très occupés à déminer et à
stabiliser la route que l’ennemi avait sérieusement endommagée avant de battre en retraite.
L’avant-garde avait signalé par radio, à 15h15, qu’elle approchait de la partie ouest de Thay
Ninh et qu’afin de faciliter la circulation sur la route derrière la colonne, elle resserrait les
intervalles entre ses véhicules. Un char lourd ennemi saisit cette occasion [note du
traducteur : le Sav-41 était considéré comme un char lourd par l’Armée Impériale]. Il apparut
soudain, débouchant d’un chemin de plantation latéral devant le gros du régiment, et son
premier tir détruisit le camion radio du 4e Régiment, tuant l’adjoint au commandant du
régiment et bloquant la route. Il put alors détruire à sa guise neuf autres camions remplis de
soldats, en tirant à courte distance des obus remplis de shrapnels [mitraille]. Un char Chi-Ha
Type-97 et deux Chi-Ro Type 89 du QG régimentaire se lancèrent à l’attaque, mais leurs
canons de 57 mm se révélèrent impuissants contre l’armure du char lourd français, qui reçut
au moins dix obus de 57 mm sans en souffrir et détruisit nos trois blindés. Il détruisit aussi
cinq tankettes Type-97 et trois voitures Ha-Go Type-95 du peloton de reconnaissance. Les
véhicules ne pouvaient s’échapper, car des champs de mines et des barrages disposés de
chaque côté de la route empêchaient tout mouvement, alors que le char lourd pouvait
manœuvrer à son gré sur le bas-côté. Nos soldats tombaient devant l’ennemi comme des
feuilles de cerisier dans une tempête d’automne.
Bientôt, toute la scène fut obscurcie par les fumées montant des véhicules en flammes, dont
les équipages ne pouvaient qu’essayer de se mettre à l’abri du tir des mitrailleuses de
l’ennemi avant de chercher à contre-attaquer. Deux de nos hommes tentèrent d’approcher le
char en portant des charges de démolition, mais ils furent abattus par des soldats ennemis qui
s’étaient embusqués derrière un petit talus au-dessus d’un canal de drainage.
Pendant ce temps, les hommes de l’avant-garde, qui ouvraient la marche avec l’officier
commandant le 4e Régiment, furent coupés. Leur dernier message radio, reçu à 16h32,
signalait qu’ils étaient complètement encerclés par l’infanterie et les chars ennemis, que leur
position était intenable, que toute retraite était bloquée et qu’ils s’apprêtaient à mourir
honorablement. Il était en effet impossible de leur porter secours car, en plus des chars et des
camions en flammes, la route était obstruée par le char lourd lui-même, maintenant soutenu
par un peloton d’infanterie et au moins deux mortiers légers, qui interdisaient les abords. »
(Extrait cité dans Tank Warfare in the Far-East – Translation of Main Japanese Documents
about Tank Use in WWII. Department of Defence, United States Army Translation Office,
Tokyo, June 1947, IX volumes, vol. II, pp. 275-76).
Ce piège élaboré, mis en place par des troupes de la Légion Etrangère et des éléments du
GBMS autour du char Gigondas, arrête un bon moment l’avance des Japonais vers ThayNinh.
Néanmoins, en fin d’après-midi, l’ennemi commence à pilonner la ville au canon de 100 mm,
et ce pilonnage se poursuit toute la nuit. L’Armée de l’Air ne peut répliquer qu’avec quatre
antiques Potez-25 TOE, qui harcèlent les batteries ennemies avec des projectiles de 10 kg.
………
– A l’est de Saigon, la défense s’accroche à Xuan Loc, dernier point d’arrêt sur la route de
Bien Hoa et Saigon. Les survivants du 1er RIV ont pris position 3 km à l’est de la ville, sur la
RC-1. La défense de la ville elle-même a été confiée au 1er Bataillon de Volontaires Chinois
et aux deux Bataillons de Volontaires Vietnamiens encadrés par des fusiliers marins. Ces
forces sont soutenues par des éléments du 5e Régiment d’Artillerie Légère Coloniale (5e
RALC) avec douze 75 mm de campagne et six 47 mm antichars. Une partie de la population a
été évacuée vers Bien Hoa et certaines maisons ont été démolies pour créer des barrages
autour de la cathédrale et du séminaire. Trois compagnies d’infanterie ont été formées par des
volontaires locaux pour assurer la sécurité autour de la ville.
Ce qui reste du GBMS à l’est de Saigon a pris position près de Suoi Dau Giay, 3 km à l’ouest
de Xuan Loc, pour prévenir toute tentative des forces japonaises d’encercler la ville et de
couper la RC-1 derrière elle. Il s’agit de deux compagnies blindées en sous-effectifs et de
deux maigres bataillons d’infanterie mécanisée reconstitués, autour des survivants de
l’infanterie mécanisée d’origine, grâce à des volontaires français et vietnamiens. Cette force
est soutenue par les restes du groupe d’artillerie mixte du GBMS (quatre obusiers de 105 mm
et huit mortiers de 81 mm SP montés sur des half-tracks M3).
………
Saigon – Une note de service de Pierre Brossolette, transmise en code via le ministère des
Colonies et le Palais Norodom, ordonne aux équipes d’Havas libre de ne quitter l’Indochine
« qu’en même temps que les hautes autorités ». Elles devront se replier, « au moins dans une
première étape », sur Singapour.
Brossolette ignore encore que l’essentiel de l’équipe du Tonkin a pu s’échapper par la baie
d’Along. Elle se trouve présentement embarquée sur une grosse jonque gréée en guerre avec
trois FM et une Hotchkiss. Armée par un équipage de la Marine mais camouflée en barque de
pêche, elle navigue plein sud au large de Tourane, à bonne vitesse grâce aux vents favorables
de la saison humide, en espérant échapper au blocus, au vrai encore assez lâche, de la Marine
Impériale.
Un seul journaliste, intégré pour la circonstance à la section de commandement de la 7e
compagnie du 3e bataillon du 5e REI, « marche son pied la route », selon l’expression des
tirailleurs sénégalais, au sein de la colonne de l’opération Épervier. C’est une participation
aux combats “à toutes fins utiles”, puisqu’il ne peut disposer d’aucun moyen de transmettre
ses dépêches, cependant consignées sur un gros cahier (à la main : il n’a pas emporté sa
machine à écrire portable)3.
À cause des difficultés techniques de toutes sortes, qui mêlent la guerre à la distance et aux
conditions climatiques, l’accusé de réception de Saigon ne sera capté à Alger que le 25 à
01h15 du matin.
Campagne de Malaisie
Au nord… – Les troupes japonaises commencent à tâter les défenses de Gurun, mais sans
lancer de véritable attaque. Les bombardiers en piqué cherchent à détruire l’artillerie du
Commonwealth, mais les canons britanniques sont maintenant bien camouflés.
………
Au sud… – A Kluang comme à Kota Tinggi, le front est assez calme, tandis que les forces
japonaises préparent de nouvelles attaques. Les bombardiers de l’Armée basés à Kuching
concentrent leurs attaques sur Kota Tinggi, bombardée par une formation de 27 Ki-21, mais le
résultat de cette attaque est plus spectaculaire qu’efficace.
………
A Singapour… – Des bombardiers de la Marine attaquent le port, où ils coulent un caboteur
et endommagent un transport.
………
Dans le détroit de Malacca – Le convoi “Substance”, qui a passé le détroit de Karimata de
nuit, entre dans le détroit de Malacca à 17h00 sans avoir été détecté par les avions de
reconnaissance japonais. Il ralentit alors, prévoyant de ne s’élancer sur Port Weld qu’à la
tombée de la nuit du 25, pour limiter les risques d’attaque par l’aviation japonaise. Les
Hurricane basés à Palembang-II partent en fin de journée pour Medan, afin de pouvoir couvrir
le détroit le lendemain. L’un d’eux est accidentellement détruit en se posant sur le terrain
encore constellé de cratères.
3
Ces dépêches permettront de préciser et de compléter sur de nombreux points le Journal de Marche et
Opérations du 5e REI. Elles seront publiées in extenso après la guerre par les éditions Flammarion sous le titre
L’Épervier a pris son vol - Chroniques de l’Indochine en guerre, 1942. Le cahier manuscrit à été légué par son
auteur à la Légion Etrangère, et se trouve aujourd’hui sous une vitrine de la salle d’honneur de Castelnaudary.
Campagne d’Indonésie
Amboine – Les troupes australiennes et hollandaises continuent de résister dans les ruines de
la petite ville. Cependant, les forces japonaises contrôlent maintenant complètement le terrain
d’aviation.
………
Bandœng (Java) – L’amiral Decoux, le contre-amiral Bérenger et d’autres officiers français
embarquent à bord d’un DC-3 pour Perth, via Kupang et Darwin, afin de rencontrer les
autorités australiennes et de discuter la possibilité pour les sous-marins français d’utiliser
Fremantle comme base, si Sœrabaya devenait intenable. Parti à l’aube de Kupang, l’avion
échappe à un raid effectué par des G4M1 basés à Manado.
En fin de journée, un Spitfire PR parti de Palembang reconnaître la Baie de Kuching rapporte
à Bandoeng des photos qui montrent un navire ennemi de taille moyenne, entouré d’au moins
dix bateaux plus petits, au voisinage immédiat de l’épave du Prince of Wales.
25 janvier
Campagne de Birmanie
Quatre Blenheim I du 3e Coast Defence Flight arrivent à Bassein. Un autre est tombé en mer à
plus de 150 km de Chittagong ; l’équipage sera récupéré par des pêcheurs.
Campagne d’Indochine
Cochinchine – Le front ouest (Tay Ninh) est calme, mais à l’est, l’artillerie japonaise
commence à pilonner Xuan Loc. La cathédrale est touchée deux fois par des obus de 150 mm.
Dans l’après-midi, un régiment attaque les positions du 1er RIV à l’est de Xuan Loc. Plus ou
moins au même moment, l’infanterie japonaise commence à s’infiltrer vers le sud le long de
la route locale n°2 (RL-2) pour envelopper la ville et venir couper la RC-1 en arrière de XuanLoc. Alors que le périmètre de défense se rétrécit, les chars du GBMS s’avancent sur la RC-1
et chargent les Japonais, les repoussant vers la RL-2 au prix de trois chars légers M2A4.
………
Tonkin – Les forces japonaises continuent à se réorganiser après la prise d’Hanoi.
Campagne de Malaisie
Dans le détroit de Malacca – Les sept transports du convoi “Substance” sont escortés par le
CL HMS Mauritius, sept DD (HMS Ashanti, Eskimo, Encounter, Jervis, MN Lynx, Tempête,
Trombe) et la flottille du Cdr C.T. Jellicoe (six DE Hunt-II : HMS Avon Vale, Blankney,
Croome, Eridge, Farndale, Grove, soutenus par trois avisos AA : Black Swan, Erne, Ibis). Le
temps ayant été très nuageux durant la nuit, le commandant du convoi décide de se diriger
droit vers Port Weld dès l’aube, sans attendre au sud la tombée de la nuit, espérant qu’une
arrivée plus précoce donnera plus de temps pour débarquer le contenu des transports. Ce
calcul fonctionne dans la matinée, mais à 13h00, un vent du nord-est commence à balayer les
nuages et à 13h58, un avion japonais solitaire est signalé, sûr présage de l’arrivée prochaine
de bombardiers.
Cependant, la cavalerie arrive parfois à temps, et à 15h02, six Hurricane apparaissent audessus du convoi, juste avant la première attaque, menée par douze D3A1 escortés par neuf
A6M2. Surprenant cette escorte, qui avait perdu l’habitude de rencontrer une opposition de la
chasse alliée, les Hurricane abattent deux Val avant de devoir tenter d’échapper aux Zéro
d’escorte et de perdre quatre avions sur six, en échange de trois chasseurs ennemis. Ils ont
quand même désorganisé l’attaque et seule la queue du convoi est attaquée, sans grand succès.
L’Erne, frôlé par deux bombes, est endommagé et doit battre en retraite.
A 16h45, les Japonais reviennent en force : dix D3A1, douze B5N2 et une escorte de douze
A6M2. Cette fois, les cinq Hurricane qui ont pris le relais au-dessus du convoi peuvent
détruire deux Kate avant de devoir se défendre contre les Zéro, perdant trois avions contre
trois chasseurs japonais. La DCA du convoi est alors sa seule protection ; elle abat deux autres
torpilleurs et un Val, mais deux transports et le DE Avon Vale sont touchés par des bombes,
tandis que le Mauritius, particulièrement visé en tant que plus gros bâtiment du convoi,
n’échappe que de peu à trois torpilles. Les deux transports, incendiés, doivent être sabordés.
L’Avon Vale, qui a reçu deux bombes de 250 kg à l’avant et a subi de lourdes pertes sur la
passerelle, doit être échoué à l’embouchure de la rivière Perak.
A 17h50, à la tombée de la nuit, la plus grande partie de l’escorte remet cap au sud, laissant le
Black Swan et l’Ibis accompagner les cinq transports survivants jusqu’à Port Weld. Là, leur
déchargement commence immédiatement, mais il est ralenti par la pauvreté des installations
portuaires et les destructions infligées par les raids japonais des semaines précédentes.
………
Au nord… – Au sol, les combats commencent à gagner en intensité à Gurun. Comme les
bombardiers en piqué de la Marine sont très occupés par le convoi “Substance”, l’artillerie du
Commonwealth a les mains relativement libres, mais les canons/obusiers de 3,7 pouces ont du
mal face aux canons et obusiers de 100 et 150 mm que les Japonais alignent maintenant. Plus
puissants, les vieux obusiers de 155 mm (des modèles français fabriqués aux Etats-Unis)
infligent des pertes à l’artillerie adverse. L’infanterie japonaise avance vers Yen, mais est
arrêtée par la 6e Brigade d’Infanterie indienne du Brigadier (prov.) Morehead. Les
bombardiers légers Ki-51 harcèlent les troupes alliées avec acharnement, mais trois sont
abattus : deux par les 40 mm du 48e LAA Regt et un par des mitrailleuses.
………
Au sud… – Le front est relativement calme, en dehors d’une attaque de Ki-21 basés à
Kuching contre Kota Tinggi.
………
Mer de Chine Méridionale – Les porte-avions Kaga et Akagi quittent Mako avec leur écran
de destroyers, cap à l’est.
Campagne d’Indonésie
Amboine – Après une seconde journée de féroces combats, les survivants australiens et
hollandais évacuent la ville, qui est maintenant solidement tenue par les troupes japonaises.
………
Java – Les croiseurs Emile-Bertin et Lamotte-Picquet arrivent à Tjilatjap, à peu près en même
temps que le Houston. Le Lamotte-Picquet comme le Houston doivent débarquer leurs blessés
touchés lors des bombardements, et le croiseur français espère pouvoir faire réparer son
gouvernail avant gagner les Etats-Unis pour réparations complètes.
De son côté, l’Emile-Bertin embarque une batterie de canons Bofors de DCA, avec ses
servants et ses munitions, et part pour Kupang, à Timor, au crépuscule.
Pacifique Central
Midway – Les sous-marins japonais I-18 et I-24 font surface au large de l’île fortifiée par les
Américains. Les premiers obus pleuvent bientôt sur le sable de Midway, mais les Marines ne
se laissent pas faire et leurs canons forcent rapidement leurs adversaires à abandonner leur
attaque et à plonger.
26 janvier
Campagne de Birmanie
Nouveau sweep sur Mingaladon : 23 Ki-27 du 50e sont interceptés par huit P-40 et Hurricane.
Deux P-40 et un Ki-27 sont perdus.
L’après-midi, cinq Blenheim du Sqn 113 escortés par deux Hurricane et six P-40 attaquent
Kawkareik, touchant une colonne japonaise sur la piste qui se dirige vers l’ouest. En effet, les
Japonais ont réussi à se débarrasser de la 17e Brigade – dont les hommes ont traversé la
rivière qui leur coupait la retraite, mais après avoir dû détruire une bonne partie de leurs
véhicules et de leurs armes lourdes. Ils ne pourront participer à la bataille qui va s’engager à
Moulmein.
Campagne d’Indochine
Cochinchine – A l’est de Saigon, les troupes japonaises venant de la côte essayent à nouveau
de briser les défenses françaises à Xuan Loc. Dans la matinée, une première attaque frontale
est bloquée, mais elle n’a pour but que de fixer les défenseurs. En début d’après-midi, des
forces japonaises, bien plus nombreuses que la veille, sont repérées au nord de la ville, se
dirigeant vers la RC-1. A 15h30, les derniers éléments du GBMS à l’est de Saigon font face à
l’équivalent d’un régiment japonais. Grâce à leurs obusiers de 105 mm et à leurs mortiers, les
Franco-Vietnamiens parviennent cependant à arrêter les attaquants devant Suoi Dau Giay,
puis à les repousser, faisant échouer cette nouvelle tentative de couper Xuan Loc de Saigon.
Campagne de Malaisie
Détroit de Malacca – Les bombardiers japonais basés dans le sud de la Thaïlande
concentrent la plupart de leurs attaques sur le convoi Substance, en train de décharger à Port
Weld. Mais dès le début de la matinée, neuf D3A1 escortés par six A6M2 s’en prennent au
HMS Erne, qui retourne à faible vitesse vers Singapour, handicapé par les dommages subis la
veille. L’aviso est touché par deux bombes de 270 kg et frôlé par trois autres. Après plusieurs
heures de tentatives désespérées pour contrôler à la fois les incendies et les voies d’eau, son
équipage finit à 16h20 par abandonner le petit navire, qui chavire peu après.
08h45 – Port Weld est attaqué une première fois à par douze B5N2 escortés par neuf A6M2.
Six Hurricane venus de Sumatra réussissent à abattre un des bombardiers-torpilleurs et deux
chasseurs, mais au prix de trois d’entre eux. Neuf des B5N2 réalisent un bombardement
horizontal assez précis, incendiant l’un des cargos.
09h05 – Neuf D3A1 sans escorte attaquent sans opposition, car les trois Hurricane survivants
ont été attirés à basse altitude. Cette attaque est bien plus précise. Un deuxième cargo est
touché et prend feu. Quelques minutes plus tard, l’aviso AA Black Swan est touché par une
bombe de 250 kg juste devant sa tourelle arrière et par deux de 60 kg sur sa passerelle. Peu
après, le bateau est frôlé par deux autres bombes de 250 kg qui mettent hors service sa turbine
bâbord.
09h50 – L’aviation de l’Armée attaque à son tour Port Weld, mais les 18 Ki-48 escortés par
15 Ki-43 frappent surtout la ville et la gare.
11h35 – Après une courte trêve, neuf D3A1 escortés par autant d’A6M2 se présentent, mais
sont interceptés par six nouveaux Hurricane. Une nouvelle fois, la moitié des défenseurs sont
abattus, mais ils détruisent deux bombardiers en piqué et trois de leurs escorteurs. Les autres
Val s’acharnent sur le Black Swan, qui est à nouveau touché, cette fois par une bombe de
270 kg qui explose dans sa chaudière. L’aviso stoppe et commence à dériver dans le port,
brûlant furieusement. Le patrouilleur V1 essaie de le pousser vers une plage, mais, dévoré par
les flammes, le Black Swan coule à 12h25 et le V1 ne peut que repêcher les survivants de
l’équipage.
12h45 – 18 Ki-21 apparaissent et bombardent le port et la ville, ajoutant aux destructions des
raids précédents. La bretelle ferroviaire reliant le port et la voie principale est coupée en deux
endroits.
………
Au nord… – A Gurun, la 6e Brigade d’Infanterie indienne est à nouveau durement confrontée
aux forces japonaises. Cependant, comme les avions de la Marine sont très occupés à attaquer
Port Weld, ces forces ne sont soutenues que par des Ki-51 d’appui tactique, qui manquent de
la précision des D3A1, et l’attaque s’essouffle. Ce que voyant, le général Yamashita réclame à
Tokyo l’envoi rapide du 1er Dokuritsu Sentai, même avec ses vieux D1A2 d’entraînement.
Dans le même temps, après avoir discuté avec un observateur de la Wehrmacht arrivé la veille
à son QG, Yamashita ordonne de faire immédiatement monter au front plusieurs batteries AA
équipées du canon anti-aérien de 75 mm Type 88, et d’utiliser ces canons contre les chars.
L’officier allemand, qui a participé aux combats en France contre les B1bis et en Grèce contre
les Valentine, estime en effet que ce canon pourrait jouer contre les chars alliés le même rôle
que le 88 mm, bien qu’il soit plus fragile et plus difficile à déplacer.
………
Au sud et à Singapour… – Le front est relativement calme à Kluang comme à Kota Tinggi,
mais Singapour est violemment attaquée par les avions basés à Kuching : des Ki-21 de
l’Armée le matin et des G3M2/3 de la marine l’après-midi. Le premier raid provoque de
lourdes pertes dans la population civile. Le second, qui vise le port, détruit un transport en
train d’embarquer des réfugiés et le patrouilleur Sheldrake.
………
Mako (îles Pescadores) – Les CVL Shoho et Zuiho, escortés par les DD Hibiki et Nowaki,
viennent ravitailler et réarmer. Les opérations commencent immédiatement, car les deux
porte-avions doivent repartir pour la côte malaise le jour suivant.
Campagne d’Indonésie
Amboine – Les troupes japonaises contrôlent complètement la ville et l’aérodrome, qui est
activement préparé à recevoir les bombardiers de la Marine.
………
Sœrabaya – La 3e Flotille sous-marine d’Extrême-Orient, exilée dans le port indonésien,
reçoit des renforts : quatre 1 500 tonnes (classe Redoutable) de la 8e DSM et deux unités de la
classe Aurore, qui ont passé tous les six le Détroit de la Sonde le 23. Les deux sous-marins
mouilleurs de mines complétant la flottille arriveront quatre jours plus tard avec le ravitailleur
Cap des Palmes.
Campagne des Philippines
Sur la presqu’île de Bataan, les troupes américaines reculent jusqu’à la ligne Bagac-Orion.
Cependant, un débarquement japonais à la Pointe Quinauan est repoussé.
Campagne du Pacifique Sud
Nouméa – Le vice-amiral Emile Muselier arrive en avion de Papeete pour installer le
Commandement du Pacifique (CoPac). Cet organisme doit être intégré à l’ANZAC,
commandé par le vice-amiral Leary et qui s’étend aux eaux de l’Australie Orientale, de la
Nouvelle-Zélande, de la Nouvelle-Guinée britannique, des îles Salomon, Loyauté et Fidji et
des colonies françaises du Pacifique Sud. Le même jour, le croiseur-école Jeanne d’Arc arrive
à Nouméa, venant de l’île Canton, où des navires américains l’ont relayé.
En fin de matinée, l’EV1 Yvon Lagadec, pilote sans avion, est arrivé sur le “Caillou” : « Je
tentais avec obstination de trouver un moyen de transport pour rejoindre mon porte-avions
aux Etats-Unis. En l’absence d’une ligne régulière, par ces temps troublés, je voyageais plus
ou moins en stop. De Java, traversée en camion jusqu’à Tjilatjap, j’avais gagné Darwin, sur
un caboteur minable qui présentait cependant un avantage : il était fort douteux qu’un bateau
de si pauvre mine donnât envie à un sous-marin japonais de gaspiller une torpille ou même
un obus sur sa vieille coque. A Darwin, j’avais attrapé (grâce à la sollicitude de l’équipage,
touché par ma détresse) le DC-3 des Lignes Aériennes Militaires, qui m’avait conduit à
Sydney, puis à Nouméa – terminus ! J’en demande pardon aux habitants de la NouvelleCalédonie, mais en débarquant chez eux, je me suis cru au bout du monde. Sans l’arrivée de
la Jeanne quelques heures plus tard, j’aurais sérieusement pensé que j’étais condamné à
moisir là jusqu’à la fin de la guerre, au moins ! »
………
Iles Samoa – Sur l’ordre de l’amiral Chester Nimitz, commandant l’US Navy dans le
Pacifique, les porte-avions Enterprise (vice-amiral W. Halsey) et Yorktown (contre-amiral F.
Fletcher) quittent avec leur écran les Samoa, où ils ont accompagné un convoi de troupes,
pour lancer une attaque contre les bases japonaises des îles Marshall. Ce raid a été décidé pour
prévenir une possible attaque japonaise contre les Samoa.
27 janvier
Campagne de Birmanie
Dans la nuit, six Ki-21 touchent Mingaladon avec précision, détruisant deux Hurricane. Mais
l’un d’eux est abattu par le Sqn-Ldr Stone, pilotant un Hurricane. C’est la première perte de
l’aviation de l’Armée Impériale en bombardement de nuit.
Cette même nuit, 5 Blenheim, 2 Overstrand et 4 Heyford frappent diverses cibles en
Thaïlande, sans perte (un autre Blenheim s’est écrasé au décollage, sans pertes humaines).
Campagne d’Indochine
– A l’ouest de Saigon, Tay Ninh tombe en fin de journée sous une succession d’attaques
japonaises. Les forces franco-vietnamiennes se replient sur Hieu Thien. Lors de cette retraite,
le Sav-41 Gigondas, qui avait joué le premier rôle dans l’embuscade tendue à la 1ère Brigade
Blindée japonaise trois jours plus tôt, est détruit par un coup direct tiré par un obusier de
150 mm.
– A l’est de Saigon, les troupes japonaises reprennent leur attaque contre Xuan Loc. Ayant
échoué à déloger les défenseurs par un mouvement tournant, elles essayent à présent de
s’infiltrer au nord du périmètre de défense. Pendant que l’artillerie japonaise martèle
consciencieusement la ville, des éléments totalisant environ deux compagnies parviennent à
s’infiltrer dans le quartier du séminaire et près de la cathédrale. En fin d’après-midi, ils sont
rejetés par le 1er Bataillon de Volontaires Chinois et le 2e Bataillon de Volontaires
Vietnamiens, soutenus par un peloton de Sav-41, après un furieux combat au corps à corps.
« Le char Margaux de Fernand Naudin et Roger Carmaux, engagé en première ligne, est
attaqué sur le parvis de la cathédrale par une “équipe suicide” japonaise. Le dernier de ceux
que les Français ont surnommé les “porteurs de valise” (à cause de la charge d’explosifs
qu’ils transportent) arrive à quelques mètres du Margaux quand il est plaqué au sol par le
soldat Ky, syndicaliste et membre du PC vietnamien clandestin. L’explosion de la charge tue
les deux hommes. “Quelle connerie, Fernand, observe Carmaux, qui s’était lié d’amitié avec
celui qui venait de sauver leur char. Un bon communiste, athée convaincu, se faire tuer en
défendant une cathédrale et un char fabriqué par une usine capitaliste.” Alors Naudin, qui voit
l’émotion de son équipier : “C’est la vraie Internationale, Roger. Ce char a été fabriqué par
des ouvriers américains, et cette cathédrale est consacrée au charpentier Jésus.” » (Pascal
Nguyen-Minh, op.cit.).
Campagne de Malaisie
Détroit de Malacca – L’aviation de la Marine impériale, renforcée par l’arrivée de 19 G3M3,
8 D3A1 et 10 A6M2, pilonne toute la journée Port Weld, ne s’arrêtant que pour laisser la
place aux bombardiers moyens de l’Armée. Les Hurricane II qui s’opposent à ces attaques
abattent six avions japonais (un D3A1, un A6M2, deux Ki-21 et deux Ki-43), perdant quatre
des leurs. Une DCA très active inscrit deux Ki-48 et un Ki-21 à son actif. Cependant, les
bombardiers en piqué détruisent un autre transport (à peu près vidé de son contenu) et le
patrouilleur V1. Le port est maintenant très encombré par les navires coulés et les diverses
destructions. Profitant de la concentration des attaques japonaises sur Port Weld, le dernier
aviso AA, l’Ibis, réussit à s’enfuir et à quitter le Détroit.
………
Au nord… – A Gurun, les troupes japonaises reprennent leurs tentatives pour déborder les
positions du Commonwealth. La 28e Brigade Gurkha (Brigadier (prov.) Selby, ex Lt.-Colonel
du 2/9e Gurkha) lance une contre-attaque avec le soutien des chars A12 Matilda du 2/6e et des
A13 Cruisers Mk.III du Royal New South Wales Lancers, mais cette contre-attaque s’épuise
quand quatre Cruisers et trois Matilda sont détruits par les canons antichars japonais et surtout
par les 75 mm AA, tirant à relativement longue portée.
………
Au sud et à Singapour… – Le front est encore calme à l’est de Kluang comme à Kota
Tinggi, mais l’aviation japonaise est très active. Les Ki-21 de l’Armée basés à Kuching
effectuent deux raids, un le matin contre Kota Tinggi, l’autre le soir contre Singapour. Deux
bombardiers sont abattus lors de ce dernier raid, par la DCA et par un Defiant en “patrouille
du crépuscule”. Les avions des porte-avions de la 2e Flotte attaquent Seletar et Sembawang,
détruisant deux Hudson sur le premier terrain et un DC-3 sur le second.
Campagne d’Indonésie
Bandœng (Java) – La ville et l’aérodrome sont attaqués par 36 bombardiers de la Marine
japonaise venant de Kuching, escortés par 18 A6M2. Des dommages significatifs sont infligés
aux deux cibles et la population civile locale commence à fuir vers la campagne avoisinante.
………
Bali – La Strike Force de l’amiral K. Doorman (cinq croiseurs et neuf destroyers) arrive dans
la baie de Denpasar.
………
Baie de Kupang (Timor) – L’Emile-Bertin arrive à Kupang peu après l’aube et débarque en
hâte la batterie de Bofors qu’il transporte. Alors qu’il quitte Kupang pour retourner à
Tjilatjap, la ville et l’aérodrome sont à nouveau attaqués, cette fois par 27 G4M1.
Campagne de Nouvelle-Guinée
Tous les hommes blancs de Nouvelle-Guinée âgés de 18 à 45 ans sont mobilisés, ce qui
provoque une crise entre le Brigadier Morris (bientôt major-général) et l’administrateur civil
de Papouasie, M. Murray.
Campagne du Pacifique Sud
Rentrant à Pearl Harbor, le croiseur sous-marin Surcouf effectue des observations sur les
Marshall du Nord (Wotje et Kwajalein), pour préparer le raid aéronaval américain.
Pacifique Central
240 nautiques à l’ouest de Midway – Le sous-marin USS Gudgeon (CC E.W. Grenfell)
intercepte et coule le japonais I-73 (CF Akira Isobe), qui naviguait en surface. C’est la
première victoire d’un submersible américain contre un congénère. Mais le plus important est
qu’elle a été obtenue grâce à l’interception du trafic radio de l’ennemi, qui a permis de
localiser le sous-marin nippon.
28 janvier
Campagne de Birmanie
Sachant que les Alliés opèrent toujours de Mingaladon, la 5e Division Aérienne organise une
nouvelle journée de sweeps. Le 77e Sentai lance ainsi 27 Ki-27 et le 50e en envoie dix, mais la
coordination est médiocre et les deux raids restent séparés.
Un P-40 de la ROCAF est abattu, mais le 77e perd quatre Ki-27. Touché, le lieutenant Kaneki
Yamamoto fracasse délibérément son avion sur un P-40 chinois s’apprêtant à décoller et dont
le pilote voit avec étonnement disparaître soudain l’arrière de son fuselage. Yamamoto sera
enterré par la RAF avec les honneurs militaires ; une boîte à message contenant le récit de sa
mort complété de photographies des funérailles sera lâchée sur le terrain de Racheng.
Campagne d’Indochine
Tonkin – Les unités japonaises, descendant rapidement vers le sud par la route côtière,
approchent de Hué. Presque toute la côte du Vietnam est sous contrôle japonais.
………
Cochinchine – A l’est de Saigon, les forces japonaises attaquent à nouveau les forces francovietnamiennes à Xuan Loc. En fin de journée, la loi du nombre commence à s’exercer et
l’infanterie japonaise pénètre au cœur de la ville, constamment bombardée et dont la
cathédrale est en ruines, touchée par de nombreux obus. Sur la côte, les Japonais approchent
de Dat Do, non loin du cap Saint-Jacques (Vung Tau). Le commandant en chef des forces
terrestres françaises, le général Martin, décide d’envoyer un nouveau bataillon de volontaires
vietnamiens, levé en hâte, à Phuoc Le, sur la RC-15, pour empêcher la coupure de la route
entre Bien Hoa et Cap Saint-Jacques.
Sur le front ouest, les Japonais testent les défenses françaises à Hieu-Thien.
Saigon est très durement bombardée à deux reprises par les avions de la Marine et de l’Armée
japonaises. De grands incendies éclatent autour de la cathédrale de la ville et du siège du
Haut-Commissariat.
Au crépuscule, dans l’immeuble du QG des forces françaises d’Indochine, noirci par
l’incendie de l’une des principales centrales électriques de Saigon lors de l’un des raids de la
semaine précédente, se tient une conférence qui sera plus tard qualifiée d’historique. Y
participent, autour du Haut-Commissaire Jean Sainteny, le général Martin, le général de
brigade Bourdeau (ex-commandant de la Division d’Annam, maintenant chargé de la défense
de Saigon), le colonel Schlesser (commandant du GBMS), Sa Majesté Bao Daï, empereur
d’Annam, Sa Majesté Norodom Sihanouk, prince héritier du Cambodge, ainsi que des
dignitaires du mouvement Cao-Daïste, des dirigeants des syndicats vietnamiens (c’est-à-dire,
officieusement, du Parti communiste vietnamien) et des représentants de la communauté
chinoise de Saigon-Cholon.
– Il faut nous rendre à l’évidence, Messieurs, expose le général Bourdeau, la défense de
Saigon est sur le point de s’effondrer, malgré la bravoure de tous, Français, Vietnamiens et
Chinois. A l’ouest, Hieu Thien ne pourra pas tenir longtemps, et nous devrons probablement
reculer jusqu’à Cu Chi d’ici quarante-huit heures. A l’est, la chute de Xuan Loc n’est qu’une
question d’heures, et la route de Bien Hoa sera alors ouverte à l’ennemi. Or, le contrôle de
Bien Hoa est maintenant essentiel, car cette localité commande notre seule voie d’évasion,
vers Ban-Me-Thuot et les Hautes Terres, que nous tenons encore solidement. De là, il est
possible, par Pleiku et Kontum, d’atteindre Saravane, dans les Bolovens, puis, profitant du
fait que les Thaïlandais ne sont guère actifs dans le centre et le nord du Laos, de remonter
jusqu’à Luang-Prabang et jusqu’à la base Epervier.
– C’est pourquoi, conclut le général Martin, je vous propose de commencer tout de suite
l’évacuation militaire de Saigon et de déclarer la cité ville ouverte dans trois ou quatre jours.
– Ce n’est pas possible, s’exclame M. Kow, représentant des Chinois de Cholon. Ce petit
homme replet parle un français hésitant, avec un fort accent, mais sa voix est vibrante
d’inquiétude. « Les Japonais, jamais ils respectent les lois internationales sur les villes
ouvertes. Rappelez-vous Nankin, il y a cinq ans, et ils font la même chose à Phnom-Penh et à
Haiphong, juste il y a quelques jours. Si ils entrent à Saigon, ils tuent tous les hommes
chinois, et les femmes ils tuent aussi, sauf les jeunes, ils les violent et ils les mettent dans des
bordels pour leurs soldats ! »
Religieux et syndicalistes vietnamiens soutiennent fermement ce discours, affirmant que les
Vietnamiens seront certainement aussi menacés que les Chinois, surtout maintenant que
beaucoup d’hommes combattent aux côtés des Français contre les Japonais.
S.M. Bao Daï ne dit mot (il gardera le plus grand calme pendant toute la conférence), mais à
ce moment, le jeune prince Norodom Sihanouk se lève et interpelle Sainteny et Martin. Il
s’exprime, lui, dans un français parfait, voire précieux, mais non moins énergique :
« Monsieur le Haut-Commissaire, Général Martin ! Ne pensez-vous pas qu’il est temps de
décréter la levée en masse du peuple contre l’envahisseur ? Est-ce donc à un prince
héréditaire khmer de vous rappeler l’histoire de la Révolution française ? De vous rappeler
que cette décision s’impose comme le recours légitime et naturel des Républicains face à une
sanguinaire invasion étrangère ? De vous remettre en mémoire les trois choses que
demandait Danton pour sauver la Nation : « De l’audace, encore de l’audace, toujours de
l’audace ! ». Moi-même, j’ai appelé mon peuple à gagner la jungle et à continuer le combat
jusqu’à ce qu’il ne reste plus un Japonais vivant sur le sol du Cambodge. Je vous en conjure,
donnez au peuple du Vietnam les moyens de sa lutte. Pour l’honneur de la France et de la
République, vous ne pouvez faire moins ! »
Dans une interview accordée peu avant la fin de sa vie, celui qui était devenu le vieux roi
Norodom avouera qu’il avait été inspiré par un entretien qu’il avait eu avec le général de
Gaulle lors du voyage effectué par celui-ci en Asie avant l’offensive japonaise (on sait que
Norodom Sihanouk et Charles de Gaulle eurent toujours par la suite les plus cordiales
relations). Quoi qu’il en soit, son discours fait une forte impression. Sainteny précisera même,
dans ses Mémoires (Serviteur de la République – tome 2, La Force Jaune) : « Je n’ai jamais
été aussi ému par un discours politique, peut-être parce que cette supplique s’adressait à moi
personnellement et que j’avais les moyens, pour le meilleur ou pour le pire, d’y répondre. »
– Combien d’armes reste-t-il dans les dépôts de la région de Saigon et Bien Hoa ? demande
le Haut-Commissaire.
– Sur le papier, suffisamment pour équiper environ 15 000 hommes, répond le général Martin.
Mais je répète : sur le papier. Ils n’auraient pratiquement pas d’armes lourdes. Par ailleurs,
il nous faut songer au problème que poseraient les familles de ces combattants. La plupart
des femmes et des enfants français ont été évacués par bateau avant l’attaque japonaise, et
depuis quelques jours, un certain nombre de personnes âgées et d’infirmes ont été envoyés
vers les Hautes Terres, ainsi que tout le personnel colonial qui n’était pas strictement
nécessaire à la défense. Mais la création des Bataillons de Volontaires Chinois et
Vietnamiens a considérablement accru l’ampleur du problème, et une levée en masse
l’accroîtrait encore.
– Ce n’est pas mon avis, remarque le colonel Schlesser. J’ai constaté à Xuan Luoc que la
présence des familles des troupes locales n’est pas forcément un problème. Au contraire, c’est
bon pour leur moral et il est fréquent que les femmes et les adolescents aident les combattants
en leur apportant des munitions et en évacuant les blessés.
– Mais que feront-ils quand les Japonais occuperont toute la région ? questionne Martin.
C’est M. Tran, l’un des “syndicalistes” vietnamiens, qui répond : « Le peuple de Saigon est
prêt à se battre sur chaque pouce de sa terre, Général, et si nécessaire, il est même prêt à se
battre dessous. »
Jean Sainteny donne alors son accord pour défendre jusqu’au bout Saigon et Bien Hoa, non
sans avertir les participants qu’il donnera tout de même l’ordre à un certain nombre de
personnels clés de quitter la région et de rejoindre les troupes dans le nord de l’Indochine. La
défense de Saigon doit en effet être comprise comme un combat de retardement décidé en
dernier recours. Une partie de la population civile, principalement les communautés les plus
exposées à de possibles exactions japonaises, doit aussi quitter la ville pour Ban-Me-Thuot.
« A partir de 23h00, le décret officiel établissant le Camp Retranché de Saigon, écrit en
français, en vietnamien et en chinois, est placardé sur tous les murs de Saigon, Cholon et
Bien Hoa. Il appelle tous les hommes de 18 à 45 ans en état de servir à se présenter aux
casernes de l’Armée française et des sapeurs-pompiers. Les hommes qui ne pourraient être
armés devront suivre les troupes pour être à leur tour équipés d’armes récupérées sur des
morts ou des blessés, ou seront enrôlés dans des “bataillons de fortifications” pour creuser
des tranchées et construire des barrages.
Le caporal Désiré Leroux, dont le half-track armé Camembert a été détruit lors des combats
de Tay Ninh, assiste à l’affichage du décret (un peu par dérision, les équipages des halftracks du GBMS avaient donné à leurs véhicules mal protégés des noms de fromages en
constatant que les équipages des chars donnaient à leurs blindés des noms de grands vins).
“Je devais être le seul Français, et le seul soldat, dans une foule d’hommes, pour la plupart des
ouvriers, qui lisaient et relisaient le décret en le commentant à voix basse. Au premier rang,
j’aperçois un de leurs chefs (j’avais assez d’expérience pour reconnaître un chef entouré de
son état-major au milieu d’une foule, même sans galons). Au bout d’un moment, il se tourne
vers les autres, le poing droit levé, et commence à chanter en vietnamien ! Au bout de trois
mesures, l’un des ses compagnons l’arrête avec un geste dans ma direction. Il se dirige alors
vers moi et me demande en bon français, avec ce curieux sourire des Jaunes, ce que je fais
loin du front. Je réponds que je fais partie du GBMS, mais que mon half-track a été détruit à
Tay Ninh et qu’on m’a envoyé ici pour y encadrer les volontaires.
– Votre half-track ? Mais vous n’y étiez pas seul, n’est-ce pas ?
– Non. Mais mes équipiers sont morts. J’ai eu beaucoup de chance.
Il me regarde en face, et son expression commence à ressembler un peu plus à un vrai sourire.
– Vous savez, les armes que vous nous donnez, personne ne nous les reprendra, ni les
Japonais, ni vous.
– Je m’en doute. Mais si mes copains sont venus se faire tuer ici, très loin de leur Normandie,
c’était pas vraiment pour que l’Indochine reste une colonie française. On a assez de mal à
éviter que la France devienne une colonie allemande !
J’ai dû dire ce qu’il fallait, parce que maintenant, il sourit vraiment. Et il commence à chanter,
mais cette fois, c’est la Marseillaise. Et la foule reprend !
Quand le silence revient, comme je ne sais pas quoi dire, j’y vais moi aussi de ma chanson.
J’avais reconnu l’air qu’il avait commencé à chanter au début. C’était facile, je l’avais
tellement chantée, en 36, en défilant avec mon paternel et tous les ouvriers de l’usine. En 39,
lors du Pacte entre les Boches et les Russes, j’avais juré de ne plus jamais la chanter, mais là,
dans la nuit de Saigon, ça m’a paru la chose à faire. N’empêche, j’étais un soldat français, et
ça m’a fait drôle d’être porté en triomphe jusqu’à la caserne par tous ces Jaunes vêtus de noir
et qui venaient s’enrôler sous le drapeau tricolore, en chantant l’Internationale…” » (Pascal
N’Guyen-Minh, op. cit.).
Campagne de Malaisie
Au nord… – Dans la journée, pendant que les avions de l’Armée attaquent Sungei Patani et
Kuala Lumpur, les D3A1 de la Marine reprennent leurs opérations d’appui tactique au profit
des troupes au sol, visant les unités d’artillerie australiennes. Leur action empêche ces unités
de contre-battre une douzaine de canons de 75 mm Type-88, qui couvrent maintenant les axes
de pénétration japonais face aux contre-attaques blindées. La situation à Gurun menaçant de
se détériorer rapidement, les troupes du Commonwealth se retirent de leur position Krohfrontière jusqu’à la position Baling. Un point d’arrêt sur le Sungei Muda doit être préparé
pour permettre de renforcer l’île de Penang.
En fin de journée, l’aviation japonaise dans le sud de la Thaïlande est encore renforcée par
l’arrivée, via Mako et Bin Dinh, de 12 G3M3 et 9 D3A1 pour la Marine et de 24 Ki-27 (Nate)
et 17 Ki-43 Hayabusa (Oscar) pour l’Armée.
………
Au sud… – En Johore, Kota Tinggi est à nouveau bombardée par les Ki-21 basés à Kuching.
………
Sumatra – A l’aube, 15 G3M3 et 12 B5N2 escortés par 15 A6M2 attaquent le terrain de
Sabang, surprenant les avions de la RAF qui sont là en transit vers Palembang. Cinq
Hurricane et deux Buffalo (du ML-KNIL) tentent d’intercepter le raid mais, privés d’alerte
radar, ils se font coiffer par les Zéro pendant qu’ils grimpent. Trois Hurricane et les deux
Buffalo sont abattus, contre seulement deux A6M2. Au sol, les bombes détruisent sept autres
Hurricane, cinq Blenheim et un Wellington.
Campagne d’Indonésie
Manado (nord de Célèbes) – Arrivée de la 1ère Force d’Attaque Surprise du contre-amiral
K. Hara (DD Minatsuki, Nagatsuki, Satsuki, Harukaze, Hatakaze), qui se joint au groupe du
couverture du contre-amiral T. Tagaki : CA Haguro, Myoko et Nachi (amiral), CVL Ryujo (25
A5M4 et 18 B5N2), porte-hydravions Chitose (12 F1M2, 8 E13A1, 4 E8N), DD Shiokaze.
………
Détroit de Macassar – La force d’Ozawa (CA Kumano, Mikuma, Mogami, Suzuya, DD
Ayanami, Shikinami, Uranami, Amagiri, Yuguri, Sagiri) prend position au large de
Balikpapan, relevant le groupe spécial du contre-amiral Tanaka, qui appareille pour les îles
Palau.
………
Sœrabaya (Java) – Les dix sous-marins de la Xe Flotille de la Royal Navy arrivent à la base
hollandaise. Commandée par le Captain G.W.G. Simpson, cette flottille comprend huit
bateaux de classe U, les HMS Unbeaten, Unique, Upholder, Upright, Urge, Utmost, P-31 et
P-34, ainsi que deux classe T, les HMS Truant et Trusty.
Campagne du Pacifique Sud
Iles Palau – Arrivée des porte-avions Shokaku et Zuikaku, accompagnés du porte-hydravions
Mizuho et des mouilleurs de mines Okinoshima et Tsugaru et escortés par les DD Akigumo,
Arare, Kagero et Shiranui.
………
Nouméa – Arrivée d’un grand convoi de troupes américain, transportant des unités des
Marines et de l’US Army, et escorté par les porte-avions USS Lexington (vice-amiral Wilson
Brown) et Wasp (contre-amiral Leigh Noyes). Les deux porte-avions sont entourés par les CA
Indianapolis, Portland et San Francisco et les DD du DesRon 1 (Dale, Farragut,
Macdonough, Phelps, Worden) et du DesRon 12 (Aaron Ward, Farenholt, Lang, Selfridge,
Stack, Sterett).
L’amiral Muselier souhaite la bienvenue à l’amiral Brown. Les deux hommes s’accordent
pour attirer l’attention du commandement de l’ANZAC sur la grande vulnérabilité des forces
australiennes à Rabaul. Si des forces japonaises venant des îles Palau l’attaquaient, Rabaul
tomberait rapidement, créant dans la région une situation très préoccupante.
Pour Yvon Lagadec, l’arrivée des porte-avions américains, c’est un peu Noël ! « J’avais
embarqué sur la Jeanne, qui était censée me déposer à Papeete. Mais l’arrivée de l’escadre
américaine m’a littéralement ravi. D’abord parce que je commençais à me demander si tous
leurs bateaux étaient au fond de la rade de Pearl Harbor. Ensuite parce que je n’avais jamais
vu un porte-avions aussi imposant que le Lexington. Dès cet instant, je n’ai plus eu qu’une
idée en tête – vous devinez laquelle. J’ai mis ce que j’ai pu trouver de mieux comme uniforme,
sans oublier ma DFC et mes carnets de vol, et j’ai été supplier le pacha de la Jeanne jusqu’à
ce qu’il accepte de me laisser emprunter l’une des embarcations du croiseur. Et me voilà à la
coupée du Lexington, où je demande à rencontrer le commandant du groupe aérien, en tant
que représentant de la Chasse de l’Aéronavale française à Nouméa (je ne mentais pas, bien
que je fus le seul membre de l’espèce et que je n’eus même pas de monture). Quelques heures
plus tôt avait eu lieu une rencontre d’amiraux, ma visite a dû sembler dans l’ordre des
choses. Un moment plus tard, après force discours et moult descriptions des combats aériens
en Méditerranée et en Mer de Chine, le commandant du groupe aérien décidait qu’il était de
la plus haute importance que je puisse transmettre mon expérience aux pilotes du Lexington
et que, pour cela, je les accompagnerais jusqu’à la prochaine escale du porte-avions à Pearl,
d’où je devais trouver facilement un passage pour les Etats-Unis. Restait une formalité :
obtenir la signature de l’amiral Muselier, tâche dont je m’acquittai aussitôt, grâce à l’aide du
commandant de la Jeanne, très content de se débarrasser de moi ! C’est ainsi que je devins le
seul Français jamais inscrit sur le rôle du splendide “Lady Lex”. Seule ombre au tableau :
j’ai dû m’accoutumer à parler de Wildcat et non plus de Martlet, et surtout à supporter les
vulgarités et l’accent américains, à la place de l’anglais châtié de la Royal Navy… »
Echanges nippo-allemands
Varsovie (Pologne occupée) – Un train de 27 voitures, baptisé “convoi Anton”, quitte la gare
de Varsovie en début de matinée pour Harbin et Dairen, au Mandchoukouo, où il doit arriver
le 14 février après avoir traversé toute l’URSS.
29 janvier
Campagne de Birmanie
Six Hurricane et six P-40 de la ROCAF interceptent 20 Ki-27 du 77e Sentai sur Rangoon.
Quatre Ki-27 et deux P-40 sont abattus, plus un Hurricane qui se pose sur le ventre et sera
irréparable. Le sergent Yoshida, qui pilote un Ki-27, touché de plusieurs balles, tente de
s’écraser sur un Blenheim du Sqn 113, mais sa machine s’écrase sur la butte de protection.
De nouveaux Lysander arrivent au Sqn 28, portant son effectif à 18 machines.
Campagne d’Indochine
Saigon – Alors que les troupes japonaises attaquent Hieu Thien en force et contrôlent
maintenant la plus grande partie de ce qui reste de Xuan Luoc, le décret de levée en masse
entre en application. En fin de journée, ce sont au moins 40 000 travailleurs qui creusent des
tranchées à l’est de Bien Hoa et à l’ouest de Saigon. Certains immeubles sont démolis pour
construire des barrages dans plusieurs points clés de l’agglomération.
Un message du gouvernement français, signé de Paul Reynaud, Georges Mandel et Charles de
Gaulle, valide la décision de Jean Sainteny, nomme Norodom Sihanouk et Bao Daï HautsCommissaires délégués et confie à Sainteny tous les pouvoirs civils et militaires.
………
Kunming (Chine) – Les Hawk-81 français de la 40e EC, reconstituée dans la région de
Mandalay, en Birmanie, arrivent à Kunming pour relever les squadrons de l’AVG. Pilotes et
avions de l’AVG, que la presse alliée n’appelle que les “Tigres Volants”, se rendent à
Chungking, où leur unité sera à son tour reconstituée.
Campagne de Malaisie
Au nord… – Des bombardiers en piqué D3A1 de la Marine japonaise maintiennent une
pression constante sur les forces du Commonwealth à Gurun. Celles-ci commencent à se
replier sur de nouvelles positions, autour de Sungei Munda.
D’autres bombardiers de la Marine lancent une attaque massive contre Penang. L’île est
d’abord la cible de 27 G3M3, qui infligent de graves dégâts à Georgetown, puis celle de
douze D3A1, qui frappent le port, détruisant la canonnière Grasshopper et le pétrolier
Kurumba. Pendant ce temps, l’aviation de l’Armée attaque Port Weld : 18 Ki-21, escortés par
21 Ki-43, ajoutent de nouveaux dommages à ceux des jours précédents. En l’absence de
chasseurs alliés, 12 Ki-43 attaquent des convois routiers sur le chemin du retour,
désorganisant sérieusement la circulation mais perdant l’un des leurs, abattus par des tirs de
DCA légère.
Par ailleurs, des Ki-48 attaquent la gare de Nibong Tebal, endommagent sérieusement la voie
ferrée.
………
Au sud… – En Johore, les troupes japonaises tentent de déborder les positions britanniques à
Kota Tinggi, mais sont facilement repoussées malgré deux attaques aériennes.
Campagne d’Indonésie
Ile Palau – Les porte-avions Kaga et Akagi, venant de Mako (Pescadores) avec les CA
Chikuma et Tone, le CL Abukuma et les DD Hamakaze, Isokaze, Tanikaze, Urakaze et
Kasumi, arrivent tard dans la nuit à Palau. Commandée par le vice-amiral Nagumo, cette
escadre se joint aux autres bâtiments japonais déjà concentrés là.
………
Tjilatjap (Java) – Le croiseur mouilleur de mines Emile-Bertin arrive en fin de journée et
commence aussitôt à embarquer des troupes destinées à Timor.
………
Bali – Arrivée en baie de Denpasar du croiseur USS Houston, qui, malgré les dommages
subis, doit renforcer la Strike Force de l’amiral Karel Doorman.
30 janvier
Campagne de Birmanie – Bataille de Moulmein
La bataille s’ouvre par une violente attaque japonaise venant du sud et du sud-est. A 08h00, le
général Harvey transfère son QG sur la crête dominant la ville, mais à partir de 09h30, cette
zone devient la cible des tirs de l’artillerie japonaise. Un peu plus tard, devant l’avance
ennemie, le BVAS évacue le terrain d’aviation, incendiant deux Audax endommagés qui ne
peuvent se replier vers Pegu.
Vers midi, l’attaque est repoussée, mais les bataillons à l’est de la ville ont dû raccourcir leur
périmètre, laissant un détachement de gardes sikhs isolé sur l’aérodrome. Ces hommes vont
lutter magnifiquement tout le reste de la journée et toute la nuit suivante.
Décollant de Pegu, le BVAS lance une attaque en masse contre les forces menaçant
Moulmein. Les Japonais ont le privilège d’assister au remarquable spectacle de six Heyford,
deux Overstrand et huit Audax volant (plus ou moins) en formation, escortés par quatre Fury
et trois Hurricane (ces derniers un peu déplacés parmi tous ces biplans historiques). Ce raid
est intercepté par sept Ki-27, qui abattent un Heyford et un Audax mais perdent deux des
leurs.
Le même jour, huit Blenheim du Sqn 113 attaquent la zone sans pertes.
L’aviation japonaise n’est pas en reste : le 31e Sentai lance pas moins de quatre attaques
contre Moulmein, sans juger utile de faire escorter ses bombardiers. Deux Ki-30 sont abattus
par des Fury du BVAS. C’est ainsi que le FO Mohan Singh obtient sa cinquième victoire, ce
qui fait de lui le premier as de l’Indian Air Force dans cette campagne.
Campagne d’Indochine
Tonkin – Vingt Hawk-81 du GC I/40 se posent sur la piste de Dien-Bien-Phu, relevant le
squadron Adam & Eve de l’AVG, qui doit aller rejoindre le Panda Bear à Kunming. Le GC
I/40 commence le jour même à attaquer les troupes japonaises opérant dans la région aval de
la Rivière Noire.
………
Cochinchine – Les forces franco-vietnamiennes évacuent Hieu Thien à l’ouest et Xuan Loc à
l’est de Saigon. Sur le front ouest, une nouvelle ligne de défense est préparée à Cu Chi avec
l’aide de la population locale. Sur le front est, les derniers chars du GBMS arrêtent à Suoi Dau
Giay les unités japonaises qui tentent de déboucher de Xuan Loc.
A Saigon et Bien Hoa, rageusement bombardées toute la journée par l’aviation japonaise, ce
sont maintenant plus de 70 000 ouvriers qui creusent des tranchées et dressent des barrages.
En fin de journée, le général de brigade Bourdeau informe le général Martin et le HautCommissaire Sainteny que deux nouveaux régiments de volontaires, un vietnamien et un
chinois, forts chacun de 4 500 hommes, devraient être prêts le 2 février. Cependant, il n’y a
pas une seule pièce d’artillerie et très peu de mitrailleuses pour les unités de soutien chargées
d’appuyer les deux régiments. Par ailleurs, les survivants des premiers bataillons de
volontaires vietnamiens et chinois qui ont combattu à Xuan-Loc doivent être amalgamés pour
constituer un troisième régiment de volontaires, dit “mixte”.
Au crépuscule, une longue colonne de civils quitte Bien Hoa vers les Hautes Terres. C’est le
début de l’évacuation de ce que l’administration française, jamais avare d’euphémismes,
dénomme les « populations particulièrement menacées ».
Campagne de Malaisie
Au nord… – Les troupes du Commonwealth au Kedah commencent à se regrouper sur la
ligne de Sungei Muda, pendant que l’aviation japonaise concentre ses coups contre Penang
(bombardée deux fois), Port Weld et Taiping. Le dragueur de mines auxiliaire Bathurst et les
ferries Kara Kara et Kurami sont coulés lors des raids contre Penang.
………
Au sud… – En Johore, le front est à nouveau calme, mais Kota Tinggi est attaquée à deux
reprises par les bombardiers japonais (une fois par l’Armée, une fois par la Marine).
………
Mer de Chine Méridionale – Les porte-avions légers de la 2e Flotte de Kondo, les Shoho et
Zuiho, escortés par les DD Hibiki et Nowaki, reviennent se positionner au large de la côte est
de la Malaisie après avoir ravitaillé à Mako. Ils ont également réorganisé leurs groupes
aériens : chacun d’eux porte à présent 15 chasseurs A6M2 et 12 bombardiers-torpilleurs
B5N2. Les CV Soryu et Hiryu sont immédiatement renvoyés à Mako pour ravitaillement.
Campagne d’Indonésie
Célèbes – Les 36 G4M1 du 1er Kokutai se redéploient de Manado à Amboine et les 44 G4M1
du Takao Kokutai de Manado à Kendari. En fin de journée, les 36 A6M2 et les 4 C5M2 du
Tainan Kokutai, venant de Mako via Davao et Manado, se posent eux aussi à Kendari.
………
Fremantle (Australie) – Les croiseurs légers australiens Sydney et Hobart, avec les destroyers
américains Bailey, Meade, Shubrick et Swasey, prennent en charge un convoi de six
transports. Ces derniers sont chargés de troupes qui devaient à l’origine partir pour Java et
sont maintenant destinés à Timor.
Renforts
Colombo (Ceylan) – Le Groupe d’Escorte de l’Océan Indien (BB Royal Sovereign, CL
Danae, DD Active, Amazon, Ambuscade, Electra, tous britanniques, avisos coloniaux français
Bougainville, D’Entrecasteaux, Dumont-d’Urville, aviso hollandais Van Kinsbergen) quitte
Colombo pour Aden, où il doit accueillir le convoi Stone-Age à sa sortie de la Mer Rouge.
Campagne du Pacifique Sud
Canberra – Le vice-amiral Emile Muselier vient rencontrer les autorités australiennes. En
tant que commandant des Forces françaises du Pacifique, il souligne l’urgence de renforcer
rapidement les forces australiennes à Rabaul et offre de consacrer à cette opération la 1ère
Brigade de Marines américains, officiellement chargée de la défense de la NouvelleCalédonie.
31 janvier
Campagne de Birmanie – Bataille de Moulmein
Peu avant l’aube, les Sikhs encerclés sur l’aérodrome se fraient un chemin en chargeant à la
baïonnette pour rejoindre le gros des troupes alliées. Ils signalent un présage menaçant : ils
ont entendu des bruits de chenilles dans la nuit. Les Japonais auraient donc des chars dans le
secteur.
A 10h00, le Brigadier Ford signale que la plus grande partie du 4e Burma Rifles (de la 1ère
Division Birmane), qui tenait le flanc gauche de sa position, a disparu – en fait, ce sont des
Birmans des vallées qui ont fait défection et sont passés à l’ennemi. Les Japonais ne
manquent pas de s’enfoncer dans la brèche. Deux bataillons de la 55e division japonaise et un
de la 2e DI thaïe attaquent la 19e Brigade, emmenés par quatre tankettes Type 95 du 5e Rgt
Blindé et deux Vickers Six-toners thaïs. Les soldats birmans encore dans le secteur, qui n’ont
jamais vu quoi que ce soit qui ressemble à un char, s’évaporent dans la forêt, à la notable
exception des hommes des hautes terres, qui se rallient aux troupes indiennes voisines. En
l’absence du moindre antichar, l’attaque nippo-thaïe ne peut être que ralentie, malgré des
combats acharnés.
Vers 14h00, le QG du brigadier Ford est attaqué. La plupart des membres de l’état-major,
dont Ford lui-même, sont tués en tentant de tenir la position.
Pendant ce temps, Harvey a ses propres ennuis. Il a déplacé son QG dans le pavillon des
Travaux Publics du parc Salween et a réussi à rallier la 18e Brigade (Lochner), dont les
hommes se sont mis à couvert dans les premiers bâtiments de la ville et ont pu contenir les
Japonais, avec l’aide de l’artillerie déployée à l’abri, sur la rive ouest de la Salween. Mais à
20h00, le QG d’Harvey est attaqué par des Japonais déguisés en Birmans. La lutte au corps à
corps est féroce – retrouvant son savoir-faire de l’Autre Guerre, Harvey tue personnellement
deux Japonais à la baïonnette, mais il est lui-même assez sérieusement blessé. Cependant,
l’attaque surprise est repoussée par l’état-major et les troupes voisines, accourues à la
rescousse.
Ayant la preuve que ses deux brigades sont attaquées par le gros de la 55e Division japonaise
et par une bonne partie de la 2e DI thaïlandaise, avec l’appui de blindés, Harvey donne l’ordre
à ses troupes de commencer pendant la nuit à se replier sur la rive ouest du fleuve. Elles y
retrouvent les premiers éléments de la 17e Brigade (Ford), qui commencent à atteindre
Moulmein.
Toute la journée, les avions des deux camps sont très actifs au-dessus de Moulmein. La RAF
perd deux Hurricane, un Audax du BVAS et un Blenheim I, en échange de deux Ki-27, un Ki30 et un Ki-48.
Campagne d’Indochine
Tonkin – Les éléments de l’AVG opérant encore de pistes improvisées rejoignent Kunming
où leur Groupe doit être reconstitué, pendant que le GC I/40, basé à Dien-Bien-Phu, multiplie
les attaques de harcèlement contre les colonnes japonaises qui tentent de progresser vers le
nord.
………
Cochinchine – Sur le front ouest de Saigon, une attaque frontale japonaise contre Cu Chi est
bloquée, au prix de la destruction du Bourgueil, le dernier Sav-41 encore opérationnel sur ce
front.
Sur le front est, les troupes françaises reculent lentement vers Bien Hoa, où le 1er Régiment de
Volontaires Mixte prend position dans des fortifications de campagne construites par des
“bataillons de fortifications”. Pendant ce temps, les avions de coopération et d’appui au sol de
l’Armée japonaise (Ki-36 et Ki-51) s’acharnent sur les colonnes de réfugiés qui marchent sur
la route de Bien Hoa à Ban Me Tuot.
« A Saigon, un message d’Alger apprend au colonel Schlesser, d’une part qu’il a été promu
général de brigade, d’autre part qu’il doit immédiatement quitter l’Indochine en se rendant
au cap Saint-Jacques, où le sous-marin Pascal doit le récupérer, ainsi que les sept dernières
infirmières de l’Hôpital Militaire de Saigon et la douzaine de pilotes survivants du squadron
Hell’s Angels et de l’ancienne 40e E.C. (qui finiront par rejoindre leurs unités après un long
détour par la Birmanie). Deux Américains et deux Français exigent de rester, leurs appareils
(deux P-40 et deux Hawk-75) étant encore opérationnels. Le nouveau général, lui, n’accepte
d’obéir qu’après une longue discussion avec Sainteny et Martin. Le cœur serré, il laisse son
commandement au Lt-colonel Lecoq.
Mais Schlesser n’est pas au bout de ses émotions pour la journée. En effet, alors qu’il
prépare son départ, il voit arriver une jeune femme furibonde : c’est Edmonde Charles-Roux,
choisie par les autres infirmières pour les représenter malgré son jeune âge (20 ans), car la
future présidente de l’Académie Goncourt a été décorée de la Croix de Guerre (et blessée)
lors de la Campagne de France. Aucune des sept n’accepte de partir ! Après une chaude
discussion, le général Schlesser use de l’autorité de son grade pour obliger à le suivre les
trois infirmières militaires (dont Mlle Charles-Roux). Mais les quatre autres refusent d’obéir,
arguant qu’elles ne se sont pas engagées dans l’Armée, mais qu’elles sont des Françaises
résidant au Vietnam qui se sont enrôlées sur place pour soigner les blessés, et qu’elles ne les
abandonneront pas ! On se souvient peut-être qu’en 1959, cet épisode et le voyage du Pascal
furent portés à l’écran, dans une version considérablement… arrangée, comme le montrent le
titre, “Le Sous-Marin des Mers Chaudes”, et la distribution : le général français était
interprété par Jean Marais et l’infirmière rebelle par Martine Carol, tandis qu’Eddie
Constantine incarnait un pilote américain disputant au général le cœur de la capiteuse
Martine… » (Pascal N’Guyen-Minh, op. cit.).
Campagne de Malaisie
Au nord… L’aviation japonaise maintient sa pression sur Port Weld et Penang pendant toute
la journée, tandis que des bombardiers légers Ki-48 et des chasseurs Ki-27 et Ki-43
empêchent la plupart des mouvements sur les routes du Perak.
Dans la soirée, lord Gort arrive à Kuala Lumpur en compagnie du général Wavell et du Ltgénéral Percival pour rencontrer les commandants du IIe Corps australien (Lt-général J.
Northcott), de la 8e D.I. australienne (major-général H. Gordon-Bennett), de la 1ère D.B.
australienne (major-général H.C.H. Robertson), de la 11e D.I. indienne (major-général D.M.
Murray-Lyon) et de la 18e D.I. britannique (major-général Merton Beckville-Smith). Ils
s’accordent pour reconnaître que la situation se détériore dans le nord de la Malaisie. Les
forces japonaises s’adaptent aux procédures de défense des forces du Commonwealth et,
disposant d’un contrôle presque complet de l’espace aérien, parviennent à contrebalancer
jusqu’à un certain point la supériorité de l’artillerie britannique. Wavell recommande de
positionner la 11e D.I. indienne sur la “Ligne Verte” (de Kuala Kangsar à Sungei Perak) et la
18e D.I. britannique à Penang. Cependant, les récents raids aériens japonais ont en partie mis
hors d’usage les installations de Port Weld et il est impossible de se reposer sur le système
ferroviaire, constamment attaqué. La 8e D.I. australienne, qui a repoussé l’essentiel des
premières attaques japonaises et dont les forces sont en grande partie épuisées, doit être
évacuée. Cependant, une évacuation par Port Weld n’apparaît pas réaliste dans la situation
présente. Georgetown (Penang) est maintenant le seul port doté d’installations importantes,
mais est aussi quotidiennement attaquée.
Le sujet de la couverture de chasse est soulevé, mais Wavell rappelle que le terrain de Sabang
a été récemment touché et est mal protégé, et que les chasseurs américains assemblés à
Darwin doivent maintenant être envoyés d’urgence défendre Java et Timor.
Campagne d’Indonésie
Iles Palau – Arrivée du groupe du contre-amiral R. Tanaka (CL Jintsu, DD Hayashio,
Kuroshio, Oyashio, Amatsukaze et Hatsukaze).
………
Manado – La Force de Débarquement à Timor, commandée par le vice-amiral I. Takahashi,
se met en route à l’aube. Elle est composée de dix transports escortés par le Groupe de
Couverture du contre-amiral T. Tagaki (CA Haguro, Myoko et Nachi [amiral], CVL Ryujo
[25 A5M4 et 18 B5N2], porte-hydravions Chitose [12 F1M2, 8 E13A1, 4 E8N] et DD
Shiokaze), du 1er Groupe d’Attaque Surprise du contre-amiral K. Hara (DD Minatsuki,
Nagatsuki, Satsuki, Harukaze, Hatakaze), plus cinq dragueurs de mines et trois chasseurs de
sous-marins.
………
Baie de Kupang (Timor) – Au coucher du soleil, l’Emile-Bertin entre dans le port et
commence à débarquer hommes et matériel de la 1ère Compagnie d’Infanterie Indépendante de
l’Armée des Indes (300 hommes commandés par le Major S.P. Fearon) et de la “Force Rose”
de l’Australian Imperial Force (50 Australiens et 6 Guides de la FMSVF, commandés par le
major Lloyd, accompagné du major Rose, du 2e Argyll & Sunderland Highlanders, créateur
de cette force spéciale détachée par l’état-major de Malaisie). Le croiseur français quitte la
baie de Kupang dès le débarquement expédié et file vers Sœrabaya, où il doit embarquer des
mines pour une opération offensive.
………
Fremantle (Australie) – Les six transports de troupes américaines et australiennes quittent
Fremantle avec leur escorte pour la baie de Kupang.
Campagne du Pacifique Sud
A 18h30 (locales), les porte-avions Enterprise et Yorktown se séparent et filent vers les
positions choisies pour lancer leurs avions. L’Enterprise, sous le commandement de Halsey,
doit attaquer Wotje, Maloelap et Kwajalein. Le Yorktown, sous le commandement de
Fletcher, doit attaquer Jaluit, Mili et Makin.