La fille aînée de Bernadette et Jacques Chirac est

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La fille aînée de Bernadette et Jacques Chirac est
Le Point, le 14 avril 2016
La fille aînée de Bernadette et Jacques Chirac est
morte
Âgée de 58 ans, elle souffrait d'anorexie depuis de nombreuses années. Laurence Chirac est
décédée aujourd'hui d'un malaise cardiaque.
Laurence Chirac est morte jeudi des suites d'un malaise cardiaque. Hospitalisée dans la soirée de
dimanche, elle a été prise en charge dans une unité de soins intensifs de l'hôpital Necker à Paris. Son
cœur avait cessé de battre, avant de repartir grâce à l'efficace intervention du corps médical. Mais la
fille aînée du couple Chirac avait alors sombré dans un coma dont elle ne s'est finalement pas
réveillée.
Peu connue des Français – beaucoup considèrent même que Chirac n'a qu'une fille, Claude -,
Laurence, née le 4 mars 1958, fut atteinte d'une anorexie mentale à l'âge de 15 ans. Une maladie qui
se caractérise par un refus de s'alimenter. Longtemps Bernadette Chirac a mis cette anorexie sur le
compte d'une méningite mal soignée. Ce fut en tout cas le diagnostic des médecins après que
Laurence eut été prise de terribles maux de tête lors d'un séjour en Corse au début des années 70.
Selon d'autres spécialistes, l'anorexie mentale est née de sa relation au père. Un père absent,
travaillant à ses rêves de grandeur politique, déjà ministre de Pompidou. Pour tenter de «guérir»
Laurence, le couple Chirac a sollicité les plus grands centres spécialisés dans l'anorexie, en France
comme en Europe. Mais il n'existait que des structures fermées, ce qui fut rédhibitoire pour la
famille, qui souhaitait avoir Laurence à ses côtés. Parallèlement, la jeune fille est suivie par le grand
psychiatre Louis Bertagna.
La famille Chirac se constitue en clan autour d'elle
22 Mars 1981 Jacques Chirac avec sa fille Laurence, dans leur appartement de l'Hôtel de ville de
Paris. © Henri Bureau Copyright 2000 Adobe Systems Incorporated
Premier ministre entre 1974 et 1976, Jacques Chirac s'impose de déjeuner régulièrement avec son
aînée - quitte à déjeuner deux fois s'il lui fallait honorer un rendez-vous politique. De famille, les
Chirac se constituent en «clan» autour de Laurence, qui vit au gré des embellies et des rechutes. La
jeune fille, sosie de son père, tient à poursuivre des études de médecine, encouragée par les siens, et
entretient une correspondance avec le journaliste Patrick Poivre d'Arvor, dont la fille, Solenn, est elle
aussi victime d'anorexie. Alors qu'il revient à Matignon en 1986, Jacques Chirac doit faire face à une
terrible rumeur : Laurence serait morte. «Je ne vais quand même pas faire un communiqué pour dire
qu'elle est vivante!» s'agace-t-il.
Le 13 avril 1990, alors qu'il est en Thaïlande, il apprend que sa fille s'est jetée par la fenêtre. Après
une quinzaine de tentatives de suicide, elle s'installe dans un rez-de-chaussée de la rue SaintDominique. Elle reçoit la visite de sa mère, qui trouve les mots pour contenir ses pulsions de mort. À
Bitty, dans le château corrézien familial, elle vit dans une petite maison sise dans le parc, à l'abri des
regards. Pour la protéger, Laurence sera maintenue à l'écart de l'existence publique des Chirac. Elle
fera une apparition à l'Élysée lors de l'intronisation de son père en 1995. Le président élu tiendra, par
ailleurs, à garder sa fille Claude auprès de lui. Il la nomme responsable des relations presse. Leur
relation sera exclusive. Comme si Jacques Chirac, rongé par la culpabilité, craignait le pire s'agissant
de sa benjamine. En 2012, Laurence participe, voûtée et habillée d'une veste en jean, à un long
reportage photo de Paris Match pour les 80 ans de son père. «Laurence, c'est le drame de ma vie»,
dira-t-il au journaliste Pierre Péan.
Bernadette évoque le sujet en 2004
C'est pour venir en aide aux victimes d'anorexie que Bernadette, sa mère, lève des fonds à la fin des
années 1990 pour ouvrir dans toute la France des établissements spécialisés pour accueillir ces
malades. Ce n'est qu'à l'occasion de l'inauguration en décembre 2004 de la maison des adolescents
de l'hôpital Cochin, baptisée Maison de Solenn en souvenir de Solenn Poivre d'Arvor, que Bernadette
Chirac s'exprime sur ce sujet douloureux. Depuis vingt ans, l'ex-première dame s'investit plus
spécialement pour l'amélioration des conditions d'hospitalisation et d'accompagnement des enfants
et adolescents malades dans les hôpitaux.
Sources :
« L'Inconnu de l'Élysée » (Fayard), de Pierre Péan
« Chirac, une vie » (Flammarion), de Franz-Olivier Giesbert
« Conversation » (Plon), entretien entre Bernadette Chirac et Patrick de Carolis.