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Roténone: un outil essentiel mais décrié pour l’évaluation de la diversité des poissons marins
D. ROSS ROBERTSON Y WILLIAM F. SMITH-VANIZ
Les récifs coralliens, l’un des écosystèmes biologiquement les plus divers et importants sur la Terre, subissent un déclin écologique
sans précédent et chaque fois plus important alors que les faunes de poissons de ces récifs et autres habitats côtiers sont toujours mal
connues dans le détail. La roténone, une substance naturelle traditionnellement utilisée pour la pêche de subsistance, est un outil
particulièrement efficient pour la collecte d’échantillons de poissons de récifs et d’autres zones côtières pour la recherche marine.
Malheureusement, ce type d’échantillonnage est perçu comme très destructif, et l’augmentation des interdictions d’usage de la
roténone dans de nombreux pays va bientôt handicaper la recherche dans le domaine de la biodiversité des poissons coralliens à
l’échelon mondial. Dans cet article, nous dissipons des idées fausses communes sur les effets environnementaux que peut avoir
l’échantillonnage à petite échelle avec la roténone dans le cadre de la recherche marine.
Mots-clès: poissons de récifs coralliens, recherche sur la biodiversité, échantillonnage avec la roténone.
D. Ross Robertson (e-mail: [email protected]) travaille au Smithsonian Tropical Research Institute á Balboa, République de Panamá.
William F. Smith-Vaniz (e-mail: [email protected]) est associé au Florida Museum of Natural History, University of Florida à
Gainesville. Copyright 2008 American Institute of Biological Science.
La roténone, une substance chimique naturelle
produite par des plantes légumineuses originaires du sud-est
asiatique et de l’Amérique du Sud, a été traditionnellement
utilisée par les pêcheurs indigènes dans les eaux douces et
marines de ces régions (Béarez 1998, Lockett 1998, Ling
2003). La roténone tue les poissons et les autres organismes
par blocage de l’absorption de l’oxygène au niveau cellulaire
(Singer et Ramsay 1994). Les gestionnaires des pêches en eau
douce l’utilisent de façon routinière en quantités pouvant
atteindre des centaines des tonnes, soit afin d’éliminer les
espèces exotiques dans le cadre de la conservation des
poissons indigènes, soit pour éliminer les poissons
indésirables avant d’ensemencer un plan d’eau avec des
poissons destinés à la pêche sportive (McClay 2000, Ling
2003).
La roténone est le principe actif des insecticides
organiques communément utilisés pour les animaux de
compagnie et dans les jardins, ainsi que dans l’agriculture et
l’élevage. L’information sur l’utilisation de la roténone comme
pesticide, extraite des rapports du gouvernement et d’une large
gamme d’études publiées dans des revues scientifiques, et sur
les implications de son usage sur la santé humaine et
l’environnement, est disponible sur les sites suivants:
Organisation
Mondiale
de
la
Santé
(OMS;
www.who.int/ipcs/publications/pesticides_hazard_rev_3.pdf),
Réseau de Toxicologie EXTOXNET (The Extension
Toxicology Network; http://extoxnet.orst.edu/pips/rotenone
.htm) et Société Américaine des Pêches (American Fisheries
Society; www.fisheries.org/units/rotenone/index.htm; des
rapports importants de l’Agence pour la Protection de
l’Environnement des États-Unis sont aussi disponibles sur le
site de l’AFS); voir aussi les synthèses de Lockett (1998) et
Ling (2003). En résumé, ces sources considèrent la roténone
comme un pesticide relativement sûr qui peut être utilisé dans
l’agriculture comme dans l’élevage. Il n’y a pas d’indice clair
d’un éventuel effet cancérigène ou tératogène chez le rat.
L’OMS classe la roténone comme modérément dangereuse,
avec la pyréthrine, un autre insecticide organique d’usage
domestique commun: elle est classée au niveau 3 dans une
échelle de 1 (le plus toxique) à 4. Lorsqu’elle est avalée en
grand quantité, la roténone a une faible toxicité pour les
oiseaux, mais elle est modérément toxique pour les rats. Le
principal danger, pour la santé humaine, d’un usage de la
roténone dans la gestion des pêches (et la recherche), vient de
sa possible inhalation sous forme de poudre ou d’aérosol, ce
qui peut être évité en utilisant un masque. Les poissons tués
par la roténone ne gardent en eux qu’une petite quantité de
substance, principalement dans les parties du corps non
comestibles. Il n’a pas été rapporté d’effets sur l’homme de la
consommation de poissons collectés après usage de roténone
et les deux auteurs ont consommé du poisson pêché de cette
manière sans ressentir aucun effet notable et immédiat. En
outre, en raison du caractère thermolabile de la roténone, la
cuisson réduit le risque potentiel de toxicité chez les personnes
consommant des poissons ayant été exposés à cette substance.
Il est peu probable qu’on mène des études à grande échelle et
rigoureusement élaborées sur les effets à long terme chez
l’homme d’une consommation de poissons exposés à la
roténone, dans la mesure où elles sont coûteuses et
généralement restreintes aux pesticides utilisés dans les pays
développés, où l’usage de la roténone est très réglementé et
son utilisation pour la pêche prohibée. L’AFS soutient qu’une
étude expérimentale qui avait mis en évidence des lésions
cérébrales et des symptômes du type maladie de Parkinson
chez des rats suite à des injections intraveineuses régulières de
roténone (Betarbet et al. 2000) n’a qu’un intérêt douteux pour
ce qui concerne l’usage de la roténone dans la gestion des
pêches. L’évaluation de cette étude de la part de l’AFS (voir
www.fisheries.org/units/rotenone/index.htm; voir aussi Ling
[2003]) souligne que : (a) la roténone n’est pas absorbée par le
système digestif des mammifères et qu’elle est rapidement
dégradée par le foie; (b) dans l’étude de Betarbet et ses
collègues (2000), l’atteinte du cerveau des rats par la roténone
a nécessité le recours à des injections intraveineuses; (c) aucun
symptôme ou changement anatomique de type maladie de
Parkinson n’a jamais été décelé auparavant dans des études sur
des rats ayant ingéré de la roténone durant de longues
périodes; et (d) il n’y a aucune évidence de lien entre
l’utilisation pendant plusieurs décennies de la roténone pour la
pêche et la maladie de Parkinson chez l’homme.
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Les restrictions d’usage de la roténone dans les
recherches marines sont en considérable augmentation à
l’échelon mondial. Beaucoup de pays situés dans les centres
globaux de diversité pour les poissons côtiers des zones
tropicales et subtropicales, ont interdit ou restreint
énergiquement aux chercheurs l’usage de la roténone pour la
collecte d’échantillons de poissons côtiers ou récifaux. Une
liste partielle inclue les États-Unis (partie continentale, Iles
Vierges et Hawaii), où la roténone est pourtant utilisée
légalement dans la gestion des pêches à grande échelle et dans
la restauration des populations de poissons d’eau douce natifs;
le Mexique, le Belize, le Honduras, la Colombie, l’Équateur,
le Venezuela, les Iles Caïmans, le Brésil, où la roténone a été
historiquement utilisée par les pêcheurs indigènes; la
Polynésie française, le Japon, Palau, l’Australie, la NouvelleZélande, l’Inde et l’Afrique du Sud. Nous croyons, comme
nous le montrons ici, que des telles interdictions ou
restrictions anormales résultent d’un manque d’information de
la part des gestionnaires sur le réel besoin d’échantillonnages à
petite échelle avec de la roténone et d’un manque de
conscience de la nature provisoire et insignifiante des effets
secondaires de tels échantillonnages sur l’environnement.
L’échantillonnage avec la roténone fournit des données
essentielles sur la biodiversité marine
La taxonomie est fondamentale pour comprendre la
biodiversité et les processus évolutifs, et joue un rôle essentiel
en biologie de la conservation (Dubois 2003) ; des faits que les
gestionnaires n’apprécient souvent pas, mais qu’ils doivent
pourtant prendre en considération. Toute recherche biologique
requiert d’une identification précise des espèces, laquelle
dépend des systématiciens travaillant dans les muséums et
ayant à disposition suffisamment d’espèces récoltées dans de
vastes aires géographiques et sur de longues périodes de temps
(Cotterill 1995). Des spécimens de référence sont essentiels
pour la recherche sur la biodiversité des poissons côtiers, leur
taxonomie (morphologique et génétique) et leurs réponses
écologique, évolutive, biogéographique et populationnelle au
changement climatique. L’échantillonnage avec la roténone a
été d’une importance capitale pour le développement et
l’édition de guides régionaux modernes pour l’identification
des poissons côtiers tropicaux, lesquels incluent
nécessairement des poissons cryptiques. Ces guides, incluant
celui de Randall (2007) ainsi que ses neuf guides régionaux
précédents sur l’identification des poissons de récifs de l’IndoPacifique et de l’Atlantique (voir aussi Carpenter [2002]) et
trois autres guides régionaux sur les poissons tropicaux de
l’Indo-Pacifique, édités par l’Organisation des Nations Unies
pour l’Agriculture et l’Alimentation (FAO), montrent
l’importance d’un tel échantillonnage pour comprendre la
biodiversité des poissons côtiers tropicaux à l’échelle
planétaire. Néanmoins, de larges zones tropicales n’ont
toujours pas été inventoriées, et l’on est encore loin de
connaître de façon claire le nombre d’espèces de poissons
côtiers tropicaux existants, même dans les zones qui ont été
relativement bien échantillonnées (voir Zapata et Robertson
[2006]). De plus, l’abondante information fournie par
l’échantillonnage avec la roténone sur l’usage de l’habitat,
l’écologie et la distribution géographique des poissons côtiers
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est vitale pour leur conservation et la gestion de leurs
populations - les organismes les plus vulnérables à l’extinction
locale ou globale en raison de conditions adverses sont ceux
ayant de faibles répartitions géographiques, des habitats
spéciaux ou autres nécessités écologiques. D’après Gerald R.
Allen du Western Australian Museum de Perth
(communication personnelle, 13 juin 2007), l’échantillonnage
avec la roténone s’est montré essentiel pour ses récents
inventaires de biodiversité dans le cadre d’études de
conservation dans quelques endroits clés comme les
Philippines, l’Indonésie, la Papouasie-Nouvelle-Guinée et les
Iles Salomon. Combiné à des inventaires visuels, un tel
échantillonnage a représenté un outil puissant pour obtenir une
“photo instantanée” complète de la faune en chaque lieu
étudié. Allen a utilisé l’échantillonnage avec la roténone de
façon régulière au cours de ces 10 dernières années comme
partie du protocole des “évaluations biologiques rapides” dans
ces zones.
Ces évaluations sont un élément clé dans les
stratégies de conservation employées par des organisations
telles que Conservation International (CI), The Nature
Conservancy (TNC) et le World Wildlife Fund (WWF). Un tel
échantillonnage a joué un rôle crucial lors des inventaires
réalisés par CI et TNC dans les îles Raja Ampat, au large de la
côte occidentale de Nouvelle-Guinée. Dans ces îles,
l’association d’inventaires visuels et d’échantillonnages à la
roténone sur de petites stations a permis à l’équipe de Allen de
dresser une liste impressionnante de plus de 1100 espèces des
poissons pour cette zone, évidence indéniable que cette zone
est parmi les plus riches au monde en poissons de récifs
tropicaux. Comme résultat direct de cette investigation, un
réseau de six aires marines protégées a été mis en place dans
ces îles - un résultat qui n’aurait pas été possible sans l’aide
des échantillonnages avec la roténone.
L’usage de la roténone dans la recherche marine
Historiquement, les chercheurs ont utilisé trois formulations
différentes de la roténone pour collecter des poissons : (1) des
préparations aqueuses diluées, composées de racine pulvérisée
(concentration de 5 à 8 pour cent) mélangée à de l’eau pour
produire une pâte, avec souvent un ajout de savons
biodégradables pour augmenter l’émulsion de la poudre; (2)
des préparations commerciales liquides à base de pétrole,
composées de résine de roténone (jusqu’à une concentration
de 50 pour cent) mélangée à des solvants de pétrole et des
émulsifiants permettant la dilution de la préparation liquide
dans l’eau; et (3) la roténone cristalline à 97 pour cent dissoute
dans l’alcool ou l’acétone (Gilmore et al. 1981, McClay
2000). Les préparations commerciales à base de pétrole,
lesquelles s’utilisent communément pour la pêche en eau
douce (McClay 2000), sont coûteuses, peu fiables après
stockage prolongé et, en raison de leur caractère inflammable,
dangereuses à transporter. La roténone cristalline est
extrêmement chère. Pour ces raisons, les biologistes marins
utilisent en général des préparations aqueuses. Lors
d’échantillonnages de poissons côtiers, les collecteurs
dispersent de façon manuelle sur le fond une petite quantité de
pâte aqueuse de roténone (environ 1 kilogramme de poudre
mélangée à plusieurs litres d’eau). En milieu récifal ouvert,
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une telle quantité permet d’échantillonner les poissons sur une
surface d’environ 10 mètres de diamètre pour un peu moins
d’une heure, après quoi la roténone est trop dispersée pour être
effective sur les poissons entrant dans la zone traitée. Cet
échantillonnage est typiquement limité aux zones à faible
renouvellement d’eau, car beaucoup d’espèces de poissons
sont résistantes à la roténone (quelques unes ont besoin
d’environ 20 minutes d’exposition pour pouvoir être
capturables) et la roténone se disperse trop rapidement lorsque
les courants sont modérés à forts.
L’échantillonnage avec la roténone n’est qu’une technique
parmi une panoplie de méthodes de recherche et non une
technique alternative. Les inventaires visuels fournissent des
informations précises sur les espèces visibles dans les eaux
claires des récifs coralliens, mais pas sur des espèces vivant
dans les eaux troubles, comme en estuaire ou en mangrove, ni
sur des poissons cryptiques qui vivent cachés dans des
crevasses ou des terriers, que ce soit dans les récifs, les
mangroves, le sable ou la vase. En revanche, les inventaires
faits avec la roténone offrent d’importantes informations sur
les poissons cryptiques ou vivant dans les milieux turbides; ils
améliorent aussi grandement la collecte des poissons de récifs
profonds. Richard Pyle, du Bishop Museum à Hawaii
(communication personnelle, 15 juin 2007), est l’un des
plongeurs, du petit groupe de plongeurs scientifiques à
l’échelle mondiale, qui utilise un “recycleur d’air” pour la
récolte d’échantillons de poissons dans les récifs, à des
profondeurs allant entre 45 et 150 mètres. Selon son
expérience, les échantillonnages faits avec la roténone á ces
profondeurs multiplie par trois le taux des découvertes de
nouvelles espèces des poissons cryptiques des récifs profonds
(voir par exemple Smith-Vaniz [2005], pour la description
d’une de ces espèces et pour des informations sur la collecte à
l’aide de “recycleurs d’air” ). John E. McCosker, de la
California Academy of Sciences á San Francisco
(communication personnelle, 12 juin 2007), affirme que les
inventaires avec la roténone sont essentiels pour des
échantillonnages efficaces des environnements très profonds
(> 150 mètres) à partir de sous-marins de recherche, lesquels
utilisent un bras flexible pour injecter de la roténone depuis un
réservoir à bord, jusque dans les crevasses ou sur le fond.
Les poissons cryptiques côtiers appartiennent à une
large gamme de familles de poissons et représentent presque la
moitié des espèces de l’ichtyofaune néotropicale côtière (voir
Carpenter [2002], Robertson et Allen [2006]) ; leur importance
est similaire dans l’ensemble des faunes de poissons côtiers de
la ceinture tropicale. L’échantillonnage avec la roténone révèle
des espèces cryptiques qui usuellement ne sont pas détectées
dans les inventaires visuels d’une aire donnée, en doublant
souvent le nombre d’espèces connues préalablement pour cette
zone (Harmelin-Vivien et al. 1985, Dibble 1991, Lockett
1998, Ackerman et Bellwood 2000, Collette et al. 2003,
Dennis et al. 2005, Smith-Vaniz et al. 2006), même si Willis
(2001) a trouvé six fois plus d’espèces en utilisant la roténone.
Non seulement les inventaires visuels n’arrivent pas à
documenter la présence de beaucoup des poissons cryptiques
de récifs, mais de plus ils sous-estiment largement les densités
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des populations de tels poissons. Par exemple, Ackerman et
Bellwood (2000) ont effectué le recensement visuel de petites
zones avant de les échantillonner avec la roténone ; ils ont
récolté de 50 á 75 pour cent plus d’individus en utilisant la
roténone. Willis (2001) et Dibble (1991) ont récolté de 4 à 16
fois plus, respectivement (voir aussi Brock [1982] et Kulbicki
[1990]).
La collecte avec des anesthésiques, comme la
quinaldine ou l’huile de clou de girofle, est efficace quand on
projette de petites quantités de produit, à l’aide d’une pissette,
sur les poissons qu’on a pu approcher suffisamment.
Néanmoins, en général, les anesthésiques sont beaucoup
moins efficaces que la roténone pour capturer des poissons
cachés, lesquels sortent de leurs cachettes (devenant ainsi
accessibles) lorsqu’ils sont exposés a la roténone alors que ce
n’est souvent pas le cas lorsqu’ils sont anesthésiés. En outre,
la roténone produit une désorientation plus durable que les
anesthésiques chez les poissons, ce qui permet une capture
plus aisée (Ackerman et Bellwood 2002). De plus, dans la
plupart des cas, l’usage des anesthésiques requiert l’usage de
solvants comme l’alcool ou l’acétone. Bien que les
anesthésiques puissent être utilisés pour échantillonner de
petites zones fermées telles que des mares intertidales
rocheuses (Griffiths 2000), l’usage d’anesthésiques en grandes
quantités, nécessaires à un tel échantillonnage, implique la
libération dans le milieu de quantités de solvants qui affectent
probablement bien d’autres organismes que les poissons.
Les autres techniques de collecte ont toutes des
limitations considérables pour l’échantillonnage des poissons
côtiers: les explosifs sont généralement destructifs; les pièges
et les filets sont très sélectifs et peuvent détruire certains
habitats; et la pêche électrique ne fonctionne pas dans l’eau
salée. Comme la roténone, l’antimycine a été utilisée pour
capturer des poissons; cependant, cet antibiotique est plus
toxique que la roténone pour une large gamme d’organismes;
il est substantiellement plus toxique que la roténone pour les
mammifères; son action est très variable en fonction des
espèces de poissons, et pas du tout efficace lorsque le pH est
élevé, comme dans les mangroves et certains autres habitats
marins (Marking 1992).
De notre expérience et de celles d’autres collègues
qui collectent des poissons côtiers, l’échantillonnage avec la
roténone est de loi la méthode la plus efficace pour capturer
une large gamme de poissons cryptiques habitant les eaux
troubles ou en profondeur, dans le cadre des inventaires de
biodiversité.
La roténone est très sélective pour les poissons. La roténone
a une faible toxicité pour les oiseaux, et les oiseaux marins ne
sont pas affectés par la consommation des poissons traités
avec la roténone pendant les récoltes scientifiques (John E.
McCosker, communication personnelle, 15 juin 2007) ; en tout
cas, les poissons conservent très peu de roténone dans leurs
tissus. En dehors des poissons, la roténone touche
principalement les petits crustacés planctoniques, et une
station typique de pêche à la roténone ne fournit que des
quantités limitées d’ophiures, de petites crevettes benthiques
et de poulpes, lesquels sont aussi utiles pour la recherche
(Bussing 1972, Lockett 1998, Ling 2003 ; Gerald R. Allen,
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communication personnelle, 12 juin 2007; John E. Randall,
Bishop Museum, Honolulu, communication personnelle, 13
juin 2007).
Les quelques expériences pertinentes réalisées sur ce sujet
n’ont détecté aucun effet délétère sur les coraux exposés à la
roténone diluée, telle qu’elle est utilisée par les chercheurs.
Jaap et Wheaton (1975) ont trouvé que la solution non diluée
(concentration maximale) de roténone liquide à base de
pétrole, au lieu de se disperser correctement, a formé des
gouttelettes qui se sont déposées et sont restées sur les
surfaces horizontales des coraux durs. Ceci a causé une
“mortalité partielle” des colonies de coraux, quelques parties
étant mortes mais sans affecter l’intégralité de la colonie. Le
corail peut régénérer ensuite les zones mortes du squelette. Il
n’y a pas eu tels effets de la roténone en concentration
maximale sur les coraux mous, lesquels, à la différence des
coraux durs, croissent verticalement et ne retiennent pas les
gouttelettes de solution de roténone. Ces auteurs n’ont pas
remarqué d’effets de la solution diluée de roténone à base de
pétrole sur les coraux durs et mous, quand la solution se
disperse normalement. Comme les chercheurs qui collectent
des poissons diluent la roténone avant de l’utiliser sous l’eau,
et comme celle-ci se disperse rapidement dans les stations de
prélèvement, les coraux ne subissent pas de contact prolongé
avec la roténone concentrée pendant les opérations de collecte.
Dans d’autres études sur le terrain où
l’échantillonnage s’est fait de façon classique sur de petites
stations de pêche à la roténone, aucun effet nuisible sur les
coraux n’a été observé. Par exemple, Bright et ses collègues
(1974) n’ont pas noté d’effet après l’usage de roténone à base
de pétrole sous une “bâche” en plastique dont ils avaient lesté
le pourtour pour délimiter une zone du fond et ainsi réduire la
dispersion de la roténone pour une heure environ, avant de
l’enlever pour permettre aux chercheurs de travailler sur la
zone. Smith (1973) a utilisé la roténone à base de pétrole pour
échantillonner à plusieurs reprises des zones coralliennes, ce
jusqu’à trois fois sur des périodes allant jusqu’à trois ans, et il
n’a pas remarqué d’effet nuisible sur les coraux (C. Lavett
Smith, American Museum of Natural History, New York,
communication personnelle, 13 juin 2007).
À part les poissons, les seuls organismes
macroscopiques tués par l’application de roténone á base de
pétrole dans une grande mare intertidale d’un récif du
Pacifique central, ont été des crevettes et des poulpes (mais
pas les crabes; Bussing 1972). L’administration du Parc
National qui a effectué une évaluation et un suivi des effets
collatéraux de l’échantillonnage avec la roténone aqueuse
réalisé par Smith-Vaniz et ses collaborateurs (2006) dans les
Iles Vierges (USA) n’a pas relevé d’effets nuisibles sur les
coraux (Z. Hillis-Starr, Buck Island Reef National Monument,
St. Croix, communication personnelle, 18 juin 2007).
L’absence d’effet observé sur les coraux brièvement exposés a
la roténone diluée dans une station de collecte typique est en
accord avec nos propres observations tout au long des
nombreuses années de récolte d’échantillons. Tant nousmêmes que les autres chercheurs qui utilisons la roténone, soit
aqueuse soit à base de pétrole (e. g. Gilmore et al. 1981),
avons observé moins de mortalité des invertébrés avec les
préparations aqueuses, ce qui indique que les produits à base
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de pétrole utilisés dans les préparations commerciales de
roténone sont toxiques tant pour les invertébrés que pour les
poissons. Limiter les prélèvements scientifiques en eaux peu
profondes à l’utilisation de la seule roténone aqueuse ne
représenterait pas une entrave pour la recherche. La roténone à
base de pétrole est en revanche plus utile pour les collectes en
eaux profondes parce que les plongeurs scientifiques
(seulement un petit groupe à travers le monde) qui
échantillonnent ces milieux disposent de peu de temps pour
faire leur travail, et que les températures, plus basses,
réduisent de façon dramatique l’efficacité de la roténone
aqueuse (Richard L. Pyle, communication personnelle, 15 juin
2007; John E. McCosker, communication personnelle, 12 juin
2007).
L’échantillonnage avec la roténone n’élimine pas tous les
poissons ni ne détruit leurs habitats.
L’échantillonnage à la roténone sur de petites stations en mer
ouverte ne tue pas tous les poissons de la zone. Les poissons
doivent rester un certain laps de temps dans la zone traitée
pour qu’ils deviennent capturables et les grands poissons,
mobiles, qui se déplacent brièvement dans la zone traitée, ne
sont pas affectés. Beaucoup de poissons mobiles évitent la
roténone et abandonnent la zone traitée temporairement
jusqu’à que la roténone se soit dispersée, bien que des petits
mérous soient attirés sur les lieux de collecte pour chasser les
poissons désorientés. Les inventaires visuels peuvent fournir
des données appropriées sur les poissons de récifs sousreprésentés dans les échantillonnages avec la roténone en
raison de telles réactions d’évitement. En fait, la fuite des
poissons mobiles et très visibles est préférable lors des
échantillonnages avec la roténone qui visent principalement à
évaluer la présence des espèces cryptiques. S’il y a besoin de
retenir les poissons mobiles (par exemple quand on calcule
l’abondance d’une communauté), on peut installer des filets de
rétention autour de l’aire d’échantillonnage avant de répandre
la roténone (e.g. Ackerman et Bellwood 2000). De plus, les
poissons récupèrent à la suite d’une légère intoxication à la
roténone (Schultz 1948, Bussing 1972, Smith 1973, Ling
2003). En fait, Galzin (1979) a utilisé avec succès la roténone
comme anesthésique des poissons de récifs coralliens. À l’aide
d’une pissette, il a projeté de petites quantités de solution
hautement diluée sur des poissons isolés jusqu’à qu’ils soient
suffisamment désorientés pour être capturés avec une épuisette
d’aquarium; après quoi ils furent marqués puis libérés. Un
mois après leur capture avec la roténone, il a pu à nouveau
observer sur le terrain 95 pour cent des poissons marqués.
Finalement, par opposition aux méthodes mécaniques de
collecte, comme le chalutage, qui peuvent détruire ou
perturber de grandes zones de communautés benthiques
sessiles qui constituent des habitats pour les poissons,
l’échantillonnage avec la roténone réalisé par des plongeurs ne
provoque pas de destruction physique des habitats marins.
La roténone se disperse et se dégrade rapidement. Les
bulles produites pendant la plongée, associées aux
mouvements de nage des plongeurs, éloignent rapidement
l’eau et la roténone du lieu d’application. Une heure d’activité
d’un couple de plongeurs qui collectent des échantillons en
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milieu ouvert, en absence de courant, est suffisante pour
disperser la roténone jusqu’au point où elle n’affecte plus les
poissons qui entrent dans la zone préalablement traitée. Les
courants d’eau accélèrent grandement ce processus de
dispersion.
L’information sur la dégradation de la roténone dans les
milieux aquatiques et terrestres est disponible auprès des
mêmes sources qui fournissent l’information sur l’usage de la
roténone comme pesticide (voir plus haut). Il est largement
reconnu que la roténone est chimiquement instable et se
dégrade rapidement dans l’environnement au travers de
mécanismes abiotiques (photolyse et hydrolyse). La vitesse de
dégradation de la roténone dans l’eau est principalement
déterminée par la température, mais aussi par la turbidité et les
niveaux de lumière, pH et oxygène. La dégradation est plus
rapide dans les eaux chaudes, bien éclairées et bien oxygénées,
conditions dans lesquelles elle peut être complète en moins
d’une semaine. Bien que les études précédentes n’aient pas
examiné spécifiquement la dégradation de la roténone dans les
récifs coralliens, leurs résultats indiquent clairement qu’en
conditions comme celles qui sont typiquement associées aux
récifs coralliens (eaux chaudes, claires, bien éclairées et
oxygénées), la dégradation complète de la roténone se réalise
en quelques jours. Le potentiel de bio-accumulation de la
roténone dans les chaînes alimentaires est très faible, la
roténone ayant une demi-vie d’environ un jour chez le
poisson.
Les populations de poissons côtiers sont résilientes. Les
populations de poissons côtiers récupèrent rapidement suite
aux désastres naturels de courte durée et aux effets bien plus
localisés des échantillonnages avec la roténone. L’utilisation à
grande échelle de la roténone de la part des gestionnaires des
pêches peut conduire à des changements “permanents”
recherchés parmi les communautés de poissons d’eaux douces
des lacs et réservoirs, car les poissons non désirés ne peuvent
pas repeupler de façon naturelle des masses d’eaux isolées. En
revanche, les communautés locales de poissons côtiers sont
fortement interconnectées par la dispersion des larves
pélagiques produites par la plupart des poissons marins.
Les communautés de poissons de récifs vivant dans des aires
réduites fluctuent naturellement dans leur composition
spécifique et dans l’abondance de chaque espèce,
principalement en raison de la variation interspécifique du
rythme et du taux de recrutement des larves pélagiques sur les
habitats côtiers. L’abondance absolue d’une espèce varie en
fonction des fluctuations du recrutement et les abondances
relatives des différents poissons (à la fois proies et prédateurs)
changent du fait que tous les ans les modalités du recrutement
ne sont pas les mêmes pour toutes les espèces (voir par
exemple, Sale 1988) - en résumé, les communautés de
poissons côtiers sont des entités naturellement dynamiques.
Les communautés d’organismes marins le long des rivages de
la planète souffrent de stresses d’échelle globale, tel que le
réchauffement global, et de forts stresses à long terme tel que
celui engendré par l’activité humaine, intensive, continue et à
grande échelle. Néanmoins, les environnements côtiers sont
hautement dynamiques et ils sont constamment soumis à des
perturbations naturelles (par exemple, inondations, tempêtes et
FORUM • BioScience 169
ouragans), lesquelles réduisent les populations de poissons
côtiers dans de larges zones et, à la fois, détruisent ou
construisent les habitats des poissons. La dispersion larvaire
permet à ces populations de poissons de récupérer rapidement
suite au dépeuplement naturel résultant d’un événement
relativement bref et occasionnel, mais permet aussi aux
communautés de poissons côtiers de se repeupler en quelques
mois à la suite des effets bien plus limités d’un
échantillonnage à petite échelle avec la roténone. Plusieurs
études ont documenté le rétablissement des poissons côtiers
après un dépeuplement résultant (a) d’événements naturels le
long du Golfe de Californie (Thomson et Lehner 1976); (b)
d’explosions atomiques en Polynésie française (Planes et al.
2005); (c) de l’emploi d’anesthésique dans des mares
intertidales de Californie (Grossman 1982) ; et (d)
d’échantillonnages avec la roténone dans le Pacifique nord-est
des États-Unis (Polivka et Chotkowski 1998), dans des récifs
des Caraïbes (Smith 1973, Mahon et Mahon 1994), du Golfe
du Mexique (Ross et Doherty, 1994), de l’est des États-Unis
(Collette 1986), d’Afrique du Sud (Beckley 1985), du Brésil
(Rosa et al. 1997), d’Australie (Lardner et al. 1993), et de
Nouvelle Zélande (Willis et Roberts 1996; Roberts et Stewart
2006). Dans le Golfe d’Aqaba, une fuite accidentelle majeure
de produits chimiques, incluant des pesticides beaucoup plus
puissants que la roténone, a provoqué l’élimination totale des
poissons de récifs dans une zone des centaines de fois plus
grande que celle typiquement échantillonnée dans une station
de pêche à la roténone. Gundermann et Popper (1975) ont
suivi les populations de poissons dans des massifs de coraux
de ce secteur avant et après l’accident et ils ont constaté que la
récupération s’était effectuée entre 10 et 12 mois après la fuite.
Les échantillonnages avec la roténone sont peu fréquents,
espacés dans le temps et à très petite échelle. Un
échantillonnage typique de biodiversité, conduit sur deux
semaines par une équipe de plusieurs collecteurs, comprendra
de deux à trois pêches à la roténone par jour, réparties parmi
plusieurs types d’habitats et diverses localités. Par
comparaison, le filet d’un petit chalutier crevettier prendra
approximativement deux minutes pour draguer une zone
équivalente à la surface échantillonnée en deux semaines pour
l’inventaire de biodiversité, le chalut attrapant par ailleurs
beaucoup d’organismes autres que des poissons et perturbant
les habitats benthiques sur son passage.
Conclusions
L’échantillonnage avec la roténone à petite échelle est
un des meilleurs outils disponibles pour découvrir des
informations vitales sur la biodiversité de poissons côtiers
tropicaux. Un tel échantillonnage combine une forte sélectivité
et efficacité avec des effets minimaux et hautement transitoires
sur l’environnement. Les communautés de poissons côtiers
sont résilientes et ont une capacité bien éprouvée pour la
récupération face à un stress temporaire de moyenne échelle,
tel que celui produit par les ouragans, comme à un stress plus
bref et de petite échelle, tel que celui produit par la pêche à la
roténone des petites stations. Les effets de l’échantillonnage
avec la roténone à petite échelle sont imperceptibles à
l’échelle d’un écosystème récifal, d’un estuaire, ou d’un pays,
www.biosciencemag.org February 2008 / Vol. 58 No. 2
au regard des effets destructifs des événements naturels ou en
comparaison avec les effets d’une large gamme d’activités
humaines sur les poissons côtiers (surpêche, pollution,
destruction des habitats).
Puisque l’usage de la roténone pour la recherche n’a
pas de base sociale ou économique d’influence politique, elle
constitue une cible facile et commode pour les interdictions.
Cependant, pour qu’elle soient effectives, les décisions
scientifiques et administratives doivent êtres prises sur la base
de la meilleure information possible et les meilleures
méthodes disponibles pour obtenir cette information sur la
biodiversité marine incluent l’échantillonnage à petite échelle
avec la roténone. Par conséquent, nous encourageons les
gestionnaires des ressources marines à prendre en
considération, de façon responsable et objective, les demandes
des scientifiques marins quant à l’usage de la roténone dans
les programmes de recherche qui ont clairement énoncé des
objectifs scientifiques et de gestion.
Remerciements
Nous remercions les personnes suivantes pour leurs
commentaires sur un premier jet de ce manuscrit: Gerald R.
Allen, Ralf Britz, René Galzin, Philip C. Heemstra, Keiichi
Matsuura, Richard L. Pyle, John E. Randall, Peter F. Sale,
Robert R. Warner, et Richard Winterbottom. La participation
de D. R. R. á été financée par le Smithsonian Tropical
Research Institute. L’intérêt et la participation de W. F. S.-V. à
cette étude est le fruit de ses recherches lorsqu’il travaillait
pour l’U. S. Geological Survey.
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