Hématologie biologique en 2013

Transcription

Hématologie biologique en 2013
Hématologie biologique en 2013:
du microscope au séquençage de nouvelle génération à
haut‐débit.
L.Mauvieux
Laboratoire d’Hématologie
EA3430
Faculté de Médecine de Strasbourg
Pôle de biologie
CHRU Strasbourg
42ème Colloque National des Biologistes des Hôpitaux
Strasbourg, 1‐4 octobre 2013
ACNBH
ODPC N°1495
DECLARATION D’INTERET
DANS LE CADRE DE MISSIONS DE FORMATION REALISEES POUR L’ACNBH
Pr Laurent Mauvieux
Exerçant au CHU de Strasbourg
déclare sur l’honneur ne pas avoir d'intérêt, direct ou indirect (financier) avec les entreprises pharmaceutiques, du diagnostic ou d’édition de logiciels susceptible de modifier mon jugement ou mes propos, concernant le DMDIV et/ou le sujet présenté.
L’invention de la microscopie
Antoni van Leeuwenhoek (1632‐1723)
X300, résolution 1,4µm Arcana Natura Detecta, Delphes, 1695
Georges Hayem
(1841 ‐1933)
• Nombreux travaux de physiologie sanguine
• Elabore les principes fondamentaux de l’hématimétrie
• Caractérise les anémies
• Dr Cholera
Les automates d’hématologie
Technologies utilisées
Focalisation hydrodynamique
Impédance
Radiofréquence
Spectrophotométrie
Diffraction laser
Fluorescence laser
Cytochimie (perox)
numération et volumes
complexité cellulaire
mesure Hb
numération, volumes, contenus
contenu, ARN, ADN, marqueurs de surface
contenu
Sysmex XN
La cytométrie en flux
• développée en 1968 dans l’université de Münster et commercialisé par PhyweTM
en 1969
• FACS BD 1974
• EPICS Coulter 1977
• Très forte intégration de analyseurs
10 couleurs, 4 lasers 18 couleurs, 5 lasers
Gallios™
BD LSRFortessa ™
La cytométrie en flux en hématologie
• Etude des sous-populations lymphocytaires
• Onco-hématologie:
– Typage des hémopathies
• score de Matutes (syndromes lymphoprolifératifs), score EGIL (LA)
– Recherche des cibles thérapeutiques:
• Rituximab – Mabthera® (anti-CD20)
• Alembtuzumab –Campath® (anti-CD52)
• Gemtuzumab (anti-CD33)
– Contenu en ADN (cycle cellulaire / LAL de l’enfant)
– Diagnostic des hémoglobinuries paroxystiques nocturnes (déficit prot
Gpi)
– Recherche de transporteurs de drogues (P-gp / phénotype MDR)
– Fonctions plaquettaires, microparticules membranaires….
3 applications récentes
• Recherche d’anomalies des protéines
membranaires du globule rouge
• Recherche de l’activation fonctionnelle de p53
• Maladie résiduelle dans les leucémies
1) Sphérocytose héréditaire
Test à l’Eosine 5’maléimide (EMA) – anémie hémolytique Protéine Bande 3, Ankyrin, Protéine 4.2, Spectrine
chronique
– déficit de protéines membranaires du GR => perte membranaire
– CCMH augmentée (>36g/dl)
– présence de sphérocytes sur le frottis sanguin – Examen de référence: Ektacytométrie (Kremlin‐
Bicêtre)
Maladie autosomique dominante dans 75% des cas; 1/5000 naissances Test à l’EMA
Sensibilité
Sensibilité
Conservation pré‐
analytique
Sphérocytose
Témoin
Evènements
‐ Colorant fluorescent se fixant aux protéines Band3
‐Coloration proportionnelle à la quantité de protéine Band 3, et donc à
la surface membranaire
‐Un défaut de 10% de fluorescence est en faveur du diagnostic
‐Quelques faux positifs: elliptocytose et pyropoikilocytose, rares dysplasies congénitales
Fluorescence
Test à l’EMA
93‐96 %
95‐99 %
Résistance Globulaire
66‐74 %
71%
Pink test
91%
72 heures
2 heures
2 heures
2) Etude fonctionnelle de la voie p53 dans les LLC
Fludarabine
• p53: facteur de transcription Incorporation dans l’ADN
induisant l’apoptose ou l’arrêt du cycle cellulaire en réponse à
Cassures double brin
l’altération de l’ADN
• Fréquentes délétions et mutations de Activation de la voie p53
TP53 dans les LLC (FISH; 17p)
• Associé à:
Apoptose
– Une instabilité chromosomique
– une résistance à la fludarabine
• Confèrent un pronostic défavorable
Etude fonctionnelle de TP53
LLC après 24h de culture cellulaire en présence d’Etoposide
et de Nutilin ‐3a
Profil normal
(induction TP53)
Profil anormal
(haut niveau basal,
faible induction)
Profil anormal
(aucune induction)
M Le Garff‐Tavernier et al., Blood Cancer Journal (2011)
3) Maladie résiduelle dans les leucémies aigues myéloïdes par CMF
• Virtuellement applicable à tous les patients
– Y compris en l’absence de marqueurs moléculaires
• Expression des marqueurs d’immaturité (CD34; CD117; CD133)
• Expression d’antigènes aberrants:
– Lignée – Asynchronisme de maturation
– Expression augmentée ou diminuée
• Rapide, sensible (seuil 0,1%)
517 patients inclus
27 centres
LAM faible risque
MRD induction 2
mois
LAM risque intermédiaire
MRD induction 2
LAM bon risque élevé
mois
Vers le futur: la cytométrie de masse ?
1 Anticorps couplés à des isotopes stables de métaux
Europium
Strontium…
2 Dont la masse peut‐être mesurée très précisement
par spectrométrie de masse
Scott Tanner
DVScience TM
L’idée: coupler la spectrométrie de masse atomique avec le marquage cellulaire
• Cellules marquées introduites dans torche à
plasma • Les masses atomiques des ions des métaux sont analysés par spectrométrie de masse
• jusqu’à 100 Ac différents analysées simultanément (100,000 cellules en 4 minutes)
DVScience Cytof II TM
Mass spectrometry analysis
• Analyse multidimensionnelle
– Immunophénotype
– Signalisation cellulaire
– Expression de cytokines…
L’étude du génome
1) Cytogénétique
2) Biologie moléculaire
Etapes de la cytogénétique
• 1888: Waldeyer découvre les chromosomes
• 1902: Theodor Boveri propose que les tumeurs pourraient être liées à la mauvaise ségrégation des chromosomes
• Années 50: Utilisation de techniques de culture cellulaire
• Banding en 1969=> identification de la t(9;22) dans la LMC
• 1977: essor de la FISH
• 2004: premiers CGH‐Array (comparative genomic hybridization)
Origine génétique acquise des leucémies:
remaniements génomiques
Cytogénétique moléculaire
Leucémie myéloïde chronique
FISH interphasique BCR‐ABL
MULTI‐FISH
Peinture chromosomique
Classification OMS (WHO) 2001/2008
CBF, RARa
Caryotype normal
Anomalies de MLL, del 5q, del 7
Biologie moléculaire des hémopathies malignes
• Approches: PCR, RT‐PCR et séquençage
• Diagnostic:
– Recherche de transcrits de fusion: ex. BCR‐ABL;
– Mutations ex: JAK2 / polyglobulies primitives
– Expression anormales de gènes ex: Cycline D1/ LNH du manteau • Pronostic
– Mutation du domaine Tyr kinase d’ABL / LMC résistantes au GLIVEC
– Mutations de FLT3, CBF dans les LAM
 classification WHO 2008
• Suivi des patients : maladie résiduelle:
– Quantification transcrit BCR‐ABL
– Recherche de clonalité lymphoide
Les limites de la « biomol »
• Onéreux, long
• Cibles en augmentation constante (hématologie et tumeurs solides)
– Tests compagnons pour les traitements
– Marqueurs « théranostiques »
• Organisation des plate‐formes ont trouvé
leurs limites
• Besoin d’approches plus puissantes, plus globales
Approche globale
le séquençage « génome entier »
Next Generation Sequencing (NGS)
• Recherche des anomalies génétiques (variants) à l’échelon du génome
• Séquençage du génome entier (whole genome
sequencing)
• Séquençage direct des ARNm (RNA‐seq)
• Séquençage des microARN
• Séquençage des séquences d’ADN methylées
(CHIP‐seq)
Séquençage « Sanger »
Dideoxynucléotides bloquant l’élongation d’une matrice d’ADN
Radiomarqués:
P32, P33
Fluorescents
prix Nobel de chimie en 1980
Séquençons le Génome Humain
Log (prix)
10
8
6
2001: Human Genome Project
(HUGO)
3 milliard $, 10 ans
James Watson's genome
2008 2007: 454
1M$, 3 months
2008: ABI SOLiD
60K$, 2 weeks
2001: Celera
300M$, 3 years
2010: 6K$,
4
2009: Illumina,
Helicos
40-50K$
2
2000
2014: 1000$?,
<24 hrs?
2005
2010
27
Le séquençage Haut‐Débit, c’est quoi?
• Approche miniaturisée:
– Densité de séquences: ~10.000/ mm2
• Massivement parallèle:
– Plusieurs millions de séquençage simultanés possibles, voire plusieurs milliards…
• Productions de quantités impressionnantes de données: de 35 millions de bases à 600 Gb par réaction de séquençage (« run »)
Taille du génome humain ~3 Gb de paires de nucléotides
Approche 454 (Roche Ltd)
Etapes principales
• Fragments d’ADN capturés sur une bille
• PCR en émulsion (huile/eau)
• Réaction de pyroséquençage: production de photons capturés par une caméra CCD
• Production d’un « flowgram »
Solexa/ Illumina
• Fragments d’ADN capturés sur une surface solide
• Chaque brin est multiplié
(clusters)
• Chaque cluster correspond à 1 séquence
• Capture par caméra CCD
Approche semi‐conducteurs Proton /PGM (Life technologies™)
Incorporation d’un nucléotide
Génération d’un proton H+
1 proton = 1 base, signal intégré dans un microprocesseur
Particularités du NGS
• « profondeur » de séquençage
• « Etiquettes » des ADN: Multiplexage (=> 96)
• Ciblage possible des régions séquencées:
– « amplicons »
– « Capture » de séquences par sondes biotinylées
• Combinaisons pour optimiser la capacité de séquençage:
– nombre de cibles
– nombre d’ADN différents
– Profondeur de séquençage souhaitée
Analyses des données
• Importance d’une équipe:
– Techniciens
– Biologistes
– Bio‐informaticiens
– Informaticiens
1) Données brutes: format “Fastq”
+
%.7786867:778556858746575058873/347777476035
@HWUSI‐EAS582_157:6:1:1:1606/1
NCTGGCACCTTGATTTTGGACTTCCCAGCCTCCAGAACTGTGAG
+
Score de qualité
Sequence
Nom de l’appareil
Cellule de séquençage
Zone de la cellule de séquençage
Coordonnées –x‐ du cluster
Coordonnées –y ‐ du cluster
Index de multiplexage
Simple ou double lecture
2) Alignement des séquences
• A partir de séquences de référence du génome humain (Hg19)
• algorithmes – Bowtie
– Smith‐Waterman – BWA • Production d’un fichier « .bam »
3) Recherche de « variants »
génétiques
• Ré‐analyse informatique du patient précédent: – identification d’une mutation de l’AA 723 de DNMT3A (DNA methyl transférase 3) – Décalage du cadre de lecture => codon stop prématuré
Analyse des mutations de DNMT3A chez 188 patients
Survie chez les patients atteints de LAM selon le statut de DNMT3A
• 200 patients avec cytogénétique intermédiaire ou favorable étudiés (génomes entiers de leucémies séquencés ou exome)
• Séquençage de l’ARNm, de l’ADN méthylé(CHIP Seq)
• + contrôle génome constitutionnel
Résultats
• 2315 variants génétiques identifiés
• 270 insertions ou délétions de petite taille
• MAIS:
‐Seuls 23 gènes sont le siège de mutations récurrentes (mutations « driver »)
‐En moyenne 3 mutations driver nécessaires pour qu’une LAM surviennent
‐ jusqu’à 3 sous‐clones identifiés (50% avec 1 sous clone)
• Autres mutations: « passenger »
Catégorisation des anomalies génétiques des LAM
1) Fusions génétiques impliquant des facteurs de transcription
2) Gènes suppresseurs de tumeurs
3) Gènes impliqués dans la méthylation de l’ADN 4) Gènes impliqués dans le transduction du signal 5) Gènes de la différenciation myéloïde
6) Gènes modifiant la chromatine
7) Cohésines
8) Spliceosome
Conclusions
• L’Hématologie en 2013:
– Repose toujours sur une routine de qualité:
• Automates performants
• Revue raisonnée des frottis sanguins /bonne coloration
– Prise en charge en milieu spécialisé des hémopathies malignes
• diagnostic: faisceau d’arguments cliniques et biologiques
– Orientation affirmée vers une médecine de + en + personnalisée
Merci pour votre attention
Laboratoire d’Hématologie des HUS
Laboratoire de recherche
EA3430
A Eischen
AC Galoisy
L Miguet
C Mayeur Rousse
L Monier
D. Guenot
N. Perrusson
Plate‐forme hospitalière de séquençage de l’Institut régional du Cancer de Strasbourg