Le nombre d`or et les abeilles

Transcription

Le nombre d`or et les abeilles
Zoom ...
Le nombre d’or et les abeilles
Le cerveau en ébullition,
d’innombrables savants
ont cherché à décrypter
le secret des formes
du monde. Le culte du
nombre d’or en est un
exemple. Il intervient
dans la construction du
pentagone régulier et de
la spirale logarithmique
inscrite dans des rectangles
d’or. Ses propriétés
algébriques le lient
également à la suite de
telles que le rapport de la somme a + b
Fibonacci. Un lien avec
des deux longueurs sur la plus grande (a)
ce nombre d’or s’observe dans quelques
soit égal à celui de la plus
expressions de la nature
(par exemple chez les
Quel est le secret de grande (a) sur la plus petite
(b) c’est-à-dire lorsque (a +
capitules de tournesol
la beauté et de la
= a/b. Durant l’Antiquité,
ou la forme de certains
diversité des formes b)/a
l’étude du nombre d’or est
bras de notre voie lactée)
qui existent dans la essentiellement géométrique,
et notamment dans la
nature ?
Hypsiclès, un mathématicien
géométrie avec laquelle
grec du IIe siècle av. J.-C., en
nos abeilles construisent
fait usage pour la mesure de
le fond de leurs alvéoles
polyèdres réguliers. Elle revient chaque
ou encore lorsqu’on étudie la génétique
fois qu’un pentagone est présent. En
apicole.
intégrant un carré de côté b dans un
rectangle d’or de côtés a × b, il reste un
Un peu d’histoire
rectangle qui encore d’or. Il est possible
Les mathématiciens grecs, pour qui la
de réitérer le processus et d’intégrer un
géométrie représentait le savoir suprême,
carré de côté a − b dans le rectangle d’or
avaient décelé derrière son expression
de côtés b × (a − b), comme indiqué sur
compliquée : (1 + √5)/2, une belle
harmonie car cela correspondait à l’unique la figure de droite. Cette méthode peut
être prolongée indéfiniment. Si, dans
rapport a/b entre deux longueurs a et b
190 • novembre - décembre 2014
La spirale logarythmique
inédit. L’intérêt du nombre ne réside pas
chaque carré est dessiné un quart de
tant dans ses propriétés mathématiques
cercle d’extrémités deux côtés du carré,
que mystiques, elles «concordent avec
comme sur la figure, on obtient une spirale
logarithmique. La spirale obtenue, appelée les attributs qui appartiennent à Dieu…
». Pacioli rédige ainsi l’envoi de son livre :
spirale d’or, se rencontre souvent dans la
nature: capitules de tournesol,
pommes de pins, coquillage du
nautile.
En 1202, Leonardo Pisano,
plus connu sous le nom de
Fibonacci, introduit dans son
livre, Liber Abaci, la suite qui
porte maintenant son nom où
un élément de cette suite est la
somme des deux précédents.
En revanche la relation avec le
nombre d’or n’est pas perçue par
l’auteur.
Trois siècles plus tard, Luca
Pacioli rédige un livre dénommé
La divine proportion, illustré
par Léonard de Vinci. Si
l’aspect mathématique n’est
L’homme de Vitruve. Leonardo da Vinci. De divines proportions !
pas nouveau, le traitement de
la question du nombre d’or est
novembre - décembre 2014 • 191
«une œuvre nécessaire à tous les
esprits perspicaces et curieux,
où chacun de ceux qui aiment
à étudier la philosophie, la perspective,
la peinture, la sculpture, l’architecture,
la musique et les autres disciplines
mathématiques, trouvera une
très délicate, subtile et admirable
doctrine et se délectera de
diverses questions touchant
à une très secrète science. », il
est en revanche discret sur la
manière dont s’applique cette
proportion. Par contre, une note
manuscrite, datant du début du
XVIe siècle et écrite par un auteur
anonyme dans la traduction de
Pacioli des éléments d’Euclide
de 1509, montre la connaissance
de la relation entre la suite de
Fibonacci et le nombre d’or. Si
l’on divise un terme de la suite
par son précédent, on trouve
une approximation du nombre
d’or. Plus le terme est élevé, plus
l’approximation est bonne et
elle peut devenir aussi précise
que souhaitée. Le nombre
d’or est maintenant souvent
désigné par la lettre φ (phi) et équivaut
approximativement à 1,618.
L’empreinte du «Rhomboèdre
d’or «dans le fond des alvéoles
Le sujet qui retient mon attention, ici,
vient de la précision avec laquelle les
abeilles construisent leurs rayons. Dans
son livre «Vie et moeurs des abeilles »,
Von Frisch explique pourquoi la forme
hexagonale des cellules représente la
solution la plus appropriée. Sur le plan
192 • novembre - décembre 2014
de la géométrie, sachez que le fond des
alvéoles rappelle le triacontaèdre (30
faces) rhombique (faces losanges) dit aussi
polyèdre de Romé de l’Isle (minéralogiste
et cristallographe du 18ème siècle) qui
est présenté ci-contre. Ce polyèdre
fondamentaux qu’il est le plus apte à
une stabilité isotrope pour la contenance
volumétrique maximale. Il est, de ce fait,
le seul polyèdre à permettre la moindre
dépense énergétique pour un maximum
de capacité. Alors on peut se demander
comment les abeilles ont-elles su que
dans cette géométrie se tient la meilleure
solution pour l’édification de leur nid ?
De la divine proportion à la
royale proportion
Dans nos ruches, le faux-bourdon n’ayant
pas de père puisqu’il est issu d’un œuf
non fécondé, il s’en suit que l’arbre
généalogique des reines pour lesquels on
retrace leur pedigree prend une allure qui
se rapproche étrangement à la suite de
Fibonacci. Comme le montre le tableau
ci-dessous, la loi de progression de l’arbre
généalogique de la reine est 1-2-3-5-813-21… où chaque nombre à partir du
troisième est la somme des 2 précédents.
Comme nous l’avons vu
ci-dessus, cette suite est
intimement liée au nombre d’or
que Luca Pacioli a appelé divine
proportion et que nous pourrions appeler
dorénavant royale proportion. Relever
un lien entre le nombre d’or et une loi
naturelle est une chose assez simple mais
essayer d’expliquer le pourquoi de cette
corrélation est un problème hautement
plus compliqué à résoudre .
Conclusion
1,618 est un nombre mystérieux et
magique qui fait parler de lui depuis la
plus haute antiquité dans de nombreux
domaines tels que la géométrie,
l’architecture, la peinture… Sa présence
dans certaines formes naturelles sont-elles
de pures coïncidences ou la manière dont
la nature exprime tout son esthétisme ? A
chacun de se faire sa propre opinion…
Jean-Luc Strebelle
présente une géométrie très singulière
où la proportion d’or est omniprésente,
d’où cette appellation «Rhomboèdre d’or
«proposée ici. Le rapport des longueurs
des diagonales des 30 faces losanges du
rhomboèdre est égal au nombre d’or, ce
sont des «losanges d’or». Le diamètre de
la sphère inscrite dans le rhomboèdre d’or,
comparé aux longueurs des diagonales
de ses faces, est dans la proportion d’or
(grandes diagonales) ou son carré (pour
les petites). C’est à cause de ces caractères
novembre - décembre 2014 • 193