Guide d`évaluation du risque de suicide
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Guide d`évaluation du risque de suicide
Guide d’évaluation du risque de suicide Une ressource pour les organismes de santé PA R T E N A I R E Avertissement Le présent Guide d’évaluation du risque de suicide : Une ressource pour les organismes de santé a été rédigé par l’Ontario Hospital Association (OHA) en partenariat avec l’Institut canadien pour la sécurité des patients (ICSP) afin d’aider les organismes de santé à comprendre et à normaliser la procédure d’évaluation du risque de suicide pour qu’elle en soit une de grande qualité. Les conclusions de recherche, les outils et les autres renseignements fournis dans le guide le sont à titre informatif seulement, leur utilisation devrait être adaptée à la situation de chaque établissement de santé. Le guide se fonde sur les recommandations et les interprétations considérées comme valides au moment de sa publication, selon les études disponibles. Il ne se veut pas, et ne devrait pas être interprété comme un avis clinique ou professionnel. Les organismes de santé et les professionnels en soins de santé qui ont des réserves quant à l’applicabilité de ce guide devraient demander un avis juridique ou professionnel. L’OHA ni l’ICSP ne pourra être tenu responsable de tout préjudice, dommage ou autres pertes découlant de l’utilisation ou de la mauvaise utilisation des renseignements d’ordre général contenus dans ce guide ou des actes commis sur la foi de ces renseignements. ISBN no 978-0-88621-335-0 Numéro de publication : 332 Guide d’évaluation du risque de suicide : Une ressource pour les organismes de santé Commandité par : La Ontario Hospital Association et l’Institut canadien pour la sécurité des patients Rédigé par : Christopher Perlman, Ph. D. Chef de projet Institut de recherche Homewood et École de médecine Michael G. DeGroote, Université McMaster, Campus régional de Waterloo Eva Neufeld, M.A. (candidate au Ph. D.) Associée de recherche Institut de recherche Homewood et Département des études sur la santé et de la gérontologie, Université de Waterloo Lynn Martin, Ph.D. Professeure agrégée Département des sciences de la santé, Lakehead University Mary Goy, B.Sc.Inf. (candidate à la M.Sc.Inf.) Infirmière clinicienne Institut de recherche Homewood et Centre de santé Homewood John P. Hirdes, Ph.D. Professeur Département des études sur la santé et la gérontologie, Université de Waterloo Citation suggérée : Perlman C.M., Neufeld E., Martin L., Goy M., & Hirdes J.P. (2011). Guide d’évaluation du risque de suicide : Une ressource pour les organismes de santé. Toronto (Ontario) : Association des hôpitaux de l’Ontario et Institut canadien pour la sécurité des patients. Remerciements Nous sommes infiniment reconnaissants envers toutes les personnes qui ont participé à l’élaboration de ce guide. Nous voulons remercier tout particulièrement les participants aux entrevues et les organismes auxquels ils sont rattachés de nous avoir communiqué leur enthousiasme, leurs expériences et une perspective unique de l’évaluation du risque de suicide. Nous avons également été privilégiés d’obtenir l’opinion d’intervenants étrangers – membres de l’interRAI Network of Excellence in Mental Health –, qui nous ont offert un appui enthousiaste et leurs points de vue sur l’importance de l’évaluation du risque de suicide pour assurer la sécurité des patients. L’équipe de recherche souhaite également remercier plusieurs personnes et groupes de personnes pour leur soutien à l’élaboration de ce guide. Kaitlin Bellai, de l’Institut de recherche Homewood, a participé à l’organisation de l’analyse documentaire, tandis que Karen Parsons a minutieusement mis en page le guide. Nous sommes reconnaissants envers Josephine Muxlow, infirmière clinicienne spécialisée en santé mentale des adultes dans la Région de l’Atlantique, des communautés autochtones, pour l’examen attentif et les conseils du contenu et du libellé de ce guide. Le Waterloo Region Suicide Prevention Council (WRSPC) s’est également avéré une précieuse ressource pour ajouter une perspective à l’évaluation du risque de suicide. Nous aimerions également souligner l’appui non financier du Homewood Research Institute de Guelph (Ontario); du Département des études sur la santé et de la gérontologie de l’Université de Waterloo (Ontario), et de l’École de la santé publique de l’Université Lakehead de Thunder Bay (Ontario). Nous tenons à souligner la participation du Comité consultatif pancanadien sur la sécurité des patients et la santé mentale à l’élaboration du présent guide. Ce Comité nous a fait profiter de sa vaste expérience et de conseils qui ont permis de soutenir et de façonner ce guide pour qu’il soit une ressource d’utilisation pratique pour les organismes de santé canadiens, tout en leur permettant d’assurer des soins et une sécurité centrée sur les personnes. Les membres du Comité consultatif pancanadien sont : • Glenna Raymond (présidente), présidente et chef de la direction, Ontario Shores Centre for Mental Health Sciences (Ontario) • Lisa Crawley Beames, gestionnaire, Traitements cliniques, St. Michael’s Hospital (Ontario) et présidente, Fédération canadienne des infirmières et infirmiers en santé mentale • Linda Courey, directrice, Services de santé mentale et de toxicomanie, Cape Breton District Health Authority (Nouvelle-Écosse) • Margaret Doma, directrice de la gestion des risques et des relations avec les patients, St. Joseph’s Health Care, Hamilton (Ontario) • Beth Hamer, infirmière en chef des soins infirmiers en santé mentale/ psychiatriques, Waypoint Centre for Mental Health Care, Penetanguishene (Ontario) • Isabelle Jarrin, enseignante en nursing – santé mentale, Centre des sciences de la santé de Winnipeg (Manitoba) • Denice Klavano, membre, Patients pour la sécurité des patients du Canada (Nouvelle-Écosse) • David Koczerginski, chef du Service de psychiatrie, William Osler Health System (Ontario) • Judith Macrae, gestionnaire, Tertiary Mental Health and Substance Use Services, Fraser Health (Colombie Britannique) et directrice pour le CRPNBC • Saibal Nandy, psychiatre de pratique privée • Ann Pottinger, infirmière de pratique avancée, Centre for Addiction and Mental Health (CAMH) (Ontario) • Margaret Tansey, vice-présidente de la pratique professionnelle et infirmière en chef, Royal Ottawa Health Care Group (Ontario) • Michael Trew, directeur médical principal, Toxicomanie et santé mentale, Alberta Health Services (Alberta) • Dr. Tristin Wayte, gestionnaire, Risque et évaluation, BC Mental Health and Addiction Services (Colombie Britannique) L’équipe de recherche est également très reconnaissante envers l’OHA et l’Institut canadien pour la sécurité des patients (ICSP) pour la mise en place de cette très importante initiative. Pour leur contribution à l’animation et à la gestion, nous souhaitons remercier Michelle Caplan, Cyrelle Muskat, Sharon Walker, Elizabeth Carlton et Sudha Kutty de l’OHA, ainsi que Sandi Kossey, Hina Laeeque et Marie Owen de l’ICSP. Nous félicitons l’OHA et l’ICSP d’avoir pris l’initiative d’élaborer cette précieuse ressource afin d’aider les organismes de santé canadiens à améliorer la sécurité des patients et la qualité des soins qu’ils reçoivent. Table des matières Sommaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . i Contexte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . i Nécessité d’évaluer le risque de suicide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . i À propos du guide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . iii Aperçu des principes, des processus et des considérations en matière d’évaluation du risque de suicide. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 Le contenu de l’évaluation du risque de suicide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2 La différence entre suicide et automutilation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2 L’évaluation des facteurs sous-jacents qui indiquent le risque de suicide : signes avant coureurs, facteurs de risque et facteurs de protection . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 Les principes qui guident le processus d’évaluation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 Premier principe – la relation thérapeutique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 Deuxième principe – la communication et la collaboration . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14 Troisième principe – la documentation du processus d’évaluation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .18 Quatrième principe – sensibilisation aux cultures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22 Résumé des principes clés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 La mise en pratique des principes – Considérations particulières selon le milieu de soins et la population. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26 Milieux de soins . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .26 Considérations liées à l’étape de vie et aux expériences traumatiques. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32 Inventaire des outils d’évaluation du risque de suicide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41 L’utilisation des outils d’évaluation du risque de suicide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .42 Considérations techniques pour choisir les outils d’évaluation du risque de suicide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .42 L’inventaire des outils d’évaluation du risque de suicide. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .44 Outils d’évaluation du risque de suicide couramment utilisés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44 Échelle de désespoir de Beck . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45 Échelle d’idéation suicidaire de Beck (BSS®) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46 Échelle Columbia de la gravité du risque de suicide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47 Échelle d’idéation suicidaire gériatrique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. 48 Échelle interRAI de la gravité du comportement autodestructeur (interRAI SOS) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49 Liste de contrôle du milieu de soins en santé mentale. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .51 Échelle d’idéation suicidaire modifiée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52 Évaluation globale du risque de suicide par les infirmières . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .53 Inventaire des raisons de vivre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54 Échelles SAD PERSONS et SAD PERSONAS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55 Échelle d’incidence de la suicidalité – Prise en charge, évaluation et planification des soins. . . . . . . . . . . 57 Questionnaire sur les comportements suicidaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58 Échelle d’intention suicidaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .59 Échelle de probabilité du suicide. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61 Outil d’évaluation du risque de suicide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63 L’évaluation et l’utilisation des outils d’évaluation du risque de suicide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68 Sommaire des outils d’évaluation du risque de suicide et conséquences pour la pratique . . . . . . . . . . . . . . . . . .68 Cadre d’évaluation du risque de suicide et de surveillance de la qualité . . . . . . . . . . . . . . . 71 Parvenir à une évaluation de qualité du risque de suicide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72 Les outils et le cadre d’évaluation du risque de suicide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .76 Utilisation des outils d’évaluation du risque de suicide à l’intérieur du cadre d’évaluation du risque . . . . . . . . 76 Considérations liées aux milieux de soins au moment de choisir les outils . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77 La mesure de la qualité du processus d’évaluation du risque de suicide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .80 Le cadre entourant le processus d’évaluation du risque de suicide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72 Les cinq dimensions du cadre d’évaluation du risque de suicide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72 Surveiller la qualité de l’évaluation du risque de suicide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 80 Les prochaines étapes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .86 Sommaire et recommandations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 87 Références et ressources . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91 Annexe A : Démarche méthodologique ayant servi à élaborer ce guide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91 Annexe B : Liste des participants aux entrevues . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 94 Annexe C : Illustration de l’incidence d’une accumulation de facteurs de risque potentialisateurs et de signes avant coureurs sur le risque de suicide. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 96 Annexe D : Exemples de facteurs de protection . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97 Annexe E : Exemple de documentation recommandée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98 Annexe F : Résumé des risques clés de l’évaluation du risque de suicide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 100 Annexe G : Principales questions à considérer pour choisir un outil d’évaluation du risque de suicide . . . . . . 101 Annexe I : Dimensions du cadre d’évaluation du risque de suicide. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 103 Annexe H : Caractéristiques des outils d’évaluation du risque de suicide. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 102 Annexe J : Références. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 104 Sommaire Sommaire CONTEXTE Le suicide est un événement tragique et stressant. Ses conséquences néfastes pour la famille, les amis et la collectivité confirment l’urgence d’une meilleure compréhension et d’une meilleure prévention de ce phénomène. Selon Statistique Canada, 3 500 personnes se sont suicidées au pays en 2006. À l’échelle mondiale, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) soutient que le taux de suicide s’est accru depuis 1950, une hausse aussi importante que 268 % chez les hommes de 15 à 24 ans (OMS, 2003). Outre la hausse du taux de mortalité par suicide, on constate qu’un plus grand nombre de personnes ont été hospitalisées à la suite d’une tentative de suicide. En 2001, il y a eu 23 000 hospitalisations au Canada (Institut canadien d’information sur la santé [ICIS], 2004). Par ce guide, nous souhaitons uniformiser la méthode d’évaluation du risque de suicide adoptée par les établissements de santé canadiens. Le guide a pour but de mettre en lumière tous les facteurs qui doivent être pris en considération lors de toute évaluation de qualité, ceci afin d’assurer la sécurité et le bien être des personnes soignées. Voilà pourquoi l’évaluation du risque de suicide est devenue l’une des questions de sécurité fondamentales pour les organismes de santé du Canada et de l’étranger. Le manque d’information et de documentation sur le risque de suicide est un problème souvent cerné lors de l’examen des cas de décès par suicide dans les établissements de santé mentale (Mills, Neily, Luan, Osborne et Howard, 2006). En étudiant les stratégies nationales de prévention du suicide adoptées dans 11 pays, dont le Canada, Martin et Page (2009) ont constaté que l’adoption d’une méthode uniforme pour évaluer ce risque ne figurait pas parmi les volets importants de ces stratégies. Pourtant, un rapport conjoint de la OHA et de l’Institut canadien pour la sécurité des patients (ICSP) a mis en lumière la nécessité de disposer d’outils d’évaluation des risques pour la sécurité des patients, notamment le risque de suicide (Brickell, Nicholls, Procyshyn, McLean, Dempster, Lavoie et al., 2009). En accordant de l’importance à l’évaluation du risque de suicide, nous faisons un premier pas vers une meilleure prévention de ce fléau. NÉCESSITÉ D’ÉVALUER LE RISQUE DE SUICIDE La OHA et l’ICSP reconnaissent que le suicide est une préoccupation importante pour la sécurité des patients. Le rapport commandé par ces deux organismes (Brickell, Nicholls, Procyshyn, McLean, Dempster, Lavoie et al., 2009) a permis de cerner de nombreuses lacunes dans les études canadiennes portant sur la sécurité des patients recevant des soins en santé mentale, notamment le risque de suicide. Il contenait un certain nombre de Guide d’évaluation du risque de suicide I i recommandations visant les politiques, les pratiques et la recherche liées à la sécurité des patients, notamment l’uniformisation des soins offerts dans tous les établissements de santé mentale et l’amélioration de la déclaration des incidents. Le rapport a également mis en lumière la nécessité de concevoir et d’évaluer des outils d’évaluation des risques pour la sécurité des patients. Par conséquent, la OHA et l’ICSP ont demandé à ce qu’un guide de ressources soit élaboré afin de faciliter l’évaluation du risque de suicide et la prévention du suicide dans les établissements de santé canadiens. L’évaluation du risque de suicide doit être considérée comme partie intégrante d’un processus thérapeutique holistique qui ouvre la voie à une discussion entre la personne et le prestataire de soins, les membres de sa famille et ses autres appuis. ii I Guide d’évaluation du risque de suicide Il est important d’admettre d’entrée de jeu que, à l’instar d’autres troubles médicaux comme les crises cardiaques, certains suicides ne sont pas entièrement évitables. Cela dit, le suicide dans les établissements de santé mentale demeure un événement indésirable grave. La santé publique et le système de santé doivent faciliter la sécurité et la qualité des soins au moyen d’une évaluation des risques, d’une intervention et d’une documentation de qualité. Les organismes nationaux d’assurance de la qualité et d’agrément conviennent qu’il faut faire en sorte que l’évaluation et la documentation du risque de suicide soient uniformes et, de ce fait, ont intégré ces procédures à leurs cadres d’évaluation. Agrément Canada exige depuis près de deux ans qu’une évaluation régulière du risque de suicide soit effectuée auprès de toutes les personnes hospitalisées dans une unité de soins en santé mentale, comme toute autre « pratique organisationnelle requise » (POR). Il s’agit dorénavant d’une exigence standard pour répondre aux besoins de sécurité immédiats et permanents des personnes considérées à risque, ainsi que pour documenter comme il se doit les risques et les interventions menées dans le dossier médical de chaque personne (Agrément Canada, 2011). Bien que les organismes d’agrément et de surveillance de la qualité rendent l’évaluation du risque de suicide obligatoire, il est important de comprendre que cet exercice ne doit pas viser seulement à atténuer les responsabilités vis à-vis d’une telle obligation (Lyons, Price, Embling et Smith, 2000). L’évaluation du risque de suicide doit être plutôt considérée comme partie intégrante d’un processus thérapeutique holistique qui ouvre la voie à une discussion entre la personne et le prestataire de soins, les membres de sa famille et ses autres appuis. Sommaire À PROPOS DU GUIDE Le présent guide se fonde sur une analyse du contexte de la littérature portant sur les études examinées par les pairs, les pratiques exemplaires et les politiques concernant les processus, principes et outils d’évaluation du risque de suicide. L’approche méthodologique ayant permis de concevoir le guide est présentée à l’annexe A. Des entrevues ont également été menées auprès de 21 intervenants experts issus de divers milieux culturels, ethniques, géographiques, démographiques et professionnels et de divers secteurs de la santé. Ces entrevues ont permis de compléter l’analyse du contexte et de tenir compte de certains aspects contextuels dans le cadre de l’évaluation du risque de suicide menée dans diverses situations et auprès de personnes ayant des antécédents variés. Les résultats de l’analyse du contexte et des entrevues ont débouché à l’élaboration de quatre sections : I. La première section donne un aperçu des principes, des processus et des considérations en matière d’évaluation du risque de suicide afin de faciliter cette évaluation dans divers milieux de soins de santé. II. La deuxième section recense les outils d’évaluation du risque de suicide en précisant leurs propriétés psychométriques et en formulant des recommandations d’utilisation. III. La troisième section établit un cadre pour l’évaluation du risque de suicide, notamment l’utilisation des outils d’évaluation du risque de suicide et des recommandations sur la surveillance de la qualité du processus d’évaluation de ce risque. IV. La quatrième et dernière section fournit aux organismes de santé des ressources, notamment des concepts clés, des trucs et des diagrammes, qui peuvent être reproduites et affichées dans le milieu de soins. De plus, la méthodologie du projet y est expliquée plus en détail, et les références aux ouvrages cités sont énumérées. Guide d’évaluation du risque de suicide I iii Ensemble, ces sections constituent le fondement du guide d’évaluation du risque de suicide. Au Canada, ce guide devrait être le premier pas vers la normalisation du processus d’évaluation du risque de suicide auprès des professionnels de la santé et, espérons le, permettra de faire avancer l’idée d’une stratégie nationale sur la prévention du suicide. Nous souhaitons également que ce guide puisse servir à sensibiliser les professionnels de la santé et les décideurs, ainsi qu’à accroître le nombre d’initiatives de qualité en ce qui concerne l’évaluation du risque de suicide, et ce, en offrant une réflexion tant attendue sur la réduction et la prévention du suicide. iv I Guide d’évaluation du risque de suicide Section I Aperçu des principes, des processus et des considérations en matière d’évaluation du risque de suicide PA R T E N A I R E Section I : Aperçu des principes, des processus et des considérations en matière d’évaluation du risque de suicide « L’évaluation du risque de suicide ne vise pas à prévoir le suicide, mais plutôt à [...] apprécier le fondement de la suicidalité, puis à permettre une intervention plus éclairée. » - (Jacobs, Brewer et Klein-Benheim, 1999, p. 6) Contenu de la section 1. Le contenu de l’évaluation du risque de suicide • Cerner et évaluer les signes avant coureurs, ainsi que les facteurs de risque et de protection • Expliquer pourquoi certaines données démographiques, comme l’âge et le sexe, sont exclues des facteurs de risque • Aborder les questions qui font partie de l’évaluation des risques, comme la maladie mentale et la suicidalité chronique 2. Les principes qui guident le processus d’évaluation • • • • La relation thérapeutique La communication et la collaboration La documentation La sensibilisation aux cultures 3. La mise en pratique des principes – Considérations particulières selon le milieu de soins et la population • • • • • • • • Soins primaires Urgences Service de santé mentale Jeunes Personnes âgées Communautés autochtones Gais, lesbiennes, bisexuels et transgenres Personnel militaire Les lecteurs sont invités à consulter les ouvrages cités s’ils souhaitent approfondir chacune des notions présentées. L’ensemble des références sont énumérées à l’annexe J. Guide d’évaluation du risque de suicide I 1 L’évaluation des risques de suicide est un processus en plusieurs étapes qui permet de mieux connaître une personne, de cerner ses besoins et ses facteurs de stress, puis de travailler avec elle pour mobiliser ses forces et ses appuis (facteurs de protection). Bien que les outils d’évaluation des risques de suicide fassent partie de ce processus, ils ne doivent servir qu’à soutenir le processus, et non à l’orienter. 1. Le contenu de l’évaluation du risque de suicide L’évaluation du risque de suicide repose le plus souvent sur la détermination et l’évaluation des signes avant coureurs, ainsi que des facteurs de risque et de protection qui sont présents. Tout renseignement ayant trait aux antécédents, à l’expérience chronique, à l’état de risque aigu, à la présence d’un plan de suicide, à l’idéation suicidaire actuelle et au réseau d’appuis disponibles de la personne peut servir à établir le niveau de risque. L’évaluation du risque de suicide est un processus en plusieurs étapes qui permet de mieux connaître une personne, de cerner ses besoins et ses facteurs de stress et d’y répondre ou d’y réagir, puis de travailler avec elle pour mobiliser ses forces et ses appuis. Bien que les outils d’évaluation du risque de suicide fassent partie de ce processus, ils ne doivent servir qu’à soutenir le processus, et non à le guider. Il existe également beaucoup d’autres types de ressources pour appuyer le processus d’évaluation du risque de suicide, notamment les guides cliniques (p. ex., Jacobs, 1999; Rudd, Joiner et Rajab, 2004) et les lignes directrices sur les pratiques exemplaires (p. ex., American Psychiatric Association, 2003; Heisel et Flett, 2006; Association des infirmières et infirmiers autorisés de l’Ontario [AIIAO], 2009). La difficulté de déterminer dans quelle mesure la présence ou l’absence de facteurs de risque permet de prévoir réellement le suicide vient compliquer la tâche de bien comprendre le risque de suicide, vu la rareté du phénomène et les écarts dans l’intervalle d’évaluation de ce risque (Baldessarnin, Finklestein et Arana, 1988). Par exemple, l’intervalle de mesure du risque de suicide varie entre 1 et 20 ans (p. ex., Brown, Beck, Steer et Grisham, 2000). Les intervalles plus longs témoignent de la nature chronique du risque de suicide en fonction de certains facteurs de risque, mais ces mêmes facteurs peuvent ne pas être significatifs du point de vue clinique pour évaluer le risque à court terme (soit en minutes et en jours; Rudd, Berman, Joiner et al., 2006). Il est important de garder en tête ces difficultés au moment d’examiner l’abondante documentation portant sur la détermination du risque de suicide et des comportements suicidaires et sur les interventions cliniques qui s’y rattachent (p. ex., Jacobs, 1999; Joiner, 2005; Rudd et coll., 2004). LA DIFFÉRENCE ENTRE SUICIDE ET AUTOMUTILATION En guise d’introduction, il est bon de faire une distinction entre les termes « automutilation » et « suicide ». Il arrive souvent que ces termes soient 2 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section I : Aperçu des principes, des processus et des considérations en matière d’évaluation du risque de suicide employés de manière interchangeable, mais ils diffèrent pourtant, tant en ce qui concerne le concept que le traitement. La distinction entre « acte autodestructeur » et « comportement Le suicide est un acte intentionnel et auto infligé qui entraîne la mort. Il est difficile de distinguer le comportement suicidaire d’un acte autodestructeur volontaire, parce qu’il faut déterminer l’intention de la personne. Par exemple, la personne avait elle l’intention, par son geste, de mettre fin à sa vie, d’appeler à l’aide ou de fuir temporairement ses problèmes? Les comportements suicidaires qui ne provoquent pas la mort sont qualifiés de « non mortels » ou, plus couramment, de « tentatives de suicide ». suicidaire » est importante puisque les options de traitement appropriées à chacun diffèrent. L’automutilation est un comportement intentionnel souvent répétitif qui consiste à infliger une blessure à son propre corps à des fins qui ne sont pas socialement admises (en excluant les modifications esthétiques culturellement acceptées, comme le perçage corporel), mais sans intention suicidaire (voir Neufeld, Hirdes et Rabinowitz, 2011). Il s’avère parfois très difficile de distinguer le geste d’automutilation du geste suicidaire puisque les deux sont dirigés contre la personne et dangereux. Cependant, la plupart des personnes qui se livrent à de l’automutilation ne souhaitent pas mourir. Elles s’en servent plutôt comme un mécanisme d’adaptation qui leur permet temporairement de se soulager de leur détresse psychologique. Bien qu’elles puissent sembler extrêmes, ces méthodes constituent un moyen efficace de faire face au stress pour certaines personnes. La plupart savent quand mettre fin à une séance d’automutilation (soit quand leur besoin est satisfait), mais il arrive que le décès en soit l’issue, notamment lorsque la personne se coupe une veine et ne peut arrêter le saignement. Ces cas d’automutilation peuvent être à tort catégorisés par les professionnels de la santé comme un suicide ou une tentative de suicide non mortelle. L’ÉVALUATION DES FACTEURS SOUS-JACENTS QUI INDIQUENT LE RISQUE DE SUICIDE : SIGNES AVANT COUREURS, FACTEURS DE RISQUE ET FACTEURS DE PROTECTION Signes avant coureurs et facteurs de risque Pour évaluer les risques de suicide, il est important de faire la distinction entre la mesure dans laquelle les facteurs sont connus pour être corrélés au suicide (c’est-à-dire des facteurs de risque potentialisateurs; Jacobs et coll., 1999) et la mesure dans laquelle ils sont connus pour accroître réellement le risque de suicide (c’est-à-dire des signes avant coureurs; Rudd et coll., 2006). Guide d’évaluation du risque de suicide I 3 Définition Il y a facteurs de risque potentialisateurs lorsqu’une personne envisage le suicide à un certain moment de sa vie. Les signes avant-coureurs sont des facteurs qui peuvent déclencher le processus de suicide à court terme (dans les minutes ou les jours suivants). FAIT : En règle générale, le consensus veut que ce soit la combinaison de signes avant coureurs et de facteurs de risque potentialisateurs qui accroît le risque qu’une personne se suicide (Jacobs et coll., 1999). Des facteurs de risque sont présents lorsqu’une personne envisage le suicide à un certain moment de sa vie, alors que les signes avant coureurs sont les facteurs qui, dans un avenir immédiat (les prochaines minutes ou les prochains jours), peuvent déclencher le processus menant au suicide (Rudd, 2008). Les signes avant coureurs fournissent au clinicien des preuves tangibles qu’une personne présente un risque accru de suicide à court terme; ils peuvent être constatés même en l’absence de facteurs de risque potentialisateurs. Il est important d’admettre que le risque de suicide peut être tout de même élevé chez la personne qui n’exprime pas explicitement d’idées ni de plans suicidaires, ne cherche pas de moyens ou n’adopte pas un comportement suicidaire menaçant. Les personnes qui ont la réelle intention de mettre fin à leur vie peuvent dissimuler les signes avant coureurs. Il est donc essentiel de reconnaître et de documenter tout signe avant coureur lors de l’évaluation des risques. À la section III de ce guide, nous présenterons des façons d’utiliser les outils d’évaluation du risque de suicide pour cerner plus facilement toute incohérence entre le niveau de détresse d’une personne et le niveau d’intention qu’elle exprime envers le suicide. La présence de facteurs de risque potentialisateurs peut prédisposer une personne à un plus grand risque de suicide, mais ce risque est confirmé par la présence de signes avant coureurs. Par exemple, les personnes sans emploi ne sont pas toutes à risque de suicide. Cependant, si une personne sans emploi vit de plus en plus de désespoir en pensant à son avenir, que ce soit en raison de dettes importantes ou d’une incapacité à subvenir aux besoins de sa famille, et se met à dire que les autres seraient mieux sans elle, cette personne présente effectivement un risque accru de suicide. La figure 1 illustre de quelle façon le risque de suicide chez une personne s’accroît en présence de signes avant coureurs, ainsi qu’en fonction du nombre et de l’intensité de ces signes. Il convient toutefois de noter que la figure 1 n’est pas exhaustive et n’énumère pas nécessairement tous les facteurs de risques potentialisateurs ni tous les signes avant coureurs. En effet, Wingate et ses collègues (2004) ont cerné plus de 75 facteurs de risques pouvant être liés au suicide. La figure 1 met plutôt l’accent sur les principaux facteurs de risques et signes avant coureurs qui contribuent à accroître le risque de suicide selon la documentation scientifique et les experts interrogés. Voir la référence à l’annexe C. 4 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section I : Aperçu des principes, des processus et des considérations en matière d’évaluation du risque de suicide Risque très élevé Obtenir l’aide immédiate des urgences ou d’un professionnel en santé mentale SIGNES AVANT-COUREURS • Menace de blessure ou d’attentat à la vie • Recherche de moyens ou accès à ces moyens : somnifères, armes ou autres moyens • Preuve ou expression d’un plan de suicide • Expression (écrite ou orale) d’idées suicidaires, de la volonté de mourir ou de la mort • Désespoir • Geste téméraire, adoption impulsive d’un comportement imprudent • Expression d’un sentiment d’être pris en piège sans voir d’issue • Consommation accrue ou excessive de drogues ou d’alcool • Comportement d’isolement par rapport à la famille, aux amis, à la société • Anxiété, agitation, sommeil anormal (dort trop ou trop peu) • Brusques changements d’humeur Nombre de signes avant-coureurs • Rage, colère, volonté de vengeance Risque élevé Obtenir l’aide d’un professionnel en santé mentale • Expression de l’absence de raison de vivre, de but dans la vie FACTEURS DE RISQUE POTENTIALISATEURS • • • Chômage ou difficultés financières récentes Divorce, séparation, deuil du conjoint Isolement social • • • • Abus ou événements traumatiques antérieurs Comportement suicidaire antérieur Maladie mentale chronique Maladie physique chronique ou débilitante Risque faible Recommander une thérapie et surveiller l’apparition de signes avant-coureurs Figure 1. Illustration de l’incidence d’une accumulation de facteurs de risques potentialisateurs et de signes avant-coureurs sur le risque de suicide (signes avantcoureurs adaptés de Rudd et coll., 2006) Guide d’évaluation du risque de suicide I 5 En gros, les facteurs de risque potentialisateurs cernés peuvent devenir les aspects à cibler par les interventions une fois le risque éliminé. Par exemple, certaines expériences comme des événements traumatiques antérieurs, une maladie et une incapacité chronique, l’isolement social et une très grande perte (financière, personnelle, sociale) sont importantes à la compréhension des origines du risque. En l’absence de signes avant coureurs, les facteurs de risque potentialisateurs peuvent représenter un risque de suicide, mais de façon moins immédiate. En concentrant les efforts de traitement sur ce genre de facteurs potentialisateurs, les prestataires de soins peuvent en fait éviter que la personne présente éventuellement des signes avant coureurs. C’est donc dire que les signes avant coureurs indiquent que le niveau de risque de suicide de la personne, tandis que les facteurs de risque potentialisateurs précisent les aspects sur lesquels il faut cibler les interventions. FAIT : La détermination du risque de suicide ne doit pas reposer sur des caractéristiques démographiques, comme l’âge ou le sexe. Ces caractéristiques doivent plutôt servir à déterminer l’intervention la Exclusion de certaines caractéristiques démographiques des principaux facteurs de risque Un certain nombre de caractéristiques démographiques liées au risque de suicide dans la littérature ont été exclues des principaux facteurs de risque proposés dans le présent guide, en particulier l’âge et le sexe. plus appropriée une fois le risque établi en fonction des risques potentialisateurs et des signes avant coureurs. Âge Selon les entrevues menées auprès des experts, l’âge seul ne devrait pas faire partie des facteurs de risque potentialisateurs puisqu’il ne dit rien du risque de suicide sans la présence d’autres facteurs (énumérés à la figure 1 de la page 5). L’âge peut être lié au suicide lorsqu’il interagit avec d’autres facteurs, comme l’impulsivité ou les circonstances de la vie. Par exemple, les adultes plus âgés peuvent présenter un risque de suicide en raison d’une maladie ou d’une douleur physique qui perdure depuis longtemps. L’âge demeure un important facteur à considérer lors de l’évaluation des risques, mais pas en tant que facteur de risque. Certaines considérations concernant la durée de vie et l’expérience de vie traumatique sont présentées à la page 33. Sexe En ce qui concerne le sexe, un écart constant entre le taux de suicide des hommes et celui des femmes s’observe tant au Canada que dans le reste du monde. En règle générale, le taux de suicide des hommes est supérieur à celui des femmes, bien que certains rapports indiquent que le taux de tentative de 6 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section I : Aperçu des principes, des processus et des considérations en matière d’évaluation du risque de suicide suicide est plus élevé chez les femmes (Murphy, 1998). L’hypothèse est que de telles tentatives peuvent servir d’appel à l’aide de la part des femmes, alors que les hommes sont moins enclins à discuter ouvertement de leur détresse ou de leur vulnérabilité (Murphy, 1998; Pearson et coll., 1997). Les interventions thérapeutiques menées auprès des hommes et des femmes en détresse doivent donc inclure une vigilance accrue et hâtive pour déceler tout indice verbal ou comportemental de la présence de signes avant coureurs. L’évaluation des facteurs de risque sous jacents n’est pas un exercice linéaire Pour parvenir à évaluer les facteurs pouvant indiquer un risque de suicide, il faut également tenir compte de deux questions interreliées, soit la maladie mentale et la suicidalité chronique. Suicidalité et maladie mentale Les personnes souffrant de maladie mentale n’ont pas nécessairement des pensées ou des comportements suicidaires. Selon les estimations, environ 5 % des personnes souffrant de schizophrénie se suicident (Palmer, Pankratz et Bostwick, 2005). Cependant, jusqu’à 50 % des personnes aux prises avec cette maladie envisagent le suicide à un certain moment de leur vie (Radomsky, Haas, Mann et Sweeney, 1999). En fait, 90 % des personnes mortes par suicide aux États Unis souffraient également de dépression, de toxicomanie ou d’une autre maladie mentale (Moscicki, 2001). Les antécédents de maladie mentale s’avèrent un facteur beaucoup plus fiable pour prédire le suicide que les variables socioéconomiques (chômage, faible revenu, situation de famille; Mortensen, Agerbo, Erikson, Qin et Westergaard-Nielsen, 2000). Le risque de suicide n’est pas nécessairement symptomatique d’une maladie mentale; il se fonde plutôt sur certains symptômes ou situations vécus par les personnes souffrant de maladie mentale. • Le désespoir est considéré comme un prédicteur d’idéation suicidaire plus solide qu’un diagnostic de dépression (Beck, Steer, Beck et Newman, 1993). • Chez les personnes souffrant de schizophrénie, il est important de déterminer si des hallucinations (délire de persécution ou commandement) viennent contribuer aux idées suicidaires ou au désir de mourir de la personne (Heila, Isometsa, Henriksson, Heikkinen, Guide d’évaluation du risque de suicide I 7 Définition Le suicide situationnel est le « suicide qui survient lorsque la personne sans maladie mentale vit une situation inacceptable qu’elle estime sans autre issue possible que la mort. » (Pridmore, 2009, p 113) Marttunen et Lonngvist, 1997). En outre, la récence de l’apparition de la schizophrénie, la fréquence des hospitalisations, ainsi que le désarroi, la tristesse ou le désespoir (même en l’absence d’un syndrome dépressif) peuvent également accroître le risque de suicide chez les membres de ce groupe (Mamo, 2007). • Les personnes qui abusent de l’alcool ou d’autres substances peuvent également présenter un risque accru de suicide, surtout parce que le contrôle inhibiteur diminue et que l’impulsivité augmente (Wilcox, Conner et Caine, 2004). Plusieurs personnes interrogées estiment également que les circonstances de la vie et l’apparition d’une dépression à la suite d’une désintoxication peuvent aussi exacerber le sentiment d’isolement, de culpabilité, de désespoir et toute autre forme de désarroi, ce qui peut accroître les pensées ou les comportements suicidaires. • Un état émotionnel négatif intense, l’impulsivité et la persistance de la maladie mènent souvent à l’adoption d’un grand nombre de comportements suicidaires, de tentatives de suicide et de décès chez les personnes souffrant d’un trouble de la personnalité limite ou antisociale (Zaheer, Links et Liu, 2008). Il importe également d’admettre le fait qu’un suicide peut survenir en l’absence d’une maladie mentale diagnostiquée ou en présence d’un diagnostic relativement non spécifique (p. ex., un trouble de l’adaptation). Le concept de suicide situationnel est utilisé pour décrire un « suicide qui survient lorsque la personne sans maladie mentale vit une situation inacceptable qu’elle estime sans autre issue possible que la mort » (Pridmore, 2009, p. 113). Ce phénomène peut s’observer, sans s’y limiter, chez les personnes qui vivent une importante perte financière, qui ressentent une culpabilité, une humiliation ou une honte excessive, ou qui sont en deuil d’une personne très intime. Ces expériences, ou facteurs de risque potentialisateurs, peuvent se manifester par des signes avant coureurs si la personne ne parvient pas à s’adapter à la situation ou à l’accepter, ou si elle se sent seule et isolée sans personne vers qui se tourner pour obtenir du soutien. Il est particulièrement important pour les établissements de soins primaires et autres établissements en mesure de dépister et intervenir rapidement de reconnaître la possibilité que de telles expériences se manifestent par des signes avant coureurs. 8 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section I : Aperçu des principes, des processus et des considérations en matière d’évaluation du risque de suicide Suicidalité chronique À l’occasion, les professionnels de la santé devront transiger avec des personnes considérées comme « suicidaires chroniques ». Ces personnes vivent une idéation suicidaire quotidienne et des pensées d’intensité et de persistance variées. Tout suicidaire chronique doit être soumis à une évaluation du risque aigu pour déterminer son degré d’intention de mourir. Cela dit, il arrive qu’une personne qui entretient des idées suicidaires à répétition et qui menace fréquemment de se suicider suscite des sentiments ambivalents (p. ex., « cette personne tente simplement d’attirer l’attention »), ce qui compromet la relation thérapeutique. Les personnes présentant une suicidalité chronique peuvent souffrir d’un trouble mental sous jacent (p. ex., trouble de la personnalité limite), être exaspérées de l’absence de réaction aux interventions ou traitements reçus ou se servir de la suicidalité comme moyen de communiquer leur détresse (Kutcher et Chehil, 2007; Paris, 2002). Contrairement aux personnes présentant une suicidalité aiguë (avec ou sans symptômes graves d’épisodes dépressifs), la prise en charge des suicidaires chroniques exige l’application d’un ensemble de principes différent. Les approches cliniques permettant de traiter la suicidalité aiguë chez les personnes ayant des troubles de l’humeur conviennent rarement aux cas de suicidalité chronique. À moins d’un état psychotique ou d’une grave tentative de suicide récente, l’hospitalisation des suicidaires chroniques est peu utile pour prévenir le suicide chez ces patients et peut avoir des conséquences négatives indésirées (p. ex., un cycle d’admissions répétées; Paris, 2002). L’hospitalisation partielle dans le cadre d’un programme de jour fortement structuré offre une solution de rechange efficace, car elle donne accès à une équipe psychiatrique spécialisée et fournit, à tout le moins, un répit à la famille et aux thérapeutes en clinique externe (Bateman et Fonagy, 1999). Une thérapie comportementale dialectique (TCD) s’est également avérée efficace pour intervenir auprès des personnes qui adoptent un comportement suicidaire récurrent au sein de la collectivité (McMain, Links, Gnam, Guimond, Cardish, Korman et Streiner, 2009). Selon les recommandations formulées dans la littérature et par les intervenants interrogés, les professionnels en santé mentale peuvent devoir en arriver à tolérer la suicidalité sur une longue période et permettre (à faisant preuve d’un bon jugement clinique) aux personnes de rester dans la collectivité malgré un « certain degré de risque » (Maltsberger, 1994; Paris, Guide d’évaluation du risque de suicide I 9 2002). Cette décision doit privilégier la prudence, reposer sur une relation thérapeutique bien établie et s’accompagner d’une surveillance continue qui permettra de déceler toute hausse du risque aigu. Dans le cas des suicidaires chroniques, l’élaboration, le respect et la révision constante d’un plan de sécurité centré sur la personne revêtent une importance particulière. À court terme, l’hospitalisation d’une personne présentant une suicidalité chronique peut être un moyen d’assurer la sécurité immédiate de la personne et d’établir un plan de traitement; toutefois, à long terme, il peut être utile de déterminer et d’examiner les causes profondes de cette suicidalité chronique (en clinique externe) afin de concevoir des solutions de rechange aux problèmes sous jacents. Comme démontré dans le cas des personnes souffrant d’un trouble de la personnalité limite, dès que le traitement commence à porter fruit, la suicidalité chronique disparaît graduellement (Najavits et Gunderson, 1995). Facteurs de protection Les facteurs de protection sont ceux qui peuvent atténuer le risque de suicide (Nelson, Johnston et Shrivastava, 2010; Sanchez, 2001); certains sont énumérés dans l’encadré 1. ci-dessous. Encadré 1. Exemples de facteurs de protection • • • • • • • • • • 10 I Guide d’évaluation du risque de suicide (Sanchez, 2001; United States Public Health Service, 1999) Liens solides avec la famille et soutien de la collectivité Capacité de résoudre les problèmes, de s’adapter et de régler les conflits Sentiment d’appartenance, sentiment d’identité et bonne estime de soi Liens et croyances de nature culturelle, spirituelle et religieuse Définition d’objectifs à atteindre Utilisation constructive des temps libres (activités agréables) Soutien dans le cadre d’une prestation continue de soins médicaux et de soins de santé mentale Soins cliniques efficaces pour les troubles de santé mentale, de santé physique et de toxicomanie Accès facile à diverses interventions cliniques et soutien pour obtenir de l’aide Accès restreint à des moyens très létaux de se suicider Section I : Aperçu des principes, des processus et des considérations en matière d’évaluation du risque de suicide La définition des facteurs de protection est une étape essentielle de l’évaluation du risque de suicide afin de cerner les forces possibles et la résilience pouvant servir à atténuer le risque de suicide. La reconnaissance des facteurs de protection peut même servir à donner espoir aux personnes à risque. En effet, la responsabilité et l’amour de la personne envers sa famille ou ses enfants, les liens serrés qui l’unit à ses amis et à sa communauté, ou encore ses goûts et intérêts personnels peuvent nourrir chez elle un sentiment d’estime et doivent être pris en considération lors de l’évaluation du risque de suicide. Cela dit, la nature protectrice de certains facteurs peut être temporaire (p. ex., la personne n’attente pas à ses jours tant que ses enfants vivent sous son toit). Les facteurs de protection ne devraient jamais l’emporter sur la preuve de signes avant coureurs au moment d’évaluer le risque, puisque leur présence ne réduit pas ce risque en présence de graves signes avant coureurs. Ils doivent plutôt servir à soutenir le procédé de soins fournis à la personne afin de tenter d’atténuer le risque de suicide. La simple absence de signes avant coureurs et de facteurs de risque potentialisateurs peut également être considérée comme un facteur de protection Il importe de prendre conscience que l’absence des facteurs de risque potentialisateurs peut constituer une force lorsque vient le temps de faire face à d’autres facteurs de risque ou à des signes avant coureurs. En fait, plusieurs experts interrogés ont insisté sur l’utilisation et l’optimisation des facteurs de protection dans le cadre d’une approche axée sur les forces afin d’évaluer et de surveiller le risque de suicide, particulièrement chez les personnes recevant des soins dans la communauté (voir le chapitre Inventaire des raisons de vivre à la section II pour un exemple d’outil pouvant aider à recueillir de l’information sur les facteurs de protection). De plus, il est important d’aborder la question des appuis tant intérieurs (p. ex., compétences et mécanismes d’adaptation personnels) et extérieurs (p. ex., solides liens familiaux ou communautaires, réseaux culturels ou religieux; Grotberg, 2002) dont jouit la personne. Le fait de demander à la personne de s’identifier à des énoncés positifs (p. ex., « Je peux prendre soin de moi », « J’ai des gens autour de moi à qui parler », etc.) peut également aider la personne à détourner son attention de sa détresse et de ses idées suicidaires pour la porter plutôt sur ses forces et ses appuis. Guide d’évaluation du risque de suicide I 11 2.Les principes qui guident le processus d’évaluation Les prestataires de soins doivent cerner les facteurs de risque potentialisateurs et les signes avant coureurs, puis les organiser et prendre des mesures les concernant. Le contexte et la complexité de donner des soins aux personnes à risque de suicide ne facilitent pas ce processus. En effet, dans presque tous les établissements de santé, les prestataires de soins doivent relever de nombreux défis, notamment : Pour assurer une évaluation du risque centrée sur la personne, le premier principe consiste à établir, avec la personne, une relation thérapeutique qui repose sur l’écoute active, la confiance, le respect, l’authenticité, l’empathie et la réponse aux inquiétudes de la personne. 12 I Guide d’évaluation du risque de suicide • le temps disponible pour évaluer adéquatement une personne; • la disponibilité, l’expérience et le soutien d’autres prestataires de soins ou des membres de l’équipe clinique; • la sophistication des systèmes d’information sur la santé; • la disponibilité de services appropriés aux personnes à risque élevé; • la gestion continue des admissions et des congés; • les changements de quart du personnel et les transitions internes dans les soins. À ces défis s’ajoutent l’urgence et les conséquences que représente l’état de la personne. En temps opportun, il faut prendre des décisions éclairées concernant la sécurité de la personne et le risque qu’elle peut représenter pour elle même, que ce soit en milieu hospitalier ou à l’extérieur de ce milieu. PREMIER PRINCIPE – LA RELATION THÉRAPEUTIQUE Compte tenu des défis brièvement décrits plus haut, le danger est que le processus d’évaluation du risque de suicide devienne automatisé ou axé seulement sur le triage ou le besoin de services plutôt que sur la détermination et la prise en charge de la détresse de la personne. Par conséquent, pour assurer une évaluation du risque centrée sur la personne, le premier principe consiste à établir une relation thérapeutique avec cette personne (APA, 2003). Cette relation doit reposer sur l’écoute active, Section I : Aperçu des principes, des processus et des considérations en matière d’évaluation du risque de suicide la confiance, le respect, l’authenticité, l’empathie et une réponse aux inquiétudes de la personne (AIIAO, 2009). Le maintien d’une ouverture, d’une acceptation et d’une volonté de discuter de sa détresse peut permettre de réduire chez la personne les sentiments de honte et de culpabilité ainsi que la stigmatisation qu’elle peut vivre. La façon de poser les questions permet de susciter de l’empathie et un sens de la normalité, ce qui aide la personne à se sentir à l’aise. Ce point s’avère particulièrement important avec les jeunes, qui peuvent hésiter à révéler leurs sentiments par crainte des répercussions. L’une des approches possibles consiste à dire à la personne qu’il n’est pas rare que certains individus pensent à se faire du mal lorsqu’ils sont en détresse, puis à lui demander si c’est ce qu’elle ressent aussi. La personne peut ainsi se sentir rassurée de ne pas être la seule à vivre de la détresse et de savoir que le/la prestataire est là pour l’écouter et lui donner du soutien. L’établissement d’une bonne relation thérapeutique peut améliorer le processus d’évaluation du risque de suicide L’établissement d’une relation thérapeutique peut prendre un certain temps et s’échelonner sur de nombreuses rencontres, même si un lien se noue au premier contact. Plusieurs stratégies peuvent être adoptées pour créer une relation thérapeutique avec la personne et ainsi améliorer le processus d’évaluation du risque de suicide (Heaton, 1998). Encadré 2. Stratégies fructueuses pour créer la relation thérapeutique (Heaton, 1998) • • • • • • Demander à la personne comment elle souhaite être abordée Lui expliquer votre rôle et le but de l’évaluation, ce qui réduira l’incertitude et l’anxiété qu’elle peut ressentir Écouter avec empathie Prendre le temps d’écouter l’histoire de la personne Faire ressortir ses forces Tenir la rencontre dans un endroit confortable et privé Guide d’évaluation du risque de suicide I 13 La création du lien doit commencer dès les premiers instants de la rencontre entre le clinicien et la personne, puis se poursuivre tout au long du processus d’évaluation du risque de suicide; ainsi la personne sera rassurée et participera davantage. Le/la prestataire doit : • écouter la personne avec empathie et parler d’une voix calme. Il arrive souvent qu’une personne ne sache pas comment agir lorsqu’elle est en crise. Il peut donc être utile de modeler son comportement (p. ex., par un ton de voix calme et égal) pour aider la personne à comprendre ce qui est attendu d’elle et calmer le jeu; • prendre le temps d’écouter l’histoire de la personne pour qu’elle ne se sente pas exclue. Il faut que le/la prestataire prenne conscience que la personne en crise est davantage qu’un ensemble de comportements; il doit donc voir d’abord la personne, puis la personne en crise; • aider la personne à reconnaître ses forces (p. ex., insister sur le fait qu’elle a fait le bon choix en obtenant de l’aide), valider ses sentiments et l’amener à reprendre le contrôle. L’endroit dans lequel l’évaluation s’effectue doit être confortable et privé afin d’amener la personne à se sentir à l’aise et ouverte à la discussion. Toute distraction de l’extérieur peut exacerber la crise. Une salle d’attente offrant une certaine intimité, loin du bruit et des oreilles indiscrètes, permet de réduire l’anxiété et la détresse. Si la personne vit une détresse telle qu’elle est en pleurs, il faut lui demander si elle préfère aller dans un endroit plus isolé, sécuritaire (c. à d. exempt de risques environnementaux) et relativement tranquille pour lui permettre d’avoir le temps et l’intimité nécessaires. Le fait de vérifier le degré d’aise de la personne dans l’environnement immédiat permet non seulement de faire tomber la tension, mais aussi de resserrer le lien thérapeutique (Bergmans et coll., 2007). DEUXIÈME PRINCIPE – LA COMMUNICATION ET LA COLLABORATION... Une communication et une collaboration efficaces sont essentielles pour veiller à ce que l’évaluation du risque de suicide soit complète, cohérente et efficace pour déterminer le risque que représente la personne tout au long de son périple dans le système de santé (p. ex., de la salle d’urgence à la communauté, d’un/d’une prestataire à l’autre). Elles sont également nécessaires pour obtenir des renseignements complémentaires sur la détresse 14 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section I : Aperçu des principes, des processus et des considérations en matière d’évaluation du risque de suicide de la personne et assurer sa sécurité. Pour soutenir la personne tout au long de son rétablissement, il est crucial de maintenir une bonne communication et une bonne collaboration : • • • avec la personne; avec le réseau de soutien informel de la personne; au sein et entre les équipes de soins qui soutiennent la personne. ... Avec la personne Bon nombre des personnes qui ont recours aux services de santé mentale et qui entrent en contact avec le personnel de ces services disent avoir vécu une expérience négative. Selon Cerel et ses collègues (2006), moins de 40 % des personnes qui se retrouvent aux urgences à la suite d’une tentative de suicide estiment que le personnel les a écoutées ou a pris leurs blessures sérieusement; plus de la moitié de ces personnes se sont senties directement punies ou stigmatisées par le personnel. Assurer les soins et le traitement des personnes au comportement suicidaire est exigeant sur le plan émotif, et les prestataires de soins doivent prendre conscience qu’ils peuvent avoir besoin de soutien eux aussi. Certains professionnels de la santé ont parfois de très vives réactions personnelles à un risque de suicide, ce qui leur complique la tâche de rester empathique, acceptant et ouverts d’esprit. Les personnes qui se livrent à l’automutilation de façon répétée peuvent susciter chez leurs soignants un sentiment de frustration devant leur incapacité de les « guérir » (Bergmans et coll., 2007). Les professionnels qui comprennent leurs propres réactions face au suicide et à l’automutilation parviennent mieux à garder une attitude bienveillante, respectueuse et exempte de jugements (Pompili, 2011), alors que ceux qui comprennent le point de vue de la personne à risque contribuent à élaborer des interventions centrées sur la personne plus significatives. FAIT : La perception d’une mauvaise attitude de la part du personnel envers un comportement suicidaire peut décourager les personnes à risque de demander de l’aide. Moins de 12 % des personnes ayant des antécédents suicidaires considèrent le système de santé mentale comme l’aide de première ligne à aller chercher en temps de crise (Alexander et coll., 2009). Les critiques du personnel peuvent accroître le niveau de détresse. Une expérience négative vécue à l’hôpital peut notamment exacerber l’automutilation, et les personnes qui s’infligent ainsi des blessures les soignent elles-mêmes pour éviter d’aller aux urgences et de revivre une telle expérience (Harrison, 1995). Bien que des problèmes systémiques plus grands puissent également nuire à la relation thérapeutique, il est essentiel que les cliniciens demeurent conscients de l’incidence que peut avoir le fait qu’ils se sentent dépassés ou frustrés sur la relation. Lorsque les prestataires de soins ont de tels sentiments, ils doivent aller chercher de l’aide et du soutien. De telles stratégies d’adaptation permettront de veiller à ce que la personne à risque continue de se sentir soutenue et entendue. Guide d’évaluation du risque de suicide I 15 ... Avec le réseau de soutien informel de la personne La famille, les amis et les autres appuis informels sont de précieuses ressources pour les personnes en détresse. Si approprié et avec la permission de la personne, ces ressources doivent prendre part à l’évaluation du risque et au traitement du comportement autodestructeur et suicidaire. La famille et les autres appuis informels peuvent également fournir certains renseignements complémentaires en faisant part de leurs soupçons ou observations de signes d’un comportement suicidaire avant l’intervention formelle des services de santé mentale. Il est essentiel pour la sécurité de la personne de faire connaître à sa famille tous les aspects du risque, de l’évaluation, de la surveillance et des interventions. La famille doit participer à la surveillance de la personne, empêcher l’accès aux moyens et encourager la personne à respecter les recommandations concernant son traitement. Bien que les efforts pour inclure les appuis informels au processus d’évaluation du risque et au traitement puissent améliorer les soins généraux prodigués, cette participation n’est pas toujours maximisée. En effet, certains membres de la famille disent n’avoir pas vraiment eu la possibilité de prendre part aux soins et au traitement, et ce, tant à l’échelle du système que du personnel, et avoir été peu encouragés à le faire (Goodwin et Happell, 2007). Cependant, lorsqu’une approche centrée sur la personne est adoptée pour traiter le comportement suicidaire, les membres de la famille sont considérés comme des partenaires de soins (Buila et Swanke, 2010). À l’opposé, il arrive parfois que les membres de la famille nient le comportement suicidaire et espèrent qu’il disparaîtra tout seul. C’est pourquoi, lorsqu’il est approprié et possible de le faire, il faut amener la famille à discuter de la façon de gérer la sécurité et les situations de crise en insistant sur l’absence de jugement et la normalisation de leurs sentiments et en les informant que du soutien est mis à leur disposition. Plusieurs facteurs permettent de déterminer le degré de participation de la famille et des appuis informels à l’évaluation du risque de suicide. Lorsqu’une personne est profondément suicidaire, il faut d’abord assurer sa sécurité, ce qui peut nécessiter une violation de la confidentialité, tel que requis par la loi et les codes de conduite éthique. Ces lois et codes sont établis par le gouvernement, la pratique professionnelle ou la politique organisationnelle. Il peut s’avérer nécessaire d’enfreindre les règles de confidentialité pour informer la famille ou lui demander des renseignements en vue d’assurer la sécurité de la personne (APA, 2003). Il s’agit d’une situation très complexe 16 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section I : Aperçu des principes, des processus et des considérations en matière d’évaluation du risque de suicide qui demande d’être examinée avec l’aide d’experts en droit, en éthique et en gestion des risques.Tout en menant ces consultations au sujet de la violation de la confidentialité, il faut mettre en place une stratégie pour assurer la sécurité de la personne en se servant des moyens courants. Dans certains cas, le risque d’automutilation ou de suicide découle de relations familiales conflictuelles (p. ex., un parent abusif, un divorce, de l’intimidation) ou d’un milieu de vie dysfonctionnel. Dans ce contexte, la sécurité de la personne devient la priorité absolue et peut nécessiter (selon la gravité de la situation) l’intervention des services de la protection de la jeunesse, le retrait temporaire de la personne de son milieu de vie ou le simple renvoi à un thérapeute familial. À l’occasion, il arrive que la culture ou la religion de la personne empêche ou interdise toute discussion sur le suicide, ce qui complique la participation de la famille à l’évaluation du risque de suicide. Dans ce cas, le droit de la personne à la vie privée doit être respecté et sous peser par rapport à la nécessité d’assurer sa sécurité s’il y a risque de suicide. ... Au sein et entre les équipes de soins qui soutiennent la personne La documentation est au cœur de l’évaluation du risque de suicide. Il faut des notes claires sur : • le niveau de risque (selon les signes avant-coureurs, les facteurs de risque potentialisateurs et les facteurs de protection); • les pensées et les comportements Lors de l’évaluation du risque et la prévention du suicide, la communication et la collaboration sont des processus fondamentaux, tant au sein des établissements de santé qu’entre eux. La documentation et le partage des renseignements au sein et entre les unités cliniques et les établissements de soins doivent faire l’objet d’un processus normalisé afin d’améliorer et de faciliter la circulation de l’information ainsi que la cohérence des connaissances sur le risque de la personne. Lors des discussions tenues au sein d’un établissement, les prestataires de soins doivent faire l’examen formel de l’état de la personne et de son niveau de détresse, puis déterminer le risque qu’elle représente. Les renseignements découlant de cet examen doivent être consignés et clairement communiqués à tous ceux qui prennent part aux soins de la personne. Granello (2010) indique que les équipes de soins doivent avoir recours à la collaboration, à la corroboration et à la consultation lors du processus d’évaluation du risque. La collaboration avec les autres membres de l’équipe et les personnes connaissant l’état de la personne permettra de veiller à ce qu’aucun renseignement important sur le risque ne soit omis. La corroboration des données d’évaluation du risque auprès d’autres gens connaissant l’état de la personne permettra de cerner le niveau de risque en fournissant de l’information sur les antécédents de la personne quant à la fréquence de observés de la personne; • les antécédents psychiatriques; • les traitements antérieurs; • les plans de traitement et de soins préventifs; • les inquiétudes exprimées par le réseau d’appuis informels; • le comportement suicidaire actuel et précédent (moment, méthode, degré d’intention et conséquences). Cette liste est loin d’être complète. De plus, les établissements doivent instaurer des protocoles normalisés pour localiser les renseignements portant sur le risque de suicide dans le dossier médical de la personne. Guide d’évaluation du risque de suicide I 17 ses troubles mentaux et de ses pensées et comportements suicidaires. Enfin, la consultation avec les autres membres de l’équipe ou les experts cliniques est importante pour cerner définitivement le risque et déterminer les mesures à prendre pour l’atténuer. Même parmi les cliniciens spécialisés, la collaboration est essentielle à la détermination du risque. La communication et la collaboration sont tout aussi essentielles pour comprendre le risque de suicide et le prévenir aux points de transition entre les quarts de travail, les programmes et les établissements de soins (parfois désignés par le terme « transfert des soins » ou « transitions de responsabilité »), soit le moment où le risque de suicide est le plus élevé (Ho, 2003). En Norvège, les lignes directrices nationales sur le suicide recommandent qu’une chaîne de soins qui comprend l’évaluation et la communication continues du risque de suicide soit élaborée pour les personnes qui sont transférées de milieux de soins à la suite d’une tentative de suicide. Toutefois, peu d’établissements parviennent vraiment à respecter ces lignes directrices (Mork et coll., 2010). Il est donc important, à l’échelon de l’établissement de santé, d’instaurer certains processus pour assurer la communication du risque de suicide et la prévention du suicide au sein et entre les milieux de soins. TROISIÈME PRINCIPE – LA DOCUMENTATION DU PROCESSUS D’ÉVALUATION La documentation est une étape cruciale pour assurer l’efficacité de l’évaluation du risque de suicide. Après l’évaluation initiale et chacune des suivantes, les notes consignées au dossier doivent préciser le niveau de risque de la personne (selon les signes avant-coureurs, les facteurs de risque potentialisateurs et les facteurs de protection), ainsi que les plans de traitement et de soins préventifs. Ces notes doivent être complétées par des évaluations structurées, notamment l’évaluation de risques pertinents, les antécédents psychiatriques, les traitements antérieurs reçus ainsi que les inquiétudes exprimées par la famille ou les amis. Dans les endroits où il est facile d’observer le comportement (p. ex., à l’hôpital), la documentation doit également inclure de l’information sur les pensées et comportements précis de la personne afin d’approfondir l’évaluation du risque. La documentation doit également préciser le comportement suicidaire et autodestructeur volontaire actuel et précédent. Même si le comportement est survenu il y a plusieurs années, il est nécessaire d’examiner les circonstances ayant entouré l’incident et la réaction de la personne, au cas où une situation semblable se reproduirait. Que ce soit pour le comportement suicidaire 18 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section I : Aperçu des principes, des processus et des considérations en matière d’évaluation du risque de suicide présent ou passé, il faut consigner des détails sur le moment, la méthode, le degré d’intention et les conséquences du comportement. Voir la référence à l’annexe E. Voici ce qui doit se trouver dans la documentation : 1. Le niveau général de risque de suicide Le niveau de suicide doit être clairement documenté et s’accompagner de renseignements à l’appui de cette affirmation. Il peut s’agir de renseignements sur : • • le type d’outils d’évaluation utilisés pour évaluer le risque; les détails des entrevues cliniques et des communications avec d’autres (p. ex., la famille et les amis de la personne, d’autres professionnels), soit : i. les circonstances et le moment de l’incident; ii. la méthode choisie pour commettre le suicide; iii. le degré d’intention; iv. les conséquences. 2. Les antécédents de tentatives de suicide et d’automutilation Il faut préciser : • le plan de soins ou d’intervention qui a été mis en place précédemment; • l’intervalle de temps depuis la ou les tentatives de suicide antérieures ou les comportements d’automutilation; • les motifs justifiant le fait que la personne n’ait pas été admise dans un milieu de soins plus intensifs ou ait été transférée dans un milieu moins restreignant, ainsi que les plans de sécurité mis en place; • des détails sur les inquiétudes de la famille et la réponse à ces inquiétudes. 3. Des détails sur tous les facteurs de risque potentialisateurs, les signes avant coureurs et les facteurs de protection Guide d’évaluation du risque de suicide I 19 4. Le degré d’intention de commettre un suicide Le degré d’intention peut préciser, par exemple, ce que la personne pensait ou souhaitait qu’il arrive. 5. Les sentiments et la réaction de la personne après le comportement suicidaire Par exemple, un sentiment de soulagement, le regret d’être en vie. 6. La preuve d’une progression de la létalité possible de l’automutilation ou du comportement suicidaire Il faut préciser si la personne a commencé à envisager, à planifier ou à utiliser des moyens de plus en plus létaux (p. ex., est passée des coupures à la pendaison, a cherché une arme). 7. La similitude entre la situation actuelle de la personne et celle ayant mené à la ou aux tentatives de suicide ou aux comportements d’automutilation précédents 8. L’historique de la famille ou des amis quant à l’automutilation ou aux comportements suicidaires, ou importante perte dans la famille ou le cercle d’amis Ces renseignements sont notamment les dates d’anniversaire de ces événements, puisque le risque peut s’accroître à ces moments. Les établissements doivent également instaurer des protocoles normalisés pour localiser les renseignements portant sur le risque de suicide dans le dossier médical de la personne. L’emplacement de cette documentation doit être cohérent et facile à trouver par les autres employés de l’établissement ou par ceux qui prennent part aux soins de la personne. Documentation durant les transitions Des études ont démontré que les personnes qui ont reçu leur congé d’un service hospitalier de soins psychiatriques courent un risque particulièrement plus élevé de se suicider que la population en général (Ho, 2003; Hunt et coll., 2009; Goldacre et coll., 1993). La transition entre la sécurité du milieu hospitalier et la communauté constitue une période de vulnérabilité. La planification des congés peut faciliter ce retour dans la communauté et réduire le risque de suicide chez les personnes qui ne sont plus hospitalisées aux soins psychiatriques. 20 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section I : Aperçu des principes, des processus et des considérations en matière d’évaluation du risque de suicide Encadré 3. Principaux aspects à documenter lors des transitions • • • • Les indicateurs de risque qui informent immédiatement les prestataires de soins du risque accru de la personne. L’utilisation de certains signes physiques ou virtuels (p. ex., dossier de couleur vive, avertissement au dossier électronique) pour indiquer le risque accru de la personne. Les renseignements concernant la surveillance passée, le calendrier d’évaluation et les recommandations en matière de surveillance future (fondés sur la connaissance de la personne et la compréhension de ses besoins aigus et chroniques). Les renseignements concernant les plans visant à atténuer le risque qui ont été établis par la personne et son équipe de soins (plan de crise, plan d’appuis et de sécurité, ainsi qu’inquiétudes ou considérations du réseau de soutien informel). Ainsi, les prestataires de divers milieux de soins peuvent suivre la même stratégie de prévention du risque de suicide. Une évaluation approfondie du risque de suicide est essentielle au moment de déterminer à quel moment il convient de donner congé à la personne. Si la crise n’a pas été traitée, si la personne n’est pas entièrement calmée ou si elle n’est pas en mesure (ou désireuse) d’accepter d’élaborer elle même un plan de sécurité, il faut tenter d’en négocier un avec elle. Cependant, la personne ne doit pas avoir d’idées suicidaires, afficher une humeur maussade ou vivre du désespoir au moment de son congé. Il est recommandé de lui offrir des choix concrets (p. ex., « Croyez vous qu’il serait utile pour vous de rester à l’hôpital ou serait il plus sécuritaire de retourner à la maison avec un membre de la famille? ») afin de lui laisser son autonomie pour qu’elle opte pour le traitement qui lui semble le meilleur pour sa sécurité. Le fait de connaître la façon dont la personne a su se comporter auparavant dans la communauté (ou à l’hôpital) n’est pas une garantie de sécurité absolue quant à la façon dont elle réagira cette fois. Il faut la préparer à réintégrer la société, lui fournir des numéros de téléphone à composer en cas de crise et lui donner un rendez vous en temps opportun avec un professionnel pour discuter de ses problèmes. Les personnes qui quittent volontairement l’hôpital après une crise suicidaire doivent faire l’objet d’une surveillance étroite. Les consultations de suivi Guide d’évaluation du risque de suicide I 21 exigent les mêmes pratiques de gestion du risque de suicide que celles appliquées lors de la planification du congé (Bergmans et coll., 2007; Hunt et coll., 2009). Les personnes qui sont hospitalisés ou se présentent aux urgences pour suicidalité doivent recevoir leur congé une fois qu’elles ont en main un plan de sécurité précis pour savoir comment se protéger une fois de retour dans la communauté. Ce plan doit comprendre des stratégies pour rester en vie, les premiers signes avant coureurs à surveiller, des techniques de prise de conscience de l’ici maintenant, des stratégies d’adaptation et des numéros de téléphone à composer en cas de crise, comme discuté durant l’intervention. En mettant ce plan par écrit avec la personne, il sera plus facile pour elle d’éviter de retomber en crise une fois sortie de la sécurité offerte par l’hôpital (Bergmans et coll., 2007), de même qu’elle aura une ressource tangible à consulter lorsque ses sentiments ou sa détresse prendront de l’ampleur. Les appuis personnels, comme la famille ou les amis, doivent prendre part à l’élaboration détaillée du plan de sécurité et savoir clairement qui contacter en cas de crise imminente. La communication du plan de sécurité aux membres de l’équipe de soins de la personne permettra également d’améliorer la collaboration et la continuité des soins en cas de réadmission. QUATRIÈME PRINCIPE – SENSIBILISATION AUX CULTURES Les cliniciens et les professionnels de la santé qui effectuent l’évaluation du risque de suicide doivent connaître la culture de la personne et sa possible influence sur le suicide. Dans certaines cultures, par exemple, le suicide est considéré comme un tabou et n’est ni reconnu ni discuté. Ce fait présente tout un défi, non seulement pour le clinicien chargé d’évaluer la suicidalité, mais aussi pour la personne issue de cette culture qui peut être aux prises avec des pensées suicidaires tout en étant incapable d’en discuter ou de partager ses pensées et sentiments aux membres de sa communauté ethnique. Lorsqu’elles sont issues d’une culture qui n’accepte pas le suicide et n’aborde jamais cette question, les personnes qui parviennent à révéler leurs idées suicidaires font preuve d’une force qu’il faut reconnaître. Les croyances intraculturelles concernant le suicide peuvent également être renforcées selon l’âge (jeune, adulte, aîné), le sexe et les croyances religieuses. Il est important de tenir compte et d’être conscient de cette diversité de croyances, ainsi que de l’incidence qu’elle peut avoir sur le risque de suicide. 22 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section I : Aperçu des principes, des processus et des considérations en matière d’évaluation du risque de suicide Dans la mesure du possible, il faut parler avec la personne, la famille ou les autres appuis de certaines croyances culturelles envers le suicide afin de faciliter le processus d’évaluation du risque et l’adoption d’une approche de prévention qui convient aux croyances de la personne. RÉSUMÉ DES PRINCIPES CLÉS Les principes susmentionnés, et bien d’autres, peuvent servir à relever quelques uns des défis que pose la conduite d’une évaluation approfondie du risque de suicide. Granello (2010) a établi un ensemble de principes pour effectuer une évaluation approfondie centrée sur la personne, laquelle peut comprendre l’utilisation d’un outil d’évaluation du risque de suicide ou d’une entrevue clinique ou des deux (voir le tableau 1 qui suit). Voir la référence à l’annexe F. Tableau 1. Principes directeurs de l’évaluation du risque de suicide (adapté de Granello, 2010) L’évaluation du risque de suicide : Explication 1. est un traitement et s’effectue dans le cadre d’une relation thérapeutique • • • Le processus d’évaluation du risque même peut s’avérer un processus thérapeutique pour la personne en l’aidant à se sentir écoutée dans un cadre sécuritaire et confidentiel. Il est important de démontrer de l’empathie envers la personne et de l’aider à se sentir appréciée dans le cadre du processus d’évaluation. Ce processus peut faciliter l’établissement d’une relation thérapeutique avec la personne. 2. est unique à chaque personne • • Quel que soit son profil de risque, la personne peut vivre une situation unique qui suscite des idées ou des comportements suicidaires. Pour aider la personne, il est important de connaître cette situation du point de vue même de la personne. 3. est complexe et exigeante • • • Les pensées ou comportements suicidaires peuvent constituer un moyen de fuir la détresse plutôt que de refléter un désir direct de mourir. La distinction entre le désir de vivre et celui de mourir peut offrir des possibilités d’intervention. Chaque personne a parfois ses propres raisons de fuir ou de vivre de la détresse, et ces raisons peuvent varier au fil des ans. Guide d’évaluation du risque de suicide I 23 L’évaluation du risque de suicide : Explication 4. est un processus continu • • • Une évaluation continue est nécessaire en raison de la variation des facteurs de risque et des signes avant-coureurs au fil des ans. Les points d’évaluation importants sont notamment les moments de transition, de stress accru et de changement dans les appuis. L’évaluation peut se faire à l’aide de courtes questions sur la fréquence et le moment des idées suicidaires (p. ex., hier, la semaine dernière, le mois dernier, etc.) afin de déterminer le caractère aigu ou chronique de ces idées. 5. privilégie la prudence • • • L’évaluation du risque doit trouver un juste équilibre entre le besoin d’identifier toutes les personnes pouvant être à risque de suicide (sensibilité) et celui d’identifier seulement les personnes véritablement à risque de suicide (spécificité). Bien qu’il puisse être coûteux de surestimer le nombre de personnes pouvant être à risque (faux positifs), il peut être préjudiciable de sous estimer le nombre de personnes qui sont vraiment à risque (faux négatifs). Les facteurs de risque et les signes avant-coureurs doivent servir à soupeser cette évaluation, mais un jugement clinique prudent est nécessaire pour assurer la sécurité de la personne. 6. se fait en collaboration et repose sur • De nombreuses sources d’information peuvent permettre de corroborer les résultats de l’évaluation du risque. une communication efficace • La collaboration et la consultation avec les autres membres de l’équipe clinique et les personnes qui connaissent la personne dans divers milieux (p. ex., à la maison, à l’école ou au travail) permettent d’améliorer le processus d’évaluation. • La communication des facteurs de risque et des signes avant-coureurs entre toutes les personnes participant aux soins est essentielle afin de surveiller et de prévenir le risque. 7. repose sur le jugement clinique • • Les outils d’évaluation facilitent la prise de décisions éclairées, mais ne donnent jamais de réponses exactes. L’évaluation exige une combinaison d’expérience et de formation pour que toutes les sources d’information soient prises en considération, y compris le recours aux outils d’évaluation du risque. 8. prend au sérieux l’ensemble des menaces, signes avant coureurs et facteurs de risque • • Les menaces et les signes avant-coureurs peuvent constituer un appel à l’aide et doivent toujours être considérés comme d’éventuels risques pour la sécurité de la personne. Un lien thérapeutique est essentiel pour parvenir à distinguer les idées et comportements propres à une suicidalité chronique des signes avantcoureurs représentant un risque de suicide aigu. 24 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section I : Aperçu des principes, des processus et des considérations en matière d’évaluation du risque de suicide L’évaluation du risque de suicide : Explication 9. pose les questions difficiles • • • • 10. tente de découvrir le message sous jacent • En règle générale, la raison qu’a une personne de vouloir mettre fin à sa vie s’exprime par trois types de messages : - communiquer une détresse ou une souffrance insupportable; - contrôler sa vie, sa destinée ou les actions des autres; - éviter une souffrance physique ou émotionnelle imminente alors que toutes les autres options ont été épuisées (p. ex., difficultés financières ou légales inévitables). 11. se fait dans un contexte culturel • • • Il faut prendre conscience que tout le monde, peu importe le contexte racial ou culturel, peut avoir des idées suicidaires. Dans certaines cultures ou religions qui ont une attitude négative envers le suicide (p. ex., irrespectueux envers la famille, la religion), la personne peut hésiter à révéler de l’information sur ses pensées suicidaires. L’empathie et la sensibilité aux cultures sont importantes lors de l’évaluation du risque. 12. est documentée • • Une documentation détaillée de tous les aspects de l’évaluation du risque de suicide (soit les facteurs de risques, les signes avant coureurs, les messages sous jacents, le niveau de risque et les recommandations d’intervention) doit être faite dans le dossier médical de la personne. La précision de ces renseignements et leur accessibilité par les membres du personnel clinique et les autres établissements de soins (soins de courte durée, soins communautaires) sont cruciales pour assurer en tout temps la surveillance et la sécurité de la personne. Plutôt que d’employer des termes indirects (p. ex., « parti pour toujours »), il faut utiliser un langage direct faisant référence précisément au « suicide » ou à la « mort » pour éviter une mauvaise communication. Il faut clairement indiquer qu’il est tout à fait approprié de parler de ses pensées ou comportements suicidaires. Des questions ouvertes permettent également à la personne d’exprimer ses pensées concernant ses intentions ou comportements, surtout si sa principale intention n’est pas de mourir. Le fait de poser de multiples questions s’avère souvent bien plus efficace que de demander simplement : « Avez vous déjà pensé au suicide? » Guide d’évaluation du risque de suicide I 25 3. La mise en pratique des principes – Considérations particulières selon le milieu de soins et la population Bien que les principes susmentionnés s’appliquent à tous les milieux de soins et à toutes les populations, il peut parfois s’avérer nécessaire de tenir compte de certaines préoccupations ou considérations lors de l’évaluation du risque selon le milieu de soins et la population concernés. MILIEUX DE SOINS Cette section porte sur les considérations particulières liées aux soins primaires, aux urgences, au service de santé mentale et aux établissements de soins de longue durée, puisqu’elles reflètent des préoccupations d’ordre général concernant le milieu de soins. Soins primaires Puisqu’ils sont le premier point de contact avec le système de santé pour la plupart des gens, les milieux de soins primaires (p. ex., médecins de famille, infirmières praticiennes ou cliniciens, consultant en pratique privée) ont la capacité de cerner, de réduire et de prévenir le risque de suicide. Cependant, le dépistage du risque de suicide ne fait pas partie des pratiques habituelles de la plupart des médecins de premier recours (Fenkenfield, Keyl, Gielen, Wissow, Werthamer et Baker, 2000), et il existe un certain nombre d’obstacles qui empêchent le professionnel d’être en mesure de reconnaître et de traiter adéquatement la suicidalité. Mentionnons tout particulièrement les contraintes de temps des consultations : les personnes ont très peu de temps pour discuter des inquiétudes qu’elles ont au sujet de leur santé mentale. Lorsqu’elles se sentent « bousculées », elles peuvent ne pas se sentir à l’aise de parler de leurs pensées suicidaires ni encouragées à le faire (Cole et Raju, 1996; Denneson, Basham, Dickinson, Crutchfield, Millet, Shen et Dobscha, 2010). À moins d’être questionnées directement sur leur état de santé émotionnelle, les personnes choisissent souvent de ne pas parler de leur détresse psychologique (Mellor, Davison, McCabe, et coll., 2008). Les cliniciens en soins primaires peuvent inviter leurs patients à parler de leurs problèmes de santé mentale en assurant une communication efficace et un milieu favorable centré sur le patient1. 1 Le genre masculin utilisé dans ce document désigne aussi bien les femmes que les hommes. 26 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section I : Aperçu des principes, des processus et des considérations en matière d’évaluation du risque de suicide Certaines méthodes facilitent le dépistage ou la détermination du risque de suicide en milieux de soins primaires • Formation – • Voilà une stratégie clé pour accroître la sensibilisation à la santé mentale et réduire les attitudes stigmatisantes et l’inconfort des professionnels quand il s’agit d’aborder des sujets délicats comme le suicide (Costa von Aesch et Racine, 2007; Saarela et Engestrom, 2003). Mann, Apter, Bertolote et al. (2005) ont constaté que les médecins de premier recours qui ont été formés au dépistage du risque de suicide ont vu le taux de suicide de leurs patients chuter de 22 % à 73 %. Formation et acquisition de nouvelles compétences – Cette stratégie, qui peut comprendre une formation à l’utilisation d’un instrument de dépistage du suicide, permet également d’accroître la capacité des cliniciens en soins primaires de reconnaître et de traiter les problèmes de santé mentale sous jacents (Botega, Silva, Reginato et coll., 2007; McCabe, Russo, Mellor et coll., 2008). – De nouvelles données probantes militent en faveur de l’utilité de procéder à un dépistage rapide afin de cerner de façon précoce le risque de suicide en milieu de soins primaires. Ainsi, Gardner, Klima, Chisolm et al. (2010) ont constaté que, parmi les 1 500 jeunes ayant rempli un bref questionnaire informatisé sur les idées et comportements suicidaires dans la salle d’attente, seuls 44 ont refusé de répondre, alors que 209 ont dit avoir des pensées ou des comportements suicidaires et ont pu être mieux évalués et pris en charge au triage. • Approches collaboratives en matière de soins – En milieu de soins primaires, l’adoption d’une approche collaborative pour traiter les problèmes de santé mentale s’est également avérée efficace (Chang-Quan, Bi-Rong, Zhen-Chan et coll., 2009; Gilbody, Bower, Fletcher et coll., 2006). Les principes qui sous tendent la prestation de soins en collaboration permettent généralement aux cliniciens de se concentrer sur les diagnostics médicaux, alors que d’autres spécialistes et professionnels de la santé travaillent avec les Guide d’évaluation du risque de suicide I 27 patients en vue de prendre leur état en charge et d’améliorer leurs habitudes de vie. En d’autres termes, un plus grand nombre de spécialistes (p. ex., gestionnaires de soins individualisés offerts par le personnel infirmier, travailleurs sociaux, psychologues, etc.) travaillent en équipe afin de compléter les services de soins primaires. Puisque les soins de la personne sont assurés par un plus grand nombre de professionnels de la santé, la probabilité de déceler la détresse psychologique ou les idées suicidaires sous jacentes s’en trouve grandement accrue. Urgences L’évaluation du risque de suicide aux urgences est un processus assujetti au temps qui consiste à déterminer le degré de risque d’autodestruction, à atténuer le risque aigu et à établir les soins appropriés pour la personne (Dawe, 2008). Les personnes à risque de suicide qui se présentent aux urgences le font lorsqu’elles viennent tout juste de commettre une tentative de suicide, qu’elles étaient sur le point d’attenter à leurs jours ou pour toute autre raison que des pensées ou des comportements suicidaires tout en étant à risque. Afin d’évaluer le risque et de diriger la personne vers les bons soins, l’évaluation du risque de suicide aux urgences se fait comme suit : 1) Déterminer le niveau d’intention actuel de la personne (c. à d. si elle souhaite vraiment mourir ou non). • En pareille situation, il est crucial de déterminer la profondeur et la gravité des symptômes liés à l’humeur et du désespoir, ainsi que le degré d’idéation, les méthodes, les plans et les intentions en vue de commettre un suicide. Les outils d’évaluation du risque s’avèrent dans ce cas de vrais alliés pour apprécier la gravité des symptômes et connaître les intentions de la personne. 2) Déterminer si la personne dit la vérité, peu importe qu’elle dise vouloir se suicider ou non. • 28 I Guide d’évaluation du risque de suicide Les motifs qui sous tendent les comportements suicidaires de certaines personnes peuvent être autres que de vouloir mettre fin à leurs jours. Dans ce cas, il est très important de prendre les pensées, plans ou menaces d’automutilation au sérieux, en portant attention aux renseignements qui peuvent refléter un certain niveau de détresse. Section I : Aperçu des principes, des processus et des considérations en matière d’évaluation du risque de suicide • Il faut déterminer s’il y a présence de psychose afin d’établir le lien possible entre des symptômes comme des hallucinations de commandement et l’idéation ou l’intention suicidaire. • La clé pour déterminer le degré d’intention et la motivation de la personne consiste à lui poser des questions sur son avenir. Par exemple, il peut être utile de lui demander si elle a des plans en ce qui concerne ses études, son emploi, ses loisirs ou ses sorties sociales dans les jours ou les semaines à venir afin de déterminer si elle est vraiment à risque de s’enlever la vie. • Les personnes qui cachent leur réel niveau d’intention lors de l’évaluation du risque peuvent être démasquées par les incohérences qui existent entre leur niveau de détresse, leur agitation et la gravité de leurs symptômes, d’une part, et les pensées, intentions et plans qu’elles disent avoir concernant le suicide, d’autre part. – Dans ce cas, l’utilisation d’un outil permettant de faire une brève évaluation qui ne porte pas entièrement sur les intentions suicidaires, mais qui pose des questions sur l’éventualité de commettre un suicide, ainsi que sur d’autres symptômes, comme la dépression ou le désespoir, peut s’avérer utile (par exemple, l’Inventaire de dépression de Beck; Beck, Ward et Mendelson, 1961). Les outils d’observation peuvent également permettre au clinicien de se faire une idée du risque que court la personne en fonction de ses antécédents, de la gravité de ses symptômes actuels, ainsi que de ses idées et comportements actuels, selon ce qu’elle exprime. Voir la section II pour en savoir davantage sur les outils. Dans de nombreux cas, la personne se présente aux urgences accompagnée d’ambulanciers, de policiers, d’un membre de la famille ou d’un ami. Ces personnes doivent être consultées pour qu’elles puissent faire part de leurs avis et observations sur la personne, ainsi que des discussions qu’elles ont eues avec elle. Il faut demander à quiconque amène la personne aux urgences si celle ci a tenu des propos suicidaires ou exprimé le désir de mourir, si elle a déjà tenté de se suicider et si elle présente tout autre signe avant coureur. Guide d’évaluation du risque de suicide I 29 Services de santé mentale Dans les unités de santé mentale, l’évaluation du risque de suicide se fait plus fréquemment que dans tout autre milieu de soins. Que les soins en santé mentale soient prodigués à l’hôpital ou en clinique externe, l’évaluation du risque de suicide est un processus continu et fait partie du processus thérapeutique mené auprès de la personne. Il est essentiel dans ce milieu d’assurer un dépistage initial, une évaluation globale des besoins de soins et une évaluation continue de très grande qualité. Le dépistage initial doit être bref, mais fait avec suffisamment de soin pour détecter les personnes pouvant présenter des signes avant coureurs, surtout lors des points de transition au sein et entre les établissements. Il faut donc mener un processus continu d’évaluation du risque comprenant dépistage, surveillance, intervention et suivi afin de décider des premiers soins à donner et des possibilités thérapeutiques à tenter, de suivre les progrès du traitement et de modifier le niveau de soins, au besoin. Établissements de soins de longue durée Le suicide dans les établissements de soins de longue durée (SLD) est une question que la littérature aborde peu et qui est moins bien comprise. En règle générale, les tentatives de suicide ou les décès par suicide dans ce genre d’établissement sont moins courants que dans les autres milieux de soins, notamment les établissements de santé mentale (Conwell, Pearson et DeRenzo, 1996). Cela dit, un faible taux de suicide ne signifie pas que les personnes en SLD ne vivent pas de détresse ou d’idées suicidaires. On soupçonne plutôt que les facteurs de risque de suicide, comme la maladie mentale, passent souvent inaperçus ou sont sous traités dans ces établissements, et que le faible taux de suicide est plutôt attribuable à l’accès limité des résidents aux moyens létaux et à la plus grande supervision quotidienne dont ils font l’objet (Conwell et coll., 1996; Scocco, Fantoni, Rapattoni et coll., 2009). C’est pourquoi l’évaluation et la surveillance du risque de suicide sont un volet important des soins à prodiguer aux personnes vivant en établissement de SLD. Le désir de mourir, le sentiment d’inutilité ou l’absence de but dans la vie sont fréquemment observés chez certains résidents d’établissements de SLD (Adams-Fryatt, 2010). Une maladie grave ou la perte d’êtres chers peut également amener la personne âgée à vouloir que sa vie se termine, sans toutefois être suicidaire. 30 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section I : Aperçu des principes, des processus et des considérations en matière d’évaluation du risque de suicide Les comportements autodestructeurs indirects sont des gestes qui ne sont pas généralement considérés comme suicidaires, mais qui peuvent tout de même mettre en danger la vie de la personne âgée (Conwell, Pearson et DeRenzo, 1996). Ces gestes sont très nombreux, comme refuser de manger ou de boire, négliger de prendre ses médicaments ou ne pas respecter le traitement recommandé (Brown, Bongar et Cleary, 2004). De tels comportements sont plus souvent observés dans les établissements de SLD, où l’accès à des moyens létaux (p. ex., une arme à feu) est plus limité que dans la communauté. Il y a cependant une importante distinction à faire : ces comportements autodestructeurs découlent ils de l’intention de mourir de la personne ou bien de son droit de refuser les soins offerts dans un milieu qui vient souvent restreindre son autonomie? Dans ce sens, avoir le contrôle sur sa vie et sa mort peut prendre une tout autre signification aux yeux d’un bénéficiaire de SLD. Comme tout type de comportement préjudiciable qui fait qu’une personne risque une mort prématurée, les comportements autodestructeurs indirects et le risque de suicide doivent être évalués de la même façon. Pour ce faire, un premier pas consiste à évaluer le degré d’intention suicidaire d’une personne âgée en normalisant le sentiment de perte d’un sens à la vie. Par exemple, il pourrait être utile de lui demander : « Il arrive que les personnes souffrant des mêmes problèmes de santé que vous trouvent que leur vie n’a plus de sens. Avez vous déjà eu ce sentiment? » D’autres questions semblables ainsi qu’une discussion sur les facteurs de protection de la personne âgée peuvent faciliter l’évaluation du niveau de risque. S’assurer que tous les types de milieux de soins sont sécuritaires Il est essentiel pour les personnes à risque aigu de suicide que les milieux de soins soient sécuritaires et exempts de dangers qui pourraient servir de moyen ou d’aide pour se suicider. Des mesures de sécurité environnementale, ainsi que des politiques et des pratiques exemplaires à cet égard, doivent être mises en place pour empêcher quiconque de causer un préjudice à lui même ou aux autres (Tishler et Reiss, 2009). Aux États Unis, les personnes hospitalisées qui se suicident le font surtout en se pendant ou en sautant d’une fenêtre ou du toit; les pendaisons ont surtout lieu dans les salles de bain (Tishler et Reiss, 2009). Lors d’une étude sur les risques environnementaux présents en milieu de soins menée dans les hôpitaux de santé mentale des anciens combattants américains, on a répertorié jusqu’à 64 dangers par hôpital, soit en moyenne 3 dangers par FAIT : Dangers fréquents dans les milieux de soins : • points d’ancrage dans les murs qui peuvent supporter le poids d’une personne; • équipement pouvant servir d’arme, comme les tiroirs, les cordes, les moulures, les tuiles décollées, les couverts, les sacs-poubelle de plastique, les nettoyants toxiques; • possibilité de fugue d’une unité sécurisée. Guide d’évaluation du risque de suicide I 31 lit (Mills, 2010). Les points d’ancrage dans les murs qui peuvent supporter le poids d’une personne qui tente de s’y pendre représentent le danger le plus courant, suivis de l’équipement pouvant servir d’arme et de risques de fugue des unités sécurisées. Après une évaluation de ces dangers, 90 % ont été éliminés. Les portes et armoires qui offraient près de la moitié des points d’ancrage ont été enlevées ou modifiées. L’étude a également permis de constater que les tiroirs, cordes, moulures, tuiles, couverts et autres petits objets semblables pouvaient servir d’armes facilement accessibles. Bien que moins fréquents, mais ayant un potentiel létal plus élevé, des risques de suffocation ont également été décelés en raison de la présence de sacs-poubelle de plastique et de nettoyants toxiques dans des placards de rangement non verrouillés. Il est manifeste que le coût est toujours un aspect à considérer au moment d’améliorer la sécurité d’un milieu. Cependant, la plupart des dangers cernés, à l’exception des modifications à apporter aux structures comme les portes et les murs, ont été éliminés simplement en les enlevant, en sensibilisant mieux le personnel ou en apportant certaines modifications aux équipements utilisés et accessibles dans les unités de soins. Le milieu de soins doit également offrir en tout temps un climat confortable et thérapeutique, et non autoritaire (Bostwick, 2009). Dans ce sens, il faut faire preuve de sensibilité au moment de retirer les effets personnels d’un patient pouvant représenter un risque à sa sécurité (Lieberman et coll., 2004). Plutôt que de simplement prendre les effets de la personne, il vaut mieux lui expliquer qu’on les lui enlève pour sa sécurité et qu’ils seront gardés en lieu sûr. CONSIDÉRATIONS LIÉES À L’ÉTAPE DE VIE ET AUX EXPÉRIENCES TRAUMATIQUES À l’instar du type de milieu de soins, certaines considérations, comme l’étape de vie et l’orientation sexuelle, peuvent avoir une incidence sur la mise en pratique des principes généraux entourant l’évaluation du risque de suicide. Voici quelques considérations particulièrement en ce qui concerne les jeunes, les personnes âgées, les communautés autochtones, la communauté des gais, lesbiennes, bisexuels et transgenres (GLBT) et le personnel militaire. 32 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section I : Aperçu des principes, des processus et des considérations en matière d’évaluation du risque de suicide Jeunes Pour évaluer le risque de suicide chez les jeunes, il faut adopter certaines approches particulières pour mener l’entrevue d’évaluation de façon à les mettre à l’aise et les rendre ouverts à la discussion. Au moment de poser des questions sur leur désir de mourir, il est tout aussi important de normaliser les pensées ou les sentiments des jeunes pour les encourager davantage à se confier. Une façon de le faire est d’expliquer comment d’autres jeunes ont exprimé certains sentiments (p. ex., leur tristesse ou leur désespoir) en tentant de mourir, puis de demander au jeune si c’est ce qu’il ressent lui. • Il convient mieux de poser des questions directes concernant le « désir de mourir » plutôt que le « désir de commettre un suicide » aux jeunes. Ainsi, il faut demander : « As tu déjà essayé de mourir? », « Quand as-tu essayé de mourir la dernière fois? » et « As tu déjà essayé de te faire mal sans vouloir mourir pour autant? » Par exemple, « Je sais que certains jeunes peuvent se sentir seuls ou blessés et vouloir se faire du mal. Est-ce comment tu te sens? » L’effet de contagion Chez les jeunes, il arrive parfois que plusieurs personnes se suicident au cours d’une période donnée ou au même endroit – en plus grand nombre que celui auquel on pourrait s’attendre au sein d’une certaine communauté (p. ex., plusieurs personnes se suicident dans une école secondaire au cours d’une même année scolaire; CDC, 1998). Ce phénomène illustre l’effet de « contagion », c’est à dire que certaines personnes qui se suicident semblent avoir été influencées ou vouloir imiter le comportement suicidaire d’autres personnes. Les données probantes à l’appui d’un tel effet de contagion ne font pas l’unanimité. Il va sans dire que le climat chargé d’émotions qui suit une épidémie de suicides rehausse la perception d’un effet de contagion (O’Carroll et Mercy, 1990). Les autres facteurs pouvant expliquer l’occurrence d’une série de suicides sont notamment les facteurs de risque de chaque individu devant un événement malheureux imprévu, ainsi que les amitiés qui sont exposées au même niveau extrême de stress (Anestis, 2009). Parfois, un suicide dans la communauté ou le suicide d’une célébrité fera l’objet d’une couverture médiatique qui ajoute un aspect romantique ou dramatique des décès par suicide (Sudak et Sudak, 2005). Les données probantes concernant l’influence d’une telle couverture médiatique sur le taux de suicide des jeunes vulnérables sont aussi controversées, bien que l’effet de contagion demeure un sujet de préoccupation (CDC, 1998). Guide d’évaluation du risque de suicide I 33 Lorsqu’une épidémie de suicides est soupçonnée au sein d’une communauté, les Centers for Disease Control and Prevention recommandent l’élaboration d’un plan d’intervention communautaire en vue de prévenir d’autres suicides et de contenir le phénomène (aller à http://www.cdc.gov/mmwr/preview/ mmwrhtml/00001755.htm). Puisqu’il existe certaines preuves selon lesquelles une hausse du comportement suicidaire de membres de la famille soit liée à la hausse de décès par suicide chez les jeunes (Ali, Dwyer et Rizzo, 2011), les cliniciens doivent prendre en considération : • • • FaIt : À l’échelle mondiale, les hommes et les femmes de plus de 74 ans présentent le taux de décès par suicide le plus élevé (OMS, 2005); cependant, les hommes de plus de le fait que le jeune connaît ou non quelqu’un qui a envisagé ou tenté de se suicider ou qui est mort par suicide; la récence de cet événement; la façon dont le jeune gère la situation. Quant aux facteurs de risque et aux signes avant coureurs propres aux jeunes, il est important de savoir s’il y a une augmentation de l’impulsivité, surtout lorsque d’autres facteurs de risque ou signes avant coureurs sont présents (p. ex., antécédents d’abus, conflit avec la famille ou le soignant, désespoir) (Kutcher et Chehil, 2007). L’idéation suicidaire chez le jeune est également liée à sa victimisation en situation d’intimidation, à sa capacité d’exprimer ses sentiments, au piètre lien d’attachement à ses parents ou tuteurs ainsi qu’à la présence de pairs affichant un comportement déviant (Peter, Roberts et Buzdugan, 2008). Il est tout aussi important de demander au jeune et à sa famille s’il a accès à des moyens létaux à la maison, comme des armes de chasse, des points d’ancrage ou des substances toxiques. Personnes âgées 84 ans ont le plus haut taux de suicide de tous les groupes d’âge (Coalition canadienne pour la santé mentale des personnes âgées [CCSMPA], 2006). Par rapport aux jeunes adultes, les personnes âgées qui ont des idées suicidaires sont beaucoup moins enclines à chercher de l’aide auprès des centres de prévention du suicide, des lignes d’écoute téléphonique ou d’autres types de services en santé mentale (Glass et Reed, 1993). 34 I Guide d’évaluation du risque de suicide Les personnes âgées qui consultent un médecin avant leur suicide ont tendance à lui faire part de leurs symptômes somatiques (p. ex., insomnie, perte de poids, etc.) ou de leur désespoir, mais ne livrent habituellement pas leurs pensées suicidaires à moins d’être directement questionnées à ce sujet. Waern et coll. (1999) indiquent que les trois quarts des personnes âgées mortes par suicide ont parlé à des parents ou amis de leurs idées suicidaires au cours de l’année précédant l’acte, mais seulement un tiers en a discuté avec un professionnel de la santé. Section I : Aperçu des principes, des processus et des considérations en matière d’évaluation du risque de suicide La Coalition canadienne pour la santé mentale des personnes âgées (CCSMPA) a élaboré un guide intitulé « Suicide : évaluation et prévention chez la personne âgée » qui donne un aperçu des questions précises à examiner chez les aînés (Heisel et coll., 2006). Ce guide insiste également sur le fait que les personnes âgées peuvent minimiser ou sous estimer les facteurs de risque ou les pensées liées au suicide, et qu’elles présentent souvent des symptômes somatiques (p. ex., douleur non soulagée, trouble du sommeil). Une surveillance continue est recommandée en raison des variations de l’expression et de la gravité des pensées suicidaires chez les personnes âgées. L’évaluation du risque de suicide chez les personnes âgées exige à la fois l’établissement d’une relation thérapeutique et une formation psychométrique particulière avant de pouvoir utiliser les outils appropriés pour ce faire. Ainsi, on s’assure que l’évaluation est menée avec professionnalisme dans un milieu chaleureux et empathique. L’utilisation inadéquate d’un outil – par exemple, le fait d’utiliser une liste de contrôle en l’absence d’une relation thérapeutique – peut renforcer la sous estimation du risque de suicide au sein de cette population (Heisel et Duberstein, 2005). Durant le processus d’évaluation, il est également important pour les professionnels d’éviter d’adopter une « attitude moraliste ou une aversion au suicide » afin d’encourager l’ouverture du dialogue en la personne âgée et l’évaluateur (Heisel et coll., 2006, p. 568). Communautés autochtones FAIT : Les personnes âgées ont tendance à : • minimiser ou sous estimer les facteurs de risque ou les pensées liés au suicide; • faire état de symptômes somatiques ou de désespoir; • ne pas parler de leurs pensées suicidaires à moins d’être directement questionnées; • avoir parlé de leurs idées suicidaires à leurs familles ou amis avant de faire une tentative. FAIT : Selon le gouvernement du Canada (2006), le taux de suicide au sein des On croit à tort que le taux de suicide est le même dans toutes les communautés autochtones. Les statistiques globales indiquent que, au Canada, le taux de suicide est supérieur au sein des communautés autochtones que dans le reste de la population. Selon le gouvernement du Canada (2006), le taux de suicide au sein des communautés autochtones du Canada était de 24 sur 100 000 habitants en 2000, alors que le taux au sein de la population en général était de 12 sur 100 000 habitants. Les communautés inuites du Nunavut ont connu une hausse dramatique du taux de suicide au cours des 25 dernières années, lequel est passé d’environ 35 sur 100 000 habitants en 1981 à près de 120 sur 100 000 habitants en 2007 ( ou NSPSWG, 2010). Cependant, même si certaines communautés autochtones affichent un taux très élevé de suicide, il est important de reconnaître le fait que le suicide n’est pas un phénomène ayant la même ampleur dans toutes ces communautés (Bagley, Wood et Khumar, 1990; Bohn, 2003). En Colombie Britannique, par exemple, Chandler communautés autochtones du Canada était de 24 sur 100 000 habitants en 2000, alors que le taux au sein de la population en général était de 12 sur 100 000 habitants. FAIT : Dans cette population, certains signes avant-coureurs peuvent découler d’expériences personnelles traumatiques ou d’un traumatisme multigénérationnel. Guide d’évaluation du risque de suicide I 35 et Lalonde (1998) font état d’un taux de suicide aussi élevé que 800 fois la moyenne nationale chez les jeunes dans certaines communautés autochtones. À l’opposé, dans d’autres communautés autochtones, ce taux se situe tout près de 0. Le suicide ne peut donc pas être considéré comme uniforme dans toutes les communautés autochtones et inuites. Il faut plutôt comprendre les facteurs sociaux et culturels propres à chaque communauté, en plus des facteurs propres à chaque personne, au moment d’évaluer le risque de suicide. Chez les personnes autochtones, les facteurs pouvant influer sur le risque de suicide sont notamment les facteurs personnels et socioculturels, et ils doivent être pris en considération lors de l’évaluation du risque et la planification de l’intervention. Bon nombre des signes avant coureurs décrits aux sections précédentes se retrouvent également chez les peuples autochtones. Toutefois, la cause profonde du risque de suicide d’une personne est souvent liée à la colonisation, aux événements historiques et aux traumatismes intergénérationnels. Les signes avant-coureurs précis qu’il faut examiner chez la personne sont notamment une piètre estime de soi et un sentiment d’inutilité, une perte d’identité, la consommation d’alcool et de drogues, la consommation occasionnelle excessive d’alcool, l’isolement social, le désespoir, des sentiments de colère et de rage, ainsi que le sentiment d’un malaise social et d’une perte de lien à la communauté. La présence de l’un ou l’autre de ces facteurs, et surtout de plusieurs, chez une personne peut indiquer un risque accru de suicide. L’un des facteurs socioculturels de risque potentialisateurs significatif au sein des peuples autochtones du Canada est la continuité culturelle (Chandler et Lalonde, 1995; Chandler et Lalonde, 2004). Cette continuité culturelle doit s’ajouter aux facteurs de risque, aux signes avant-coureurs et aux facteurs de protection de toute personne d’origine autochtone. Continuité culturelle Par continuité culturelle, on entend le processus de maintenir ou de préserver pour l’avenir l’appartenance aux traditions, systèmes de croyances et culture du passé. Ce sentiment d’appartenance ou de connexion se perd et l’identité culturelle s’effrite lorsque le développement ou la situation socioculturelle viennent miner ou interrompre la continuité entre le passé, le présent et l’avenir. 36 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section I : Aperçu des principes, des processus et des considérations en matière d’évaluation du risque de suicide L’établissement des pensionnats, qui ont existé de la moitié des années 1800 jusqu’à tout récemment (1996) donne un triste exemple de la façon dont la continuité culturelle peut être fracturée (Affaires indiennes et du Nord Canada [AINC], 1998). À l’instauration de ce système, les enfants autochtones étaient retirés de leur famille et de leur communauté pour assurer leur assimilation (Fondation autochtone de guérison, 2002; AINC, 1998). Dans le même ordre d’idées, les politiques adoptées par le gouvernement canadien à la suite de la Seconde Guerre mondiale obligeaient les Inuits à délaisser leurs campements saisonniers traditionnels pour s’installer dans de nouvelles communautés fondées sur des valeurs, une éducation, une gouvernance et des lois non inuites (NSPSWG, 2010). Ainsi déconnectés de leur patrimoine et sans moyens d’exprimer leur culture, beaucoup d’Autochtones et d’Inuits retiennent de ces expériences un sentiment de solitude extrême, d’abandon, de perte culturelle, de manque de respect de soi et de dignité, et vivent des problèmes dans leurs relations personnelles. Lors du processus d’évaluation du risque, il est important d’examiner le cadre communautaire et la continuité culturelle de la personne. Les communautés exemptes d’un fort sentiment d’appartenance à la culture et à l’identité historique ne sont pas en mesure d’offrir des ressources aux membres vulnérables pour les aider à surmonter les périodes difficiles de confusion et de déconnexion identitaires (Chandler et Lalonde, 1995). C’est donc dire que la nature protectrice d’une communauté solidaire peut être absente dans les communautés ayant vécu une fracture de la continuité culturelle. Il est aussi important de reconnaître le fait qu’une continuité culturelle n’est pas absente dans toutes les communautés autochtones. Les mesures que certaines d’entre elles ont prises pour rétablir ou renforcer cette continuité culturelle parviennent réellement à protéger leurs membres du risque de suicide. Par exemple, les communautés autochtones de la Colombie Britannique qui ont déployé des efforts pour se réapproprier légalement leurs terres ancestrales, rétablir leur autonomie gouvernementale, reprendre le contrôle de l’éducation et des autres services sociaux et communautaires, ainsi que préserver et promouvoir les pratiques culturelles traditionnelles affichent le plus bas taux de suicide des communautés autochtones, surtout par rapport à celles qui n’ont pas pris de telles mesures (Chandler et Lalonde, 1998). Par conséquent, il est important d’essayer de faire participer à l’évaluation du risque des membres de la communauté ou d’autres personnes qui connaissent la communauté et le cadre culturels de la personne. Les entrevues menées auprès d’experts ont révélé que des programmes comme l’Aboriginal Suicide Guide d’évaluation du risque de suicide I 37 Critical Incidence Response Team (ASCIRT) de la Inter-Tribal Health Authority, programme s’adressant à 29 nations membres dans toute l’île de Vancouver et certaines régions de la côte de la Colombie Britannique (www. intertribalhealth.ca), facilitent l’enseignement des valeurs traditionnelles aux communautés autochtones et leur donnent le pouvoir d’établir des ressources communautaires, ainsi que de reconnaître et aborder la question des risques en tant que responsabilité communautaire. Les non-membres des communautés autochtones qui prennent part à l’évaluation du risque de suicide de personnes appartenant à ces communautés doivent consulter les professionnels des programmes comme l’ASCIRT afin de tenir compte du contexte culturel et communautaire dans lequel vit la personne. L’orientation de la personne n’est pas en soi la cause profonde du risque de suicide. Communauté des gais, lesbiennes, bisexuels et transgenres (GLBT) Il est essentiel de reconnaître l’importance et l’incidence de certaines expériences de vie, comme les railleries, la discrimination, le harcèlement, la marginalisation et la victimisation des personnes de la communauté des GLBT lors de l’évaluation du risque de suicide. FAIT : • Selon Hatzenbuelher (2011) : – les jeunes GLB (soit plus de 31 000 étudiants de 11e année) étaient beaucoup plus susceptibles de tenter de se suicider que les jeunes hétérosexuels (21,5 % par rapport à 4,2 %); – parmi les jeunes GLB, le risque de tentative de suicide était 20 % supérieur dans un milieu non favorable que dans un milieu favorable. • O’Donnell, Meyer et Schwartz (2011) ont constaté que le risque de suicide était encore plus élevé chez les jeunes GLB issus d’un groupe ethnique ou minoritaire que chez les jeunes GLB blancs. 38 I Guide d’évaluation du risque de suicide Il faut également comprendre que l’orientation sexuelle de la personne n’est pas la cause profonde du risque de suicide. Ce risque découle plutôt de la détresse causée par des expériences traumatiques externes, allant de la négligence ou de l’exclusion des parents à la discrimination publique et au harcèlement. Il est essentiel d’adopter une approche d’évaluation ayant recours à la compréhension, à l’empathie et à une attitude exempte de jugements qui respecte la vie privée de la personne. Personnel militaire Les personnes ayant déjà servi dans les forces armées peuvent avoir vécu des expériences traumatiques ou développé d’autres problèmes de santé mentale qui peuvent contribuer au risque de suicide. La prévalence à vie du risque de tentatives de suicide parmi les militaires canadiens actifs est évaluée à 2,2 % pour les hommes et à 5,6 % pour les femmes (Belik, Stein, Asmundson et Sareen, 2009). Selon des études récentes, les idées suicidaires des militaires et des civils ne présentaient aucune différence au cours de l’année précédant l’étude, alors que la prévalence des tentatives de suicide est moindre chez le personnel militaire que chez les civils (Belik, Stein, Asmundson et Sareen, 2010). Section I : Aperçu des principes, des processus et des considérations en matière d’évaluation du risque de suicide Cependant, certains facteurs de risque et signes avant coureurs particuliers doivent être recherchés chez le personnel militaire. Une fois la maladie mentale et les facteurs sociodémographiques contrôlés, ce sont les traumatismes interpersonnels (p. ex., viol, agression sexuelle, violence physique et psychologique) qui ont un lien significatif avec le risque de suicide des militaires (Belik et coll., 2009). Bien que bon nombre des facteurs de risque et des signes avant coureurs soient semblables à ceux des civils, certains facteurs de risque professionnels doivent être pris en considération chez le personnel militaire actif, notamment : • l’accès à des moyens létaux; • le moment où le militaire fait son quart de travail ou est en service (quart du matin, quart de nuit); • le changement récent de l’état de service pour des raisons médicales (déclassement médical; Mahon et coll., 2005). L’évaluation du risque de suicide chez le personnel militaire doit tenir compte de l’incidence des expériences traumatiques qui peuvent ou non être liées à leur service militaire, ainsi que de certains aspects de l’état de service de la personne. Les cliniciens prenant part au processus de déclassement médical doivent être particulièrement vigilants et surveiller le risque chez une personne qui vit une telle transition. Guide d’évaluation du risque de suicide I 39 Section II Inventaire des outils d’évaluation du risque de suicide PA R T E N A I R E Section II: Inventaire des outils d’évaluation du risque de suicide Les outils d’évaluation ne sont qu’un des aspects du processus d’évaluation du risque de suicide. Ils doivent servir à éclairer, et non à remplacer, le jugement clinique. Ces outils doivent être utilisés lors de l’entrevue clinique et seulement après qu’une relation thérapeutique a été établie. Contenu de la section 1. L’utilisation des outils d’évaluation du risque de suicide • Les considérations techniques à examiner pour choisir les outils d’évaluation du risque de suicide 2. L’inventaire des outils d’évaluation du risque • • • Un résumé critique de 15 outils d’évaluation du risque de suicide cernés lors de l’analyse documentaire et les entrevues Un tableau facile à consulter décrivant les caractéristiques de chaque outil (voir le tableau 2, page 58) Des renseignements sur le ou les auteurs et le droit d’auteur de chacune des échelles d’évaluation du risque de suicide présentées (voir le tableau 3, page 59) 3. L’évaluation et l’utilisation des outils d’évaluation du risque • Les difficultés liées aux outils d’évaluation du risque • L’utilisation possible des résultats générés par les outils d’évaluation du risque Guide d’évaluation du risque de suicide I 41 1. L’utilisation des outils d’évaluation du risque de suicide L’évaluation du risque de suicide est manifestement un processus complexe qui nécessite la prise en considération d’une multitude de facteurs et de contextes. L’expérience clinique est un atout pour quiconque prend part à ce processus parce que, ultimement, la détermination du risque relève d’une décision clinique. Cela dit, un certain nombre d’outils ont été conçus pour faciliter le processus d’évaluation du risque de suicide. Ces outils doivent donc être considérés comme un des aspects du processus qui éclaire le jugement clinique du risque sans toutefois s’y substituer (Barker et Barker, 2005). Le recours à des outils dans le cadre du processus d’évaluation du risque doit permettre à l’évaluation de rester centrée sur la personne et être intégrée à l’entrevue clinique; ces outils peuvent être utilisés lorsqu’une relation thérapeutique est établie. Définition Les propriétés psychométriques sont des propriétés statistiques qui précisent la qualité de conception d’un outil. CONSIDÉRATIONS TECHNIQUES POUR CHOISIR LES OUTILS D’ÉVALUATION DU RISQUE DE SUICIDE Il y a de nombreux facteurs à prendre en considération au moment d’apprécier la pertinence des outils d’évaluation du risque. Ainsi, il faut connaître les propriétés psychométriques des outils, ainsi que les autres aspects techniques qui donnent une idée de leur utilité. La fiabilité et la validité, entre autres, sont des propriétés à examiner et à considérer pour savoir si les données que fournira l’outil d’évaluation sont dignes de foi, significatives et utiles. L’encadré 4 donne une brève description des principaux critères psychométriques et techniques servant à évaluer les outils d’évaluation du risque. 42 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section II: Inventaire des outils d’évaluation du risque de suicide Encadré 4. Considérations psychométriques et techniques en vue d’évaluer les outils d’évaluation du risque de suicide Corrélation Ampleur d’une association entre variables (p. ex., notes accordées par l’outil) qui fait en sorte que les valeurs d’une variable changent lorsque celles d’une autre variable changent. Une corrélation va de -1,0 à 1,0. Plus la note est près du -1,0 ou du 1,0, plus le lien entre les variables est fort. Les corrélations négatives signifient que la valeur d’une variable augmente à mesure que la valeur de l’autre variable diminue. La corrélation est souvent utilisée dans le processus de validation au moment de déterminer dans quelle mesure la note accordée par un outil est liée à d’autres indicateurs de risque de suicide ou de détresse. Fiabilité Mesure dans laquelle un outil d’évaluation du risque produira des résultats cohérents (p. ex., cohérence interne) à diverses périodes (p. ex., coefficient test-retest) ou lorsqu’il est utilisé par divers évaluateurs (p. ex., coefficient d’objectivité). Le coefficient alpha de Cronbach (ou α) est une statistique souvent obtenue pour la cohérence interne. Comme une corrélation, cette donnée va de 0 à 1,0. Une note plus élevée indique que les éléments mesurent de façon constante le concept d’intérêt. En règle générale, une note de 0,7 ou plus indique une bonne fiabilité. Validité Mesure dans laquelle un outil d’évaluation du risque mesurera ce qu’il doit mesurer ou prévoir dans l’avenir. La validité convergente, concourante et conceptuelle s’établit en examinant la corrélation entre la note d’un outil et celle d’autres instruments, les mesures ou les facteurs déjà connus afin de mesurer ou d’indiquer le concept d’intérêt (p. ex., l’outil d’évaluation du risque de suicide doit corréler avec des instruments reconnus pour mesurer le risque de suicide ou les facteurs liés au risque de suicide comme la dépression grave). La validité apparente s’établit lorsque le contenu de l’instrument correspond à la théorie acceptée ou aux dimensions cliniques du concept d’intérêt. La validité prédictive concerne la mesure dans laquelle la note accordée par un outil d’évaluation du risque de suicide peut prévoir le comportement futur. Sensibilité Un aspect de la validité, la sensibilité d’un outil d’évaluation du risque est la capacité de l’instrument à cerner correctement les personnes qui sont à risque. Spécificité Un aspect de la validité, la spécificité d’un outil d’évaluation du risque est la capacité de l’instrument à cerner correctement les personnes qui ne sont pas à risque. Analyse des facteurs Démarche statistique pouvant servir à analyser les interrelations parmi un grand nombre d’éléments contenus dans l’outil, puis à expliquer ces liens en ce qui concerne leurs dimensions (facteurs) sous jacentes communes. Généralement, cette analyse est menée afin de déterminer comment les éléments d’un instrument mesurent un facteur semblable. Guide d’évaluation du risque de suicide I 43 Scores seuils Le score seuil est la note minimale indiquant le niveau de risque qui peut être accordée par un instrument d’évaluation. L’obtention d’un score élevé, par exemple, peut indiquer un risque plus élevé de suicide. Il convient de noter que tous les scores seuils n’ont pas été validés dans l’ensemble des populations et milieux, et que leur utilisation peut entraîner un plus grand nombre de faux négatifs (c. à d. étiqueter incorrectement une personne non à risque de suicide). Pour fixer un score seuil permettant de déterminer le risque élevé de suicide, il faut la preuve d’une solide sensibilité et d’une solide spécificité, comme mentionné plus haut. Modes de passation Il existe plusieurs approches d’évaluation du risque, comme la conduite d’une entrevue clinique ou la réponse à un questionnaire d’autoévaluation. L’autoévaluation offre certains avantages, comme la possibilité de faire un dépistage avant une visite, surtout dans un milieu de soins primaires ou de faire une pause au cours de l’entrevue clinique, et elle donne aussi la possibilité de corroborer les résultats. Toutefois, elle a certains inconvénients, notamment le risque que la personne perçoive un désengagement de la part de l’évaluateur, ainsi que la nature impersonnelle d’un questionnaire. FAIT : L’évaluation des symptômes renvoie à l’utilisation d’un outil pour déceler la présence de symptômes ou de conditions précis qui sont connus pour être liés aux facteurs de risque ou aux signes avant coureurs de suicide (p. ex., Échelle de désespoir de Beck). Les outils qui évaluent les facteurs de 2. L’inventaire des outils d’évaluation du risque de suicide OUTILS D’ÉVALUATION DU RISQUE DE SUICIDE COURAMMENT UTILISÉS Cette section présente (en ordre alphabétique) un résumé critique de 15 des outils d’évaluation du risque de suicide les plus souvent utilisés. Ces outils portent sur divers aspects, allant de l’évaluation des symptômes (p. ex., le désespoir) aux facteurs de résilience (p. ex., les raisons de vivre). résilience permettent de déterminer la motivation de la personne ou sa détermination de vivre ou mourir (p. ex., Inventaire des raisons de vivre). Certains Bien que non exhaustive, la liste des outils d’évaluation du risque de suicide se fonde sur les recommandations émanant de la littérature et des entrevues avec les experts. Voir le résumé des outils d’évaluation fourni en référence à l’annexe H. outils permettent à la fois d’évaluer les symptômes et les facteurs de résilience. 44 I Guide d’évaluation du risque de suicide IL EST RECOMMANDÉ DE SUIVRE UNE FORMATION SUR L’UTILISATION DE CHACUN DES OUTILS D’ÉVALUATION DU RISQUE DE SUICIDE. Section II: Inventaire des outils d’évaluation du risque de suicide LES ÉCHELLES Échelle de désespoir de Beck (Beck Hopelessness Scale ou BHS) Éléments mesurés L’Échelle de désespoir de Beck (BHS; Beck et Steer, 1988) a été conçue pour mesurer les attitudes négatives concernant l’avenir d’une personne et son incapacité perçue d’éviter les événements négatifs de la vie. Format Vingt questions vrai ou faux permettent de mesurer trois aspects du désespoir : • • • les sentiments négatifs envers l’avenir; la perte de motivation; les attentes pessimistes. Chacune des 20 questions reçoit un score de 0 ou 1. Le score total est calculé en additionnant les réponses pessimistes à chacune des 20 questions, et plus le score est élevé, plus le désespoir est grand. Le score seuil indiqué pour la BHS est 9 (Beck, Steer et al., 1985). Milieu et population ciblés La BHS peut être utilisée pour les patients psychiatriques et non psychiatriques (population en général), ainsi que pour les personnes âgées (Neufeld et coll., 2010). Elle peut être utilisée en médecine légale, où un score seuil de 5 a été donné au risque de suicide (McMillan et coll., 2007). Propriétés psychométriques Les notes obtenues par la BHS se sont avérées fiables, et les notes relatives à la cohérence interne, selon le coefficient alpha de Chronbach, vont de α = 0,82 à α = 0,93 chez les groupes de personnes souffrant de maladie mentale (Beck et Steer, 1988) ou à α = .0,88 chez les patients non psychiatriques (Steed, 2001). Après avoir comparé les notes de la BHS à l’évaluation clinique du désespoir, on a constaté des corrélations modérées entre les réponses des deux évaluations dans un groupe de patients en médecine générale (r = 0,74) et dans un groupe de personnes ayant tenté de se suicider (r = 0,62) (Beck et coll., 1974). Autres considérations On estime que la BHS serait un bon outil d’évaluation initiale afin d’identifier les personnes qui ont besoin d’une évaluation clinique du risque de suicide plus complète (McMillan et coll., 2007). L’utilisation de la BHS n’est pas conseillée pour identifier les personnes à très haut risque d’automutilation non suicidaire répétée, ni pour mener une évaluation aux urgences (Cochrane-Brink et coll., 2000). Guide d’évaluation du risque de suicide I 45 Échelle d’idéation suicidaire de Beck (Beck Scale for Suicide Ideation ou BSS®) Éléments mesurés L’échelle d’idéation suicidaire de Beck (BSS®: Beck et al., 1979) mesure l’intensité actuelle et immédiate des attitudes, comportements et plans suicidaires dénotant une intention de mettre fin à leur jour chez les patients psychiatriques. Format L’échelle comprend 21 éléments qui sont notés sur une échelle d’intensité suicidaire de 3 points (p. ex., de 0 à 2). Les cinq premiers éléments sont des questions de dépistage qui permettent d’évaluer le désir du patient de vivre ou de mourir, y compris le désir d’attenter à ses jours. Si une idéation suicidaire active ou passive est observée, les autres questions sont posées afin d’évaluer la durée et la fréquence de cette idéation, ainsi que la somme de préparation liée à la tentative de suicide envisagée. Deux éléments permettent d’évaluer les comportements suicidaires antérieurs. L’utilisation de la BSS® exige une formation et des qualifications professionnelles particulières. Consulter l’éditeur pour de plus amples renseignements sur la formation à suivre (http://www.pearsonassessments.com). Milieu et population cibles La BSS® a été validée auprès d’un certain nombre de populations, y compris les patients psychiatriques hospitalisés et suivis en clinique externe, les patients en soins primaires, les patients aux urgences, les adolescents, les étudiants universitaires et les personnes âgées (Beck et coll., 1985; Beck et coll., 1997; Clum et Curtin, 1993; Holi et coll., 2005; Mireault et de Man, 1996). Propriétés psychométriques La BSS® indique une cohérence interne modérément élevée, avec des coefficients alpha de Cronbach allant de α = 0,84 à α = 0,89. Les réponses à la BSS® ont été étroitement liées à celles de l’inventaire de dépression de Beck et l’échelle de dépression de Hamilton (Brown, 2002). La BSS® figure parmi les quelques outils d’évaluation qui ont documenté une validité prédictive des décès par suicide. Dans le cadre d’une étude prospective échelonnée sur 20 ans, les patients considérés à risque élevé étaient sept fois plus susceptibles de mourir par suicide que les patients considérés à moindre risque (Brown et coll., 2000). Cependant, la validité prédictive de la BSS® pour le risque aigu de suicide n’est pas mentionnée dans la littérature. Autres considérations La BSS® est l’une des mesures les plus utilisées pour évaluer l’idéation suicidaire et a fait l’objet de nombreuses études. Elle s’avère en mesure de faire une distinction entre les adultes et les adolescents avec et sans antécédents suicidaires (Holi et coll., 2005; Mann et coll., 1999). De plus, elle a été traduite en plusieurs langues, dont le français (de Man et coll., 1987), le norvégien (Chioqueta et Stiles, 2006), le chinois (Zhang et Brown, 2007) et l’urdu (Ayub, 2008). La BSS® peut être utilisée par un clinicien ou par le patient même, et être remplie à l’aide d’un papier et d’un crayon ou à l’ordinateur (Chioqueta et Stiles, 2006). L’analyse des facteurs de l’échelle révèle diverses dimensions de la suicidalité, selon la population étudiée et les méthodes d’analyse employées. L’analyse des facteurs originale portait sur trois facteurs : le désir suicidaire actif, le désir suicidaire passif et la préparation (Beck et coll., 1979). Dernièrement, un modèle à deux facteurs, soit la motivation (p. ex., désirs, raisons, souhaits) et la préparation (p. ex., planification et passage à l’action), a été utilisé auprès d’un groupe de femmes ayant tenté de se suicider (Holden et DeLisle, 2005). 46 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section II: Inventaire des outils d’évaluation du risque de suicide Échelle Columbia de la gravité du risque de suicide (Columbia-Suicide Severity Rating Scale ou C-SSRS) Éléments mesurés L’échelle Columbia de la gravité du risque de suicide (C-SSRS; Posner et coll., 2008) évalue une foule d’idées et de comportements suicidaires, ainsi que l’intensité de l’idéation suicidaire. Une formation est nécessaire pour utiliser le C-SSRS. Format Il s’agit d’un questionnaire conçu pour servir à la recherche sur les médicaments dans le cadre d’essais cliniques, mais il peut également être utilisé en pratique clinique. Milieu et population cibles Trois versions de la C-SSRS sont utilisées en pratique clinique afin d’optimiser la sécurité et la prise en charge des patients, ainsi que de surveiller l’amélioration ou la détérioration de la suicidalité. • La version À vie/maintenant (Lifetime/Recent) permet de recueillir des données sur les antécédents de suicidalité à vie, ainsi que sur les idées ou comportements suicidaires récents. L’utilisation de cette version convient lors de la première entrevue avec la personne. • La version Depuis la dernière visite (Since Last Visit) examine de manière prospective les comportements suicidaires depuis la dernière visite de la personne ou la dernière fois que la C-SSRS a été utilisée auprès de la personne. • La version Évaluation du risque (Risk Assessment) est conçue pour les établissements de soins de courte durée puisqu’elle permet d’établir le risque de suicide immédiat de la personne. Les idées ou comportements suicidaires de la dernière semaine et de toute la vie sont évalués au moyen d’une liste de contrôle des facteurs de risque et de protection en matière de suicidalité. Mundt et coll. (2010) ont mis à l’essai et validé une version informatisée de la C-SSRS et ont constaté qu’elle présentait une bonne corrélation avec l’Échelle d’idéation suicidaire de Beck (r = 0,61). Autres considérations Aucune donnée concernant la fiabilité et la validité de la C-SSRS n’était disponible au moment de la publication du présent guide. Guide d’évaluation du risque de suicide I 47 Échelle d’idéation suicidaire gériatrique (Geriatric Suicide Ideation Scale ou GSIS) Éléments mesurés L’échelle d’idéation suicidaire gériatrique (GSIS; Heisel et Flett, 2006) permet une mesure multidimensionnelle de l’idéation suicidaire chez les personnes âgées. Format La GSIS se compose de 31 questions, et les scores obtenus vont de 31 à 165. Les participants répondent selon une échelle de Likert de 5 points, allant de fortement en désaccord (1) à fortement d’accord (5). La GSIS a d’abord été validée auprès des personnes âgées de plus de 64 ans résidant en établissement et dans la communauté (Heisel et Flett, 2006). La GSIS mesure quatre facteurs, soit : • • • • l’idéation suicidaire (p. ex., « Je veux mettre fin à ma vie »); le sens donné à la vie (p. ex., « Je tiens beaucoup à la vie », et vice versa); la perte d’une utilité personnelle et sociale (p. ex., « Je me sens habituellement assez inutile »); l’idéation de la mort (p. ex., « Je souhaite souvent mourir dans mon sommeil »); et un élément supplémentaire (p. ex., « J’ai déjà essayé de m’enlever la vie »). Milieu et population cibles Personnes âgées. Propriétés psychométriques La fiabilité test-retest des réponses données par un échantillon de 32 résidents de maisons de soins infirmiers est de r = 0,86 (1 ou 2 mois entre les points de mesure), alors qu’il est de r = 0,77 pour un échantillon de 13 résidents de maisons de soins infirmiers (1 ou 1,5 an entre les points de mesure; Heisel et Flett, 2006). Le coefficient alpha de Cronbach des réponses à la GSIS (α = 0,90) et à ses sous échelles (0,74 ≤ α ≤ 0,86) laisse entrevoir une cohérence interne acceptable ou bonne (Heisel et Flett, 2006). Les réponses à la GSIS ont démontré une forte validité concourante par rapport à l’échelle d’idéation suicidaire de Beck (r = 0,62) et à l’échelle de dépression gériatrique (r = 0,77; Heisel, Flett, Duberstein et Lyness, 2005). Parmi ses autres caractéristiques positives, mentionnons sa sensibilité à l’idéation suicidaire dans une foule d’échelles de fonctionnement et de sous échelles qui portent sur les facteurs de mésadaptation et de protection. 48 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section II: Inventaire des outils d’évaluation du risque de suicide Échelle interRAI de la gravité du comportement autodestructeur (interRAI Severity of Self-harm Scale ou interRAI SOS) Éléments mesurés L’échelle interRAI de la gravité du comportement autodestructeur (interRAI SOS) mesure le risque d’autodestruction (suicide ou automutilation) en fonction des idées, plans et comportements suicidaires passés et présents, ainsi que des indicateurs de dépression ou de désespoir, des symptômes positifs, du fonctionnement cognitif et des inquiétudes de la famille quant à la sécurité de la personne. L’interRAI SOS utilise un algorithme de classification hiérarchique qui donne des scores allant de 0 (aucun risque) à 6 (risque extrême ou imminent). Les personnes qui obtiennent un score très élevé (6 ou risque extrême) sont notamment celles qui, selon les observations de la personne ou les confidences qu’elle a faites, ont eu des idées suicidaires au cours des 24 à 76 dernières heures, ont déjà fait une tentative de suicide et présentent actuellement un grand nombre de symptômes dépressifs. Format: L’interRAI SOS est une échelle intégrée à trois instruments d’évaluation d’interRAI utilisés dans les établissements de santé mentale, soit l’interRAI Mental Health, l’interRAI Community Mental Health et l’interRAI Emergency Screener for Psychiatry (www.interrai.org). L’interRAI Mental Health (interRAI MH) est un système d’évaluation qui comprend des données sur les caractéristiques sociodémographiques de la personne, des indicateurs de son état de santé physique et mentale, ses habitudes de consommation de drogues, ses comportements agressifs et perturbateurs, les blessures auto-infligées et infligées aux autres, les diagnostics, son rendement cognitif, son fonctionnement dans la vie de tous les jours, ses relations sociales et familiales, son fonctionnement au travail et son utilisation des services (Hirdes et coll., 2000). Compatible à l’interRAI MH, l’interRAI Community Mental Health (interRAI CMH) est un instrument conçu pour les personnes recevant des services externes en santé mentale. Environ 60 % des questions de l’interRAI CMH se retrouvent également dans l’interRAI MH, tandis que les autres visent à aborder les questions qui ont une pertinence particulière pour les services communautaires en santé mentale (p. ex., les questions financières, la toxicomanie plus en détail, des problèmes avec la justice pénale, etc.). Enfin, l’interRAI Emergency Screener for Psychiatry (interRAI ESP) est un instrument de dépistage simple qui comporte des questions tirées de l’interRAI MH et de l’interRAI CMH afin d’évaluer aux urgences la capacité de la personne de prendre soin d’elle et le risque qu’elle s’inflige des blessures ou qu’elle blesse d’autres personnes. Les interRAI MH et CMH sont remplis à l’admission, puis à tous les 90 jours, dès que l’état du patient change et au départ de l’hôpital. De son côté, l’interRAI ESP est rempli dans les 24 heures suivant l’arrivée d’une personne dans un établissement d’urgence en santé mentale. Chacune de ces évaluations est effectuée par l’équipe des soins cliniques à partir d’observation et après consultation des autres membres de l’équipe, de la famille et de la personne. Les interRAI MH et CMH reposent sur une période d’observation de trois jours, alors que l’interRAI ESP se limite à une période d’observation de 24 heures. Milieu et population cibles Adultes hospitalisés, adultes dans la communauté et établissements d’urgence en santé mentale. Propriétés psychométriques L’interRAI MH démontre un bon coefficient d’objectivité, avec un degré d’accord moyen sur les scores obtenus de plus de 80 % entre évaluateurs (Hirdes et coll., 2002). L’interRAI SOS est tiré des résultats de plus de 1 000 évaluations menées à l’aide d’interRAI ESP dans 10 hôpitaux ontariens contenant des lits en santé mentale. Afin d’évaluer la validité, les cliniciens qui À suivre... Guide d’évaluation du risque de suicide I 49 remplissaient l’interRAI ESP ont également été invités à évaluer le niveau de risque de blessure de chaque personne en fonction d’une échelle de 5 points, allant de risque minime à risque très grave/imminent. Des liens étroits ont été constatés entre les scores de l’interRAI SOS et les évaluations des cliniciens : les premiers correspondaient aux seconds 85 % du temps. En outre, 98 % des patients ayant obtenu un score de 0 sur l’interRAI SOS ont été évalués comme présentant un risque minime ou léger par les cliniciens, alors que 80 % des patients ayant obtenu un score de 6 sur l’interRAI SOS ont été évalués comme présentant un risque modéré à très grave/imminent. Autres considérations En Ontario et dans certains pays (p. ex., en Finlande et en Islande), l’interRAI MH sert à évaluer toutes les personnes admises dans un hôpital et occupant un lit en santé mentale. L’interRAI SOS est également utilisée comme fondement du protocole d’évaluation clinique (PEC) sur la suicidalité et l’automutilation. Après avoir rempli au complet l’interRAI MH, CMH ou ESP, l’équipe clinique est informée des personnes qui présentent un risque d’automutilation minime à léger (0 à 2), modéré à grave (3 ou 4) et très grave (5 ou 6). Le PEC fournit une liste de considérations initiales, des lignes directrices et d’interventions dont l’équipe clinique peut se servir pour planifier les soins et aborder la question de la sécurité immédiate et à long terme de la personne afin de prévenir tout autre geste autodestructeur ou tout suicide à l’avenir. Ainsi, les instruments d’évaluation d’interRAI combinent l’évaluation du risque et des lignes directrices à l’appui de la planification des soins. Sur certains territoires comme en Ontario, l’interRAI SOS est utilisée pour toute personne admise à l’hôpital et occupant un lit en santé mentale, ce qui permet un dépistage systématique et offre une occasion d’identifier les personnes nécessitant une évaluation plus approfondie du risque de suicide lors d’une entrevue clinique. 50 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section II: Inventaire des outils d’évaluation du risque de suicide Liste de contrôle du milieu de soins en santé mentale (Mental Health Environment of Care Checklist ou MHECC) Éléments mesurés La liste de contrôle du milieu de soins en santé mentale (MHECC) met l’accent sur les facteurs présents dans le milieu de soins qui contribuent à la sécurité des patients et du personnel. Elle ne permet pas de déterminer si une personne est à risque de suicide. Format La liste de contrôle fournit des lignes directrices détaillées afin de cerner les dangers environnementaux et d’améliorer la sécurité du milieu. Elle permet d’évaluer 114 dangers possibles quant à leur gravité (de négligeable à catastrophique) et à la probabilité d’accident (de accident probable dans l’immédiat à accident improbable). Chaque danger est évalué selon un code d’évaluation du risque (CER) de 5 points qui combine les éléments liés à la gravité du danger et à la probabilité d’accident (de négligeable à critique). Par exemple, un CER de 5 est une situation qui nécessite une attention immédiate, comme une fenêtre ouverte dans une chambre située à un étage supérieur. Aux États Unis, Veteran Affairs oblige l’utilisation de la MHECC dans toutes les unités de santé mentale responsables de traitements des personnes présentant un risque connu de suicide. Quant à son efficacité et à sa facilité d’utilisation, des équipes multidisciplinaires d’inspection de la sécurité ont utilisé la liste de contrôle dans 113 installations et cerné 7 642 dangers, dont 5 834 (76,4 %) ont été éliminés après seulement un an (Mills et coll., 2010). Milieu et population cibles Établissements offrant des soins aux patients hospitalisés. Autres considérations La liste de contrôle du milieu de soins en santé mentale (MHECC; Mills, 2010) a été élaborée d’après les résultats d’une étude portant sur le lien entre le suicide des patients hospitalisés et le milieu physique. Un comité formé de hauts dirigeants et d’employés de première ligne en santé mentale, d’infirmières-chefs en santé mentale, d’ingénieurs en chef et d’architectes ayant une expertise en conception et en construction d’installations en santé mentale, ainsi que d’employés chevronnés en sécurité et sécurité incendie en milieu hospitalier ont conçu cette liste de contrôle du milieu pour que toutes les unités en santé mentale accueillant des anciens combattants puissent réduire les facteurs environnementaux qui contribuent au suicide et aux blessures volontaires des patients hospitalisés. Guide d’évaluation du risque de suicide I 51 Échelle d’idéation suicidaire modifiée (Modified Scale for Suicide Ideation ou SSI-M) Éléments mesurés L’échelle d’idéation suicidaire modifiée (SSI-M; Miller, Bishop et Dow, 1986) est conçue pour dépister les patients à risque qui se présentent dans une clinique, et son format permet une utilisation par les paraprofessionnels et les profanes. Ainsi, la SSI-M identifie les personnes qui courent le plus grand risque de suicide au sein d’une certaine population à risque élevé (p. ex., les patients psychiatriques chez qui des idées suicidaires sont soupçonnées) et elle permet que l’évaluation soit effectuée par un personnel non cliniquement formé (Pettit, Garza, Grover et coll., 2009; Rudd et Rajab, 1995). La SSI-M évalue plusieurs aspects de l’idéation et du comportement suicidaire, comme la fréquence, la durée et la gravité des idées; les facteurs dissuasifs identifiables d’une tentative; les raisons de vivre et de mourir; le degré de spécificité/planification; le moyen disponible ou l’occasion; l’expectative d’une réelle tentative, ainsi qu’une réelle préparation (Rudd et Rajab, 1995). Format L’échelle comprend 18 questions qui sont notées de 0 à 3. Le score total, qui varie entre 0 et 54 et se fonde sur la somme de tous les éléments, est calculé pour évaluer la gravité de l’idéation suicidaire. Par souci d’efficacité, les quatre premières questions de l’échelle se veulent des questions de dépistage (p. ex., les patients qui disent avoir un désir modéré ou fort de mourir) afin de justifier la passation de tout le questionnaire. Milieu et population cibles La SSI-M est utilisée auprès des personnes âgées et des adolescents de 13 à 17 ans. Propriétés psychométriques La cohérence interne obtenue par les réponses de la SSI-M va de α = 0,87 à α = 0,94 (Clum et Yang, 1995; Miller, et coll., 1986; Rudd et Rajab, 1995). La corrélation entre la SSI-M et l’échelle d’idéation suicidaire (SSI) (r = 0,74), l’inventaire de dépression de Beck (r = 0,39, la BHS (r = 0,46) et l’échelle de dépression de Zung (r = 0,45) permet d’établir la validité conceptuelle de l’outil. La SSI-M donne un certain appui à l’établissement du risque à certains intervalles (p. ex., six mois), mais les données probantes concernant sa validité prédictive sont limitées. Autres considérations L’échelle d’idéation suicidaire modifiée (SSI-M; Miller, Morman, Bishop et Dow, 1986) est une version révisée de l’échelle d’idéation suicidaire de Beck (BSS®: Beck et al., 1979). Elle offre cependant un avantage, du fait qu’elle est en mesure d’établir efficacement une distinction entre les idéateurs du suicide et les personnes qui attentent à leur vie dès leur accueil. 52 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section II: Inventaire des outils d’évaluation du risque de suicide Évaluation globale du risque de suicide par les infirmières (Nurses’ Global Assessment of Suicide Risk ou NGASR) Éléments mesurés L’évaluation globale du risque de suicide par les infirmières (NGASR; Cutcliffe et Barker, 2004) est un outil d’évaluation infirmière permettant de cerner les facteurs de stress psychosociaux qui s’avèrent étroitement liés au suicide. Niveau de compétence requis Il est recommandé d’utiliser la NGASR à titre de guide de l’évaluation du risque de suicide; cette évaluation convient au personnel de la santé de premier échelon ayant peu d’expérience en évaluation du risque de suicide. Format Quinze questions permettent d’évaluation le niveau de risque du patient, ainsi que les niveaux d’engagement et de soutien correspondants pour répondre aux besoins du patient. Cinq de ces 15 questions ont une pondération de 3 points, puisqu’elles constituent des indicateurs essentiels du risque de suicide (p. ex., le désespoir, la présence d’un plan de suicide). Les 10 autres questions valent 1 point. Le risque se divise en quatre catégories possibles : très peu de risque de suicide, risque de suicide modéré, risque de suicide élevé et risque de suicide très élevé. Plus le degré de risque est élevé, plus le niveau d’engagement requis sera exigeant. Milieu et population cible Patients psychiatriques hospitalisés et suivis en externe. Adultes. Propriétés psychométriques Aucune étude à grande échelle n’a mis à l’épreuve les propriétés psychométriques de la NGASR. Une récente étude néerlandaise ayant eu recours à la NGASR dans un service de résolution de crise indique une faible cohérence interne (α = 0,42), mais une grande satisfaction des utilisateurs (Veen, 2010). Cette satisfaction parmi les professionnels de la santé qui utilisent la NGASR a également trouvé écho ailleurs (Mitchell et coll., 2005), notamment parmi les infirmières qui sont néophytes en matière d’évaluation du risque de suicide. L’outil est très populaire au sein des infirmières du Canada, d’Irlande, du Japon, de la Nouvelle Zélande et du Royaume-Uni. Autres considérations Barker et Barker (2005) intègrent la NGASR en tant qu’élément clé de l’évaluation et de la surveillance du risque de suicide dans leur modèle des soins de santé mentale, une approche théorique des soins infirmiers en santé mentale qui met l’accent sur une relation thérapeutique qui favorise l’autonomie du patient. Guide d’évaluation du risque de suicide I 53 Inventaire des raisons de vivre (Reasons for Living Inventory ou RFL) Éléments mesurés L’inventaire des raisons de vivre (RFL; Linehan et coll., 1983) évaluer les facteurs de protection possibles chez les personnes disant avoir des idées suicidaires. Il peut également servir à explorer les différences de raisons de vivre entre les personnes qui ont un comportement suicidaire et celles qui n’en ont pas (p. ex., « Je crois que je peux m’adapter à tout ce que la vie a à offrir »). Format Le RFL est un questionnaire d’autoévaluation de 48 questions. Chaque question est notée selon une échelle de Likert de 6 points allant de 1 (pas du tout important) à 6 (extrêmement important). Le RFL compte six sous échelles et une échelle totale, soit : survie et croyances d’adaptation (24 questions); responsabilité envers la famille (7 questions); inquiétudes concernant les enfants (3 questions); peur du suicide (7 questions); peur de la désapprobation sociale (3 questions); et objections morales (4 questions). Les six sous échelles se fondent sur quatre analyses factorielles menées sur deux échantillons d’adultes normaux volontaires (Linehan et coll., 1983). Cependant, une analyse factorielle confirmatoire subséquente n’a constaté qu’un appui modéré pour le modèle à six facteurs chez les patients psychiatriques (Osman et coll., 1999). Milieu et population cibles L’utilisation du RFL a été démontrée chez les patients cliniques et non cliniques, ainsi qu’auprès des personnes âgées (RFL-OA; Edelstein et coll., 2009) et des jeunes adultes (RFL-YA; Gutierrez et coll., 2002; Linehan et coll., 1983; Malone et coll., 2000; Osman et coll., 1993). Propriétés psychométriques Une bonne fiabilité interne est démontrée par un coefficient alpha de Cronbach allant de α = 0,72 à α = 0,92 pour chaque sous échelle. Une solide cohérence interne est démontrée pour le RFL-OA (α = 0,98). Le RFL présente une corrélation négative modérée avec le SSI (r = -0,64) et le BHS (r = -.0,63) dans un échantillon d’étudiants universitaires (Brown, 2002). Les réponses aux RFL-OA présentaient également une forte corrélation avec le SSI (r = -0,40) et le BDI-II (r = -0,43). Aucune donnée probante ne permet de confirmer la validité prédictive du RFL. Autres considérations Certains rapports indiquent que le RFL prend environ 10 minutes à faire passer, mais il peut être lourd pour certaines populations, comme les patients hospitalisés en psychiatrie ou en médecine légale de répondre aux 48 questions (Brown, 2002; Range et Knott, 1997). Cela dit, le RFL offre l’avantage d’être rédigé en des termes positifs, ce qui peut, en partie, agir comme une sorte de tampon contre l’élaboration d’idées suicidaires chez les personnes qui y répondent. L’évaluation des raisons de vivre, qu’elle soit menée à l’aide de cet outil ou d’une entrevue clinique approfondie, doit faire partie de l’évaluation des personnes suicidaires (Malone et coll., 2000). Bien qu’il s’agisse d’un outil d’autoévaluation, les cliniciens qui souhaitent utiliser le RFL peuvent inclure les questions à leur entrevue clinique ou donner des directives détaillées à la personne et leur expliquer pourquoi elle doit y répondre. Les cliniciens qui ne font que remettre les questions pour obtenir un score risquent d’être perçus comme une personne froide qui ne s’engage pas dans une relation thérapeutique. Une fois le RFL rempli, il est important de discuter des questions avec la personne et d’examiner ses réponses dans le cadre de l’intervention thérapeutique. 54 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section II: Inventaire des outils d’évaluation du risque de suicide Échelles SAD PERSONS et SAD PERSONAS Échelle « SAD PERSONS » Éléments mesurés L’échelle « SAD PERSONS » (Patterson et coll., 1983) est une simple mnémonique servant à évaluer les principaux facteurs de risque de suicide (Patterson et coll., 1983). Format Les lettres « SAD PERSONS » représentent des facteurs de risque démographiques, comportementaux et psychosociaux. Une réponse positive à chaque facteur vaut 1 point, jusqu’à concurrence de 10 points. Un score seuil de plus de 5 points correspond au niveau de risque pour lequel une hospitalisation (volontaire ou involontaire) du patient à risque est nécessaire. Cependant, peu de données probantes ne permettent de soutenir la validité de ce score seuil. Les facteurs sont les suivants : S = Sexe (masculin), 1 point A = Âge (25-34 ans); (35-44 ans); (65 ans+), 1 point D = Dépression, 1 point P = Précédente tentative de suicide, 1 point E = Éthylisme et toxicomanie, 1 point R = Rationalité déficiente (psychose), 1 point S = Seul (aucun soutien social), 1 point O = Organisation planifiée du suicide, 1 point N = Non marié (pour les hommes), 1 point S = Santé précaire (maladie chronique/grave), 1 point Chaque facteur est noté selon qu’il est présent ou absent, jusqu’à concurrence de 10 points. Selon les recommandations de Patterson et coll. (1983), un score de 3 ou 4 devrait inciter les cliniciens à surveiller de très près l’état du patient, un score de 5 ou 6 devrait les inciter à « envisager fortement l’hospitalisation », alors qu’un score de 7 à 10 nécessite une hospitalisation pour évaluation plus poussée. Juhnke et Hovestadt (1995) concluent que les cliniciens qui utilisent l’échelle « SAD PERSONS » sont mieux en mesure d’identifier les personnes qui ont des idées suicidaires que ceux qui ne s’en servent pas (selon un groupe témoin de cliniciens). Milieu et population cibles Tous les établissements de santé et toutes les populations. Propriétés psychométriques Quelques études se sont penchées sur la validité de l’échelle « SAD PERSONS ». Bullard (1993) a constaté que le score peut sous-estimer le risque de suicide par rapport à l’entrevue clinique. De son côté, Herman (2006) a découvert que le score seuil de 5 n’a pas permis d’identifier 14 % des personnes considérées par les cliniciens comme activement suicidaires et donnait un taux de faux positif de 87 %. À suivre... Guide d’évaluation du risque de suicide I 55 Autres considérations Bien que l’échelle « SAD PERSONS » tienne compte de certains facteurs de risque et signes avant coureurs (p. ex., toxicomanie, rationalité déficiente et présence d’un plan de suicide), elle comporte également un certain nombre de facteurs épidémiologiques pouvant avoir un lien moins étroit au risque de suicide. Plus important encore est le fait que les facteurs de risque ne suivent aucune structure hiérarchique, contrairement à ce que suggère la littérature sur les signes avant coureurs (Rudd, 2008). Par exemple, un homme célibataire de 40 ans souffrant de diabète obtiendra un score plus élevé qu’une femme de 40 ans souffrant de dépression et ayant un plan de suicide organisé. Les cliniciens peuvent donc être confrontés à un grand nombre de faux positifs. « SAD PERSONAS » Version modifiée de l’échelle « SAD PERSONS », l’échelle « SAD PERSONAS » (Hockberger et Rothstein, 1998) vient ajuster la pondération et modifier plusieurs éléments : S = Sexe (masculin), 1 point A = Âge (<19 ans ou >45 ans), 1 point D = Dépression ou désespoir, 2 points P = Passé de tentatives de suicide ou de soins psychiatriques, 1 point E = Excès d’alcool ou de drogues, 1 point R = Rationalité déficiente (psychose), 2 points S = Sans conjoint (séparé, divorcé ou veuf), 1 point O = Organisé (tentative sérieuse), 2 points N = Non socialement soutenu, 1 point A = Accès à des moyens létaux, 2 points S = Signes clairs d’une intention future, 2 points Milieu et population cibles Tous les établissements de santé et toutes les populations. Propriétés psychométriques Hockberger et Rothstein (1998) ont constaté une sensibilité de 31 % et une spécificité de 94 % pour la version modifiée de l’échelle « SAD PERSONAS » en ce qui a trait à la capacité de prévoir l’hospitalisation chez les personnes qui se présentent aux urgences. À l’opposé, Cochrane-Brink et coll. (2000) concluent que l’échelle « SAD PERSONAS » n’est pas aussi efficace pour prévoir les hospitalisations en raison du risque de blessures volontaires lorsqu’elle est comparée à d’autres mesures de risque, dont l’échelle de probabilité du suicide (SPS). Autres considérations Bien que l’échelle modifiée permette une meilleure pondération des facteurs de risque qui correspondent davantage aux signes avant-coureurs spécifiques du risque aigu de suicide, elle présente toujours une lacune quant à la validité prédictive pour guider la prise de décisions cliniques. L’évaluation offre cependant une liste de contrôle facile à mémoriser quant aux facteurs de risques possibles, ce qui facilite le dépistage initial, surtout pour les personnes qui ont peu d’expérience en évaluation clinique du risque de suicide. 56 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section II: Inventaire des outils d’évaluation du risque de suicide Échelle d’incidence de la suicidalité – Prise en charge, évaluation et planification des soins (Scale for Impact of Suicidality – Management, Assessment and Planning of Care ou SIS-MAP) Éléments mesurés L’échelle d’incidence de la suicidalité – Prise en charge, évaluation et planification des soins (SIS-MAP; Nelson, Johnston et Shrivastava, 2010) est un outil d’évaluation complet qui permet de prévoir le risque de suicide, ainsi que d’élaborer un plan de soins et de prise en charge. Format Les éléments de la SIS-MAP tournent autour des facteurs de risque et de résilience (facteurs de protection), en plus des facteurs de toutes sortes qui contribuent au risque de suicide. L’échelle permet d’évaluer le niveau de risque actuel en mesurant les facteurs découlant de huit aspects : 1) facteurs démographiques; 2) état psychologique; 3) comorbidités; 4) antécédents familiaux; 5) facteurs biologiques; 6) facteurs de protection; 7) évaluations/observations cliniques; 8) problèmes psychosociaux ou environnementaux. L’échelle SIS-MAP se compose de 108 questions portant sur ces huit aspects. Malgré le nombre de questions, l’échelle s’utilise en assez peu de temps. La majorité des questions exige simplement de cocher la case « oui » ou « non » pour indiquer la présence ou l’absence des éléments concernés (1 point pour les « oui », 0 point pour les « non »). Les auteurs de l’échelle recommandent que les personnes obtenant un score de 33 ou plus soient considérées comme « à risque grave » de suicide et admises dans un établissement psychiatrique, alors que les personnes ayant un score de 13 à 33 demeurent à risque et nécessitent un jugement clinique pour déterminer les soins appropriés (Nelson et coll., 2010). Un score de moins de 13 ne devrait pas nécessiter de suivi, mais il faut tout de même faire preuve d’un certain jugement clinique. Contrairement à d’autres outils d’évaluation du risque, qui offrent peu d’indications sur le traitement à offrir, la SIS-MAP précise des seuils cliniques afin de faciliter la prise d’une décision quant au niveau de soins à donner au patient en fonction de son score. Milieu et population cibles Adultes hospitalisés dans un établissement psychiatrique ou recevant des soins psychiatriques en clinique externe, ainsi que tout autre établissement de santé. Propriétés psychométriques Les questions de la SIS-MAP portant sur la résilience s’avèrent modérément liées à l’hospitalisation (r = -0,33, p < .05), ce qui donne à penser que les personnes présentant un plus grand nombre de facteurs de protection sont moins susceptibles d’être admises à l’hôpital. La SIS-MAP parvient également à bien distinguer les personnes qui n’ont pas besoin d’être hospitalisées (taux de spécificité de 78,1 %) de celles qui doivent l’être (taux de sensibilité de 66,7 %). Le taux de faux positif est de 33,3 %, alors que 21,9 % des cas donnent un faux négatif (Nelson et coll., 2010). Bien que d’autres études psychométriques et de validation soient nécessaires, la SIS-MAP semble être un outil valide, sensible et spécifique pour évaluer le risque de suicide, selon les premières données probantes. Guide d’évaluation du risque de suicide I 57 Questionnaire sur les comportements suicidaires (Suicidal Behaviors Questionnaire ou SBQ) Éléments mesurés Le questionnaire sur les comportements suicidaires (SBQ; Linehan, 1981) est un outil d’autoévaluation portant sur les pensées et comportements suicidaires chez les adultes. Le SBQ mesure la fréquence et l’intensité des idées suicidaires, des menaces de suicide passées ou à venir, des tentatives de suicide passées ou à venir et des comportements autodestructeurs non mortels. Les questions sont notées selon que la période visée concerne les derniers jours, le dernier mois, la dernière année ou tout le cours de la vie. Les comportements sont notés à l’aide d’un score global pondéré pour chacune de ces périodes. Le score-seuil suggéré pour la population adulte générale est de plus de 7 et, pour les adultes hospitalisés en psychiatrie, de plus de 8. Format Le questionnaire sur les comportements suicidaires est un outil d’autoévaluation disponible en deux versions : la version à 14 questions (SBQ-14; Linehan, 1996) et la version à 4 questions (SBQ-4; Linehan et Nielsen, 1981). Milieu et population cibles Le SBQ a été validé pour une utilisation auprès de diverses populations, notamment les adultes dans la communauté et la population psychiatrique, ainsi que les jeunes dans les établissements correctionnels. Propriétés psychométriques La cohérence interne a été établie pour les deux versions du questionnaire, avec un coefficient allant de α = 0,76 à α = 0,87 (Osman et coll., 2001). La corrélation entre le SBQ-14, l’échelle d’idéation suicidaire, l’inventaire de dépression de Beck et l’échelle de désespoir de Beck (r = 0,55 à r = 0,62) établit la validité conceptuelle de l’échelle (Linehan et Addis, 1990). Autres considérations Puisqu’il s’agit d’une autoévaluation, le SBQ permet d’obtenir de l’information de la part de personnes qui peuvent éprouver des difficultés à révéler, dans le cadre d’une entrevue, leurs pensées suicidaires ou leurs comportements suicidaires passés (Osman et coll., 2001). En raison de la formulation utilisée dans le SBQ-4, un grand nombre de comportements suicidaires peut rapidement être évalué. Les cliniciens peuvent préférer la version à 4 questions aux versions à 34 ou à 14 questions, qui sont plus souvent utilisées à des fins de recherche. 58 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section II: Inventaire des outils d’évaluation du risque de suicide Échelle d’intention suicidaire (Suicide Intent Scale ou SIS) Éléments mesurés L’échelle d’intention suicidaire (SIS; Beck, Schuyler et Herman, 1974) est beaucoup utilisée comme instrument de recherche pour évaluer les sentiments d’intention circonstanciels et subjectifs à la suite d’une tentative de suicide. Format La SIS comprend 15 questions qui évaluent le degré de gravité au moyen d’un score allant de 0 à 2 pour chaque question, soit un score total variant entre 0 et 30. Les scores les plus élevés indiquent un degré plus élevé d’intention. La SIS est généralement utilisée en entrevue. La première partie (questions 1 à 8) évalue les circonstances objectives entourant la tentative de suicide, notamment des questions concernant la préparation, le moyen d’exécution de la tentative, le contexte ainsi que les signes précurseurs chez le patient qui peuvent faciliter ou gêner la découverte de la tentative. La deuxième partie de l’échelle SIS (questions 9 à 15) couvre la perception qu’a l’auteur de la tentative, de la létalité, de la méthode; les attentes quant à la possibilité d’un sauvetage, et d’une intervention et les raisons alléguées de la tentative. Récemment, une structure à quatre facteurs a été définie pour les adultes. Cette structure comprend la conception (p. ex., la raison et le sérieux de la tentative), la préparation (p. ex., le degré de planification), les précautions prises pour ne pas être découvert (p. ex., l’isolement) et la communication (p. ex., chercher à obtenir de l’aide) (Misson et coll., 2010). Par exemple, le score donné à la question relative au degré de méditation est de 2 si la personne a envisagé le suicide pendant plus de trois heures avant une tentative, de 1, si la personne a envisagé le suicide pendant moins de trois heures et de 0, si la personne n’a pas envisagé le suicide, mais qu’elle a agi de manière impulsive (Beck, Schuyler et Herman, 1974). Milieu et population cibles Milieux de soins pour personnes qui peuvent avoir récemment tenté de se suicider. Psychometric properties: L’échelle SIS est considérée comme une mesure fiable de l’intention suicidaire parce qu’il a été prouvé qu’elle a une forte cohérence interne (α = 0,95) et un fort coefficient d’objectivité (r = 0,95; Beck, Schuyler et Herman, 1974). La validité concourante de l’échelle SIS est limitée en raison de résultats inconsistants quant à la relation entre l’échelle et d’autres outils de mesure de l’intention suicidaire (Freedenthal, 2008). La validité prédictive de l’échelle est de faible à modérée. Deux études prospectives, menées sur la foi de données recueillies pendant 10 ans et relatives au suicide réussi chez des patients qui avaient été hospitalisés à la suite d’une tentative, concluent que l’échelle SIS n’est pas prédictive des décès par suicide (Beck et Steer, 1989; Tejedor, Diaz, Castillon et Pericay, 1999). D’autres études ont obtenu des résultats inconsistants sur le plan de la validité À suivre... Guide d’évaluation du risque de suicide I 59 prédictive de l’échelle SIS pour des tentatives de suicide non fatales subséquentes. Beck, Morris et Beck (1974) ont établi une corrélation entre le score SIS et des tentatives subséquentes de suicide, alors que Tejedor, Diaz, Castillon et Pericay (1999) n’ont trouvé aucun lien de ce genre. Autres considérations La SIS a été traduite en plusieurs langues et s’est révélée fiable chez diverses cultures (Gau et coll., 2009). L’échelle SIS pourrait mieux convenir comme outil de recherche ou comme protocole de dépistage rapide pour aider à comprendre, rétrospectivement, les raisons expliquant pourquoi une personne a tenté de se suicider (Harriss et Hawton, 2005; Sisask et al., 2009). La première section portant sur l’appréciation objective pourrait même être complétée par des chercheurs lors de l’examen du dossier médical d’une personne à la suite de son décès (Freedenthal, 2008). Cependant, compte tenu des inconsistances et du manque d’efficacité prédictive, l’échelle SIS n’est pas un outil de dépistage efficace pour évaluer le risque futur de suicide. 60 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section II: Inventaire des outils d’évaluation du risque de suicide Échelle de probabilité du suicide (Suicide Probability Scale ou SPS) Éléments mesurés L’échelle de probabilité du suicide (SPS; Cull et Gill, 1988) mesure les idées suicidaires actuelles, le désespoir, le sens de soi négatif et l’hostilité. Format La SPS est une autoévaluation en 36 questions. Les questions concernant la fréquence des émotions et des comportements sont notées sur une échelle de 4 points, allant de 1 (« Jamais ou parfois ») à 4 (« La plupart du temps ou toujours »). Le questionnaire SPS prend entre 10 et 20 minutes à remplir et demande un niveau de lecture équivalant à celui d’une quatrième année. Trois scores globaux peuvent être compilés à partir de l’échelle SPS : • • • un score de probabilité du suicide, un score pondéré total, un score T normalisé. Pour le score de probabilité du suicide (allant de 0 à 100), des scores-seuils représentatifs ont été créés pour les personnes hospitalisées (risque élevé = de 50 à 100), les personnes traitées à l’externe (risque moyen = de 25 à 49) et les personnes de la population en général (risque faible = de 0 à 24). Le score pondéré total va de 30 à 147, et le score-seuil pondéré pour les cas à risque élevé est de 78. La SPS se fonde sur six facteurs : • • • • • • les idées suicidaires (6 questions), le désespoir (12 questions), les perspectives positives (6 questions), la proximité interpersonnelle (3 questions), l’hostilité (7 questions), l’impulsivité et la colère (2 questions) (Cull et Gill, 1988). Cependant, quatre sous-échelles sont recommandées : • • • • le désespoir, les idées suicidaires, le sens de soi négatif (combinant les perspectives positives et la proximité interpersonnelle), l’hostilité (incluant l’impulsivité et la colère). À suivre... Guide d’évaluation du risque de suicide I 61 L’existence de ces diverses dimensions permet aux cliniciens de cerner certains facteurs qui peuvent contribuer au risque de suicide chez une personne. Milieu et population cibles L’outil SPS a été utilisé pour des échantillons d’adolescents et d’adultes, hommes et femmes. Les scores normatifs ont été établis en fonction d’échantillons de la population en général, de personnes recevant des services de santé mentale à l’interne et de personnes qui avaient tenté de se suicider (Cull et Gill, 1988). Chacun de ces échantillons regroupait des personnes d’origine raciale caucasienne, hispanique et afro américaine. La SPS a aussi été utilisée dans la population carcérale adulte où le total des scores de probabilité a révélé une sensibilité et une spécificité de faible à moyenne pour l’identification, parmi les détenus, des individus qui adopteront plus tard des comportements suicidaires (Naud et Daigle, 2010). L’outil SPS a également démontré sa fiabilité chez la population universitaire, les adolescents et les détenus masculins (Labelle et coll., 1998). Propriétés psychométriques Chez les populations adultes, la SPS a fait preuve d’une grande fiabilité avec un coefficient alpha de Cronbach de α = 0,93, dans une fourchette allant de α = 0,62 à α = 0,93 pour les quatre sous-échelles cliniques (Cull et Gill, 1988, Bisconer et Gross, 2007). La SPS a également démontré une bonne validité convergente, étant bien corrélée avec d’autres mesures du risque de suicide, du désespoir et de la dépression. La fiabilité test-retest avec une corrélation de r = 0,92 a été établie sur une période de trois semaines. La validité prédictive de l’échelle SPS n’a pas été étudiée de façon exhaustive chez les populations adultes. Chez un petit échantillon d’adultes hospitalisés parce qu’ils sont un risque pour eux-mêmes (groupe à risque élevé) ou pour les autres (groupe à faible risque), un score-seuil total de probabilité de suicide de 50 sur l’échelle SPS a permis d’identifier correctement les personnes du groupe à risque élevé (sensibilité) dans 52 % des cas et les personnes ne faisant pas partie du groupe à risque élevé (spécificité) dans 78 % des cas. Ces résultats justifient la poursuite des investigations avant que le scoreseuil à utiliser puisse être recommandé. Autres considérations La SPS peut être utilisée de manière fiable et valide chez les adolescents psychiatriques traités à l’interne, bien que la structure factorielle identifiée chez les adultes n’ait pas été uniformément vérifiée chez les adolescents (Eltz et coll., 2006). Parmi les adolescents hospitalisés, le score pondéré total permet de prédire avec une grande précision les tentatives de suicide après le congé de l’hôpital (Huth-Bocks et coll., 2007). Dans la même étude, la sensibilité du score-seuil, fixé à 78, était modérée (65 %), tout comme la spécificité (64 %). Le fait d’abaisser le score-seuil à 61 a permis d’améliorer la sensibilité à 90 %, mais a grandement réduit la spécificité, désormais à 38 %, ce qui indique la possibilité d’un grand nombre de résultats faux positifs. 62 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section II: Inventaire des outils d’évaluation du risque de suicide Outil d’évaluation du risque de suicide (Tool for Assessment of Suicide Risk ou TASR) Éléments mesurés L’outil d’évaluation du risque de suicide (TASR; Kutcher et Chehil, 2007) a été conçu pour évaluer le risque de suicide imminent. Le TASR permet de mener une évaluation brève et succincte dans le cadre de l’appréciation régulière de la santé mentale. Il vise à faciliter la prise de décisions cliniques concernant le « fardeau de risque » lié au suicide (Kutcher et Chehil, 2007) en veillant à ce que les facteurs de risque individuel, symptomatique et aigu les plus pertinents aient été évalués par le clinicien. Format Le TASR se divise en quatre sections comportant des questions correspondant à chacune d’elles. Chaque section reçoit un astérisque de pondération (*) afin de souligner l’importance de ces questions pour le risque de suicide. Les cliniciens cochent « oui » (s’applique au patient) ou « non » (ne s’applique pas au patient) pour chaque question énumérée. 1) Profil de risque individuel (section 1) – permet de cerner l’âge et les facteurs de risque démographiques, ainsi que des données pertinentes sur les antécédents familiaux, les antécédents médicaux personnels et la situation psychosociale. Cette section peut être pondérée d’un astérisque, puisque de nombreuses personnes présentent bon nombre des facteurs de risque démographiques sans être suicidaires pour autant. 2) Profil des symptômes (section 2) – évalue la présence actuelle de symptômes psychiatriques qui sont liés à un risque de suicide accru (p. ex., symptômes dépressifs, impulsivité). La pondération de cette section est de deux astérisques. 3) Profil d’entrevue (section 3) – se penche sur les facteurs de risque aigu cernés durant l’entrevue clinique et pouvant amener la personne à courir un risque élevé de suicide (p. ex., intention suicidaire, plan de suicide), que ces facteurs s’accompagnent ou non des autres facteurs énumérés aux sections 1 et 2. Cette section a une pondération de trois astérisques. 4) Évaluation globale du risque (section 4) – évalue le risque de suicide de la personne (élevé, modéré, faible) selon l’impression du clinicien une fois l’évaluation globale complétée. Milieu et population cibles Le TASR est utilisé auprès des adultes qui se présentent aux urgences, qui sont hospitalisés et qui reçoivent des soins en clinique externe. Il est également disponible en version pour les jeunes (Tool for Assessment of Suicide Risk for Adolescents ou TASR-A). Cette dernière en semblable au TASR pour adultes, mais compte certaines questions spécifiques sur les facteurs de risque de suicide dans une population plus jeune. Propriétés psychométriques Aucune donnée ne permet d’établir la validité ni la fiabilité du TASR. Kutcher et Chehil (2007) indiquent que le TASR n’est pas conçu pour servir d’outil de prévision ou de diagnostic; il se veut plutôt un moyen pour les cliniciens de résumer leur évaluation d’un patient pouvant démontrer un risque de suicide. Guide d’évaluation du risque de suicide I 63 64 I Guide d’évaluation du risque de suicide x x 26 36 15 x x x x x x x x x x x x x Fiabilité x x x x x x x Évaluation globale x x x x x x x x x x x x Dépistage Utilité possible x x x x x x x x x x x x x x x Hosp. x x x x x x x x x x x x x Externe x x x x x Urgences Psychiatrique Milieu x x x x x x x x x x x Non psychiatrique x x x x x x x x x x x x x Adultes x x x x x x x Enfants et adolescents Population ^ x x x Personnes âgées ^ Adultes (18-64 ans), personnes âgées (65 ans+), enfants et adolescents (8-18 ans) *L’échelle interRAI SOS fait partie d’un système d’évaluation de la santé mentale composé de trois instruments. Le nombre de questions de chaque instrument varie, tout comme le temps nécessaire pour effectuer l’évaluation dans son ensemble. Nota. BSS® = Échelle d’idéation suicidaire de Beck; BHS = Échelle de désespoir de Beck; C-SSRS = Échelle Columbia de la gravité du risque de suicide; GSIS = Échelle d’idéation suicidaire gériatrique; interRAI SOS = Échelle interRAI de la gravité du comportement autodestructeur; MHECC = Liste de contrôle du milieu de soins en santé mentale; NGASR = Évaluation globale du risque de suicide par les infirmières; RFL = Inventaire des raisons de vivre; SIS-MAP = Échelle d’incidence de la suicidalité – Prise en charge, évaluation et planification des soins; SSI-M = Échelle d’idéation suicidaire modifiée; SBQ = Questionnaire sur les comportements suicidaires; SIS = Échelle d’intention suicidaire; SPS = Échelle de probabilité du suicide; TASR = Outil d’évaluation du risque de suicide TASR SPS SIS 34 18 x SSI-M x 108 x SIS-MAP SBQ 10 48 15 x x x 114 varié* x SAD PERSONAS RFL NGASR MHECC interRAISOS GSIS 31 x C-SSRS x 20 x BHS x 21 x BSS® x Nbre de Validité questions prédictive Entrevue/ observation Passation Autoévaluation Échelle Tableau 2. Caractéristiques des outils d’évaluation du risque de suicide Section II: Inventaire des outils d’évaluation du risque de suicide Tableau 3. Renseignements concernant les auteurs et le droit d’auteur des échelles d’évaluation du risque de suicide Échelle Principal auteur Échelle d’idéation suicidaire de Beck (BSS®) Coordonnées Droit d’auteur Frais Aaron T. Beck, University of Pennsylvania Gregory K. Brown Department of Psychiatry et Robert A. Steer Room 2032 3535 Market Street Philadelphia, PA 19104-3309 [email protected] Oui 115 $ (Pearson) www.pearsonassessments. com Échelle de désespoir de Beck (BHS) Aaron T. Beck et Robert A. Steer University of Pennsylvania Department of Psychiatry Room 2032 - 3535 Market Street Philadelphia, PA 19104-3309 [email protected] Oui 115 $ (Pearson) www.pearsonassessments. com Échelle Columbia de la gravité du risqué de suicide (C-SSRS) Kelly Posner New York State Psychiatric Institute Oui 1051 Riverside Drive, Unit 78 New York, NY 10032 Tél. : (212) 543-5504 Téléc. : (212) 543-5344 [email protected] Non Communiquer avec l’auteur pour obtenir sa permission Échelle d’idéation suicidaire gériatrique (GSIS) Marnin Heisel et Gordon Flett Département d’épidémiologie et de biostatistiques Université Western Ontario London (Ontario) Canada N6A 5C1 Tél. : (519) 685-8500, ext: 75981 Téléc. : (519) 667-6584 [email protected] Oui Non Communiquer avec l’auteur pour obtenir sa permission Échelle interRAI de la gravité du comportement autodestructeur (interRAI SOS) John Hirdes et le groupe interRAI Pour de l’information sur les outils d’interRAI, communiquer avec : Mary James Institute of Gerontology University of Michigan 300 North Ingalls, Ann Arbor, Michigan 48109-2007 USA Tél. : +1 734/936-3261 Téléc. : +1 734/936-2116 [email protected] Oui Non Communiquer avec interRAI pour obtenir une licence Guide d’évaluation du risque de suicide I 65 Échelle Principal auteur Liste de contrôle Peter Mills du milieu de soins en santé mentale (MHECC) Coordonnées Droit d’auteur Frais Field Office of the National Center for Patient Safety - Veterans Health Administration White River Junction, VT USA [email protected] Non Non Échelle d’idéation suicidaire modifiée (SSI-M) Ivan W. Miller, William H. Norman, Stephen B. Bishop et Michael G. Dow Ivan W. Miller Box G-RI Brown University Providence, RI 02912-G-RI Oui Non (General Practice South) www.gpsouth.com Évaluation globale du risque de suicide par les infirmières (NGASR) John Cutcliffe et P. Barker John Cutcliffe University of Northern British Columbia 3333 University Way Prince George, BC Canada V4N 4Z9 [email protected] Oui Non Inventaire des raisons de vivre (RLS) Marsha M. Linehan Behavioral Research & Therapy Clinics Department of Psychology, Box 351525 University of Washington Seattle, WA 98195-1525 [email protected] Oui Non Communiquer avec l’auteur pour obtenir sa permission Échelle « SAD PERSONS » William M. Patterson, Henry H. Dohn, Julian Bird et Gary A. Patterson Birmingham Research Group, Inc. 2120 Lynngate Drive Birmingham, AL 35216 Tél. : (205) 823-0766 Téléc. : (205) 823-9410 [email protected] Non Non 66 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section II: Inventaire des outils d’évaluation du risque de suicide Échelle Principal auteur Coordonnées Échelle d’incidence de la suicidalité – Prise en charge, évaluation et planification des soins (SIS-MAP) Amresh Srivastava et Charles Nelson Clinique de traitement des Oui blessures liées au stress opérationnel Hôpital Parkwood, Édifice Hobbins 801, chemin Commissioners Est 3e étage, salle H-3015 London (Ontario) Canada N6C 5J1 Tél. : (519) 685-4567, ext 42235 [email protected] [email protected] Non Communiquer avec l’auteur pour obtenir sa permission Behavioral Research & Therapy Clinics Department of Psychology, Box 351525 University of Washington Seattle, WA 98195-1525 [email protected] Oui Non Communiquer avec l’auteur pour obtenir sa permission Marsha M. Questionnaire Linehan sur les comportements suicidaires (SBQ) Droit d’auteur Frais Suicide Intent Scale (SIS) Aaron T. Beck, D. Schuyler et Herman University of Pennsylvania Department of Psychiatry Room 2032 - 3535 Market Street Philadelphia, PA 19104-3309 [email protected] Oui Non Communiquer avec l’auteur pour plus de renseignements Échelle de probabilité du suicide (SPS) John G. Cull et Wayne S. Gill Western Psychological Services Publishers and Distributors 12031 Wilshire Boulevard Los Angeles, CA 90025-1251 Oui 99 $ (Western Psychological Services) www.wpspublish.com Outil d’évaluation du risque de suicide (TASR) Stan Kutcher et Sonia Chehil Oui Non Département de psychiatrie Université Dalhousie 5909 Veterans’ Memorial Lane, 8e étage Édifice Abbie J. Lane Memorial QEII Health Sciences Centre Halifax (N.-É.) Canada B3H 2E2 Tél. : (902) 473-2470 Téléc. : (902) 473-4887 [email protected] Guide d’évaluation du risque de suicide I 67 3. L’évaluation et l’utilisation des outils d’évaluation du risque de suicide SOMMAIRE DES OUTILS D’ÉVALUATION DU RISQUE DE SUICIDE ET CONSÉQUENCES POUR LA PRATIQUE Il n’existe aucun consensus quant à l’outil « le » plus efficace pour évaluer le risque de suicide. Aucun outil ne peut prévoir le suicide; certains outils peuvent tout au plus fournir des données pertinentes pour éclairer la prise de décisions cliniques. Un certain nombre d’instruments ont été conçus pour faciliter la détection et l’évaluation du risque de suicide dans une foule de milieux. Les échelles visent des fins diverses; elles peuvent servir d’outils de dépistage et de recherche ou d’outils d’évaluation globale du risque de suicide à intégrer au processus plus large de l’évaluation de la santé mentale. Selon l’analyse documentaire et les entrevues menées avec divers intervenants, il est impossible d’établir avec certitude lequel des outils est le plus efficace ou le plus populaire pour évaluer le risque de suicide. Les personnes interrogées sont d’avis mitigé à ce sujet : certains appuient entièrement l’utilisation des outils d’évaluation dans le cadre du processus global d’évaluation des risques, tandis que d’autres préfèrent l’entrevue clinique à ces outils. Puisqu’il n’existe aucun outil pouvant prévoir avec exactitude le risque de suicide, le consensus de base veut que les outils d’évaluation du risque de suicide soient utiles pour fournir d’autres renseignements et une certaine corroboration afin d’éclairer la prise de décisions cliniques quant à ce risque. Pour la plupart des échelles examinées dans le présent guide, les données probantes indiquent qu’elles offrent une cohérence interne adéquate ou forte et qu’elles sont liées à d’autres indicateurs du risque de suicide. Les défis de l’évaluation des outils d’évaluation du risque de suicide Il existe un certain nombre de défis à relever pour évaluer les outils d’évaluation du risque de suicide, notamment : 68 I Guide d’évaluation du risque de suicide • l’utilisation de scores globaux comme unique fondement à la prise de décisions sur le risque aigu n’est appuyée par aucune donnée probante; • la capacité de prévoir le suicide en fonction du ou des scores obtenus par un outil d’évaluation du risque est faible. Idéalement, le choix d’un outil d’évaluation du risque repose sur sa capacité prédictive, c’est-à-dire Section II: Inventaire des outils d’évaluation du risque de suicide sur les réponses que donne une personne aux questions d’évaluation portant sur la probabilité qu’elle puisse effectivement tenter de se suicider; – la difficulté de répondre à cette question repose sur le fait que le suicide, bien que catastrophique, est une issue relativement rare dans la plupart des milieux de soins. Vu le peu de cas de mort par suicide, il est difficile d’évaluer la valeur prédictive d’un outil; – les études portant sur la valeur prédictive des outils d’évaluation sont obligées de s’en remettre à des mesures approximatives de l’issue, comme la hausse des facteurs de risque ou des signes avant coureurs de suicide. Le fait que les outils d’évaluation ne puissent jamais être totalement précis souligne l’importance de recourir au jugement clinique et à la collaboration en même temps que les outils d’évaluation pour établir le risque de suicide. Encadré 5. Principales questions à considérer pour choisir un outil d’évaluation du risque de suicide 1. Combien de temps avez-vous pour effectuer l’évaluation? 2. Combien de temps faut il pour effectuer l’évaluation? 3. L’outil d’évaluation du risque est il facile à noter? 4. L’outil d’évaluation du risque convient il à la population que vous soignez? 5. Les scores obtenus sont ils significatifs? 6. Avez-vous besoin de l’outil pour faciliter le dépistage, l’évaluation globale, etc.? 7. La personne susceptible d’être à risque de suicide peut-elle remplir seule l’outil d’évaluation du risque? 8. L’outil d’évaluation du risque mesure t il les aspects que vous avez besoin d’approfondir? 9. Avez vous les moyens d’acheter l’outil d’évaluation du risque? Ces considérations sont fournies à titre de référence à l’annexe G. Guide d’évaluation du risque de suicide I 69 L’utilisation que peuvent faire les professionnels des scores générés par les outils d’évaluation du risque de suicide Les experts rencontrés en entrevue sont tous d’avis que les scores globaux obtenus par les outils d’évaluation du risque de suicide ne sont pas souvent considérés dans la pratique pour prendre des décisions fermes au sujet du risque de suicide d’une personne. Ils soutiennent plutôt que ces scores sont utiles pour informer les évaluateurs de la gravité ou de la complexité du niveau de détresse de la personne. Les entrevues ont permis de conclure que les scores globaux générés par les instruments d’évaluation du risque de suicide sont parfois moins utiles que les sujets abordés sur les questions mêmes de l’outil. Par exemple, il est plus important de savoir que la personne a élaboré un plan de suicide que de savoir qu’elle a obtenu un score de « 11 sur 20 ». Dans certains cas, les scores indiquent une accumulation de facteurs de risque ou de signes avant coureurs et peuvent s’avérer utiles pour évaluer la complexité du risque de suicide. Cependant, en pratique, ces scores doivent être interprétés avec prudence. Le danger est de se fier entièrement à un seul score de risque et de négliger ainsi la nature holistique de l’évaluation au profit de l’efficacité et de la protection contre tout recours en responsabilité (Lyons, Price, Embling et Smith, 2000). L’utilité des outils d’évaluation du risque de suicide est de permettre aux cliniciens : • de recueillir d’autres renseignements qui peuvent mettre en lumière le degré de risque de suicide de la personne; • de corroborer les conclusions des entrevues cliniques; • de cerner toute divergence dans le risque de suicide, le cas échéant. – Par exemple, dans certains cas, la personne ne révèle pas des indices de risque lors de l’entrevue clinique, mais fait état de certains facteurs dans l’outil d’évaluation. L’utilisation des outils est un moyen d’améliorer la qualité globale du processus d’évaluation du risque de suicide. L’utilisation des outils d’évaluation du risque de suicide s’avère particulièrement utile pour les personnes ayant moins d’expérience dans l’évaluation des risques. En ce sens, ces outils offrent l’occasion d’uniformiser l’utilisation et le processus d’évaluation des risques. 70 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section III Cadre d’évaluation du risque de suicide et de surveillance de la qualité PA R T E N A I R E Section III : Cadre d’évaluation du risque de suicide et de surveillance de la qualité L’évaluation du risque de suicide doit être approfondie, centrée sur la personne et simple. Elle doit intégrer de nombreuses approches afin de pouvoir évaluer le niveau de détresse et le risque de suicide de la personne. Contenu de la section 1. Parvenir à une évaluation de qualité du risque de suicide 2. Les outils et le cadre d’évaluation du risque de suicide • L’utilisation des outils d’évaluation du risque de suicide à l’intérieur du cadre • Choisir les outils qui conviennent au milieu de soins particulier 3. La mesure de la qualité du processus d’évaluation du risque de suicide • Le cadre entourant le processus d’évaluation du risque de suicide • Les cinq dimensions du cadre d’évaluation du risque de suicide • Surveiller la qualité de l’évaluation du risque de suicide • La nécessité d’établir des indicateurs de qualité adéquats • La nécessité d’assurer une formation continue 4. Les prochaines étapes • Sommaire et recommandations Guide d’évaluation du risque de suicide I 71 1. Parvenir à une évaluation de qualité du risque de suicide Le processus d’évaluation du risque de suicide est tout aussi important que l’outil utilisé pour évaluer le risque. Il est recommandé de ne pas employer un seul outil ou une seule méthode pour évaluer le risque de suicide (p. ex., Bisconer et Gross, 2007). Au contraire, une évaluation de qualité du risque de suicide se doit d’intégrer de multiples approches afin de déterminer le niveau de détresse et le risque de suicide de la personne. LE CADRE ENTOURANT LE PROCESSUS D’ÉVALUATION DU RISQUE DE SUICIDE Rendre l’évaluation simple Une notion constamment mentionnée lors des entrevues concernant le fait que l’évaluation du risque de suicide doit être approfondie, centrée sur la personne et simple. Ainsi, l’évaluateur doit : • rester à l’affût de signes avant-coureurs, de facteurs de risques potentialisateurs et de facteurs de protection (voir la section I, page 3 pour de plus amples renseignements); • faire preuve d’un bon jugement clinique et utiliser d’autres sources d’information pour mieux connaître la personne; • documenter tous les résultats (voir la section I, page 18 pour de plus amples renseignements); • assurer une surveillance adéquate de la personne. LES CINQ DIMENSIONS DU CADRE D’ÉVALUATION DU RISQUE DE SUICIDE Dans leur ouvrage sur les soins en santé mentale intitulé Tidal Model, Barker et Barker (2005) décrivent un processus d’évaluation du risque de suicide qui comprend une entrevue centrée sur les risques, une évaluation globale du risque de la personne pour déterminer ses besoins en soins, ainsi qu’une surveillance et une réévaluation continues. Ces dimensions décrivent les processus clés pour assurer en tout temps l’évaluation et la surveillance du risque de suicide. Cependant, 72 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section III : Cadre d’évaluation du risque de suicide et de surveillance de la qualité ce modèle s’applique aux milieux de soins en santé mentale, où l’hypothèse est que la personne est déjà peut-être considérée comme présentant un certain risque de suicide. Ce qui suit est un cadre d’évaluation du risque de suicide adapté de Barker et Barker (2005) et élargi pour comprendre cinq dimensions (encadré 6). Ce cadre se distingue du Tidal Model à deux égards. D’abord, il est applicable dans les milieux de soins de toutes sortes, et non seulement en santé mentale. Ensuite, il peut servir pour les personnes qui se présentent dans un milieu de soins, en santé mentale ou en médecine générale, pour des raisons autres qu’un risque de blessures volontaires, mais chez qui il faut tout de même évaluer le risque de suicide. Encadré 6. Les cinq dimensions du cadre d’évaluation du risque de suicide 1. Dépistage initial du risque de suicide 2. Évaluation ciblée du risque de suicide 3. Intégration de l’évaluation du risque de suicide 4. Planification des soins, mise en œuvre de l’intervention 5. Surveillance et réévaluation 1. Dépistage initial du risque de suicide Lors du dépistage initial, il faut tenter de déterminer s’il y a un risque de suicide possible chez la personne. Le dépistage initial peut comprendre un examen clinique informel du risque et l’utilisation de méthodes de dépistage afin de cerner ce risque. Presque tous les prestataires de soins sont en mesure de faire un certain dépistage du risque de suicide chez les personnes examinées. Cependant, ils doivent connaître les facteurs de risque potentialisateurs et les signes avant coureurs précisés dans les sections précédentes de ce guide avant de mener ce processus (voir la section I, page 3). Grâce à cette connaissance, les personnes peuvent faire l’objet d’un dépistage informel durant une consultation clinique afin de déceler tout facteur de risque ou signe avant coureur au moyen de l’observation et de la discussion (soit en faisant des liens entre les propos de la personne, les propos des membres de l’entourage de la personne, la détresse observée et le risque de suicide). Le recours aux méthodes de dépistage formel peut se fonder sur l’examen clinique informel ou s’inscrire dans le cadre de la pratique normale Guide d’évaluation du risque de suicide I 73 de soins. Le dépistage formel doit prévoir l’utilisation d’outils de dépistage rapide et une entrevue clinique qui permettre de poser directement des questions sur le suicide. Les considérations liées à certaines populations et à certains milieux de soins (décrites à la section I, page 26) peuvent entrer en jeu durant le processus de dépistage formel. À cette étape, la documentation et la corroboration sont des volets essentiels. 2. Évaluation ciblée du risque de suicide Comme l’explique le modèle de Barker et Barker (2005), en effectuant une évaluation ciblée du risque, l’évaluateur tente de mieux comprendre les facteurs sous jacents qui atténuent ou modèrent le risque. À cette étape, une entrevue clinique ciblée et une évaluation globale du risque peuvent avoir lieu. Le but est le suivant : • établir une relation thérapeutique ouverte avec la personne afin de discuter en détail de ses idées, plans et comportements suicidaires; • cerner ses forces et les appuis disponibles qui peuvent modérer le risque. Ce processus se fait en collaboration avec la personne et toute personne connaissant l’état de la personne. Ainsi, l’évaluateur s’assurera d’avoir de multiples points de vue pour mieux déterminer le niveau de risque. À cette étape, des outils d’évaluation du risque de suicide peuvent également être utilisés pour recueillir des données complémentaires quant au risque. Au moment d’utiliser des questionnaires d’autoévaluation, le prestataire de soins doit rassurer la personne et lui expliquer qu’il demeure entièrement disponible pour l’écouter et que l’autoévaluation n’est qu’une autre façon de tenter de comprendre ses besoins et sa détresse. Une solide relation thérapeutique doit être établie avant d’utiliser un outil d’autoévaluation. 3. Intégration de l’évaluation du risque de suicide Cette étape de l’évaluation du risque de suicide met de l’avant un processus de collaboration afin de déterminer le niveau de soins approprié à prodiguer à la personne compte tenu du niveau de risque cerné lors du dépistage initial et de l’évaluation ciblée. Les données recueillies par tout outil de dépistage ou d’évaluation globale du risque peuvent être intégrées aux résultats de l’entrevue cliniques pour faciliter l’établissement du risque global. Il faut consulter les autres professionnels prenant part aux soins de la personne, 74 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section III : Cadre d’évaluation du risque de suicide et de surveillance de la qualité ainsi que ses appuis informels, ceci afin de veiller à ce que le risque soit le mieux défini possible. En outre, il faut prendre soin de veiller à ce que tous les facteurs de risque et de protection aient été pris en considération dans la détermination du niveau de risque, comme il se doit. 4. Planification des soins et mise en œuvre de l’intervention Après avoir déterminé le niveau de risque de la personne et les facteurs liés au risque immédiat, il convient de mettre en place une démarche d’intervention et un plan de soins précis afin d’assurer la sécurité de la personne et son rétablissement. Pour les personnes qui ne sont pas déjà soignées en santé mentale, le degré de restriction imposé par le milieu de soins augmentera selon la gravité du risque cerné. Pour les personnes présentant des facteurs de risque potentialisateurs sans signes avant coureurs, la restriction imposée peut être moindre que pour les personnes montrant des signes avant coureurs laissant entrevoir un risque élevé de suicide. Les soins recommandés pour cette population sont notamment une thérapie de suivi et une évaluation plus approfondie de la santé mentale afin de porter attention à la détresse de la personne et prévenir l’escalade du risque de suicide. En présence de signes avant coureurs, une intervention immédiate s’impose, notamment en faisant participer les services professionnels en santé mentale et les services de soutien en cas de crise ou en faisant appel aux services d’urgence en santé mentale. Au moment d’élaborer un plan de soins, il est également important de garder à l’esprit les questions de la suicidalité chronique et la maladie mentale, ainsi que leur incidence sur la planification des soins, comme mentionné à la section I, page 7 et suivantes. 5. Surveillance et réévaluation La surveillance continue de l’état de la personne se fera à des intervalles de plus en plus fréquents à mesure que le niveau de risque de suicide augmente. Par exemple, les patients hospitalisés à risque élevé, s’ils ne sont pas sous observation étroite ou constante, doivent être surveillés à courts intervalles et réévalués à chaque changement de quart. Essentiellement, dans le cadre du processus de surveillance et de réévaluation, il faut suivre les quatre étapes précédentes du cadre à cinq dimensions. Plus précisément, la surveillance doit comprendre : Guide d’évaluation du risque de suicide I 75 • un dépistage rapide pour cerner un changement du niveau de risque; • l’atténuation des signes avant-coureurs immédiats; • l’élaboration ou l’utilisation de facteurs de protection. La surveillance et la réévaluation sont essentielles aux points de transition (« transferts des soins »), y compris lors des transitions à l’intérieur du milieu de soins (p. ex., changement de personnel, avant les sorties autorisées, changement de salle) et entre les milieux de soins (p. ex., à la suite du congé de l’hôpital). Une communication cohérente et constante avec les autres personnes prenant part aux soins de la personne est vitale au cours de toute activité de surveillance. 2. Les outils et le cadre d’évaluation du risque de suicide UTILISATION DES OUTILS D’ÉVALUATION DU RISQUE DE SUICIDE À L’INTÉRIEUR DU CADRE D’ÉVALUATION DU RISQUE Dans la mesure du possible, et seulement après qu’une solide relation thérapeutique a été établie, les outils d’évaluation du risque de suicide doivent être intégrés à l’entrevue d’évaluation du risque plutôt qu’être remis à la personne sous forme d’autoévaluation. 76 I Guide d’évaluation du risque de suicide Les outils d’évaluation du risque de suicide, comme mentionné à la section II, constituent une source d’information pouvant servir à déterminer le risque de suicide de la personne. Ils ne remplacent pas le jugement clinique (Barker et Barker, 2005). L’utilisation de tels outils au cours des étapes du cadre d’évaluation du risque de suicide doit demeurer centrée sur la personne et faire partie d’une évaluation objective, chaleureuse et empathique. Le recours à des outils d’évaluation du risque de suicide peut s’avérer une façon d’améliorer la qualité globale du processus d’évaluation du risque de suicide puisque ces outils permettent d’obtenir plus de renseignements pour déterminer et communiquer le risque. Bon nombre des personnes interrogées estiment que les outils d’évaluation du risque de suicide sont utiles pour éclairer tout le processus d’évaluation des risques, surtout pour les personnes qui ont peu d’expérience dans la conduite d’une telle évaluation. En ce sens, les outils d’évaluation du risque de suicide offrent l’occasion d’uniformiser l’utilisation et le processus d’évaluation des risques. En outre, chez les personnes qui ont des difficultés à révéler leurs sentiments ou leurs émotions (p. ex., les adolescents), les outils d’évaluation du risque peuvent offrir une façon d’exprimer ces sentiments et de décrire leur détresse. Section III : Cadre d’évaluation du risque de suicide et de surveillance de la qualité CONSIDÉRATIONS LIÉES AUX MILIEUX DE SOINS AU MOMENT DE CHOISIR LES OUTILS Les outils d’évaluation du risque de suicide permettent de documenter les diverses étapes à suivre qui sont décrites dans le cadre d’évaluation du risque. Toutefois, le type d’outil utilisé et l’approche adoptée peuvent dépendre du milieu de soins et de l’intention (soit le dépistage, la surveillance ou la détermination du risque) qui sous tend l’évaluation. Milieux de soins primaires et de soins non psychiatriques Principal objectif : Déterminer la probabilité qu’une personne tente de se suicider, afin de décider s’il convient de diriger la personne vers un milieu de soins plus spécialisé. Utilité de l’outil d’évaluation du risque de suicide : Dépistage et surveillance Dans ce cas, les outils d’évaluation du risque servent au dépistage, lequel offre une indication assez juste de la présence d’une accumulation de facteurs de risque, de signes avant coureurs et de facteurs de protection. Les outils pouvant s’avérer utiles sont notamment l’échelle SAD PERSONS (page 55) et le TASR (page 63) parce qu’il s’agit d’échelles raffinées que le praticien peut remplir lors d’une entrevue clinique générale afin de se faire une idée globale du risque et de faciliter le processus de renvoi vers des soins spécialisés. Les professionnels prodiguant des soins aux personnes âgées (p. ex., les services de soins à domicile), la GSIS (page 48) peut être utile. Ce même outil (GSIS) peut servir à surveiller les personnes qui ne sont pas nécessairement à risque, mais qui sont susceptibles de le devenir de façon continue (p. ex., présence d’un facteur de risque potentialisateurs sans signe avant coureur). Si un risque est décelé lors du dépistage, la personne est généralement dirigée vers des milieux de soins plus spécialisés pour évaluer plus à fond le risque de suicide et intervenir. Programmes de soins communautaires en santé mentale Principal objectif : Déterminer le niveau de risque chez les personnes qui viennent d’être admises dans le milieu de soins ou déterminer si l’état de la personne qui suit le programme s’est modifié de façon telle qu’elle court un risque plus aigu. C’est souvent le cas dans les milieux communautaires Guide d’évaluation du risque de suicide I 77 de soins en santé mentale : les personnes soignées peuvent souffrir depuis longtemps de troubles mentaux, dont la suicidalité chronique (voir ce sujet à la section I, page 9). Utilité de l’outil d’évaluation du risque de suicide : Dépistage et surveillance Certains problèmes, comme une situation difficile récente, peuvent favoriser l’apparition de signes avant-coureurs chez les personnes présentant ou non des facteurs de risque potentialisateurs. Les outils d’évaluation du risque, comme l’interRAI Community Mental Health, comprennent une évaluation globale de la santé mentale et du fonctionnement de la personne, tout en fournissant un score global de risque en fonction de l’échelle de la gravité du comportement autodestructeur (SOS, page 49). Presque tous les outils énumérés au tableau 2 (page 64) qui servent au dépistage peuvent également être utilisés dans le cadre du dépistage et de la surveillance continus. L’équipe de soins doit s’en remettre à la qualité de la relation thérapeutique pour déterminer s’il convient d’utiliser un questionnaire d’autoévaluation plutôt que d’effectuer une évaluation lors de l’entrevue. Cette décision peut se fonder sur la volonté de la personne de parler de suicide, ainsi que sur son fonctionnement cognitif et sa capacité de communiquer. Outre les outils d’évaluation, il est possible de faire le dépistage en ne posant que de simples questions pour « vérifier » la situation auprès de la personne. Ces questions peuvent porter sur ses pensées actuelles et son désir de mourir, si elle a un plan pour ce faire et si elle se sent en danger. En présence d’un risque, l’équipe de soins doit mener une entrevue plus approfondie et se servir d’un outil d’évaluation afin d’effectuer une évaluation ciblée du risque de suicide. À cette étape, les outils à utiliser sont notamment les échelles SOS, SIS-MAP, SPS, NGASR, RFL ou encore d’autres outils utiles pour faire une évaluation globale, comme énumérés au tableau 2, page 64. Urgences Principal objectif : Cerner le niveau de risque et le degré d’intention afin de déterminer si la personne peut quitter l’hôpital en toute sécurité ou si elle doit plutôt être dirigée vers une unité de soins plus restrictive afin d’assurer sa sécurité personnelle. Utilité de l’outil d’évaluation du risque de suicide : Dépistage 78 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section III : Cadre d’évaluation du risque de suicide et de surveillance de la qualité Il est important d’effectuer un dépistage rapide ainsi qu’une entrevue et une consultation cliniques pour éclairer cette prise de décision. Des outils comme l’échelle SOS intégrée à l’interRAI Emergency Screener for Psychiatry (outil de dépistage d’urgence en psychiatrie) peuvent faciliter ce processus puisqu’ils comportent des questions sur le caractère récent des idées ou comportements suicidaires et sur l’intention, ainsi qu’il permet d’obtenir des renseignements sur le risque que court la personne d’infliger des blessures aux autres et à elle même. Cet outil fournit une indication rapide du risque qui doit s’accompagner d’une entrevue clinique complète et/ou d’une évaluation ciblée du risque, surtout si le dépistage initial à l’aide de l’échelle SOS ou de toute autre méthode indique qu’il y a un risque. Les outils d’évaluation globale du risque de suicide peuvent aider l’équipe clinique des urgences à évaluer le degré d’intention de la personne et à cerner certains aspects de sa détresse pour ainsi être en mesure de déterminer le niveau de soins approprié à son état (soit l’hospitalisation ou le renvoi vers un milieu de soins dans la communauté). Milieux de soins en santé mentale pour les patients hospitalisés Principal objectif : Dans les milieux de soins en santé mentale pour les patients hospitalisés, les personnes ont été soit été identifiées à risque élevé avant leur admission, soit admises pour une raison autre qu’un risque d’automutilation. C’est donc dire que le dépistage initial demeure important pour les personnes dont le risque de se blesser volontairement n’a pas été déterminé à l’admission. Utilité de l’outil d’évaluation du risque de suicide : Dépistage continu Un dépistage continu doit être assuré chez toutes les personnes identifiées à risque d’automutilation. Il s’agit d’effectuer un dépistage rapide à certains intervalles, selon le niveau de risque de chaque personne (à intervalles plus rapprochés pour les personnes à plus grand risque), ainsi qu’à tous les points de transition durant le séjour de la personne à l’hôpital (p. ex., lors d’un changement de quart de travail ou avant une sortie autorisée). Les intervalles de surveillance continue peuvent être modifiés à mesure que le risque s’atténue. Guide d’évaluation du risque de suicide I 79 3. La mesure de la qualité du processus d’évaluation du risque de suicide Les outils de dépistage énumérés au tableau 2 (page 58) peuvent servir tout au long de ce processus. Cependant, une évaluation plus approfondie doit être faite aux principaux points de transition, comme lors de transferts entre unités d’un même hôpital ou avant le congé. En Ontario, l’utilisation normalisée de l’évaluation du risque à l’aide de l’outil interRAI Mental Health comprend automatiquement le dépistage initial du risque de blessures volontaires chez toutes les personnes admises dans le milieu de soins. Grâce à l’échelle SOS utilisée après avoir effectué l’évaluation interRAI, les équipes de soins peuvent identifier les personnes qui nécessitent une évaluation globale du risque de suicide. De plus, elles peuvent enclencher le processus de planification des soins en vue d’atténuer ce risque. En effet, l’évaluation de la santé mentale interRAI comprend également un guide de planification des soins, soit le protocole d’évaluation clinique du risque d’automutilation et de suicide (Suicidality and Purposeful Self-harm Clinical Assessment Protocol) (Neufeld et coll., 2011), qui peut fournir de plus amples renseignements pour orienter le déroulement du processus d’évaluation globale du risque et de planification de l’intervention. SURVEILLER LA QUALITÉ DE L’ÉVALUATION DU RISQUE DE SUICIDE La mesure de la qualité peut s’avérer complexe, surtout lorsqu’il s’agit de processus comme l’évaluation du risque de suicide. Cette complexité se fonde sur l’absence, à l’heure actuelle, de politiques et de procédures normalisées visant à encourager l’évaluation du risque, ainsi que sur la diversité des préférences cliniques quant aux méthodes à employer et sur le manque de données uniformes et communes sur le suicide. Il y a eu un certain nombre d’appels en faveur de la normalisation de l’évaluation du risque de suicide. Au Canada, Agrément Canada a intégré l’évaluation du risque de suicide à ses pratiques organisationnelles requises (POR). L’encadré 7 donne un aperçu des POR d’Agrément Canada (Agrément Canada, 2010). 80 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section III : Cadre d’évaluation du risque de suicide et de surveillance de la qualité Encadré 7. Indicateurs sur les POR faisant l’objet d’une surveillance par Agrément Canada (2010) pour tous les services en santé mentale, à l’hôpital et dans la communauté • • • • • Le risque de suicide chez chaque client est évalué à intervalles réguliers ou au fur et à mesure que les besoins changent. Les clients à risque de suicide sont identifiés. Les besoins de sécurité immédiats du client sont comblés. Des stratégies d’intervention et de suivi sont établies afin d’assurer la sécurité des clients. La mise en œuvre des stratégies d’intervention et de suivi est consignée dans le dossier médical des clients. Outre ces pratiques organisationnelles, le processus d’évaluation du risque de suicide est également considéré comme une norme de pratique en psychiatrie (APA, 2003; Simon, 2002). Simon (2002) décrit l’évaluation du risque comme une norme de soins qui doit être surveillée dans le cadre des programmes d’assurance de la qualité et entre organismes. En tant que norme de soins, toute donnée concernant le risque de suicide doit être communiquée aux prestataires de soins de chaque personne. Afin d’assurer la qualité du processus d’évaluation du risque, Simon (2002) propose que toute l’information à contrôler, à consigner et à mettre à la disposition des prestataires de soins concernés en tant que données probantes justifiant le recours à la norme de soins appropriée englobe : • une précision sur le déroulement de l’évaluation du risque de suicide pour savoir si elle a eu lieu dans le cadre d’un processus systématique (continu); • le type d’évaluation du risque effectuée; • les données probantes de certains facteurs de protection; • tous les facteurs de risque et les signes avant coureurs; • les mesures prises ou les interventions menées pour assurer l’atténuation du risque de suicide à court et à long terme. Guide d’évaluation du risque de suicide I 81 Pour instaurer un processus d’évaluation du risque de suicide qui soit conforme aux POR d’Agrément Canada et aux normes de soins, il est crucial d’adopter en tout temps une approche centrée sur la personne. L’importance d’établir une relation thérapeutique fondée sur la confiance, l’empathie et la compréhension est tout aussi essentielle. Le processus de communication doit insister sur la compréhension de la description que fait la personne des facteurs ayant mené à son niveau de détresse, plutôt que sur la recherche de ce qui « peut bien clocher » chez la personne. L’approche centrée sur la personne consiste à connaître la personne et à comprendre sa détresse, et non à lui apposer une étiquette. Qualité de l’évaluation du risque : nécessité d’assurer une documentation adéquate Une documentation adéquate est au cœur d’une évaluation de qualité du risque de suicide (voir la section I, page 18). L’établissement de POR et de normes de soins repose grandement sur la documentation pour démontrer la qualité du processus d’évaluation. Mahal, Chee, Lee, Nguyen et Woo (2009) ont évalué la qualité de l’évaluation du risque de suicide menée dans les urgences psychiatriques en vérifiant si une documentation adéquate existait pour 19 indicateurs précis, notamment les facteurs de risque, les signes avant coureurs, les facteurs de protection, les antécédents cliniques et le suivi des soins. Ainsi, ils ont constaté que la documentation sur l’ensemble des 19 indicateurs n’était pas complète pour la totalité des patients, et qu’entre trois et neuf indicateurs par personne étaient le plus souvent documentés. Fait intéressant, ils ont constaté que les principaux signes avant coureurs, comme l’idéation suicidaire actuelle, l’existence d’un plan de suicide, les antécédents de tentatives de suicide et le désespoir, étaient documentés dans moins de 70 % des cas de l’échantillon, composé de patients retenus contre leur gré pour un comportement suicidaire présent imminent. Comme le mentionne le présent guide, la documentation et la communication du risque sont des éléments clés pour prévenir tout futur risque de suicide dans les milieux de soins et aux points de transition (voir la section I, pages 14-22). 82 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section III : Cadre d’évaluation du risque de suicide et de surveillance de la qualité Qualité de l’évaluation du risque : nécessité d’établir certains indicateurs de qualité pour l’évaluation du risque de suicide La relative rareté des données sur l’évaluation du risque de suicide et l’impossibilité de les recueillir facilement font obstacle à l’établissement et à la surveillance continue d’indicateurs de qualité en ce qui concerne l’évaluation du risque de suicide. Pour illustrer ce problème, Mahal et coll. (2009) ont dû faire un examen manuel des dossiers pour évaluer 19 indicateurs de la qualité du processus auprès de 141 personnes ayant reçu des services aux urgences d’un milieu de soins en santé mentale. La nécessité pour les organismes de se livrer à ce genre d’exercice pour obtenir des données sur toutes les personnes soignées coûte cher en temps et en argent. Bien que le processus d’agrément nécessite des visites sur place et l’examen aléatoire des dossiers pour que ces pratiques soient vérifiées, ce processus est effectué à intervalles éloignés. Mork, Mehlum, Fadum et Rossow (2010) estiment que l’évaluation de la qualité du processus d’évaluation du risque de suicide d’une personne peut être faite en s’appuyant sur les normes clairement définies et écrites dans les politiques et lignes directrices organisationnelles. Sans moyen systématique de faire un suivi efficace des évaluations du risque effectuées (p. ex., dossiers médicaux électroniques), les organismes qui souhaitent surveiller la qualité de leur processus d’évaluation du risque devront compter sur la conformité du personnel à l’égard des politiques liées à l’évaluation du risque de suicide. Ces politiques peuvent comprendre les principes d’une évaluation du risque de qualité précisés dans ce guide ou ailleurs, ainsi que les politiques concernant le moment d’effectuer des évaluations du risque et les processus de suivi du risque. Bien que d’autres études soient nécessaires pour en démontrer la validité et l’efficacité, d’autres indicateurs pour démontrer la grande qualité des processus organisationnels d’évaluation du risque de suicide peuvent s’inscrire dans le cadre de politiques qui : • précisent l’utilisation d’un outil de dépistage du risque de suicide en particulier dans le cadre du processus d’évaluation de ce risque; • précisent des lignes directrices normalisées et des interventions précises pour planifier les soins des personnes considérées comme à risque, à divers niveau; Guide d’évaluation du risque de suicide I 83 • précisent le calendrier d’évaluation continue du risque de suicide en fonction que ce risque soit faible, modéré ou élevé; – • En outre, le taux de suicide ne reflète pas directement la qualité du processus d’évaluation du risque en soi. Il se peut qu’un taux de suicide élevé indique une mauvaise planification de l’intervention ou l’absence de services pour les personnes bel et bien considérées comme à risque élevé de suicide. notamment des procédures pour signaler et examiner les événements indésirables, y compris le bilan postsuicide (pour ce bilan, la politique établit les étapes à suivre pour revoir les conclusions tirées de l’examen et des plans et y donner suite afin d’atténuer tout futur risque); rendent obligatoires une sensibilisation et une formation axées sur les compétences en évaluation du risque de suicide. De façon générale, pour ce qui est de l’issue, le taux de suicide en tant qu’indicateur de la qualité des services en santé mentale a fait l’objet de certaines études. Ainsi, Desai, Dausey et Rosenheck (2005) se sont penchés sur l’utilisation du taux de suicide comme mesure de la qualité des services en santé mentale offerts dans les hôpitaux pour anciens combattants de Veterans’ Affairs aux États Unis. Dans un échantillon de plus de 120 000 personnes ayant bénéficié de ces services, 481 suicides sont survenus. Bien que le taux de suicide variait d’un établissement à l’autre, aucun lien n’a pu être établi entre l’écart du taux de suicide et d’autres mesures de la qualité des soins, comme la durée du séjour, le suivi des soins, le caractère opportun des visites en clinique externe, la réhospitalisation ou le financement de l’hôpital. Desai et ses collègues recommandent donc de ne pas utiliser le taux de suicide comme mesure de la qualité pour les raisons suivantes : • le taux de suicide est très instable (en raison du faible nombre de suicides); • la difficulté d’obtenir des données sur les décès après le congé; • l’absence d’un lien entre le taux de suicide et d’autres indicateurs de qualité de l’établissement. Manifestement, l’établissement d’indicateurs de qualité du processus (soit des indicateurs sur la façon dont l’évaluation du risque a été menée) pour cerner précisément toute mauvaise évaluation du risque de suicide pose tout un défi en raison de la nature qualitative de ce processus d’évaluation. Les indicateurs 84 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section III : Cadre d’évaluation du risque de suicide et de surveillance de la qualité de qualité des résultats qui mesurent l’incidence des idées, plans ou comportements suicidaires au moment où la personne reçoit des soins d’un prestataire de services de santé (p. ex., une fois hospitalisée) peuvent s’avérer plus faciles à établir. Cependant, ces indicateurs peuvent davantage démontrer la piètre qualité des soins due à l’organisation, à la prestation des soins ou à la réaction à ces soins plutôt qu’une mauvaise évaluation du risque de suicide. Autrement dit, malgré le fait qu’une évaluation du risque de suicide de qualité ait eu lieu, un événement indésirable peut toujours survenir. Par contre, une chose est certaine : si la qualité du processus d’évaluation du risque de suicide n’est pas assurée, la probabilité que survienne un événement indésirable est de beaucoup plus élevée. C’est donc dire que, bien que difficiles à établir, des indicateurs précis doivent être définis pour surveiller la qualité de l’évaluation du risque de suicide. Les études à venir devront examiner l’éventuel établissement et la validité d’indicateurs pour mesurer la qualité de l’évaluation du risque de suicide. Entre autres indicateurs possibles, mentionnons : • la prévalence des comportements suicidaires en milieu de soins chez les personnes à faible risque selon l’évaluation initiale; • le taux de tentatives de suicide ou de décès par suicide dans la semaine suivant le congé; • le taux de congé des personnes à risque élevé de suicide; • le rythme de changement des facteurs de risque dynamiques ou des signes avant-coureurs liés au risque de suicide; • la documentation effectuée entre la détermination de facteurs de risque dynamiques précis et la mise en œuvre du plan de soins concernant ces facteurs; • l’augmentation du nombre de facteurs de protection cernés, comme la résilience et les stratégies d’adaptation en milieu de soins; • l’incidence des dangers environnementaux cernés dans le milieu de soins; • le nombre de dangers toujours présents dans le milieu de soins depuis la dernière évaluation; Guide d’évaluation du risque de suicide I 85 • la perception de la personne et de sa famille à l’égard du processus d’évaluation du risque de suicide; • les perceptions du personnel à l’égard du processus d’évaluation du risque de suicide. 4. Les prochaines étapes Nécessité d’une formation continue et d’une compétence organisationnelle pour soutenir l’amélioration de la qualité L’existence d’une formation continue en évaluation du risque de suicide peut être une bonne indication d’une compétence organisationnelle en la matière. Selon McNiel, Fordwood, Weaver, Chamberlain, Hall et Binder (2008), une formation à l’utilisation des données probantes lors de l’évaluation du risque de suicide permet d’améliorer la documentation sur le risque de suicide, ainsi que la compétence autoévaluée des professionnels de la psychologie et de la psychiatrie suivant cette formation pour détecter ce risque. Puisque la formation en évaluation du risque de suicide peut s’inscrire dans le cadre d’une initiative d’amélioration de la qualité, la fréquence d’une telle formation et le taux de participation pourraient être l’un des aspects de la mesure et de la surveillance de la qualité. Il demeure cependant nécessaire de préciser le type, les méthodes et les intervalles de prestation de cette formation en vue d’améliorer l’évaluation du risque de suicide. De plus, il pourrait être possible d’élaborer une cadre pour évaluer la compétence organisationnelle en évaluation du risque de suicide en suivant la méthode par traceurs d’Agrément Canada. Cette méthode comprend des exercices au cours desquels les visiteurs d’agrément observent tous les aspects d’un processus clinique (p. ex., lutte contre les infections) ou administratif (p. ex., communication) afin de déterminer si l’organisme respecte les normes de soins. Cet exercice consiste notamment à examiner les dossiers, à observer les procédures cliniques et à examiner les processus de documentation et de communication. Un processus de soins qui ne respecte pas une norme de soins offre une occasion d’améliorer la qualité. Les méthodes par traceurs qui sont utilisées selon les POR d’Agrément Canada en matière d’évaluation du risque de suicide ainsi que les concepts de l’évaluation du risque de suicide abordés dans le présent guide peuvent aider 86 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section III : Cadre d’évaluation du risque de suicide et de surveillance de la qualité les organismes à évaluer la qualité de leur processus d’évaluation du risque de suicide. Outre ces exercices, des listes de contrôle peuvent servir à examiner les politiques, pratiques et processus en matière d’évaluation et de prévention du risque de suicide mises en place au sein de l’organisme. Par exemple, l’Association canadienne pour la prévention du suicide (ACPS) a élaboré une liste de contrôle que les organismes peuvent utiliser pour examiner la sécurité des patients quant au risque de suicide. Cette courte liste de contrôle, appelée Becoming Suicide Safer: A Guide for Service Organizations (S’armer contre le suicide : guide pour les organismes de services) est disponible sans frais (en anglais seulement) sur le site Web de l’ACPS (www.suicideprevention.ca). Les résultats des exercices par traceurs et des listes de contrôle sur la sécurité peuvent être ensuite analysés de façon globale (p. ex., tous les exercices menés dans l’année) afin de déterminer s’il y a eu amélioration de la compétence en évaluation du risque de suicide. SOMMAIRE ET RECOMMANDATIONS Le présent guide représente la première étape de la normalisation du processus d’évaluation du risque de suicide. Nous souhaitons que ce guide parvienne à réduire la fragmentation de la pratique et de l’évaluation du risque de suicide en résumant les principaux concepts permettant d’effectuer une évaluation du risque de suicide de grande qualité. En outre, ce guide peut servir à mieux sensibiliser les prestataires de soins et à renforcer les initiatives d’amélioration de la qualité visant l’évaluation du risque de suicide au sein des organismes de santé canadiens. L’un des principes fondamentaux de l’évaluation du risque de suicide est l’adoption d’une approche honnête, empathique et centrée sur la personne au moment d’aborder les bénéficiaires de soins pour qu’ils prennent part à cette évaluation. Au cours de la rédaction du présent guide, plusieurs facteurs clés ont été cernés pour atteindre cet objectif. 1. L’évaluation du risque de suicide est un processus À partir des entrevues et des recherches menées, il est devenu clair que l’évaluation du risque de suicide est un processus qui exige beaucoup plus que de simplement utiliser des instruments et les scores qui en découlent. L’évaluation du risque de suicide est plutôt un volet essentiel du processus thérapeutique qui, à son tour, fait partie intégrante du processus de rétablissement de la personne. Guide d’évaluation du risque de suicide I 87 2. Les prestataires de soins doivent être adéquatement formés Les prestataires de soins doivent réussir à bien comprendre les facteurs (facteurs de risque potentialisateurs et signes avant coureurs) qui indiquent la présence d’un risque aigu de suicide afin de déterminer et d’atténuer ce risque comme il se doit. Les facteurs positifs présents dans la vie de la personne doivent également être pris en considération comme des forces que la personne peut exploiter en temps de crise. La définition et la prise en considération de ces facteurs favoriseront la sécurité du patient et permettront de cerner certaines possibilités d’intervention. Dans la mesure du possible, il est également important de faire participer toutes les personnes qui connaissent l’état de la personne et qui comprennent bien son contexte culturel. 3. Les outils d’évaluation du risque de suicide ne servent qu’à faciliter le processus Ce guide donne également un aperçu de plusieurs outils d’évaluation du risque de suicide dont peuvent se servir les prestataires de soins. Cela dit, ces outils ne peuvent que faciliter le processus d’évaluation du risque en fournissant de l’information utile, et doivent servir à éclairer le jugement clinique en vue de cerner le risque et de prendre les décisions qui s’imposent. Certains outils s’avèrent également utiles pour dépister le risque de suicide de façon continue. Cela dit, il n’existe pas beaucoup de données probantes permettant de confirmer la capacité des outils d’évaluation du risque de suicide de prévoir le suicide. L’avenir Il convient de noter que l’ampleur du risque de suicide est très vaste. Ce guide ne porte que sur le processus d’évaluation de ce risque à l’intérieur des organismes de santé. Il n’aborde pas la question de l’évaluation du risque de suicide dans d’autres milieux que celui des soins de santé et il n’examine pas en détail la faisabilité d’intégrer la technologie au processus d’évaluation (p. ex., télépsychiatrie et télémédecine), les interventions visant à atténuer ce risque dans divers milieux de soins ni les stratégies de prévention. 88 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section III : Cadre d’évaluation du risque de suicide et de surveillance de la qualité Voici quelques recommandations concernant les questions à étudier à l’avenir : • le processus de surveillance et d’évaluation du risque de suicide dans d’autres milieux (p. ex., la santé publique); • la faisabilité d’intégrer la technologie au processus d’évaluation du risque de suicide (p. ex., télépsychiatrie et télémédecine); • l’examen des interventions visant à atténuer le risque de suicide dans divers milieux de soins; • les stratégies de prévention de suicide. Le présent guide ne constitue que la première étape de la normalisation du processus d’évaluation et de prévention du risque de suicide. De telles ressources complémentaires peuvent servir de fondement à l’élaboration d’une stratégie nationale sur la prévention du suicide, laquelle peut ensuite susciter une meilleure sensibilisation du public au suicide, y compris aux facteurs de risque qui y contribuent, et favoriser une culture de compréhension, d’acceptation et de prévention au sein de la population canadienne. Guide d’évaluation du risque de suicide I 89 Section IV Références et ressources PA R T E N A I R E Section IV : Références et ressources Annexe A : Démarche méthodologique ayant servi à élaborer ce guide L’élaboration de ce guide se fait en deux étapes : Étape I : Analyse du contexte en ce qui concerne les outils d’évaluation du risque de suicide L’analyse du contexte a consisté à faire une analyse documentaire des articles scientifiques, de la documentation clinique, des rapports sur les pratiques exemplaires et des autres documents parallèles afin de déterminer et d’étudier les processus et les outils disponibles pour effectuer l’évaluation du risque de suicide. Ainsi, une foule de bases de données en médecine et en sciences sociales ont été interrogées afin de cerner les diverses stratégies et outils d’évaluation du risque de suicide, notamment la Bibliothèque Cochrane, la CINAHL, PubMed (Medline), PsycINFO, Google Scholar et Scopus. Les listes de références contenues dans certains articles ont également été épluchées pour compléter la recherche documentaire. Aucun limiteur de critères n’a été établi lors de l’interrogation des bases de données, bien qu’une attention particulière ait été accordée aux sources canadiennes. L’analyse documentaire a commencé par un vaste ensemble de termes, dont : « suicide* », tentative de suicide, automutilation, évaluation des résultats, évaluation du risque, échelle d’évaluation psychiatrique, validité, prédiction (MeSH). Ces termes ont généré plus de 7 500 articles issus de toutes les bases de données. De nombreux articles se sont vite révélés non pertinents pour l’évaluation du risque de suicide et ont donc été exclus. C’est le cas notamment des études pharmaceutiques sur l’efficacité de certains médicaments pour réduire les symptômes liés au suicide ainsi que des études épidémiologiques sur les types de suicide dans diverses populations, diverses régions et divers secteurs de la santé. Les articles retenus ont ensuite été examinés pour déterminer leur pertinence en fonction des catégories suivantes (nombre d’articles retenus) : Guide d’évaluation du risque de suicide I 91 • Les outils et échelles d’évaluation du risque de suicide (99) • Les pratiques exemplaires de l’évaluation du risque de suicide (43) • Les études de nature générale sur le risque de suicide (52) • Les indicateurs de qualité liés à l’évaluation du risque de suicide (3) • Autre (15) Une fois des articles et ressources examinés, un certain nombre ont été exclus en raison du peu de pertinence à l’évaluation du risque de suicide. Des associations professionnelles comme l’Association des psychiatres du Canada et son pendant américain, l’Association des infirmières et infirmiers autorisés de l’Ontario (lignes directrices de la pratique clinique) et d’autres ont également été consultées pour obtenir des ressources ou de l’information sur l’évaluation du risque de suicide. Étape II : Entrevues avec les intervenants Afin de compéter l’analyse du contexte et recueillir de l’information sur l’évaluation du risque de suicide en pratique, un certain nombre d’intervenants ont été rencontrés en entrevue. Ils ont été recrutés dans le cadre d’une démarche d’échantillonnage à l’aveuglette menée à partir des noms soumis par le Comité consultatif pancanadien (mentionné dans la section Remerciements), la OHA, l’Institut canadien pour la sécurité des patients (ICSP) et le groupe de recherche en fonction de l’expérience de ces intervenants en évaluation des risques. Le lieu de travail, la spécialité et l’expérience des candidats aux entrevues ont été pris en considération afin d’obtenir une vaste gamme d’expérience. Plus précisément, le processus de recrutement a tenté de réunir des personnes expérimentées provenant de diverses régions du Canada (p. ex., de la côte est, de la côte ouest, de la ville et de la campagne), travaillant auprès de diverses populations soignées (p. ex., jeunes, personnes âgées, autochtones et dans divers secteurs de la santé (p. ex., urgences, communauté, soins de courte durée) et ayant des antécédents professionnels différents. 92 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section IV : Références et ressources Cette stratégie d’échantillonnage a permis de dresser une liste de 30 candidats. Une invitation leur a donc été envoyée par courriel, et les membres du Groupe consultatif qui connaissaient certains candidats leur ont téléphoné ou envoyé un courriel de suivi. En tout, neuf personnes ont décliné l’invitation; 21 entrevues ont donc été menées. Un tableau présentant chacune de ces personnes est fourni à l’annexe B. Une approche semi structurée a été adoptée pour mener les entrevues. Les personnes interrogées ont été invitées à parler des sujets suivants : • leurs antécédents et expérience; • leurs recommandations quant au processus à suivre pour mener une évaluation de qualité du risque de suicide; • leur connaissance et utilisation des outils d’évaluation du risque de suicide ainsi que leurs recommandations à cet égard; • leur connaissance des politiques, pratiques et processus d’évaluation en matière d’évaluation du risque de suicide ainsi que leurs recommandations à cet égard. Les personnes ayant précisé leur spécialité (p. ex., santé mentale des jeunes) ont été questionnées en fonction du contexte de leur spécialité (p. ex., quels sont les principaux facteurs à considérer pour évaluer le risque de suicide chez les jeunes?). Guide d’évaluation du risque de suicide I 93 Annexe B : Liste des participants aux entrevues Nom Titre Organisation Linda Bender Chef d’équipe, Services d’éducation et de développement communautaires Association canadienne pour la santé mentale, succursale Grand River, Kitchener (Ontario) Jennifer Brasch Professeure agrégée, Psychiatrie et neurosciences du comportement Université McMaster, Hamilton (Ontario) Directrice, Services d’urgences psychiatriques, coordonnatrice de la formation sur place Service de psychiatrie, St. Joseph’s Health Care, Hamilton (Ontario) Coleen Cawdeary Coordinatrice de programme Équipe communautaire de traitement actif, Fergus (Ontario) Gary Chaimowitz Chef de service; Service de médecine légale St. Joseph’s Health Care, Hamilton (Ontario) Martha Donnelly Directrice, Division de la gériatrie communautaire, Département de la pratique familiale University of British Columbia, Vancouver (Colombie-Britannique) Directrice, Programme de psychiatrie gériatrique, Département de psychiatrie Vancouver Hospital, Vancouver (ColombieBritannique) Psychiatre gériatrique, équipe mobile en psychiatrie gériatrique Alan Eppel Chef de service; Services de psychiatrie communautaire St. Joseph’s Health Care, Hamilton (Ontario) Brian Furlong Directeur, Division de la psychiatrie communautaire Centre de santé Homewood, Guelph (Ontario) Laurence Y. Katz Professeure agrégée en psychiatrie Coordonnatrices des études supérieures, Psychiatrie des enfants et des adolescents Université du Manitoba, Winnipeg (Manitoba) Denice Klavano Membre Patients pour la sécurité des patients du Canada (Nouvelle Écosse) Stan Kutcher Chaire Sun Life Financial en santé mentale des adolescents IWK Health Centre, Halifax (Nouvelle Écosse) Directeur, Centre collaborateur de l’Organisation mondiale de la Santé en santé mentale Université Dalhousie, Halifax (Nouvelle Écosse) 94 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section IV : Références et ressources Nom Titre Organisation Paul Links Scientifique, Centre de recherche Keenan Li Ka Shing Knowledge Institute, St. Michael’s Hospital, Toronto (Ontario) Chaire Arthur Sommer Rotenberg des études sur le suicide, Services de santé mentale /Département de psychiatrie St. Michael’s Hospital/Université de Toronto, Toronto (Ontario) Chef adjoint en psychiatrie, Services de santé mentale St. Michael’s Hospital, Toronto (Ontario) Membre associé, Faculté de médecine, Sciences de la santé publique Membre associé, Institut des sciences médicales Professeur, Faculté de médecine, Psychiatrie Université de Toronto, Toronto (Ontario) Peter Mills Directeur, Veterans Affairs National Centre for Patient Safety Field Office United States Department of Veterans Affairs, Burlington (Vermont) Jill Mitchell Directrice, Réhabilitation et rétablissement des troubles concurrents, Toxicomanie et santé mentale de la province Services de santé Alberta, Edmonton (Alberta) Dena Moitoso Thérapeute et éducateur en matière de deuil Erb & Good Family Funeral Home Ltd. Kuntz House, Waterloo (Ontario) Tana Nash Coordonnatrice Waterloo Region Suicide Prevention Council, Waterloo (Ontario) Crystal Norman Coordonnatrice de l’amélioration de la qualité Northeast Mental Health Centre, North Bay (Ontario) Kathy Payette Directrice adjointe, Services de santé mentale Lutherwood, Waterloo (Ontario) Beth Reade Psychiatre, Division de la toxicomanie de Homewood Centre de santé Homewood, Guelph (Ontario) Tracey Scott Psychologue clinique Central Newfoundland Regional Health Centre, Grand Falls-Windsor (Terre Neuve) Ian Slayter Directeur clinique, Services de psychiatrie générale pour adultes Régie régionale de la santé Capital, Halifax (Nouvelle Écosse) Lee Whittmann Mentor, équipe d’intervention autochtone en cas d’incident critique et de suicide (Aboriginal Suicide Critical Incident Response Team ou ASCIRT) Autorité sanitaire intertribale, Nanaimo (Colombie-Britannique) Guide d’évaluation du risque de suicide I 95 Annexe C : Illustration de l’incidence d’une accumulation de facteurs de risque potentialisateurs et de signes avant coureurs sur le risque de suicide Risque très élevé Obtenir l’aide immédiate des urgences ou d’un professionnel en santé mentale SIGNES AVANT-COUREURS • Menace de blessure ou d’attentat à la vie • Recherche de moyens ou accès à ces moyens : somnifères, armes ou autres moyens • Preuve ou expression d’un plan de suicide • Expression (écrite ou orale) d’idées suicidaires, de la volonté de mourir ou de la mort • Désespoir • Geste téméraire, adoption impulsive d’un comportement imprudent • Expression d’un sentiment d’être pris en piège sans voir d’issue • Consommation accrue ou excessive de drogues ou d’alcool • Comportement d’isolement par rapport à la famille, aux amis, à la société • Anxiété, agitation, sommeil anormal (dort trop ou trop peu) • Brusques changements d’humeur Nombre de signes avant-coureurs • Rage, colère, volonté de vengeance Risque élevé Obtenir l’aide d’un professionnel en santé mentale • Expression de l’absence de raison de vivre, de but dans la vie FACTEURS DE RISQUE POTENTIALISATEURS • • • Chômage ou difficultés financières récentes Divorce, séparation, deuil du conjoint Isolement social • • • • Abus ou événements traumatiques antérieurs Comportement suicidaire antérieur Maladie mentale chronique Maladie physique chronique ou débilitante (Signes avant-coureurs adaptés de Rudd et coll., 2006). 96 I Guide d’évaluation du risque de suicide Risque faible Recommander une thérapie et surveiller l’apparition de signes avant-coureurs Section IV : Références et ressources Annexe D : Exemples de facteurs de protection Exemples de facteurs de protection • • • • • • • • • • (Sanchez, 2001; United States Public Health Service, 1999) Liens solides avec la famille et soutien de la collectivité Capacité de résoudre les problèmes, de s’adapter et de régler les conflits Sentiment d’appartenance, sentiment d’identité et bonne estime de soi Liens et croyances de nature culturelle, spirituelle et religieuse Définition d’objectifs à atteindre Utilisation constructive des temps libres (activités agréables) Soutien dans le cadre d’une prestation continue de soins médicaux et de soins de santé mentale Soins cliniques efficaces pour les troubles de santé mentale, de santé physique et de toxicomanie Accès facile à diverses interventions cliniques et soutien pour obtenir de l’aide Accès restreint à des moyens très létaux de se suicider Guide d’évaluation du risque de suicide I 97 Annexe E : Exemple de documentation recommandée 1. Le niveau général de risque de suicide Le niveau de suicide doit être clairement documenté et s’accompagner de renseignements à l’appui de cette affirmation. Il peut s’agir de renseignements sur : • • le type d’outils d’évaluation utilisés pour évaluer le risque; les détails des entrevues cliniques et des communications avec d’autres (p. ex., la famille et les amis de la personne, d’autres professionnels), soit : i. les circonstances et le moment de l’incident; ii. la méthode choisie pour commettre le suicide; iii. le degré d’intention; iv. les conséquences. 2. Les antécédents de tentatives de suicide et d’automutilation Il faut préciser : 98 I Guide d’évaluation du risque de suicide • le plan de soins ou d’intervention qui a été mis en place précédemment; • l’intervalle de temps depuis la ou les tentatives de suicide antérieures ou les comportements d’automutilation; • les motifs justifiant le fait que la personne n’ait pas été admise dans un milieu de soins plus intensifs ou ait été transférée dans un milieu moins restreignant, ainsi que les plans de sécurité mis en place; • des détails sur les inquiétudes de la famille et la réponse à ces inquiétudes. Section IV : Références et ressources 3. Des détails sur tous les facteurs de risque potentialisateurs, les signes avant coureurs et les facteurs de protection 4. Le degré d’intention de commettre un suicide Le degré d’intention peut préciser, par exemple, ce que la personne pensait ou souhaitait qu’il arrive. 5. Les sentiments et la réaction de la personne après le comportement suicidaire Par exemple, un sentiment de soulagement, le regret d’être en vie. 6. La preuve d’une progression de la létalité possible de l’automutilation ou du comportement suicidaire Il faut préciser si la personne a commencé à envisager, à planifier ou à utiliser des moyens de plus en plus létaux (p. ex., est passée des coupures à la pendaison, a cherché une arme). 7. La similitude entre la situation actuelle de la personne et celle ayant mené à la ou aux tentatives de suicide ou aux comportements d’automutilation précédents 8. L’historique de la famille ou des amis quant à l’automutilation ou aux comportements suicidaires, ou importante perte dans la famille ou le cercle d’amis Ces renseignements sont notamment les dates d’anniversaire de ces événements, puisque le risque peut s’accroître à ces moments. Les établissements doivent également instaurer des protocoles normalisés pour localiser les renseignements portant sur le risque de suicide dans le dossier médical de la personne. L’emplacement de cette documentation doit être cohérent et facile à trouver par les autres employés de l’établissement ou par ceux qui prennent part aux soins de la personne. Guide d’évaluation du risque de suicide I 99 Annexe F : Résumé des risques clés de l’évaluation du risque de suicide Principes à prendre en considération au moment d’effectuer une évaluation du risque de suicide (adapté de Granello, 2011) L’évaluation du risque de suicide… 1. est un traitement et s’effectue dans le cadre d’une relation thérapeutique 2. est unique à chaque personne 3. est complexe et exigeante 4. est un processus continu 5. privilégie la prudence 6. se fait en collaboration et repose sur une communication efficace 7. repose sur le jugement clinique 8. prend au sérieux l’ensemble des menaces, signes avant coureurs et facteurs de risque 9. pose les questions difficiles 10. tente de découvrir le message sous jacent 11. se fait dans un contexte culturel 12. est documentée 100 I Guide d’évaluation du risque de suicide Section IV : Références et ressources Annexe G : Principales questions à considérer pour choisir un outil d’évaluation du risque de suicide Principales questions à considérer pour choisir un outil d’évaluation du risque de suicide 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. 9. Combien de temps avez-vous pour effectuer l’évaluation? Combien de temps faut il pour effectuer l’évaluation? L’outil d’évaluation du risque est il facile à noter? L’outil d’évaluation du risque convient il à la population que vous soignez? Les scores obtenus sont ils significatifs? Avez-vous besoin de l’outil pour faciliter le dépistage, l’évaluation globale, etc.? La personne susceptible d’être à risque de suicide peut-elle remplir seule l’outil d’évaluation du risque? L’outil d’évaluation du risque mesure t il les aspects que vous avez besoin d’approfondir? Avez vous les moyens d’acheter l’outil d’évaluation du risque? Guide d’évaluation du risque de suicide I 101 102 I Guide d’évaluation du risque de suicide x x 26 36 15 x x x x x x x x x x x x x Fiabilité x x x x x x x Évaluation globale x x x x x x x x x x x x Dépistage Utilité possible x x x x x x x x x x x x x x x Hosp. x x x x x x x x x x x x x Externe x x x x x Urgences Psychiatrique Milieu x x x x x x x x x x x Non psychiatrique x x x x x x x x x x x x x Adultes x x x x x x x Enfants et adolescents Population ^ x x x Personnes âgées ^ Adultes (18-64 ans), personnes âgées (65 ans+), enfants et adolescents (8-18 ans) *L’échelle interRAI SOS fait partie d’un système d’évaluation de la santé mentale composé de trois instruments. Le nombre de questions de chaque instrument varie, tout comme le temps nécessaire pour effectuer l’évaluation dans son ensemble. Nota. BSS® = Échelle d’idéation suicidaire de Beck; BHS = Échelle de désespoir de Beck; C-SSRS = Échelle Columbia de la gravité du risque de suicide; GSIS = Échelle d’idéation suicidaire gériatrique; interRAI SOS = Échelle interRAI de la gravité du comportement autodestructeur; MHECC = Liste de contrôle du milieu de soins en santé mentale; NGASR = Évaluation globale du risque de suicide par les infirmières; RFL = Inventaire des raisons de vivre; SIS-MAP = Échelle d’incidence de la suicidalité – Prise en charge, évaluation et planification des soins; SSI-M = Échelle d’idéation suicidaire modifiée; SBQ = Questionnaire sur les comportements suicidaires; SIS = Échelle d’intention suicidaire; SPS = Échelle de probabilité du suicide; TASR = Outil d’évaluation du risque de suicide TASR SPS SIS 34 18 x SSI-M x 108 x SIS-MAP SBQ 10 48 15 x x x 114 varié* x SAD PERSONAS RFL NGASR MHECC interRAISOS GSIS 31 x C-SSRS x 20 x BHS x 21 x BSS® x Nbre de Validité questions prédictive Entrevue/ observation Passation Autoévaluation Échelle Annexe H : Caractéristiques des outils d’évaluation du risque de suicide Section IV : Références et ressources Annexe I : Dimensions du cadre d’évaluation du risque de suicide Les cinq dimensions du cadre d’évaluation du risque de suicide 1. Dépistage initial du risque de suicide 2. Évaluation ciblée du risque de suicide 3. Intégration de l’évaluation du risque de suicide 4. Planification des soins, mise en œuvre de l’intervention 5. Surveillance et réévaluation Guide d’évaluation du risque de suicide I 103 Annexe J : Références Aboriginal Healing Foundation (2002). The healing has begun. Ottawa. En ligne. <http://www.ahf.ca/english-pdf/ healing_has_begun.pdf>. Agrément Canada (2011). Pratiques organisationnelles requises. Manuel. En ligne. <www.accreditation.ca>. Adams-Fryatt, A. (2010). « Acknowledging, recognizing, and treating depression in elderly long term care residents ». Annals of Long Term Care, vol. 18, p. 30-32. Alexander, M. J., G. Haugland, P. Ashenden, E. Knight et I. Brown (2009). « Coping with thoughts of suicide: techniques used by consumers of mental health services ». Psychiatric Services, vol. 60, p. 1214-1221. Ali, M. M., D. S. Dwyer et J. A. 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